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MACROBE

 

INTRODUCTION

Oeuvre numérisée par Marc Szwajcer

 

  saturnales livre 1

NOTICE SUR MACROBE.

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Macrobe est un des écrivains latins sur lesquels l'antiquité nous a laissé le moins de documents. Les savants du moyen âge, dont un grand nombre a su bien apprécier les trésors d'érudition que ses ouvrages renferment, n'ont point fait de l'histoire de sa vie ni de celle de ses écrits l'objet d'un travail spécial. Je vais tâcher de suppléer à cette omission, en recueillant les renseignements épars soit dans leurs divers ouvrages, soit dans les écrits plus récents.

I. Macrobius, Ambrosius, Aurelius, Theodosius : tels sont les noms que porta notre auteur, et qu'on lui donne en tête de ses œuvres. De ce que, dans renonciation de ces noms, celui de Théodose est quelquefois placé le dernier, P. Colomiès conclut que ce fut celui sous lequel il était connu et distingué de son vivant ; et que le nom de Macrobe ne doit être regardé que comme un surnom. Voici comment Colomiès établit et développe cette opinion : « Quel est, dit-il, ce Théodose auquel Aviénus dédie ses fables ? Si nous en croyons Géraldi, c'est l'empereur de ce nom ; mais cet écrivain se trompe certainement, et ce Théodose n'est autre que celui que nous appelons ordinairement Macrobe, mais qu'évidemment les anciens appelaient Théodose. On en trouve la preuve dans l'appendice ajouté par Jean, ou par Érigène, ou quelque autre, au traité De differentiis et societatibus graeci latinique verbi. A l'appui de notre opinion, nous citerons un passage d'un ancien interprète de l’Ibis d'Ovide, qui s'exprime en ces termes : Tyrannus est des deux genres, selon la règle posée par le grammairien Théodose. » La même opinion a été émise, accompagnée de quelque doute, par le savant P. Pithou ; mais le P. Sirmon, avec non moins d'assurance que Colomiès, affirme que Théodose, auquel Aviénus dédie ses fables, et dont parle Boèce, n'est autre que Macrobe. Dans le catalogue des manuscrits d'Isaac Vossius, rédigé par Colomiès, et sous le n° 294, on trouve l'indication suivante : Theodosii (imo Avienï) ad Macrobium Theodosium fabulae. Saxius et Henri Canegietieo sont tacitement contraires à cette opinion, puisqu'ils veulent qu'Aviénus, le fabuliste, ait été contemporain d'Antonin le Pieux.

Osarth « dit avoir vu un manuscrit qui portait le titre suivant : Macrobii, Ambrosii, Oriniocensis in somnium Scipionis commentarium incipit; et il pense que ce nouveau nom (Oriniocensis) aura été donné à Macrobe, ou du lieu qui l'a vu naître, on par allusion à son commentaire sur le songe de Scipion : comme qui dirait Oniracritique, mot qui serait formé de ὄνειρος (songe), et de κρῖνειν (juger). C'est aussi l'explication qu'en donne le Scoliaste d'un manuscrit qui fut possédé par Pontanus, l'un des commentateurs qui ont travaillé sur Macrobe. Seulement il y est appelé, tantôt Ornicensis, et tantôt Ornicsis.

Le jésuite Alex. Wilthem rapporte qu'un manuscrit du monastère de Saint-Maximin portait le titre suivant : avb. memm. symmach. vs. v. c. emenDABAM. VEL. DIV. MEVM. BAVENNAE. CUM. MAcRobio. pLOTiNO. eudoxio. Le manuscrit de Saint-Maximin portait encore un autre titre, transcrit par Wilthem de la manière suivante : MACROBII. ambrosii. sicetini. de. soMNio, etc. Avant de terminer ce qui concerne le nom de Macrobe, je crois pouvoir rapporter l'anecdote suivante, conservée par Jurieu : « Un écolier, dit-il, fut saisi par un inquisiteur, parce que, dans sa bibliothèque, on trouva un Macrobius. L'inquisiteur jugea que cet effroyable nom, Macrobii Saturnalia, ne pouvait être que celui de quelque Allemand hérétique. »

