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table des matières d'Athénée de Naucratis

introduction à athénée de naucratis

ATHÉNÉE DE NAUCRATIS

LIVRE II : ÉPITOME.

Vin – Boisson – Les démons de la boisson – Éloge du vin – Eau – Différentes sortes d'eau – Viandes succulentes – Noms de fruits – Fruits et herbes – Lupins – Noms de plantes – Œufs – Champignons – Oignons, asperges etc. – Concombres et laitues – Le cactus – le Nil.

Le Livre ΙI des Deipnosophistes

texte grec

Oeuvre numérisée par Marc Szwajcer 

 

  

 

trADUCTION

LE BANQUET DES SAVANTS D'ATHÉNÉE.

LIVRE DEUXIÈME.

 

 

BANQUET

DES SAVANS,

PAR

ATHÉNÉE,

Traduit, tant sur les Textes imprimés, que sur plusieurs

Manuscrits,

Par M. LEFEBVRE DE VILLEBRUNE.

TOME PREMIER.

  


 

Pour nous, qui ne pouvons plus consulter qu'une très petite partie des Auteurs allégués par Athénée, et qui ne trouvons que dans son livre cent particularités curieuses dont, il parle, nous regardons sa compilation comme un trésor très précieux.

Bayle, Dict.

 

A PARIS,

Chez Lamy, Libraire, quai des Augustins, n°. 26.

DE L'IMPRIMERIE DE MONSIEUR.

M. DCC. LXXXIX.

AVEC APPROBATION, ET PRIVILÈGE DU ROI.


 

ATHENEE

DEIPNOSOPHISTES

LIVRE SECOND.

 

 

[35a] …………………………………………………….. donner au sommeil[1] le par-dessus de la mesure

pendant une grande partie du jour...............................................

…………………………….... la variété des discours que vous avez rappelés, ne m'a pas permis de donner quelques moments au sommeil....

Nicandre de Colophone dit qu’oinos,[2] mot qui signifie vin, est venu d'Œnée, selon ce passage:

« Œnée ayant exprimé du jus de raisin dans des vases, l'appela vin....»

Mélampide de Milet dit:

« O maître! le mot oinos approche bien du nom d'Œnée....»

Hécatée de Milet, disant que la vigne a été trouvée en Étolie. raconte ceci :

[35b] Oresthée,[3] fils de Deucalion, étant venu régner en Etolie, sa chienne mit bas une souche au lieu d'un chien. Il ordonna que ce bois fût enfoui, et il en vint un cep qui se couvrit de raisins. Voilà aussi pourquoi il appela son fils, Phytius (Planteur). Du nom de la vigne que les anciens appelaient oinee, le fils de Phytius fut appelé Œnée, et celui-ci eut un fils qu'on nomma Ætolus.

Platon, dans son Cratyle, occupé de l'étymologie du mot oinos, vin, dit qu'il est pour oionous, [34c] en ce qu'il nous remplit d’oieesis[4] ou présomption ; ou que peut-être il a été ainsi appelé du mot onesis, qui signifie utilité. En effet, Homère, faisant en quelque manière allusion à cette origine du mot oinos, parle ainsi :

« Buvez ce vin,[5] il vous fera du bien : oneeseai. »

Aussi appelle-t-il oneiata les aliments parce qu'ils nous sont utiles. Un poète a dit :

2. « Les dieux, ô Ménélas![6] ont donné le vin aux mortels, comme le meilleur moyen de dissiper les soucis.... »

Diphile, poète comique, a dit aussi:

[35d] « O Bacchus, délice des sages, et très sage toi-même, que tu es charmant! toi seul tu élèves[7] l'âme des gens qui sont dans la bassesse : tu dérides le front de l'homme le plus sévère, et le fais rire. Avec toi, la faiblesse devient la force même, et l’homme timide ne connaît plus la crainte.... »

On lit dans Philoxène de Cythère :

« Le vin qui se verse à larges flots, fait entendre mille voix différentes. »

Chérémon, le poète tragique, dit que ceux qui usent du vin, y trouvent les ris, la sagesse,[8] la science et le bon conseil

Mais Ion de Chio appelle

[35e] « Le vin un enfant indomptable,[9] à l'œil de taureau, un jeune vieillard, l'aimable entremetteur des bruyantes amours, un maître qui donne de la fierté. »

[36a] Mnésithée en parle en ces termes :

« Les dieux ont fait connaître le vin aux hommes, comme un très grand bien pour ceux qui en usent avec raison, mais comme très pernicieux pour ceux qui en usent sans discrétion. Il nourrit, fortifie le corps et l'âme, et devient très utile pour la médecine ; car on en fait entrer le mélange dans les médicaments. On ne le trouve pas moins avantageux pour les plaies. Il met dans une assiette tranquille l'esprit de ceux qui en boivent modérément, et étendu, dans les repas ordinaires. Si l’on passe la juste mesure, il causera des querelles : [36b] si l'on en boit avec moitié eau, il rend fou;[10] mais pris pur, il abat tout le corps. Voilà pourquoi Bacchus est invoqué partout comme a médecin. La Pythie a même ordonné à quelques-uns d'invoquer Bacchus comme dieu de la santé... »

3. Eubule fait ainsi parler Bacchus :

« Pour les sages, je ne mêle que trois cratères ; un pour la santé, et c'est celui qu'ils boivent le premier ; [36c] le second est pour l'amour et pour le plaisir; le troisième, pour le sommeil. Quand ils ont bu ce troisième verre, ils s'en vont chez eux, en gens sages. Quant au quatrième, je ne m'en mêle[11] point; c'est le fait de l'insolence ; le cinquième cause du tumulte ; le sixième enivre ; le septième enflamme les yeux (ou fait pocher les yeux); au huitième, on crie à la garde; le neuvième met la bile en effervescence ; le dixième rend maniaque» et jette bas son homme : car le vin versé en grande quantité clans un petit vaisseau, donne facilement le croc en jambes à ceux qui l'ont bu.... »

 

CHAP. II. Épicharme dit à ce sujet:

« Du sacrifice on vint au festin, [36d] et dans le festin l'on but, même avec gaieté, selon moi; mais en buvant, on se mit en débauche. De la débauche on passa au vacarme ; du vacarme aux procès : les procès furent suivis de condamnation ; on fut mis en prison: les fers ulcérèrent les membres, et l’on fut encore obligé de payer l'amende. »

Panyasis, poète épique, donne le premier cratère aux Grâces, aux Heures et à Bacchus; le second, à Vénus jointe à Bacchus; le troisième, à l'insolence et à la violence; car, selon Euripide,

« La débauche occasionne des injures, des outrages et des coups. »

C’est ce qui a fait dire que Bacchus et l’injure étaient nés en même temps.....

4. Alexis fait cette comparaison:

« L'homme, de sa nature, est en quelque sorte bien [36e] semblable au vin. Il faut que le vin nouveau et un jeune homme jettent leur premier bouillon. Après cette despumation, qui en fait monter les fleurs, les rend durs, et les dégage de tous ces principes hétérogènes qui nagent sur la surface, et qui, dans le jeune homme, sont la folie de son âge, ils deviennent, l'un potable (l’autre traitable), et sont enfin dans l'état où chacun peut leur trouver des charmes.... »

Le poète de Cyrène a dit:

[36f] « Le vin à la force du feu lorsqu'il est introduit dans le corps de l'homme : il l'agite, comme les vents du nord et du midi agitent la mer de Libye. Comme ils découvrent ce qui est caché au fond de ses gouffres, de même le vin met au jour tout ce que l'homme, pense.... »

Mais Alexis dit quelque part tout le contraire de ce qu'on a lu de lui plus haut:

« L'homme ne tient en rien de la nature du vin : en vieillissant, il devient morose et déplaisant ; le vin vieux, au contraire, nous égaie, et nous le voulons le plus vieux... »

Panyasis dit:

[37a] « Le vin est aussi utile à l'homme que le feu : c'est toujours le fidèle compagnon des chansons.[12] Il fait une partie des délices des festins, de la joie, de la danse, et du doux commerce de l'amitié.

C'est pourquoi buvez avec gaieté dans un repas, lorsqu'il vous faut arroser ; et n'allez pas vous remplir de manger comme un vautour, en oubliant de vous livrer à la joie avec trop de nourriture. »

Il dit encore ailleurs:

« Le meilleur présent que les dieux font aux hommes, [37b] est un vin brillant. Les chansons, les danses, toutes les liaisons de l'amitié l'accompagnent : bu avec modération, il chasse du cœur toutes les peines ; mais il devient préjudiciable, bu sans discrétion.... »

5. Timée de Taormine nous apprend qu'une maison d'Agrigente fut nommée la Galère, pour la raison suivante :

« Quelques jeunes gens s'y étant enivrés, eurent la tête tellement échauffée par les fumées du vin, qu'ils perdirent la raison et prirent cette maison pour une galère. S'imaginant donc voguer dedans, et être battus d'une furieuse tempête, [37c] ils poussent l'extravagance jusqu'à jeter par les fenêtres, vases, meubles, croyant que c'est le pilote qui leur ordonne d'alléger ainsi le vaisseau, à cause de la tempête. Il se rassemble là beaucoup de monde : on pille tout ce qu'ils jettent; mais ils persévèrent dans leur extravagance. Le lendemain, la garde se rend à cette maison, trouve les jeunes gens penchés comme des personnes qui ont encore envie de vomir : on les interroge ; ;[37d] ils répondent aux magistrats présents que battus par la tempête, ils avaient été forcés de jeter à la mer la partie de la cargaison la moins importante. La garde paraissant étonnée de l'égarement de ces jeunes gens, celui qui semblait être le plus âgé d'entre eux, prend la parole, et dit : Seigneurs Tritons, j'ai eu tant de frayeur que je me suis jeté sous ces bancs, le plus avant que j'ai pu. La garde leur pardonnant leur aliénation d'esprit, se contente de les réprimander, leur enjoignant de boire plus modérément à l'avenir, et s'en va  les jeunes gens la remercient, et répondent : [37e] Si nous pouvons nous sauver de cette tempête, et arriver au port, ce sera à votre heureuse apparition que nous attribuerons notre salut, et nous vous dresserons des statues dans notre patrie, à côté de celles de nos dieux marins. Voilà donc pourquoi cette maison fut appelée la galère..... »

6. Philochore dit que ceux qui se livrent au vin, non seulement se mettent à découvert, mais donnent aux autres occasions de se faire connaître par la liberté qu'ils leur inspirent dans le vin. De là vient le proverbe,

« Vin,[13] vérité. »

Théognis a dit aussi :

« Le vin découvre la pensée de l'homme.... »

[37f] Le trépied est le prix du vainqueur aux jeux bachiques ; voilà pourquoi nous disons qu'un homme parle du trépied lorsqu'il dit la vérité; mais par ce trépied bachique, il faut entendre le cratère.

Il y avait anciennement deux espèces de cratères, que l'on appelait indifféremment chaudrons (lebetas) : l'un était l’empyribate, ou lœtrochoos. C'est de celui-ci que parle Eschyle dans ce passage :

« Après cela vint un trépied de cuisine, gardien soigneux du foyer. »

[38a] L'autre est le cratère dont parle Homère :

« Sept trépieds qui n'ont jamais été au feu. »

C'était dans ceux-ci qu'ils mêlaient le vin qu'on allait boire : or, c'était-là le trépied, proprement dit, de la vérité. Il appartient aussi à Apollon, à cause de la vérité de ses oracles. Quant à Bacchus, il lui est propre, à cause de la vérité qui suit l'ivresse.

Semus de Délos dit : C'est un trépied d'airain y non comme celui de la Pythie, mais un de ceux que Ton appelle lebes, ou chaudron. De ceux-ci, les uns n'allaient pas sur le feu, et l'on y mêlait le vin : les autres étaient les lœtrochooi, ou chaudrons à faire chauffer l'eau du bain ; comme on les mettait sur le feu, on les appelait empyribates, c'est-à-dire, allants au feu.

[38b] Quelques-uns de ces vaisseaux avaient des oreilles ; mais on appelait généralement trépied, tout ce qui avait une base à trois pieds....

Ephippe a dit quelque part :

« Le vin que tu as largement bu te donne du babil. Voilà pourquoi, sans doute, on dit que ceux qui ont bu parlent vrai.... »

On lit dans Antiphane :

« Phidias, on peut tout cacher, excepté deux choses : un verre de vin et une intrigue amoureuse. L'un et l'autre se trahissent dans un seul regard, dans un mot : [38c] plus on le nie, plus on se dévoile... »

7. Philochore rapporte que ce fut Amphictyon, roi d'Athènes, qui mit le premier de l'eau dans le vin, et que ce fut de Bacchus même qu'il apprit à le faire. Auparavant les hommes buvaient leur vin pur, et marchaient tout courbés : dès qu'ils l'eurent pris étendu, ils devinrent droits; c'est pourquoi on éleva un autel à Bacchus (orthos) droit, dans le temple des Heures,[14] parce que ce sont les Heures qui nourrissent le fruit de la vigne ; mais Amphictyon éleva aussi un autel aux Nymphes, près du précédent, parce que les Nymphes ont été les nourrices de Bacchus, [38d] laissant un monument relatif à ce mélange pour ceux qui usent du vin. Il établit outre cela pour loi, que pendant le repas on ne présentât de vin pur aux convives, qu'autant qu'il en faudrait pour en goûter, voulant faire connaître la vertu de ce dieu bienfaisant ; que du reste on n'en bût qu'avec de l'eau autant qu'on en voudrait, en y joignant l'invocation de Jupiter sauveur ; de sorte que ceux qui en boiraient, perpétuant ainsi et l'usage[15] et le souvenir de ce fait, sauraient que le vin bu de cette manière, leur serait toujours salutaire.....

Platon[16] assure, au second livre des Lois, que l'usage du vin est bon pour la santé ; [38e] que cependant on a comparé Bacchus au taureau et à la panthère, à cause de l'état où met l'ivresse ; état dans lequel les hommes s'abandonnent à toutes sortes d'excès.

Alcée dit:

« La vertu[17] incompréhensible du vin, qui tantôt est doux comme le miel, tantôt plus piquant que les épines. »

Il est des gens qu'il rend furieux : tel est un taureau irrité. Euripide présente la même pensée :

« Ce sont des taureaux irrités qui s'élancent en menaçant des cornes.... »

[38f] D'autres, portés à se battre, le sont dans le vin jusqu'à la férocité ; c'est Bacchus sous la forme du léopard.

8. Ariston de Chio, a dit avec beaucoup de sens : le vin le plus agréable est celui qui réunit à la douceur les charmes du parfum,[18] et que c'était dans ces vues qu'on préparait au mont Olympe de Lydie, ce que l'on appelle nectar, en mêlant ensemble du vin, des rayons de miel, et des fleurs d'une agréable odeur.

[39a] Je sais qu'Anaxandride prétend que le nectar est la nourriture, et non la boisson des dieux ; voici le passage :

« Je mange, dit Ganymède, le nectar, et je le broie sous la dent : je vide les coups d'ambroisie ; je sers Jupiter ; j'ai l'honneur de parler librement à Junon, et je m'assieds à côté de Vénus....»

Selon Alcman, les dieux mangent le nectar. Sapho dit:

« On prépara un cratère d'ambroisie ; mais Mercure prenant du vin,[19] en versa aux dieux. »

[39b] Homère cependant fait du nectar la boisson des dieux. Ibycus nous dit que l'ambroisie était neuf fois plus douce que le miel; ou, en parlant comme lui, pour le plaisir le miel n'est que la neuvième partie de l'ambroisie.... Selon Alexis :

9. « Aucun buveur n'est un méchant homme ; car le dieu qui a eu deux mères ne se plaît pas avec les méchants, ni à une vie déréglée. »

Il ajoute que ceux qui en ont un peu trop bu, aiment beaucoup à raisonner.

 

[39c] CHAP. III. Celui qui a fait l'épigramme sur Cratinus,[20] y parle ainsi :

« Pour un poète qui veut plaire, le vin est un Pégase merveilleux : mais si vous buvez de l’eau, vous ne produirez rien de bon. C'est ainsi, Bacchus, que parlait Cratinus; et son haleine n'exhalait pas la vapeur d'un broc, mais celle de tout un tonneau. Toute sa maison était pleine de couronnes: il avait aussi, comme toi, le front couronné de lierre.... »

Selon Polémon, l’on révérait à Munichie un héros nommé Akratopote:[21] quelques cuisiniers avaient même dressé à Sparte, dans le phédites, des statues aux deux héros Matton[22] et Céraon. [39d] On honore le dieu Deipnée en Achaïe, ainsi nommé du mot deipnon) qui signifie souper ou repas.....

Un repas sec ne fournit jamais de railleries fines, ni d'impromptus en vers, ni de sentiments élevés, ni certaine bonne opinion de soi-même. C’est donc avec raison qu'Aristarque le grammairien, voulait qu'on retranchât une partie de vers de ce passage d'Homère :

« Que sont devenues ces bravades que nous faisions, disant que nous étions les plus vaillants des hommes? ces discours, dis-je, pleins de jactance, tenus dans l’île de Lemnos, lorsque nous mangions toutes sortes de viandes, vidant des verres pleins jusqu'aux bords? »

Ce vers est celui qui concerne les bravades faites en mangeant des viandes:[23] or, selon Aristarque, tout contentement d'esprit et toute satiété, [39e] ne produisent pas de jactance, de raillerie, ni de badinage; c'est ce qui arrive à des gens dont l'esprit, troublé par l'ivresse, suit l'illusion du mensonge.

10. Bacchylide a dit :

« La douce nécessité de boire[24] met à peine en train, qu'elle calme la colère de Vénus, L'espérance, jointe aux dons délicieux de Bacchus, donne une secousse agréable à l'âme, [39f] chasse au plus loin les soucis de l'homme, et dès l'instant il renverse les remparts m des villes, devient le monarque de toute la terre : l'or, l'ivoire brillent dans sa maison; des vaisseaux chargés de bled lui amènent d'Egypte d'immenses richesses sur l'onde blanchissante, tant le plaisir lui agite le cœur lorsqu'il boit.... »

[40a] Sophocle a dit :

« L'ivresse est le remède de tous les maux. »

Les autres poètes ont appelé le vin :

« Le fruit réjouissant de la terre. »

Quant au prince des poètes, il fait dire à Ulysse :

« Un guerrier qui a suffisamment bu et mangé, peut combattre toute la journée contre l'ennemi ; son cœur affermi est plein de hardiesse, etc. ..»

11. C’est à l'ivresse qu'on doit l'invention de la Tragédie et de la Comédie; elles furent imaginées l’une et l'autre à Icarie,[25] bourgade de l'Attique, pendant les vendanges. C’est pourquoi la comédie eut d'abord le nom de trygoodie,[26] ou chant de vendanges....

Euripide a dit dans ses Bacchantes :

« La vigne a été donnée à l'homme pour calmer [40c] ses peines : plus de vin, plus d'amour, plus de plaisir pour les hommes. »

Astydamas dit aussi :

« Il a montré la vigne, mère du vin, aux mortels, comme le remède de leurs peines... »

Car, comme dit Antiphane,

« L'homme qui a toujours une bonne dose de vin, n'a pas de soucis; celui qui ne fait qu'en goûter est toujours rêveur.... »

On lit dans Alexis,

« Je ne mets jamais ma raison dans la cuve ; mais je bois tant que je puis encore bien articuler[27] les mots (ou bien distinguer les lettres d'un livre)....»

Seleucus nous dit, que l'usage de l'antiquité était de ne pas faire d'extraordinaire de vin, ni de tout autre plaisir, à moins que ce ne fût en l'honneur des Dieux.

On se servait alors des expressions thoinee, thalia, methee, parce qu'on supposait que c'était en l'honneur des dieux qu'il fallait faire couler le vin, et parce qu'on s'assemblait à un festin pour les Dieux, [40d] ce qu'on exprimait par daita thaleian. Quant au mot methyein, Aristote dit qu'il signifie proprement boire après le sacrifice.[28]

12. « Ceux qui présentent aux dieux[29] de petites offrandes, leur marquent plus de piété que ceux qui immolent un bœuf. »

Observez que dans ce passage, le mot telos,[30] offrande, est pris pour thysia, sacrifice. Homère l’a employé dans ce sens :

« Pour moi, je dis qu'il n'y a point de sacrifice, telos, plus agréable que quand la joie s'empare de tout le peuple.»

Nous appelons telètes, les grandes fêtes qui se célèbrent avec des cérémonies mystérieuses, [40e] vu les grandes dépenses qu'elles exigent : car telein signifie dépenser, dapanan. Polyteleis se dit de ceux qui dépensent beaucoup, et euteleis, de ceux qui dépensent peu.

Alexis dit des gens fortunés :

« Il faut que ceux qui ont de la fortune vivent dans la splendeur, et qu'ils se fassent honneur de ce que Dieu leur a donné. Il regarde cela comme le témoignage de la reconnaissance qu'on a des biens qu'il a départis. Mais quand il voit des gens qui les cachent, [40f] disant qu'ils n'ont que bien justement de quoi vivre, et qui conséquemment se traitent avec une épargne sordide, il leur ôte bientôt, comme à des gens indignes de ces faveurs, ce qu'il leur avait donné.... »

 

13. CHAP. IV. Celui qui dès ses premières années a été accoutumé à ne boire que de l'eau, ne prend aucun plaisir au vin.....

Hésiode a dit dans sa Mélampodie :

« Quand on se trouve à un repas splendide et qu'on a mangé suffisamment, la conversation a ses charmes et ses plaisirs. »

Mais personne de nous n'a encore songé à parler de l'eau : c'est cependant de l'eau que vient le vin ; d'ailleurs Pindare,[31] ce poète sublime, a dit que l'eau est la meilleure de toutes les choses. [41a] Le divin Homère n'ignorait pas qu'elle était nourrissante, lorsqu'il dit:

« Un bois de peupliers nourris d'eau. »

Il en loue ailleurs la beauté cristalline :

« Il y avait, dit-il, quatre sources d'une eau limpide. »

Une eau légère et excellente, est chez lui une eau désirable, imerton : c'est l'épithète qu'il donne au fleuve Titarèse, qui tombe dans le Pénée, mais sans y confondre ses eaux. Il fait aussi mention de la qualité détersive de l'eau; et c'est d'après lui que Praxogoras, de Coo, donne à une telle eau l'épithète de belle dans ce vers :

« Il sort au bas une belle eau, très bonne pour déterger ce qu'il y a de plus sale. »

[41b] Il distingue aussi l'eau douce (glyky),[32] de celle de la mer, qu'il appelle platy : c'est ainsi qu'il nomme l'Hellespont platyn, mais en parlant de l'autre eau, il dit:

« Ils amarrèrent[33] leurs vaisseaux près d'une eau douce (glykeroio).

Il connaissait aussi l'utilité de l'eau chaude pour les plaies; il en fait fomenter la blessure d'Eurypile: mais s'il avait été nécessaire d'arrêter une hémorragie,[34] l'eau froide aurait été ce qu'il fallait, parce qu'elle coagule et resserre. Comme il s'agit là de calmer des douleurs, il fait fomenter avec de l'eau chaude, comme parégorique.....

[41c] Le mot liaros signifie chaud dans Homère ; c'est ce qu'il montre clairement en parlant des sources du Scamandre :

« Il coule d'une de ces sources une eau chaude, couverte d'une fumée aussi épaisse que s'il y avait un feu très ardent. »

Assurément l'eau est chaude lorsqu'il en sort une vapeur ignée et une fumée ardente mais il dit de l'autre source:[35]

« Ses eaux sont, en été, aussi froides que la grêle, ou la neige, ou l'eau glacée....»

[41d] Comme d'ailleurs, en parlant des blessures récentes, il a coutume de dire qu'elles sont baignées d'un sang chaud, thermon, il se sert aussi de la même expression au sujet d'Agamemnon blessé :

« Tandis qu'il sortait de sa blessure un sang chaud, thermon. »

En parlant d'un cerf qui s'enfuit après avoir été blessé, il interprète lui-même le mot liaros :

« Tant que son sang fut chaud, liaron, il remua les jarrets....»

Les Athéniens appelaient l'eau tiède metakeras, et c'est dans ce sens qu'Eratosthène emploie ce mot, pour marquer une substance aqueuse, tiède.....

15. Il y a diverses espèces d'eau. Homère appelle ténébreuses celles qui sortent des rochers, sans doute parce qu'on ne peut en user ; il préfère à toutes les autres celles [41e] qui coulent longtemps sur une terre fertile. C'est dans ce sens qu'Hésiode a dit :

« Il coule de la belle fontaine de Tilphose une eau aussi douce que le miel et que l'ambroisie. »

Tilphose est une fontaine de Béotie. Aristophane dit que Tirésias mourut pour en avoir bu, parce qu'il ne put en supporter la froideur, à cause de son grand âge.

Théophraste dit dans son traité des eaux, [41f] que celle du Nil[36] est très douce et très utile à la génération, mais qu'elle lâche le ventre, parce qu'elle est imprégnée de certaine quantité de nitre. Dans son traité des plantes,[37] il écrit qu'il y a des contrées où les eaux sont avantageuses à la génération, comme à Thespie, et d'autres où elles y sont préjudiciables, comme à Pyrrha : qu'entre les eaux douces, il y en a qui sont contraires à la nutrition,[38] ou au moins qui nourrissent peu, comme celles de Phéta et de Pyrrha. [42a] Il rapporte ailleurs qu'une grande sécheresse ayant régné le long du Nil, les eaux de ce fleuve en contractèrent une qualité vénéneuse qui fit périr beaucoup de monde en Egypte.

Selon lui, les eaux changent aussi de nature; ce qui arrive non seulement aux eaux amères, mais encore à celles qui sont séléniteuses, sans excepter même des fleuves entiers. Tels sont l'Asope, au pied du mont Cithéron, près duquel est un temple de Jupiter,[39] et un autre fleuve de Carie, près duquel est un temple de Neptune. La cause de ce changement est, dit-il, la foudre qui tombe souvent dans les environs.

16. Il y a des eaux qui ont quelque chose de matériel et de lourd, comme celles de Trézène. Ces eaux-ci semblent emplir la bouche à la seule dégustation. [42b] Celles qu'on trouve près des mines du Pangée, pèsent en hiver quatre-vingt seize drachmes le cotyle, et en été seulement quarante-six;[40] ce surcroît de poids vient de l'astriction et de la densité plus considérable qu'y produit le froid ; c'est aussi par cette même cause que les clepsydres[41] ne marquent plus les mêmes heures en hiver : ils les prolongent en conséquence du plus lent écoulement de l'eau : or, cette lenteur vient de la densité plus grande du liquide. Il en dit autant de l'Egypte, quoique l'air y soit plus doux.

 

CHAP. V. L'eau séléniteuse est plus terreuse que les autres, et d'une coction plus difficile : c'est ce que prouve l'eau de la mer, qui, quoique naturellement d'une qualité plus chaude,[42] ne s'échauffe pas sur le feu en même raison.

[42c] De toutes les eaux séléniteuses, celles du lac Aréthisse[43] est la seule à laquelle la coction n'ôte pas la moindre partie de sa dureté. En général, les eaux pesantes, dures et froides, sont plus mauvaises pour les mêmes raisons, et parce que les molécules terreuses, jointes à l'excès de leur froideur intrinsèque, en rendent la coction parfaite très difficile; celles, au contraire, qui s'échauffent aisément,[44] sont légères et salubres.

Il y a à Cranon une source modérément chaude,[45] et qui conserve pendant deux ou trois jours cette chaleur étant mêlée avec du vin. Les eaux qui coulent sur terre, ou dans des canaux, sont meilleures que les eaux stagnantes ; le mouvement continuel les atténue, leur donne de la légèreté; c'est pourquoi l'eau de neige[46] est fort salubre, [42d] parce que les molécules les plus potables de l'eau dont la neige est formée, ont été comme volatilisées dans l'atmosphère, où elles ont éprouvé le plus grand mouvement : c'est aussi par sa légèreté que l'eau de pluie et celle de la glace fondue sont des meilleures : car la glace[47] est toujours plus légère que l'eau dont elle est formée. Les eaux intrinsèquement froides, sont dures, à cause de leurs molécules plus terreuses.

Toutes les eaux qui ont plus de densité sont plus chaudes que les autres, lorsqu'une fois on les a chauffées ; mais une fois refroidies, elles sont beaucoup plus froides.

L'eau des montagnes est meilleure que celle des plaines, parce qu'elle contient moins de molécules terreuses.

Toutes les eaux qui ont plus de densité,[48] sont plus chaudes que les autres, lorsqu'une fois on les a chauffées ; mais une fois refroidies, elles sont beaucoup plus froides.

L'eau des montagnes est meilleure que celle des plaines, parce qu'elle contient moins de molécules terreuses. Ces eaux n'ont de couleur que par la teinte que leur donnent ces molécules : [42e] voilà pourquoi le lac de Babylone est rouge en certains jours, et le lac Borysthène violet en certaines saisons, quoique les eaux en soient extrêmement légères. En effet, elles coulent sur celle de l'Hypanis[49] à leur confluent : or, ce phénomène est dû à la légèreté qu'occasionne le souffle des vents du nord.

