extraits du Journal Asiatique de 1848 à 1852
QUATRIÈME EXTRAIT DE
OU
COMMENCEMENT DE LA DYNASTIE DES BENI-HAFSS ;
TRADUIT EN FRANÇAIS ET ACCOMPAGNÉ DE NOTES.
PAR M. A. CHERBONNEAU.
*
Quoique l'importance de la famille de notre historien sous le règne des Hafsides soit clairement démontrée par un grand nombre de faits dans le courant du récit que j'ai soumis à nos lecteurs (Journ. asiat. octobre 1848, mai 1849, janvier 1851), je regarde comme essentielle la communication des quelques lignes consacrées à Ibn el-Konfoud, par Ahmed Baba le Tombouctien, dans son Tekmilet ed-dibadj ou Complément du recueil biographique intitulé Ed-Dibadj. « Ahmed ben-Haçan-ben-Ali-ben-el-Khatib-ben-el-Konfoud, dit-il à la page 37, ligne 9, naquit à Constantine. Il est connu dans le monde savant sous les noms d'Ibn el-Khatib et d'Ibn el-Konfoud. Non moins célèbre par ses voyages que par sa science, il eut le mérite d'être promu à la dignité de cadi. Les livres de Hadis, ou traditions du prophète, avaient été l'objet principal de ses éludes. On lui doit plusieurs ouvrages excellents.
Ses professeurs furent Haçan-ben-el-Kassem-ben-Badis, Ech-chérif-ibn-Kassem, imam de Ceuta ; Ech-chérif, imam de Tlemcen, le hafedh Mouça-el-Abdouci, El-Kobbab, les deux imams El-Khatib-ibn-Merzoug et Ibn Arafa, ainsi que le hafedh Abd-Allah-Abou-Yala-ed-Dhrir. Il eut pour condisciples les docteurs les plus savants et les plus pieux de l'époque, entre autres le cheikh Ahmed-ben-Acher.
Son départ de l'Ifrikia pour le Mogreb, où il séjourna dix-huit ans, date de l'année 769 (1358). A cette époque, il parcourut le pays en tout sens, recherchant avec passion l'amitié des hommes d'une piété reconnue, tels que Ech-chérif, l'imam de Ceuta, un des personnages dont la connaissance honore, suivant son expression.
Parmi les ouvrages que nous a laissés Ibn el-Konfoud, je citerai seulement son Commentaire en cinq volumes sur le Riçâla (Traité de jurisprudence) d'Ibn Abi-Zeïd-el-Kaïrouâni ; ses annotations sur le livre d'Ibn el-Hadjeb, — sur l'Abrégé d'Ibn el-Benna, — sur le Recueil d'El-Khoundji ; son Commentaire en cinq volumes sur le hadis intitulé Bounîa-el-islam ; son livre incomparable appelé Moyen facile pour reconnaître la position des éloUes ; son Tableau des successions, accompagné d'explications ; son Guide généalogique des chérifs ; l'Imitation du prophète de l'islamisme ; et enfin un volume renfermant la vie du cheikh Abou-Medièn, et de ses disciples.
Ibn el-Konfoud était né en 740 (de J. C. 1339) ; il mourut en 810 (de J. C. 1407-8). On trouve sa biographie dans les Woufïat, d'El-Ouanchérici.
Ahmed-Baba s'était occupé spécialement de l'histoire de l'Afrique ; il avait fouillé beaucoup de bibliothèques, soit dans le Soudan, soit dans le Maroc, où il fut prisonnier pendant plusieurs années. On ne peut douter qu'il n'eût inscrit la Farésiade sur la liste des œuvres d'Ibn el-Konfoud si ce volume était tombé entre ses mains. Il faut en inférer que les exemplaires en ont toujours été fort rares.
Puisque le but de la présente notice est de nous familiariser en quelque sorte avec un des plus célèbres écrivains de Constantine, je regretterais d'avoir passé sous silence deux de ses ouvrages, qui ont été cités tant de fois dans la Biographie générale, ou Tekmilet-ed-Dibadj, et figurent, à la fin, sur la liste des auteurs consultés. Ahmed-Baba dit en cet endroit :
Le premier de ces ouvrages est l'Itinéraire d'Ibn Konfoud, c'est-à-dire son voyage dans l'Afrique septentrionale (Tunis, l'Algérie et le Maroc).
Le second, auquel on donne généralement le titre de Oufaïat, qui signifie proprement les décès, et par extension la chronique des décès, commence par cet avertissement :
« Je consigne dans mon livre les dates précises de la mort des compagnons du prophète, des savants, des traditionnistes et des auteurs, en ayant soin de les ranger par siècles, d'après une méthode toute nouvelle. »
Malgré d'actives recherches, il m'a été impossible de me procurer l'Itinéraire ; j'ai dû même renoncer à l'espoir de le trouver ; car, de mémoire de taleb, on ne l'a jamais vu à Constantine. Quant au second, Mahomet m'a accordé une sorte de compensation. Un des professeurs de la Medarsa de Sidi-el-Kettani, le nommé Sil-Mekki-bou-Talebi, homme fanatique s'il en fut, a eu la pensée de me le communiquer ; il a même poussé la générosité jusqu'à me permettre d'en faire prendre copie.