II. Le troisième mot de ce titre, sicetini, est évidemment le nom de la patrie de l'auteur. Serait-ce Sicca, ville de Numidie, dont Salluste appelle les habitants Siccenses ? Ptolémée et Procope appellent cette ville Sicca Veneria, et Solin, simplement Veneria. Elle était située à l'est de Cirta, sur la côte de l'Afrique que baigne la mer Méditerranée. Elle s'est aussi nommée Oenoé, et les mythographes racontent que Thoas, roi de Lemnos, ayant été jeté dans cette île par une tempête, il y eut de la nymphe Oenoé un fils qui fut nommé Siccinus. Ou bien faudrait-il entendre, par Sicetini, que Macrobe serait natif de cette île de la mer Egée, l'une des Sporades, que Strabon appelle Sicenus, Ptolémée Sicinus, Pomponius Mela Sicynus, et Pline Sycinui? C'est là une question qu'aucun indice n'amène à résoudre. Quoi qu'il en soit, je pense qu'il y aurait de la témérité à vouloir, sur la foi d'un seul manuscrit, assigner une patrie à Macrobe. L'assertion, toutefois, serait moins gratuite que celle qui lui donne la ville de Parme pour patrie ; assertion reproduite dans la plupart des dictionnaires, et qui vraisemblablement n'a d'autre fondement qu'une tradition vague : car, malgré tous les efforts que j'ai faits pour en découvrir la source, le plus ancien auteur où je l'ai trouvée énoncée est Gaudenzio Merula, qui vivait dans le seizième siècle; encore n'en fait-il mention que pour la signaler comme une erreur. Mais ce qui contredit décisivement cette opinion, outre le sentiment des savants les plus distingués, c'est le témoignage positif de Macrobe lui-même : « Nos sub alio ortos cœlo, latinae linguae vena non adjuvat.... petitum, impetratumque volumus, aequi bonique consulant, si in nostro sermone nativa romani oris elegantia desideretur (Saturnal.) l. I, c. 2). D'après ce passage, on a dû supposer que Macrobe était Grec (la physionomie de son nom ne permet guère d'ailleurs d'en douter), puisqu'à l'époque où il écrivait, le monde civilisé ne parlait que deux langues, le latin et le grec, et que d'ailleurs son style est quelquefois bigarré d'hellénismes, et ses ouvrages remplis de citations grecques. Cœlius Rhodiginus prétend que de son temps les habitants de Vérone le comptaient au nombre des écrivains auxquels leur ville avait donné le jour. Cette opinion n'a point trouvé de partisans.

III. Nous ignorons la date précise de la naissance de Macrobe ; mais nous savons positivement, d'après les lois du code Théodosien qui lui sont adressées, ou dans lesquelles il est question de lui, aussi bien que par les personnages qu'il a introduits dans ses Saturnales, comme étant ses contemporains, tels que Symmaque et Praetextatus, qu'il a vécu sous les règnes d'Honorius et de Théodose, c'est-à-dire entre l'an 395, époque de l'avènement d'Honorius au trône, et l'an 435, époque de la publication du code Théodosien. Aussi ceux qui ont classé les écrivains latins par ordre chronologique ne se sont point écartés de cet intervalle. Riccioli, dans la Chronique qu'il a mise en tête de son Almageste, place Macrobe entre les années 395 et 400; et il relève Genebrard, Sansovino et Thevet, qui l'avaient placé au deuxième siècle de l'ère chrétienne, ainsi que les rédacteurs du catalogue de la bibliothèque du Vatican, qui l'ont placé au dixième. Saxius (loco cit.) place Macrobe vers l'an 410. M. Schœll, dans la Table synoptique des écrivains romains, en tête de son Histoire de la littérature latine, le place sous l'année 409.

IV. Tout ce que nous savons sur les dignités dont Macrobe fut revêtu, et sur les fonctions qu'il a rem- plies, est consigné dans le code Théodosien. On y trouve d'abord une loi de Constantin , datée de Sirmium, le 12 des calendes de mars de l'an 326, adressée à un Maximianos Macrobius, sans qualification, que la différence du prénom, jointe à l'époque où il a vécu, permettrait de regarder comme étant le père ou l'aïeul de l'auteur des Saturnales.

La loi 13, liv. xvi, tit. 10, de paganis (cod. Justinian.), est adressée par Honorius à Macrobe, vice-préfet (pro prœfecto) des Espagnes.

Une loi datée de Milan, l'an 400, le blâme d'un empiétement de pouvoir, et le qualifie vicarius.

La loi 11, liv. vi, tit. 28, de indulgentiis debitorum, sous la date de l'année 410, est adressée à Macrobe, proconsul d'Afrique.

Enfin il existe un rescrit de Théodose le Jeune et d'Honorius, daté de l'an 482, et adressé à Florent. Dans ce rescrit, les empereurs déclarent qu'ils élèvent la dignité de prxfectus sacri cubiculi à l'égal de celle de préfet du prétoire, de préfet urbain ou de préteur militaire; eu telle sorte que ceux qui en seront revêtus jouiront des mêmes honneurs et prérogatives que ces magistrats. Les empereurs ajoutent qu'ils portent cette loi en considération des mérites de Macrobe, qu'ils qualifient de vir illustris ; en raison de quoi ils entendent qu'il soit le premier à profiter du bénéfice de la loi, sans que ses prédécesseurs qui sont sortis de charge puissent y prétendre.

On a traduit le titre de prxpositus sacri cubiculi, par celui de grand-maître de la garde-robe, et l'on a comparé cette charge à celle que remplit le grand chambellan dans les cours de l'Europe moderne. Elle existait également dans l'empire d'Orient et dans celui d'Occident. Celui qui en était revêtu était de la troisième classe des illustres, dans laquelle il occupait le premier rang. Il avait au-dessous de lui plusieurs dignitaires, entre autres le primicerius sacri cubiculi, qui avait le titre de spectabilis, et les chartularii sacri cubiculi, au nombre de trente. Les manuscrits donnent aussi à Macrobe le titre de vir consularis et illuster. Gronovius démontre qu'à cette époque on donnait cette qualification aux gouverneurs des provinces; et Ernesti, dans l’Index dignitatum de son édition d'Ammien-Marcellin, fait voir qu'elle fut donnée au gouverneur de la Cœlé-Syrie. Quant à la qualification d'illuster, plusieurs auteurs cités par Gessner prouvent qu'on la donnait, à cette époque, aux sénateurs de la première classe. Je ne dois pas laisser ignorer que quelques savants ont révoqué en doute que le Macrobe dont il est question dans le rescrit à Florent fut le même que l'auteur des Saturnales ; et leur doute est fondé sur ce que la fonction de praepositiis sacri cubiculi fut l'apanage ordinaire des eunuques, tandis que Macrobe eut un fils nommé Eusthate, auquel il adressa ses principaux ouvrages, en lui prodiguant les expressions de la plus vive tendresse : « Eusthati fili, luce mihi dilectior.... Vitae mihi pariter dulcedo et gloria. »