17. On trouve aussi dans plusieurs contrées des sources dont les eaux sont des meilleures, et en même temps comme vineuses : telle est celle de Paphlagonie, dont les gens du pays vont de temps à autre faire une petite débauche. Il y a chez les Sicaniens de Sicile des eaux muriatiques, et qui font en même temps sentir certaine saveur[50] acide. On voit dans le territoire de Carthage, une source, sur l'eau de laquelle flotte une substance semblable à l'huile, [42f] mais plus noire;[51] les gens du pays l'enlèvent par globules,[52] et s'en servent pour les maux de leurs bestiaux et de leurs bêtes de somme. Il y a encore de semblables sources huileuses dans d'autres contrées : telle est celle d'Asie, au sujet de laquelle Alexandre écrivit une lettre, disant qu'il avait découvert une source d'huile.

Parmi les eaux thermales, il en est de douces, comme celles d'Eges en Cilicie, des environs de Tragase, de Larisse en Troade, des environs de Magnésie, de Mélos, de Lipara,[53] des environs de Pruse, près du mont Olympe, et qu'on appelle royales. Il y en a aussi en Mysie, vers Tralles, près du fleuve Caracomète, aux environs de Nyssa, et qui sont si grasses, que ceux qui s'y baignent[54] n'ont pas besoin d'autre huile : telles sont aussi les eaux voisines du bourg de Dascyle ; mais les eaux thermales de Caroures sont très chaudes et sans aucune molécule onctueuse. On en trouve de fort nitreuses et même assez mordantes près du bourg de Men en Phrygie : [43b] telles s'ont aussi celles du bourg du Lion, dans la même contrée ; mais les eaux thermales des environs de Dorylée, sont très agréables à boire. Quant à celles de Baïes en Italie, elles ne sont pas potables.

18. J'ai pesé[55] les eaux de la fontaine Pirène de Corinthe, et j'ai trouvé qu'elles sont beaucoup plus légères que toutes celles de la Grèce ; je n'en ai pas cru Antiphane, qui, mettant l'Attique au-dessus de toutes les autres contrées, la vante surtout pour l'excellence de ses eaux. Voici ce qu'il dit :

« Hipponique, par quel nombre d'excellentes productions ce pays ne l'emporte-t-il pas sur toute la terre! [43c] miel, pain, figues; et quelles figues, bon dieu! brebis, laine, baies de myrte, viande, fromage, tout est excellent. L'eau y est d'une qualité si supérieure, qu'il me suffit de la goûter pour dire qu'elle est de l’Attique.... »

 

CHAP. VI. Eubule dit que Chérémon le tragique a appelé l'eau corps du fleuve ; voici le passage :

« Lorsque nous eûmes passé au-delà des parcs de brebis, et traversé l'eau, corps du fleuve (potamou[56] soma)....»

Toute notre substance est abreuvée et nourrie d'eau, a dit quelqu'un.....

Il y a à Tenos une source, avec l'eau de laquelle le vin ne se mêle point... Hérodote dit dans son quatrième livre que l'Hypanis est fort petit près de sa source ; que l'eau y est douce, et continue de l'être pendant cinq journées de chemin ; [43d] mais qu'elle devient ensuite amère pendant quatre journées, par le confluent d'une eau amère qui s'y jette.....

Théopompe rapporte que près du fleuve Ergane, il y a une eau acidulé qui enivre ceux qui en boivent, comme ceux qui boivent du vin.....

19. Aristobule de Cassandrie, assure que l'eau de la fontaine d'Achille, au territoire de Milet, est très douce, et que cependant elle dépose un sédiment muriatique. Les Milésiens disent que c'est dans cette eau que se purifia Achille lorsqu'il eut tué Strambelus, roi des Lélèges.

[43e] On dit qu'il y a en Cappadoce une grande pièce de très belle eau, qui ne se corrompt pas, quoi qu'elle n'ait point d'écoulement, à moins que ce ne soit sous terre.....

Ptolémée, roi d'Egypte, dit dans le septième livre de ses commentaires : « En approchant de Corinthe par un endroit appelé Contoporie, nous montâmes à la cime de la montagne, et nous y vîmes une source dont l'eau était plus froide que la neige. Plusieurs d'entre nous n'en voulurent pas boire, de crainte d'en être glacés ; mais moi j'en bus.... »

[43f] Philarque dit qu'il y a dans le territoire de Clitore, une source, dont l'eau (lorsqu'on en a bu) donne une aversion décidée pour l'odeur du vin.....

Selon Cléarque, on dit de l’eau blanche, comme on dit du lait blanc, du vin rouge, du nectar rouge, du miel jaune, de l'huile jaune, et comme on dit qu'un mélange de parfums triturés ensemble est noir...

Eubule dit que les buveurs d'eau sont inventifs, et que le vin obscurcit l'imagination.

Philétas a dit la même chose en vers iambes.....

.20. .... Après avoir ainsi disserté en rhéteur sur l'eau, il reprit un peu haleine, et recommença ainsi :

[44a] . Amphis le comique a dit quelque part :

« Il semble qu'il y ait de la raison dans le vin ; en effet, plusieurs ne buvant que de l'eau, sont comme des corps sans âme. »

Antiphane a dit:

« Il faut dissiper le vin par le vin, la fatigue par la fatigue, opposer trompette à trompette, crieur à crieur, bruit à bruit, courait sane à courtisane, arrogance à arrogance, sédition à sédition, combat à combat, un pugile à des coups de poings, [44b] la douleur à la douleur, procès à procès, et femme à femme.... »

Les anciens employaient aussi le mot (akraton) sans mélange, en parlant de l'eau, comme Sophron :

« De l'eau sans mélange (akraton), dans une coupe....»

21. Phylarque nous apprend que Théodore de Larisse, toujours indisposé contre le roi Antigone, était un buveur d'eau. Il dit aussi que les Ibériens, quoique les plus riches des hommes, ne buvaient tous que de l'eau, mangeaient seuls par épargne, tandis qu'ils portaient les habits les plus somptueux.....

[44c] Aristote, ou Théophraste, rapporte qu'un certain Philinus n'avait de sa vie pris d'autre aliment solide ou fluide que du lait... Pytherme compte Glaucon, buveur d'eau ; parmi les tyrans[57] qui ont demeuré au Pirée. Hégésandre de Delphes, dit qu'Anchimolus et Moschus, sophistes qui ont enseigné à Elide, n'avaient bu que de l’eau toute leur vie, ne mangeant non plus que des figues : que néanmoins ils étaient très robustes; mais leur sueur sentait si mauvais, que tout le monde les évitait au bain. Matris d'Athènes [44d] ne mangea toute sa vie[58] que quelques baies de myrte;[59] il s'abstenait de vin et de toute autre boisson, excepté l'eau. Le musicien Lamprus fut aussi un buveur d'eau ; Phrynicus dit à son sujet:

« Lamprus, le buveur d'eau, étant mort parmi les Mouettes,[60] elles le pleurèrent. C'était un admirable Fausset, le squelette des Muses, la fièvre[61] des Rossignols, le chantre du Tartare. »

Macon le comique fait mention d'un buveur d'eau nommé Moschion.

22. Aristote dit, en traitant de l’ivresse,[62] que quelques personnes, entre autres Archonide d'Argos, restaient sans avoir soif en prenant des aliments salés. [44e] Magon de Carthage a traversé trois fois le désert aride,[63] vivant de farine seule, et sans boire. Polémon, philosophe de l'académie, se mit à trente ans à ne boire que de l'eau, et continua jusqu'à sa mort, comme le rapporte Antigone de Caryste. Démétrius de Scepse dit que Dioclès de Péparèthe ne but que de l'eau froide jusqu'à sa mort. L'orateur Démosthène[64] est sans doute un témoin croyable lorsqu'il parle de lui-même : il dit que pendant certain temps il n'a bu que de l'eau. C'est pour cette raison, sans doute, [44f] que Pythéas disait aux Athéniens : voyez combien vos deux démagogues, Démosthène et Démade, mènent une vie contraire : Démosthène ne boit que de l'eau, dit-on, et passe les nuits à réfléchir, tandis que Démade, qui ne vit qu'avec des prostituées, et toujours dans l'ivresse, ne vient à vos assemblées que pour y promener son énorme panse....

Euphorion de Chalcide rapporte quelque part le fait suivant : « La nécessité de boire n'était pas non plus indispensable pour Lasyrtas de Lasione, comme elle l'est pour les autres hommes ; cependant il urinait comme tout le monde. [45a] Des curieux, qui ne pouvaient le croire sans en être témoins, entreprirent de l'observer. Ils passèrent donc trente jours d'été à observer cet homme : voyant qu'il ne s'abstenait même pas de choses salées,[65] et qu'il avait là son pot-de-chambre, ils ne doutèrent plus de la vérité ; ce n'est pas qu'il ne bût quelquefois, mais il n'en avait pas plus besoin pour cela......»

Antiphane dit :

« Qu'il est agréable de changer de différents mets, et de goûter de quelque chose de nouveau, lorsqu'on a déjà bien mangé. C'est, dit le proverbe, doubler le plaisir de la table. »

Le roi de Perse, dit Hérodote dans son premier livre, [45b] se fait apporter du Choaspe,[66] l'eau dont il use. Ce fleuve passe au pied des murs de Suse, et c'est la seule eau dont il boit : on la fait d'abord bouillir, et des mulets l'amènent dans des flacons d'argent sur plusieurs chariots à quatre roues. Ctésias de Cnide nous apprend, dans son histoire de Perse, comment on fait bouillir cette eau, et comment on la met dans ces vaisseaux pour la mener au roi. Il assure qu'elle est très légère et très agréable.

[45c] Ptolémée II, surnommé Philadelphe, ayant marié sa fille Bérénice avec Antiochus, roi de Syrie, eut toujours soin d'envoyer de l'eau du Nil à cette princesse, sa fille, afin qu'elle n'en bût pas d'autre, comme le rapporte Polybe.

Héliodore nous dit qu'Antiochus Epiphanes, (et que Polybe appelle Epimanes, à cause de ses atrocités) fit jeter du vin dans une fontaine d'Antioche.

Midas, roi de Phrygie, avait fait la même chose avant lui, selon Théopompe, dans le dessein d'enivrer Silène, et de s'en saisir. Cette fontaine s'appelle Inna,[67] dit Bion, qui la place entre le pays des Maides et celui des Pæoniens.

Staphyle[68] dit que c'est [45d] Melampus qui imagina le mélange de l'eau et du vin.

Mais Plistonicus pense que l'eau fait mieux digérer que le vin.

24. Il ajoute que, quand on commence le repas par boire largement, on se dérange l'estomac, ou plutôt on le met dans un état vraiment malade, de sorte qu'il ne fait qu'une masse putride des aliments qu'il reçoit. Celui qui veut se bien porter, doit donc prendre quelques exercices modérés pour se faire bien suer, ensuite un bain, afin d'humecter et de relâcher les solides : après cela qu'il boive de la meilleure eau, lé plus souvent chaude en hiver et au printemps, et fraîche en été, [45e] afin de ne pas affaiblir l'estomac; mais il faut en prendre avec certaine mesure : elle aura ainsi le temps de passer dans toute l'habitude du corps et empêchera la vertu irritante du vin de se faire sentir sans mélange à l'extrémité des vaisseaux, et d'y causer[69] une astriction violente.

 

CHAP. VII. Si quelqu'un de nous ne s'accommode pas de bonne eau froide ou chaude, qu'il commence par boire du vin doux,[70] bien trempé et chaud, surtout de ce vin doux de Lesbos, de la première goutte (potrope), qui est si bon pour l'estomac. Hippocrate assure que le vin doux n'appesantit pas la tête ; le livre où il le dit a plusieurs titres : [45f] les uns l'intitulent de la diète[71] dans les maladies aiguës, les autres de la tisane, quelques-uns enfin, contre les sentences de Cnide ; mais voici ce qu'il dit.....

Le vin doux appesantit moins la tête que celui qui est vineux (liquoreux), et affecte moins le cerveau : il passe mieux par les premières voies.....

Quand vous porterez une santé à quelqu'un, dit Posidonius gardez-vous de le faire comme les Carmaniens. Pour se marquer une affection sincère dans leurs festins, ils s'ouvrent la veine[72] du front, et mêlant leur sang avec le vin, ils se présentent la coupe ; c'est pour eux la preuve [46a] de la plus parfaite amitié, que de boire réciproquement de leur sang. Après cette boisson, ils se frottent la tête de quelque onguent, surtout de celui de roses, ou de coings, s’ils n'en ont pas de roses, afin de modérer un peu l'effet du vin ; et ils empêchent ainsi ses fumées de devenir nuisibles. Au défaut de ces onguents, ils usent de ceux d'Iris ou de Nard. Alexis a donc dit avec raison :

« Il se frotte les narines d'onguents odoriférants : ces émissions agréables qu'il se porte au cerveau, contribuent beaucoup à sa santé. »

25. Mais il faut éviter les onguents épais, et ne boire que de l'eau légère, limpide, en un mot celle qui pèse le moins à la balance,[73] [46b] et qui ne contient pas de molécules terreuses.

Celle qu'on a médiocrement chauffée, et qu'on laisse refroidir dans un vaisseau d'airain ou d'argent, est salubre, lorsqu'elle n'y laisse aucune tache[74] érugineuse. Hippocrate dit que l'eau qui s'échauffe et se refroidit promptement, est toujours plus légère. Celle dans laquelle les légumes sont longtemps à cuire, est insalubre. Il en est de même des eaux sélénitiques et muriatiques. Hippocrate dit dans son traité de l’usage des liquides, que l'eau bonne à boire[75] est la meilleure pour l'usage de la médecine.

Il dit dans son traité de l’air, des lieux et des eaux : il y a des eaux dormantes, malsaines,[76] comme celles des étangs et des marais : les eaux de fontaines[77] sont la plupart trop crues.

[46c] Erasistrate observe qu'on ne peut connaître la légèreté de l'eau à la balance. En effet, dit-il, comparez celle de la fontaine d'Amphiaraüs et d'Erétrie à la balance, vous n'aurez aucune différence pour le poids ; cependant l'une est fort insalubre, et l'autre vraiment bonne.

Hippocrate ajoute dans le même traité des lieux, de l'air et des eaux : Les meilleures eaux sont celles qui viennent de quelque endroit très élevé, en roulant sur des coteaux terreux;[78] elles sont ordinairement belles, douces : la moindre goutte de vin qu'on y verse s'y fait sentir; d'ailleurs ces eaux sont chaudes en hiver, et froides ou fraîches en été.

[46d] Hippocrate préfère les sources dont les eaux coulent à l'Orient,[79] surtout à celui d'été, parce qu'elles sont limpides, légères, et flattent l'odorat.

Dioclès dit que l’eau est digestive, ne produit pas de flatuosités, rafraîchit modérément, rend la vue perçante, n'appesantit point la tête, et donne de l'activité au corps et à l'âme.[80] Praxagoras est du même avis, mais il loue l'eau de pluie. Evénor préfère celle de citerne, et dit que l'eau de la fontaine d'Amphiaraüs est excellente en comparaison de celle d'Erétrie.

26. On doit convenir que l'eau est nourrissante, [46e] puisque certains animaux ne vivent que d'eau, comme les cigales. Parmi les autres fluides, il en est aussi plusieurs qui sont nourrissants, comme le lait, la tisane (décoction d'orge) et le vin. Les animaux qui tètent, vivent de lait seul; plusieurs nations n'ont même que ce fluide pour aliment.....

On dit que Démocrite[81] étant fort âgé, voulut enfin quitter la vie ; pour cet effet il retranchait tous les jours quelque chose de sa nourriture. Les fêtes de Cérès étant arrivées, [46f] les femmes de sa maison, qui voulaient faire la fête, le prièrent de prolonger sa vie de quelques jours ; il y consentit, en leur disant de mettre près de lui un pot de miel, et il vécut encore un peu, sans autre nourriture que l'odeur du miel qu'il se portait au nez. La fête étant finie, on ôta le pot de miel, et il mourut. Démocrite avait aimé le miel toute sa vie. Quelqu'un lui demandant un jour ce qu'il fallait faire pour jouir d'une bonne santé : « Humectez, lui dit-il, l'intérieur avec du miel, et le dehors avec de l'huile. »

La nourriture des Pythagoriciens était, [47a] selon Aristoxène, du pain et du miel ; et, selon lui, ceux qui ne mangeraient que de ces aliments à dîner se porteraient toujours bien. Lycus dit que les Corses (voisins de la Sardaigne,) vivent longtemps, parce qu'ils font un usage continuel du miel, qui est très commun chez eux.....

Tout le monde[82] ayant remis cette question à un autre temps....

27. Or, remarquez ici le mot anatithemenoon au génitif pluriel, dans le sens de remettre, pour anaballomenoon, renvoyant....

Anestis, qui est à jeun, est encore ici pour neestis, en faisant précéder un a, comme on dit astachys, épi, pour stachys. C'est ce qu'on voit dans ce vers de Cratinus :

« Tu n'es pas le premier qui viens souper à jeun : aneestis. »

[47b] Diphile s'est servi du mot oxypeinos, affamé, dans le sens de curieux :

« J'ai du plaisir à voir ces curieux déguenillés, vouloir tout savoir avant le temps : oxypeinous. »

Antiphane le prend dans le sens littéral...

« A. Il n'a qu'une maladie, c'est d'être toujours affamé. » B. C'est sans doute d'un Thessalien dont tu me parles? >»

 

CHAP. VIII. On le lit aussi dans Eubule.

« Il ordonne à Zéthus d'aller demeurer dans ce bon pays de Thèbes; car, lui dit-il, tu es homme de bon appétit (oxypeinos) :or, le pain y est à bon marché. [47c] Quant au musicien (Amphion) célèbre, il lui ordonne de passer à la fameuse ville d'Athènes, car les enfants de Cécropides ne sont pas facilement affamés, puisqu'il leur suffit d'humer l'air, et de se repaître d'espérances.... »

28. On lit dans Alexis, monositoon, mangeant une fois.

« Quand vous voyez un bourgeois ne manger qu'une fois par jour, monositounta, et ne plus vouloir entendre ni poète, ni vers, ni chansons, soyez sûr que le premier a perdu la moitié de sa fortune, l'autre la moitié du profit de son art, et qu'ils ne font plus que vivoter. »

[47d] Platon le comique a dit :

« Il ne se contente pas d'un seul repas ; mais quelquefois il fait deux soupers dans un jour....»

On appelait noogaleumata, tout ce qui peut affriander. Araros a dit en ce sens :

» Voilà de jolies friandises! noogaleumata. »

On lit dans Alexis :

« Il passe le reste de la journée à s'arroser dé petit vin de Thase, et il le savoure avec friandise : noogalizei. »

Antiphane dit :

« Des raisins, des grenades, des dattes, et autres friandises.... »

[47e] Philonide a dit aposite[83] autosite, et Créôntile, parasite autosite ; le premier signifie, qui mange retiré et à ses frais ; le second, qui mange chez autrui, mais ce qu'il y a porté pour soi.

On lit dans Eupolis anaristeete, qui n'a pas dîné, et dans Cratis, anancosite,[84] qui mange ou qui fait manger forcément. Nicostrate a employé le verbe anancositein dans ce passage :

« Ayant trouvé par hasard un jeune homme couché a terre» enveloppé de son manteau, et ayant une petite tonsure, je l'ai fait manger forcément....»

Le mot aristodeipne, dîner-souper, ou repas qui tient lieu de deux, se lit dans Alexis :

« Après quoi, on nous apprêtera promptement un aristodeipne.... »

29. ......Nous nous levâmes ensuite, et chacun se coucha à table comme il voulut, sans attendre le maître des cérémonies, qui assigne les places aux convives.....

[47f] Les anciens avaient des salles à trois,[85] quatre, sept, neuf lits, et même davantage, selon le nombre des convives.

Antiphane a dit:

Je vous ai mis ensemble dans la salle à trois lits. »

Phrynicus dit:

« Il y avait une belle salle à sept lits, et de suite, une à neuf. »

Eubule dit :

« A. Arrangez la salle à sept lits : la voici cette salle. Couvrez-y cinq lits à la Sicilienne. B. Est-ce là tout? A. Mettez-y cinq coussins de Sicile....»

On lit dans Amphis :

[48a] « Ne couvrirez-vous donc pas les lits dans la salle à trois...? »

 

CHAP. IX. Anaxandride écrit:

« Sur le champ on couvrit le lit dans la salle à trois, et l'on amena des musiciens[86] aux vieillards....

« Çà, ouvrez la chambre des hôtes,[87] balayez les salles, couvrez les lits, faites bon feu, prenez le cratère, et mêlez-nous du meilleur vin....»

30. Aujourd'hui, dit Platon le philosophe, on divise en deux espèces tout ce qu'on appelle Stromates ; l’une (peribole)y comprend tout ce qui sert à nous vêtir ou envelopper; l’autre, tout ce que nous étendons sous nous (hypobole.).....

Platon le comique a dit :

[48b] « Ils se couchent et dorment sur des lits à pieds d'ivoire[88] couverts de pourpre, et même d'écarlate[89] de Sardes....»

L'art de varier le tissu et la couleur des étoffes surtout, fleurit du temps d'Akésas et d'Hélicon de Chypre. Hiéronyme croit qu'Akésas était père d'Hélicon. En effet, on lit sur un ouvrage de sa main, dans le temple de Delphes :

« Hélicon de Salamine, fils d'Akésas, m'a fait. La déesse Minerve avait mis dans leurs mains une industrie divine, »

Pathymias d'Egypte n'a pas moins excellé.....

« Que j'ai de plaisir à sauter à Taise sur des tapis [48c] qui exhalent le parfum de la rose, et à me laver, pour ainsi dire, dans les larmes de baumes exquis! disait Éphippus

On lit dans Aristophane:

« O vous, qui passez les nuits sur des tapis parfumés, en cédant[90] avec délices aux agaceries de votre amie!...

Sophron a dit :

« Des tapisseries qui représentaient des oiseaux, et de grand prix.»

Homère, ce poète admirable, appelle lita tous les tapis que nous étendons sous nous, c'est-à-dire, blancs, simples, non teints, et où l'on ne voit pas de différents dessins ; mais ce qui sert à nous couvrir et à nous envelopper, il l'appelle rheegea, étoffes, ajoutant les épithètes de belles, de couleur pourpre.

31. Les Perses, dit Héraclide, [48d] curieux que leurs lits fussent bien parés et mollets, ont eu les premiers des gens destinés à ce service. Phanias le péripatéticien, nous apprend que Timagoras de Crète, ou Entimus de Gortyne, étant allé, par jalousie contre Thémistocle, à la cour du roi de Perse, Artaxerxès, qui l'estimait, lui fit présent d'un grand et superbe pavillon, d'un lit à pieds d'argent, avec sa garniture très riche ; mais en le lui envoyant, ce prince lui envoya aussi un officier pour lui faire son lit, disant que les Grecs n'y entendaient rien. Ce Crétois était aussi invité à dîner à la table des parents[91] du roi, pour l'amuser de sa conversation : [48e] honneur qui n'avait jamais été accordé à un Grec, et qui ne l'a pas été depuis. Timagoras d'Athènes ne l'a pas eu, quoi qu'il eût adoré le roi, et que, pour cette raison, il lut en grande considération à la cour de Perse : le roi lui envoyait seulement quelques-uns des plats de sa table. Il envoya à Antalcide de Lacédémone, sa couronne trempée dans des parfums; mais outre qu'il faisait souvent de pareils honneurs à Entimus, il l'admettait encore à la table des princes du sang: [48f] les Perses en prirent de l'ombrage, parce qu'ils croyaient que c'était avilir cet honneur, et que le roi songeait à faire une seconde expédition contre la Grèce.

Il donna donc à ce Crétois un lit à pieds d'argent, avec sa garniture, un pavillon avec un ciel parsemé de fleurs, un fauteuil d'argent, un parasol garni d'or en lames, des coupes d'or, ornées de pierres précieuses, cent grandes d'argent, des cratères d'argent, cent jeunes filles, autant de jeunes garçons, six mille pièces d'or, [49a] sans ce qu'on lui fournit tous les jours pour sa dépense, et cent tables d'érable à pieds d'ivoire.

32. Cratinus fait mention de

« Tables d'érable à trois pieds. »

 

CHAP. X. Un des Cyniques ayant, dans ce moment, appelé une table trépied, Ulpien, qui était près du sophiste, trouva l'expression mauvaise : Je crois, dit-il, que je vais avoir une affaire aujourd'hui pour n'avoir rien à faire. Où cet homme va-t-il nous chercher un trépied![92] il compte apparemment le bâton de Diogène et ses deux pieds : voilà ce qu'il appelle trépied ; [49b] tandis que tout le monde appelle ces tables trapèzes. »

Le Cynique lui répondit: « Hésiode, dans les noces de Ceyx, (car vos grammairiens ont beau déclarer ce poème un enfant bâtard, je soutiens qu'il est des plus anciens) ; Hésiode, dis-je, appelle les tables des trépieds ; et l'harmonieux Xénophon ne parle pas autrement, au livre 7 de son Anabasis... On apporta, dit-il, à chacun un trépied; il y en avait environ vingt chargés de viandes, toutes partagées. Il ajoute peu après : C’était surtout aux étrangers qu'on donnait des trapèzes, ou des tables à quatre pieds. Antiphane dit aussi trépied pour table.

[49c] « Lorsqu'on eut ôté le trépied, et qu'on nous eut donné l'eau pour les mains. »

Eubule a dit de même :

« A. Tenez, voilà cinq trépieds et cinq.....B. Ma foi, je serai bientôt penteekoslologe.[93] »

On lit dans Epicharme :

« A. Qu'est-ce que cela? B. Un trépied, sans doute. A. Un trépied! mais il a quatre pieds : c'est donc un quatre pied, et non un trépied. B. Mais on l'appelle trépied, quoiqu'il ait quatre pieds. Quoi, tu passais pour un Œdipe, et tu n'entends plus les énigmes!....»

Aristophane dit :

« A. Apporte-nous un trapèze (une table) [49d] à trois pieds; prends garde qu'elle n'en ait quatre. B. Où prendrai-je donc un trapèze à trois pieds?... »

33. ..... Quand on était à table, on avait coutume de présenter à celui qui traitait,[94] la carte de tous les mets, afin qu'il sût ce que le cuisinier devait servir.....

Prunes de Damas.

Plusieurs anciens ont fait mention de Damas, comme d'une grande et fameuse ville. C'est dans son territoire qu'on cultive avec les plus grands succès les coccymèles,[95] [49e] ou prunes que l'on appelle particulièrement prunes de Damas, parce qu'elles sont assez différentes de celles qui viennent ailleurs. Voilà donc ces coccymèles dont plusieurs ont parlé, entre autres Hipponax :

« J’avais une couronne de coccymèles et de menthe. »

Alexis a écrit :

« A. J'ai rêvé que je voyais le prix de la victoire. B. Qu'est-ce que c'est? A. Écoute-moi donc. Il me semblait qu'étant dans le stade, un de mes antagoniste» venait me mettre sur la tête [49f] une couronne cyliste[96] de rameaux de prunes de Damas. B. En vérité! A. Et même bien mûres.... »

Il dit encore ailleurs :

« As-tu quelquefois vu une caillette[97] bien apprêtée, ou une rate grillée et largement épicée, ou un panier de damas bien mûres? Eh bien! voilà la mine de cet homme-là. »

Nicandre a dit :

« La pomme qu'on appelle de coucou (pour coccymèle). »

Cléarque le péripatéticien, remarque que les Rhodiens et les Siciliens appellent les coccymèles (ou prunes de Damas) Brabyla.[98] C'est ainsi que Théocrite a dit :

[50a] « Les branches étaient baissées jusqu'à terre par la charge des Brabyles. »

Il dit ailleurs :

« Autant la pomme est plus agréable que le Brabyle. »

Mais c'est un fruit d'un volume un peu moindre que la prune de Damas : la saveur est la même, quoi qu'un peu plus acide.

Seleucus dit dans ses gloses, que ces mots brabyla, eela, coccymeela et madrya, désignent le même fruit; que madrya est pour meelodrya; que brabyla a été formé de bora et de ballein, parce que ce fruit lâche et fait sortir le superflu des aliments ; qu’eela est pour meela, selon Démétrius Ixion, dans ses étymologies.

Théophraste appelle [50b spodias[99] les prunes de Damas ; mais la prune qu'il désigne est un Damas sauvage. Araros appelle l'arbre coccymeelea, et le fruit coccymeelon. Diphile de Siphne, dit que le Damas n'a qu'un suc médiocrement bon, qu'il s'altère[100] facilement, passe de même, et nourrit peu.

 

34. CHAP. XI.

Cerises.

Théophraste dit dans son traité des plantes, le cerisier est un arbre d'une espèce particulière : il vient même fort grand, et s'élève quelquefois jusqu'à la hauteur[101] de vingt-quatre coudées; sa feuille est semblable à celle du néflier, mais elle est dure et plus épaisse.[102] Il a l'écorce analogue à celle du tilleul, la fleur blanche [50c] comme celle, du néflier et du poirier. Cette fleur est composée de plusieurs pétales, qui ont l'odeur de la cire;[103] le fruit est rouge, de la forme du diospyre,[104] et de la grandeur d'une fève ; mais le noyau du diospyre est fort dur, au lieu que celui de la cerise fait peu de résistance.

Alisier.