L'émir Abou-Hafss Omar, fils du prince des croyants Abou-Yahia, fils d'Abou-Zakaria, fils des princes orthodoxes, fut salué khalife au mois de redjeb de l'année 767 (de J. G. 18/16). Son frère Abou'l Abbas Ahmed, gouverneur de Kafsa, voulant revendiquer ses droits, marcha contre Tunis, et remporta sur lui un premier avantage ; mais, quelques jours après, il fut vaincu à son tour et mis à mort (1). Ses frères prirent la fuite.
Le cheikh Abou-Mohammed-Abd-Allah-ben Taféradjin, qui avait rempli les fonctions de hadjeb auprès du feu roi, s'attacha d'abord à la personne d'Abou-Hafss-Omar ; puis, craignant l'issue de la guerre (2), il quitta en grande hâte la capitale de l'Ifrikia, et se dirigea vers les régions de l'ouest. Des cavaliers ayant été lancés à sa poursuite, il fut pris sous les murs de Constantine, et enfermé dans le selâm (galerie en forme d'entresol) de la casbah de cette ville. Deux jours après, le caïd Nebil, qui remplissait alors les fonctions de mezouar ou gouverneur (suivant l'expression d'Ibn Khaldoun, édition de M. Mac-Guckin de Slane, p. 493, l. 7), le mit en liberté, pour éviter une mauvaise affaire. Le fugitif alla rejoindre dans le Mogreb l'émir Abou'l Haçan el-Mérini. Un nommé Sakhar (3) ben-Mouça-es-Selini, qui s'était avisé d'entraver sa marche, fut cruellement puni plus tard : l'émir Abou'l Haçan lui fit couper un pied et une main.
Parmi les compagnons de Taféradjin (4), se trouvait Abd-el-Kérim-ben-Mendil-el-bou-Youcefi (5), qui, pendant la seconde année de l'occupation mérinite, fut chargé de la perception de l'impôt des Rïar et des Sedouïkéche, moyennant une redevance de cent mille dinars.
L'année 747 est appelée chez nous l'année des détenus, parce que tous les proches parents du sultan, tels que l'émir Abou-Abd-Allah, fils de l'émir Khaled, ainsi que ses trois fils les plus âgés, étaient internés à Constantine. A la mort du sultan Abou-Yahia, les six princes sortirent de leur prison pour reconquérir leur royaume l'épée à la main ; mais le caïd Nébil se montra sur l'esplanade de la casbah (6), du côté de la porte ; il fit avancer les machines de guerre, et, secondé par la garnison, il força les jeunes princes à rentrer dans le lieu de leur captivité. Toutefois, malgré les conseils qui lui furent insinués, il eut la sagesse de respecter leur vie, et les couvrit de sa protection, jusqu'au jour où l'émir Abou'l Haçan el-Mérini entra en vainqueur dans le pays. Ce fut ce prince qui leur accorda la liberté, et les dirigea vers le Mogreb.
Dès que l'émir Abou-Hafss-Omar eut appris à Tunis que le mérinite Abou'l Haçan s'avançait vers l'Ifrikia, il mit sur pied une armée nombreuse, et se porta sur Constantine, dont il voulait faire le centre de ses opérations. Malheureusement les chefs de la ville refusèrent de se déclarer pour lui, dans la crainte d'être châtiés par les Beni-Mérin. Ce contretemps l'obligea de reprendre la route de l'Ifrikia avec ses troupes. Abou'l Haçan le poursuivit sans perdre de temps, l'atteignit et lui livra bataille avec des forces considérables. On était au milieu de l'année 748 (de J. C. 1347). Trahi par la fortune, l'émir Abou-Hafss-Omar voulut reculer ; mais il fut pris et tué (7). Ses troupes cherchèrent leur salut dans la fuite.
Cette victoire éclatante assura à l'émir Abou'l Haçan el-Mérini la possession entière du pays (8). Il en dispersa les chefs dans le Mogreb, et fit son entrée triomphale dans la ville de Tunis, la même année (9). Mais la fortune abandonna bientôt sa dynastie. A la fin de l'année 748 (de J. C. 1347), éclata contre eux l'affaire de Kairouan, plus terrible que l'échec qu'ils avaient essuyé à Tarif en l'année 741 (de J. C. 1340).
Voici l'origine de l'affaire de Kairouan. Abou'l Haçan s'était mis en campagne pour châtier les Arabes rebelles (10) ; mais lorsqu'il fut en vue de l'ennemi, la trahison se glissa dans les rangs de son armée ; et pendant que les Mérinites abandonnaient ses drapeaux, une grande partie des Beni-Abd-el-Ouadi se sauvait dans le Mogreb. Des trente mille cavaliers qu'il avait amenés avec lui, il ne lui resta qu'une faible escorte, avec laquelle il se réfugia dans les murs de Kairouan, après avoir vu ses bagages, ses armes, ses munitions, son trésor et ses bêtes de somme tomber au pouvoir de l'ennemi. Il demeura bloqué dans cette ville pendant quelque temps, puis il s'échappa (11) et retourna à Tunis, n'ayant avec lui qu'une poignée de serviteurs dévoués, tant cavaliers que docteurs, secrétaires, chrétiens et mamlouks ; car les Beni-Merin s'étaient dispersés à cheval dans la direction du Maroc. Cependant au moment où il rentrait dans la casbah de la capitale, quelques villes de l'Ifrikia reconnaissaient encore la puissance de son nom.