V. Quelle fut la religion de Macrobe? Cette question a excité une vive controverse parmi les érudits, parce qu'elle touchait de près à de grands intérêts religieux. Le déiste anglais Collins, entre autres objections contre l'Évangile, avait soutenu qu'il n'était pas vraisemblable qu'un événement aussi marquant que le massacre des enfants de Bethléem et des environs, depuis l'âge de deux ans et au-dessous, rapporté par saint Matthieu, eût été passé sous silence par tous les écrivains païens, au nombre desquels il ne veut pas compter Macrobe, qui en a parlé, et qu'il considère comme chrétien. Collins avait en sa faveur l'opinion de Grotius et celle de Barth. Ce dernier, tout en disant qu'on trouve dans les écrits de Macrobe quelques légers indices qu'il professait la religion des chrétiens, le place néanmoins au nombre des écrivains païens. Jean Masson se chargea de répondre à Collins, et le fit dans une lettre écrite en anglais, adressée à Chandler, évêque de Coventry, et imprimée à la suite d'un ouvrage de ce dernier en faveur de la religion chrétienne. Masson y établit le paganisme de Macrobe, en faisant voir qu'à limitation de Celse, de Porphyre, de Julien, il s'efforce de laver le polythéisme du reproche d'absurdité qu'on lui adressait avec tant de justice, et que c'est dans ce dessein qu'il réduit ses nombreuses divinités à n'être plus que des emblèmes, des attributs divers du soleil. Au reste, continue Masson, dont j'analyse les raisonnements, il ne parle jamais de ces dieux que le vulgaire adorait, sans marquer qu'il leur rendait aussi les mêmes honneurs. « Dans nos saintes cérémonies, dit-il, nous prions Janus..... nous adorons Apollon, etc. » Ces expressions, et plusieurs autres semblables, se rencontrent fréquemment dans les Saturnales ; et certainement, s'il eût été chrétien, Macrobe se serait abstenu de les employer à une époque où la lutte entre les deux principales religions qui se partageaient la croyance du monde existait encore dans toute sa vigueur, et même était la pensée dominante qui occupait alors les esprits. On sait d'ailleurs que les premiers chrétiens poussaient si loin le scrupule en cette matière, qu'ils s'abstenaient de manger des viandes qui avaient été offertes aux idoles, et que plusieurs d'entre eux furent mis à mort pour avoir refusé de participer, sous les empereurs païens, au service militaire, qui les eût contraints de rendre aux fausses divinités des honneurs qu'ils regardaient comme coupables. — Tous les interlocuteurs que Macrobe introduit dans les Saturnales, et qu'il donne pour ses amis et ses plus intimes confidents, manifestent le plus parfait assentiment et la plus sincère admiration pour le système religieux de Praetextatus : « Quand il eut cessé de parler, tous les assistants, les yeux fixés sur lui, témoignaient leur admiration par leur silence. Ensuite on commença à louer, l’un sa mémoire, l'autre sa doctrine, tous sa religion, assurant qu'il était le seul qui connût bien le secret de la nature des dieux ; que lui seul avait l'intelligence pour comprendre les choses divines et le génie pour en parler. » L'on sait d'ailleurs que Praetextatus était prêtre des idoles, comme on le verra plus bas. Quant à Symmaque (qui est aussi un des principaux interlocuteurs des Saturnales), outre qu'il fut grand pontife, ses écrits contre le christianisme, qui sont parvenus jusqu'à nous, ne laissent aucun doute sur ses opinions. Une présomption nouvelle en faveur du paganisme de Macrobe, c'est le silence absolu qu'il garde sur la religion chrétienne, dont le sujet de ses ouvrages appelait si naturellement la discussion. S'il ne l'a point abordée, c'est, je pense, par égard pour les sentiments du souverain à la personne duquel il se trouvait attaché par un emploi important, et qu'il aura craint, sans doute, de choquer.

VI. Maintenant que tous les documents sur la personne de Macrobe sont épuisés, je passe à ses ouvrages. Il nous en est parvenu trois : 1° le Commentaire sur le Songe de Scipion; les Saturnales; 3° le traité des différences et des associations des mots grecs et latins.

 

COMMENTAIRE SUR LE SONGE DE SCIPION.