Théophraste[105] nomme Krataigos, ce que d'autres appellent kraitaigon : il a la feuille lisse, semblable au néflier, quoique plus large et plus allongée : elle est même différemment découpée. L'arbre ne vient ni grand, ni fort ; [50d] le bois est de couleur jaune, un peu madré, et dur; l'écorce est lisse comme celle du néflier : il n'a, en général, qu'une racine qui pénètre avant. Le fruit est rond, de la grosseur d'une olive sauvage ; lorsqu'il est mûr, il a une couleur d'un jaune noirâtre, la saveur et le suc de la nèfle ; de sorte que cet arbre pourrait passer pour un néflier sauvage. D'après ces détails, il me semble que le philosophe décrit ce que l'on appelle actuellement cerisier.[106]

Cerisier nain.

Asclépiade de Myrlée, nommant un arbre chamaicérase, en parle ainsi : Le chamaicérase[107] croît en Bithynie : l'arbre est petit, [50e] de même que la racine ; il est de la hauteur d'un rosier. Du reste, le fruit est semblable à la cerise : ceux qui en mangent beaucoup, éprouvent une pesanteur, de la douleur de tête, comme il arrive avec le vin.

Il me paraît que cette description d'Asclépiade, dit Athénée, comprend l'arbousier : car l'arbre[108] qui produit les arbouses est tout-à-fait semblable, et d'ailleurs celui qui mange plus de sept de ces fruits-ci, est pris de mal de tête.

Arbouses.

Aristophane dit :

« Les arbouses croissent[109] spontanément en grand nombre sur les montagnes. »

Théopompe a dit:

« Ils mangent des fruits de myrte et d'arbousier bien mûrs. »

On lit dans Cratès :

« Elle est ma foi bien nubile, car elle a [50f] la gorge ronde comme une pomme, ou comme des arbouses. »

Amphis dit:

« Le mûrier porte des mûres, comme tu vois, l'yeuse des glands, et l'arbousier[110] (komaros) des arbouses. »

Théophraste écrit l'arbuste (komaros) qui porte l'arbouse bonne à manger[111].....

.....On est incertain de l'auteur de la pièce satirique qui a pour titre Agen.[112] Est-ce Python de Catane, ou de Byzance, ou même le roi Alexandre?...

Cerises..... Larensius parle ainsi dans notre Rhéteur:[113] « Vous autres Grecs, vous vous attribuez beaucoup de choses, soit comme les ayant nommées, soit comme les ayant trouvées ; vous ignorez sans doute que Lucullus, général des armées Romaines, [51a] après avoir vaincu Mithridate et Tigrane, est celui qui apporta le premier ce végétal de Cérasonte en Italie, et qu'il le nomme Cerasum,[114] du nom de cette ville. C'est cependant ce qu'attestent nos historiens. »

Daphnus lui répartit : Mais Diphile de Siphne, homme très renommé, et qui a vécu[115] nombre d'années avant Luculle, c'est-à-dire, sous Lysimaque, un des successeurs d'Alexandre, fait mention des cerises, en disant : Les cerises sont stomachiques, d'un bon suc, mais peu nourrissantes : prises après avoir été trempées [51b] dans l'eau froide, elles ont une saveur fort agréable; mais on préfère celles qui sont plus rouges, et celles de Milet, parce qu'elles sollicitent les urines.

36. Mûres.

Les Alexandrins seuls appellent mûres (mora,) un fruit que les autres Grecs appellent généralement sycamines ; mais je n'entends pas ici les sycamines[116] qui viennent d'un figuier d'Egypte, et dont quelques-uns appellent le fruit sycomore. Les habitants déchirent la peau de ce fruit-ci avec un ongle de fer, et le laissent ainsi sur l'arbre ; agité par le vent, et surtout par le soufle des zéphyrs, il s'attendrit en trois jours,[117] [51c] au point de devenir comestible, et acquiert une odeur très agréable. Les principes rafraîchissants qu'il contient, appliqués alors en cataplasme avec de l'huile rosat, sur l'estomac des fébricitants, procurent beaucoup de calme à ces malades; mais ce figuier d'Egypte porte son fruit sessile, ou tenant au bois même, et sans pédicule.

Quant aux sycamines ou (mures) Eschyle en fait mention dans ses Phrygiens, où il s'agit du rachat d'Hector:

« Cet homme était plus tendre[118] que des mûres (moroon). »

Il dit dans ses Crétoises, au sujet de la ronce :

[51d] « Elle est en même temps chargée de mûres blanchâtres, de rouges, et de toutes noires. »

Sophocle a dit :

« Vous verrez d'abord fleurir l'épi (axillaire[119]) blanc, ensuite la mûre prendre sa forme ronde, et rougir. »

Nicandre, dans ses Géorgiques, fait observer que la mûre est, de tous les fruits[120] des arbres, celui qui paraît le premier, et il appelle l'arbre moree, comme les Alexandrins :

« Et le mûrier, dit-il, qui devient le moyen de calmer les enfants, [51e] et annonce, le premier, aux mortels les charmes de l'automne.»

 

37. CHAP. XII. Phanias d'Érèse, disciple d'Aristote, appelle aussi mûres le fruit de la ronce, ou sycamine sauvage : ce fruit, dit-il, est aussi fort doux et très agréable quand il est bien mûr. Voici donc ce qu'il en dit:

« Lorsque la pulpe sphérique sycaminoïde s'est desséchée, la mûre sauvage ne contient plus que les pépins spermatiques, sycaminoïdes, destinés à la reproduction,[121] et comme ensanglantés. On les trouve séparés par des cloisons, les unes friables, les autres d'un bon suc. »

[51f] Parthénius appelle abryna les sycamines, que d'autres nomment mûres. Salmonius dit que celles de la ronce sont les mêmes. Démétrius Ixion assure que les mures et les sycamines ne sont qu'un même fruit ; qu'on les a appelées mora pour hœmorroa, (coulantes de sang,) et sycamines, comme pour dire sycoon ameinoo, (meilleures que des figues.)

Diphile de Siphne, médecin, en écrit ceci : Les sycamines, qu'on appelle aussi mûres, ont un suc assez bon, vont bien à l'estomac, nourrissent légèrement, et passent bien. Si on les mange un peu vertes, elles ont la propriété de chasser les vers.....

[52a] ????

38. Noix.

Les écrivains d'Athènes appellent karya, tous les fruits, acrodrys; mais Epicharme dit comme nous, et spécialement:

[52b] « Les noix, les amandes sont des friandises sèches et sonores.[122] »

Philyllius a écrit :

« Les œufs, les noix, les amandes. »

Héracléon d'Éphèse dit qu'on appelait karya, noix, les amandes, et nos châtaignes actuelles....

Sophocle appelle le noyer karya, et dit au pluriel des noyers (karyai), des frênes. Eubule a dit :

« Des hêtres, des noyers, des noisetiers. »

Il y a une sorte de noisette (karya, ici) qu'on appelle noix de Præneste[123].....

39. Amandes.

Les amandes de Naxe ont été renommées chez les anciens elles sont réellement excellentes, comme je m'en suis convaincu, dit Athénée..... [52c] On lit dans Phrynicus :

« Il m'a fait sauter toutes les grosses dents, de sorte que je ne pourrais plus casser une amande de Naxe.[124] »

Il vient aussi de très bonnes amandes dans l'île de Chypre ; elles sont plus longues que les autres, et se courbent vers leurs, pointes.

Seleucus dit dans ses gloses, que les Lacédémoniens appelaient mukerous,[125] les grosses noix; (karya), que chez les Téniens, mukerous se disait des noix (karya) douces : mais le mot mukeros, selon Amerias, signifiait une amande.....

[52d] ...... Il n'y a rien qui excite plus à boire que de commencer le repas par manger des amandes : aussi Eupolis a dit :

« Donne, que je mange des amandes de Naxe, et verse-moi du vin des vignes de Naxe.... »

Il y avait une vigne qu'on appelait Naxienne...

Plutarque de Chéronée, dit que Drusus, fils de l'empereur Tibère, avait un médecin[126] qui l'emportait sur tous les buveurs. Mais on s'aperçut qu'il mangeait [52e] cinq ou six amandes amères avant de se mettre à table. On l'empêcha donc d'en manger, et il ne fut plus en état de soutenir une larme de vin. Ainsi, la cause était la vertu dessicative du principe amer: d'ailleurs, il absorbait ainsi les humeurs gastriques...,

Hérodien d'Alexandrie, dit que le mot amygdalee, vient de ce que ce fruit a beaucoup d'aspérités sur sa coque, sous la caloufe verte qui l'enveloppe. Or, cela s'exprime en grec par amychee.....

« Ane[127] que tu es! vas-t-en à la paille des desserts »

dit Philémon....».

On lit au second livre des Géorgiques de Nicandre,

« Une statue de Pan, de bois[128] de pheegos.....»

Il y a des écrivains qui font d'amygdala un nom neutre ; comme Diphile :

« Des friandises, des baies de myrte, des gâteaux, des amandes : amygdala. »

40.[Remarques sur les accents de ces mots, et que le lecteur peut passer.]

On ne convient pas de l'accent du mot amygdalee. Pamphile dit qu'il faut mettre l’accent sur la pénultiène, si l'on parle du fruit comme dans amydaloo : s'il s'agit de l'arbre, il faut un circonflexe sur la dernière, comme amydalêe, rhodêe (amandier) (rosier.)

C'est ainsi qu'Antiloque a dit :

« L'aimable fleur du rosier (rhodêes). »

[53a] Mais Aristarque met un accent aigu, tant sur le nom de l'arbre, que sur celui du fruit. Philoxène met le circonflexe sur tous les deux. Eupolis a dit quelque part :

« J'en jure[129] par l'amandier (amygdâleen). »

Aristophane a dit :

« Prends ces amandes (amygdalàs), et casse.....toi la tête avec une pierre! »

Phrynicus écrit :

« L'amande (amydâlee) est un bon remède pour la toux. »

D'autres écrivent avec un accent grave sur la dernière, amygdaleès, comme kalàs (belles).

Nous faisons le fruit neutre, amydalon, mais Triphon, dans son traité des accents attiques, le fait féminin, amygdâle, avec un aigu sur la pénultième. [53b] Quand il s'agit des arbres, il écrit amygdalêe, avec un circonflexe sur la dernière, parce qu'alors étant censé dérivé d'amydalee, amande, et regardé comme son possessif, il doit avoir un circonflexe.

 

CHAP. XIII. Selon les gloses de Pamphile, l'instrument à casser toute amande s'appelle, chez les Lacédémoniens, moukeerobate, au lieu d'amygdalocalacte ;[130] car ils appellent les amandes, moukeerous...

41. Nicandre fait mention des noix[131] du Pont, que quelques-uns appellent lopima. [53c] Hermonax et Timachide disent dans leurs glossaires, que la noix du Pont se nomme aussi gland de Jupiter[132].....

Héraclide de Tarente demande s'il faut servir les desserts[133] avant tout, comme on le fait dans quelques endroits de l'Asie et de la Grèce, ou les réserver au contraire pour la fin du repas? Si on les sert après le repas, comme on a déjà introduit beaucoup d'aliments dans l'estomac et les intestins, il arrive que les fruits à coquilles, qu'on ajoute pour s'exciter à boire, mêlés avec les aliments, causent des flatuosités et la putréfaction de ce qu'on a pris : [53d] en effet, ces fruits produisent naturellement certaine redondance, sont d'une coction difficile : de là résultent des indigestions, et des selles copieuses et réitérées...

42. Les amandes, dit Dioclès, sont nourrissantes, et amies de l'estomac; elles échauffent, parce quelles ont quelque principe stimulant au reste, les vertes font moins de mal que les sèches; celles qui ont trempé dans l'eau, moins que celles qui n'y ont pas trempé ; et les grillées, moins que les crues.....

Les noix d'Héraclée, qu'on appelle aussi glands de Jupiter, ne nourrissent pas comme les amandes ; [53e] elles ont d'ailleurs quelque âcreté, et causent de la redondance. Si l'on en mange beaucoup, il en résulte une pesanteur de tête ; mais les récentes causent moins de troubles que les sèches.

Celles de Perse[134] n'affectent pas moins la tête que les glands de Jupiter, mais elles sont plus nourrissantes : il est vrai qu'elles causent de la sécheresse à la bouche et dans la gorge ; cependant elles incommodent moins étant grillées. Mangées avec du miel, ce sont de toutes les noix celles qui passent le mieux.

Les noix[135] plates sont plus venteuses : bouillies elles incommodent moins que crues et grillées ; mais elles sont moins malfaisantes grillées que crues.

[53f] Philotime dit dans son Traité des aliments, que la noix plate, et celle de Sardes[136] sont de difficile digestion, étant crues; que d'ailleurs, enveloppées par les phlegmes de l'estomac, elles ne se dissolvent pas aisément, vu leur principe acerbe et réfractaire: quant à la noix du Pont:, elle est de nature huileuse, et par cela même difficile à digérer.

L'amande n'est pas si indigeste, et nous pouvons en manger certaine quantité sans en être incommodés, quoiqu'elle soit plus huileuse : elle fournit un suc onctueux et agréable.

[54a] Les noix royales, dit Diphile de Siphne, affectent la tête, et causent de la redondance. Celles qui sont mûres et bien blanches, ont un meilleur suc : aussi les trouve-t-on meilleures. On en rôtit au four ; mais elles nourrissent peu. L'amande, au contraire, atténue les humeurs, pousse les urines, relâche, est peu substantielle. Verte, elle a un mauvais suc, et nourrit encore moins ; sèche, elle est plus flatueuse, et plus sujette à causer une redondance : mûre, pleine, et d'un beau blanc de lait, elle a un meilleur suc. [54b] Mais celles de Thase[137] et de Chypre, bien mûres, sont de toutes les amandes sèches, celles qui passent le mieux. Enfin, dit Philotime, les noix du Pont causent des maux de tête, mais moins dé redondance que les noix royales.

43. Mnésithée d'Athènes dit dans son Traité des Comestibles, que la noix d’Eubée (ou châtaigne), car elle a ces deux noms) est d'une digestion difficile, et qui ne se fait même pas sans produire beaucoup de flatuosités ; mais qu'elle donné de l'embonpoint aux Constitutions assez fortes pour les digérer. Il ajoute que les amandes, les noix d'Héraclée, de Perse, et autres semblables, sont plus malfaisantes ; [54c] qu'il ne faut manger d'aucune de celles-ci sans les avoir soumises à l'action du feu, excepté les amandes toutes nouvelles. Il faut donc, selon lui, faire griller les unes, et bouillir les autres, parce qu'elles sont ou de nature onctueuse, comme les amandes sèches et les glands de Jupiter, ou de nature sèche et acerbe, comme les faines et toute autre analogue.

Quant à celles qui sont de nature onctueuse, le grillage les dépouille de leur principe gras, qui est ce qu'elles contiennent de plus mauvais : la coction, au contraire, amène au degré de maturité convenable celles qui sont de nature sèche et acerbe : cette coction doit se faire à feu modéré.

Diphile appelle les châtaignes glands de Sardes, et ajoute qu'elles sont très nourrissantes, d'un bon suc, [54d] mais difficiles à passer dans les secondes voies, vu leur trop longue résidence dans l'estomac. Celles qu'on fait rôtir sont en effet moins nourrissantes, mais elles digèrent mieux, et leur suc se distribue plus facilement : elles causent moins de flatuosités, bouillies, et fournissent plus de substance alimentaire que rôties. Nicandre dit dans ses Géorgiques:

« Les Eubéens appellent lopimon et karyon, ce que les autres appellent balanon (gland). »

Agéloque appelle les châtaignes amola; les noyers de Sinope ont aussi eu le nom d'amola dans les lieux où viennent les noix de Sinope.

[54e] 44. Pois chiches.

...... Crobyle en parle:

« Ils jetaient, comme en jouant au cottabe, un pois chiche pâle, qui n'avait absolument que la peau:[138] dessert bien fait pour quelque malheureux singe. »

Homère dit :

« Les fèves noires et les pois chiches sautent. »

On lit dans les Parodies de Xénophane de Colophone :

« Il fait bon, en hiver, devant un grand feu, sur un lit mollet, le ventre plein, en buvant un vin délicieux, et s'amusant d'un plat de pois chiches qu'on touche à peine ; il fait bon, dis-je, à demander de quel pays êtes-vous, mon ami? quel âge avez-vous? quelle taille aviez-vous quand les Mèdes prirent la fuite? »

 

[54f] CHAP. XIV. Sapho a dit :

« Les pois chiches, d'un jaune brillant, croissaient sur les rivages.»

Théophraste, dans son traité des Plantes, appelle certains pois chiches[139] kreious. Sophile a dit : Le père de cette femme est le grand kreios, le pois chiche. Phanias écrit dans son traité des Plantes : l'ochrus,[140] la fève, le pois chiche, dans la primeur, font partie des hors-d’œuvre ; mais lorsqu'ils sont secs, on les sert le plus souvent cuits à l'eau, ou grillés.

On lit dans Alexis :

« Nous sommes cinq en tous, mon mari qui est fort pauvre, [55a] moi qui suis vieille, ma fille, mon petit garçon et cette Bonne. Nous ne sommes que trois qui soupons : aux deux autres, nous donnons une portion de notre petite fouasse. Quand nous n'avons rien à manger, nous nous repaissons de nos larmes. Or, ces jeûnes ne peuvent que nous rendre bien pâles. Quant à la diversité de nos plats et à nos aliments, cela se réduit à des fèves, des lupins, des herbes, des raves, de l'ochrus, de la gesse, des faines, des bulbes, des cigales,[141] des pois chiches, des poires sauvages; mais un mets divin, et digne de la bouche de Cybèle, c'est la figue sèche, invention de la Phrygienne.... figue. »

[55b] Phérécrate a dit :

« Il ne te faudra qu'un instant pour faire cuire ces pois chiches. »

Et ailleurs:

« Il s'est étouffé en mangeant des pois chiches grillés. »

Diphile croit que le pois chiche, quoique difficile à digérer, est cependant détersif, diurétique, mais venteux. Selon Dioclès, il rend la chair œdémateuse ou bouffie. Les blancs et les jaunes sont préférables aux noirs; ceux de Milet, à ceux qu'on appelle ariétins, ou de bélier; les verts aux secs; ceux qui ont trempé dans l'eau, à ceux qui n'y ont pas trempé.

On attribue à Neptune la découverte des pois chiches.

[55c] 45. Lupins.

«... Périsse misérablement, avant la fin de l'année» celui qui a mangé les lupins, et qui en a laissé les cosses jonchées dans le vestibule, sans s'être étranglé en les avalant. Je suis bien sûr que ce n'est pas Cléænète[142] le tragique qui les a mangés; car il se garde bien de jeter la cosse d'aucun légume : c'est d'ailleurs un homme qui fait si adroitement ses coups! »

Lycophron de Chalcide dit, dans le Satyre qu'il a fait pour se moquer [55d] du philosophe Ménédème, auteur, de la secte d'Erétrie, et où il le berne sur ses soupers :

« Arrive ensuite un large plat de lupins, régal ordinaire de la canaille, et convive[143] de la table des gueux. »

On lit dans Diphile,

« Quel détestable métier que de faire commerce de Grisettes! Oui, j'aime mieux courir les rues, et vendre des roses, des radis, des lupins, du marc d'olives,[144] et toute autre chose, que de nourrir pareille engeance! »

[55e] Observez, dit Athénée, le mot thermokyamous dans ce passage, pour désigner les lupins; car quelques-uns les appellent encore ainsi de nos jours.

Polémon nous apprend que les Lacédémoniens appellent les lupins lysilaïdes.[145]

 

CHAP. XV. Théophraste dit, dans son traité des causes des plantes, que le lupin, l'ers, le pois chiche sont[146] les seuls légumes où il ne s'engendre pas d'insectes, à cause de leur âcreté et de leur amertume, et que le pois chiche noircit lorsqu'il s'altère. Cependant il convient, au liv. 4 du même traité, qu'il s'engendre une espèce de chenille dans les pois chiches.

[55f] Diphile de Siphne dit que les lupins sont détersifs, très nourrissants, surtout lorsqu'on leur a fait jeter leur amertume[147] en les trempant dans l'eau.

Zénon de Citium, naturellement dur et très colère, même à l'égard de ses amis, devenait charmant et très affable lorsqu'il avait un peu bu. Quelqu'un lui demandant la raison de ce contraste dans son caractère, il répondit : Je suis comme les lupins, qu'on trouve très amers avant d'avoir été bien trempés, et fort doux lorsqu'ils ont bien bu.

[56a] 46. Haricots.

Polémon raconte que dans les repas appelés copides à Lacédémone, on donnait, pour hors-d'œuvre, des figues sèches, des fèves, et des haricots verts... Épicharme dit:

« Fais au plus tôt rôtir ces haricots, je t'en prie par Bacchus.[148] »

On lit dans Démétrius :

« Ou une figue, ou un haricot, ou autre chose semblable. »

47. Olives.

......On lit dans Eupolis :

« Des sèches, des olives drypeteis.[149] »

Les Romains appelaient celles-ci dryppas. [56b] Diphile de Siphne dit : les olives sont peu nourrissantes, et causent des maux de tête; les noires dérangent plus l'estomac, et appesantissent la tête. Les colymbades[150] vont mieux à l'estomac, et resserrent : enfin, les olives noires et écrasées[151] (ihlastai) sont plus stomachiques. »

Aristophane fait mention de ces dernières:

« Faire des olives écrasées (thlastas). »

Il dit ailleurs :

« Les halmades et les stemphyles[152] ne sont pas une même chose. »

Peu après il ajoute :

[56c] « Il vaut mieux que les olives soient thlastes, que halmades

On lit dans la Gastronomie d'Archestrate :

« Qu'on te serve des olives déjà ridées et drypepeis.[153] »

Hermippe dit:

« Pour se souvenir à jamais de Marathon avec plaisir, ils jettent tous du Maratrhon[154] (fenouil) dans des halmades. »

Philémon nous apprend que les thlastes,[155] ou olives écrasées, étaient aussi appelées pityrides dans son Hécate, et que les noires se nommaient stemphylides. Callimaque fait de la gergérime[156] et de la pityris, comme autant d'espèces d'olives. [56d] Didymé avance que l'on appelait gergérimes les olives, et les figues drypepes ou mûres ; et qu'à l'égard des olives, on disait aussi seulement drupepes, sans y joindre le mot olives.....

« Téléclide me supplia de lui laisser enfin goûter de mes drypepes, de ma fouasse, après avoir vécu si longtemps de peigne de Vénus[157] (scandix).....»

Les Athéniens appelaient stemphyla, les olives écrasées, et brytea, les marcs de raisin, que nous appelons stemphyla. Or, le mot brytea[158] est venu de botrys, raisin.

48. Raifort.

Le raifort s'appelle en grec raphanis, parce qu'il lève[159] promptement. [56e] La syllabe ni de ce mot, est tantôt longue, tantôt brève chez les écrivains Attiques, dans les cas obliques de ce mot. Cratinus a dit:

« C'est ainsi qu'il plaît[160] aux raiforts (raphanîsi), et non aux autres légumes. »

Eupolis l’a fait brève :

« Des raiforts (raphanides) non lavés,[161] des sèches.... »

L'épithète non lavés (aplutoi,) doit se rapporter dans ce passage au mot raiforts, et non au mot sèches[162] (sepiai,) comme le prouve Antiphane dans ce qui suit :

« Manger des canards, des rayons de miel sauvage, des noix, des œufs, des gâteaux,[163] des raiforts non lavés, des raves, du gruau, du miel. »

On appelait proprement raiforts non lavés, ceux qui se nommaient aussi raiforts de Thase. [56f] On lit dans Phérécrate :

« Il y a un raifort (raphanis) non lavé, des bains chauds, des viandes salées cuites en daube, et des noix. »

Platon le comique a dit en diminutif (dans son Hyperbolos) du phyllon,[164] ou du raphanidion.

Théophraste dit, dans son traité des plantes, qu'il y a cinq espèces de raiforts, celui de Corinthe, le Leiothasia, celui de Cléone, l'Amorea[165] et le Béotien; et que quelques-uns appellent aussi thracia, le leiothasia. Il ajoute que celui de Béotie est très doux, et d'une forme ronde : qu'en général tous ceux qui ont les feuilles lisses, sont très doux.

 

[57a] CHAP. XVI. Callias s'est servi du mot raphanos, pour désigner le raphanis ou raifort. Après avoir disserté sur l'antiquité de la comédie, il nous présente ce passage : De la purée, du feu, des turneps ou raves, des raiforts (raphanoi,) des drypepes et des galettes. Il est certain que Callias parle ici du raifort : Aristophane le prouve. En effet, après avoir aussi parlé de cette même antiquité dans ses Danaïdes, il ajoute : Le chœur dansait alors enveloppé de tapis et de mantes, portant sous ses aisselles[166] des jambons, des andouilles et des raiforts. »

Le raifort est un manger bien commun ; [57b] voilà pourquoi on lit dans Amphis :

« O Apollon! il faut réellement être fou pour vouloir acheter des raiforts, lorsqu'on peut trouver au marché quelques bons poissons. »

49. Pommes de Pin. Konoi.

Mnésithée d'Athènes, médecin, appelle (dans son traité des comestibles) ostracides, les noyaux[167] des cônes de pin : il les nomme quelquefois même cônes. Dioclès de Caryste dit des noix (karya) de pin, et Alexandre de Mynde, des cônes de pin. Théophraste appelle l'arbre peukee, et le fruit cône. Ce fruit est nommé koccalos dans le traité de la tisane, attribué à Hippocrate, [57c] mais dont la moitié ou peut-être même le tout n'est pas de lui, selon quelques-uns. Nombre d'écrivains nomment ce fruit noyau (pyreen,) comme Hérodote s'est servi de ce mot en parlant de la noix du Pont : Elle a, dit-il, un noyau, pyreena, lorsqu'elle est mûre. »

Les strobiles, selon l'expression de Diphile, nourrissent bien, lubrifient la trachée et les bronches, purgent la poitrine, parce qu'ils contiennent dans leur substance certain principe résineux. Mnésithée dit qu'ils engraissent, qu'ils digèrent sans causer la moindre incommodité, [57d] que d'ailleurs ils sont diurétiques, et ne resserrent aucunement.

50. Œufs.

Anaxagore dit que ce qu'on appelle (ornithos gala,) lait de poule, est le blanc contenu dans les œufs. On lit dans Aristophane :

« La nuit pond d'abord un œuf clair[168] (hypeenemion). »

Sapho fait de trois syllabes le mot grec qui signifie œuf; elle dit:

« Un jour Léda conçut un œuf: ooïon. »

Elle en use de même au génitif, dans un autre endroit :

« Beaucoup plus blanc qu'un œuf: ooïou. »

Epicharme a dit au pluriel oœa, de trois syllabes :

« Des œufs d'oies et de poules volatiles. »

Simonide a dit de même dans le second livre de ses ïambes :

« Tel qu'un œuf (oœon) d'oie du Méandre. »

[57e] Anaxandride emploie ce mot en diminutif, et de quatre syllabes, disant ooaria, de petits œufs. Ephippus le fait aussi :

« Quatre petits barils de vin de Phénicie, des œufs, ooaria, et beaucoup d'autres pareilles bagatelles agréables....»

Alexis dit quelque part des moitiés d'œufs, ou des œufs coupés par moitiés.....

On disait non seulement ooa hypeenemia,[169] mais encore anemiaia, pour désigner des œufs clairs.

La partie de la maison qui se nomme chez nous hyperooa, ou l'étage supérieur, était auparavant nommée ooïa, selon Cléarque, dans ses Erotiques : voilà pourquoi, dit-il, [57f] on a feint qu'Hélène était née d'un œuf, ayant été élevée à l'étage supérieur appelé ooïon. Néoclès de Crotone a donc dit mal-à-propos qu'il tomba de la lune un œuf, duquel naquit Hélène ; car Néoclès assure que les femmes de la lune pondent des œufs, et que les hommes qui y naissent, sont quinze fois plus grands que nous : comme le raconte Hérodote d'Héraclée.....

Ibicus dit au sujet des Molionides,[170] dans le cinquième livre de ses vers:

[58a] « Lui (Hercule) après avoir tué les deux jeunes Molionides qui montaient des chevaux blancs, ayant l'un et l'autre même âge, même tête, mêmes membres, et conçus dans un seul œuf (oœoo) d'argent.

On lit dans Éphippe :

« Il y avait pour hors-d'œuvre diverses sortes de gâteaux, tels que des lirions, des pyrames, des amètes, une hécatombe d'œufs: or, nous avons tout grugé.[171] »

Nicomaque fait mention d'œufs mollets, ou qu'on hume tout d'un coup ;

« Mon père m'a voit laissé un pauvre petit bien ; en quelques mois je vous l'ai arrondi comme un œuf; puis cassant la coquille, je n'en fis qu'une gorgée. »

Eriphe parle des œufs d'oies :

[58b] « Ces gros œufs blancs sont des œufs d'oies, ce me semble; par ma foi, voilà comme Léda les pondait. »

Epænète dit, comme Héraclide de Syracuse, dans son art de la cuisine : Le premier rang appartient aux œufs de paon ; le second à ceux de l’oie-renard,[172] et le troisième à ceux de poules. »

 

CHAP. XVII.

51. Propoma.

Préliminaires du repas.

