Alathyr

IBN-ALATHYR

 

ANNALES DU MAGHREB ET DE L'ESPAGNE

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Traduction française : Mr. ED. FAGNAN

Œuvre numérisée par Marc Szwajcer

 

 

ANNALES DU MAGHREB & DE L'ESPAGNE

IBN EL-ATHIR

 

 

815 — 945

IBN EL-ATHIR

Revue Africaine, 1898.

 

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[P. 223] Expédition contre les Francs[1]

En 200 (10 août 815), El-Hakam, émir d'Espagne, équipa une armée dont il confia le commandement à 'Abd el-Kerîm [ben 'Abd el-Wâh'id] ben Moghîth, pour envahir le territoire des Francs d'Espagne. Il accompagna lui-même l'armée jusqu'à ce qu'elle eût pénétré [P. 224] au cœur du pays ennemi. Les musulmans se livrèrent à la dévastation et au pillage, et détruisirent plusieurs châteaux-forts. Sitôt qu'une localité était détruite, on se transportait dans une autre ; on anéantit les magasins des princes chrétiens. A la vue des ravages commis par les musulmans, le roi chrétien adressa des demandes de secours à tous les rois de ces régions, et partout on répondit à son appel. Il s'avança à la tête d'une armée considérable contre les musulmans, dont une rivière le séparait ; une lutte sanglante dura plusieurs jours, les fidèles cherchant à passer la rivière et les autres s'y opposant. Alors les musulmans s'écartèrent de la rivière que franchirent les infidèles. Le combat recommença plus acharné que jamais, mais les chrétiens, refoulés vers la rivière, perdirent beaucoup de monde tant en tués qu'en prisonniers ; ceux qui purent traverser la rivière, échappèrent à la mort, mais plusieurs de leurs comtes, de leurs princes et de leurs nobles furent faits prisonniers. Néanmoins, les Francs, campés sur la rive, empêchèrent les nôtres de passer la rivière, et bon se battit ainsi pendant treize jours consécutifs. Les pluies qui survinrent ensuite amenèrent la crue de la rivière, et le passage en étant devenu difficile, 'Abd el-Kerîm se retira le 7 dhoû'l-hiddja (6 juillet 816).

Révolte des Berbères dans la région de Moron[2]

Cette même année, un Khâridjite berbère, soutenu par un certain nombre de partisans, se révolta du côté de Moron, en Espagne. Averti par une lettre du gouverneur, El-Hakam tint cette nouvelle secrète et fit sur le champ appeler un de ses officiers, à qui il communiqua la chose confidentiellement : « Pars aussitôt, lui dit-il, et rapporte-moi la tête de ce Khâridjite ; sinon, la tienne la remplacera ; je ne bougerai pas de cet endroit jusqu'à ton retour ». L'officier se mit en marche et apprit, en arrivant dans le voisinage du Khâridjite, que cet homme était toujours très rigoureusement sur ses gardes, mais il se rappela aussi les mots d'El-Hakam : « Ou sa tête ou la tienne ». Il lui fallait donc risquer sa vie ; il parvint à s'introduire par ruse jusqu'auprès de lui et le tua. Il revint après une absence de quatre jours et trouva El-Hakam dans le même endroit, d'où ce prince n'avait pas bougé et qui, en voyant la tête du rebelle, récompensa généreusement cet officier et lui donna de l'avancement. (Orthographe de Moron, en arabe Mawroûr).

[P. 231] Gouvernement de Ziyâdet Allah ben Ibrahim ben el-Aghlab en Ifrîkiyya

Le 6 dhoû'l-hiddja 201 (24 juin 817) mourut, après un règne de cinq ans et environ deux mois, Abou' l-'Abbâs 'Abd Allah ben Ibrahim ben el-Aghlab, émir d'Ifrîkiyya. Il avait établi un impôt annuel de dix-huit dinars par feddân[3] dans toute l'étendue de son gouvernement, et cette lourde charge pesait aux habitants, qui se redisaient leurs doléances les uns aux autres. Alors un homme de bien, H'afç ben 'Omar[4] Djezeri, avec quelques compagnons aussi vertueux que lui, se rendit auprès du prince pour lui défendre d'appliquer plus longtemps cette mesure, et, ajoutant de sages conseils, lui montra le châtiment qui l'attendait dans l'autre vie, le mauvais renom qu'il laisserait dans celle-ci, en même temps que la disparition de sa prospérité : « Dieu ne change le sort d'un groupe d'hommes que quand ceux-ci changent leurs dispositions ; quand Dieu leur veut du mal, rien ne peut l'en détourner ; ils n'ont d'autre protecteur que lui » (Koran, xiii, 12). Mais [P. 232] leur démarche ne produisit aucun résultat, et ces saints hommes se retirèrent dans la direction de Kayrawân, Alors H'afç leur dit : « Faisons nos ablutions pour la prière et demandons à Dieu d'alléger le fardeau du peuple ! » Ainsi fit la petite troupe, et cinq jours n'étaient pas écoulés qu'un abcès se déclara à l'oreille du prince, qui était l'un des plus beaux hommes de son temps, et qui ne tarda pas à mourir.

Celui qui lui succéda fut son frère Ziyâdet Allah ben Ibrahim, prince de mœurs dissolues et auprès de qui tous les vauriens vivaient tranquilles. Il équipa une flotte nombreuse qu'il envoya contre la Sardaigne, pays chrétien[5] ; mais au retour, une partie de ces vaisseaux, dont les guerriers ramenaient du butin après avoir massacré de nombreux chrétiens, vint à périr. Les survivants furent l'objet des bienfaits et de la générosité de Ziyâdet Allah.

En 207 (26 mai 822) eut lieu la révolte de Ziyâd ben Sahl, connu sous le nom de fils de la Slave, qui, avec de nombreux partisans, assiégea la ville de Bâdja. Ziyâdet Allah fit marcher contre lui des troupes qui lui firent lever le siège et qui tuèrent ses compagnons de révolte.[6]

En 208 (15 mai 823), Ziyâdet Allah apprit que Mansour ben Noçayr[7] T'onbodhi voulait se révolter à Tunis et qu'il s'y préparait en correspondant avec le djond. Lorsqu'il fut sûr du fait, il envoya un officier nommé Mohammed ben Hamza avec trois cents cavaliers et l'ordre de faire diligence de manière à arriver en cachette à Tunis pour y prendre Mansour et le lui amener. Mais à son arrivée, Mohammed ne trouva plus Mansour, qui s'était retiré dans son château à T'ombodha.[8] Alors il lui envoya le kadi de Tunis[9] et quarante cheikhs de cette ville pour lui reprocher sa révolte, l'en détourner et le ramener à l'obéissance. Quand ces personnages l'eurent rencontré et lui eurent parlé dans ce sens, Mansour déclara n'avoir pas cessé d'obéir, promettant de se rendre en leur compagnie auprès de Mohammed pour ensuite aller trouver l'émir, mais engageant les envoyés à rester un jour auprès de lui pour qu'il eût le temps d'offrir un repas à Mohammed et à sa troupe. Ils acceptèrent, et Mansour envoya à Mohammed de nombreux et beaux cadeaux consistant en moutons, bœufs et autres victuailles, lui écrivant qu'il allait le rejoindre en compagnie du kadi et des autres envoyés. Se fiant à cette promesse, [P. 233] Mohammed et sa troupe égorgèrent ces animaux et en firent un repas arrosé de vin. Mais quand la nuit arriva, Mansour emprisonna le kadi et ceux qui l'accompagnaient, puis se rendit en toute hâte et sans bruit à Tunis ; après s'être introduit dans l'arsenal, où se trouvaient Mohammed et les siens, il fit battre le tambour en poussant le cri de « Dieu, est grand ». La troupe de Mohammed courut aux armes, mais l'ivresse la paralysait, et les partisans de Mansour la cernèrent, tandis que la populace accourue de-toutes parts la lapidait ; la lutte dura toute la nuit, et les soldats de Mohammed furent tous massacrés, sauf un petit nombre qui purent se jeter dans le lac et se sauver à la nage. Cela se passait au mois de çafar (juin-juillet 823).

Le lendemain matin, le djond réuni auprès de Mansour lui tint ce discours : « Nous ne nous fions pas à toi et nous ne sommes pas sûrs que Ziyâdet Allah ne parviendra pas à te ramener à sa cause par l'attrait de biens temporels ; si tu veux que nous fassions cause commune avec toi, sacrifie l'un ou l'autre des membres de sa famille qui se trouvent auprès de toi ! » Il se fit alors amener Ismâ'îl ben Sofiân ben Salim ben Ik'âl, parent de Ziyâdet Allah et gouverneur de Tunis, et le fit exécuter. Au reçu de ces nouvelles, Ziyâdet Allah envoya un corps de troupes considérable commandé par son vizir [et cousin] Ghalboûn, dont le nom était El-Aghlab ben 'Abd Allah ben el-Aghlab, et en faisant ses adieux à ces soldats il les menaça du dernier supplice s'ils venaient à fuir. Quand ils approchèrent de Tunis, Mansour T'onbodhi sortit de la ville et leur livra, le 10 rebi' I (22 juillet), une bataille où il resta vainqueur. Les officiers de l'armée battue déclarèrent alors à Ghalboûn que, leurs têtes n'étant pas en sécurité auprès de Ziyâdet Allah, ils ne rejoindraient ce prince que si lui Ghalboûn obtenait qu'ils auraient la vie sauve. Puis, abandonnant leur général, ils s'emparèrent de diverses villes, entre autres de Bâdja, d'El-Djezîra [ou presqu'île de Bâchoû], de Çat'foûra, de ….[10] et de Laribus, si bien que la confusion régna en Ifrîk'iyya. Le djond tout entier, mécontent des procédés de Ziyâdet Allah, se rallia à Mansour. Celui-ci, se trouvant à la tête de forces considérables, marcha sur K'ayrawân, qu'il investit en djomâda I (septembre-octobre) ; il entoura son camp d'un fossé et livra de nombreux combats à Ziyâdet Allah.

Mansour, aidé par les habitants de K'ayrawân, se mit à restaurer les murs de cette ville. Cette situation durait depuis quarante [P. 234] jours quand Ziyâdet Allah, rassemblant toutes ses forces en cavalerie et en infanterie, s'avança à leur tête. La vue de cette armée considérable troubla et effraya Mansour, qui n'attendait pas cet acte de vigueur de la mollesse de son adversaire. Une lutte acharnée s'engagea, et l'armée des révoltés vaincue dut s'enfuir en laissant un grand nombre de morts, le 15 djomâda II (24 octobre).[11] Ziyâdet Allah donna l'ordre de tirer vengeance des K'ayrawâniens, qui avaient commis la faute de venir en aide à Mansour et de combattre à ses côtés, de même qu'autrefois ils avaient soutenu 'Imrân ben Modjâlid[12] révolté contre son père Ibrahim ben el-Aghlab. Mais les savants et les hommes pieux intervinrent, et le prince se contenta de ruiner les murailles de la ville. Quant à Mansour, il se vit à la suite de sa défaite abandonné par beaucoup de ses partisans, entre autres par 'Amir ben Nâfi' et par 'Abd es-Selâm ben el-Mofarridj,[13] qui se dirigèrent vers diverses villes pour s'en rendre maîtres.

En 209 (3 mai 824),[14] Ziyâdet Allah envoya un corps d'armée commandé par Mohammed ben 'Abd Allah ben el-Aghlab contre la ville de Sebîba, où se tenait une partie du djond qui avait marché avec Mansour et qui avait pour chef 'Amir[15] ben Nâfi'. Une bataille eut lieu le 20 moharrem (22 mai), et 'Ibn el-Aghlab battu se réfugia avec ses troupes à K'ayrawân. Cet échec fut sensible à Ziyâdet Allah, qui enrôla de nouvelles troupes et les paya largement. Mais les familles des soldats du djond ralliés à Mansour étaient à K'ayrawân, et bien que Ziyâdet Allah n'eût rien fait contre elles, ces soldats dirent à Mansour qu'il devait trouver quelque moyen pour faciliter leur sortie de la ville, et ainsi les tranquilliser eux-mêmes au sujet de leurs proches. Ce chef s'avança donc à leur tête vers K'ayrawân et tint pendant seize jours Ziyâdet Allah dans une étroite observation. Il n'y eut aucun combat, mais il put faire sortir.les femmes et les enfants des soldats du djond, puis il se retira vers Tunis. Ziyâdet Allah ne resta plus ainsi maître en Ifrîk'iyya que de Gabès, du littoral, de Nefzâwa et de Tripoli, qui continuèrent de lui obéir. Le djond alors lui envoya un message aux termes duquel il pouvait, en se retirant de l'Ifrîk'iyya, sauver ses richesses et sa vie, ainsi que celle de ses partisans habitant son château. Il était tout affligé de ces dures propositions quand Sofyân ben Sawâda lui dit : « Laisse-moi [P. 235] choisir deux cents cavaliers parmi les troupes qui t'obéissent, et à leur tête je marcherai sur Nefzâwa, car j'ai appris qu’Amir ben Nâfi' se dirige du côté de tes ennemis. Si je réussis, tout sera pour le mieux ; si j'échoue, tu feras ce que tu voudras. » Sofyân fut autorisé à agir et s'avança avec ses deux cents cavaliers jusqu'à Nefzâwa, où les Berbères qu'il appela à son aide s'empressèrent de lui prêter secours. 'Amir ben Nâfi' marcha contre lui avec son armée, mais il fut battu et perdit nombre des siens ; après quoi il se retira vers K'asfiliya, où il passa trois jours et trois nuits à rassembler le produit des impôts. Ensuite il s'en alla, laissant un de ses officiers pour y commander ; mais ce lieutenant eut peur des habitants et s'enfuit également. Ces derniers firent alors demander à Ibn Sawâda de se rendre chez eux, et ce chef prit possession du pays.[16]

Il a été dit que ces événements sont des années 208 et 209 (823-24) ; mais ils sont de 209 et 210 (824-25).

On doit orthographier T'onbodha, Çat'foûra, Sebîba et Nefzâwa.

Campagne de Ziyâdet Allah ben el-Aghlab contre la Sicile ; combats qui y furent livrés jusqu'à sa mort.[17]

En 212 (le 1er avril 827), Ziyâdet Allah équipa une flotte qu'il envoya en Sicile sous le commandement d'Asad ben el-Forât,[18] kadi de K'ayrawân, disciple de Malek et auteur du traité de droit malékite intitulé El-Asadiyya ; ces troupes firent d'importantes conquêtes dans l'île. Voici l'origine des hostilités.