Sur ces entrefaites, il arriva que son fils, l'émir Abou-Eunân, qui résidait à Tlemcen, victime d'un odieux mensonge, s'imagina que son père était mort à Kairouan, et fit rédiger un acte à cet effet. La plupart des Mérinites qui s'étaient retirés dans le Mogreb après le désastre, y apposèrent leurs signatures à titre de témoignage ; alors on vit le jeune prince s'emparer du pouvoir et se faire proclamer sultan au commencement de l'année 749 (de J. C. 1348).
De son côté, l'émir Abou'l Haçan ne fut pas plus tôt parvenu à Tunis, qu'il déplaça le prince Abou Abd-Allah, fils de l'émir Abou Zakaria, fils du chef des croyants Abou-Yahia, fils d'Abou-Bekr, gouverneur de Bougie, et lui conféra le commandement de la ville de Nedrouma (12). En même temps, il éloigna de Constantine l'émir Abou Zeïd Abd er-Rahman, ainsi que ses frères, fils comme lui de l'émir Abou-Abd-Allah, fils du commandeur des croyants Abou-Yahia, fils d'Abou-Bekr, et leur donna Oudjda sur la frontière du Maroc, avec le revenu de cette ville (Ibn Khaldoun, Histoire des Berbers, t. I, p. 550, l. 12). Mais il laissa l'émir El-Fadel à Bône, siège de son commandement, parce qu'il le regardait comme un homme essentiellement pacifique. Il le connaissait d’ailleurs depuis longtemps, par suite de son mariage avec sa sœur (13).
A la nouvelle du désastre de Kairouan, l'émir El-Fadel quitta Bône, où les Ben Merin avaient été vaincus et pillés, un mercredi soir, le 28 de dou'lhidja 748 (de J. C. 1347) ; le vendredi suivant, il entrait à Constantine, avec son escorte. Sa première pensée fut de se porter sur la casbah ; mais il la trouva fermée. La garnison, qui tenait encore pour les Mérinites (14), s'était déjà préparée à faire une vigoureuse résistance ; les remparts étaient défendus de tous côtés par des archers et des soldats revêtus de cottes de maille. L'émir sentit son courage ébranlé ; il retourna sur ses pas et se retira dans la principale mosquée de la ville, où il célébra la prière du vendredi. C'était la première fois qu'on y voyait un khalife hafside assister en personne à la prière de ce jour. Quand la cérémonie fut achevée, l'émir s'assit dans la mosquée, songeant au moyen de calmer la garnison. On a prétendu qu'il s'était abaissé jusqu'à demander grâce aux habitants de Constantine ; mais ce n'est qu'un mensonge et une infâme calomnie. Ce qui est vrai, c'est qu'il envoya mon père El-Khatib en parlementaire, pour offrir aux rebelles de la casbah une amnistie pleine et entière, avec la garantie de son serment. S'il faut le dire en passant, mon père pria ce jour-là, à Djama-el-Kebir, au milieu des fidèles ; mais ce fut la seule fois de sa vie. Vers les trois heures de l'après midi, la paix fut acceptée, et les portes de la casbah s'ouvrirent devant l'émir El-Fadel. A son entrée, il vit la populace qui s'acharnait à la poursuite des Mérinites, et pour se soustraire lui-même à sa fureur, il fut obligé de se cacher pendant une grande partie de la journée. Vainqueur enfin et maître de la place, il en expulsa tous les Mérinites jusqu'au dernier, et s'empara des nombreux trésors qu'elle renfermait. C'étaient les présents et les offrandes que les populations du Mogreb venaient d'envoyer à leur souverain. Au lieu de les utiliser, El-Fadel en prodigua inconsidérément la plus grande partie.
Trois mois après, il partit de Constantine pour se rendre à Bougie, dont la population était hostile aux Beni-Mérin. A la faveur de ces dispositions, il prit la ville, et mérita par cette nouvelle conquête une gloire que vinrent ennoblir son amour pour la paix, sa modération et son habileté à administrer les pays soumis à sa puissance. Ce prince était d'une beauté vraiment remarquable. Il avait un talent supérieur en calligraphie. Ceux qui eurent le don de l'égayer furent l'objet constant de sa faveur.
Son secrétaire du paraphe, 'alama, fut l'illustre savant Abou-Ishak-Ibrahim-ben-el-Hadj, né à Grenade, en Espagne (15).
Pendant que ces événements s'accomplissaient, l'émir Abou'l Haçan el-Mérini résidait à Tunis.
Dès que l'émir Abou-Eunân eut acquis la certitude que son père était encore en vie, il craignit de recevoir le châtiment de son usurpation. Résolu alors de mettre tout en œuvre pour conjurer l'orage, il se ligua avec les anciens gouverneurs de Bougie et de Constantine, dans le but de susciter des embarras à son père, et les renvoya tous deux au siège de leur commandement. Ils devaient en quelque sorte lui servir de premier rempart (16). L'un rentra à Constantine, l'autre reprit la route de Bougie, et le pays revint à Ses légitimes possesseurs. C'est ce que nous exposerons en détail, s'il plaît à Dieu Très-Haut.
Quant à l'émir El-Fadel, après une résistance de plusieurs jours, il céda Bougie à son neveu, et s'embarqua pour Bône ; mais il n'y demeura que quelques mois, puis il marcha sur Tunis, où les Arabes l'appelaient avec instance. En arrivant, il attaqua les Mérinites qui occupaient la casbah. Quoique la lutte se fût prolongée, Abou'l Haçan fut réduit à gagner le Mogreb par mer (17).