Le propoma[173] ayant été porté à la ronde (dit Athénée, qui rapporte l’ordre de ce banquet), Ulpien fît cette demande : Le mot propoma a-t-il été employé par les anciens dans le sens qu'il a actuellement? Comme on se faisait beaucoup de questions sans rien décider, je vais, dit Ulpien, répondre moi-même à ma demande.

[58c] Phylarque d'Athènes ou de Naucrate, parlant de Zéla, roi de Bithynie, dit que ce prince invita chez lui les chefs des Galates, mais avec de mauvais desseins, et qu'il en fut la victime. Or il ajoute, si je m'en souviens bien, on porta d'abord un propoma à la ronde avant de toucher aux plats, comme il était d'usage. Après avoir ainsi parlé, Ulpien, se félicitant que sa mémoire l'eût si bien servi, demanda à boire dans un psyclère, (réfrigérant.).....

.....Mais, dit Athénée, outre les autres choses qu'on servait au propoma, on y voyait encore ce qui suit:

 

[58d] 52. CHAP. XVIII.

Mauve.

Hésiode en parle ainsi :

« Ni quel grand avantage on trouve dans la mauve et l’asphodèle.[174] »

Il écrit malachee, mauve, comme les Attiques ; mais moi, dit Athénée, j'ai trouvé dans plusieurs exemplaires d'Antiphane molochee, comme dans ce passage :

« Ils mangeaient de la mauve : molochee. »

On lit dans Epicharme :

« Je suis plus doux que la mauve : molochee. »

Mais Phanias écrit malachee dans le passage suivant de son traité des plantes : « Le type[175] spermatique de la mauve de jardins, s'appelle placenta, parce qu'elle y ressemble ; [58e] sa partie pectinoïde est analogue à la croûte supérieure striée d'un gâteau dont le centre est ombiliqué; enfin la circonférence prise dans tout son contour, représente exactement la crénelure de l'oursin. »

Diphile de Siphne assure que la mauve est d'un bon suc, qu'elle lubrifie la trachée, discute les humeurs acres de la circonférence, calme l'éréthisme des reins et de la vessie, nourrit assez bien, et passe facilement. [58f] Il préfère cependant la mauve sauvage[176] à celle des jardins.

Hermippe, disciple de Callimaque, dit que la mauve, mêlée dans la composition que l’on appelle alimon,[177] et même adipson (parce qu'elle empêche d'avoir faim et soif,) y devient fort utile.

53. Courges ou Calebasses.

Euthydème, dans son traité des Herbages, appelle la courge[178] (sicya,) calebasse indienne, parce que la semence en a été apportée de l'Inde. Les Mégalopolitains la nomment sicyonia. Théophraste dit: la courge, appelée colocynthee, né fait pas un genre unique,[179] mais elle renferme seulement sous sa dénomination, des espèces les unes meilleures que les autres.

[59a] Ménodore, disciple d'Erasistrate et ami d'Hicésius, reconnaît deux sortes de courges, savoir, l'indienne, qui est la sicya, et la kolocynthee, ou courge vulgaire. L'indienne se mange le plus souvent bouillie dans l'eau; mais la courge (kolocynthee,) se mange bouillie et rôtie. La courge s'appelle encore indienne[180] simplement chez les Cnidiens.

Les habitants de l'Hellespont appellent sicyas les courges[181] allongées, et kolocynthai, les rondes. Dioclès dit : il vient de très belles courges (kolocynthai) dans les environs de Magnésie ; outre qu'on y voit des raves extrêmement grosses, douces et très stomachiques : Dans le territoire d'Antioche, viennent les beaux concombres ; dans celui de Smyrne, les belles laitues : celui de Myre semble fait pour la rue. »

Selon Diphile, [59b] la courge est peu substantielle, digère promptement, humecte et rafraîchit les humeurs, et passe aisément; prise avec du vinaigre, après avoir cuit dans l'eau, elle est d'un assez bon suc, et plus stomachique ; mais assaisonnée avec des fines herbes, elle fait un meilleur chyle. La moutarde lui donne une vertu plus atténuante. En général, elle digère mieux, passe mieux lorsqu'on l'a cuite dans l'eau.

Mnésithée dit : Tout ce qui cède facilement à l'action du feu, comme le concombre, la courge, et autres choses semblables, fournit au corps une nourriture peu substantielle à la vérité, néanmoins exempte d'inconvénients, et plus humide que solide; [59c] mais les pommes[182] et les poires de coing (ou toute autre chose semblable) mangées cuites au feu, sans eau, resserrent beaucoup : il vaut donc mieux les manger bouillies. »

Les Attiques ne donnent à la courge que le seul nom de kolocyntee. On lit dans Hermippe :

A. Comment a-t-il la tête grosse? B. Comme une courge. »

Phrynicus dit en diminutif:

« Un petit morceau de maze, ou de courge : kolocyntion. »

On lit dans Epicharme :

« Cela est encore bien plus sain qu'une courge : kolocynthas. »

54. Epicrate le comique parle ainsi de la courge dans les vers suivants :

[59d] « A. Que font actuellement Speusippe et Ménédème? chez qui se trouvent-ils actuellement? à quoi rêvent-ils? que disent-ils sur le M sujet qu'ils examinent? et avec qui? Par la terre! dis-m'en quelque chose de précis, si tu les as entendus. B. Oh! je puis t'en parler savamment. J’étais aux Panathénées:[183] là, je vis une foule de jeunes gens réunis dans les gymnases de l'académie, et j'y entendis les discours les plus étranges. On y fixa d'abord quelques principes de physique, ensuite on établit la différence qu'il y a dans la vie de chaque espèce d'animaux ; [59e] on distingua la nature de chaque espèce d'arbres, et l'on n'oublia pas les herbes potagères, tu penses bien ; mais entre autres choses on s'occupa beaucoup de trouver le genre auquel appartient la calebasse. A. Eh bien! qu'ont-ils déterminé? à quel genre la rapportent-ils? tu vas me le dire, sans doute, si tu le sais. B. D'abord ils restèrent tous sans souffler, puis baissant les yeux, ils méditèrent assez de temps. Les jeunes gens rêvaient encore les yeux fixés sur terre, lorsqu'un de nos philosophes décida que la calebasse était un légume rond, un autre, que c'était une herbe ; [59f] enfin, un troisième, que c'était un arbre. Un médecin, venu du pays de Sicile, entendant ces délires, leur pète au nez, comme à des insensés. Nos barbons sont furieux, et crient à l'insulte ; qu'il était bien malhonnête de se comporter ainsi dans une assemblée aussi respectable. La jeunesse ne prenait pas non plus cela indifféremment, lorsque Platon se présente, et, sans s'émouvoir, leur commande d'un air gracieux de reprendre la question, et de décider le genre de la calebasse. Ils ne se firent pas prier, et ils analysèrent. »

Alexis, poète charmant, propose un propoma entier à ceux qui pourront définir ce qu'il veut dire dans ce qui suit:

[60a] « J'arrivai, sans y penser, dans un endroit où mes affaires m'appelaient. On me présenta l'eau pour les mains : quelqu'un vint apporter une table où il n'y avait ni fromage, ni olives, ni plats dont l'abondante vapeur nous flattât l'odorat, ni aucune de ces bagatelles appétissantes. Mais on servit un bassin[184] qui répandait avec fierté l'odeur des heures : c'était un hémisphère céleste entier. Or, il y avait dans ce bassin tout ce qu'on peut voir de beau, des poissons, des cabris, à travers lesquels se prolongeait un scorpion. Chaque astre était représenté par une moitié d'œuf. [60b] Nous y portâmes les mains. Celui qui me parlait était occupé à expliquer : ainsi tout l'embarras retomba sur moi. Je ne lâchai point prise que je n'eusse fait un crible de ce bassin, à force de le percer.... »

 

56. CHAP. XIX.

Champignons.

Aristias dit :

« Le sol, pavé de pierres, retentit[185] des champignons, mykaisi.... »

On lit dans Polioque :

« Chacun de nous avait deux fois par jour une petite maze faite de farine noire, pétrie avec la balle ; [60c] de méchantes figues, et de temps en temps un champignon rôti; un escargot qu'on allait chercher, s'il avait fait de la rosée; des légumes autochtones;[186] des olives (thlastes) écrasées ; enfin, un verre de petit vin à moitié tourné. »

Antiphane dit:

« Notre souper est une maze palissadée de pailles, et bien armée pour rendre sobre ; quelques mauvais plats de ragoûts, avec une bulbe, quelque laiteron, quelque champignon, ou autre chétif aliment, tel qu'un terrain de cette nature [60d] peut en fournir à des malheureux comme nous. C'est sans doute un régime excellent contre la fièvre, et qui ne donne pas de pituite. Mais quand il y a de la viande, s’amuserait-on à gruger un oignon[187] sauvage? nos Pythagoriciens même le feraient-ils? »

Et plus avant il ajoute :

« Mais qui sait ce qui peut arriver à nos amis? Prends vite ces deux champignons d'ieuse, et fait-les rôtir. »

Céphisodore, disciple d’Isocrate, reproche au philosophe Aristote, [60e] dans les quatre livres qu'il a faits contre lui, de s'être occupé d'une chose peu digne de lui, en recueillant des proverbes, et lui objecte qu'Antiphane a fait une pièce intitulée les Proverbes, dans laquelle on lit ce qui suit :

« Pour moi, quand je mange quelque chose de chez vous, je m'imagine manger des champignons crus, des pommes acerbes, ou toute autre chose capable d'étrangler. »

57. Les champignons sont une production[188] spontanée de la terre, et il y en a bien peu qu'on puisse manger, car la plupart causent un étranglement mortel ; c'est pourquoi Epicharme dit en plaisantant :

[60f] « Desséchés et durs comme vous êtes, vous nous étrangleriez comme des champignons. »

Nicandre[189] rapporte les noms des différents champignons, et entre autres ceux des champignons qu'on doit regarder comme mortels :

« Les champignons, dit-il, de l'olivier, du grenadier, de l’yeuse,[190] sont des excréments végétaux, ennemis du corps, de même que ceux qui sont comme gonflés, visqueux, lourds ; car ils causent des étranglements mortels. »

Il dit ailleurs : »

[61a] « Si vous arrosez souvent le tronc du figuier,[191] après l'avoir couvert de fumier tout autour, il y croîtra des champignons innocents. Faites[192] venir de tels champignons; mais n'arrachez pas ceux qui viennent sur les racines qui courent à la superficie du sol, »

Le reste de ce passage n'était pas lisible (dit l'abréviateur.)

Nicandre dit ensuite :

« Vous aurez soin de faire rôtir les champignons amanites.[193] »

Éparchide raconte qu'Euripide étant en voyage [61b] dans l'île d'Icare, fît l'épigramme suivante, au sujet d'une mère qui mangea à la campagne des champignons mortels, et fut empoisonnée avec ses trois enfants, savoir, deux garçons déjà formés, et une jeune fille.

« O soleil! qui parcours la voûte éternelle du ciel, as-tu jamais vu un accident aussi funeste! une mère, une jeune fille et ses deux frères ont péri le même malheureux jour! »

[61c] Dioclès de Caryste dit, dans son traité des Comestibles salubres, que parmi les légumes champêtres, il faut faire bouillir la betterave, la mauve, la patience, l'ortie, l'arroche, les bulbes, la truffe et les champignons.

[58] Berle, Siou.

Speusippe dit, au livre 2, des choses semblables, que la berle croît dans l'eau, qu'elle ressemble par sa feuille à l’eleoselinum, ou ache d'eau. Ptolémée, roi d'Egypte, (le second Evergète) voulait pour cette raison qu'on écrivît dans un vers d'Homère, siou, au lieu d'iou, qui signifie de violette.

« Ce lieu est entouré de prairies agréables parsemées de berle (siou) et d'ache, »

parce que la berle vient avec l’ache, et non avec la violette.

59.Diphile[194] écrit que les champignons sont stomachiques, laxatifs, [61d] nourrissants, mais difficiles à digérer, et flatueux, tels que ceux de l'île de Cée ; mais selon lui, il y en a aussi beaucoup qui tuent. Ceux qui sont légers, mollets, un peu friables, paraissent être innocents : tels sont ceux qui croissent au pied des ormes et des pins ; mais on regarde comme malfaisants les champignons noirs, livides, durs, et ceux qui, après avoir été bouillis et serrés quelque temps, sont comme coagulés;[195] tous ces champignons tuent si l'on en mange.

On emploiera contre leurs mauvais effets, une potion d'hydromel ou d’oxymel, du nitre et du vinaigre; mais de quelque manière que ce sait, il faut vomir après avoir pris ces breuvages. [61e] Ainsi les champignons doivent être apprêtés surtout avec du vinaigre, de l'oxymel, ou du miel, ou du sel; on leur ôtera ainsi leur qualité strangulatoire.

Théophraste, dans son histoire des Plantes, écrit ce qui suit : « Tels sont ceux[196] qui croissent sous terre, et ceux qui croissent dessus ; par exemple, ceux que quelques-uns appellent pezies,[197] (pezias,) et qui croissent parmi les champignons : or, ceux-ci n'ont pas non plus de racines. Le champignon a cependant un rudiment d'attache dans les fibrilles qui partent de l'extrémité inférieure de sa tige prolongée. »

Il dit encore que : [61f] Quand il est tombé beaucoup de pluie sur les bords de la mer, du côté des colonnes d'Hercule, il croît, près de la plage, des champignons qui se pétrifient[198] par l’action des rayons solaires. »

 

CHAP. XX. Phanias dit, au premier livre de son traité des Plantes, que parmi les végétaux, il y en a qui portent des fleurs, et d'autres point, et qui ne présentent pas d'étamines,[199] ni de traces de fécondation, comme le champignon, la truffe, la fougère et le lierre. Le même observe que la fougère (pteris,) est aussi appelée blachnon[200] par quelques écrivains. Théophraste, dans son traité des Plantes, dit qu'il y a des végétaux qui ont l'écorce lisse, comme la truffe,[201] le pezis, le champignon et le géranium.[202]

 

[62a] 60. CHAP. XXI.

Truffes.

Elles croissent aussi spontanément en terre, surtout dans les lieux sablonneux. On lit dans Théophraste : « La truffe, que quelques-uns appellent geranéion, et autre chose qui croît en terre. » Il dit ailleurs : « Telle est la génération et la nature des choses qui sont produites en terre, comme la truffe, et ce qu'on appelle le misy,[203] et qui croît aux environs de Cyrène. La saveur en est des plus agréables, et l'odeur tient de celle de la viande : telle est aussi la génération et la nature de l’iton,[204] qui croit en Thrace. »

On rapporte une chose particulière aux truffes; [62b] savoir, qu'elles se produisent pendant les grandes pluies d'automne, et lorsqu'il y a de grands coups de tonnerre,[205] lorsqu'il y a des orages, qui sont la cause[206] la plus propre à les produire : que la truffe ne passe pas l’année, mais qu'il faut la prendre dans la même année et au printemps parce qu'elle est alors dans sa bonté.

Malgré ce que nous venons de voir, quelques-uns supposent une sorte de semence qui devient le principe de la truffe, et que c'est pour cette raison qu'il n'en vient point sur la côte de Mitylène, avant que les grandes pluies en aient amené la semence des coteaux Tiares, car c'est un lieu où il s'en trouve beaucoup. La truffe croît surtout le long des côtes de la mer, et dans les terrains sablonneux : deux circonstances qui sont encore d'autres causes de leur production ;[62c]  les meilleures viennent aux environs de Lampsaque, dans le territoire d'Acarnide d'Alopéconnèse, et dans celui d'Élide.

Lyncée de Samos dit : « La mer produit l'ortie marine,[207] et la terre les truffes. »

Matron, poète parodique, dit dans son souper :

« Il apporta des coquillages[208] qui sont les truffes de Téthis, fille de Nérée. »

Diphile dit que les truffes sont difficiles à digérer, quoiqu'elles fournissent un assez bon suc, et qu'elles lubrifient l'intérieur : il les dit aussi laxatives; mais, selon lui, il y en a même qui étranglent comme les champignons.....

Hégésandre de Delphes observe qu'on ne voit à l'Hellespont [62d] ni truffes, ni oignons sauvages, ni glaucisques:[209] ainsi c'est le désert de Nausiclide;[210]

« Il n’y a ni printemps ni amis..... »

Pamphile, dans ses gloses, appelle hydnophylle, une herbe qui croît au-dessus des truffes, et au moyen de laquelle on reconnaît où il y en a.

 

61. CHAP. XXI.

Orties. Akaleephee.

C’est ainsi[211] que les Athéniens appellent la Knidee, plante qui cause un prurit cuisant. Aristophane dit dans ses Phéniciennes :

« L'asphodèle[212] est venue avant tout; ensuite les orties armées de pointes : akaleephai. »

62. Asperges.

Il y en a de marais[213] et de montagnes[214] [62e] dont les meilleures sont celles qui viennent sans avoir été semées : on les emploie pour traiter toutes les maladies internes. Celles qui ont été semées, viennent extrêmement hautes. On dit que dans la Gétulie, province de Libye, les asperges ont la grosseur du roseau de Chypre, et s'élèvent jusqu'à douze pieds ; mais que dans les pays montagneux, et près des côtes de l'Océan, elles ont une tige aussi forte que les grandes férules,[215] et environ vingt coudées de long.

Cratinus écrit aspharagos par ph; ce que fait aussi Théopompe, comme dans ce vers :

« Voyant ensuite une aspherge dans un buisson. »

[62f] De même Ameipsias :

« Il n'y a ni oignon de squille, ni aspherge, ni branches de laurier. »

Diphile dit: « L’asperge[216] du (crambee) qu'on appelle proprement ormenos, est assez stomachique, et passe fort bien ; mais elle nuit à la vue : elle a d'ailleurs de l'âcreté et pousse les urines, cependant non sans faire de mal aux reins et à la vessie. Ce sont les Athéniens qui ont appelé ormenos le jet du chou. »

Sophocle fait sentir dans ses chasseurs, la signification du mot ormenos, en disant exormenizei, il pousse avec force, et ne cesse pas un instant.....

Le mot blastee marque la pousse rapide et le terme imminent de la fleuraison.

[63a] Antiphane écrit asparagos par un p.

« L'asperge se para de ses fleurs, et quelque ochrus (cicerole), poussa ses bouquets....»

Aristophon a dit :

« Les câpres, le pouillot, le thym, le torchepot,[217] le rhamnus, (paliurus, liv. 14, ch. 16,) la sphakèle et le tympanon. »

63. Limaçon.

On lit dans Philyllus:

« Femme, je ne suis ni[218] cigale, ni limaçon.

Il dit ailleurs :

« Des mendoles, des maquereaux, des limaçons, des coracins. »

Hésiode appelle le limaçon : porte-maison. Anaxilas a dit:

[63b] « Tu es plus méfiant que les limaçons, qui portent partout leur maison, de crainte qu'on ne la leur emporte. »

On lit dans Achæus :

« Ou autant que le mont[219] Etna nourrit de limaçons cornus. »

On propose quelquefois dans les repas même, cette espèce de griphe ou d'énigme sur les limaçons :

« Je suis enfant des bois, sans piquants, et privé de sang, laissant toujours de l'humidité sur ma route (ou la trace humide de ma marche). »

Aristote dit,[220] au livre 5 des animaux, que les limaçons engendrent au printemps et en automne, et que ce sont les seuls animaux à coquilles qu'on ait vu s'accoupler.

[63c] Théophraste dit dans son traité des animaux qui se retirent dans des trous, que les limaçons[221] s'y retirent en hiver, et surtout l'été; mais que les pluies d'automne les font paraître en grande quantité ; c'est en terre, ou dans des creux d'arbres qu'ils vont se cacher :

« Il y a certains limaçons qu'on appelle sesiloi.[222] »

Epicharme en parle :

« Ils donnent pour tout cela des sauterelles en échange; mais peste soit de ton coquillage sésile!»

[63d] Apellas dit que les Lacédémoniens appellent le limaçon[223] semelon. Apollodore rapporte au second livre de ses Etymologies, qu'il y a des limaçons qu'on appelle kolysideipnoi,[224] obstacle au souper.

 

64. CHAP. XXIII.

Bulbes.

Hercule refuse, dans l’Amalthée d'Eubule, de manger des bulbes. Voici ce qu'il dit :

« Savoir s'il faut manger ou plus chaud, ou plus froid, ou entre les deux, c'est pour chacun d'eux une plus grande affaire que de prendre Troie. Pour moi, je ne suis pas venu ici pour me repaître de tiges ou de suc de selfion,[225] ni de ces mets profanes ou amères, ni de bulbes. D'abord je mange pour me nourrir, ensuite pour me fortifier; [63e] et je veux que tout ce que je mange soit salubre. Une large et bonne tranche de bœuf bouillie, des abattis bien conditionnés, trois cochons de lait rôtis, et saupoudrés de sel.[226] »

Alexis, montrant la vertu aphrodisiaque des bulbes, parle ainsi :

« Les pinnes, les langoustes, les bulbes, les limaçons, les buccins, les œufs, les abattis, sont des remèdes que chacun peut trouver aisément. [63f] Mais celui qui a une intrigue amoureuse en imaginera encore de meilleurs. »

On lit dans Xénarque :

« Une lignée périt lorsque le sort en a rendu les mâles impuissants.[227] C'est ainsi qu'un génie malfaisant a détruit la maison stérile des Pélopides ; mais le bulbe, enfant de la terre, où il est enfoncé jusqu'au cou, et habite avec Cérès, ne peut remédier à cet inconvénient, quoiqu'il favorise, étant bouilli, la passion de ceux qui l'aiment. [64a] C'est même en vain que le polype, si prompt à changer de couleur, et nourri dans les sombres gouffres de la mer, remplit la capacité[228] d'une marmite ventrue, fille de la roue, lorsqu'il a été pris dans les filets inflexibles des hommes. »

Archestrate dit :

« Fi! de ces bulbes, de ces tiges de selfion qu'on met dans ces sauces acides et piquantes : fi! de tout autre plat semblable. »

 65. Héraclide de Tarendtre dans son Banquet.

Le bulbe, le limaçon, les œufs, et autres choses semblables, passent pour fournir beaucoup de fluide spermatique, non parce qu'ils sont fort nourrissants, mais parce qu'ils ont leurs premiers principes de même forme[229] et de même nature que la liqueur spermatique. »

[64b] Suivant Diphile le médecin, le bulbe est difficile à digérer, mais fort nourrissant, stomachique, détersif, aphrodisiaque, cependant nuisible à la vue… Il y a un proverbe qui dit :

« Le bulbe ne sert de rien à celui qui n'a pas de nerf. »

66. Les bulbes qu'on appelle royaux, sont réellement aphrodisiaques, et ce sont les meilleurs. Après ceux-ci, on loue ceux de couleur fauve. Les blancs et ceux de Lybie, tiennent de la nature de la squille, ou oignon de mer ; ceux d'Egypte sont les plus mauvais. Les bulbines[230] sont d'un meilleur suc que les bulbes, mais moins stomachiques, [64c] en conséquence de leur substance un peu compacte et douceâtre ; cependant elles soutiennent assez bien, vu leur fermeté : elles passent même facilement. Matron fait mention des bulbines dans ses parodies :

« Ne chanterai-je[231] donc pas les laiterons? ne célébrerai-je pas cette production moelleuse (le marron comestible) qui s'arme de sa caloufe épineuse, comme d'un casque? la bulbine, destinée aux chantres de Jupiter, et qu'une pluie abondante, fille de ce dieu, a nourrie dans un lieu aride, plus blanche que la neige, et semblable aux gâteaux de la plus belle farine. A peine est-elle en sa maturité, qu'elle est chérie du vénérable Ventre. »

[64d] Nicandre loue les bulbes de Mégare. Théophraste dit quelque part, dans le septième livre des plantes:[232] « Il y a des bulbes d'une saveur si douce, qu'on les mange crus, comme dans la Chersonèse Taurique. » Phanias rapporte la même chose.

Mais selon Théophraste, il y a une espèce de bulbe qui porte de la laine,[233] et qui croît le long des côtes de la mer ; ils ont cette laine sous leurs premières enveloppes, de sorte qu'elle se trouve entre la partie interne comestible, et la partie externe. On en fait des chaussons de feutre, et d'autres vêtements ; comme Phanias le dit aussi. Le bulbe des Indes, analogue à celui-ci, porte une espèce de poil.

[64e] Philémon dit, au sujet de l'apprêt des bulbes:

« Si tu veux manger un bulbe, considère combien tu as de choses à employer pour qu'il plaise : il faut du fromage, du miel, du sésame, de l'huile, de l'oignon, du vinaigre, du selfion; car le bulbe seul est mauvais et amer. »

Héraclide de Tarente, dans son festin,[234] réforme l'usage des bulbes, en disant : « Il faut savoir se retenir sur l'usage de plusieurs aliments, et surtout de ceux qui ont quelque chose de pesant et de visqueux, tels que les œufs, les bulbes, les abattis, les limaçons et autres semblables; [64f] car ces aliments résident longtemps dans l'estomac, et arrêtent le cours des sucs gastriques avec lesquels ils se mêlent. »

 

68. CHAP. XIV.

Grives.

On apporte des volées de grives[235] et d'autres oiseaux pour le propoma..... On lit dans Téléclide :

« Les grives tombaient toutes rôties dans la gorge, avec de petits gâteaux (ametiscoi).

Les Syracusains disent kichelai pour kichlai, comme dans Épicharme :

« Les grives (kichelai) qui sont avides[236] du fruit de l'olivier. »

Aristophane fait mention des grives dans ses nuées. Aristote dit qu'il y en a de trois espèces : [65a] la première, qui est la plus grande, est de la grosseur d'une pie, et se nomme aussi ixophage, mangeuse de gui; la seconde est de la grosseur d'un merle, et se nomme trichas ; la troisième, et la plus petite, se nomme ilade,[237] ou tylade, selon d'autres, comme le rapporte Alexandre de Mynde ; elle va par bandes et fait son nid comme les hirondelles.....

C'est à Homère qu'on attribue un petit poème intitulé les Épikichlides : [65b] il a été ainsi appelé, parce qu'Homère l'ayant chanté à des enfants, il en reçut des grives pour récompense, selon ce que dit Ménæchme, dans ses technites.

69. Bec-figues.

Alexandre de Mynde en parle ainsi : L'une des mésanges[238] est appelée par les uns elaios, et par les autres pirias, mais sycalide, ou bec-figue, au temps où les figues sont mûres. Il y en a de deux espèces ; savoir, la sycalide et la tête-noire, ou melankoryphe.

Epicharme a dit:

« Les brillantes sycallides.

Il en parle encore dans ce passage :

« Des hérons au long cou recourbé, des tetrax[239] spermatotoges ou ramasseurs de grain, et des bec-figues brillants. »

[65c] Les bec-figues se prennent dans le temps qu'on cueille les figues. Epicharme a écrit sycallide par deux l, pour la mesure de son vers ; mais on dit mieux sycalide.

70. Tarins.

On lit dans Eubule, (mieux Ephippe, liv. 9.) :

« C'était la fête des amphidromies,[240] temps où il est d'usage de faire griller un morceau de fromage de Chersonèse, bouillir un chou, et de le bien arroser d'huile; de faire une daube de poitrines d'agneaux bien gras ; de plumer des ramiers, [65d] des grives et des tarins;[241] de bien se régaler de mendoles; d'empiler force bras de polypes, et de s'arroser de larges doses de vin pur. »

71. Merles.

Nicostrate ou Philétaire a dit :

« A. Qu'achèterai-je, dites-moi? B. Point de dépense superflue ; mais que tout soit honnête. Si tu trouves un lièvre, achète-le ; de petits canards, prends-en tant que tu voudras ; de même que des grives, des merles,[242] et beaucoup d'autres semblables oiseaux sauvages. Adieu. »

[65e] Etourneaux.

Antiphane met les étourneaux[243] au nombre des aliments.

« Du miel, dit-il, des perdrix, des ramiers, des canards, des oies, des étourneaux, une pie, des choucas,[244] des merles, des cailles, des poules.... »

« Vous nous demandez raison de tout, et il n'est pas possible de rien dire sans être arrêté.... »

On trouve le mot stroutharion (petit oiseau) dans quelques écrivains, et entre autres dans Eubule :

« Prends quatre ou cinq perdrix, trois lièvres, de petits oiseaux déjà bons à manger, des chardonnerets, des perroquets,[245] de petits tarins, des crécerelles[246] et autres que tu pourras trouver. »

[65f] 72. Cervelle de Cochon.

Les philosophes voulaient nous empêcher d'en manger, disant qu'il valait autant manger des fèves,[247] ou la tête de ses père et mère, et autres choses exécrables. Ils ajoutaient, que personne dans l'antiquité n'avait mangé de cervelle, parce que c'est le siège de presque toutes les sensations.[248]

[66a] Apollodore d'Athènes dit que les anciens n'ont même pas employé le mot enkephalos.[249] Sophocle évite ce mot dans ses Trachimènes, et y substitue celui de moelle blanche, en parlant d'Hercule qui jette Licas dans la mer.

« Les os du crâne brisé, éclatent çà et là : une moelle blanche mêlée avec le sang souille sa chevelure. »

Il a cependant nommé à la lettre toutes les autres circonstances de cet accident.