Le patrice Constantin, nommé en 211 (12 avril 826) gouverneur de Sicile par l'empereur chrétien de Constantinople, avait dès son arrivée [P. 236] mis à la tête de sa flotte un chrétien du nom de Fîmî [Euphème], et celui-ci, homme déterminé et brave, avait organisé une expédition contre l’Ifrîkiyya : il s'empara sur le littoral d'un certain nombre de marchands, s'y livra au pillage et y séjourna peu de temps. Mais alors l'empereur écrivit à Constantin de s'assurer de Fîmî, ledit amiral, pour lui infliger un châtiment. Quand Fîmî connut ce message, il en fit part à ses troupes qui, irritées, se déclarèrent prêles à l'appuyer dans sa résistance. Il retourna donc en Sicile, où il s'empara de Syracuse. Constantin marcha contre lui, mais fut battu et forcé de s'enfuir à Gatane, ville contre laquelle le rebelle envoya des troupes. Constantin tenta de se sauver, mais fut pris et tué, tandis que Fîmî fut proclamé roi, Celui-ci confia alors le gouvernement d'une portion de l'île au nommé Belât'a (Pilate ?), qui, d'accord avec son cousin paternel Mîkhâ'il, gouverneur de Palerme, se révolta contre Fîmî ; à la tête d'une armée considérable, ces deux chefs attaquèrent Fimi, qui fut mis en déroute, et Belât'a s'empara de Syracuse. Alors Fîmî et ses compagnons s'embarquèrent pour l'Ifrîkiyya et firent demander du secours à l'émir Ziyâdet Allah, en lui promettant l'empire de la Sicile. En rebi' I 212 (juin 827), l'émir envoya avec lui une armée qui arriva à Mazara et s'avança contre Belât'a, l'adversaire de Fîmî. Elle rencontra des troupes chrétiennes qu'elle combattit seule après avoir fait mettre Fîmî et les siens à l'écart, et à la suite d'une lutte acharnée, les musulmans restés vainqueurs devinrent maîtres d'un riche butin et des montures de l'ennemi. Belât'a s'enfuit en K'illawriya (Calabre), où il fut tué, tandis que les musulmans s'emparaient de plusieurs forts de l'île. Ils arrivèrent ainsi à la forteresse dite K'al'at el-Korrâth, où beaucoup de monde s'était réfugié, et ces chrétiens, pour tromper le kadi Asad ben el-Forât, chef des musulmans, se soumirent à lui. Ce que voyant, Fîmî se rapprocha d'eux et leur fit dire de tenir ferme pour sauvegarder leur patrie. Puis ils versèrent le tribut entre les mains d'Asad en le priant de ne pas trop s'approcher. Asad, se rendant à cette demande, se tint à l'écart pendant quelques jours, que ces gens employèrent à se préparer au siège, tandis que d'autre part leurs frères leur apportaient tout ce qui leur était nécessaire. [P. 237] Ils refusèrent alors de plus obéir, et Asad, recommençant les opérations militaires, fit faire de tous les côtés des razzias qui rapportèrent beaucoup de butin ; de nombreuses cavernes[19] des environs de Syracuse tombèrent entre les mains des musulmans, qui assiégèrent cette ville par terre et par mer et à qui des secours étaient envoyés d'Ifrîkiyya. Ce fut en vain que le gouverneur de Palerme, à la tête d'une nombreuse armée, s'avança contre eux : ils se couvrirent à l'aide d'un fossé en dehors duquel ils creusèrent de nombreux trous, et quand les chrétiens voulurent les charger, quantité d'entre eux tombèrent dans ces trous et y furent massacrés. La ville continua d'être soumise à un étroit blocus. Mais alors arriva de Constantinople une flotte portant des forces importantes, tandis qu'une violente épidémie avait commencé en 213 (21 mars 828) à exercer ses ravages dans le camp musulman, et parmi les nombreuses victimes figura Asad ben el-Forât, qui fut remplacé dans son commandement par Mohammed ben Abou'l-Djawâri. En présence des ravages de l'épidémie et de l'arrivée de nouveaux ennemis, les assiégeants voulurent se rembarquer ; mais la flotte chrétienne leur barra la sortie du port. Alors les musulmans livrèrent leurs vaisseaux aux flammes, et marchant sur la ville de Mineo, ils s'emparèrent de cette forteresse après trois jours de siège. De là un corps de troupes marcha contre Girgenti, dont la résistance que firent les habitants ne put empêcher la prise, et les musulmans s'y installèrent. Ces événements remontèrent beaucoup leurs esprits et ramenèrent la joie chez eux. De là ils marchèrent sur la ville de K'açriyânna (Castrogiovanni) tandis que Fîmî les accompagnait : les habitants de cette ville se portèrent à sa rencontre et, baisant la terre devant lui, consentirent à le reconnaître pour leur prince ; mais ce n'était qu'une feinte, et bientôt ils le massacrèrent.

Une nouvelle et forte armée arriva de Constantinople pour venir en aide à celle qui l'avait précédée en Sicile. Une bataille fut livrée aux musulmans, qui restèrent vainqueurs et firent un grand massacre, tandis que les survivants se réfugiaient à Castrogiovanni. Zoheyr ben Ghawth prit alors le commandement des musulmans en remplacement de Mohammed ben Abou'l-Djawâri, qui, vint à mourir.

Un parti de musulmans s'étant éloigné pour faire du butin fut attaqué par une troupe de chrétiens et dut prendre la fuite. Le lendemain, les musulmans revinrent à la charge, mais soutenus par l'armée entière ; de leur côté les chrétiens avaient rassemblé de grandes forces et vinrent une seconde fois s'aligner. Les musulmans furent encore mis en déroute et laissèrent sur le terrain [P. 238] un millier de morts. Réfugiés dans leur camp, qu'ils couvrirent par un fossé, ils furent bloqués par les chrétiens et soutinrent de fréquentes attaques. Enfin, manquant presque de vivres, ils résolurent de tenter une surprise de nuit ; mais leurs ennemis, qui connurent ce projet, ne couchèrent pas dans leurs tentes et se tinrent à proximité, de sorte que les musulmans firent une sortie dans le vide. Alors les chrétiens les attaquèrent de toutes parts et en firent un grand carnage. Les survivants se réfugièrent à Mineo, où le long siège qu'ils subirent les contraignit à manger jusqu'aux bêtes de somme et aux chiens.

Quand les musulmans restés à Girgenti apprirent la détresse de leurs frères, qu'ils étaient impuissants à secourir, ils abandonnèrent cette ville après l'avoir ruinée et se retirèrent à Mazara. Cette situation se prolongea jusqu'au début de l'an 214 (10 mars 829), et les musulmans étaient à la veille de leur perte quand arriva d'abord une flotte importante d'Espagne qui était partie en expédition, et presque simultanément de nombreux vaisseaux apportant des secours d'Ifrîkiyya. Tous ces bateaux faisaient un total de trois cents. A la suite de ce débarquement, sourire de la faveur divine, les chrétiens durent lever le siège, et les musulmans à leur tour allèrent assiéger Palerme, qu'ils serrèrent de très près, si bien que le chef de cette ville dut demander grâce pour sa vie et celle des siens, ainsi que pour sauvegarder ses biens. Cette faveur lui fut accordée, et il s'embarqua pour retourner en pays chrétien. Quand, en redjeb 216 (août-septembre 831), les vainqueurs pénétrèrent dans la ville, ils y trouvèrent moins de trois mille habitants ; elle en complait 70.000 au début du siège, et tout 'le reste était mort !

Des dissensions surgirent entre les musulmans d'Espagne et ceux d'Afrique, mais ensuite s'apaisèrent. En 219 (15 janvier 834), ils attaquèrent Castrogiovanni, d'où les chrétiens sortirent pour se battre avec acharnement ; mais ils furent, grâce à la faveur divine, mis en déroute et forcés de se replier sur leur camp. Au printemps, ils livrèrent encore une bataille où les musulmans restèrent de nouveau vainqueurs. En 220 (4 janvier 835), ces derniers, commandés par Mohammed ben 'Abd Allah, attaquèrent de nouveau Castrogiovanni, et les chrétiens furent encore battus, laissant entre les mains des vainqueurs une femme du Patrice et son fils, ainsi que le contenu de leur camp. Les musulmans regagnèrent, alors Palerme.

Mohammed ben 'Abd Allah envoya ensuite dans [P. 239] la région de Taormina des troupes qui, sous le commandement de Mohammed ben Salim, y firent un butin considérable ; mais une partie de ces soldats se mutina contre ce chef et, après l'avoir massacré, alla rejoindre les chrétiens. El-Fad'l ben Yakoub, envoyé d'Ifrîk'iyya par Ziyâdet Allah pour le remplacer, fit également une incursion du côté de Syracuse et en revint avec un butin considérable. Une autre fois, une forte troupe revenait en traînant le butin qu'elle avait recueilli, quand le Patrice, chef des chrétiens en Sicile, se présenta à elle avec des guerriers nombreux : les musulmans se retranchèrent dans un endroit difficile et couvert d'arbres touffus, si bien que le Patrice, ne pouvant les y attaquer, les guetta jusqu'à l’açr, puis se retira quand il vit qu'ils ne voulaient pas accepter le combat. Mais alors ses soldats cessèrent de garder leurs rangs, et les musulmans, profitant de ce désordre, firent sur eux une vigoureuse charge qui leur fit prendre la fuite. Le Patrice, frappé d'un coup de lance, reçut de nombreuses blessures, et tomba de cheval ; mais les plus braves de ses compagnons purent l'emporter tout blessé qu'il était. Les musulmans firent dans cette importante affaire un butin comprenant toutes les armes, montures et autres effets de l'ennemi.

Ziyâdet Allah envoya d'Ifrîk'iyya en Sicile, pour y exercer le commandement, Abou 'l-Aghlab Ibrahim ben 'Abd Allâh,[20] dont l'arrivée eut lieu à la mi-ramadân. Une flotte expédiée par ce nouveau chef rencontra des forces chrétiennes portées par des bateaux ; elle s'empara de tout le butin qu'ils renfermaient, et Abou 'l-Aghlab fit trancher la tête de tous les prisonniers. Une autre flotte envoyée par lui à K'oûçira (Pantellaria) s'empara d'un brûlot (h'arrâk'a) portant des chrétiens et un renégat originaire d'Ifrîk'iyya ; ces prisonniers lui furent amenés, et il les fit aussi décapiter. Une autre incursion dirigée contre l'Etna et les forts avoisinants eut pour résultats l'incendie des moissons, le massacre de beaucoup d'hommes et le pillage. Une autre incursion fut encore organisée dans la même direction par Abou 'l-Aghlab en 221 (25 décembre 835) ; le butin qu'on ramena fut des plus considérables, si bien que les esclaves se vendirent à vil prix. Quanta ceux qui prirent part à cette expédition, ils revinrent sains et saufs. La même année, une flotte fut envoyée contre les îles (voisines) ; après y avoir fait un riche butin et avoir conquis plusieurs villes et forteresses, elle revint saine et sauve. En la même année encore, Abou 'l-Aghlab envoya contre K'ast'ilyâsa (Castelluccio ?) une colonne [P. 240] qui, après y avoir fait du butin et des prisonniers, eut à subir une attaque où les chrétiens restèrent vainqueurs. Une autre colonne envoyée contre Castrogiovanni fut également attaquée par les chrétiens, et les musulmans durent fuir, après avoir perdu un certain nombre des leurs. Un autre combat fut encore livré, où les musulmans restèrent vainqueurs et s'emparèrent de neuf grands bâtiments "avec les hommes qu'ils portaient et de deux chalands.

Or, par une nuit obscure d'hiver, un musulman vit [un animal[21] provenant] de chez les habitants de Castrogiovanni ; en s'approchant il reconnut un chemin où il pénétra et qui était resté inconnu à tout le monde. Retournant alors au camp, il prévint ses compagnons d'armes, qui revinrent avec lui et qui, passant par ce chemin, s'emparèrent du faubourg en poussant leur cri de guerre. Les infidèles se maintinrent dans le fort, puis demandèrent et obtinrent quartier. Les musulmans regagnèrent Palerme en traînant à leur suite un abondant butin.

En 223 (2 décembre 837), de nombreux chrétiens débarquèrent en Sicile, et leur arrivée fut cause que les musulmans levèrent le siège de Djafloûdhi (Cefalu), qu'ils poursuivaient depuis longtemps. De nombreux combats eurent lieu entre eux et les nouveaux venus.

On apprit ensuite la mort de Ziyâdet Allah, émir d'Ifrîk'iyya. Cette nouvelle jeta d'abord du découragement chez les musulmans, mais bientôt ils reprirent courage et recouvrèrent toute leur liberté d'esprit.[22]

On doit orthographier Sark'oûsa, Balerm, Mînâo, Djerdjent, K'açriyânna,

[P. 252] En 203 (8 juillet 818), un homme du nom d'El-Weled se révolta en Espagne[23] ; le prince le fit assiéger à Bâdja, dont le rebelle s'était emparé ; on l'y serra de près, et l'on finit par prendre la ville et enchaîner cet homme.

En la même année,[24] le juriste Asad ben el-Forât devint kadi à K'ayrawân.

[P. 267] Mort d'El-Hakam ben Hichâm

En 206, le 25 dhoû'l-hiddja (20 mai 822), mourut El-Hakam ben Hicham ben 'Abd er-Rahman, souverain d'Espagne, qui était monté sur le trône en çafar 180 (avril-mai 796) ; [P. 268] il avait cinquante-deux ans et portait le konya (prénom) d'Abou'l-'Açi ; fils d'une esclave concubine, il était de haute taille, brun et maigre ; il laissa dix-neuf enfants mâles et est l'auteur de poésies remarquables. Le premier en Espagne, il enrégimenta des troupes mercenaires[25] ; il installa des dépôts d'armes et d'approvisionnements, s'entoura d'une nombreuse suite et d'une domesticité considérable, caserna de la cavalerie à la porte de son palais et agit en tout à la manière des souverains puissants. Il constitua un corps de mamlouks qui recevaient une solde régulièrement payée : ils atteignirent jusqu'au nombre de cinq mille et étaient appelés les muets, à cause des diverses langues étrangères qu'ils parlaient ; ils se tenaient de jour à la porte du palais. Il prenait personnellement connaissance de toutes les affaires, des grandes aussi bien que des petites. Plusieurs personnes sûres de son entourage le tenaient au courant des besoins du peuple, de sorte qu'il empêchait ou réparait les injustices dont on pouvait avoir à se plaindre. Vaillant jusqu'à la témérité, il était fort redouté, et ce furent ses efforts qui assurèrent à sa postérité le trône d'Espagne. Il recherchait les fakîh et les savants.

Avènement de son fils 'Abd er-Rahman

El-Hakam ben Hicham eut pour successeur son fils 'Abd er-Rahman, dont le konya était Abou'l-Mot'arref et dont la mère s'appelait H'alâwa ; il vivait auprès de son père, il vint au monde à Tolède, à sept mois d'après une indication manuscrite de son père El-Hakam, alors gouverneur de cette ville au nom de Hicham. C'était un gros et bel homme, au visage agréable.

A peine était-il monté sur le trône que son grand-oncle paternel, 'Abd Allah Balensi, dont la convoitise attendait la mort d'El-Hakam, quitta Valence pour marcher contre Cordoue. Mais à la nouvelle des préparatifs de défense que faisait 'Abd er-Rahman, il prit peur et, perdant courage, rentra à Valence. Il y mourut promptement,[26] et Dieu épargna ainsi à cette région les maux que lui préparait la méchanceté de cet homme. 'Abd er-Rahman transporta alors à Cordoue les enfants et la famille du défunt, et la souveraineté de l'Espagne resta sans contestation à la descendance de Hicham ben 'Abd er-Rahman. On doit orthographier Todmîr.

[P. 269] En 206 (5 juin 821), les musulmans d'Ifrîk'iyya firent une expédition contre la Sardaigne. Ils se retirèrent en emportant du butin et après avoir fait subir des pertes aux infidèles, ainsi qu'ils en subirent eux-mêmes.[27]

[P. 271] Événements d'Espagne

En 207 (20 mai 822) 'Abd er-Rahman ben el-Hakam, souverain d'Espagne, eut avec le djond et les habitants d'El-Baçrât[28] ce qu'on appelle l'affaire de Vêlez. Peu avant sa mort, El-Hakam avait fait saisir et crucifier un gouverneur du nom de Rebî', à cause des persécutions qu'il faisait subir aux tributaires, à raison de leurs enfants.[29] A l'avènement d'Abd er-Rahman, le peuple, qui avait appris l'exécution de Rebî', se rendit de toutes parts à Cordoue, réclamant les biens dont cet homme les avait dépouillés et s'imaginant qu'ils leur seraient rendus. Les habitants d'Elvira,[30] notamment, se distinguaient par leurs réclamations et leur insistance. 'Abd er-Rahman leur envoya des gens chargés de disperser les groupes qu'ils formaient et de les faire taire ; mais leurs exhortations restèrent vaines et ils furent même chassés (brutalement). Alors un détachement du djond ainsi que des compagnons du prince firent une charge qui mit en déroute le djond d'Elvira et ceux qui l'accompagnaient : les uns furent tués sur le coup, les autres ne durent leur salut qu'à la fuite, mais on les poursuivit et l'on en massacra encore beaucoup.

En la même année, des troubles éclatèrent à Todmîr entre les Mod'arites et les Yéménites ; on se battit à Lorca, et dans l'affaire connue sous le nom de journée d'El-Mod'ârra,[31] trois mille d'entre eux restèrent sur le carreau. La lutte durait depuis sept ans, quand le prince, pour y mettre fin, envoya des troupes commandées par Yahya ben 'Abd Allah ben Khalid.[32] [P. 272] Dès que les combattants avaient vent de l'approche de Yahya, ils se dispersaient, mais recommençaient la lutte sitôt qu'il s'éloignait. L'épuisement seul finit par ramener le calme.