 

Dans le sixième livre de la République de Cicéron, Scipion Émilien voit en songe son aïeul l'Africain, qui lui décrit les récompenses qui attendent, dans une autre vie, ceux qui ont bien servi leur patrie dans celle-ci : c'est le texte choisi par Macrobe pour exposer, dans un commentaire divisé en deux livrés, les sentiments des anciens concernant le système du monde. Astronomie, astrologie, physique céleste, cosmologie, métaphysique, telles sont les sections des connaissances humaines sur lesquelles roulent ses dissertations ; ouvrage d'autant plus précieux, qu'il est permis de le considérer comme l'expression fidèle des opinions des savants de son temps sur ces diverses matières. Brucker reconnaît dans les idées de notre auteur un adepte de la secte platonicienne régénérée, soit lorsqu'il reproduit la célèbre trinité de Platon, soit lorsqu'il professe la doctrine de l'indestructibilité de la matière, et soutient qu'elle ne fait réellement que changer de formes, alors qu'elle parait à nos yeux s'anéantir, soit enfin lorsque Macrobe ne veut voir dans les divinités du paganisme que des allégories des phénomènes physiques. Les connaissances astronomiques que Macrobe développe dans son Commentaire ont déterminé Riccioli à le compter au nombre des astronomes, et même à consacrer un chapitre de l'Almageste à son système, astronomique.

Barth pense que le Commentaire sur le Songe de Scipion faisait partie des Saturnales, et il se fonde sur ce qu'il a vu un manuscrit de cet ouvrage qui avait pour titre : Macrobii Th. V. C. et inl. Commentariorum tertiae diei Saturnaliorum, liber primus incipit. « En sorte que d'après cela, dit-il, il paraîtrait que la principale division de l'ouvrage de Macrobe était celle par journées, dont la troisième aurait été remplie par le Commentaire, dans lequel, en effet, il explique le sens caché de Cicéron; de même que, dans les Saturnales, il explique le sens caché de Virgile. Il ne serait pas impossible que quelques paroles qui auraient lié ces deux ouvrages ensemble se fussent perdues ; ce qu'on sera plus disposé à croire alors qu'on saura que, tandis qu'il est annoncé à la fin du deuxième livre des Saturnales que le lendemain la réunion doit avoir lieu chez Symmaque, néanmoins la discussion qui commence immédiatement le troisième livre a lieu chez Praetextatus. Remarquez d'ailleurs que, dans la division actuelle des livres, le troisième et le quatrième en formeraient à peine un, comparés à l'étendue de ceux qui les précèdent et de ceux qui les suivent. » Je ferai observer encore, à l'appui de l'opinion de Barth, qu'en tête des deux ouvrages Macrobe adresse également la parole à son fils Eustathe; mais il faut remarquer aussi, contre cette même opinion, que tandis que, dans les Saturnales, il est fait mention fréquemment des interlocuteurs, il n'est jamais question d'eux dans les deux livres fort étendus qui composent le Commentaire sur le Songe de Scipion.

Le grammairien Théodore Gaza a traduit en grec, comme on le croit communément, le Songe de Scipion de Cicéron, ce qui a fait penser faussement à plusieurs savants qu'il avait traduit aussi le Commentaire de Macrobe. La seule traduction grecque de cet ouvrage est celle de Maxime Planude, moine de Constantinople, qui vivait vers l'an 1327, et à qui l'on attribue plusieurs autres ouvrages, entre autres les fables connues sous le nom d'Ésope. D'après le témoignage de Montfaucon, il a existé un manuscrit de la traduction du Commentaire par Planude (laquelle, au reste, n'a jamais été publiée) dans la bibliothèque de Coislin, n° 35 (olim 504), et il en existe sept dans la bibliothèque du Roi, d'après le témoignage du Catalogue des manuscrits.

C'est ici le plus important et le plus cité des ouvrages de Macrobe. Il n'est pas nécessaire de décrire ici les fêtes dont le nom est le titre de l'ouvrage, il suffit de renvoyer aux 7e et 10e chapitres du liv. I des Saturnales. J'ajouterai seulement que Macrobe a divisé son ouvrage en sept livres, dans lesquels il raconte à son fils des conversations qu'il suppose tenues dans des réunions et dans des festins qui auraient eu lieu pendant les Saturnales chez Praetextatus. Disons d'abord quelque chose des personnages que Macrobe y fait parler.