 

CHAP. XXV. Euripide introduit Hécube, fondant en pleurs sur la mort d'Astyanax précipité par les Grecs, et la fait parler avec réserve à cet égard :

« Infortuné! hélas! [66b] comme les murs de ta patrie, élevés de la main d'Apollon, t'ont déchiré toute la tête! moi qui t’avais mis au monde ; qui avais pris tant de soin de tes beaux cheveux; qui les avais couverts de baisers! Hélas! je vois un meurtrier barbare faire ruisseler le sang de ton crâne fracassé, pour ne rien dire des autres choses horribles que j'aperçois! »

Mais il ne faut pas manquer d'observer les différentes époques des poèmes ; car Philoclès s'est servi du mot enkephalos :

« Il mangerait sans cesse de la cervelle (enkeph.). »

On trouve encore ce mot dans ce vers d'Aristophane :

« Je perdrais (à ce saut) les deux membranes[250] de ma cervelle). »

D'autres l'ont aussi employé. C'est donc avec la liberté de la poésie, que Sophocle a dit une moelle blanche pour la cervelle; [66c] mais Euripide ne voulant pas présenter l'objet avec toutes ses horreurs, a pris le parti de le désigner comme il croyait devoir le faire.

Il est évident que les anciens regardaient la tête comme une chose sacrée ; car ils juraient par la tête de... ils s'inclinaient aux éternuements, comme dignes de tout leur respect. C'était aussi par un signe de tête qu'ils ratifiaient leurs conventions.

« Çà marche, je t'approuverai d'un signe de tête, »

dit Jupiter dans Homère.....

73. Poivre.

Mais on servait encore bien d'autres choses au Propoma : du poivre, de fines herbes, de la myrrhe, du souchet, du parfum d'Egypte.

[66d] On lit dans Antiphane :

« Si quelque marchand apporte du poivre, on le condamne à la question comme un espion. »

Il dit ailleurs :

« Vas faire encore un tour, et cherche-moi du poivre et de la graine de blète.[251] »

Eubule a dit :

« Femme, prenez des grains de thymelée,[252] ou de poivre, broyez cela avec de la myrrhe, et saupoudrez-en bien.[253] »

On lit dans Ophélion :

« Du poivre de Lybie, du parfum à brûler, et le livre maniaque[254] de Platon. »

[66e] Nicandre dit dans ses Thériaques :

« Ou des feuilles velues de conyse:[255] ou souvent broyez du poivre nouveau, ou du cresson de Médie. »

Théophraste dit, dans son histoire des plantes:[256] Le poivre est une graine d'arbre. Il y en a de deux espèces: l'un est rond comme l'ers, ayant une écorce et une pulpe comme le grain de laurier ; c'est le poivre noir : l'autre est longuet, rougeâtre, présentant une graine semblable à celle d'un pavot : il est beaucoup plus fort que le premier ; l'un et l'autre sont échauffants ; c'est pourquoi ils deviennent utiles contre le poison de la ciguë.

[66f] Le même dit, dans son traité de la suffocation : « On peut faire revenir une personne de cet état, en l'aspergeant avec une infusion[257] acéteuse de poivre ou de graine d'ortie triturée. »

On observera que les Grecs n'ont aucun nom neutre de leur langue terminé en i, excepté meli du miel : carpeperi, poivre, kommi, gomme, et koiphi,[258] certain parfum d'Egypte, sont des mois étrangers dans la langue grecque.

74. Huile.

Antiphane ou Alexis font mention de l'huile de Samos :

« C'est lui qui te mesurera de l'huile de Samos, qui est la plus belle de toutes les huiles....»

[67a] Ophélion parle de celle de Carie :

« Il se frottait d'huile de Carie....»

Amyntas dit dans son itinéraire[259] de Perse : « Les montagnes de ces pays-là produisent des térébinthes, des larices, des noix de Perse, d'où l'on tire beaucoup d'huile pour le Roi. »

Ctésias rapporte qu'on fait dans la Carmanie une huile[260] d'acanthe pour l'usage du Roi....

Le même, faisant le détail de tout ce qu'on prépare au Roi pour son souper, (dans le troisième livre qu'il a écrit sur les tributs de l'Asie) ne fait mention ni de poivre ni de vinaigre, qui seul est le meilleur de tous les assaisonnements. Il n'en est pas non plus parlé dans le commentaire que Dinon a écrit sur la Perse, [67b] quoiqu'il y dise qu'on envoie au Roi du sel ammoniac d'Egypte, et de l'eau du Nil. Mais Théophraste fait mention de l'huile appelée omotribe[261]) dans son traité des odeurs, et dit qu'on la tirait d'olive phaulies (de la plus grosse espèce) et d'amandes.

Amphis n'a pas oublié l'huile de Thurium,[262] qu'il dit être, excellente:

« Thurium pour l'huile, Gela pour les lentilles. »

75. Garum.[263]

[67c] On lit dans Cratinus :

« Notre panier[264] va être plein de garum. »

Phérérate a dit :

« Il avait la barbe toute sale de garum.

Sophocle, dans son Triptolème, fait mention

« De garum de poisson salé. »

On lit dans Platon le comique:

« Ils m'étoufferont, ma foi, dans cette lie de garum, où ils me plongent. »

Eschyle, qui joint l'article masculin à ce mot, en détermine le genre :

« Du garum (fort garon) de poisson.[265] »

 

76. CHAP. XXVI.

Vinaigre.

De tous les assaisonnements, le vinaigre est le seul auquel les Attiques donnent le nom d'espèce[266] (eidos).

Chrysippe le philosophe, dit que les meilleurs vinaigres sont ceux d'Egypte et de Cnide.

Aristophane a dit dans son Plutus:

[67d] « Arrosé de vinaigre de Sphette. »

Didyme, interprétant ce ïambe, dit que le poète a peut-être voulu indiquer que les habitants de Sphette étaient des gens vifs et colères.

Aristophane parle aussi du vinaigre de Cléone, comme excellent.

« Il y a des saucières pleines de vinaigre de Cléone. »

On lit dans Diphile :

« A, Il soupe retiré dans son trou! et comment crois-tu? bien laconiquement! il boit sa cotyle de vin très aigre (de vinaigre). B. Peste! A. Quoi! peste. B. Dis-donc tout de suite qu'il boit une mesure de vinaigre de Cléone, car elle fait justement une cotyle. »

Philonide a dit :

« Oh! ils se passent bien de vinaigre dans les sauces. »

Héraclide de Tarente dit dans son Banquet : [67e] « Le vinaigre raffermit les parties externes, au moins quelques-unes; mais il a aussi la vertu de dissoudre[267] dans l'estomac la masse des aliments qui y causent une surcharge par le mélange des différentes humeurs avec lesquelles ils se trouvent quelquefois embarrassés. »

On estimait beaucoup le vinaigre de Décélée. Alexis en parle ainsi:

« Après m'avoir donné la question avec quatre cotyles de vinaigre de Décélée, vous me faites encore traverser la place publique... »

.....Il faut dire oxygaron avec y, pour désigner du garum mêlé avec du vinaigre, et écrire de même, avec y, oxybaphon, [67f] pour désigner le vaisseau à vinaigre, ou vinaigrier.

Puisque Lysias, dans le discours qu'il a fait contre Théopompe qui l'avait injurié, a dit : « Pour moi, je bois de l’oxymel; » nous devons dire de même, oxyrhodinon, du vinaigre rosat.

77. Artymata. Assaisonnements.
Artyein. Assaisonneur.

Artyma se lit dans Sophocle.

« Assaisonnements d'un aliment : artymala. »

Eschile dit:

« Tu répands une pluie d'assaisonnements. »

On lit dans Théopompe :

 Plusieurs médimnes d'assaisonnement, plusieurs sacs et bourses pleines de livres,[268] et beaucoup d'autres choses utiles pour la vie. »

[68a] Artuein, verbe, assaisonner, se trouve dans Sophocle :

« Je suis cuisinier, j'assaisonnerai cela à merveille. »

Cratinus dit dans son Glaucus:

« Il n'est pas donné à tout le monde de bien assaisonner. »

On lit dans Eupolis :

« Un méchant ragoût assaisonné à grands frais. »

Voici la liste d'ingrédients (artymata) que nous donne Antiphane :

« Du raisin sec, du sel, du vin cuit, du selfion, du fromage, du thym, du sésame, du nitre,[269] du cumin, de l'origan, de fines herbes,[270] du vinaigre, des olives pour un abyrtace d'herbages[271] : il parle encore de câpres, d'œufs, de poissons salés, de cresson, de feuilles de figuier,[272] du suc de selfion[273].... »

[68b] Les anciens ont connu le cumin, appelé éthiopique. Les mots thymos, thym, origanos, origan, sont du genre masculin.

 

CHAP. XXVII. Anaxandride dit :

« En hachant des asperges, de l'oignon marin[274] et de l'origan, qui, mêlé avec de la coriandre, relève le goût de la saumure... »

Ion a dit :

« L'origan se trouve aussitôt caché dans sa main... »

Mais Platon, ou Cantharus, a fait l'origan féminin.

« L'origan d'Arcadie est très pénétrante. »

Épicharme et Ameipsias l’ont fait neutre.

[68c] Nicandre a fait thym du genre neutre, dans son traité des Abeilles.

78. Pepons.[275]

Cratinus, dans ses Ulysses, appelle le pepon sicyos spermatias, ou sicyos à graine.

« Fils de Lærte, as-tu jamais vu à Paros un de tes amis acheter un fort gros sikyos spermatias? »

Platon le comique dit dans son Laïus :

« Ne voyez-vous pas ce Méléagre, ce descendant de la race illustre de Glamon, ce grand sot, cet hébété, comme il rode partout [68d] avec ses jambes de pepon eunuque?[276]

Anaxilas a dit :

« Il a la cheville du pied aussi grosse qu'un sikyos pepon. »

On lit dans Théopompe:

« Elle est devenue à mon égard plus molle que la chair d'un pepon ou d'un sikys. »

Selon Phanias, le sikyos et le pepon étant encore très jeunes[277] et sans semence, se mangent entièrement, même avec la queue; mais lorsqu'ils sont mûrs, on n'en mange plus que la chair. La courge crue n'est pas mangeable, mais elle le devient étant bouillie et rôtie.

Dioclès de Caryste dit, dans le premier livre de son traité des choses salubres : « Parmi les végétaux sauvages qui se cuisent, il faut compter la laitue champêtre [68e] (la noire est la meilleure), le cresson, la coriandre[278] sec, le sénevé, l'oignon (et ses espèces); savoir, l'échalote, la ciboule, l'ail et ses rejetons, le sikyos, le pepon, le pavot. Peu après il ajoute : le pepon est plus ami de l'estomac, et plus facile à digérer; le sikyos cuit est délicat, diurétique, innocent; mais le pepon, bouilli dans du vin miellé, est plus laxatif..... »

Speusippe, dans son traité des choses semblables, appelle le pepon, sicya. Dioclès, après avoir dit pepon, ne dit jamais sikya. Speusippe, après avoir dit une fois sicya, ne dit plus pepon

[68f] Diphile dit que le pepon a un meilleur suc, et qu'il émousse bien l'acrimonie des humeurs en s'y mêlant ; qu'au contraire, le sikyos fournit un suc de moins bonne qualité, nourrit peu, s'altère (ou digère) promptement, et passe beaucoup plus vite.

79. Laitue.

Les Athéniens l'appellent thridakine. On lit dans Epicharme :

« Une tige de laitue (thridakos) dont on a ôté la peau. »

 

[69a] CHAP. XXVIII. Strattis dit thridakinides dans ce passage :

« Mites,[279] vous qui ensuite vous promenez avec cinquante pieds dans les jardins garnis de belles plantes, figurant sur ces herbages[280] les danses des satyres à longues queues, tournant de tous côtés dans les feuilles des basilics, des laitues (thridakinides) et du persil odorant. »

Théophraste[281] dit que la laitue blanche est plus douce et plus délicate, et qu'il y en a trois espèces ; la première a la feuille large, la seconde ronde; la troisième est celle qu'on appelle laconique : sa feuille tient de celle du scolyme.[282] Sa tige s'élève droite, et assez haute, sans aucune ramification. Quant aux laitues à large feuille, il en est qui ont les tiges si fortes, [69b] qu'on en fait des portes aux haies des jardins; et quand on a coupé les tiges,[283] les rejetons qui poussent de nouveau sont d'un goût plus agréable.

80. Nicandre de Colophone dit, dans le second livre de ses Gloses,[284] qu'on appelle brenthis en Chypre, la laitue où Adonis s'était caché lorsqu'il fut tué par le sanglier.

Amphis parle ainsi dans son Ialème :

« Dans les laitues (thridakinois) plante détestable ; car si un homme qui n'a pas encore soixante ans, s'avisait d'en manger [69c] lorsqu'il a intention de voir sa femme, il passerait toute la nuit auprès d'elle sans pouvoir remplir ses désirs, quelque chose qu'il fît pour forcer la nature à le rendre heureux. »

Mais Callimaque dit que ce fut Vénus qui cacha elle-même Adonis dans des laitues. Les poètes ont présenté cela comme une allégorie, en ce que ceux qui mangent souvent des laitues ne sont guère propres aux ébats amoureux. Voilà pourquoi Eubule dit dans ses astytes ou impuissants:

« Ma femme, ne me sers pas de laitue [69d] sur ma table, ou ne t'en prends qu'à toi-même; car on dit que c'est sous cette plante que Vénus avait caché Adonis, peu avant sa mort ; ainsi c'est un manger de morts.... »

Cratinus dit que Vénus, amoureuse de Phaon, le cacha dans des laitues; mais Marsyas le jeune, dit que ce fut dans des orges vertes......

Pamphile dit, dans son glossaire qu'Hipponax appelle la laitue tetrakine. Selon Clitarque, les Prhygiens l'appelaient de même [69e] Ibicus, philosophe Pythagoricien, dit que ceux de sa secte appelaient eunuque l'espèce de laitue qui a, en sortant de terre, la feuille large, lisse et sans tige; et que les femmes la nommaient astylis (ou qui rend impuissant), parce qu'elle pousse considérablement par les urines, et éteint le principe prolifique ; que cependant elle est fort bonne à manger.

Selon Diphile, la tige de la laitue est fort nourrissante, mais passe moins facilement que la feuille. Celle-ci, dit-il, nourrit encore plus, passe plus vite, mais est plus flatueuse.

En général, la laitue est stomachique, rafraîchissante, tient le ventre libre, fait dormir ; [69f] le suc en est bon ; et, cuite, elle modère le désir des jouissances amoureuses. Plus elle est tendre et délicate, mieux l'estomac s'en accommode, et mieux elle fait dormir. Plus, au contraire, elle est dure et sèche, moins l'estomac s'en accommode : le ventre s'en trouve aussi moins bien, et elle dispose moins au sommeil. La laitue noire est celle qui rafraîchit le plus, et qui tient le ventre en meilleur état. Celle d'été fournit un suc de meilleure qualité, et plus nourrissant. La laitue d'automne a plus de sécheresse, et ainsi nourrit moins. Il paraît que la tige même de la laitue empêche d'avoir soif. Glaucias dit que cette tige et les cimes de choux (brocolis) sont les meilleurs de tous les herbages, bouillis dans un pot....

[70a] Théophraste[285] met ailleurs au nombre des légumes qui se sèment, la poirée, la laitue, la roquette, le sénevé, la patience, la coriandre, l'aneth, le cresson; mais, selon Diphile, ces légumes en général nourrissent peu, appauvrissent les humeurs en fournissant un assez mauvais chyle, causent des redondances, et se distribuent mal...

Épicharme fait quelque part mention des légumes d'été.

82. Artichaut.

Sophocle écrit kynara[286] dans ses Colchiennes; et kynaros dans son Phœnix.

« Le kynaros remplit d'épine tout l'arpent. »

Hécatée de Milet, dans sa description de l'Asie (si cependant cet ouvrage est vraiment de lui, [70b] car Callimaque l'attribue à un Hécatée insulaire) ; mais quel qu'en soit l'auteur, Hécathée nous dit : Il y a près de la mer d'Hyrcanie, de hautes montagnes couvertes de forêts : or, on trouve sur ces montagnes l'épine kynara.[287] » Il ajoute dans ce qui suit : Les Chorasmiens sont placés à l'orient des Parthes, dans un pays où l'on voit de différents côtés des plaines et des montagnes. Il y a dans ces montagnes arbres sauvages, épine kynara, (ou épine-kynara) saule, tamaris. Il ajoute que la kynara croît dans le voisinage du fleuve Indus.

Mais Scylax, ou Polémon, dit que le plat pays y est arrosé par des eaux de sources et par des canaux:[288] que, [70c] quant aux montagnes, on y voit croître la kynara, et autres plantes. Il ajoute dans les récits suivants : Il y a depuis cet endroit, et des deux côtés de ce fleuve, une chaîne de montagnes très hautes, et hérissées d'arbres sauvages et de l'épine kynara. »

Didyme le grammairien, expliquant le kynaros arkantha de Sophocle, demande si Sophocle n'aurait pas parlé là du kynosbatos,[289] parce que c'est un végétal hérissé d'épines, et qu'on ne touche pas aisément. En effet, la Pythie l'a nommé le chien de bois. [70d] Un Locrien ayant été averti par un oracle de fonder une ville dans le lieu où il serait mordu par un chien de bois, il arriva qu'il fut déchiré à la jambe par un kynosbate : en conséquence il bâtit là une ville.

Le kynosbate tient le milieu entre le buisson et l'arbre, comme dit Théophraste : il porte un fruit rouge, semblable à celui du rosier;[290] il a la feuille analogue à celle de l’agnus castus.[291]

83. Cactus.

Phanias, au liv. 7 de ses Plantes, et Théophraste,[292] au liv. 6, appellent cacte de Sicile, certaine plante épineuse : or, cette plante appelée cacte, ne se trouve qu'en Sicile; on n'en voit pas en Grèce. Elle pousse, dès sa racine même, des tiges qui touchent la superficie du sol. La feuille est large, armée d'épines. Ce sont ces tiges que l'on appelle proprement cactes. [70e] En ôtant la peau, on peut les manger malgré certaine amertume qui s'y trouve. On les conserve dans de la saumure,

De la racine il s'élève une autre tige droite, qu'on y appelle pternix : elle est pareillement bonne à manger.- En ôtant au réceptacle[293] pulpeux sa partie lanugineuse (ou le foin), il est semblable à la cervelle du palmier; on peut alors le manger : on l'appelle ascaleere.[294]

Quelqu'un, peu disposé à croire ce récit, dira, peut-être avec confiance, que le cacte de Sicile [70f] est ce que les Romains ont appelé carduus, et manifestement ce que les Grecs appellent cinara, vu que Rome étant peu éloignée de la Sicile, il a été facile de faire cardos[295] de cactos, par le seul changement de deux lettres.

Mais Epicharme nous apprend bien certainement que le cactos est un des légumes qui se mangent ordinairement. Voici le détail qu'il nous donne de quelques-unes de ces plantes.

« Le pavot, le fenouil, le cactos[296] hérissé de pointes. »

Il dit ailleurs :

« On peut bien manger le cactos[297] parmi les autres légumes ; car si on le sert après l'avoir pénétré d'une sauce grasse, il est fort agréable; mais servi seul (sans cet apprêt), je n'y touche pas. »

Il dit encore :

[71a] « Des laitues, des dattes,[298] des oignons de mer, des raiforts et des cactes. »

On lit en outre ce passage du même poète :

« Un homme parut arriver de la campagne, apportant du fenouil, des cactes, de l'asphodèle, de la patience, du scolyme[299] avec la racine, de l’escarole, de l'atractyle,[300] de la fougère femelle, du pet d'âne.[301] »

Philétas de Coos dit:

« L'os du faon sera sonore,[302] si l'animal meurt s'étant toujours garanti de la piqûre du cacte. »

84. Cinara.

Sopatre de Paphos, qui vécut du temps d'Alexandre, fils de Philippe, [71b] et même jusqu'à Ptolémée II, surnommé Philadelphe, roi d'Egypte, comme il le dit dans un de ses ouvrages, appelle aussi, comme nous, la même plante cinara.

Ptolémée Évergète, un des disciples du grammairien Aristarque, fait ce détail dans, le second livre de ses mémoires : « Près de Bérénice est le fleuve Léthon, dans lequel on trouve le poisson appelé labrax[303] ou le loup, la dorade, quantité d'anguilles, même de celles qu'on nomme royales, et moitié plus grandes que celles de Macédoine et du lac Copaïs. [71c] Tout le cours de ce fleuve est rempli de poissons de différentes espèces. Il croît là beaucoup de cinara (artichauts). Les soldats qui nous accompagnaient en cueillirent, et les mangèrent. Ils nous en apportèrent dont ils avaient ôté les épines......»

Je sais aussi qu'il y a une île appelée Cynaros,[304] dont Sémus fait mention.

85. Cervelle de Palmier,

Théophraste ajoute ceci, après avoir parlé du palmier:

« C'est ainsi[305] qu'on multiplie le palmier en semant les dattes; mais pour en avoir de plant, on coupe la partie supérieure, dans laquelle[306] est la moelle ou cervelle. (Enkephalos)......»

[71d] Xénophon dit au second livre de son Anabasis: Ce fut là que nos soldats mangèrent la première fois de la cervelle de palmier. Ils furent presque tous étonnés de la saveur exquise et singulière qu'ils trouvèrent dans ce fruit. Mais cet aliment leur donna de grands maux de tête. Le palmier dont on avait enlevé la cervelle,[307] se desséchait totalement. »

Nicandre dit dans ses Géorgiques:

« Ils coupent à l'envi les rejetons des palmiers, et ils en emportent la moelle,[308] mets délicieux pour des jeunes gens. »

[71e] Diphile de Siphne s'explique ainsi à ce sujet: La cervelle du palmier nourrit beaucoup, engraisse; mais elle est pesante sur l'estomac, d'une distribution difficile, cause de la soif, et resserre. »

Quant à nous, mon cher Timocrate, dit Athénée, si nous voulons montrer que nous avons de la cervelle jusqu'à la fin de ce discours, il faut le finir ici.

86.  ????

 

 

FIN DU LIVRE SECOND.

 

 

 


 

[1] Ce second Livre, qui renferme des articles essentiels pour l'histoire naturelle, a exigé plus de notes que je n'avais dessein d'en faire. D'ailleurs, Casaubon est ici d'une si grande ignorance, d'une si grande ineptie sur certain nombre d'articles, que cette raison seule m'aurait empêché d'être court. Les fragments intéressants de ce Livre, faisant beaucoup regretter ce que l'Abréviateur a supprimé, je tâcherai d'en rendre la lecture moins fastidieuse, par quelques réflexions relatives aux matières qui y sont rappelées. Casaubon nous fait la grâce de nous dire que les termes grecs n'ont pas été compris des savants. Je ne sais ce qu'il entend par savants ; mais longtemps avant lui on avait senti la force du texte. Baduell, dans son excellent Lexique, l'explique ainsi: Aliquid, ultra justum, subinde admetiri, et ad cumulum addere. On n'avait donc pas attendu Casaubon pour comprendre ce passage.

[2] Les Grecs ont eu leur mot oinos de l'Asie, comme on le sait ; ainsi laissons-les s'amuser d'étymologies à leur gré. Voy. Plutarq. Sympos. l. 7, Q. 10.

[3] Casaubon ne sait ce qu'il dit ici. Il confond les personnages. Adam, qui le relève a propos, se trompe cependant lorsqu'il dit que Lycaon n'a pas eu de fils nommé Oresthée. Pausanias le contredit formellement dans ses Arcadiques. Voy. Pausan. Edit. Wechel, 1583, p. 287. Mais Casaubon a tort d'attribuer à celui-ci ce que la fable dit d'Oresthée, fils de Deucalion. Le passage se trouve entier dans les Phociques du même, p. 356 : ainsi la leçon ne doit pas être changée. Quant à epi basileia (ablatif), Casaubon le devait aux manuscrits, et non pas à ses conjectures. Ces plagiats ne sont pas rares chez lui.

[4] Ce passage se trouve dans Platon, p. 56, édit. Basil. 1553. Je l'ai ensuite retrouvé dans les notes de Kuster. Suid. t. 2, p. 669.

[5] Iliade 6.

[6] Voy. Suidas. Ibid.

[7] Addis cornua pauperi, etc. dit Horace.

[8] On verra des réflexions bien contraires dans Platon, de Legibus a, à la fin.

[9] Adamon. Leçon des manuscrits : doit-on lire adamnon? J'en doute ici. Au reste, voyez l'Hésychius d'Alberti à ce mot, et adamatos.

[10] C'est à peu près ce que l’on trouve dans les problèmes d'Aristote, sect. III, n° 18; mais l'assertion n'en est pas plus vraie.

[11] Conservez hameteros, que Casaubon veut changer : c'est un Dorien qui parle; et lisez au vers n° 8, ho d’ogd, avec Adam. Conférez ensuite Suidas, t. 2, p. 669.

[12] Je lis pasees synopadon aoidees, avec Kuster, ibid. Les manuscrits portent la faute des imprimés.

[13] Conférez Plutarque, Sympos. l. 7, q. 10, p. 715. Edit. Ruald.

[14] Ou des saisons. Elles étaient figurées par une rose, un épi, une pomme. Cette théorie tient à celles de l'Egypte, où il n'y a que trois saisons. Vigenère, sur les tableaux de Philostrate, mérite d'être lu à ce sujet. Edit. Paris, in folio. Cramoisy, 1637.

[15] Je lis diamonees, qui s'accorde avec le sens, et achève le mot dia des manuscrits. Les corrections qu'on présente s'écartent de la lettre.

[16] Voyez Platon cité plus haut.

[17] Ou inexprimable. Je lis arrheeton menos, sous-entendant oinou, que le poète a sans doute dit auparavant. Casaubon est aussi obligé de le supposer dans la correction qu'il propose. Mais je ne change que y en n, qui, en grec ont si souvent la même forme dans les manuscrits.

[18] Eudias est absurde ici. Je lis euoodias, comme l'exige le mot suivant» euoodee.

[19] Herpin. Leçon des manuscrits, et qu'on retrouvera dans Rhodigin, l. 28, c. 34.

[20] Casaubon, qui copie, devait ici ouvrir l'anthologie ; il aurait vu que son vieux manuscrit, inconnu, le trompait. Cette épigramme est de Nicérate. Edit. Brodœi, p. 116. Au lieu de megas, Brodeau présente tachys, d'après le Démétrius que Casaubon voulait indiquer ; ensuite Brodeau conserve kekrokoomenou, qui est le vrai mot qu'il faut garder. La correction de Casaubon présente un sens qu'il n'a certainement pas compris. Ce mot ne pourrait se dire du front, mais de la couronne même.

[21] Celui qui boit le vin sans mélange d'eau. Voy. Stuck. Antiquit. conviv., et Aristote, Probl. sect. III, n° 14, etc. Mais akratopote se disait aussi de celui qui boit de l’eau pure.

[22] Matton, celui qui pétrit : Céraon, celui qui mêle le vin. Adam.

[23] Adam conserve avec raison hyper.

[24] Casaubon fait pitié ici. Voy. Scaliger sur Tibulle, l. 3, El. 6.

[25] On disait Icaria et Icarios. Voyez Meursius, de Popul. Attic. Casaubon veut donc changer mal à propos Adam. Mon manuscrit porte aussi Ikarioo.

[26] Je laisse de côté ces étymologies.

[27] Diorizesthai : ce que Silius exprimait par voces distingue re lingua, Aristote a dit de la langue d'un homme ivre, glassa sphallomenee plaici r kai ou dynatai teen lexin diarthroûn. Cependant l'autre leçon qui concernerait la vue, se prouverait aussi par le même passage d'Aristote : Probl. sect. III, n° 29 ; mais je suis les manuscrits. Plutarque favorise le premier sens. Sympos. l. 3, q. 3.

[28] C'est-à-dire meta (to) thyein.

[29] Rappelez ici l'offrande de la pauvre femme de l'évangile.

[30] Quelques écrivains ont nié que telos signifiât offrande, chose consacrée, et ainsi sacrifice ; mais mal à propos. Je l'observe ici, pour donner lieu d'éviter l'erreur.

[31] Ode, p. 1.

[32] Iliade 7.

[33] Iliade 12.

[34] L'auteur parle ici d'après un aphorisme d'Hippocrate, l. 5. 23, mais dont il devait rappeler l'exception. Voy. aussi, de liquid. usu, du même.

[35] Nous connaissons en Europe des sources d'eau très chaudes, près de sources très froides.

[36] Voy. Lachambre, sur la cause de l'inondation du Nil, ouvrage assez rare aujourd'hui. On en trouve un extrait dans les Transact. Philosoph. de Londres, Edit. Angl. t. 1.

[37] Il faut ajouter ici, d'après Théophraste, Hist. l. 9, c. 20, aux femmes. Lisez ensuite Pyrrhaia, comme le même, et Pline, l. 31, c. 2. Les poètes écrivent Pyrrha. Voy. Bod, ib. p. 1172.

[38] Si Casaubon avait jamais ouvert Théophraste, il aurait vu qu'Athénée, citant de mémoire, a écrit agonaou polygona, pour atrophaou po-lytropha: de Causis, l. 2, c. 8; et que Phœta doit être ici changé en Œta, qui se trouve joint à Pyrrhaia. Hist. l. 9, ch. 11. Il est évident que Pyrrhaia doit rester ici : de Causis, l. cit. et non Tarrha. Mais Casaubon copie des notes au hasard, et n'en fait pas, ou gâte tout.