Cette même année, l'Espagne fut désolée par une terrible famine qui fit périr beaucoup de monde ; dans certaines provinces, le moudd se vendit trente dinars.[33]

[P. 273] En 208 (15 mai 823), mourut El-Yasa' ben Abou'l-K'âsim, prince de Sidjilmâsa ; les habitants choisirent pour lui succéder son frère El-Montaçir ben Abou'l-K'âsim Wâsoûl, connu sous le nom de Midrâr.[34] Nous avons parlé plus haut de ces princes.

En 208, 'Abd er-Rahman ben el-Hakam, prince d'Espagne, envoya contre les infidèles une armée dont il confia le commandement à 'Abd el-Kerîm ben 'Abd el-Wâh'id ben Moghîth. Ce général marcha contre le pays d'Alava, où il sema le pillage et l'incendie ; nombre de châteaux furent assiégés, parmi lesquels les uns furent pris, les autres obtinrent la paix moyennant une somme d'argent et la mise en liberté des captifs musulmans. Cette expédition, qui eut lieu en djomâda II (oct.-nov.), eut pour résultats l'acquisition de richesses considérables et la libération de nombreux prisonniers musulmans. Le retour se fit sans accident.[35]

En la même année, mourut 'Abd Allah ben 'Abd er-Rahman, l'Omeyyade, connu sous le nom de Balensi, prince de la ville de Valence en Espagne. Nous avons longuement parlé de lui en même temps que de son neveu Hicham ben el-Hakam ben Hicham.

[P. 275] En 209 (3 mai 824), Mansour ben Nasr[36] se révolta contre l'émir Ziyâdet Allah. Nous avons raconté ces faits sous l'année 202.

[P. 279] Campagne d'Abd Allah ben Tahir en Egypte

En 210 (23 avril 825), 'Abd Allah ben Tahir marcha contre l'Egypte qu'il conquit, et 'Obeyd Allah ben es-Seri dut lui demander grâce. En effet, 'Obeyd Allah [P. 280] s'était rendu maître de l'Egypte et y agissait en rebelle, tandis qu'une troupe partie d'Espagne s'emparait d'Alexandrie. 'Abd Allah ben Tahir, occupé à combattre Nasr ben Chabath, dut tout d'abord négliger ces faits, mais dès qu'il le put il marcha contre l'Egypte…….[37]

[P. 281] Conquête d'Alexandrie par 'Abd Allah

En 210 (23 avril 1825), 'Abd Allah chassa d'Alexandrie les Espagnols qui s'étaient emparés de cette ville en lui accordant quartier. Ces gens étaient arrivés en grand nombre à Alexandrie par mer pendant les troubles occasionnés par Ibn Es-Serî et par d'autres, et y avaient débarqué sous la conduite d'un chef nommé 'Abou H'afç.[38] Cette situation dura jusqu'à l'arrivée d'Ibn Tahir, qui leur fit déclarer que, faute par eux de faire acte d'obéissance, il allait les combattre. Ils se soumirent et demandèrent l’aman, [P. 282] sous la condition qu'ils quitteraient cette ville et gagneraient quelque localité de Roum en dehors des pays musulmans. Ils obtinrent l’aman sous cette condition et allèrent s'établir dans l'île de Crète, où ils firent souche. Voici dans quels termes s'exprime Yoûnos ben 'Abd el-A'la[39] : « Un jeune héros — c'est-à-dire Ibn Tahir — arriva d'Orient chez nous, alors que toutes nos affaires étaient dans la confusion, que toutes les régions de notre pays étaient tombées entre les mains de l'un ou l'autre conquérant, et que les habitants étaient livrés au malheur. Il remit tout en ordre, rendit la confiance à l'homme sain, fit trembler le malade, et tous les sujets s'unirent dans un même sentiment d'obéissance».

Divers événements survenus en Espagne

En 210 (23 avril 825), 'Abd er-Rahman ben el-Hakam envoya sur le territoire franc une forte troupe de cavalerie commandée par 'Obeyd Allah, connu sous le nom d'Ibn el-Balensi. Cet officier dirigea des razzias dans tous les sens, se livra au meurtre et au pillage, et fit des prisonniers. En rebi' I (juin-juillet 825), une rencontre qui eut lieu avec les troupes des infidèles finit par la déroute de ceux-ci, qui perdirent beaucoup de monde ; les nôtres remportèrent là un succès important.

La même année, une armée envoyée par 'Abd er-Rahman conquit également le château d'El-K'al'a (Hisn el-K'al'a) sur le territoire ennemi, où elle fit plusieurs razzias, au milieu du mois de ramadan (fin décembre 825).[40]

'Abd er-Rahman fit commencer en cette année la construction de la grande mosquée de Jaën.[41]

[P. 283] 'Abd er-Rahman prit cette année des otages d'Abou 'ch-Chemmâkh Mohammed ben Ibrahim, chef des Yéménites à Todmîr, pour arriver à l'apaisement des hostilités entre les siens et les Mod'arites ; mais rien n'y fit, et les troubles continuèrent. En présence de cette situation, 'Abd er-Rahman donna ordre au gouverneur de Todmîr de se transporter et de résider désormais à Murcie[42] ; c'est ainsi que cette dernière ville devint depuis lors le chef-lieu de la région. Les hostilités entre ces deux races durèrent jusqu'en 213 (21 mars 828), où 'Abd er-Rahman fit marcher des troupes contre eux. Alors Abou 'ch-Chemmâkh se soumit et se rendit auprès du prince, dont il devint l'un des officiers et des compagnons. La région de Todmîr fut dès lors pacifiée.

[P. 285] Guerre en Ifrîk'iyya entre 'Amir et Mansour ; ce dernier est tué

En 211 (12 avril 826), la discorde éclata entre 'Amir ben Nâfi' et Mansour ben Nasr. Celui-ci, qui était très jaloux…………..[43] ; [celui-là] quitta Tunis à la tête des siens et marcha contre Mansour, qui était alors dans son palais à T'onbodha et qui y subit un siège assez rigoureux pour que l'eau vînt à lui manquer, de sorte qu'il dut demander quartier à son adversaire en s'engageant à s'embarquer pour l'Orient. Sa demande lui ayant été accordée, il sortit secrètement au commencement de la nuit et se dirigea vers Laribus. Mais quand arriva le matin, 'Amir, ne voyant pas de traces de Mansour, se mit à sa recherche, et l'ayant atteint lui livra un combat où l'avantage resta de son côté. Mansour se réfugia à Laribus, où il se défendit contre 'Amir, qui entreprit le siège et dressa une catapulte. A la fin, les habitants, réduits à bout par les souffrances que leur causait cette situation, mirent Mansour en demeure de s'éloigner s'il ne voulait être livré à 'Amir. Mansour obtint d'eux qu'ils patientassent quelque temps jusqu'à ce que la situation s'améliorât, et il dépêcha un messager à 'Abd er-Selâm ben el-Mofarredj,[44] qui avait un commandement dans l'armée, pour lui demander de se joindre à lui. Cet officier étant arrivé, Mansour lui parla du haut des murs, et, lui exposant la passe difficile où il se trouvait, lui demanda d'obtenir d'Amir pour lui la permission de se retirer en Orient. 'Abd es-Selâm accepta cette mission, et par ses bons offices décida 'Amir à autoriser Mansour à se rendre à Tunis pour y prendre sa famille [P. 286] et ses serviteurs, et de là gagner l'Orient. Mansour, étant sorti de la ville, reçut une escorte de cavalerie pour se rendre à Tunis ; mais d'après l'ordre secret d’Amir, le chef du détachement emmena celui qu'il escortait à Djerba[45] et l'y emprisonna, lui et son frère Hamdoun. 'Abd es-Selâm fut outré du procédé, et 'Amir envoya alors à son propre frère, qui était gouverneur de Djerba, l'ordre d'exécuter sans faute Mansour et Hamdoun. Ce gouverneur leur ayant lu la lettre qu'il venait de recevoir, Mansour demanda du papier et de l'encre pour écrire son testament ; cela lui fut accordé, mais il ne put écrire, et alors il s'écria : « Être mis à mort, c'est devenir maître de tous les biens de ce monde et de l'autre ! ».[46] Ils furent ensuite exécutés et leurs têtes envoyées à 'Amir ben Nâfi', dont l'autorité se trouva ainsi assise.

'Abd es-Selâm ben el-Mofarredj retourna à Bâdja, tandis qu’Amir resté à Tunis y mourut le 29 rebi' II 214 (5 juillet 829), et la nouvelle de sa mort fit dire à Ziyâdet Allah : « Maintenant les hostilités sont terminées[47] ! » Ce prince accorda aux fils du mort le pardon qu'ils lui firent demander et étendit sur eux ses bienfaits.

[P. 286] En 211 (12 avril 826), T'oûrîl se révolta en Espagne, dans la province de Tâkoronnâ ; il attaqua et tua un détachement du djond qui était venu ravitailler des localités de cette région, et s'empara des montures, des armes et de tous les bagages de ceux qui le formaient. Alors le gouverneur de [blanc] marcha contre lui [blanc].[48]

[P. 288] En 212 (1er avril 827), 'Abd er-Rahman, souverain d'Espagne, envoya sur le territoire des infidèles une armée qui arriva à Barcelone, puis à Djeranda (Gerona ?), contre les habitants de laquelle elle combattit en rebi' 1 (juin). Pendant deux mois, elle pilla et détruisit tout.[49]

La même année, de fortes inondations provenant de pluies ininterrompues ravagèrent l'Espagne et détruisirent la plupart des murs des villes frontières, ainsi que le pont de Saragosse. On dut refaire et consolider les parties détruites. — Barcheloûna (Barcelone) doit s'écrire comme nous le faisons.

[P. 289] En 213 (21 mars 828), les habitants de Merida, en Espagne, mirent à mort leur gouverneur, puis des troubles surgirent chez eux.[50] 'Abd er-Rahman les fît assiéger et fit ravager leurs champs et leurs plantations, ce qui les ramena à l'obéissance. L'armée se retira après avoir exigé des otages et rasé les fortifications de la ville. Mais comme 'Abd er-Rahman, pour leur ôter l'envie de les relever, envoya l'ordre de jeter dans la rivière les matériaux provenant des murs, une nouvelle révolte éclata : les habitants emprisonnèrent leur gouverneur et relevèrent des murailles plus solides que jamais. Alors le prince, au début de l'an 214 (10 mars 829), marcha contre eux avec ses troupes et accompagné des otages qu'il s'était fait livrer. L'attaque allait commencer quand les habitants obtinrent l'échange de leurs otages contre le gouverneur et les autres prisonniers qu'ils avaient entre les mains. Le prince les assiégea et leur causa quelque dommage, puis se retira. En 217 (6 février 832), il les fit de nouveau assiéger et serrer de très près ; mais le siège fut encore levé au bout d'un certain temps. Au commencement de 218 (26 janvier 833) une nouvelle expédition réduisit cette ville, d'où s'éloignèrent les fauteurs de désordres. L'un des habitants, Mahmoud ben 'Abd el-Djebbâr Mâredi (de Mérida) fut (avec ses partisans) cerné par 'Abd er-Rahman ben el-Hakam, à la tête d'un fort détachement du djond ; après une vive résistance les rebelles durent s'enfuir [P. 290] en laissant nombre de morts sur le terrain ; la cavalerie les poursuivit dans la montagne et tua, fit prisonnier ou dispersa tout. Mais Mahmoud ben 'Abd el-Djebbâr échappa avec quelques-uns des siens et se réfugia à Montsâloût'. 'Abd er-Rah’mân l'y fit attaquer en 220 (4 janvier 835), et les rebelles, battus en rebi' II (avril), s'enfuirent jusqu'à H'alk'ab. Un détachement de cavalerie fut lancé à leur poursuite, mais fut battu et perdit tous ses bagages. Mahmoud regagnait les localités qu'il occupait quand il rencontra d'autres troupes d’Abd er-Rahman ; on se battit, puis les deux corps ennemis s'en allèrent chacun de son côté. Mais Mahmoud se trouva ensuite de nouveau face à face avec un détachement ennemi, qu'il battit et pilla complètement. Il marcha ensuite contre la ville de Mina ; son attaque resta victorieuse et il s'empara des chevaux et des vivres qu'elle contenait. Il partit de là pour pénétrer sur le territoire des infidèles et conquit une place forte où il s'établit pendant cinq ans et trois mois. Il y fut attaqué par Alphonse, roi des Francs, qui, en redjeb 225 (mai 840), s'empara de la place, mita mort Mahmoud et ses partisans, et expulsa le reste de la population.

[P. 293] En 214 (10 mars 829) mourut Idris ben Idris ben 'Abd Allah ben el-Hasan ben el-Hasan ben 'Ali ben Abou Taleb, qui était dans le Maghreb.[51] Après lui ce fut son fils Mohammed qui prit le gouvernement de la ville de Fez ; il nomma son frère El-Kasim à Baçra, à Tanger et dans les territoires qui dépendent de ces villes, de même qu'il chargea ses autres frères d'administrer les villes appartenant aux Berbères.[52]

[P. 293] En 214 (10 mars 829) Abd er-Rahman, l'Omeyyade d'Espagne, alla attaquer la ville de Bâdja, qui s'était soustraite à son obéissance depuis les troubles occasionnés par Mansour,[53] et s'en empara de vive force.

En la même année, Tolède fut le siège d'une révolte de Hâchim ed-D'arrâb contre le souverain 'Abd er-Rahman. Hâchim était l'un de ceux qui avaient quitté Tolède lors du châtiment infligé par El-Hakam aux habitants de cette ville.[54] A l'époque dont nous parlons, il quitta Cordoue, où il s'était retiré, et marcha sur Tolède, où se groupèrent sous ses ordres les malfaiteurs et autres gens de cette espèce. Il s'avança à leur tête vers le Wâdi Tadjounia[55] et fit des incursions chez les Berbères et les autres habitants. Sa renommée grandit aussi bien que sa puissance, et de nombreux partisans se groupèrent autour de lui. Il causa de graves pertes aux habitants de Santaver et livra aux Berbères de fréquents combats. 'Abd er-Rahman fit cette année-là marcher contre lui un corps d'armée, mais l'issue des combats qui eurent lieu resta indécise : la situation de Hâchim ne fut pas compromise et il continua de s'emparer de nombreuses localités ; il dépassa Birket el-'Adjoûz (l'étang de la Vieille) et commença à faire des incursions de cavalerie. En 216 (17 février 831), 'Abd er-Rahman envoya de nouveau une nombreuse armée au-devant de laquelle Hâchim se porta, è l’ouest du château de Samsatâ, près de Daroca. Une bataille acharnée s’engagea et dura [P. 294] plusieurs jours: Hâchîm fut défait et y trouva la mort, ainsi que beaucoup de ses partisans, tous gens ambitieux, scélérats et fauteurs de troubles, dont Dieu arrêta les avanies.

[P 310] Insurrection de Fad’l contre Ziyâdet Allâh

En 218 (26 janvier 833), Ziyâdet Allâh ben el-Aghlab[56] fit marcher des troupes contre Fad’l ben Aboû ‘l-’Anber, qui s’était révolté dans la péninsule [de Cherîk]. Fad’l demanda et obtint l’aide [P. 311] d’Abd es-Selâm ben el-Mofarredj Rab’i, qui lui aussi était en insurrection depuis la guerre, que nous avons racontée, soulevée par Mansour. Les deux alliés se rencontrèrent avec l’armée de Ziyâdet Allâh à Medmuat-el-Yehoûd dans la péninsule, et à la Suite d’un combat acharné, es-Selâm périt et sa tête fut envoyée à Ziyâdet Allâh. Fad’l se réfugia à Tunis, où il se fortifia et soutint le siège qu’en firent les troupes de Ziyâdet Allâh; mais celles-ci le réduisirent à l’extrémité et emportèrent la ville de vive force. Nombre d’habitants furent alors massacrés par les soldats vainqueurs, entre autres le juriste ‘Abbâs ben el-Welid.[57]

Il ne prenait pas part à la lutte et était rentré dans sa demeure, où pénétra un soldat du djond ; alors saisissant son épée il se jeta dehors en proclamant la guerre sainte, et il fut tué. Pendant sept jours son cadavre resta abandonné sur un monceau de ruines sans qu'aucune bête féroce ou aucun oiseau de proie en approchât. C'était un homme vertueux qui avait appris les traditions auprès de (Sofyân) Ibn 'Oveyna et d'autres.