C'est un jurisconsulte nommé Postumius, qui raconte à sou ami Decius3 les discussions qui ont eu lieu chez Praetextatus pendant les saturnales, telles que les lui a racontées Eusèbe, l'un des interlocuteurs, lequel avait eu soin, au sortir de ces réunions, de mettre par écrit ce qu'il venait d'y entendre. Postumius y avait assisté le premier jour ; mais ensuite, obligé de vaquer à ses occupations ordinaires, il s'y était fait remplacer par Eusèbe ; en sorte que les véritables interlocuteurs des Saturnales ne sont qu'au nombre de douze, savoir, outre Eusèbe, Praetextatus, Flavien, Symmaque, Cœcina, Decius Albinus, Furius Albinus, Eustache, Nicomaque Avienus, Evangelus, Disaire Horus, et Servius. Il est à remarquer que Macrobe ne parle jamais de lui-même à l'occasion dé ces réunions, et ne dit nulle part qu'il y ait assisté : c'est qu'en effet, d'après les expressions de son prologue, ces réunions, sans être de pures fictions, ont servi de cadre à l'auteur, qui a beaucoup ajouté à la réalité. « Je vais exposer, dit-il, le plan que j'ai donné à cet ouvrage. Pendant les saturnales, les plus distingués d'entre les nobles de Rome se réunissaient chez Praetextatus, etc. » Après avoir comparé ses banquets à ceux de Platon, et le langage de ses interlocuteurs à celui que le philosophe grec prête à Socrate, Macrobe continue ainsi : « Or, si les Cotta, les Lélius, les Scipion, ont pu disserter, dans les ouvrages des anciens, sur les sujets les plus n importants de la littérature romaine, ne sera-t-il pas permis aux Flavien, aux Albinus, aux Symmaque, qui leur sont égaux en gloire et ne leur sont pas inférieurs en vertu, de disserter sur quelque sujet du même genre ? Et qu'on ne me reproche point que la vieillesse de quelques-uns de mes personnages est postérieure au siècle de Praetextatus, car les Dialogues de Platon sont une autorité en faveur de cette licence...... C'est pourquoi, à son exemple, l'âge des personnes qu'on a réunies n'a été compté pour rien, etc. » Il est évident que, si des réunions et des discussions philosophiques et littéraires ont eu lieu réellement chez Praetextatus, Macrobe ne nous en a transmis qu'un résultat arrangé à sa manière. Quoi qu'il en soit, comme les personnages qu'il met en scène ont effectivement existé et à peu près vers la même époque, je vais successivement dire un mot sur chacun d'eux.

Praetextatus doit occuper le premier rang, car c'était lui qui présidait la réunion en qualité de rex mensœ, outre que les séances se tenaient dans sa bibliothèque. Il paraît que c'était un homme profondément versé dans les rites sacrés et les mystères du polythéisme. Néanmoins, et malgré l'attachement qu'il professait pour le paganisme, il disait, s'il faut en croire saint Jérôme» : « Qu'on me fasse évêque de Rome, et sur le champ je me fais chrétien. » C'est lui qui, dans l'ouvrage de Macrobe, porte la parole le plus souvent et le plus longuement. S'il fut un des hommes les plus distingués de son temps par ses connaissances, il ne le fut pas moins par les emplois importants qu'il remplit. En effet, on le trouve désigné comme préfet de Rome en l'an 384, sous Valentinien et Valens. Godefroi rapporte, et sur la foi d'un manuscrit, qu'il fut préfet du prétoire en 384. Ammien Marcellin lui prodigue les plus grands éloges, en énumérant tout ce qu'il fit à Rome pendant sa préfecture. Le même auteur nous apprend aussi que Praetextatus fut proconsul d'Achaïe sous Julien; et il occupait encore cette place pendant les premières années de Valentinien, comme on peut le voir dans Zosime, qui, au reste, ne lui prodigue pas moins d'éloges qu'Ammien-Marcellin. Symmaque lui a adressé plusieurs de ses lettres. Dans d'autres, Symmaque eut à déplorer la mort de Praetextatus, et dans la 25e lettre du xe livre il nous apprend que, lorsque la mort surprit ce personnage, il était désigné consul pour l'aunée suivante. C'est ce que confirme aussi une inscription rapportée par Gruter, et que je vais transcrire. Elle provient d'une table de marbre trouvée à Rome, dans les jardins de la villa Mattei. Cette inscription était placée au-dessous d'une statue élevée en l'honneur de Praetextatus. Sa famille, l'une des plus distinguées de Rome, a donné à cette ville plusieurs personnages illustres, dont on peut voir la notice dans la Roma subterranea d'Aringhi. On y verra aussi que cette famille a donné son nom à l'une des catacombes de cette ville. Aringhi lui consacra le 16e chapitre de son IIIe livre, sous le titre de Cœmaeterium Prœtextati.

Symmaque est connu par une collection de lettres, divisée en dix livres, qui est parvenue jusqu'à nous. Il y parle plusieurs fois contre les chrétiens. Saint Ambroise et Prudence y répondirent. L'heureux et infatigable conservateur de la bibliothèque Ambrosienne de Milan, M. l'abbé Maïo, a découvert et publié pour la première fois, des fragments considérables des discours de Symmaque. Ce dernier avait fait aussi une traduction grecque de la Bible, dont il ne nous reste plus que quelques lambeaux. Son père avait été sénateur sous Valentinien. Lui-même il remplit, du temps de cet empereur, la charge de correcteur de la Lucanie et du pays des Brutiens, en 365 ou 368. Il fut proconsul d'Afrique en 370 ou 373. C'est lui-même qui nous l'apprend. Il parait, d'après plusieurs de ses lettres, que l'Afrique était sa patrie, et qu'il conservait pour elle le plus tendre attachement. Il fut préfet de Rome sous Valentinien le Jeune, en 384, Richomer et Cléarque étant consuls. Enfin, il fut consul avec Tatien en 391. Son fils, qui fut proconsul d Afrique sous Honorius, loi consacra une inscription trouvée à Rome sur le mont Cœlius, et publiée pour la première fois par Pontanus, dans ses notes sur Macrobe.