[39] Voy. Pline, l. 31, c. 4, t. 2, p. 555. — Pursan lisait ici après Egypte, ce que l'auteur dit à la fin de ce chapitre, en traduisant, « voilà ce qu'il dit de l'Egypte, où l'air, etc. » ; mais c'est une inadvertance. » Quant aux temples dont parle l'auteur, voyez Pline, l. 31, c. 5.

[40] Daléchamp lit ici soixante-six. Je n'en vois pas la raison, à moins que son manuscrit ne lui ait présenté cette leçon; mais elle serait vicieuse.

[41] L'auteur écrit gnoomosi, terme général qui signifie index, ou ce qui désigne précisément (l’heure ici.) V. l'anthologie sur ces clepsydres. Vigenère, sur les Tabl. de Philostr. Magius.

[42] C'est-à-dire, qu'elle contient des principes d'une nature plus chaude, mais accessoires. En effet, on reconnaît dans l'eau de mer une qualité onctueuse ou grasse. Je n'entrerai dans aucun détail chimique. On sentira que l'eau de mer doit être plus chaude, selon l'idée de l'auteur, lorsqu'on saura qu'elle contient différents sels, outre le sel marin, et autres substances, comme du sel de Glauber, du sel d'Epsom, du sel marin à base de magnésie et de chaux : il y a même du mercure et du fer dans le sel marin.

Quant au mot alykon, il faut l'entendre en général de toutes les eaux séléniteuses ; mais dont les qualités varient en raison des différents principes qui s'y trouvent quelquefois réunis. Ceux qui voudront avoir une idée de ces phénomènes chimiques, consulteront l'excellent traité de l'eau, par M. Macquart, in-8°. Baccius, dans son traité des Bains, donnera une idée exacte des dénominations des anciens. Voy. aussi M. Fourcroy, chim.

[43] Casaubon se met ici à la torture pour ne dire rien qui vaille. Il faut lire Arethisses avec Solin, et tout sera clair, si l'on se rappelle le lac Aréthisse ou Aréthuse, qui, selon Pline, pisces nitrosos alil. l. 2, c. 103, t. 1, p. 120. C'est le même que Strabon appelle Arsena. Il y avait huit endroits nommés Aréthuse chez- les Grecs. Voy. Stéphan.

[44] Ceci est un aphorisme d'Hippocrate.

[45] Je lis thermon avec les manuscrits, non thermainon ; et ensuite epi, non apo ; comme plus bas, epi tinas heemeras, à l'accusatif.

[46] Mauvais raisonnement, quoique spécieux. L'expérience seule le réfute.

[47] Si l'auteur avait observé la formation de la glace, il aurait vu que c'est sa structure, et non sa qualité, qui la rend plus légère que l'eau. Voy. Mairan.

[48] Principe qui est d’une bonne physique : plus les corps ont de masse sous un même volume, plus ils sont susceptibles de s’échauffer, et vice versa. Les détails que l’auteur va donner sur les eaux, se retrouvent tous, et avec plus de vérité, dans les écrits d’Hippocrate. On lira aussi avec fruit ceux que donne Théophraste, de Causis, l. 7, c. 7, 8.

[49] Voy. Pline, l. 31, c. 5. Il ajoute que c'est l'Hypanis qui surnage, lorsque les vents du midi soufflent. Je crois que Pline met ici un peu du sien : au reste, je lirais ici ginetai de dia tees kouph. tees en t. b. Mon manuscrit est ici fort altéré.

[50] On connaît aujourd'hui plusieurs sources semblables. Baccius, ibid. en rappelle aussi quelques autres connues des anciens.

[51] Nous en connaissons plusieurs semblables. Baccius en cite aussi quelques autres connues des anciens. Ibid. Vitruve, l. 8, c. 3.

[52] Aposphairoûntes. Ce mot ne peut avoir d'autre sens. Vitruve aurait-il voulu rendre ce mot par diripiunt?

[53] Il s'agit ici de Lipara, partie de la Cappadoce, non d'une des îles Eoliennes.

[54] C'est ce que Vitruve dit du fleuve Liparis en Cilicie, liv. 8, chap. 3, Edit. Philandre, 1586, in-4°. p. 315. Ce chapitre de Vitruve mérite d'être lu ici.

[55] Hippocrate savait que cette expérience était trompeuse. L'auteur la rappelle plus bas.

[56] L'Abréviateur conserve sans doute ce passage pour la seule singularité de l'expression.

[57] Je lis ici en tois Peiraioi tyranneesasi, etc. Casaubon ne de voit pas ignorer que Peiraioi est un ablatif absolu, du meilleur style, en grec, pour en Peiraioo. Les copistes ont défiguré le mot, qu'ils ne comprenaient pas. Ensuite Casaubon pouvait-il ignorer que les trente tyrans, et les dix qui leur avaient été substitués, demeuraient dans le Pirée? Il n'a donc jamais lu l'histoire de Xénophon? Voilà l'érudition de Casaubon, lorsqu'il ne trouvait rien dans les notes d'Ægius qu'il copiait. Mon manuscrit porte Peiraioi, par abréviation, et il n'y a rien à changer au texte. Adam se tait ici. Il a mieux fait que Casaubon.

[58] Casaubon a tort de substituer hoson à hon, qui est très exact, pour kath'hon.

[59] Mon manuscrit porte myrrikee, comme Théophraste écrit ce mot. Il s'agirait alors du Tamarisc.

[60] En latin, Larus. Nous l'appelons plus souvent Goéland. C'est un oiseau aquatique, palmipède dans la plupart des espèces, ayant quatre doigts à chaque pied : il est extrêmement goulu, et a un cri plaintif, qui semble être un miaulement. Les Allemands l'ont appelé, pour cette raison, Meue de Mawen, gémir, se lamenter; et nous en avons fait Mauve et Mouette. M. Camus observe sensément que Goéland serait pris, avec raison, pour le nom du genre qui comprendrait les différentes espèces de ces oiseaux. Celui qui a parlé avec plus de détail et de précision de ces espèces d'oiseaux, est, sans contredit, Cyprian, dans ses additions à l'histoire des animaux de Frangius, p. 1591 et suiv. : ainsi j'y renvoie. Cet oiseau a donné lieu à plusieurs proverbes. Voyez Gesner, page 525, sur cet oiseau et sur ces proverbes ; Suidas, à ce mot. Schott a repris ceux de Suidas ; mais Casaubon n'a pas fait attention aux termes, en hoisi Lampr., etc. Ce n'est pas eo mortuo simplement, comme traduit Daléchamp, mais inter quos Laros, Lampro mortuo, etc. Les Mouettes pleurent Lamprus mort, parce que, selon l'idée de Phrynicus, Lamprus était une des leurs, ayant la même voix et le même chant. Les Mouettes pleurent aussi Télestagores, fils de Timarès, dans l'Anthologie, mais par une autre raison. Il périt sur les côtes de la mer, dans un naufrage. Voy. Antholog. l. 3, Epigr. 61, sect. 22. Ce passage prouve, en même temps, que ceux qui ne placent les Mouettes que sur les rivières, ont mal examiné les habitudes des différentes espèces, dont quelques-unes sont, en partie, fidipèdes, et les autres palmipèdes. Cyprian les décrit bien d'après les naturalistes.

[61] Texte, Eepialos, fièvre, dont l'invasion est accompagnée de froid et de tremblement. Voy. Foës œcon. Gorrée, Lexic., etc.

[62] Je ne sais si Aristote avait écrit un traité sur l'ivresse : il est certain que ceci ne se trouve plus dans la section III de ses problèmes, intitulée de l'Ivresse. Cependant Plutarque en cite un passage qui s'y trouve. Sympos. l. 3, q. 3, et donne ainsi lieu de croire qu'il s'agit de cette section.

[63] Dont parle Strabon, l. 17, Libye.

[64] Philippique II.

[65] Je suis les textes. Kystis signifie aussi pot-de-chambre, matula. L'auteur dit qu'il l'avait ; sans doute qu'on vit qu'il s'en servait. Je lis autou, adverbe, . Daléchamp a traduit comme s'il avait lu ekcheonta, effundentem, vidant sa vessie. Cette leçon est bonne, mais je ne la trouve pas. Casaubon est pitoyable ici, et n'entend pas le sens de kystis.

[66] Voy. Brisson. Regn. Persar.

[67] Est-ce le mot oriental même Inna, qui signifie fontaine? J'avoue que je ne trouve qu'ici le nom de cette fontaine, entre les Pæoniens et les Maides. J'écris Maides avec Stephanus. Voyez-le sur ce mot. Plusieurs écrivains ont parlé de ces Maidobithyniens. Si on trouve leur nom écrit Mèdes ici, dans Strabon, Tite-Live, c'est une faute de copiste. Casaubon approuverait ici ana, mais sans savoir pourquoi, car il l'aurait dit.

[68] Ce Staphyle est le médecin de Naucrates, sur lequel voyez Pline Hard. t. 1, p. 66 ; mais Pline, l. 7, p. 415, attribue cette invention à Staphyle, fils de Silène: c'est-à-dire, qu'il a confondu la fable avec l'histoire. Le fait ne mérite pas assez d'attention pour être discuté. Voy. aussi Brodeau, Antholog. l. 1, p. 116.

[69] Réflexion de la meilleure physique, et qui explique bien la cause de l’ivresse. Casaubon fait ici une note assez longue, dans laquelle il y a autant d'inepties que de mots. On voit aussitôt qu'il copie sans entendre ce qu'il lit : il confond Plistionices, surnom d'un Appion dont Pline parle, liv. 37, c. 5, avec Plistionicus, dont parle le même, l. 20, c. 4, 12. Il dit que Pline parle de celui-ci dans son Histoire des Plantes. Pline n'a pas fait une telle histoire. Il parle des plantes dans le liv. 19, en général; et des médicaments, dans le liv. 20, où il cite Plistionicus : ensuite Casaubon cite le commentaire III, péri oxeoon, ce qui veut dire touchant les maladies aiguës. Mais Hippocrate n'a jamais écrit un tel traité. Nous n'avons de lui que son Pronostique, relatif à ce but, ouvrage où il expose les signes de ces maladies. Ægius, qui sa voit ce qu'il écrivait, aura mis sur sa marge péri oxeoon, sachant bien que cela signifiait le Traité de la diète dans les maladies aiguës ; ce que Casaubon n'était pas en état de comprendre. En outre, Casaubon expliquant le mot perata,  fait dire à Galien tout le contraire de ce que dit et devait dire ce médecin Grec. Perata était assez expliqué par stena, qui désigne dans ce passage l'extrémité.des vaisseaux où aboutissait le chyle dans le système de Galien. Mais Galien se trompait de son temps, les vaisseaux lactés, le réservoir de Pecquet, et le canal thoracique, n'ayant été vraiment connus que des modernes : nous savons donc que le chyle ne se rend pas au foie. Voici le vrai sens du passage de Plistionicus. Il conseille de boire d'abord de l'eau, afin que les vaisseaux (et surtout leurs extrémités) s'abreuvant du fluide aqueux, soient moins saisis par l'acide du vin, qui en crispe les dernières ramifications, Laperata, et empêche ainsi le sang de circuler en liberté. Cette crispation, causée par l'acidité du vin, force le sang à revenir sur le centre, et à se porter en plus grande quantité à la tête, où il peut affluer avec moins de gêne : le cerveau et les nerfs y étant alors fortement comprimés, il en résulte cette stupeur, cet abattement de l'ivresse, de sorte que, si la crispation des extrémités artérielles ne cesse pas, le sujet périt apoplectique, comme il arrive assez souvent aux ivrognes. Voilà pourquoi un homme qui a un peu bu, et même sans être ivre dans la chambre ou l'appartement, le devient s'il est frappé d'un air frais en sortant, parce que cette sensation du froid saisit et crispe les dernières ramifications artérielles. Plistionicus raisonnait donc en vrai physicien, et Casaubon en franc ignorant. Il n'a même pas su copier Ægius.

[70] Je lis ici glyky hydures, expression d'Hippocrate, et ensuite thermon. On voit comment les copistes en ont fait glyky hydoor ee, etc. Casaubon bavarde.

[71] Ce livre, très précieux, est interpolé en plusieurs endroits par des hommes cupides, pour grossir les volumes qu'ils vendaient à la bibliothèque d'Alexandrie.

[72] Je lis teen phleba.

[73] Expérience fautive, comme je l'ai dit.

[74] Casaubon est grand ici dans une bien petite chose. Il devait au moins ajouter que l'expérience faite sur le fer n'est pas sûre, parce que le fer, contenant beaucoup de molécules terreuses, est attaqué par la seule action de l'eau, si elle ne court pas dessus. Casaubon devait ensuite lire ho kai eis chalk, ou hotan eis, car le texte ne peut rester tel qu'il est : ensuite il faut lire ti ioodes.

[75] Casaubon présume que ce passage n'est plus dans Hippocrate ; c'est qu'il ne l’a pas ouvert. L'Abréviateur ou ses copistes l'ont seulement défiguré. C'est la première ligne du livre que cite Athénée. Rien de plus clair, en lisant poumon pour poton, dans Hippocrate. J'ai traduit ce passage à la lettre : il se trouve répété avec polimon, De medico, sect. I des œuvres d'Hippocrate, p. 19. Voy. de liquid. usu. Foës, Edit. Genève 1667, in fol.

[76] Hippocr. p. 283.

[77] Id. p. 284, ligne 17.

[78] Id. p. 284 ; c'est la leçon de son texte, ligne 23, du traité de l'Air, des Lieux et des Eaux.

[79] Id. p. 282, l. 53 ; p. 284, l. 29. L'auteur dit, d'après son original, que ces eaux flattent l'odorat (euoodea). Cependant l'auteur du traité intitulé des Chairs, dit que l'eau n'a point d'odeur, à moins qu'elle ne soit déjà putride : il a raison.

[80] Aristote dit que les buveurs d'eau sont inventifs.

[81] Bayle a rapporté dans son Dictionnaire les diverses opinions sur la mort de Démocrite.

[82] L'Abréviateur ne conserve ce passage que pour les mots grecs qui sont expliqués.

[83] Ce passage, que j'ai rétabli dans son vrai sens, me dispense de commentaire. On le retrouve l. 6.

[84] Epictète se sert de ce mot, en parlant des athlètes qui étaient forcés de manger ; mais on ne peut l'entendre que des âges postérieurs; car, selon Porphyre, les premiers athlètes vivaient on ne peut plus frugalement. Voyez mon édition grecque, ou ma grecque et française d’Epictète.

[85] Mot qui a désigné un lit à trois personnes, où une salle à trois lits, et en général une salle ou une table à manger. Mais Plutarque nous apprend, dans ses Symposiaques, liv. 5, q. 5, qu'on avait des salles où l’on mettait jusqu'à trente lits. Il faut lire ici Vitruve, liv. 6, c. 5, et les notes très instructives de Philandre, p. 229-236. Statius, l. 4, Sylv. 11.

[86] Je laisse à Casaubon son gerontikai, qui est vraiment un conte de vieille, et je lis geronti, comme le texte. On sait que ces joueuses ou joueurs de flûte se tenaient dans les places publiques, où l’on allait les prendre au besoin. On verra dans Pignorius, de servis, tout ce qu'on peut désirer sur ces synaulies et les instruments. Edit. Amstelod. 1614. Conférez Rhodigin, l. 27, ch. 24, avec Vitruve, l. 6, ch. 10; et Thomasin, Tesserœ Hospitalitatis.

[87] L'auteur parlera plus loin, d'après Plutarque, Sympos. liv. 3, q. 9, des proportions d'eau et de vin qu'on mêlait. Conférez aussi Philandre sur Vitruve, p. 231, l. 6, c. 5,

[88] Voyez sur cette partie du luxe des anciens, Bochart, Géograph. liv. 1, ch. 6. Edit. Traject. 1707, in-folio ; et Philon, de vit. contemplat.

[89] Casaubon veut ici faire le docte aux dépens de la vérité. Daléchamp traduit bien Sardiano. Il s'agit des teintures de Sardes dont parle Pline, l. 7, ch. 56, t. 1, p. 414 : Inficere lanas Sardibus Lydi. Les copistes grecs et latins ont souvent confondu Sardiano ou Sardianico avec Sardiniano. On en aura la preuve dans les Adversaria de Turnèbe. Casaubon nous renvoie aux proverbes grecs. Il entend sans doute Apostolius. Mais celui-ci est formellement contraire à Casaubon, puisqu'il écrit sardianique, cent. 5, n° 38, et non sardiniaque, en parlant de teinture, qui ne peut être prise que dans le sens de Pline

[90] Le lecteur n'a pas besoin d'interprétation sur le mot ereidoo : il est digne d'Aristophane.

[91] Voy. Brisson, de Regn. Persar. sur ces parents du roi, et les circonstances de ce passage.

[92] Rhodigin, l. 8, c. 15, servira d'ample commentaire sur tout ce que les interlocuteurs appellent ici trépied. Voyez-en deux modèles dans Philandre sur Vitruve, p. a33, et suiv. Pignorius, de Servis, et autres.

[93] Celui qui levait l'impôt du cinquantième denier. Adam dit très bien ici que cet homme, à qui l'on donne les choses cinq par cinq, calcule que, si l'on va jusqu'à dix articles, il y en aura bientôt cinquante.

[94] Athénée copie ici Plutarque : Sympos. Voy. Stuck, au mot ferculum.

[95] On interprète ce mot par pommes de coucou : soit. Ceux qui voudront de longs détails sur ce fruit, consulteront Bod sur Théophraste, l. 3, c. 4. p. 316-319.

[96] Ce mot signifie, à la lettre, roulée ; cependant les érudits sont incertains sur le vrai sens de cette dénomination. Rhodigin en parle sans trop s'expliquer, l. 27, c. 26. Athénée reste lui-même indécis, l. 15, p. 678 du texte grec, au chap. 6, à la fin, et chap. 7. Paschal, de Coronis, l. 1, ch. 13, mérite d'être conféré avec Bod sur Théophr. p. 317, col. 2. J'avoue que tous ces détails sont trop érudits pour faire comprendre la chose, qui me paraît toute simple. C'était une couronne faite en roulant de petits rameaux, et quelquefois avec leur fruit au moins, voilà l'idée seule que je puis m'en former. Bod me paraît dans l’erreur.

[97] Le second estomac des animaux qui ruminent»

[98] Cette dénomination n'était pas généralement admise. Il paraît, par un passage de Galien, que le Brabylon était ce que le peuple appelle vulgairement chez nous Domino, petite prune ronde, d'un brun noirâtre, et d'une saveur plus acide que le Damas : ce que Bod n'a pas compris. J'observerai en outre (ce que j'ai omis précédemment) que Bod, p. 317, col. 2, à la fin, lit mal ce passage d'Athénée. Il ne faut pas y lire idioos de haleitai, etc. mais idioos kaleitai, alors tout est clair. Quant au mot akrodryon, il ne se dit que du fruit quelconque qui pend aux branches d'arbres. Celse rend ce terme parfrue tus surculorum j il a bien vu. Le mot ahrodryon se dit, tant des fruits pommes, selon les anciens, que des fruits noix, c'est-à-dire, 1° des fruits dont la chair renferme le noyau bu l'amande, ou le pépin ; 2° des fruits quelconques, dont l'amande est renfermée dans une coquille ou peau, comme noix, noisettes, amandes, châtaignes. Je fais cette observation préliminaire, pour prévenir le lecteur sur les idées que les anciens attachaient aux termes que j'explique, et qui se trouvent souvent répétés. Je prends le mot fruit dans le sens vulgaire; car ce mot, prisa la rigueur, ne désigne que ce qui est produit et peut reproduire, selon Théophraste. D'après cette idée, qui est vraie, il n'y a fe fruit que l'amande quelconque renfermée dans sa coque ou sa peau,

[99] Athénée dit vrai. Voy. Théophr. Hist. l. 3, c. 7.

[100] Quelques-uns ont pris ce terme pour la digestion : Celse, selon cette idée, le rend par facile vitiatur. C'est, je crois, le sens ici.

[101] Théophr. Hist. l. 3, ch. 13.

[102] Le texte de Théophraste porte aujourd'hui platyteron, plus large. Je ne sais pourquoi Bod n'observe pas cette différence, p. 206. Par néflier, entendez ici le setanios, ou la seconde espèce de Dioscoride, l. 1, c. 171.

[103] D'autres traduisent, ayant la forme dune alvéole. Mon manuscrit porte keerioodes ; ce qui répondrait à ce sens-ci. Mais Bod observe sensément que la fleur du cerisier (il pouvait dire quelconque) n’a pas la forme d'une alvéole. Je me suis fait apporter des fleurs de plusieurs espèces, je ne l'ai pas non plus remarqué. Théophraste ne peut pas non plus avoir parlé assez improprement pour désigner le calice seul par le terme de fleur, à laquelle il donne plusieurs petits pétales (il y en a cinq). Ce calice est monophylle, forme un tube, qui, ne faisant pas corps avec une partie de l'ovaire, tombe avant la maturité du fruit ; mais il n'est pas hexagone comme l'alvéole, dont chaque angle est de soixante degrés. Chaque pétale, arrivé à son vrai terme, forme un cuilleron assez évasé, mais qui ne ressemble en rien à l'alvéole. Ce cuilleron s'aplatit même bientôt, de sorte qu'il n'y a plus que le bord supérieur (divisé par une très petite échancrure) qui relève. Tous ces détails, pris sur la fleur même, prouvent donc que Casaubon ne sait ni ce qu'il dit, ni ce que disent les passages de Théophraste, qu'il cite pour prouver que Daléchamp a mal traduit ceram olet : c'est cependant la vérité. Ainsi, je lis keeroodes, et je soutiens que c'est la vraie leçon, malgré l'orgasme de Casaubon.

[104] Plakminier, de la famille des Airelles. Voy. M. Adanson. Famille des Plant. t. 2, n° xxii.

[105] Alisier. Voy, Tournefort, Inst. R. herb. Selon Théophraste, Hist. l. 3, ch. 15, op l'appelait aussi krataigoon. Je préviens les lecteurs peu éclairés sur ces sortes de matières, de ne pas le confondre avec le krataigonon ou le melampyron de Dioscoride, notre bled noir. Voy. Dioscor. l. 3, 189. Par néflier, entendez l’anthedon ou l’azérolier. Bod entend mal ce que dit Athénée, d'après Théophraste, ton de charagmon ouk ekei hoosper, etc. Cela ne signifie pas, il n'a pas de découpures à la feuille, mais il a les découpures de la feuille différentes de, etc. ; et cela est vrai. D'autres retranchent la négation, et disent, il a les feuilles découpées comme, ttc, Il y a vraiment quelque ressemblance apparente. Le texte de Théophraste, qui porte hoosper kakeino, paraîtrait favoriser ce sentiment. En effet, pourquoi ce kai devant ekeino, après une négation? Ceux qui entendent bien la langue de l'auteur, sentiront cela comme moi. Le mot ouk serait donc résulté de la finale on du mot précédent. Ces erreurs ne sont pas rares dans les manuscrits.

[106] Daléchamp et Bod ont bien aperçu l'erreur d'Athénée. Danda venia Athenœo, dit Bod, p. 133, in re herbaria parum exercitato.

[107] C'est le cerasus pumila de Malhiole. Il s'élève cependant jusqu'à six et sept pieds dans de bonnes terres. La saveur de son fruit est acerbe, même lorsqu'il est bien mûr. Quelques-uns ont pris cet arbrisseau d'Athénée, pour le periclymenum folio serrato de J. Bauhin : cerasus dumetorum, dont la saveur est très désagréable. Quant à l'arbousier, J. B. convient qu'il lui a fatigué l'estomac. Si d'autres n'ont pas ressenti cet inconvénient, ni mal de tête, il faut convenir avec Bod, que cela dépend des lieux et du sol où peut croître ce végétal. Voy. Bod, p. 343, et suiv. Dioscoride, l. 1, 176.

[108] Je suis la leçon de mon manuscrit. La correction que Bod veut faire ici est inutile. Casaubon lisait comme mon manuscrit, d'après celui de Farnèse

[109] Je lis automata.

[110] Pline confond le nom de l'arbre avec celui du fruit, Voy. Bod.

[111] Clusius dit en avoir mangé sans inconvénient. Hist. Plant. rar. liv. 5, ch. 30.

[112] Titre incertain d'une pièce qui n'existe plus, et que Casaubon avait le loisir de chercher.

[113] A l'article des vins, Athénée est un Sophiste ou Erudit chez notre abréviateur.

[114] Bod croit retrouver l'étymologie de ce mot dans sa langue flamande. Voyez-le aussi sur l'origine des cerises;

[115] Xénophane, contemporain d'Anaximandre (Bayle), avait parlé des cerises longtemps auparavant. Athénée l'ignorait-il? C'est au moins ce qu'assure Pollux.

[116] Figue de Pharaon ou d'Egypte. Il n'est pas de botaniste qui ne parle de ce figuier à feuilles de mûrier. J'observerai seulement que, selon Théophraste, on déchirait ce fruit avec un onglet de fer, et qu’on l’oignait d'huile ; ce que n'ajoute pas notre auteur. Du reste, on consultera les deux Bauhins, Rawolff, Prosper Alpin ; Dapper, dans son Egypte. Les lois romaines nous apprennent qu'il était défendu, sous les peines les plus rigoureuses, de rien arracher d'aucun de ces arbres dont les racines maintenaient les terres des levées et des digues.

[117] Casaubon veut lire ici en quatre jours ; mais l'auteur qui dit en trois, suppose par-là que ce fruit est mangeable le quatrième : en cela il s'accorde avec Théophraste : d'ailleurs, Athénée, qui était Égyptien, devait mieux connaître ce fruit que Théophraste et Pline.

[118] Texte pepaiteros. Ce mot peut être pris pour un homme doux, flexible. Il se dit aussi d'un homme usé de vieillesse. C'est ainsi que Nicétas Choniatès appelle le vieux Andronic Comnène, pepoon, vetulus exsuccus, en rapportant son mariage avec une très jeune princesse, qu'il désigne élégamment par omphakizousan, ou toute verte.

[119] Voyez M. Adanson, Famille des Plantes, t. 2, p. 377. J'ai employé le mot français épi, qui est propre ici.

[120] J'ai déjà expliqué le mot akrodrya. Voyez aussi Bod, p. 204, col. 1 ; et Rhodigin, l. 7, ch. 15. J'ajouterai que Bochart s'est trompé, lorsqu'il a cru que ce mot ne désignait que les fruits duri et lignosi corticis. Géogr. col. 629.

[121] Casaubon dit qu'il a quelquefois dormi ; c'est surtout ici, autrement Daléchamp eût été un Tirésias sous sa plume. Diagonas n'est pas ici un terme de géométrie, mais l'expression même de la propagation des fruits ou des graines, autrement Phanias aurait écrit diagoonas, comme Théophraste a dit goonias en parlant d'angles : Hist. l. 1, ch. 18. Goneuesthai est un terme de Théophraste, et qui présente la même idée de propagation. Ensuite je lis hyphaimoûsas, et tout est clair, quoique Casaubon trouve Phanias si obscur ici et ailleurs. Cet habile Grec décrit la mûre sauvage presque dans les mêmes termes que M. Adanson ; mais Casaubon ne connaissait pas les choses, il ne pouvait comprendre les mots. Pytherme, dit Higésandre, rapporte que de son temps, les mûriers ne portèrent aucun fruit pendant vingt ans, et que la goutte devint une épidémie si générale, qu'elle attaqua les hommes faits, les enfants mâles ou femelles, les femmes, les eunuques, que les bestiaux n'en furent même pas épargnés, et particulièrement les deux tiers des brebis.

[122] On pourrait rapporter à ce mot le Tripudium de Turnèbe : Advers. L. 27, ch. 17 ; et de Pline, l. 1, p. 748. V. Hardouin, note.

[123] Texte : mostène. Turnèbe pouvait indiquer ici à Casaubon les noix de Prœneste : ibid. comme Saumaise a très bien corrigé, t. 1, p. 605. Solin. Edit. Paris ; ce sont les avelines.

[124] Ces amandes étaient une des espèces des tarentinœ de Pline, tom. 1, p. 749. Turnèbe se trompait en lisant terentinx comme de tener. Ibid.

[125] Casaubon et d'autres trouvent ici Hésychius altéré : ils ont tort. Ce grammairien dit que mukeeros signifie une amande, et que quelques-uns comptent les noix parmi les fruits pommes. Son observation est juste.

Hardouin a aussi noté cette erreur, Pline, l. 1, p. 749, au mot molluscœ. Il est donc inutile de vouloir lire dans Hésychius malaka karya > qui seraient les noix mésanges, fragili putamine.

[126] Voyez, sur les amandes et dur ce médecin, Plutarque, Sympos. liv. 1, q. 6, p. 624. Edit. Rualdi ; et Bochart, Géogr. col. 629.

[127] Voyez Erasme, Adag. col. 249, édit. 1699.