La prise de la ville causa la fuite de nombreux Tunisiens, dont le retour s'effectua à la suite du pardon qui leur fut octroyé par Ziyâdet Allah.

[P. 313] Siège de Tolède

En 219 (15 janvier 834), 'Abd er-Rah'mân ben el-Hakam l'Omeyyade, souverain d'Espagne, envoya un corps de troupes commandé par Omeyya ben El-Hakam contre Tolède, dont les habitants s'étaient révoltés contre El-Hakam et soustraits à son autorité. Ce général serra la ville de près, coupa les arbres de (la banlieue) et détruisit les-cultures, mais sans arriver à réduire les habitants. Alors il s'éloigna, mais en laissant à Calatrava un corps de troupes commandé par Meysera, connu sous le nom de Fata Abou Ayyoub. Quand il fut parti, une troupe nombreuse de Tolédans sortit de la ville dans l'espoir de trouver quelque occasion où la négligence de Meysera leur permettrait de s'emparer de lui et des siens. Mais ce chef, informé de leur tentative, [P. 314] dressa des embuscades dans divers endroits. Quand les Tolédans s'approchèrent de Calatrava pour tenter leur attaque, les troupes embusquées les entourèrent de toutes parts et en firent un grand massacre ; ceux qui purent y échapper s'enfuirent à Tolède. On coupa les têtes des cadavres et on alla les présenter à Meysera, qui fut péniblement impressionné par leur grand nombre et en eut une vraie frayeur ; il en ressentit un vif chagrin et mourut quelques jours après.[58]

Dans le cours de la même année, il y eut encore à Tolède une violente émeute connue sous le nom de Malh'amat el-'irâs (catastrophe de la corde ?) et où de nombreux habitants périrent.[59]

[P. 321] En 220 (4 janvier 835), 'Abd er-Rah'mân envoya une armée contre Tolède, mais les combats qu'elle livra ne la rendirent pas maîtresse de cette ville.

[P. 336] 'Abd er-Rah'mân se rend maître de Tolède

Nous avons parlé déjà de la révolte des Tolédans contre 'Abd er-Rah'mân ben El-Hakam ben Hichâm, le souverain omeyyade d'Espagne, et de l'envoi plusieurs fois renouvelé de troupes pour les réduire. En 221 (25 décembre 835), une troupe de Tolédans[60] se rendit à Calatrava, où se trouvaient des troupes d’Abd er-Rah'mân. [P. 337] Alors ces guerriers réunis se mirent à pousser activement le siège de la ville et coupèrent aux habitants toute communication. Cette situation pénible dura jusqu'au commencement de 222 (13 décembre 836), où 'Abd er-Rah'mân envoya encore contre eux son frère El-Welîd ben El-Hakam, qui les trouva épuisés par les suprêmes efforts qu'ils avaient faits ; éprouvés comme ils l'étaient par la longueur du siège, ils ne pouvaient plus résister aux attaques, et El-Welîd emporta la ville d'assaut le samedi 8 redjeb (15 juin 837). Il s'y installa et fit reconstruire le château qui dominait la porte du fort,[61] car il avait été détruit sous le règne d'El-Hakam ; il en partit à la fin de chaban 223 (fin juillet 838), c'est-à-dire après que la réorganisation administrative fut terminée et que le calme fut rentré dans les esprits.

[P. 350] Mort de Ziyâdet Allah et avènement de son frère El-Aghlab[62]

Le 14 redjeb 223 (10 juin 838) mourut Ziyâdet Allah ben Ibrahim ben el-Aghlab, émir d’Ifrîkiyya, à l'âge de cinquante et un ans neuf mois et huit jours, après un règne de vingt et un ans et sept mois.

Son successeur fut son frère Abou 'Affân[63] el-Aghlab ben Ibrahim ben el-Aghlab, qui traita libéralement le djond, réprima de nombreux abus, augmenta les traitements des gouverneurs et fit cesser les exactions de ceux-ci ; il proscrivit de Kayrawân le vin de dattes et le vin. En 224 (22 novembre 838), il dirigea contre la Sicile une incursion qui revint saine et sauve en ramenant du butin. En 225 (11 novembre 839), plusieurs châteaux-forts de Sicile demandèrent quartier aux musulmans, entre autres Hisn el-balloût' (Caltabellotta), Platano, Corleone et Moroû (Calatomauro ?). Une flotte musulmane débarqua en Calabre, où elle demeura victorieuse, puis rencontra et battit la flotte de l'empereur de Constantinople ; la victoire fut complète, et les vaisseaux mis en fuite durent se réfugier à Constantinople. [P. 351] En 226 (30 octobre 840), une expédition fut faite en Sicile contre Castrogiovanni ; les assaillants, firent du butin et des prisonniers, et promenèrent l'incendie sans rencontrer de résistance. De là ils marchèrent contre Hisn el-Ghîrân (Fort des grottes), qui se compose de quarante grottes, et le mirent entièrement au pillage.

C'est en cette année que mourut, comme nous le raconterons, Abou 'Affân.

[P. 351] En 223 (2 décembre 837), 'Abd er-Rah'mân ben el-Hakam, souverain d'Espagne, envoya une armée contre Alava ; elle s'établit auprès de Hisn el-Gharât, qu'elle assiégea ; elle s'empara du butin qu'elle y trouva, en tua les habitants et s'en retourna, emmenant captifs les femmes et les enfants.[64]

[P. 361] Expédition des Musulmans d'Espagne

En 224 (22 novembre 838), 'Abd er-Rah'mân envoya sur le territoire ennemi 'Obeyd Allah,[65] connu sous le nom d'Ibn el-Balensi. Ce général poussa jusqu'à Alava et eut à soutenir un combat acharné contre les polythéistes, qui étaient sortis en nombre au-devant de lui ; mais ceux-ci furent défaits, et il en fut tué une quantité innombrable. Les monceaux formés par les têtes coupées, étaient tellement hauts que les cavaliers qu'ils séparaient ne se voyaient pas les uns les autres.

En la même année, Loderîk' tenta avec son armée une incursion contre Medinaceli, en Espagne. Fortoûn ben Moussa, à la tête de troupes nombreuses, s'avança contre lui, le défit et lui tua beaucoup d'hommes ; puis il alla assiéger le château qu'avaient élevé les habitants d'Alava, vis-à-vis les places frontières musulmanes, le prit et le détruisit.[66]

[P. 362] En 224 (22 novembre 838), la guerre éclata en Ifrîkiyya, entre 'Isa ben Rey'ân Azdi et les Lawâta, les Zawâgha et les Miknâsa. La lutte eut lieu entre Gafça et K'ast'îliya, et 'Isa égorgea tous ses ennemis jusqu'au dernier.[67]

En la même année, les habitants de Sidjilmâsa, d'accord avec Midrâr ben El-Yasa', confièrent le pouvoir en cette ville à Meymoûn ben Midrâr et expulsèrent le frère de ce dernier, connu sous le nom d'Ibn Tak'iya. Meymoûn, après qu'il eut bien établi son autorité, déporta son père et sa mère dans l'une des bourgades de Sidjilmâsa.[68]

[P. 367] En chaban 225 (juin 840), 'Abd er-Rah'mân, souverain d'Espagne, pénétra sur le territoire des polythéistes à la tête d'une nombreuse armée et s'avança en Galice, où il se rendit maître de plusieurs forts. Il parcourut le pays en y semant la ruine, le pillage et la mort, et y faisant de (nombreux) captifs. A la fin de cette incursion, qui dura longtemps, il rentra à Cordoue.[69]

[P. 369] Mort d'El-Aghlab ; règne d'Abou' l-'Abbâs Mohammed ben el-Aghlab

Le jeudi 22 rebi' II 226 (17 février 841), mourut El-Aghlab ben Ibrahim, après un règne de deux ans, sept mois et sept jours.[70]

Il eut pour successeur son fils Abou' l-'Abbâs Mohammed ben el-Aghlab ben Ibrahim ben el-Aghlab, dont l'autorité s'étendit sur toute l'Ifrîkiyya.[71] En 239 (11 juin 853), il fonda non loin de Tahert une ville qu'il nomma 'Abbâsiyya ; elle fut livrée aux flammes par Allah' ben 'Abd el-Wahhâb l'Ibâdite, qui envoya cette nouvelle à l'Omeyyade régnant en Espagne, et ce dernier lui fit parvenir pour sa peine la somme de cent mille dirhems.[72] Mohammed ben el-Aghlab mourut [P. 370] le lundi 1er moharrem 242 (9 mai 856), après un règne de quinze ans, huit mois et dix jours.

Règne d'Abou Ibrahim Ahmed, fils du précédent

Abou Ibrahim Ahmed, qui remplaça son père défunt,[73] traita le peuple avec justice, donna de grosses soldes au djond et bâtit en Ifrîkiyya dix mille châteaux-forts en pierre et chaux avec portes de fer ; il acquit de (nombreux) esclaves noirs. Aucun soulèvement n'agita son règne, et il mourut le mardi 17 dhoû'l-k'a'da 249 (31 décembre 863) ; il avait vingt-huit ans et avait régné sept ans, dix mois et douze jours.

Règne d'Abou Mohammed Ziyâdet Allah, frère du précédent

Ziyâdet Allah succéda à son frère[74] et marcha sur les traces de ses prédécesseurs ; mais il mourut bientôt, le samedi 19 dhoû'l-k'a'da 250 (23 décembre 864), après un règne d'un an et six jours.

Règne de Mohammed ben Ahmed ben el-Aghlab[75]

Ziyâdet Allah eut pour successeur Abou 'Abd Allah Mohammed ben Ahmed ben Mohammed ben el-Aghlab, qui suivit la même voie que ses prédécesseurs ; il était lettré, intelligent et sage administrateur, mais les chrétiens purent alors s'emparer de plusieurs localités de Sicile. Lui aussi éleva des forteresses et des corps de garde sur le littoral. Il y a en Occident[76] une région appelée la Grande Terre, à quinze jours de Barka, où l'on trouve sur le littoral de la ville de Bâra (Bari) habitée par des chrétiens qui ne sont pas des Roum. Cette ville fut l'objectif d'une expédition, qui ne réussit pas ; de H'ayât,[77] affranchi d'El-Aghlab, puis de Khalfoûn [P. 37i] le Berbère, qu'on dit 'affranchi de Rôbî'a ; et-qui s'en rendit maître sous le khalifat d'El-Mdtawakkil. On vit ensuite prendre le dessus un nommé El-Mofarredj ben Salim,[78] qui se rendit maître de' vingt-quatre châteaux-forts qu'il garda ; puis il annonça ses conquêtes au gouverneur d'Egypte, en ajoutant qu'il ne voyait, tant pour lui que pour ses compagnons, d'autre moyen de dire (canoniquement) la prière que si le (khalife et) imâm t'investissait de ce pays et lui en confiait l’administration, de manière à n'être plus un simple conquérant ; puis il édifia une mosquée principale (djâmi). Au bout de quelque temps, ses compagnons se : soulevèrent contre lui et le massacrèrent.

Abou 'Abd Allah Mohammed mourut en 261 (15 octobre 874).

Nous avons parlé d'un seul coup de tous ces princes à cause du petit nombre de faits se rapportant à chacun.

[P. 377] En 227 (20 octobre 841), une armée envoyée en territoire ennemi par 'Abd er-Rah'mân fut, entre Arboûna (Narbonne) et Chertânia (la Cerdagne), entourée par les chrétiens ; la bataille dura toute la nuit, mais au matin la faveur divine descendit sur les musulmans, qui restèrent vainqueurs. Moussa ben Moussa, chef de l'avant-garde, déploya dans cette bataille un courage remarquable.[79] Des dissentiments qui éclatèrent entre lui et Djerîr ben Mowaffek', un autre des principaux personnages de l'état, furent cause de la révolte de Moussa contre 'Abd er-Rah'mân.

En cette année aussi mourut Alphonse, roi des chrétiens d'Espagne,[80] après un règne de soixante-deux ans, ainsi que le juriste malékite Mohammed ben 'Abd Allah ben Hassan Yah'çobi,[81] qui était originaire d'Ifrîkiyya. (Orthographe de Chert'âniya).

[Tome VII, p. 3] Expéditions des musulmans en Sicile[82]

En 228 (9 octobre 842), El-Fad'l ben Djafar Hamadâni opéra un débarquement dans le port de Messine, d'où il envoya diverses colonnes qui rapportèrent un butin considérable. Les habitants de Naples lui demandèrent quartier et firent cause commune avec lui. El-Fad'l attaqua vigoureusement l'a ville de Messine,[83] mais sans pouvoir s'en rendre maître. Alors un corps de troupes contourna une montagne qui domine cette ville, la gravit, puis en redescendit sur la ville même, dont la population était absorbée par la lutte qu'elle soutenait contre [Ibn] Djafar ; se trouvant ainsi prise à revers, elle lâcha pied, et les musulmans restèrent maîtres de Messine.

La même année eut lieu la prise de la ville de Meskân.[84]

En 229 (29 septembre 843), Abou'l-Aghlab el-'Abbâs bëir el-Fad'l, à la tête d'un corps de troupes, arriva jusqu'à Chera,[85] dont les habitants, à la suite d'un combat acharné, durent fuir : dix mille des leurs perdirent la ; vie, tandis que trois musulmans seulement trouvèrent le martyre. Pareil fait ne s'était pas encore produit en Sicile.

En 232 (27 août 846), El-Fad'l ben Djafar, qui avait commencé le siège de Lentîni, fut averti que les habitants, ayant adressé une demande de secours au Patrice qui était en Sicile, avaient obtenu une réponse favorable : « Le signal de mon arrivée, avait-il ajouté, consistera en feux allumés trois nuits de suite [P.4] sur telle montagne ; j'arriverai le quatrième jour pour assaillir les musulmans de concert avec vous. » Alors El-Fad'l fit allumer pendant trois nuits des feux sur la montagne en question, ce qui fit que les habitants de Lentîni commencèrent leurs préparatifs. De son côté le général musulman fit les siens : il organisa une embuscade du côté de laquelle les assiégeants devaient, quand ils seraient attaqués, feindre de fuir, pour ensuite faire volte-face quand ils l'auraient dépassée. Le quatrième jour en effet, les habitants de Lentîni, qui attendaient l'arrivée du Patrice, firent une sortie en masse et attaquèrent les musulmans, qui prirent la fuite et attirèrent les chrétiens jusqu'au-delà de l'embuscade ; puis ils firent volte-face, tandis que leurs camarades apostés attaquaient l'ennemi par derrière. Il en fut fait un grand carnage, et le petit nombre de ceux qui échappèrent demandèrent grâce pour leurs vies et leurs biens, à quoi les musulmans consentirent moyennant reddition de la ville.

Dans la même année les musulmans s'installèrent dans la ville de Tarente en Lombardie et y fixèrent leur séjour.

En 233 (16 août 817), dix chelendi chrétiens vinrent jeter l'ancre à Mersa. et-T'in [Mondello, près Palerme[86]] et débarquèrent des soldats ; mais ceux-ci s'égarèrent ; et, forcés de revenir sans avoir rien pu faire, ils se rembarquèrent sur les bâtiments qui les avaient amenés, dont sept furent submergés.

En 234 (5 août 1848), les Ragusains conclurent la paix avec les musulmans moyennant livraison de la ville et de ce qu'elle renfermait. Les vainqueurs la détruisirent après en avoir enlevé tout ce qui était transportable. En, 235 : (25 juillet 849), une troupe de musulmans marcha contre Castrogiovanni et en revint saine et sauve, après avoir livré cette ville au pillage, au meurtre …et à l'incendie.