Eusèbe, auteur de cette inscription, est sans doute le même que nous trouvons au nombre des interlocuteurs des Saturnales. Tout ce que nous savons de lui se réduit à ce que nous apprend Macrobe : qu'il était Grec de naissance, et néanmoins aussi versé dans la littérature latine que dans celle de sa nation. Il exerça avec distinction la profession de rhéteur, et son style était abondant et fleuri.

Flavien était frère de Symmaque. Gruter rapporte une inscription qui le concerne. En voici une autre, trouvée en même temps que celle de Symmaque que j'ai rapportée plus haut. Pontanus demande si cène serait pas le même dont a parlé Jean de Salisbury en ces termes : « C'est ce qu'assure Flavien, dans son ouvrage intitulé de Vestigiis Philosophorum. » Et ailleurs : « Cette anecdote (celle de la matrone d'Éphèse) racontée en ces termes par Pétrone, vous l'appellerez comme il vous plaira, fable ou histoire. Toutefois Flavien atteste que le fait s'est passé ainsi à Éphèse. » Le P. de Colonia ajoute que c'est ce même Flavien qui, de concert avec Arbogaste, ayant soulevé Rome en faveur d'Eugène, se fit tuer en défendant le passage des Alpes et l'entrée de l'Italie contre l'armée de Théodose le Grand.

Cœcina Albinus fut préfet de Rome sous Honorius, en 414. Rutilius Claudius Numatianus fait mention de lui dans son Itinéraire, ainsi qu'Olympiodore, cité dans la Bibliothèque de Photius. Gruter rapporte deux inscriptions, qui le concernent.

Nicomachus Avienus était encore très jeune, et se bornait ordinairement à interroger. Saxius pense que cet Avienus est Rufus Sextus Avienus, non l'auteur des fables, mais celui qui a traduit les Phénomènes d'Aratus et Denys Périégète. Gruter rapporte, d'après Smetius et Boissard, une inscription trouvée à Rome au pied du Capitule, et qui servait de base à une statue élevée à R. AVV. Avianus Symmachus, v. c. le 3 des calendes de mai, Gratien IV et Merobande consuls.

Les autres interlocuteurs des Saturnales sont : Eustache, philosophe distingué et ami particulier de Flavien, mais qu'il ne faut pas confondre avec le savant archevêque de Thessalonique, commentateur d'Homère, puisqu'il n'a vécu que plusieurs siècles après ; Evangelus, que Macrobe nous peint sous les traits de la rudesse et de l'âpreté ; Harus, Égyptien de naissance, comme son nom l'indique, qui, après avoir remporté plusieurs palmes athlétiques, avait fini par embrasser la secte des cyniques; Disaire, Grec de nation, qui fut de son temps le premier médecin de Rome, et enfin le grammairien Servius, le même dont il nous reste un commentaire sur Virgile. Peut-être Servius conçut-il l'idée de cet ouvrage au sein des discussions approfondies sur le poète latin, qui eurent lieu chez Praetextatus ; du moins les paroles que Macrobe place dans sa bouche, à la fin du troisième livre, se retrouvent à peu près textuellement dans le commentaire du grammairien, ainsi que plusieurs de ses observations. A l'époque de nos Saturnales, il venait d'être reçu tout récemment professeur de grammaire; et Macrobe loue, également ses connaissances et sa modestie, laquelle se manifestait chez lui jusque dans son extérieur.

Maintenant que l'on connaît les personnes que Macrobe fait asseoir à son banquet, je vais tracer une analyse rapide de l'ouvrage lui-même.

Il est divisé en sept livres. Un passage de la fin du sixième, où il est annoncé que Flavien doit disserter le lendemain sur les profondes connaissances de Virgile dans l'art des augures, annonce, qui ne se réalise point, a donné lieu à Pontanus de soupçonner qu'il devait exister un huitième livre; ce qui eût formé un nombre égal au nombre de jours que remplissaient en dernier lieu les fêtes des Saturnales. J'ai déjà dit que Barth a pensé que le Commentaire sur le Songe de Scipion formait ce huitième livre. Quoi qu'il en soit, M. Etienne a divisé les sept livres qui nous restent en trois journées, nombre primitif de la durée des Saturnales. La première renferme le premier livre ; la deuxième renferme les deuxième, troisième, quatrième, cinquième et sixième livres ; et la troisième renferme le septième et dernier. Cette division, quoique purement arbitraire, et même en opposition avec le texte précis de l'ouvrage, où il n'est fait mention que de deux journées, a toujours été indiquée depuis dans les éditions postérieures. Voici à peu près les matières qui sont renfermées dans les sept livres, et l'ordre dans lequel elles sont disposées.

Le premier livre traite des Saturnales, et de plusieurs autres fêtes des Romains, de Saturne lui-même, de Janus, de la division de l'année chez les Romains, et de son organisation successive par Romulus, Numa et Jules-César; de la division du jour civil, et de ses diversités; des calendes, des ides, des nones, et généralement de tout ce qui concerne le calendrier romain : il se termine enfin par plusieurs chapitres très importants, dans lesquels Macrobe déploie une vaste érudition, à l'appui du système qui fait rapporter tous les dieux au soleil. Cette partie est originale, autant que les travaux d'érudition le peuvent être. Dans le reste du livre, il a beaucoup pris à Aulu-Gelle et à Sénèque le moraliste.