Le même jour, l'émir Abou'l Abbas el-Fadel, fils du commandeur des croyants Yahia-ben-Abou-Bekr et descendant des princes orthodoxes, faisait son entrée à Tunis, où il fut salué khalife. On était dans l'année 750 (de J. C. 1349). Parmi ses ministres, on doit citer Ech-Chouache (18), ainsi que le fakih (jurisconsulte) de Tunis, Khaled-ben-Taskert, qui avait eu précédemment l'honneur de servir le khalife. Cependant le khalife montra tant de faiblesse à suivre les mauvais conseils de ses serviteurs, que l'autorité fut compromise et le trône ébranlé. Le cheikh Abou Mohammed Abd-Allah ben ech cheikh Abou'l Abbas Ahmed ben Taféradjin revint de l'Orient, où il s'était réfugié, à l'époque où la fortune commençait à tourner contre les Beni-Mérin. Il employa la ruse pour attirer El-Fadel hors de la ville et s'emparer de sa personne (19). Une fois maître de la position, il entra à Tunis. Son premier soin fut de chercher l'émir Abou-Ishak, fils du sultan des croyants Abou-Yahia, fils d'Abou-Bekr, et descendant des princes orthodoxes. Ayant appris qu'il s'était caché dans une maison de la banlieue, il l'invita à en sortir, et le proclama khalife au mois de djoumada premier, l'an 751 (de J.C. 1350), après la mort de son frère. Dieu sait quelle fut la fin de ce prince infortuné (20).
Dès le commencement de ce règne, ce fut le cheikh Abou-Mohammed-ben-Taféradjin qui prit en main la direction des affaires (21) ; il pacifia le pays, consolida le pouvoir du gouvernement, et fit en même temps respecter l'autorité du chef de l'Etat. Son dévouement pour Abou-Ishak fut tel, qu'il allait au-devant de ses désirs (22), et qu'il lui procurait tous les mets qu'il désirait. Cela dura environ quinze ans, à partir de l'année 751 (de J. C. 1350).
L'administration du cheikh Abou-Mohammed fut généralement digne d'éloges. Peut-être lui reprochera-t-on d'avoir trop épargné les Arabes, ainsi que leurs chefs (23), et d'avoir fait peser un impôt exorbitant sur la navigation.
Il existait entre lui et le roi du Mogreb, Abou Eunân, un échange amical de cadeaux ; mais leurs bonnes relations furent troublées, parce que la fille du khalife Abou-Yahia, fils d'Abou-Bekr, refusa de se marier avec le fils d'Abou-Eunân, prétendant qu'elle avait entendu dire de lui qu'il était brusque et insociable.
Lorsqu'en l'année 758 (de J. C. 1357) l'émir Abou-Eunân marcha sur Constantine, il amena par terre une partie de ses troupes, avec la tribu des Oulad-Mehelhel, en même temps qu'il expédiait par mer un corps d'armée considérable. Un des plus illustres fakihs de sa cour partit avec la flotte, ayant pour mission de demander la main de la princesse. A leur approche, le cheikh Abou Mohammed ben Taféradjin voulut d'abord défendre Tunis ; mais ayant appris qu'Abou-Eunân allait s'avancer avec le reste de son armée, il se sauva à El-Mahdïa avec le sultan Abou-Ishak-Ibrahim et sa cour. Leur absence de la capitale dura soixante et dix jours.
Quant à la fille du khalife, elle eut une première entrevue avec le fakih en mission, et lui dit : «Demain, s'il plaît à Dieu, nous nous réunirons chez le cadi avec les témoins, et l'on s'entendra. » Mais lorsqu'il se présenta au rendez-vous, il ne la trouva point, parce qu'elle s'était cachée pour éviter la rencontre. Loin de se décourager, il rechercha la princesse avec une nouvelle instance. Malheureusement la mort du sultan mit fin à ses négociations, à la fin-de l'année 769 (de J. C. 1367-1368). Il était alors âgé de trente ans ; son règne avait duré vingt ans (24).
Abou-Eunân quitta Constantine malgré lui : son armée l'entraîna pour ainsi dire en criant : « Partons pour l'Occident !» Dans le même temps, ses partisans s'échappaient de Tunis en désordre. Mais à peine fut-il arrivé dans le Mogreb, qu'il frappa impitoyablement presque tous ceux qui s'étaient refusés à rester en Ifrikia. Le lendemain de son entrée à Fez, il jeta dans les prisons quatre-vingt-quatorze cheikhs du parti mérinite, et ordonna le supplice de son ministre Fârès-ben-Mimoun-ben-Oudrar et de plusieurs officiers supérieurs de l'armée.
Le fakih Abou Abd-Allah Mohammed ben Ahmed de Tlemcen (25), qu'il avait envoyé à Tunis pour demander la main de la fille du sultan ne fut pas épargné par sa colère ; il lui fit un crime de sa déconvenue. En vain l'accusé lui répondait-il : « Il n'y a qu'un prince en personne qui puisse demander une princesse en mariage : comment vouliez-vous que je réussisse ? » Il l'enferma dans les cachots pendant six mois.