En redjeb 236 (janvier 851), mourut l'émir musulman de Sicile, Mohammed ben 'Abd Allah ben el-Aghlab, [P. 5] qui avait exercé le pouvoir pendant dix-neuf ans.[87] Il résidait à Palerme, d'où il ne sortait pas ; il se contentait d'envoyer de là des troupes et des colonnes qui lui servaient d'instruments de conquête et de pillage.

Guerre entre Moussa et El-Hârith ben Yezîgh[88]

En 228 (9 octobre 842) des combats eurent lieu ; contre Moussa, gouverneur de Tudèle, et El-Hârith 'ben Yézîgh, qui commandait l'armée du souverain d'Espagne ; 'Abd er-Rah'mân, voici à quel propos.[89] Nôûëi-avons dit qu'en 227 (20 octobre 841) des dissentiments fondée sur la jalousie avaient éclaté entre Moussa ben Moussa ; l’un des principaux officiers d’Abd er-Rah'mân et ; gouverneur de Tudèle, et les autres généraux. Alors ce chef se souleva contre 'Abd er-Rah'mân, qui fit marcher contre lui des troupes commandées par H'ârith ben Yezîgh et par d'autres chefs. Près de Borja[90] eut lieu une rencontre où Moussa perdit de nombreux soldats, y compris l'un de ses cousins. El-Hârith retourna ensuite à Saragosse. Mais Moussa ayant envoyé son fils Alb ben Moussa à Borja, El-Hârith vint assiéger cette dernière ville et s'en empara, puis s'en retourna après avoir fait mourir le fils de Moussa. Il (Moûéa ?) se rendit ensuite à une invitation de (El-Hârith ?), qui lui offrit de conclure la paix moyennant abandon de la ville ; mais Moussa se retira à Arnît (Arnedo), si bien qu'après l'avoir cherché plusieurs jours, El-H'ârith marcha sur cette localité et y assiégea son adversaire. Celui-ci députa alors à Garcia, l'un des princes polythéistes d'Espagne : une alliance fut conclue entre eux contre El-Hârith, et des embuscades furent préparées sur la route que celui-ci devait suivre. (Moussa lui-même) se posta avec un corps de cavalerie et d'infanterie dans un endroit nommé  près de la rivière qui arrose cette localité. Quand El-Hârith arriva à cette rivière, il fut assailli à l’improviste et entouré de toutes parts ; il lutta vaillamment, mais un coup qui l'atteignit à la tête lui creva l'œil, et il fut fait prisonnier.

'Abd er-Rah'mân, vivement impressionné par cet échec, équipa une nombreuse armée dont il confia le commandement à son fils Mohammed, et qu'il envoya contre Moussa en ramadan 229 (mai-juin 844). Mohammed s'avança vers Pampelune et livra près de cette ville à une forte armée polythéiste une bataille où Garcia et nombre des siens périrent. Moussa s'étant ensuite livré à de nouveaux actes de rébellion contre 'Abd er-Rah'mân, ce prince leva et fit marcher contre lui un corps de troupes considérable. [P. 6] Le rebelle demanda alors la paix, qui lui fut accordée ; il donna son fils Ismâ'îl en otage, et le gouvernement de Tudèle lui fut rendu. A son arrivée dans cette ville, il en expulsa tous ceux dont il avait quelque chose à craindre et s'y établit solidement.

[P. 11] Attaques des polythéistes contre les musulmans d'Espagne[91]

En 230 (17 septembre 844), les Madjoûs, partis des régions les plus éloignées de l'Espagne, vinrent attaquer par mer les pays musulmans. Ils se montrèrent tout d'abord en dhoû'l-hiddja 229 (août-septembre 843) près de Lisbonne,[92] où ils restèrent treize jours et où ils livrèrent plusieurs combats aux musulmans ; de là ils gagnèrent Cadix, puis Sidona, où il y eut aussi plusieurs rencontres. Les de moharrem (24 septembre), ils se dirigèrent sur Séville, à douze parasanges de laquelle ils établirent leur camp. De nombreux fidèles allèrent les y attaquer, mais furent battus et laissèrent sur le terrain quantité de morts. L'ennemi vint alors camper à deux milles de la ville, dont les habitants, qui firent une sortie contre lui, furent encore défaits le 14 de moharrem (30 septembre) et perdirent beaucoup de monde tant en tués qu'en prisonniers. Les Madjoûs n'épargnèrent ni hommes ni bêtes, s'installèrent pendant vingt-quatre heures dans la banlieue de la ville et regagnèrent ensuite leurs navires. Alors l'armée d’Abd er-Rah'mân entra en ligne, ayant à sa tête de nombreux officiers ; elle résista à l'impétueuse attaque des Madjoûs, qui perdirent soixante-dix hommes et durent se retirer à bord de leurs bâtiments, mais sans être poursuivis par les musulmans. Au reçu de cette nouvelle, 'Abd er-Rah'mân envoya une autre armée qui combattit vigoureusement les Madjoûs. Ceux-ci, obligés de reculer, furent rejoints, le 2 de rebi' I (26 novembre), par les musulmans, qui avaient reçu des secours de partout et dans les rangs desquels tout le monde venait se ranger. Attaqués par les Madjoûs, ils commencèrent par plier, mais ensuite l'ordre se rétablit, et nombre d'entre eux ayant mis pied à terre, l'ennemi s'enfuit en laissant sur le terrain environ cinq cents cadavres ; on lui prit quatre navires, auxquels on mit le feu après en avoir retiré ce qu'ils contenaient. Plusieurs jours se passèrent ensuite sans aucun fait de guerre, car les Madjoûs ne débarquèrent pas. Les infidèles allèrent ensuite attaquer Niébla, où ils firent des prisonniers[93] ; puis ils débarquèrent dans une île proche de K'oûrîs (Corias) pour y procéder au partage du butin. Ce spectacle enflamma de colère les musulmans, [P. 12] qui franchirent la rivière pour les attaquer et leur tuèrent deux hommes. Alors les Madjoûs allèrent à Sidona, où ils restèrent deux jours à s'emparer de vivres et à faire dès prisonniers. Des bâtiments d’Abd er-Rah'mân, souverain de l'Espagne, arrivèrent ensuite à Séville et à cette nouvelle les Madjoûs tombèrent sur Niébla, où ils continuèrent à piller et à faire des captifs, puis successivement sur Ocsonoba,[94] Badja et Lisbonne. Ensuite ils se retirèrent et l'on n'entendit plus parler d'eux, de sorte que les populations purent respirer.

Certains chroniqueurs arabes ont aussi raconté l'incursion des Madjoûs à Séville en 246 (27 mars 860), laquelle offre des points de ressemblance avec celle dont nous venons de parler, mais j'ignore si c'est la même, puisque la date est différente, ou s'il s'agit d'une autre. Il est plus vraisemblable que les deux n'en font qu'une ; je viens de faire le récit de la première, parce que l'on trouve dans chacune des traits différents. [P. 16] En 231 (6 septembre 845), une armée musulmane pénétra en Galice sur le territoire des infidèles, où elle pilla et massacra tout. Elle s'avança jusqu'à la ville de Léon, dont elle entreprit le siège avec des catapultés. Les habitants, effrayés s'enfuirent en abandonnant la ville et ce qu'elle renfermait, de sorte que les musulmans y pillèrent à leur gré, puis ruinèrent ce qui restait. Mais ils se retirèrent sans avoir pu détruire les murailles, car elles avaient dix-sept coudées de large,[95] et ne purent qu'y ouvrir de nombreuses brèches.

[P. 17] En 231 (6 septembre 845), la guerre éclata en Ifrîk'iyya entre Ahmed ben el-Aghlab et son frère Mohammed ben el-Aghlab. Le premier suivi d'une troupe de partisans assaillit le second dans son palais, dont les portes furent fermées par les gens de Mohammed ; il y eut d'abord combat, mais ils finirent par s'arranger. L'influence d'Ahmed devint prépondérante, et la direction des bureaux passa entre ses mains, de sorte qu'il avait toute la réalité d'un pouvoir que Mohammed n'exerçait que nominalement. Cette situation dura jusqu'en 232 (27 août 846), où Mohammed, à la suite d'une entente conclue avec certains de ses cousins paternels et de ses clients, put combattre Ahmed : il s'empara de sa personne et l'exila en Orient, tandis que lui-même reprit l'exercice du pouvoir. Ahmed mourut en 'Irak'.[96]

[P. 23] En 232 (27 août 846), Moussa, violant, ses promesses, se révolta en Espagne contre le souverain 'Abd er-Rah'mân ben El-Hakam, alors que la paix était conclue entre eux et que Moussa s'était soumis. Le prince fit marcher contre le rebelle une armée à la tête de laquelle il mit son fils Mohammed.

L'Espagne eut beaucoup à souffrir de la faim par suite d'une grande sécheresse qui commença en l'an 232[97] : Beaucoup d'hommes et d'animaux périrent, et les arbres desséchèrent (sur pied), si bien que l'on cessa de semer. Mais en cette année (sic), on se mit à prier pour avoir de l'eau, et l'on put arroser et semer ; les ravages causés par la sécheresse s'arrêtèrent.

[P. 27] En 233 (16 août 847), Mohammed ben el-Aghlab, émir d'Ifrîk'iyya, révoqua Salim ben Ghalboûn, qu'il avait nommé gouverneur du Zâb. Celui-ci s'avança vers

K'ayrawên, mais quand il fut arrivé au fort de…,[98] il manifesta ses projets de révolte et se dirigea vers Laribus. Sur le refus des habitants de le laisser pénétrer dans cette ville, il se rendit à Bâdja, où il se mit à l'abri. Mais Ibn el-Aghlab envoya contre lui des troupes commandées par Khafâdja ben Sofyân, qui alla camper sous les murs de cette ville et commença à l'attaquer. Salim tenta de fuir de nuit, mais il fut poursuivi et tué par Khafâdja, qui porta sa tête à Ibn el-Aghlab. Celui-ci fit également mettre à mort Azhar ben Salim, qu'il gardait prisonnier.

[P. 29] Troubles en Ifrîk'iyya

En 234 (4 août 848), 'Amr ben Selîm Todjibi, connu sous le nom d'El-K'awî', [P. 30] se révolta contre Mohammed ben el-Aghlab, qui le fit assiéger dans Tunis cette année-là, mais sans succès, de sorte que les troupes durent se retirer. En 235 (25 juillet 849), Ibn el-Aghlab envoya de nouveau contre le rebelle une armée qui lui livra bataille non loin de Tunis ; mais un grand nombre de soldats aghlabides firent défection et passèrent du côté d'El-K'awî', qui resta vainqueur et dont la situation acquit plus de relief. En 233 (14 juillet 850), de nouvelles troupes aghlabides défirent enfin le rebelle et firent un grand massacre de ses partisans ; lui-même fut poursuivi par un homme qui le décapita, et l'armée d'Ibn el-Aghlab entra à Tunis l'épée à la main en djomâda I.[99]

[P. 33] En 235 (25 juillet 849), le khalife (abbaside) El-Motawakkil fit reconnaître ses trois, fils en qualité d'héritiers présomptifs. A Mohammed, à qui il attribua le surnom honorifique d'El-Montaçir billah, il attribua à litre de fiefs l'Ifrîk'iyya, le Maghreb tout entier…, etc.

[P. 34] Événements d'Espagne

En 235 (25 juillet 849), 'Abbâs ben Welîd, connu sous le nom de Tabli, alla combattre dans les environs de Todmîr un rassemblement qui s'était formé et avait pris pour chef un nommé Mohammed ben 'Isa ben Sâbik'. 'Abbâs réduisit cette région, combattit les rebelles et s'en retourna après leur avoir accordé la paix.

La même année, des troubles occasionnés par les habitants de Tâkoronnâ et par les Berbères des environs furent sévèrement réprimés par un corps de troupes qu’Abd er-Rah'mân envoya contre eux.

El-Mondhir, que son père 'Abd er-Rah'mân avait envoyé faire une incursion contre les chrétiens à la tête d'une armée considérable, pénétra dans le pays d'Alava.[100]

En redjeb (janvier-février 850), de grandes inondations eurent lieu en Espagne : le pont d'Ecija fut emporté, les moulins furent détruits, le fleuve de Séville submergea seize bourgades, et le Tage, devenu large de trente milles, en submergea dix-huit. Ces graves ; désastres affligèrent tout le pays dans l'espace d'un seul mois[101] ; Rodmîr ben Adfounch (Ramire Ier, fils de Bermude) mourut en redjeb, après un règne de huit ans.

Le poète Abou 's-Sawl Sa'îd ben Ya'mer ben 'Ali mourut à Saragosse.

[P. 38] En 236 (14 juillet 850), H'abîba le Berbère[102] se révolta en Espagne, dans les montagnes d'Algésiras. Les nombreux partisans qui se joignirent à lui furent arrêtés dans leurs incursions victorieuses, par des troupes d'Abd er-Rah'mân, qui les battirent et les dispersèrent.

En la même année, des troupes d'Espagne firent une expédition sur le territoire de Barcelone ; elles y tuèrent de nombreux habitants, emmenèrent tout le reste en captivité et revinrent sans encombre, chargées de butin.[103]

[P. 40] Gouvernement d'El-'Abbâs ben el-Fad'l en Sicile ; ses conquêtes[104]

Nous avons dit, sous l'année 228, que Mohammed ben 'Abd' Allah, émir de Sicile, mourut en 236 (14 juillet 850). A sa mort, les musulmans tombèrent d'accord pour mettre à leur tête El-'Abbâs ben el-Fad'l ben Yakoub, et informèrent de leur choix l'émir d'Ifrîk'iyya, Mohammed ben el-Aghlab, qui envoya son investiture au nouveau chef. Avant même que ce diplôme lui fût parvenu, El-'Abbâs avait envoyé en expédition diverses colonnes qui avaient rapporté du butin. Après sa nomination officielle, il se mit lui-même en campagne, Il envoya une colonne commandée par son oncle paternel Rebâh', qu'il avait mis à la tête de son avant-garde, contre le fort d'Abou Thawr (Caltavuturo), et cet officier en revint avec du butin et des prisonniers. El-'Abbâs fit massacrer ceux-ci et s'avança vers Castrogiovanni en pillant, brûlant et détruisant tout sur son passage : il voulait ainsi forcer le Patrice à sortir pour le combattre, mais ce fut en vain, et il dut retourner (à Palerme).

En 238 (22 juin 852), il poussa avec une armée considérable jusqu'à Castrogiovanni et se livra au pillage et à la destruction ; puis il alla à Catane, à Syracuse, à Nout'os (Noto) et à Raguse, continuant de semer dans ces régions le pillage, la ruine et l'incendie. Il alla camper sous les murs de Bothîra (Butera), dont les habitants, après avoir subi un siège de cinq mois, obtinrent la paix moyennant livraison de cinq mille (esclaves).

En 242 (9 mai 856), El-'Abbâs, à la tête d'un corps de troupes important, se rendit maître de cinq châteaux-forts.[105]

En 243 (29 avril 857), il marcha contre Castrogiovanni, dont les habitants firent une sortie où ils furent mis en déroute et subirent des pertes importantes. Il se dirigea de là contre Syracuse, Tabermîn (Taormina) et autres villes en se livrant au pillage, à la destruction et à l'incendie. Il mit enfin le siège devant El-K'açr el-djedîd,[106] [P. 41] qu'il serra de très près. En vain les chrétiens assiégés lui offrirent une rançon de quinze mille dinars, il refusa de l'accepter et poursuivit le siège ; ils consentirent à rendre la place à condition qu'il laissât en liberté deux cents d'entre eux seulement. Cette condition fut acceptée, et après avoir mis en vente toute la population moins les deux cents stipulés, il démantela cette place forte.