Le deuxième livre est le plus original et le plus vulgairement connu de l'ouvrage de Macrobe. C'est un recueil d'anecdotes, de plaisanteries, de bons mots, même de calembours, en un mot un véritable ana. La plupart des choses qu'il renferme ne se trouvent que là ; et nous les ignorerions entièrement, si Macrobe avait négligé de nous les transmettre. La seconde partie du deuxième livre est remplie par des détails très curieux sur les mœurs domestiques des Romains, leur cuisine, leurs mets, les fruits qu'ils consommaient, et diverses particularités de ce genre.

Depuis le troisième livre jusqu'au sixième inclusivement, les Saturnales deviennent un commentaire approfondi de Virgile, considéré sous divers rapports. Dans le troisième livre, on développe les connaissances du poète latin, concernant les rites et les croyances de la religion. Dans le quatrième, on fait voir combien toutes les ressources de l'art des rhéteurs lui ont été familières, et avec quelle habileté il a su les employer. Le cinquième n'est qu'un parallèle continuel d'Homère et de Virgile, où sont signalés en même temps les nombreux larcins que le dernier a faits au poète grec. Ce que Virgile a emprunté aux poètes de sa nation est dévoilé dans le sixième livre, où sont aussi développés, d'après les ouvrages de Virgile, quelques points curieux d'antiquité.

Le septième livre est imité en grande partie du Symposiaque (repas) de Plutarque. On y trouve discutées plusieurs questions intéressantes de physique et de physiologie ; on y remarque des exemples curieux de la manière dont les sophistes soutenaient le pour et le contre d'une même thèse. Sans doute la latinité de Macrobe se ressent de la décadence de son siècle ; mais il faut convenir aussi que les défauts de son style ont été beaucoup exagérés par les critiques anciens, qui, pendant longtemps, n'ont eu sous les yeux qu'un texte mutilé et totalement défiguré. On lui a surtout reproché ses plagiats avec beaucoup d'amertume. Erasme l'appelle Aesopica comicula...... quae ex aliorum pannis suos contexuit centones. Non loquitur, et si quando loquitur, grœculum latine balbutire credas. Vossius le qualifie de bonorum scriptorum lavernam. Muret dit assez plaisamment : Macrobium........ factitasse condem artem, quam plerique hoc seculo faciunt, qui ita liumani a se nihil alienum putant, ut alienis aeque utantur ac suis. Ange Politien et Scaliger le père ne lui sont pas moins défavorables. Un reproche qu'ils ne lui ont pas adressé, quoiqu'ils eussent pu le faire avec beaucoup de justice, c'est le défaut absolu de méthode, et le désordre complet qui règne dans son ouvrage. Encore aurait-il pu s'en excuser par la licence que lui donnait à cet égard le genre de la conversation qu'il a adopté. Au reste, la manière modeste dont il s'exprime dans sa préface aurait dû lui faire trouver des juges moins sévères. En effet, il n'a pas prétendu faire un ouvrage original ; seulement il réunit dans un seul cadre, pour l'instruction de son fils, le résultat de ses nombreuses lectures. Il le prévient qu'il n'a point eu dessein de faire parade de son éloquence, mais uniquement de rassembler en sa faveur une certaine masse de connaissances ; enfin, il a eu grand soin d'avertir le lecteur que plus d'une fois il avait copié jusqu'aux propres expressions des auteurs cités par lui. Tous les critiques ne sont pas restés insensibles à cette modestie. Thomasius se croit bien obligé de lui assigner un rang parmi les plagiaires ; mais il convient que ce rang est l'un des plus distingués. Le P. Vavasseur remarque que s'il emprunte souvent, souvent aussi il produit de son propre fonds. Caelius Rhodiginus l'appelle autorem excellentissimum, et virum reconditae scientiae.

Mais ce sont surtout les critiques modernes qui ont rendu à Macrobe une justice pleine et entière. L'éditeur de Padoue (Jer. Volpi) dit avec beaucoup de justesse dans sa préface : Nemo fere illorum qui studia humanitatis cum disciplinis gravioribus conjungere amant, cui Macrobii scripta et grata et explorata non sunt. Chompré, qui, dans son recueil d'auteurs latins à l'usage de la jeunesse, a inséré des fragments du onzième chapitre du premier livre et des deuxième et cinquième chapitres du deuxième livre des Saturnales, avec la traduction de ces morceaux, s'exprime ainsi: « S'il y a un livre à faire connaître aux jeunes gens, c'est celui-là. Il est rempli de choses extrêmement utiles et agréables ; le peu que nous en avons tiré n'est que pour avertir les étudiants qu'il y a un Macrobe qui mérite d'être connu et lu. » Enfin, M. Coupé, qui, dans ses Soirées littéraires, a consacré un article à Macrobe, et traduit à sa manière, c'est-à-dire analysé vaguement, quelques morceaux des premier, deuxième et septième livres, après plusieurs autres choses flatteuses pour notre auteur, dit : « Voilà tout ce que nous dirons de cet auteur charmant, à qui nous désirons un traducteur. »

Nous avons en notre langue un ouvrage anonyme en deux volumes in-12, intitulé Les Saturnales françaises. La seule ressemblance qu'on y remarque avec celles de l'auteur latin, c'est qu'elles sont divisées en journées. La scène se passe, pendant les vacances du palais, dans le château d'un président, situé aux environs de Paris. Cette production médiocre est attribuée, dans le Dictionnaire de Barbier, à l'abbé de la Baume.