En 760 (de J. C. 1359), l'émir Abou Ishak-Ibrahim se porta sur Constantine, où la garnison mérinite le tint quelque temps en échec (26). Espérant être plus heureux du côté de Bougie, il y conduisit son armée, et, à la faveur d'une insurrection de la populace contre les Beni-Mérin, s'empara du caïd de ces derniers, nommé Yahia-ben-Mimoun-ben-el-Masmoudi, qu'il fit embarquer pour Tunis, chargé de fers. Depuis ce moment jusqu'en 766 (de J. C. 1364), Bougie fut le siège de sa résidence ; le cheikh Mohammed ben Taféradjin lui expédiait de Tunis tous ses approvisionnements. Il y resta jusqu'à l'époque où il en fut chassé par son neveu, l'émir Abou Abd-Allah, fils de l'émir Abou-Zakaria, lequel venait, après plusieurs tentatives malheureuses, reprendre son gouvernement. Ensuite il reprit la route de Tunis par terre, pendant qu'Abou-Abd-Allah lui enlevait une partie de ses bagages. Arrivé a Constantine, il y reçut une hospitalité magnifique de la part de son neveu, l'émir Abou'l Abbâs, qui en était devenu commandant supérieur. J'ai dit son neveu ; mais je n'ose l'affirmer (27). Quelques jours ayant suffi pour le remettre de ses fatigues, lui, sa femme et les gens de sa suite, il reprit avec eux la route de Tunis, et reparut dans sa capitale avec toute la pompe de la royauté. Cependant il ne fut réellement affranchi de la tutelle du cheikh Ben-Taféradjin, qu'à la mort de ce dernier (28), c'est-à-dire, en l'année 766 (de J. C. 1364-1365). Jusqu'en 770 (de J. C. 1368-1369), ce fut lui qui gouverna. Une mort subite l'ayant enlevé dans le mois 3e redjeb de la même année, il laissa le trône à son fils, l'émir Khaled-Abou-Ishak, fils du commandeur des croyants Abou-Yahia, fils d'Abou-Bekr, le descendant des princes orthodoxes.
Ce prince fut salué khalife au mois de redjeb de l'année 770 (de J. C. 1369). L'administration de son royaume resta entre les mains de ses ministres, et particulièrement d'El-Balqui. (On lit dans le Mounèss El-Belâqui ou El-Yolâqui, et dans Ibn Khaldoun, édition de M. de Slane, El-Belâqui.) Aucune affaire ne lui était soumise (29), et le gouvernement fut poussé dans une voie funeste, par suite des exactions et des désordres qui se commettaient. Enfin l'émir se vit obligé de quitter Tunis en 772 (de J. C. 1371), à l'approche de l'émir Abou'l Abbas, fils du commandeur des croyants Abou-Abd-Allah, fils de l'émir Vahia, fils d'Abou-Bekr, descendant des princes orthodoxes (30).
Abou'l Abbas, né à Constantine la bien gardée en 729 (de J. C. 1328-9), était gouverneur de cette ville. Plusieurs chefs de l'Ifrikia, à la tête desquels se trouvait Mansour-ben-Harma-el-Kaabi, vinrent l'engager à se saisir du trône. S'étant laissé tenter, il se présenta devant les murs de Tunis, dont un combat meurtrier lui ouvrit les portes, le 18 du mois de rebi et-tsâni de la même année. En même temps qu'il prenait possession de la casbah, les maisons de plusieurs des partisans du prince déchu étaient livrées au pillage.
Le premier soin d'Abou'l Abbas fut de rétablir l'ordre dans les finances et dans la police. La sûreté fut rendue aux routes, et la confiance s'étendit sur tout le pays. En un mot, il organisa l'administration d'une manière parfaite. C'est l'honneur de ce prince d'avoir institué un medjlès (31), uniquement composé d'hommes d'un mérite supérieur, qui concouraient à l'éclairer de leurs lumières. En 776 (de J. C. 1374-5), j'eus le bonheur de voir fonctionner cette haute cour. On y remarquait le cheikh Abou Abd-Allah, fils du cheikh Abou'1-Abbas-Ahmed-benTaféradjin de Tinmelel, qui, indépendamment d'une connaissance parfaite des affaires relatives au gouvernement, savait trouver, dans les trésors de son jugement et de sa mémoire, des citations ou des exemples pour résoudre les questions les plus difficiles (32).
Il y avait encore au nombre de ses favoris quatre cheikhs qui l'avaient accompagné jusqu'à Tunis. C'étaient le vizir Abou-Ishak-Ibrahim, fils du cheikh Er-Refie' ; El-Hadj-Abou-Abd-Allah-Mohammed, né, comme le premier, à Constantine ; le secrétaire intelligent Abou-Ishak-Ibrahim, fils du jurisconsulte si justement vanté pour la droiture de son jugement, Abou-Mohammed-Abd-el-Kerim-ben-el-Kemâd, une des notabilités de notre ville ; et l'habile secrétaire Abou'l Haçan Ali ben Zakaria, qui avait servi dans le Mogreb, où il était né d'une bonne famille de l'Espagne.
La santé du khalife était confiée au médecin Abou'l Hadjadje-Yousef, qui était né à Arkouba, ville d'Espagne, et avait su, par un mélange de finesse et de douceur de caractère, se faire à la cour une position considérable, qui lui permettait de protéger maintes personnes et de leur rendre de grands services. Il avait eu pour professeur Ben-Ouzara, l'illustre médecin de la cour de Grenade, né dans la ville d'Usturdèle, en Espagne.
Le sultan n'appelait aux fonctions administratives que des hommes d'une intégrité, d'une vertu et d'un mérite reconnus.