Prise de Castrogiovanni[107]

Cette conquête fut opérée par les musulmans en 244 (18 avril 858). Castrogiovanni était devenue la capitale chrétienne de la Sicile à cause de sa forte situation, et avait ainsi remplacé Syracuse, où résidait auparavant le chef de l'île, depuis que les musulmans s'étaient rendus maîtres d'une partie du pays. Or, El-'Abbâs marcha à la tête des forces musulmanes contre Castrogiovanni et Syracuse, en même temps qu'il expédiait une flotte ; celle-ci rencontra quarante chelendi chrétiens, qui durent fuir après avoir soutenu un combat acharné et en laissant aux vainqueurs dix de ces bâtiments avec les hommes qui les montaient. El-'Abbâs retourna alors dans sa ville (de Palerme). Puis l'hiver étant venu, une colonne fut expédiée contre Castrogiovanni, d'où elle revint après s'être livrée au pillage et à la destruction, ramenant un prisonnier chrétien qui était un personnage de marque. Comme El-'Abbâs donnait l'ordre de le mettre à mort, il demanda à être épargné en promettant de fournir de bons renseignements, et aux interrogations d'El-'Abbâs, il répondit en ces termes : « Je puis te procurer la prise de Castrogiovanni en l'indiquant le chemin qui y conduit. Parce temps d'hiver et de neige, la garnison n'ayant pas à redouter vos attaques n'exerce pas de surveillance, et je pourrais introduire dans la ville une troupe de tes soldats que tu enverras avec moi ». El-'Abbâs choisit donc deux mille cavaliers d'entre les plus braves et les plus résolus, et l'on se mit en marche. Non loin de la ville, il se mit en embuscade et envoya son oncle Rebâh' avec ses hommes d'élite. Cette petite troupe s'avança couverte par la nuit, et le chrétien, qui marchait enchaîné devant Rebâh, leur fit voir l'endroit dont il fallait se rendre maître ; on dressa alors les échelles et l'on se trouva ainsi sur la montagne ; puis on atteignit les murailles de la ville vers l'aube et alors que les sentinelles étaient endormies. Par une petite porte qui laissait entrer l'eau et où l'on jetait les ordures, les musulmans se glissèrent tous dans l'intérieur, puis, l'épée à la main, attaquèrent les chrétiens et s'emparèrent des autres portes. El-'Abbâs arriva alors avec le reste de l'armée, [P. 42] si bien que la prière de l'aube put être dite dans la place le jeudi 15 chawwâl (23 janvier 859). Il fit aussitôt installer une mosquée pourvue d'une chaire où il monta le vendredi pour y faire la khotba (prône). Tous les combattants trouvés dans la place furent mis à mort ; on réduisit en captivité les filles de patrices couvertes de bijoux, ainsi que des fils de rois, et l'on y trouva (des richesses) impossibles à décrire. Ce fut un jour de cruelle humiliation pour le polythéisme en Sicile !

Quand cette conquête fut connue du roi des chrétiens, il envoya de Constantinople un Patrice à la tête de trois cents chelendi et de nombreux soldats. El-'Abbâs quitta Palerme pour attaquer cette flotte, qui était arrivée à Syracuse ; il battit les chrétiens, qui durent se rembarquer en désordre, leur enleva cent chelendi et leur tua beaucoup de monde, tandis que trois musulmans seulement furent atteints par les flèches ennemies.

En 246 (27 mars 860), la paix fut rompue par beaucoup de places fortes de Sicile, Sat'ar (Sutera), Ablâ (?), Platano, K'al'at 'Abd el-Mou'min, Caltabellotta, Caltavuluro, et d'autres encore. El-'Abbâs, qui se mit en campagne, pour les réduire, eut à combattre les troupes chrétiennes, qu'il vainquit et dont il fit un grand carnage. Puis il marcha contre K'al'at 'Abd el-Mou'min et Platano. Il était occupé à assiéger cette dernière place, quand la nouvelle de l'arrivée d'une (nouvelle et) nombreuse armée chrétienne l’obligea à s’avancer contre elle : il la rencontra à Cefalù, et à la suite d'un combat acharné il la força à se retirer à Syracuse. Lui-même rentra, à Palerme, mais il remit Castrogiovanni en état de défense et y installa une garnison.

En 247 (16 mars 861), El-'Abbâs se porta vers Syracuse, où il fit du butin, et s'avança vers les grottes de K'ark'ana[108] ; mais il tomba alors malade et mourut au bout de trois jours, le 3 djomâda II (13 août). Oh l'enterra en cet endroit, mais les chrétiens exhumèrent son cadavre et le jetèrent dans les flammes. Pendant son gouvernement, qui dura onze ans, il ne cessa ni hiver ni été de faire la guerre sainte ; il fit des expéditions en Calabre et en Lombardie et installa à demeure des musulmans dans ces deux régions.

[P. 43] En 237 (4 juillet 851), il surgit en Espagne, du côté des places frontières, un faux prophète qui proposa une explication nouvelle du Koran [P. 44] et qui trouva comme adhérents un certain nombre de vauriens. A côté d'autres prescriptions, il défendait qu'on se coupât les cheveux et les ongles. Le gouverneur de la région se le fit amener, et les premiers mots que lui adressa l'apôtre furent une invitation à se convertir à la foi nouvelle, Le gouverneur, après l'avoir inutilement sommé de venir à résipiscence, le fit crucifier.[109]

La même année, des troupes musulmanes pénétrèrent sur le territoire des polythéistes et remportèrent la victoire dans une grande bataille bien connue en Espagne sous le nom d'affaire d'El-Beyd'â'.[110]

[P. 46] Mort d’Abd er-Rah'mân ben El-Hakam et avènement de son fils Mohammed

Au mois de rebi' II 238 (septembre-octobre 852) mourut le souverain omeyyade d'Espagne 'Abd er-Rah'mân ben El-Hakam ben Hicham ben 'Abd er-Rah'mân ben Mo'âwiya ben Hicham, qui était né en 176 (27 avril 792) et avait régné trente et un ans et trois mois. Ce prince était brun et grand, il avait le nez aquilin et de grands yeux ; sa barbe était longue et il faisait usage du henné. Il laissa quarante-cinq enfants mâles.[111] Il avait, de la littérature et savait faire des vers ; on le compte parmi ceux qui avaient de l'amour pour leurs filles esclaves, et il est devenu célèbre par la passion qu'il conçut pour l'une d'elles, nommée T'aroûb.[112] Il était versé, dans la science de la loi religieuse (chéri'a) et dans les sciences philosophiques. La sécurité et le calme fleurirent durant le règne de ce prince, qui était d'une profonde intelligence et dont les richesses étaient considérables ; il édifia des palais et des lieux de plaisance nombreux, et établit des routes. Il ajouta deux portiques à la mosquée de Cordoue ; la mort l'empêcha de terminer l'ornementation de cet édifice, qui fut achevée par son fils. Il éleva aussi de nombreuses mosquées principales en Espagne.[113]

Celui qui lui succéda sur le trône fut son fils Mohammed, qui continua ses traditions de justice et termina la grande mosquée de Cordoue. Sa mère s'appelait Balitar[114] ; il eut cent enfants, tous mâles.[115] Ce fut lui, qui introduisit en Espagne les habitudes d'une pompe royale et tous les usages royaux ; aussi se croyait-il trop haut placé pour frayer avec le peuple. On comparait la pompe de sa cour à celle d'El-Welîd ben 'Abd el-Melik. C'est à lui aussi qu'on doit les premiers travaux d'art destinés à amener de l'eau potable à Cordoue même, ainsi que l'établissement d'un vaste réservoir où la population avait accès.[116]

[P. 47] En 239 (11 juin 853), Mohammed ben 'Abd er-Rah'mân envoya son frère El-Hakam à la tête d’une armée à Calatrava, dont les Tolédans avaient ruiné les remparts et mis à mort de nombreux habitants. El-Hakam commença par en relever les murailles, y ramena les habitants qui s'étaient enfuis et remit tout en ordre ; puis il marcha sur Tolède, dont il ravagea et dévasta les environs. Un autre corps de troupes, aussi envoyé par Mohammed contre Tolède, fut, en approchant de cette ville, surpris par les djond qui avaient dressé une embuscade ; il dut prendre la fuite, car la plupart des soldats dont il était composé furent blessés.[117]

[P. 48] Bataille entre les musulmans et les Francs d'Espagne

Au mois de moharrem 240 (juin 854), eut lieu en Espagne une sanglante rencontre entre les musulmans ; et les Francs, voici dans quelles circonstances. On sait l'état de rébellion où se trouvaient les Tolédans contre Mohammed ben 'Abd er-Rah'mân aussi bien que contre son père et prédécesseur. Or Mohammed s'étant, à cette ; époque, dirigé avec ses troupes vers Tolède, les habitants de celle ville députèrent aussitôt au roi de Galice et à celui des pays basques pour demander leur aide, et ce dernier leur expédia une armée considérable. A cette nouvelle, Mohammed, qui était déjà dans le voisinage de Tolède, rangea son armée en bataille, après avoir eu le soin de placer des troupes en embuscade du côté du Guadacelete ; lui même se porta en avant avec une faible troupe. Les Tolédans informèrent aussitôt les Francs de la faiblesse numérique de leurs ennemis, et, tout pleins de convoitise, se précipitèrent au combat. Mais, une fois la lutte engagée, les corps placés en embuscade assaillirent de toutes parts les polythéistes et les Tolédans et en tuèrent des quantités innombrables : on recueillit huit mille têtes qu'on envoya par tout le pays. Au dire des Tolédans, vingt mille hommes, tant d'un côté que de l'autre, périrent, et pendant longtemps les cadavres restèrent auprès du Guadacelete sans sépulture.[118]

[P. 52] En 241 (21 mai 855), Mohammed, souverain d'Espagne, renforça les garnisons de Calatrava et des régions voisines pour les mettre à même de tenir tête aux Tolédans. Il envoya aussi des troupes commandées par Moussa faire une incursion contre les Francs ; ce chef pénétra dans le pays d'Alava et s'en retourna après s'être rendu maître de plusieurs châteaux.[119]

[P. 53) En 242 (9 mai 856), une armée envoyée par Mohammed ben 'Abd er-Rah'mân d'Espagne, pénétra sur le territoire des polythéistes jusqu'à Barcelone et, dépassant les forts de cette région, stupéfaits (de tant d'audace), [P. 54] arriva jusque par delà les districts qui en dépendent. L'expédition eut pour résultats un butin considérable et la conquête d'un château appelé T'arrâdja,[120] dépendant de Barcelone et l'un des plus éloignés de cette ville.

Le 10 moharrem 242 (18 mai 856) mourut Abou'l 'Abbâs Mohammed ben el-Aghlab, à l'âge de trente-six ans. Il eut pour successeur son fils,[121] Abou Ibrahim Ahmed ben Mohammed ben el-Aghlab, ainsi que nous l'avons dit sous l'année 226.

En 243 (29 avril 857), les Tolédans se portèrent en masse contre Talavera, où commandait Massoud ben 'Abd Allah el-'Arîf Celui-ci fit une sortie à la tête des soldats du djond, mit en déroute les agresseurs, dont il tua un grand nombre et envoya à Cordoue sept cents têtes.[122]

La même année mourut le savant Choheyd ben 'Isa ben Choheyd Andalosi.[123]

[P. 56] En 245 (7 avril 859), un tremblement de terre détruisit au Maghreb maintes forteresses, des lieux d'habitation et des ponts. Le, khalife El-Motewakkil fit distribuer trois millions de dirhems à ceux qui, dans le lieu qu'il habitait, avaient souffert de ce phénomène.[124]

[P. 58] Expédition des infidèles d'Espagne contre le territoire musulman.[125]

En 245 (7 avril 859), les Madjoûs (Normands) s'embarquèrent sur les côtes d'Espagne et se dirigèrent sur le territoire musulman, dont le souverain Mohammed ben 'Abd er-Rah'mân mit en campagne des troupes destinées à leur tenir tête. La flotte des Madjoûs arriva à Séville, et ceux qui la montaient débarquèrent à Algésiras[126] et pénétrèrent dans les environs de la capitale, pour y entamer la lutte. Après avoir incendié la grande mosquée,[127] ils (se retirèrent et) gagnèrent la rive africaine, où ils débarquèrent à Nâkoûr.[128] Ils repassèrent ensuite en Espagne, mirent en déroute les habitants de Todmîr et pénétrèrent dans le fort d'Orihuela, après quoi ils s'avancèrent vers la frontière de France, où ils livrèrent le pays à la dévastation et firent un butin important ainsi que de nombreux prisonniers. Ils battirent alors en retraite, mais ils furent rejoints et combattus par les bâtiments de Mohammed, qui incendièrent deux navires ennemis et en prirent deux autres, dont le contenu fut mis au pillage. Cet exploit exaspéra les infidèles, dont le redoublement d'ardeur guerrière procura le martyre à un certain nombre de musulmans. La flotte ennemie s'avança jusqu'à Pampelune, dont le chef franc Garcia[129] dut racheter sa vie moyennant 90.000 dinars.

La même année, le gouverneur ('âmil) de T'arsoûna (Tarazona) fit une incursion contre Pampelune et conquit le château de …..[130] dont il réduisit les habitants en captivité ; le lendemain eut lieu avec les musulmans une rencontre où plusieurs de ceux-ci moururent en combattant pour leur foi.

[P. 58] Guerre en Ifrîkiyya entre les Berbères et Ibn el-Aghlab

En djomâda II 245 (septembre 859) eut lieu entre les Berbères et l'armée d'Abou Ibrahim Ahmed ben Mohammed ben el-Aghlab une bataille importante causée par le refus des Berbères de Lohân[131] de payer au gouverneur de Tripoli les dîmes et les impôts qu'ils lui devaient. [P. 59] Battu et forcé de fuir devant eux, il gagna Lebda, qu'il fortifia, puis se dirigea sur Tripoli. L'émir Ahmed lui envoya des troupes commandées par son frère Ziyâdet Allah, qui vainquit les Berbères et en massacra un grand ; nombre ; il lança en outre sa cavalerie à leur poursuite et fit sabrer ceux qu'elle atteignit ; les prisonniers furent décapités, et le contenu du camp ennemi fut livré aux flammes.

Les Berbères durent alors se soumettre, livrèrent des otages et payèrent leurs impôts.

[P. 60] En 246 (27 mars 860), Mohammed ben 'Abd er-Rah'mân s'avança[132] avec des troupes nombreuses et un grand attirail militaire contre la région de Pampelune : il réduisit, ruina et ravagea ce territoire, qui fut mis au pillage et où il sema la mort, lise rendit maître des. châteaux-forts de Fîroûs, de Fâlah'san et d'El-K'achtil[133] : dans ce dernier il mit la main sur Fortoûn, fils de Garcia, qu'après avoir gardé pendant vingt ans à Cordoue comme prisonnier il renvoya dans sa patrie et qui mourut âgé de quatre-vingt-seize ans. Mohammed passa, trente-deux jours sur le territoire de Pampelune.

 [P. 68] Gouvernement de la Sicile par Khafâdja ben Sofyân et par son fils Mohammed ; leurs campagnes.[134]

On a vu sous l'année 236 qu'El-'Abbâs, émir de Sicile, mourut en 247. La population fit choix pour le remplacer de son fils 'Abd Allah ben el-'Abbâs, ce dont on informa l'émir d’Ifrîk'iyya. 'Abd Allah envoya des colonnes de divers côtés et conquit maints et maints châteaux-forts, entre autres le Djebel Abou Mâlik, la K'al'at el-Arminîn et la K'al'at el-Mochâri'a.[135] Ces événements eurent lieu dans une période de cinq mois, au bout de laquelle, en djomada I 248 (6 mars 862), arriva Khafâdja ben Sofyân, envoyé d’Ifrîk'iyya en qualité d'émir. [P. 69] La première colonne qu'expédia le nouveau chef fut commandée par son fils Mahmoud[136] et dirigée contre Syracuse ; elle se livra au pillage, à la dévastation et à l'incendie, mais les chrétiens l'attaquèrent et la battirent, de sorte qu'elle dut battre en retraite ; cependant les habitants de Raguse lui demandèrent l'aman. On verra qu'en 252 il y eut encore une demande d'aman par Raguse ; j'ignore si cela constitue une simple divergence des dates données par les chroniqueurs, ou s'il s'agit de deux campagnes différentes, dont la seconde aurait été provoquée par le manquement des Ragusains à la parole donnée.