[128] Ce n'est pas ici le hêtre mais une des espèces du rouvre, comme le distingue bien Théophraste, ajoutant qu'il résiste, par son extrême dureté, a toute l'inclémence de l'air, des pluies, etc. Ces statues de Pan paraissent avoir été faites de bois brut: autoxylos, dit Apollonius dans l'Anthologie, liv. 4, sect. des statues, épigr.

[129] Je cherche le sens de cette expression. L'amandier, fleurissant le premier de tous les arbres, est le plus exposé à tromper l'espoir de son propriétaire, s'il sent l'impression des vents du nord. Est-ce dans ce sens que jure le personnage d'Eupolis, promettant beaucoup pour ne rien tenir? ou doit-on entendre l'amandier, des cheveux blancs, comme quelques-uns l'entendent dans l'Ecclésiaste de Salomon? Voyez Levinus, Phytologia sacra; Hiller, Hierophyt.; Schlichter, Decim. Sacr. observat. 28. Au reste, d'autres juraient par les câpres, les choux, etc. Voyez Erasm. Adag.

[130] Ou casse-amande.

[131] Espèces d'avelines. On a aussi appelé noix d'Héraclée, ville du Pont, ce que nous nommons châtaignes : ce qu'il faut bien observer. Rien de si confus que ce que les Grecs nous disent sur les dénominations des noix. Saumaise a beaucoup disserté à ce sujet ; mais à peine peut-on se tirer de ses détails. Voyez son Solin. Pline prévient son lecteur, en disant : Nuces vocamus et castaneas, quanquam accommodatiores glandium generi. t. 1, liv. 15, ch. 23.

[132] Marron.

[133] Texte, Trageemata. Ce mot avait chez les Grecs un sens plus étendu que notre mot dessert. Il se disait des hors-d'œuvre, et de tout ce qui n'était regardé que comme un accessoire aux repas. Ainsi, les trageemata, qui étaient proprement des choses à gruger, se servaient avant les repas, ou après, et même avec les mets du repas. Nous en avons fait dragées. Je préviens, une fois pour toutes, du sens de ce mot, pour ne pas donner lieu à quelque critique mal fondée.

[134] C'est notre noix, et surtout de la grosse espèce. Elle se nommait aussi noix royale.

[135] Espèce de châtaigne plate, que Pline, ibid. appelle pura et plana. Le mot pura signifie ici, sans cette espèce de duvet que l'on remarque sur la coque des marrons.

[136] En Lydie, non la Sardaigne. Il s'agit d'une espèce de châtaigne. Sardianos balanos, dans Pline, liv. 15, ch. 23, non sardinianos, comme le portent quelques éditions.

[137] Voyez Macrobe, sur ces amandes de Thase. Saturn. liv. I, chap. 14 et Théophr. De causis plantarum, liv. 1, ch. 9 ; Bochart, liv. ch. supra.

[138] Daléchamp a mal divisé ce passage. Adam n'a pas compris le mot kenou, en traduisant sans cosse. Il désigne un pois vide. Érébinthe était aussi un des surnoms de Bacchus. Voyez-en la raison dans Rhodigin. liv. 7, ch. 15; conférez Suidas.

[139] Ce pois a, dit-on, eu ce nom de sa forme analogue â la tête d'un bélier. Voyez Théophr. Hist. liv. 8, ch. 5; Bod, ibid. Pline, tom. 2, liv. 18, ch. 12; et Hard., note 5, 6. M. Brotier, tom. 3, p. 541. Kreios signifie bélier: aries, latin.

[140] Cicerole. Ochrus folio integro capreolos emittente, J. B. C'est une espèce de lathyrus, qu'il ne faut pas confondre avec l’épurge ou lathyris.

[141] On sait que plusieurs peuples mangent encore des cigales et des sauterelles, Bochart, t. 2, liv.4, ch. 7. Quant au mot bulbe, c'est un nom général chez les anciens. Mathiole, Bod, Chabrée, dans ses Icônes plant., Hardouin, M. Brotier et autres, remarquent que les anciens comprenaient sous cette dénomination, nombre de productions végétales qui nous sont en grande partie inconnues, et que le pauvre mangeait alors. D'habiles botanistes croient même qu'ils ont mis dans cette classe de végétaux nos pommes de terre, qu'ils ont bien connues, quoiqu'on les dise originaires d'Amérique. Ainsi elle comprenait tout ce que les latins appelaient tuber et cœpa, pris dans le sens le plus général. Je suis aussi de cet avis. Cependant ils ont assez souvent désigné nos truffes par le mot bulbe, surtout lorsqu'ils les disent favorables aux ébats amoureux. C'est ainsi que le Scholiaste d'Aristophane explique par hydna, deux passages de ce poète, l'un des Nuées, l’autre des Concionatrices.

[142] Stobée, tit. 69, cite un vers de ce poète, que Vossius n'a pas nommé. Ce passage est du poète Alexis.

[143] Voyez ce même passage plus ample, et avec un peu de différence, liv. 10, p 420, lin. C. du texte grec. Democritos est un terme de plaisanterie, aussi bon que ce que Casaubon veut substituer. Laissons les textes; ces termes sont trop peu importants pour arrêter un homme qui n'abuse pas de ses loisirs.

[144] On le criait à vendre par les rues. Le paysan et le pauvre citadin en faisaient un régal. Ce mot se dit aussi du marc de raisin. Voyez le Schol. d'Aristoph. sur les Nuées et les Chevaliers. Bod, sur Théophr. p. 314. On lirait peut-être mieux, dans ce passage, rhoas, des grenades, que rhodas, des roses. Ces deux mots sont assez souvent confondus dans les manuscrits.

[145] Je ne vois pas clair ici. Ce mot ferait-il allusion à la qualité échauffante de ce légume? V. Celse. Si cette leçon est vraie, le mot laïs signifiant un bouc, on pourrait expliquer le texte par ces termes, qui solvit capros in venerem, dans le sens figuré qu'a pris Horace, en disant, tauri ruentis in venerem. Mais les manuscrits portent lysiadas ; mot encore plus obscur. C'était une épithète des nymphes. Les lupins doivent être longtemps dans l'eau pour être mangeables. Le lecteur cherchera mieux s'il peut.

[146] Il paraît qu'Athénée a lu des textes de Théophraste un peu différera des nôtres, ou que l'Abréviateur a changé celui d'Athénée. Voyez, entre autres passages de Théophraste, de Causis, liv. 4, ch. 2, ch. 16; liv. 1, ch. 7. Hist. liv. 8, chap. 8. Mais Casaubon fait une demande qui prouve qu'il n'a jamais ouvert Théophraste, et qu'il ne fait que copier autrui. D'abord il aurait corrigé dans notre texte en too tritoo tees, etc. ; car le passage se trouve liv. 3, chap. 17, où il s'agit des maladies des végétaux. Théophraste avait dit la même chose, Hist. liv. 8, chap. 10 ; mais il donne des raisons solides qui dispensaient Casaubon de sa sotte demande. Conférez de Causis, liv. 4, ch. 17, ch. 2) vers la fin. J'ai traduit noircit avec Théophraste, de Causis ; liv. 4, ch. 2. Le texte d'Athénée porte megas, grand. Casaubon ne marque cette erreur qu'en citant Daléchamp, qui avait mieux lu Théophraste que lui. Par s'altère, entendez lorsqu'il est piqué du ver. Je laisse le gâchis grammatical de Casaubon.

[147] Voyez Géoponic. liv. 2, p. 72. Edit. Basil. On lit dans cette édition, que le lupin broyé appliqué sur les yeux, ophtalmois, etc. Il faut lire omphalois sur les nombrils, etc. comme je le trouve corrigé sur la marge de mon exemplaire.

[148] Cet idiotisme est connu.

[149] Les Grecs, dit Pline, appellent drypetas les olives que nous nommons drypas : incipiente bacca nigrescere. Pline liv. 15, ch. 2 ; ou selon Columelle, cum primum decolorari cœperit. Voyez Hard. ibid. Cassianus Bassus veut cependant qu'on ne cueille les olives, pour en faire de l'huile, que quand elles sont noires plus de moitié : Géopon. p. 235. Il dit de très bonnes choses sur Phnile et les olives, jusqu'à la fin de son livre 9. Voilà tout ce que je puis dire à ce sujet. Lisez, pour plus ample instruction, Bod sur Théoph. p. 312 et suiv. Suidas : le Schol. d'Aristoph. sur la Lysistrate, p. 872. Edit. Porti, et laissons les accents à Casaubon.

[150] En latin, natantes, olives qui trempent dans la saumure. V. Géoponic, liv. 9 ; Dioscoride, Palladius, etc. sur ces olives, et les différents procédés pour les arranger. Ce sont les mêmes que les halmades: halme, saumure.

[151] Ou écrasées. Voyez Bod sur Théophr. liv. 4, p. 314, d'après les Géoponiques et autres sur les procédés requis.

[152] Mot équivoque dans ce passage isolé. Il semblerait, par un des passages suivants, que ce mot indiquerait les thlastes ; car il est dit que les stemphyles étaient pour les Athéniens les mêmes que les tetrimmenai, broyées ou écrasées. Bod est de cet avis, ibid.

[153] Olives mûres destinées à être mangées. Voyez Bod et Fl. Chrétien, sur la Lysistrate, p. 872.

[154] Plat jeu de mot sur Marathon, nom de lieu célèbre, et sur Marathron, an fenouil.

[155] Je lis ici thlastai avec N. Lecomte, quoique les autres textes portent phaulai. L’erreur est peut-être venue de ce que l'auteur avait écrit phlastai, synonyme de thlastai. Je lis ensuite épityrides. Voyez Columelle, sur la manière de préparer ce qu'il appelle épityrum. Scripior. rei rust. edit. Gesneri, t. 2, liv. 12, ch. 47, p. 813, n° 9, et ch. 49, p. 815. Casaubon bavarde sur le mot phaulie : je le relèverai plus loin. Daléchamp explique bien le mot stemphylides de ce passage.

[156] On appelait gergérimes les olives et les figues drypepes. Ce mot drypepes signifie ici mûres. Tel est le vrai sens de ce passage, comme on le verra en comparant Suidas avec le Schol. d'Aristophane, p. 872, col. 2.

Si Casaubon avait consulté ce dernier, il aurait vu son erreur. Jamais les Grecs n'ont donné aux olives le nom d’ischas, quoique Bod ait admis l’erreur de Casaubon, p. 312, col. 2.

[157] Plante de la famille des ombellifères, et de la classe des cerfeuils. Voyez Tournefort, ou M. Adanson.

[158] Étymologie digne des Grecs.

[159] Cette étymologie idéale ne peut se sentir que dans le texte même.

[160] Adam lisait ici dokeuei, insidiatur, ce qui me plaît beaucoup. Mais quel sens déterminer dans un passage isolé?

[161] Ou qui ont toujours une apparence sale par leur couleur, tels sont ceux de Thase. C'est ainsi qu'il faut entendre Hésychius.

[162] Ceci se comprendra dans le texte même. L'équivoque ne peut avoir lieu en français.

[163] Gâteau fait de lait ou de miel. Voyez la concordance des Septantes, de Trom. Edit. de 1718. Par rave, entendez ici la grosse rave ronde ou mâle. La longue ou femelle, est celle dont il a été parlé, liv. 1, au sujet d'une aphye. Voyez J. Bauh. ou Sutherland. Hort. Edimburg.

[164] Lisez mieux phyllion avec mon manuscrit, et entendez-le de la laitue. Voyez Schol. Aristoph. Acharn. p. 314 E. ou Gorrée, Lexic.

[165] Ce mot a fait soupçonner ici armoracia. Daléchamp lit ainsi : ce serait le raifort sauvage. Théophr. Hist. liv. 7, ch. 4. Voyez Bod, p. 770. Au lieu de thracia lisez thasia, comme on le trouve plusieurs fois dans Hésychius. Leiothalassia est ensuite une faute de copiste pour leiothasia : Pline le prouve en écrivant liothasium. Le raisonnement de Casaubon montre qu'il copie sans discernement ses notes communiquées. Au reste, voy. Géoponic. sur les vertus du raifort, liv. 12, p. 345.

[166] Voy. Érasme, adage col. 1050.

[167] Les pignons. Voyez les détails intéressants de M. Adanson sur ces amandes et sur les parties du pin, t. 2, p. 478.

[168] Sans jaune, ni par conséquent aucun principe d'embryon.

[169] Il y a ici une petite transposition dans le texte.

[170] Les fils d'Actor et de Molione. Ils repoussèrent d'abord Hercule, qui les surprit, et les tua. Adam.

[171] Voyez sur l'expression grecque, Érasme, adag. col. 1782.

[172] Vulpanser. Voyez Cyprian, Hist. anim. p. 1025. Belon, liv. 3, ch. 17. Il en donne la description. C'est une espèce de canard, de la grosseur d'une oie moyenne : on l'a nommé oie-renard, parce qu'il se terre comme le renard, pour faire son nid. Nous l'appelons tadorne, ou bergandier.

[173] Cette partie du repas a pris ce nom de l'usage où l’on était de boire à la ronde dès qu'on était à table. Voyez Stuck, antiq. conviv. liv. 3, ch. 11. Pétrone, Trimalci. Edit. Antoni, Leip. In 8°. 1781, cap. 31-33 ; Potter, antiq. gr. liv. 4, ch. 20. Rhodigin, Plutarque, etc. Il est fâcheux que l’Abréviateur nous ait tronqué les détails d'Athénée sur le propoma.

[174] Plante de la famille des liliacées, et de la classe des oignons. Voyez Clusius, Stirp. Hispan. liv. 2, chap. 17, et Histor. rar. plant, liv. 2, chap. 39.

[175] Il faut nécessairement avoir cette graine sous les yeux, et comparer les détails de Klein sur les oursins catocystes, nommés gâteaux, p. 91, pour se former une idée de ces détails exacts de Phanias. On observera ensuite qu'il ne parle que d'une analogie, et non d'une parfaite ressemblance; et l'on consultera aussi les détails de M. Adanson, t. 2, p. 395 et 400: cela vaudra mieux que les commentaires de Casaubon.

[176] C'est malva sylvestris folio sinuato. C. Bauh.; cependant il y a plusieurs variations : l'auteur ne donne pas de caractère. Voyez Sutherland, Hort. Edimburg.

[177] Selon les voyageurs, les habitants du nord-est de l'Asie et du nord de l'Amérique, se font, avec certaine plante, une préparation alimon, avec laquelle ils entreprennent les plus longs voyages sans souffrir la faim.

[178] Je dois observer ici que les détails que les Grecs et les Latins nous ont laissés sur leurs plantes cucurbitacées sont si vagues, qu'il est impossible d'en déterminer aujourd'hui les espèces: d'ailleurs, les mêmes plantes, ou leurs fruits, avaient des noms différents, d'une contrée à l'autre : les modernes ne sont pas plus exacts. M. Rosier se plaint aussi de cette variation bizarre de nos dénominations : voyez son Diction. Linné est même le plus inexact des Botanistes à cet égard. La courge ou calebasse présente plus de cent espèces différentes, si l'on réunit celles de l'Amérique aux courges de notre hémisphère.

[179] Casaubon bat ici la campagne. Hen meros ideas, est une expression de Platon, et doit s'entendre d'un genre propre. En cela Théophraste avait raison, puisque la courge doit être rapportée à la famille des briones. Ensuite Casaubon dit à faux que Théophraste diserte negat. Ce philosophe écrit phasi, on dit : Hist. liv. 7, chap. 4. Bod s'est laissé entraîner par ce barbouilleur, qui n'entendait rien à ces matières-ci, et très peu à toutes les autres ; il aurait dû consulter Théophraste.

[180] Il n'y a rien à changer ici.

[181] Cucurbita oblonga folio molli, flore albo. C. Bauh.

[182] Pursan rétablit le texte grec dans l'ordre même de la traduction de Daléchamp : c'est ce que Casaubon devait faire, autrement il n'y a plus de sens.

[183] Fêtes de Minerve. Voyez Potter, antiq. grœc. liv. a, p.419 » Edit. angl. t. 1 ; et le traité de Meursius, à la fin de sa Grœcia feriata, in 4°.

[184] On trouve dans Pétrone, ch. 35, un beau commentaire sur ce plat. Il s'agit des douze signes du zodiaque. Thomasin l'a aussi cité dans ses Tesserœ hospital. Le passage d'Athénée ne donne pas tout ; la fin est même assez obscure.

[185] Le mot orechteoo a deux sens, désirer et retentir. Le dernier est celui de l'auteur.

[186] Voyez Suidas, sur les deux sens de ce mot. Il peut signifier ici, ou qui croissent spontanément, ou qui croissent dans le pays par la culture.

[187] Texte, thymos, mot équivoque qui désigne, ou une espèce d'oignon sauvage, ou l’esprit. C'est un jeu de mot sur un des prétendus symboles de Pythagore, qui cependant ne les a jamais écrits. Voyez M. Meiner, Hist, de l'origine, des progrès et de la décadence des sciences en Grèce et à Rome; en allemand, 2 vol. in-8° : c'est t. 1, p. 496. Au reste je renvoie le lecteur à l'excellent ouvrage que François Berni a écrit sur ces symboles, p. 308, à Ferrare, in 4°. Conférez les notes de l'Apollonius de Vigenère, p. 54 ; le parallèle mérite d'être lu.

[188] Voyez dans les alexipharmaques de Nicandre, les moyens d'obvier à l'effet dès champignons vénéneux. Nicandre y appelle le champignon, ferment de la terre. Conférez Dioscoride, liv. 6, chap. 23 Le Scholiaste de Nicandre a voulu expliquer la cause de l'étranglement ; mais c'est un grammairien qui bavarde. Voyez Nicandre, Edit. Colon. 1530, p. 97.

[189] Texte, du chêne yeuse. Casaubon, ni Bod, ni Adam n'ont aperçu l’erreur qu'il y a dans ce vers. D'abord ils ont cru que prinos et drys étaient ici deux arbres différents, ce qui est faux. L'auteur n'ajoute drys à prinos, que comme épithète, pour le distinguer de l'arbrisseau nommé simplement prinos ou ilex coccigera, de Camerarius, ou quercus coccifera, de Linné, c'est-à-dire, l'arbrisseau qui fournit le kermès : ensuite il faut ge ou g’ pour te ou t’ après dryos ; et tout est clair. Nicandre n'est plus en contradiction avec Pline, en parlant de l’ieuse, puisque Pline parle du rouvre, roboris, dont il dit les gland sprobatissimos, liv. 16, ch. 8. On voit aussi que Théophraste parlait de ceux de Pline : Hist. Plant., liv. 3, ch. 9. Zwinger reconnaît dans son Theatr. Botanic., allemand, que les champignons du rouvre sont comestibles, quoiqu'ils causent des maux de tète à plusieurs des campagnards qui en mangent.

[190] Ibid. vers suivant, sygkolla, est ce que Dioscoride nomme gloioodee, en parlant du champignon, liv. 4, 83; et Pline, lentum. Voyez sur les champignons, Pline, liv. 16, ch. 8; liv. 22, ch. 23.

[191] Les anciens ont eu plusieurs procédés pour faire venir des champignons. Voyez Bod sur Théophr. p. 28.

[192] Je lis hous sy mykeetas threpson; et ensuite avec Adam, mee te chamaizeelees protamoi' apo rhizees. Cet apo rhizees répond à ceux qui, dans Théophraste, croissent non pro rhizees, mais para rhizas, liv. 3, ch. 9.

[193] M. Adanson les a bien décrits, t. 2, p. 11.

[194] Il y a ici sur la berle un passage transposé de six lignes, que je place après les champignons.

[195] Casaubon reprend Daléchamp avec raison; mais il n'entend pas bien ce terme qu'il veut conserver : c'est coagulés en masse visqueuse ; et Pline ne doit pas s'entendre autrement.

[196] Bod dit qu'on ne lit plus ceci dans Théophraste ; mais Athénée cite probablement de mémoire d'après plusieurs passages où l'on retrouve presque les mêmes choses.

[197] Dans Théophraste, poxos, mot dû aux copistes : c'est la vesse de loup : pezica, dans Pline, liv. 19, ch. 3. M. Adanson le distingue cependant du lycoperdon, ou vesse de loup ; mais je suis Hardouin et M. Brotier, que je trouve bien fondés d'après notre texte. Je lis ensuite rhipes, mot abrégé dans mon manuscrit, non rhipsi. Le mot apoteinousin est ici un verbe qui suppose le pronom se. A la lettre, il en part des fibrilles. Casaubon brouille tout.

[198] Théophraste dit la même chose, Hist. liv. 4, ch. 8 ; mais il parle à cet égard de la mer Rouge, au-dessus de Coptos. Je ne vois pas la raison de la différence de ces deux textes.

[199] Casaubon est pitoyable. Il s'agit ici des étamines, ou parties mâles et fécondantes, koryneesis spermatikee. La fécondation est exprimée par spermatoosis, ce qui est dit de la poussière prolifique. M. Adanson convient lui-même que les anciens ont eu quelque idée de ces parties de la génération dans les plantes, quoiqu'ils se soient exprimés d'une manière un peu vague. Ce passage de Phanias est cependant bien précis. Voyez M. Adanson, t. 1, au sujet de la date de ces découvertes parmi les modernes. Nous savons aussi que les fougères ont leurs étamines, les champignons et les truffes leurs graines. Je remarquerai même ici que Tancrède Robinson, médecin Anglais, avait déjà vu, le siècle dernier, les parties séminales de la truffe. Voyez Dale, supplément à sa Pharmacologie, p. 46, Lond. 1718. Quant au lierre, sa fleur et sa baie ne sont pas équivoques. On avait cru, d'après Pline, que les truffes n'étaient qu'une concrétion terreuse. Voyez Pline, liv. 19, ch. 2, sect. xi ; et Balthasar Pizanelli, traité des aliments, édit. latine de Freitag, p. 31.

[200] Ce n'est pas simplement la fougère, mais une des espèces qui ont la fleur appliquée sous la feuille. Voyez M. Adanson, t. 2, p. 20.

[201] Théophraste cite pour exemple le pommier et le figuier: Hist. liv. 1, chap. 8.

[202] Geranium tuberosum, à feuilles d'anémone. Zwinger remarque que cette plante est très commune en Dalmatie, etc. Theatr. botan.

[203] Adam prenait ceci pour un minéral, dont parlent Pline, et Baccius avec plus de détail dans son traité des bains et des eaux. Mais c'est un végétal analogue à la truffe, comme l’iton, et recommandable par sa saveur, son odeur et sa chair délicate : Pline, t. 2, liv. 19, ch. 2, p. 159.

[204] Végétal de Thrace. Selon Pline, Solin, Eustathe, c'est le même que le géranium. Voyez Pline, t. 2, p. 185, n° iv, et Hardouin. Notre texte porte mal iston. Il ne faut pas le confondre avec une autre bulbe de l'Egypte, nommée oiton, et mal écrit ouiggon dans Théophraste, liv. 1, ch. 11: voyez Bod ; mais Hésychius écrit ouiton etc.

[205] Athénée prend ceci de Plutarque : Sympos. liv. 4, quest. 2. Voyez Pline, liv. 19, ch. 3, et les notes.

[206] Cet effet du tonnerre, ou plutôt de la matière électrique sur les végétaux, est même connue de nos jardiniers. Ils savent qu'un orage suffit pour faire monter promptement leurs salades, et j'entai vu la preuve dans mon jardin. Les expériences que Noilet et Jalabert ont faites avec des graines qu'ils ont électrisées, ne laissent aucun doute ; mais le tonnerre n'est pas cause productrice ; il ne fait que forcer le développement de la graine ou de la tige. C'est ce feu principe ou to heegoumenon d'Hippocrate, et qui donne le branle a tout. Je lis dans ce passage aitias idiooteras ousees.

[207] Concrétion marine gélatineuse, qu'on a rangée parmi les mollusques. On la croit douée de certain mouvement spontanée et progressif. Elle a eu le nom d'ortie, de ce qu'elle semblait faire sentir une piqûre lorsqu'on la touchait. Réaumur dément ce fait dans son mémoire. Voyez Académie des Sciences, 1710, p. 466. Aristote, Hist. anim. liv. 5, chap. 16; et sur ses différentes couleurs, Franzius, Hist. anim. p. 354; sur ses espèces, Cyprian, ibid. p. 3309.

[208] Texte, ostrea, terme générique. L'auteur parlerait-il ici des glands de mer? Ils sont très bons à manger, selon Macrobe. Nous en avons sur les côtes de Normandie.

[209] A la lettre, petits glauques. Cette dénomination a embarrassé les naturalistes. M. Brotier rend le mot grec par glauque simplement : a-t-il raison? est-ce le même poisson? le boniton. V. Cyprian, Hist. anim. p. 2375.

[210] Voyez sur ce proverbe Junius, Adag. Erasm. col. 489.

[211] Je lis legetai p. t. a. houtoos hee hnidee, to botanoodes, kneesmoon, etc.

[212] L’iphyon de Théophraste, en grec. Il fleurit dès le commencement de mars. Bod a tort de prendre l’iphyon pour la sauge.

[213] Asparagus pratensis. J. B.

[214] Asparagus sylvestris, foliis acutis. C. B.

[215] Plante de la famille des ombellifères et de la classe des panais. On en mange la nouvelle pousse du printemps : elle devient un très bon aphrodisiaque.

[216] Les Grecs donnaient ce nom d'asperge à tous les jets tendres des plantes. Il s'agit donc ici de ceux du chou crambe. Voyez Pollux, liv. 6, n° 54.

[217] Je lis ici sitta, le grimpereau, espèce de torchepot. Voyez M. Brisson, Ornithologie. Le texte porte pilta. On peut lire kitta, pie, car les anciens en mangeaient, comme nos campagnards. Voyez Cyprian, Hist. anim. Le mot tympanon suivant, indique un autre oiseau dans Aristote. On trouve dans ses manuscrits, typanos, tapynos, mais on ignore quel est l'oiseau qu'il indique. Le mot sphakelon paraît ici devoir être sphakos, selon Bod. Théophraste, liv. 6, ch. 2, p. 571. Il s'agit alors de la sauge; cependant je crois qu'il ne faut rien changer à la leçon des manuscrits. Ce mot indique la sauge sauvage, breviori et lœviori folio.

[218] C'est-à-dire, je ne vis ni d'air, ni d'eau ; il me faut du vin.

[219] C'est la leçon des manuscrits. J'aime voir Casaubon comparer la naissance de Moïse à celle d'un limaçon. L'énigme se retrouve dans Cicéron, de divinatione, et dans plusieurs autres anciens écrivains.

[220] Quelques textes portent des parties des animaux. Lisez, Hist. anim. liv. 8, ch. 13, et liv. 3, ch. 10, de generat. anim. Cela vaudra mieux que ce que dit Casaubon. J'ai vu plusieurs limaçons accouplés, et j'ai tenu vingt œufs de ces hermaphrodites.

[221] Le limaçon passe presque sept mois en retraite dans nos contrées, si le temps n'est pas favorable. Il reste, ou seul, ou en compagnie, et ne reparaît que lorsqu'il peut trouver à paître.

[222] Les détails que Bochart donne à ce sujet, valent mieux que tout ce que je pourrais dire. Que Casaubon est petit à côté de ce vrai savant V. Hierozoic. t. 2, col. 646. Edit. Lond. In folio.

[223] Bochart conserve ce mot. Voyez ibid.

[224] Je traduis le texte vicieux, pour le corriger ici. Rhodigin, liv. 27, ch. 44, rappelle aussi le mot holysideipnoi, qui se lit dans Plutarque, Sympos. liv. 8, quest. 6, p. 726. Mais quel rapport y a-t-il entre des limaçons qui font retarder le repas, et les détails de Plutarque? Je soutiens qu'on ne doit pas lire ici ce mot dans Athénée. Apollodore avait écrit holykideipnoi, en parlant d'une espèce de cochlide, que Klein a bien nommée saccus. Ostracolog. §. 120 et suiv. Voyez tab. 2, fig. 55. On sait qu'on disait en grec kolykon et korykos pour un sac : or, Apollodore nomme kooryhoi certains coquillages raboteux, qui ne peuvent être que notre cochlide. V. Athénée, liv. 3, p. 87, lig. 18 ; ainsi traduisez le mot holykideipnoi par soupers dans un sac y ou sacs à souper : c'est une plaisanterie.

[225] Selfion, en latin, laser, asa dulcis. Pollux, liv. 6, p. 606. M. Brotier observe que cette plante se trouve encore dans les environs de Derne, ou de l'ancienne Cyrène en Afrique. Quelques-uns des voyageurs modernes ont donc eu tort d'avancer que cette plante avait disparu. Mais il est assez singulier que l’assa fœtida, ou, comme disent les Allemands, teuffelsdreck,merde du diable, soit un délice pour plusieurs peuples actuels. Voyez M. Brotier, Pline, liv. 19, ch. 3, t.4, p. 431.

[226] Je lis halipasta, avec les manuscrits.

[227] Astytois, sine nervo tumente et rigido.

[228] V. les belles figures de Salvien, dans son traité des poissons, et ses détails sur ce crustacée, qui est quelquefois d'une énorme grosseur. Conférez Oppien.

[229] Idée du système des molécules organiques, bien présenté dans Hippocrate.