On compte parmi ses œuvres méritoires et d'une création durable, 1° l'établissement d'un collège de lecteurs journaliers du Koran dans la maksoura, située à l'ouest de Djama'-ez-Zeïtouna (la mosquée de l'Olivier) ; 2° la fondation d'une sebbâla (33) sur la place d'Ibn Merdoum, dans l'enceinte de la ville ; 3° la construction de la grande tour, située à l'est de la ville de Kammart, sur le port. Sa piété assura, par des waqfs, ou rentes à perpétuité, l'existence des deux premiers établissements. Il abolit la dîfa, c'est-à-dire les fournitures de vivres imposées aux habitants, lorsque la cour était en voyage.
Le premier personnage qui fut appelé à l'honneur d'écrire son 'alama (paraphe) à Tunis est le fakih Abou-Zakaria-Yahia-ben-Oudjad-el-Koumi, de Constantine. Il occupa pendant plusieurs années ce poste élevé, et montra un rare dévouement pour le bien public. Il réunissait toutes les qualités qui font un bon secrétaire d'état, l'élégance de l'écriture, t'esprit de conduite et la discrétion. Son père a été mis au rang des poètes célèbres. On a de lui un recueil de vers qu'il composa en l'honneur des émirs orthodoxes.
Après la mort de Ben-Oudjad, les fonctions de secrétaire du parafe royal furent dévolues à un homme d'un mérite et d'un savoir incontestable, le fakih Abou-Abd-Allah-Mohammed, fils du fakih.
Abou'l Fadel-Kâcem, fils du cheikh Abou Zeïd Abd er-Rahman ben el-Hadjar, issu d'une famille qui donna plusieurs âdels à la ville de Constantine. Jusqu'à la mort du khalife, il conserva cette place, et s'y fit remarquer autant par l'habileté de son écriture, que par la netteté de son style.
Au mois de chaabân de l'année 786 (de J. C. 1355), lors de sa première investiture, qui eut lieu à Constantine, il avait pris pour secrétaire de son parafe le kateb Abou-Ali-Haçan, fils d'Abou'l Fadel le Constantinois, qui, au dire de ses contemporains, et notamment de l'aveu de l'émir Abou-Eunân, possédait un talent extraordinaire en calligraphie.
(1) Ce fut Taféradjin ou Taférakin qui poussa Abou-Hafss-Omar à s'emparer du trône, au mépris des dispositions de son père en faveur d'Abou'l Abbas. Informé de cette perfidie, celui-ci rassembla les Arabes et marcha sur Tunis. (Cf. l’Adilla-el-Beïina-en-Nourânia-fi Mefâkher ed-Doula-el-Hafsia, par Ibn Chemmâ, fol. 27 v. l. 5 ; le Mouness fï akhbar Ifrikia ou Touness, par Mohammed-er-Raïni-el-Kaïrouâni, plus connu sous le nom de Ben Abi-Dinar, p. 111, l. 7.) — Hadj-Hamouda-ben-Abd-el-Aziz le Tunisien ajoute dans sa Chronique des Hafsites, fol. 11 v. l. 17 : «que son frère Abou-Farès, qui était gouverneur du territoire de Souça, vint au-devant de lui, et lui fit sa soumission à Kairouan. » Ces détails ont été empruntés presque textuellement à Ibn Khaldoun (Hist. des Berbers, t. I, p. 547, l. 6 et suiv. édit. du baron de Slane) par Ibn Abi-Dinar et Hadj-Hamouda. — Abou-Hafss-Omar, soutenu par les Almohades, sortit de Tunis pour tenir tête à son frère ; mais au moment où les deux armées furent en présence, Taféradjin, craignant l'issue du combat, s'esquiva et rentra dans la capitale ; puis il rassembla ses trésors et partit pour l'Ouest. Abou-Hafsa-Omar se sauva lui-même à Tunis, et de là à Bedja. Ce fut alors qu'Abou'l Abbas entra sans obstacles dans la capitale, où il ne resta que sept jours. (Cf. le Mouness d'Ibn Abi-Dinar, p. 111, l. 8.) — Ibn Khaldoun (loc. laud. p. 547, l. 10), ainsi que Hadj-Hamouda son compilateur, entre dans des détails plus longs : «Abou'l Abbas descendit d'abord dans le parc (riâdh) de Ras-et-Tâbia, et fit sortir de prison son frère Abou'l Baka ; ensuite il s'installa dans le palais. Huit jours après, l'émir Abou-Hafss-Omar pénétra dans la ville, à la pointe du jour. » On lit dans Ibn Chemmâ, fol. 28 v. l. 1 : « A cette nouvelle, Abou'l Abbas voulut se sauver par la porte dite Bab-el-Uindra mais l'ayant trouvée fermée, il courut d'un autre côté, et fut pris par le caïd Mesrou, au moment où il se glissait dans la maison d'El-Meliâni. Ce fut là qu'il perdit la vie. »
(2) La note précédente explique la conduite de Taféradjin.
(3) Ibn Khaldoun écrit (op. supra laud. p. 551, l. 6, t. I).
(4) Dans l'impossibilité de figurer avec leur alphabet la prononciation du gué ou gua des Berbers, les Arabes ont écrit tantôt Taféradjin (cf. Ibn el-Konfoud), tantôt Taférakin (cf. Ibn Khaldoun). La véritable orthographe est Taféraquin. C'est ainsi que du nom berber Asnagui, pl. Isnâguen, on a fait Sanhadja.