En moharrem 250 (12 février 864) fut prise la ville de Noût'os (Noto), grâce à l'indication, donnée par quelques habitants aux musulmans, d'un passage par où ils purent s'y introduire ; le butin qu'on y fit fut des plus riches. Un siège livra également la ville de Chikla (Scicli).[137]

En 252 (21. janvier 866) Khafâdja s'avança contre Syracuse, puis vers l'Etna ; il reçut alors des messagers de Taormine,[138] qui demandait Vamân, et envoya dans cette ville sa femme et son fils pour en arrêter les conditions. L'accord était conclu quand les chrétiens violèrent leur parole, et Khafâdja envoya son fils Mohammed, qui, à la tête d'un corps d'armée, prit la ville et réduisit les habitants en esclavage. En la même année, Khafâdja s'étant avancé contre Raguse, les habitants demandèrent à traiter moyennant la permission pour… (lacune) hommes de se retirer librement avec leurs montures et leurs biens, tout le reste étant livré au pillage. En conséquence, le vainqueur s'empara de toutes les richesses, esclaves et montures que renfermait la place. Les habitants d'El-Ghîrân et d'autres lieux conclurent une trêve avec lui, mais il s'empara de nombreuses places fortes, puis il dut rentrer à Palerme par suite d'une maladie.

En 253 (10 janvier 867), Khafâdja s'avança de Palerme sur Syracuse et Catane, ravagea le pays et en dévasta les moissons ; ses colonnes parcoururent (toute) la Sicile et y firent un abondant butin.

Le 20 rebi' I 254 (18 mars 869), Khafâdja se mit en campagne ; il confia les brûlots à son fils Mohammed et envoya contre Syracuse une colonne qui se livra au pillage. On apprit alors qu'un patrice envoyé de Constantinople arrivait en Sicile avec des forces considérables ; un corps de troupes musulmanes se porta à sa rencontre et après un combat acharné [P. 70] le mit en fuite, lui fit subir des pertes importantes et s'appropria un butin considérable. Khafâdja en personne s'avança du côté de Syracuse, ravagea les moissons et rentra à Palerme chargé de butin. Le 1er redjeb (25 juin) il fit embarquer son fils Mohammed, qui alla assiégea Ghayt'a (Gaète ?), en fit parcourir les environs par ses troupes et chargea ses navires du butin qu'il ramena à Palerme en chawwâl (septembre-octobre).

En çafar 255 (janvier-février 869), il fit partir son fils Mohammed pour Taormine, l'une des plus belles villes de Sicile, avec quelqu'un qui était venu lui promettre d'y introduire les musulmans par un sentier inconnu. En arrivant près de Taormine, Mohammed envoya en avant des fantassins que le guide y introduisit, qui s'emparèrent de la porte et des murailles et se mirent à piller et à enlever des captifs ; mais comme Mohammed, qui était resté en arrière avec une partie de ses troupes, n'arriva pas au moment convenu, l'avant-garde crut qu'une attaque de l'ennemi l'empêchait de participer au pillage, et elle se retira en désordre. Quand Mohammed arriva à la porte de la ville, les pillards l'avaient déjà abandonnée, et lui-même renonça à la partie.

En rebi' I de la même année (février-mars), Khafâdja. s'avança vers Mersa [ou Tiracia, Randazzo ?], tandis qu'il envoya de nombreux soldais commandés par son fils vers Syracuse ; mais ils se heurtèrent à une forte armée chrétienne devant laquelle ils faiblirent, et après avoir subi quelques pertes ils se retirèrent du côté de Khafâdja. Celui-ci marcha contre Syracuse, devant laquelle il mit le siège et qu'il bloqua étroitement, tout en ravageant le pays environnant et détruisant les moissons. Il se retira ensuite dans la direction de Palerme et alla camper au Wâdi et-T'în (Dittaino), d'où il se remit en marche la nuit ; il fut alors attaqué par un de ses soldats qui le tua d'un coup de lance, le 1er redjeb (14 juin), et s'enfuit ensuite à Syracuse. Le cadavre fut ramené et inhumé à Palerme.

Le peuple choisit pour lui succéder son fils Mohammed, et l'on informa du fait [P. 71] l'émir d’Ifrîk'iyya Mohammed ben Ahmed, qui ratifia cette nomination et envoya au nouveau chef l'investiture et des robes d'honneur.[139]

Gouvernement de Mohammed ben Khafâdja

A la suite de la mort de Khafâdja, son fils Mohammed, désigné par la population pour lui succéder, fut confirmé dans cette situation par Mohammed ben Ahmed ben el-Aghlab, prince de K'ayrawân. En 256 (8 décembre 869), il envoya une armée à Malte, dont les chrétiens levèrent le siège en apprenant l'arrivée de ces troupes. En redjeb 257,[140] l'émir Mohammed fut tué par ses eunuques, qui tentèrent ensuite de fuir ; mais la population se mit à leur poursuite et les massacra.

[P. 71] En 247 (16 mars 861), des troupes musulmanes d'Espagne marchèrent contre la ville de Barcelone, qui appartenait aux Francs. A la suite des attaques dont les habitants eurent à souffrir, le prince de cette ville réclama des secours au roi des Francs, qui lui envoya un corps d'armée important. Les musulmans de leur côté reçurent les renforts qu'ils avaient demandés et assiégèrent Barcelone, dont, à la suite d'une lutte acharnée, ils occupèrent les faubourgs, ainsi que deux tours. De nombreux infidèles périrent, elles musulmans purent se retirer sains et saufs avec le butin dont ils s'étaient emparés.[141]

[P. 79] En 248 (6 mars 862) mourut Abou Mohammed 'Abd er-Rah'mân ben 'Adaweyh Râfi'i, ascète dont les prières étaient exaucées de Dieu et qui était d’Ifrîk’iyya.

En 248, une troupe de cavaliers marcha sur Dhoû Teroûdja (Tprrejon ?), en Espagnes, car les infidèles avaient commis des empiétements de ce côté. Les ennemis furent rejoints et battus par ces cavaliers, qui en tuèrent un grand nombre.[142]

[P. 79] En 248, les musulmans de Sicile envoyèrent diverses colonnes qui revinrent en ramenant du butin, mais sans qu'il y eût des combats (assez importants pour qu') on les ait mentionnés.[143]

[P. 82] En 249 (23 février 863), Mohammed, souverain d'Espagne, envoya son fils à la tête d'une armée contre la région d'Alava, dans le pays des Francs. La cavalerie se lança à travers ces provinces frontières, y fit du butin et y conquit plusieurs châteaux des mieux défendus.[144]

[P. 82] Le 13 dhoû'l-k'a'da 249 (27 décembre 863) mourut Abou Ibrahim Ahmed ben Mohammed ben el-Agblab, prince d’Ifrîk’iyya. Son frère et successeur, Ziyâdet Allah ben Mohammed ben el-Aghlab fit, lors de son avènement, prévenir Khafâdja ben Sofyân, gouverneur de Sicile, de la mort de son frère et lui envoya l'ordre de continuer ses fonctions.[145] [P. 89] En 250 (12 février 864) mourut Ziyâdet Allah ben Mohammed ben el-Aghlab, après un règne d'un an et six jours. Il eut pour successeur son neveu Mohammed ben Abou Ibrahim Ahmed ben Mohammed.

[P. 108] Campagne des Francs en Espagne

En djomâda II 251 (juillet 865), l'Omeyyade d'Espagne Mohammed ben 'Abd er-Rah'mân envoya sur le territoire infidèle une armée commandée par son fils El-Mondhir,[146] armée qui se dirigea vers El-Mellâh'â.[147] Comme les propriétés de Loderîk étaient situées du côté de l'Alava et que les musulmans avaient dévasté et pillé tout le pays, ce prince rassembla ses troupes pour marcher contre les envahisseurs. Il les rencontra dans un lieu nommé Feddj el-Markwîn,[148] d'où cette campagne tira son nom ; les polythéistes furent défaits, mais ne s'éloignèrent pas et se reformèrent [P. 109] sur une colline non loin du champ de bataille. Poursuivis et chargés par les musulmans, les Francs furent, après un vif combat, réduits à s'enfuir, serrés de près par leurs vainqueurs, qui tuaient ou emprisonnaient (ceux qui leur tombaient entre les mains). A la suite de cette affaire importante, qui eut lieu le 12 redjeb (8 août et d'où l'on emporta deux mille quatre cent quatre-vingt-douze têtes d'infidèles,[149] les musulmans se retirèrent.[150]

[P. 119] En 252 (21 janvier 866), un corps d'armée envoyé sur le territoire ennemi par Mohammed ben 'Abd er-Rah'mân d'Espagne marcha contre l'Alava et la ville de Mâno ( ?) et revint sans subir de pertes, après avoir tué quantité d'habitants de ces localités.[151]

[P. 124] En 253 (10 janvier 867), l'armée musulmane sortît d'Espagne et s'avança dans le pays des infidèles, où ; elle conquit les forts de Djernîk' et mit le siège devant Foûtâb (?),[152] dont les murailles tombèrent entre ses mains pour la plus grande partie.

[P. 127]. En 254 (31 décembre 867), les habitants de Mérida,[153] en Espagne, se révoltèrent de nouveau contre Mohammed ben 'Abd er-Rah'mân. [P. 128] L'insurrection qu'ils avaient tentée autrefois contre le père de ce prince avait-été réprimée, et par suite nombre d'entre eux avaient quitté la ville. Or, à l'époque dont nous parlons, ces gens rentrèrent dans leur patrie, et leur esprit de mutinerie y suscita une nouvelle révolte. Mohammed alla assiéger la ville et la réduisit à la dernière extrémité, de sorte qu'elle dut se rendre et reconnaître son autorité. Il fit transporter à Cordoue les habitants avec leurs biens, et abattit les remparts, dont il employa les matériaux à fortifier uniquement l'endroit qui servait exclusivement de demeure à ses représentants.

En la même année mourut Ordoño, fils de Rodmî'r, prince de Galice, en Espagne, qui eut pour successeur Alphonse, âgé de douze ans.[154]

L'Espagne fut, de 251 à 255 (865 à 868), ravagée par une horrible disette qui prit fin à cette époque.[155]

[P. 148] En redjeb 255 (19 décembre 868) mourut l'émir de. Sicile, Khafâdja ben Sofyân, à qui succéda son fils Mohammed, ainsi qu'il a été dit sous l'année 247. Mohammed.fit marcher contre Syracuse [P. 149] son oncle, paternel, 'Abd Allah ben Sofyân, qui ravagea les moissons de cette région et revint ensuite.[156]

[P. 173] En 257, (28 novembre 870) ; Mohammed ben Khafâdja, émir de Sicile, fut assassiné en plein jour par ses esclaves ; mais : ils cachèrent leur méfait, qui ne fut connu que le lendemain, alors qu'ils s'étaient enfuis. Ils furent cependant poursuivis et pris, et plusieurs furent exécutés. Mohammed ben Ahmed ben el-Aghlab le remplaça par Ahmed ben Yakoub ben el-Mod'abeh Selma, qui mourut peu après, en 258 (17 novembre 871).

[P. 182] Événements d'Espagne

En 259 (6 novembre 872), Mohammed ben 'Abd er-Rah'mân alla assiéger les Tolédans, qui s'étaient insurgés contre lui ; il les força à demander Vamân, qu'il leur accorda moyennant la remise d'otages.

Les Tolédans, au nombre de dix mille, marchèrent contre le fort de Sekyân, défendu par sept cents Berbères. [P. 183] Dans le combat qui s'engagea, l'un des chefs des assaillants, 'Abd er-Rah'mân ben Habib ; ayant pris la fuite, entraîna les Tolédans avec lui. Cet acte (de trahison) avait pour cause l'inimitié qui le séparait d'un autre chef tolédan nommé T'oreycha,[157] qu'il voulait ainsi réduire à l'impuissance. Après leur déroute, ils tuèrent El-Bark'îl (?).

En la même année, 'Amr ben 'Amroûs, qui était en état de rébellion depuis plusieurs années, fit sa soumission à Mohammed ben 'Abd er-Rah'mân, qui lui confia le gouvernement de la ville d'Huesca.[158] Mohammed assiégea plusieurs châteaux-forts des Beni-Moussa ; il marcha ensuite contre Pampelune, sur le territoire de laquelle il exerça des actes d'hostilité, puis rentra dans ses états.

[P. 183] En 259 (6 novembre 872), une colonne musulmane marcha contre Syracuse, dont les habitants obtinrent la paix moyennant la mise en liberté de trois cent soixante prisonniers musulmans qui étaient entre leurs mains ; après quoi la colonne se retira.

[P. 187] Guerre entre les Tolédans et les Hawwâra

En 260 (26 octobre 873), Moussa ben Dhoû'n-Noûn le Hawwâri leva la tête à Santaver ; il fit une incursion contre les Tolédans et pénétra dans le fort de Welîd (Hisn Welîd), qui fait parti (du territoire) de Santaver. Environ 20.000 Tolédans marchèrent contre lui ; mais quand la bataille fut engagée, Mohammed ben T'oreycha, qui était avec eux, prit la fuite avec ses soldats, et les Tolédans firent de même ; Mot'arref ben 'Abd er-Rah'mân fut aussi entraîné dans cette déroute. Ibn T'oreycha voulut ainsi rendre la pareille à Mot'arref, alors qu'il avait, l'année précédente, été lui-même entraîné dans la fuite. Les Tolédans subirent de fortes pertes. La situation de Moussa ben Dhoû'n-Noûn se consolida, et ce chef obtint le respect de tous ceux qui avaient à redouter quelque chose de lui.[159]

[P. 188] En 260 (26 octobre 873), une famine terrible ravagea l'Ifrîk'iyya, le Maghreb et l'Espagne et s'étendit même partout. Elle fut suivie de la peste et de violentes épidémies qui enlevèrent beaucoup de monde.[160]

[P. 191] En chawwâl 260 (juillet-août 874), le khalife El-Mo'tamid, dans une séance tenue à l'hôtel destiné aux réceptions publiques (dâr el-'âmma), désigna pour son successeur son fils Djafar, à qui il donna le surnom honorifique d'El-Mofawwad' ila'llâh, en lui adjoignant (comme conseiller) Moussa ben Boghâ. Il le nomma au gouvernement de l'Ifrîk'iyya, de l'Egypte, etc.

[P. 195] En 261 (15 octobre 874), les habitants de Bark'a s'étant révoltés contre Ahmed ben Touloun et ayant expulsé leur émir Mohammed ben el-Faradj Ferghâni, le prince d'Egypte envoya contre eux un corps d'armée commandé par son page Loulou, dont les instructions étaient d'employer tout d'abord la douceur et de tâcher de ramener les révoltés sans recourir à la violence, mais de tirer l'épée s'il était nécessaire. Ces troupes se mirent en marche et vinrent camper sous les murs de Barka, qu'elles entourèrent de près, mais en agissant vis-à-vis des habitants conformément aux ordres d'Ibn Touloun. Mais ces gens, croyant rester les plus forts, firent un jour une sortie, et, attaquant une partie des troupes campées près de la porte de la ville, y firent un certain nombre de victimes. Loulou avertit alors de ce fait Ahmed, et, conformément à l'ordre qu'envoya celui-ci d'engager sérieusement les hostilités, il dressa ses machines de guerre et attaqua vigoureusement. Les assiégés demandèrent et obtinrent quartier ; la porte fut ouverte à Loulou, qui pénétra dans la ville, saisit un certain nombre des chefs et fit fouetter les uns, couper les mains aux autres ; il en réserva également pour les emmener en Egypte. Après avoir installé un gouverneur à Barka, il retourna au Caire, où Ahmed lui conféra un vêtement d'honneur comprenant deux colliers qu'il se mit au cou. Les prisonniers furent promenés dans les rues.