[230] Clusius avait connu ce fruit en Espagne : il est très commun en Portugal, où il se nomme donzellas. C'est l’ornithogalum spicatum, C. et J. Bauh. On en verra la figure dans Chabrée, Zwinger et autres. — Théophraste la compte parmi les plantes bulbeuses, liv. 7, ch. 13: voyez Pline, liv. 19, ch. 5; mais Pline appelle aussi bulbine, une autre plante qui est la jacinthe vulgaire de Mathiole, ou hiacynthus comosus major purpureus, C. B.; ou maximus botryoïdes coma cœrulea, J. B. Voyez Pline, liv. 20, ch. 9.

[231] L'auteur parodie quelques vers d'Homère.

[232] Théoph. Hist. liv. 7, ch. 13.

[233] La porte-laine. Théophr. ibid. Conférez Pline, Hard. liv. 19, ch. 2; et liv. 2, n° 196, au sujet des podeia, ou chaussons de feutre.

[234] Je lis too sympoosioo à l'ablatif, sans préposition, selon l'usage de citer. Mon manuscrit porte ion sympoosion, Les copistes, ne comprenant pas cet usage, ont changé l'ablatif; et Casaubon s'abuse singulièrement. Le seul exemple qu'il cite pour appuyer son bavardage, serait diagraphein, en apparence ; mais il n'a pas vu qu'il y a la une ellipse du mot heneka. Quant à perigraphein, il faudrait ek, non apo, pour construire. Le même Héraclide est encore cité : en too epigraphomenoo sympoosioo, p. 120, liv. 18 du texte grec; et p. 67, E. en too sympoosio. Casaubon n'y regarde pas de si près.

[235] Voyez Arist. Hist. anim. liv. 9, ch. 20 ; et t. 2, édit. Camus, p. 395. Mais on aura des détails plus intéressants sur les différentes espèces, dans Cyprian, p. 1482-1491.

[236] Je lis elaiophilophagous, avec mon manuscrit.

[237] Iliade, illade, ou tylade. Les naturalistes conservent ces trois noms. C'est la quatrième espèce de Cyprian, p. 1487, où il en donne une description exacte. Voyez Aristote, Hist. liv. 9, ch. 11 ; et Bochart, t. 2, p. 107.

[238] Conférez dans M. Camus, Hist. anim. Arist. t. a, les mots bec-figue, mésange et tête-noire, pour bien entendre ce passage, qui exigerait une discussion. Comparez les détails de Cyprian, p. 104 et suiv.

[239] Athénée parle de deux espèces de cet oiseau, l'un très petit, l'autre plus grand que le plus grand coq, et dit qu'Aristote n'en a pas parlé. Il est donc différent du tetrix, autre oiseau inconnu qui se trouve dans Aristote. Athénée, ou plutôt Larensius, liv. 9, ch. 13, le compare au porphyrion, autre oiseau qu'on n'a pas encore pu déterminer, quoiqu'on en ait cru donner la description dans les mémoires de l'Académie des Sciences et dans Trévoux. Les détails de Cyprian, p. 1327, donnent lieu de croire cet oiseau fabuleux, car ce n'est pas non plus la poule sultane, ce qu'a bien montré M. Camus, t. 2, p. 694 ; ou elle a été mal décrite par les anciens. Buffon croyait que le tetrix était le coq de bruyère, nommé aussi tetrao et que M. Brotier, sur Pline, nomme tétras. Tous ces mots se rapprochent. Cependant le tetrax d'Athénée, de grosse espèce, a des barbillons qui lui tombent des oreilles, liv. 9 : c'est pourquoi Daléchamp, qui le prit d'abord pour la canne-petière, présumait ensuite que c'était la pintade. Voilà les opinions ; pour moi, je n'en adopte aucune.

Spermatologe, moissonneur. Aristote donne cette épithète au roitelet. Ce mot est épithète dans notre passage ; mais, liv. 9 d'Athénée, il parait qu'il est nom substantif et désigne un oiseau particulier, quoique, selon moi, le texte ait été tout défiguré par les copistes. Casaubon fait une page et demie de gâchis dégoûtant, latin, hébreu, grec, pour nous dire à la fin qu'il pensera encore avant de nous expliquer ce qu'il entend par tetrax.

[240] Fête célébrée en famille, à Athènes, le cinquième jour de la naissance d'un enfant, à qui on donnait un nom le sept. Athénée en parle ailleurs, liv. 8, p. 370. Voyez les détails dans Paiter, Antiq. Gr. t. 2, p. 318.

[241] Saumaise sur Solin, p. 445, observe que les Grecs parlent souvent des spînoi servis avec les grives. Quelques-uns croient que spinos désigne le pinson. Saumaise distingue d'abord cet oiseau, mais ensuite il les confond sous le nom de spiza. V. Hésychius, Cyprian, p. 1548; et M. Camus, t. 2.

[242] Kopsichos, oiseau d'un beau plumage noir, très connu ; mais j’ai vu un merle blanc et trois corbeaux très blancs; je remarque simplement ce jeu de la nature dans les environs de Paris, car le merle blanc à bec rouge, se voit dans les Alpes et dans le Nord. Les Romains faisaient un régal très friand du merle. Voyez, pour les espèces, Cyprian, p. 1492 et suivi On a compris sous cette dénomination, des oiseaux bien différents de nos merles ordinaires. On les trouvera dans le dictionnaire des animaux.

[243] Texte, Psar. Voyez Cyprian, sur l'usage de manger des étourneaux, p.. 1501 ; et des pies, p. 1353.

[244] Texte koloios ; en latin, gracculus, que quelques-uns ont pris pour le geai. Celui-ci est la pica glandularia. Rien de plus sensé que ce que dit Cyprian sur les trois espèces du koloios, p. 1203. Conférez M. Camus, au mot choucas. Il rejette avec raison la prétendue quatrième espèce qu'on a insérée dans le texte d'Aristote. J'ai vu des campagnards manger de ces oiseaux en leur ôtant la peau. Le pyrrhocorax de Pline, liv. 10, ch. 48, n'appartient pas au koloios. L'auteur du dictionnaire des animaux tombe ici dans une singulière méprise, en disant du pyrrhocorax, ce que Pline dit du lagopus. Il avait évité cette erreur au mot perdrix blanche : lagopus.

[245] Texte, bittahous pour psittahous, et même sittahous. V. Saumaise sur Solin, p. 1014. Ctésias écrit de même.

[246] Texte, kercheneedas, pour kercheneïedas, espèce d'épervier fainéant. Voyez Saumaise, p. 840 : c'est en latin, tinnunculus. Columelle, l. 8, ch. 8, et Pline, liv. 10, chap. 8, ont cru qu'il défendait les colombes. M. Camus assure qu'il les mange; il a raison : il ne faut pas le confondre avec la cercelle, espèce de canard. Les anciens mangeaient plusieurs oiseaux de proie ou carnassiers. Cyprian décrit exactement cet épervier, p. 1101.

[247] Allusion à la prétendue défense de Pythagore. Voyez Berni, p. 368, sur les symboles de Pythagore. Lucien, t. I, p. 363; t. 2, p. 237, édit. 1619.

[248] Il aurait mieux dit, le principe de toute sensibilité, en ce que les nerfs y prennent naissance ; mais le cerveau proprement dit, est peu sensible. Nombre de faits qu'on me dispensera de citer, prouvent qu'on peut perdre une partie de la cervelle sans la vie, et sans que les fonctions animales ou intellectuelles soient lésées. Mais on ne blesse pas impunément le cervelet.

[249] Ou cervelle, pris dans le sens général

[250] Les méninges qui enveloppent la cervelle. Voyez Cowper, Tabul. Anatom. nos 5 et 8.

[251] Blitum rubrum. Il y en a aussi de blanche : en général, la graine fatigue l'estomac, et prend à la gorge

[252] Thymelœa foliis lini, C. B., ou monspeliaca, J. B. V, aussi Gorrée, Lexic. ; Théophr. Hist. liv. 9, ch. 22; Bod, ibid. p. 1184 ; Dioscoride, liv. 2, 189; liv. 4, 173; Pline, liv. 27, ch.9.

[253] J'ai vraiment honte de relever ici l’étrange ineptie de Casaubon, car je laisse de côté plusieurs de ses rêveries répandues dans ce chapitre ; mais je dois expliquer ici l'auteur. Casaubon rend ten hodon par viam, en disant: viam consperge, rectius quam, etc. Ce triple plagiaire ne savait pas que teen hodon est pour kata teen hodon, ou simplement katha'hodon, que l'auteur exprime plus loin par kaloos > bien, comme il faut. Le bon sens devait au moins lui faire soupçonner qu'on ne préparait pas les ingrédients d'un mets, pour le jeter ensuite dans la rue; et voilà le grand Casaubon!

[254] Je ne conçois pas trop cette plaisanterie s'il ne s'agit pas ici de ce que dit Platon dans l'Alcibiade II, sur la dose de folie qu'on peut avoir. Il y appelle eelithious, kai embronteetous, ceux qui n'en ont qu'une légère dose; c'est à la seconde page de ce livre, édit. Basil. I : on voit donc que c'est un convive qui veut se livrer à la joie, selon Horace : Dulce est desipere in loco.

[255] Conyza pannonica lanuginosa, C. B. ; c'est celle dont il s'agit ici.

[256] Théophr. Hist. liv. 9, ch. 22. Voyez ce que je viens de citer de Dioscoride, liv. 2, 189. Plutarque dit, Syrnpos. liv. 9, quest. 9, que la plupart des anciens ne voulaient pas faire usage de poivre, ni de cervelle, etc.

[257] Cet avis mérite attention dans les cas d'asphyxie.

[258] Plutarque, qui donne une recette de ce parfum, écrit kyphi, de Isid. Osirid. p. 353. Dioscoride suit cette même orthographe, et donne aussi une recette, disant qu'il y avait beaucoup de procédés pour le préparer, liv. 1, 24. Suidas rappelle le Maneethos qui le composait. Il paraît, par le traité des odeurs de Théophraste, que les parfumeurs égyptiens excellaient dans leur art.

[259] Texte, stations, ou lieux dans lesquels on s'arrêtait en route.

[260] Aucun naturaliste moderne, de ceux que j'ai sous la main, ne m'a fourni de lumières sur ce végétal épineux de Carmanie. Daléchamp proposait œnanthe pour acanthe. Théophraste parle de l'huile d'œnanthe dans son traité des odeurs, et non de celle d’acanthe. Brisson cite le passage d'Athénée, sans rien éclaircir, R. Pers. p. m. 85. Eustathe confirme notre texte; mais Eustathe ne citant presque jamais Athénée que sur l'Abréviateur, peut avoir eu des manuscrits aussi altérés que les nôtres. Ainsi je renonce aux recherches, persuadé qu'il s'agit de l’œnanthe, car cette plante se nommant leukanthos, en Grec, les copistes ont pu en faire le mot acanthe. L'odeur de ses fleurs est extrêmement agréable. V. Dioscoride, sur la composition de cette huile, liv. I, 57. Casaubon se croit un grand homme quand il a cité Eustathe. Daléchamp a bien vu.

[261] Huile blanche et amère, tirée d'olives, phaulies, avant leur maturité. Ces olives se mangeaient ordinairement ; on n'en faisait que peu d'huile : elle était flegmatique et abondante en lie. Ces olives étaient la plus grosse espèce, et avaient le noyau fort petit, proportionnément à leur chair. Hésychius appelle aussi phaulies de grosses pommes : du reste, voyez Bod et Saumaise sur Solin. Casaubon a mieux aimé croire un mauvais grammairien, et dire que les phaulies étaient de la petite espèce. Cet homme fait pitié. Théophraste devait certainement le détromper. Voyez Théophraste, des Odeurs, p. 444, édit. Heynsii, de Causis, liv. 6, ch. xi.

[262] Ville très ancienne de l'Italie. Voyez Scaliger, not. in Euseb.chronic. p. 104 ; Pline, liv. 12, ch. 25. Quoique Pline ne parle pas de l'huile de Thurium, il paraît, par ce qu'il dit liv. 16, ch. 21, que le terroir de cette ville était très propre à la végétation.

[263] Cyprian, qui s'est beaucoup étendu sur le garum, et avec intérêt, p. 2034, croyait que le poisson dont on le fit d'abord, était actuellement inconnu : c'est le gerre, ou celui que nous appelons smaris en latin. Je renvoie à ses détails sur les espèces de garum : on y joindra ceux de Ludovic Nonnius, de Esu piscium, ch. 41, p. 166. Geoponic. liv. 20, cap. ultimo. Dioscoride, etc. Le garum se servait tout fait; chacun y mettait à volonté des aromates, de l'eau, du vin, du vinaigre, de l'huile, etc. Delà, les noms d'hydrogarum, œnogarum, oxygarum, elœogarum, etc. — Pollux, qui met garros pour le vinaigre, ne peut l'entendre que de l’oxygarum.

[264] Est-ce un badinage de valet? ou l'auteur l'entend-il, comme le berger de Virgile, de ces vases faits d'osier ou d'écorce d'arbre, assez serrés pour tenir un fluide ? de fundam calathis, etc. Eclog. 5, v. 71. Quelques Grecs font encore des bouteilles d'écorce d'arbre (de tilleul). Voyez Encyclopéd. nouv. t. 2, partie des arts, p. 174, col. 2.

[265] C'est la troisième espèce de muria dont parle Nonnius, l. ch. supra.

[266] Texte eidos. Il est inutile de vouloir substituer ici heedos à eidos, mot qui a désigné d'abord chez les médecins, des médicaments de certaine classe. Le terme passa ensuite chez le peuple, pour désigner certains ingrédients. Le vinaigre étant d'un très grand usage dans les assaisonnements, a eu ce nom particulièrement, de même que celui de heedos : il se trouve désigné par l'un et l’autre dans divers auteurs; ainsi les deux noms le signifiaient également dans l'usage ordinaire de la cuisine.

[267] Les anciens attribuaient au vinaigre une vertu dissolvante intérieurement, surtout pour fondre la saburre et la pituite. Balthasar Pisanelli est de ce sentiment dans son traité des substances alimentaires, p. 130. Je ne m'arrêterai pas à relever les bavardages que Casaubon a faits sur le mot ogkos, dans ses commentaires. Il a cité ce qu'il n'entendait pas, ou plutôt il a copié Ægius sans l'entendre.

[268] Longin lit ainsi, ch. 34, en citant ce passage plus étendu ; mais je ne doute pas que le texte de Théopompe ne fût déjà altéré du temps de Longin, et qu'il ne faille lire bolboon, des bulbes, pour biblioon, des livres. Ce qui suit prouve qu'il s'agit de comestibles, et c'est-là ce que Longin trouvait de bas dans ce récit. Je laisse de côté Boileau, qui manque très souvent le sens de son texte, et Dacier. Je confirmerai cette correction plus loin.

[269] Si l'auteur a écrit nitrou, entendez-le ici du natron, ou lisez alors kitriou, écorce de citron, selon l'expression d'usage.

[270] C'est la leçon de mon manuscrit et du texte imprimé.

[271] C'est ainsi qu'il faut diviser. L'abyrtace se faisait de différentes manières. Voyez Rhodigin, liv. VI, ch. 4.

[272] Texte, ihrioon : on enveloppait avec ces feuilles les pâtés ou gâteaux, et autres choses que l'on faisait cotre.

[273] Texte, opos. Omnium succorum prœstantissimus, dit Gorrée : ut qui meriterit simplieker opos, per excellentiam appellari.

[274] On a pris ici schinos pour le lentisc : je ne puis trop blâmer ce sentiment ; mais je préfère l'autre.

[275] J'observerai ici, en général, que les anciens comprenant le concombre et le melon sous les dénominations de sikyos et de skys, il est assez difficile de dire en quel cas ces mots désignent un concombre ou un melon. M. Adanson applique le mot sikys au melon et au concombre. Le pepon parait désigner le potiron, et le sikyos pepony une espèce particulière de potiron, ou plutôt la citrouille : d'autres l'interprètent par melon. Tout cela est si incertain, qu'on a même douté que les Grecs eussent connu nos melons. Il est cependant vrai que les Grecs en ont de plusieurs espèces, et même quelques-uns qui viennent de concombres. On a aussi dit que le sikyos spermatias était le melopepon, ou notre melon : d'autres l'ont nié, et n'ont vu dans ce mot que la pastèque : ils ont, je crois, raison ; mais je n'emploierai aucune dénomination française. Il faut bien observer que Théophraste n'a pas eu pour but d'écrire un traité des plantes, mais le système du règne végétal, comme Aristote le système du règne animal, non une histoire proprement dite des animaux. Les fragments qui nous restent de Phanias, feraient présumer qu'il avait donné les caractères des genres et des espèces du règne végétal, autant qu'on les connaissait alors ; mais son ouvrage est perdu, et nous ne voyons que trop de raisons de le regretter, quoique Casaubon n'ait pas compris un mot dans ce qu'Athénée nous en a conservé. Dioscoride ne prend que les formes les plus générales, sans caractères, sans toucher même à ce que chaque sujet présente de relatif à certain nombre d'espèces. C'est toujours chez lui, cela ressemble ou est semblable à, etc. Mais lorsqu'on examine les choses de près, on n'aperçoit que le même sens ici : voyez Saumaise, Solin, p. 980. Epikarpion doit être conservé; c'est la queue du fruit et non la chair : celle-ci se nomme perikarpion. Pline jette du jour ici, en disant de la courge, cucurbitœ caulis primus usus in cibo : nous mangeons aussi la queue de nos concombres confits. Pline, ibid. Je lis apala hama too epikarpioo : on pourrait même entendre ici le mot grec de caulis, la tige, comme dans Pline.

[276] Ou sans graine. Les anciens se les procuraient sans graine, en faisant infuser la semence dans une décoction de conyze, ou d’herbe aux puces. Pline, liv. 19, ch. 5, ou dans de l'huile de sésame ; Géoponic. liv. 12, p. m. 341.

[277] C'est ce que signifie ici le mot apala, qui quelquefois se trouve opposé au mot aua, sec, en parlant d'autres végétaux. Broota ou trookta auraient

[278] Je lis auon korianon. On voit comment les copistes en ont fait adrianon. Mon manuscrit porte adryanon ; mais on trouve dans Théophraste, Hist. liv. 7, ch. 1, la coriandre joint à ces plantes. V. Pollux, 6, n° 66.

[279] Qui rongent le poireau, comme le dit le mot prasokourides. Voyez M. Camus sur ce mot, Hist. anim. Aristote, t. 2, p. 509. Je lis bainete à l'indicatif, 2e. Pers. avec mon manuscrit. Le mot kata doit rester ici; c'est pour kai eita : le sens est donc, qui ensuite vous promenez, etc. Nous ignorons ce qui précède ; mais ce n'est pas une raison de changer le texte. Casaubon rêve ici.

[280] Je lis pooon avec Pursan, pour avoir un sens.

[281] Hist. liv. 7, ch. 4.

[282] Voyez plus bas, le skolyme.

[283] Ceci ne se lit pas de suite dans Théophraste, mais Hist. liv. 7, ch. 2. Il y a ici une faute dans l'imprimé de notre texte : lisez paliblastous, ou mieux palimblastous, comme dans Théophraste.

[284] J'observerai ici une fois pour toutesque le mot glose, que je conserve, signifie chez les Grecs un mot particulier à certain siècle, à une contrée, à une ville, à un auteur, à un art, etc. On consultera les détails instructifs de Maussac sur Harpocration : c'est un homme de vrai mérite.

[285] Hist. liv. 7, ch. 1.

[286] Pour kinara. Laissons-là ces misères grammaticales : on verra Bod, p. 622, 629, sur Théophraste.

[287] C'est notre artichaut dans l'état sauvage et sans culture.

[288] Observez le mot ochetoisi, qui désigne des canaux faits pour arroser les champs, etc. Xénophon parle de semblables ouvrages. Virgile les rappelle, claudite jam rivos, etc. Les Péruviens en avaient aussi faits pour arroser leur maïs. V. les Lettres sur l'Amérique de M. le Comte Carli.

[289] Didyme faisait-là une demande digne d'un grammairien. Il faut entendre ici l'églantier ou rosier sauvage, par kynosbate, nom que les Grecs ont donné à plusieurs végétaux épineux : ensuite je lis kai gar Locros tis, etc. quant au sens

[290] Je lis rhodee, comme Pline, et l'expérience le prouve. Varinus, qui cite Bod, a conservé la bonne et la mauvaise leçon, voulant sans doute indiquer l'erreur. Je laisse les autres détails de Bod, presque toujours trop diffus, page 271.

[291] Texte, agnoodes : c'est la leçon des manuscrits; elle est vraie. Bod et les autres n'ont pas observé qu'il s'agissait de la seconde espèce, vitex folio serrato, dont la feuille est plus longue, plus large, et assez semblable à celle de l’églantier, Casaubon sauve ici son ignorance en escamoteur.

[292] Voyez Théophraste, Hist. liv. 6, ch. 4. Je conserve le terme cactus, consacré chez les botanistes. Il parait que c'est le cinara sylvestris lalifo-lia, qui se voit encore dans les campagnes de Sicile. Les femmes le font cuire, et le crient à vendre. Bod s'est beaucoup étendu sur ce passage d'Athénée, en examinant celui de Théophraste ; mais ses détails n'apprennent rien : il a même eu tort de vouloir corriger notre texte sur celui de Théophraste. Athénée abrège : il n'y a que tee rhizee, à lire au datif, qui répond kpara tees rhheesj dans Théophraste. Ce cactus est un vrai chardon. Hardouin ne devait pas le prendre pour notre artichaut vulgaire, hortensis, Pline, liv. 21, ch. 16. Voyez Linné sur les espèces de cette plante. Species plant., classe xii. Icosandrie monogynie.

[293] C'est la partie charnue, que l'on mange.

[294] Théophraste écrit scalie ou ascalie, Hist. liv. 4, ch. 2. Par palmier, il faut entendre ici le Dachel ou Dattier. Conférez Pline, liv. 21, chap. 16, sect. 57 : il traduit presqu'à la lettre ce passage.

[295] Passons aux Grecs ces absurdes étymologies.

[296] Ce passage ne nous détermine rien.

[297] Il fallait que Casaubon eût perdu la tête, pour faire ici l'exclamation qu'il présente dans son commentaire : et pourquoi? pour corrompre un passage qu'il n'entend pas. Ce savantasse boursoufflé ignorait ici l'ellipse de la préposition syn ou hama, si fréquente dans les auteurs Grecs. Supposons syn avant tois allois, et tout sera clair. Voilà tout ce que peut faire le grand Esculape qu'il invoque, comme s'il s'agissait de faire cesser la peste ; mais voyons d'autres traits de son extrême inadvertance.

[298] Les Grecs ont désigné cette espèce de phœnix ou palmier, par elatee, nom de la gaine qui enveloppe les fleurs femelles, se servant du mot spata pour l'enveloppe des fleurs mâles. Elatee fut par abus le nom du fruit même, ou de la datte, mais Casaubon, qui n'a ouvert ni Théophraste, ni Dioscoride, pour éviter l'erreur, voit ici le sapin, et dit simplement : on ne sert pas de sapin sur table ; il faut donc lire elaion pour elatee. Voilà le savoir du grandissime Casaubon! autre trait d'ineptie suivant.

[299] Autostylon : le texte porte, par la faute des copistes, otostylon. C'est, dit Casaubon, une de ces choses nombreuses qui nous sont inconnues chez les anciens; cela est vrai : mais ils n'ont jamais été assez ineptes pour écrire otostylon. Casaubon devait consulter Pline, liv. 21, ch. 16, et Théophraste, Hist. liv. 6, ch. 4, il aurait vu qu'on mangeait le scolyme, sans excepter la racine crue ou cuite. Dioscoride dit même qu'on mangeait toute la plante encore jeune. Racine est ici stylos, caudex, truncus ou stelechos. Voyez Saumaise, Solin, p. 1271. Autostylon est un composé semblable kautoxylon, tronc d'arbre brut; autoklados, tronc avec les branches; autopyron, pain fait de bled dont on n'a ôté aucune partie, etc.

[300] Espèce de chardon : atractylis vera flore luteo. J. B.

[301] Chardon qui fait péter les ânes lorsqu'ils en mangent. Pline, liv.27, ch. 21. Casaubon demande comment les savants lui prouveront que l’onoporde est un chardon, puisque ses interprètes Grecs disent que ce mot désigne la pariétaire. Je réponds, que c'est en corrigeant dans Hésychius, ixinee pour helxinee, ce que ni Casaubon ni Alberti n'ont aperçu. Les copistes ont défiguré Hésychius, comme ils ont corrompu Pline, l. 21, c. 16, s. 56, où ils ont mis helxine pour ixinee, dans la version que cet auteur fait d'un passage de Théophraste, liv. 6, ch. 4 ; mais Pline parle de l’helxine ou de la pariétaire, liv. 22, ch. 17. Voilà comment on prouve que Casaubon ne consultait que les notes qu'il copiait au hasard sur l'exemplaire d'Ægius, et n'entendait rien de ce qu'il écrivait ici.

[302] Je ne dirai pas ici qu'on faisait des flûtes de ces os; j'en parlerai ailleurs où je rappellerai ce passage au sujet de plusieurs noms d'instruments que les Grecs ont dus aux Phéniciens, et qui se trouvent les mêmes que plusieurs dont il s'agit aux titres de quelques psaumes. Bochart, cet homme si profond, et que je ne nomme qu'avec vénération, n'a pas compris ces titres.

[303] Poisson dont je parlerai dans d'autres notes.

[304] Ou Cinara, une des Sporades. Pline, liv. 4, ch. 12. Stace parle-t-il de cette île lorsqu'il dit, cyrnaneaque germina? Plutarque n'y connaissait qu'un terrain stérile.

[305] Théophraste, Hist. liv. 2, ch. 8. Athénée, ou son abréviateur, suppose ce qui a été dit de la première manière de propager le palmier. Théophraste entre ici dans de grands détails sur la propagation de ce végétal, et sur ses différentes espèces. Conférez Pline, liv. 13, ch. 4.

[306] Dans est le texte de Théophraste, quoique notre texte supprime cette préposition : ce ne pourrait être alors que l'ellipse de para : mais le sens serait faux. Pline dit aussi, dulcis medulla in cacumine, liv. 13, ch. 4 ; Dioscoride fait aussi sentir dans le mot encardion qu'il donne à cette moelle. Conférez ici les détails de Xénophon, Anabase et les notes de Hutchinson, p. 133-135. Je ne puis qu'indiquer ici.

[307] L'espèce de ce palmier n'était donc pas celle dont parle Pline, liv. c. sect. ix, et que Théophraste appelle chamœrripees, liv. c., c'est-à-dire, rampante. Ce palmier nain ou rampant, que les Italiens appellent cefaglione ou cephalogne, n'est pas inconnu dans les pays méridionaux de la France : il croît aussi en Espagne. On vend ses feuilles ou palmes, en Italie, vers la fin du carême, pour en orner, le jour des Rameaux, les branches d'oliviers qu'on porte à la procession : elles servent aussi à faire' des corbeilles, des nattes, des balais. La moelle de cet arbre est près de la racine, dans une protubérance qui s'y forme : cette moelle, renfermée par plusieurs enveloppes membraneuses, se présente aux desserts; on la mange avec du sel et du poivre, pour se garantir des flatuosités qu'elle produirait. On voit donc, par ce détail, la différence de ce palmier nain.

Le palmiste franc d'Amérique, ou, comme Ray l'appelle, palma nobilis Jamaïcensis,est un arbre qui devient extrêmement haut, et porte à sa cime, comme le dachel, une moelle blanche très savoureuse, enveloppée de plusieurs feuilles très déliées et fort blanches. Les François l'ont appelée chou de palmiste, parce qu'ils en mettaient cuire au pot comme d'autres plantes potagères. Il présente aussi, comme le palmier nain, une espèce de panache, qui est toujours tourné vers le soleil levant.

Les anciens ont parlé de l'amour du palmier mâle et femelle, comme d'une chose merveilleuse (car ils avaient très bien remarqué les différents sexes dans plusieurs plantes). Jovianus Pontanus a fait de fort jolis vers latins, à ce sujet, sur deux palmiers d'Italie, dont la femelle n'a produit de fruit que quand l'un et l'autre arbre furent assez élevés pour que la poussière prolifique du mâle pût être portée sur la femelle, à la faveur du vent, quoiqu'elle en fût très éloignée.

Non uno crevere solo, distantibus agris,
Nulla
loci facies, nec socialis amor.
Permansit
sine prole diu, sine fructibus arbor
Utraque
, frondosis et sine fruge comis.
Ast
postquam patulos fuderunt brachia ramos
Cœpere
et cœlo liberiore frui.
Frondosique
apices se conspexere, virique
Illa
sui vultus, conjugis ille suœ
Hausere
, et blandum venis sitientibus ignem,
Optatos
fœtus sponte tulere sua:
Ornarunt
gemmis mirabile die tu,
Implevere
suos melle liquente favos.

Voyez Bod, p. 103. Il y a nombre d'autres espèces de palmiers. Les curieux consulteront l’Hortus Malabarensis, Gumilla, Ray, Margrave, Pison, Comelin, Dapper, Parkins, etc. etc.

[308] Il s'agirait ici, non de la moelle, in cacumine, mais de la datte même, comme l'indique le mot paraphyadas : ainsi l'abréviateur ou l'auteur présente une équivoque dans le sens du discours. Conférez Dioscoride, liv. I, 149.

 

FIN DU LIVRE DEUXIÈME.