(5) Les Benou-Yousef forment une tribu très ancienne, près de Guedjal, sur le territoire de Sétif.
(6) La casbah de Constantine, située dans la partie la plus élevée et à l'angle septentrional de la ville, formait, avant l'arrivée des Français, un quartier distinct, très-peuplé et entouré de murs épais, bâtis en 683 (de J. C. 1284) par l'émir Abou-Zakaria, et qui ont été démolis par le génie militaire en 1849, pour être remplacés par âne forte muraille, où sont enclavées, tant du côté de la rue qu'à l'intérieur, une trentaine d'inscriptions grecques et d'inscriptions latines. Un hôpital, deux immenses casernes et un parc d artillerie, ont été construits dans l'enceinte de la casbah ; on n'y voit plus que la mosquée des sultans Hafsides, transformée en magasin du génie, et la maison des Koutchouk-Ali, qui est occupée aujourd'hui par la pharmacie militaire. Par suite des différents travaux exécutés à cet endroit, le sol a été abaissé de plusieurs mètres.
Lorsque les Turcs s'emparèrent de Constantine, il y a plus de trois siècles, la casbah perdit beaucoup de son importance. Le bey qui commandait la province fit construire presque an milieu de la ville, c'est-à-dire, à quelques pas de Djema-el-Kebir, un palais appelé généralement Dar-el-Bey. Vers la fin du xie siècle de l'hégire, Salah Bey éleva un autre palais à coté de Souk-el-Asr ; mais cette demeure princière resta dans sa famille, et ses successeurs continuèrent à faire de Dar-el-Bey le siège du commandement. Seulement ils logeaient ailleurs leurs femmes, leurs enfants et leurs serviteurs. Hadj-Ahmed est le premier qui ait entrepris de se bâtir une vaste habitation dans le goût oriental. Malheureusement il n'en jouit pas longtemps : son joli palais devint la demeure du commandant supérieur de la division de Constantine.
(7) Ibn Abi-Dinar-el-Kaïrouâni nous apprend, p. 111, l. 5, que l'émir Abou-Hafss-Omar, s'étant sauvé de Tunis, fut atteint par les Mérinites à Qâbess, où ils le massacrèrent. El-Mérini veut dire proprement le prince des Mérinites. — Ibn Chemmâ, fol. 29, l. 3 et suiv., raconte que la tête de l'émir Omar fut envoyée à Tunis, ou l'on dut l'exposer en public, afin que sa mort fût bien constatée ; mais qu'on eut beaucoup de peine a la reconnaître, parce qu'elle était devenue noire pendant le voyage.— Hadj-Hamouda note au fol. 12 v. l. 1, que la tête d'Omar fut apportée à Badja, où se trouvait l'émir Abou'l Haçan.
(8) Au rapport d'Ibn Abi-Dinar (cf. le Mouness, p. 112, l. 15), Taféradjjn fut la cause de la conquête de l’Ifrikia par Abou'l Haçan. Lorsqu'il s'enfuit vers le Mogreb, il s'était rendu à la cour du prince mérinite, et lui avait dépeint cette conquête comme très facile
(9) A ce sujet, Ibn Chemmâ raconte (fol. 29 v. l. 13) que l'émir Abou'l Haçan amena sous les murs de Tunis une armée si nombreuse, que la ville devint insuffisante pour la loger. Il fut obligé de construire au-dessus de Sedjoum, une nouvelle ville, qui prit le nom d'El-Mansoura.
(10) Ibn Chemmâ, ainsi que son compilateur Ibn Abi-Omar, se sont étendus sur relie partie de l'histoire mérinite. Ils blâment Abou'l Haçan de s'être montré ingrat envers les Arabes, et de n'avoir pas accompli les promesses qu'il leur avait faites pour les attirer sous ses drapeaux. (Cf. l’Adilla, fol. 30 r. l. 2, et le Mouness, p. 113, l. 19.)
(11) Taféradjin avait partagé la fortune du sultan mérinite. Ils étaient depuis quelques jours renfermés dans les murs de Kairouan, lorsque les Arabes, inspirés par Bou-Debbous, qu'ils s'étaient donné pour sultan, firent demander Taféradjin pour traiter de la paix. Mais lorsqu'il fut arrivé dans leur camp, ils le proclamèrent hadjeb de Bou-Debbous ……….. (Cf. Ibn Chemmâ, fol. 30 v. l. 2, et le Mouness, p. 113, l. 1 et suiv.) ….. Quant à l'émir Abou'l Haçan, il parvint à gagner quelques Arabes de la tribu des Oulad-Mehellel, qui lui procurèrent les moyens de sortir de Kairouan et de se rendre à Souça, où il s'embarqua pour Tunis. (Cf. Ibn Chemmâ, (loc. laud. et le Mouness, p. 113, l. 5.) Hadj-Hamouda reproduit ces événements en quelques lignes seulement (fol. 12 v. l. 12) ; cependant aucun historien n'a traité ce sujet avec plus de clarté et de science qu'Ibn Khaldoun ; mais le plan que je me suis tracé me fait un devoir de renvoyer le lecteur à son premier volume de l'Histoire des Berbers, p. 555.
(12) Nedrouma, ville sur la frontière du Maroc, et non loin de Tlemcen. Ibn Khaldoun nous indique la position qu'il lui fit (P. 550, l. 9.)
(13) La même circonstance a été recueillie par Ibn Chemmâ, fol. 29 v. l. 7.