 

TRAITE DES DIFFERENCES ET DES ASSOCIATIONS

DES MOTS GRECS ET LATINS.

 

Ce traité de grammaire ne nous est point parvenu tel que Macrobe l'avait composé; car ce qui nous reste n'est qu'un abrégé fait par un certain Jean qu'on suppose, d'après Pithou, être Jean Scot, dit Erigène, qui vivait en 850, sous le règne de Charles le Chauve, qui a traduit du grec en latin les ouvrages de Denys l'Aréopagite. Cependant il avait existé auparavant, selon Trithème, un autre Jean Scot, qui vécut sous le règne de Charlemagne, environ l'an 800 ; et il exista depuis un Jean Duns Scot, qui vivait en 1308, sous l'empereur Albert. Le premier éditeur de cet opuscule, Opsœpœus, pense que Jean Scot en a beaucoup retranché, mais qu'il n'y a rien ajouté du sien.

 

OUVRAGES INÉDITS OU FRAGMENTS DE MACROBE.

 

Paul Colomiès, dans le catalogue des manuscrits d'Isaac Vossius, cite parmi les manuscrits latins, sous le n° 30, un fragment d'un ouvrage de Macrobe, qui serait intitulé De differentia Stellarum; et de magnitudine solis, sous le n° 48; un autre fragment intitulé Sphera Macrobii; et enfin, sous le n° 91, un troisième fragment ayant pour titre : Macrobius, de palliis, quae sunt lapidum nomina. La nature des sujets de ces divers fragments, à l'exception du dernier, semble indiquer que ce ne sont que des lambeaux du Commentaire sur le Songe de Scipion. Ernesti nous apprend qu'il a existé à Nuremberg, entre les mains de Godefroi Thomasius, un manuscrit intitulé Macrobius, de secretis mulierum. Gronovius, dans ses notes sur le cinquième chapitre du deuxième livre du Commentaire sur le Songe de Scipion, a publié un fragment considérable de la Géométrie d'un anonyme, tiré des manuscrits de son père; fragment où Macrobe est cité plusieurs fois, et quelquefois même copié. D'un autre côté, Brucker rapporte que le continuateur de l'ouvrage de Bède, De gestis Anglorum, parle d'une Épître à Gerbert, consacrée par Elbode, évêque de Wisburg, à disserter sur les doctrines géométriques de Macrobe. Il me semble naturel de penser que cet Elbode est l'auteur inconnu de la Géométrie publiée par Gronovius. On trouve dans Montfaucon l'indication suivante : Le matematiche di Macrobio, tradotte du incerto colla posizione per il loro uso mss. (ex Biblioth. Reg. Taurinensis). Argellati, en citant ce manuscrit, le donne à la bibliothèque du roi de France. On trouve encore dans Montfaucon les indications suivantes : Macrobius, de lunae cursu per signum tonitruale (p. 41) (ex biblioth. reginae Sueciœ in Vatican. n° 1259. — Macrobius, de cursu lunae et tonitru (p. 81) (ex biblioth. Alexandri Petavii in Vatican, n° 557, 108).

Au sujet du manuscrit intitulé Sphera Macrobii, voici un renseignement que je trouve dans une des préfaces de l'édition publiée par M. Sébastien Ciampi, de la version italienne par Zanobi da Strata, de la version grecque par Maxime Planude, du Songe de Scipion de Cicéron. Tiraboschi rapporte que l'abbé Menus fait mention d'une traduction, en ottava rima, du Commentaire de Macrobe sur le Songe de Scipion, qui est conservée manuscrite dans la bibliothèque de Saint Marc à Milan, et qui est probablement, continue Tiraboschi, ce poème que quelques-uns attribuent à Macrobe, et qu'ils considèrent comme étant écrit en vers latins. Peut-être (et c'est l'opinion de quelques personnes) que le Commentaire sur le Songe de Scipion a été traduit par Zanobi, non en ottava rima, mais en vers latins.

VII. Outre l'auteur des Saturnales, il a encore existé deux autres écrivains du nom de Macrobe : l'un, diacre de l'église de Carthage, zélé partisan de la doctrine et des écrits de S. Cyprien, et dont l'auteur de l'appendice au traité de saint Hildefonse de Script. Eccles., cite un ouvrage en cent chapitres, tirés de l'Écriture sainte, en réponse aux objections des hérétiques ; l'autre, plus connu, fut d'abord prêtre en Afrique, et ensuite clandestinement évêque des donatistes de Rome. N'étant encore que prêtre, il écrivit un ouvrage adressé ad confessores et virgines, qui est beaucoup loué par Gennade et par Trithème. Mabillon, dans la dernière édition de ses Analecta, a publié un fragment d'une épitre adressée par ce second Macrobe au peuple de Carthage, sur le martyre des donatistes Maximien et Isaac. L'Anglais Guillaume Cave lui a consacré un article dans son Histoire des écrivains ecclésiastiques, sous l'année 344.