(14) Abou’l Haçan avait laissé à Constantine ses lieutenants et ses agents, (Ibn Khaldoun, p. 550, l. 12).
(15) J’ai trouvé la biographie du docteur Abou-Ishak dans le Tekmilet ed-Dibadj d’Ahmed-Baba le Tombouctien, t. I. 5.)
(16) C’est ce qu’Ibn Chemmâ explique en ces termes : (Cf. l’Adilla, fol. 31 r. l. 17). — Plus loin, il ajoute : « Se voyant dans l’impossibilité de pénétrer dans les terres, l’émir Abou’l Haçan s’embarqua avec sa famille, ses trésors et sa garde, pour se rendre dans le Maghreb ; mais il laissa à Tunis son autre fils El-F’âdel.s (Ibid. L fol. 31 r. l. 18 ; cf. le Mouness, p. 113, l.,
(17) Ibn Khaldoun consacre à cet événement un chapitre entier, p. 559, l. 5. Sa relation diffère toutefois de celle d’Ibn Konfoud, en ce qu’il fait partir Abou’l Haçan avant l’arrivée de l’émir El-Fadel sous les murs de la capitale.
(18) Le nom de ce ministre est Mohammed ben-Ech-Chouache suivant Ibn Khaldoun. p. 560, l. 11.
(19) Taféradjin avait pour complice Omar-ben-Hamza, avec lequel il s’était rencontré à la Mekke en 750. (Cf. Ibn Khaldoun p. 56i, 15 ; et l’Adilla, fol. 32 r. l. 15.)
(20) Le malheureux El-Fadel prit dans les tortures, (Cf. Ibn Khaldoun, p. 561, l. 19 et l’Adilla, fol. 3 v. l. 4)
(21) Ibn Chemmâ remarque qu’il recevait tous les matins les cheikhs dans son parterre, et que les choses en vinrent au point qu’il se laissait offrir les hommages qui ne sont dus qu’aux rois. (Cf. l’Adilla, fol. 3 v. l. 15.) L’auteur du Mouness paraît insister sur la pain-tore de l’ambition de Taféradjin.
(22) L’émir Abou-Ishak était très jeune lorsqu’il fut placé sur le trône par Taféradjin (Cf. Ibn Khaldoun, p. 561, l. 15).
(23) Cependant il est prouvé par le témoignage d’Ibn Chemmâ et d’Ibn Abi-Dinar, que la politique de Taféradjin n’eut d’autre but que d’évincer les Arabes du commandement de Carthage, de Kairouan, de Souça, de Badja, de Tubersok et d’El-Orbèss (cf. l’Adilla, fol. 32 v. l. 16, et le Mouness, p 114, l. 15) pour leur substituer ses créatures (ibid.).
(24) Au lieu de, l’année 769, il faut lire l’année 759 ; et au chiffre vingt, donné comme le nombre des années du règne d’Abou-Eunân, on doit substituer dix. C. D-y.
(25) Voyez la biographie de ce fakih dans le Tekmilet ed-Dibadj, t. II, fol 59 r. et fol. 61 r. l. 5.
(26) Ce fut cette année-là que les chrétiens s’emparèrent de Hammamat, (Cf. le Mouness, p. 115, l. 3
(27) Hadj-Hamouda atteste qu’il était son neveu, comme on le voit dans la phrase suivante, fol.15 r. l. 6.
(28) Taféradjin mourut de la peste qui régnait à Tunis. Quelques jours avant sa mort, le sultan avait épousé sa fille. Le contrat de mariage avait été rédigé par Ibn Merzouk et lu par Ibn Arafa. (Ibn Chemmâ, fol. 34 r. l. 13, Ibn Abi-Dinar, p. 115, l. 4.)
(29) L'émir Abou'l Baka était excessivement jeune, dit Ibn Chemmâ. (Cf. l’Adilla, fol. 34 v. l. 11.)
(30) A peine s'était-il sauvé avec les siens par la porte El-Djezira, qu'il fut poursuivi et arrêté …… Plus tard on l'embarqua avec son frère pour l'exiler ; mais une tempête les fit sombrer. (Cf. l’Adilla, fol. 35 v. l. 4 et suiv.). Ibn Abi-Dinar n'omet aucun de ces détails.
(31) Il est à remarquer que plusieurs historiens ont parlé de cette sage institution, fondée par les Hafsites à Tunis. Ibn Abi-Dinar, entre autres, dit, à la page 471 de son Épilogue (voir Exploration scientifique de l’Algérie pendant les années 1840, 1841, 1842) : « Les Beni-Hafss réunissaient devant eux, le jeudi de chaque semaine, les cadis, les muphtis et les ouléma, pour rendre la justice. La se discutaient les grandes affaires. Les ouléma faisaient les recherches et décidaient les points de droit. Ce medjlès (analogue à nos assises) durait une heure. Les autres jours de la semaine, les cadis prononçaient les jugements, soit chez eux, soit dans le lieu désigné à cet effet. »
(32) Un autre passage de l'épilogue du Mouness parait se rapporter à ce fait : « Ces ouléma recherchaient dans le Medjlès les questions de droit et leur application aux affaires qui se présentaient.» (Cf. Explor. Scient. …….. p. 473, l. 8.)
(33) Le mot sebalah, de même que sébil, désigne une grande fontaine publique (Voy. Sir Grenville Temple, Excursions in the Mediterranean, t. I, p. 251).