Gouvernement d'Ibrahim ben Ahmed en Ifrîk'iyya.[161]

Le 6 djomâda I (15 février 875), mourut Mohammed ben Ahmed ben el-Aghlab, prince d’Ifrîk’iyya, après un règne de dix ans, cinq mois et seize jours. Quand il fut près de mourir, il désigna, pour lui succéder, son fils Abou 'Ik'âl, et fit jurer à son frère Ibrahim de ne pas lui créer de difficultés, en faisant prendre acte de ce serment par la famille Aghlabide [P. 196] et par les cheikhs de K'ayrawân. Cela fait, il chargea Ibrahim du soin de gouverner le pays jusqu'à la majorité du jeune homme.

Quand il fut mort, les habitants de K'ayrawân vinrent demander à Ibrahim, dont ils connaissaient les qualités d'administrateur et la justice, de prendre leurs affaires en mains. Ibrahim refusa d'abord, puis consentit et s'installa dans le palais gouvernemental, d'où il imprima aux affaires une direction unanimement approuvée : il était juste et ferme, procura la sécurité au pays et le débarrassa des fauteurs de troubles et des malfaiteurs ; le lundi et le jeudi, il s'installait dans la grande mosquée de K'ayrawân pour entendre les plaignants, qu'il écoutait patiemment et dont il tranchait équitablement les différends. Les caravanes et les marchands parcouraient sans crainte des routes sûres ; il fit élever des forts et des corps de garde sur le littoral maritime, si bien qu'une seule nuit suffisait, à l'aide des feux allumés de proche en proche, pour faire parvenir une nouvelle de Ceuta à Alexandrie ; il entoura Sousse de murailles et projeta de faire le pèlerinage, puis il supprima les abus et pratiqua l'abstinence et la piété. Sachant que, s'il passait par l'Egypte pour se rendre à. la Mekke, il en serait empêché par Ibn Touloun et qu'il en résulterait une guerre meurtrière pour les musulmans, il se décida à prendre le chemin de la Sicile pour faire à la fois le pèlerinage et la guerre sainte, en conquérant dans cette île les places fortes qui avaient résisté jusqu'alors. Il transporta donc tout l'or, les armes, etc., qu'il avait amassés, à Sousse, où il fi.t son entrée au commencement de 289 (15 décembre 901), vêtu de la pelisse rapiécée que portent les ascètes, et s'embarqua de là pour la Sicile. Il alla attaquer la ville de Yartînoû[162] (Nardo ?) et s'en rendit maître à la fin de redjeb ; il se conduisit avec justice et y traita bien les sujets. Il se dirigea ensuite sur Taormine, dont les habitants étaient prêts au combat et firent une sortie contre lui. La mêlée commençait quand un lecteur du Koran lut ces mots « Nous t'avons donné une victoire évidente » (Koran, XLVIII, 1). — Récite plutôt», lui dit l'émir, « Ce sont deux adversaires qui disputent au sujet de leur Seigneur » (ibid., xxii, 20). Après que cela fut fait : « O grand Dieu, s'écria Ibrahim, c'est aujourd'hui moi et les infidèles qui te soumettons notre différend » ; puis il chargea suivi des plus braves,[163] et mit en déroute les chrétiens, que les musulmans massacrèrent tout à leur aise ; ils entrèrent à leur suite dans la ville qu'ils emportèrent d'assaut. Une partie des chrétiens put s'enfuir sur des navires, d'autres se réfugièrent dans la forteresse, dont les vainqueurs firent le blocus [P. 197] et par leurs attaques forcèrent les réfugiés à se rendre, de sorte qu'ils s'emparèrent de leurs richesses et firent prisonniers les femmes et les enfants, le 22 chaban (31 juillet 902) ; les combattants furent massacrés, les prisonniers et le butin vendus.

La nouvelle de la prise de Taormine affecta vivement le roi des Roum, qui resta pendant sept jours sans ceindre son diadème, car, disait-il, cet insigne ne doit pas figurer sur la fête d'un homme affligé. Puis les Roum commencèrent les préparatifs d'une expédition en Sicile pour enlever cette île aux musulmans ; mais quand ils apprirent qu'(Ibrahim) songeait à marcher sur Constantinople même, leur prince laissa dans cette ville une armée imposante, tout en envoyant en Sicile des troupes nombreuses. D'autre part, Ibrahim, après avoir conquis Taormine, envoya des colonnes contre les villes de Sicile encore occupées par les chrétiens, entre autres contre Mîk'och et contre Demonech (Demona) : ces deux localités avaient été abandonnées par leurs habitants, et nos troupes en rapportèrent le butin qu'elles y trouvèrent. Deux autres colonnes furent lancées l'une contre Ramette, l'autre contre Aci : en vain la population de ces deux localités offrit de payer le tribut, Ibrahim exigea et obtint la remise des forts, qui furent démantelés. Il s'avança ensuite contre Cosenza, qui envoya des messagers pour demander l'aman, mais cela leur fut refusé. On commença donc le siège, mais le prince venait d'être attaqué de la diarrhée, et son absence refroidit l'ardeur guerrière de ses troupes. Il restait isolé, à cause de la violence de la maladie et ne pouvant plus dormir, puis l'agonie survint, et il mourut la nuit du vendredi au samedi 19[164] dhoû' l-k'a'da 289 (23 octobre 902). Les gens sages de l'armée décidèrent de confier le commandement à Abou Mod'ar [Ziyâdet Allah] ben Abou' l-'Abbâs 'Abd Allah pour qu'il veillât à l'heureux retour, en Ifrîk'iyya, près de son propre père, tant des troupes que des richesses et des bagages. Quant au cadavre d'Ibrahim, on le plaça dans un cercueil et on l'emporta à K'ayrawân, où il fut inhumé.[165]

Ce prince, dont le gouvernement avait duré vingt-cinq ans, était intelligent, administrateur équitable, pratiquant les bonnes œuvres et les bienfaits, distribuant en aumônes ou en fondations pieuses tout ce qu'il avait. Il apportait à découvrir les actes cachés une grande finesse ; en voici un exemple. Un marchand de K'ayrawân avait une femme belle, [P. 198] vertueuse et pleine de retenue. Le vizir d'Ibrahim, qui en eut connaissance, lui envoya des messages qui restèrent sans réponse, et sa passion s'en enflamma davantage. Il conta celle affaire à une vieille qui le fréquentait, qui jouissait d'une certaine considération auprès de l'émir et d'une très grande considération auprès de la mère de celui-ci, car elle passait pour une femme de bien par qui l'on s'attirait les bénédictions divines, et l'on sollicitait ses prières. Elle promit au vizir d'adoucir l'inhumaine et de lui procurer une entrevue avec elle. En effet, elle alla frapper à la porte de la demeure de cette dernière, en disant qu'elle désirait purifier son vêtement qui venait d'être souillé. La femme du marchand lui ouvrit, lui souhaita la bienvenue et la fit entrer, puis la vieille, après avoir purifié son vêtement, se mit à prier. Elle refusa ensuite l'offre de son hôtesse de lui servir à manger, sous le prétexte qu'elle jeûnait, mais en ajoutant qu'il était indispensable qu'elle revînt souvent. C'est, en effet, ce qu'elle fit, puis elle dit un jour : « Je suis chargée d'une orpheline que je vais marier et je le prie, si la chose ne t'est pas désagréable, de me prêter tes bijoux pour que je puisse l'en parer dans cette occasion ». Son interlocutrice y consentit et lui remit ses bijoux ; la vieille les emporta et resta quelques jours sans se montrer. Lorsqu'elle revint, la femme du marchand lui redemanda ses bijoux, que la vieille déclara ne plus avoir. « Ils sont, dit-elle, chez le vizir, qui me les a pris alors que j'en étais chargée et que je passais auprès de lui ; il m'a déclaré qu'il ne les remettra qu'à toi ». Les deux femmes se disputèrent, puis la vieille s'en alla. Le marchand fut à son retour mis au courant des faits par sa femme, et il alla raconter la chose à l'émir Ibrahim. Celui-ci pénétra chez sa mère et lui demanda où était la vieille : « Elle est là, dit sa mère, à prier pour toi ». Sur la demande qu'il fit de se sanctifiera son contact, la princesse la fit chercher, et Ibrahim allant au-devant d'elle l'accueillit avec honneur et d'un air gai ; puis lui prenant un cachet qu'elle avait au doigt, il se mita le tourner et retourner en jouant avec. Appelant ensuite un eunuque : « Va, lui dit-il, chez cette vieille et fais-toi remettre par sa fille telle cassette renfermant tels et tels bijoux ; voici le cachet qui prouvera que tu viens de sa part ». Quand le coffret fut entre ses mains, il le montra à la vieille en lui demandant ce que c'était, et elle resta tout interdite. Il la fit mettre à mort et enterrer dans le palais ; quant au coffret, il fut restitué à son propriétaire avec quelque chose par surcroît, et le prince dit à cet homme : « A tirer vengeance du vizir sur le champ, l'affaire s'ébruitera ; mais je profiterai de la première occasion où il sera en faute. » Au bout de peu de temps, en effet, ce vizir fut provoqué à commettre un acte coupable et fut puni de mort.

[P. 199] En 261 (15 octobre 874), Ibn Merwân le Galicien s'enfuit de Cordoue et se dirigea sur le fort d'Alanje,[166] dont il s'empara et où il se fortifia. Le prince d'Espagne Mohammed alla l'y assiéger pendant trois mois et le réduisit à se nourrir de ses montures. Alors le rebelle dut demander l'aman, qu'il obtint, et se retira dans la ville de Badajoz.

Asad ben el-Hârith ben Raf se mit à la tête d'une insurrection des habitants de Tâkorona, qui furent forcés de rentrer dans le devoir à la suite de l'expédition que le souverain Mohammed fit faire par ses troupes.[167]

[P. 212] En 262 (5 octobre 875), le souverain d'Espagne Mohammed envoya une armée conduite par son fils El-Mondhir contre le Galicien, qui était alors à Badajoz, ville qu'il quitta en apprenant qu'il allait y être attaqué, pour se rendre dans le château de Caracuel.[168] Il y fut assiégé, et nombre des siens trouvèrent la mort au mois de chawwâl (juin-juillet 876).

[P. 215] En 263 (23 septembre 876), le souverain d'Espagne Mohammed envoya son fils El-Mondhir à la tête d'une nombreuse troupe avec ordre de passer par Mérida. Au delà de cette ville et alors qu'il se dirigeait vers le territoire ennemi, El-Mondhir fut suivi par neuf cents cavaliers de l'armée régulière ('asker). Mais alors ceux-ci furent assaillis par un corps considérable de polythéistes qui avaient été postés en arrière ; cependant ils tinrent ferme dans une série de combats et leur tuèrent beaucoup de monde. Mais ensuite le fils du Galicien, soutenu par des auxiliaires infidèles, l'emporta sur la troupe des sept cents[169] guerriers, et sous leurs coups tous ces musulmans furent par Dieu gratifiés de la mort.

En 263 (23 septembre 876) Ibrahim, émir d'Ifrîk'iyya, commença à bâtir la ville de Rak'k'âda.[170]

[P. 219-220] A la suite de la mort d'Amâdjoûr, Ahmed ben Touloun partit pour la Syrie en 264 (12 septembre 877), laissant en Egypte, en qualité de lieutenant, son fils El-'Abbûs… Il reçut bientôt la nouvelle que ce dernier, secouant l'obéissance qu'il lui devait, était parti pour Bark'a en enlevant des sommes d'argent ; mais Ahmed, sans se préoccuper autrement de ce fait ni se laisser troubler, acheva les affaires qui avaient motivé son déplacement et assura les frontières de ce côté….[171]

 

 

suivant


 

[1] Sur cette expédition, voir aussi le Bayân (ii, 77), qui mentionne encore une expédition en 199 (comparez sur cette date au 1897, p. 382). Makkari parle aussi de la campagne de 200 (t. i, 219) ; Dozy, Recherches (t. i, 149 de la 2e éd., 137 de la 3e).

[2] Le Bayân ne parle pas de cette affaire.

[3] Ailleurs, il est dit huit dinars (Berbères, i, 404 ; Bayân, i, 87).

[4] On lit « H'omeyd » au lieu de « 'Amr » dans le récit de cette même anecdote qu'on retrouve ailleurs (Berbères, l. l. ; Bayân, l. l.)

[5] Ce passage a été relevé par Amari, Biblioteca, i, 364. L'expédition eut pour chef Mohammed ben 'Abd Allah Temimi et se fit en 206, d'après le Bayân (i, 89) et ainsi que le dit plus loin Ibn el-Athir lui-même, p. 99.

[6] Le Bayân (i, 89) parle de cette révolte sous l'année 207, mais il semble la distinguer du mouvement provoqué, par le même personnage, dès le début du règne (ibid., 88).

[7] Ce nom est écrit partout ailleurs Naçr, comme aussi dans le ms. de Paris. Tornberg n'a pas noté cette variante ; mais il a signalé que ce ms. présente une rédaction beaucoup plus brève et condense en une douzaine de lignes environ ce qui, dans l'édition imprimée, a trait à l'année 208 et en comporte une cinquantaine (cf. infra). La révolte de Tonbodhi est racontée longuement par Noweïri (Berbères, i, 406) et par le Bayân (i, 90) ; ce dernier ouvrage la place sous l'année 209, et cette date se retrouve également dans Bekri (p. 63) et dans Ibn el-Abbar (ap. Berbères, i, 408, n.). Le Mochtarik (p. 294) donne aussi la date 208.

[8] C'est la Mohammediyya actuelle, à 4 lieues sud de Tunis. Les voyelles de ce nom sont indiquées un peu plus bas par notre auteur même ; le Merâcid orthographie T'anbadha (cf. Mochtarik, p. 294 ; Fournel, i, 482).

[9] Qui se nommait Chedjra ben 'Isa.

[10] Ici se présente un nom que M. de Goeje a proposé de lire Bizerte ; on pourrait aussi songer à Monastir, bien que les autres localités citées se trouvent plus au nord ; mais il est presque aussitôt parlé de l'attaque dirigée contre K'ayrawân. Ce nom ne figure pas dans l'énumération que fait Ibn Khaldoun de ces diverses villes (Des Vergers, p. 100).

[11] Il doit bien s'agir du mois de djomâda II, puisque Mansour, arrivé devant K'ayrawân en djomâda I, investit cette ville pendant quarante jours. Bekri (p. 63) a donc commis un lapsus en écrivant djomâda I, ce que Fournel a relevé (i, 487).

[12] Sur ce nom, cf. année 1897.

[13] Le ms. de Paris présente ici, ce qui a été relevé plus haut, une rédaction très abrégée de toute la fin du chapitre. Immédiatement après le mot « Mofarridj », il continue en ces termes : « A cette nouvelle, Ziyâdet Allah équipa un corps d'armée destiné à combattre Mansour et dont il confia le commandement à Mohammed ben 'Abd Allâh Ifrîki. Ces troupes livrèrent aux partisans de Mansour, qui avaient abandonné celui-ci, un combat sanglant où Mohammed Ifrilri fut mis en dérouté. Alors Mansour, reprenant courage, marcha une seconde fois sur K'ayrawân, sous les murs de laquelle il campa pendant treize jours ; mais il dut fuir et il installa son camp à. Laribus avec ceux du djond qui s'étaient attachés à sa fortune. Alors ceux qui avaient fait défection pour suivre 'Amir bon [Nâfi'] allèrent l'assiéger, et il dut demander l'aman. 'Amir le lui accorda, mais il fît emprisonner son adversaire quand celui-ci alla le trouver ; puis il le lit mettre à mort en 212. »

[14] Ici encore le Bayân lit 210.

[15] Le texte porte 'Omar, par suite d'une erreur typographique l'élevée par Tornberg lui-même, ainsi qu'en témoigne l'index qu'il a ajouté à son édition.

[16] Comparez le récit de ces événements dans Noweïri (Berbères, i, 410) ; le Bayân (i, 91) ; Ibn Khaldoun-Desvergers (p. 100) ; Fournel (i. 487).

[17] Ce chapitre figure dans la Biblioteca, i, 364. Le récit du Bayân (i, 95 et s.) est très bref.

[18] Voir entre autres sur ce savant et guerrier la note du traducteur d'Ibn Khallikan (ii, 132).

[19] J'ai suivi la leçon d'Amari, d'après laquelle il est fait allusion aux Latomies, et qu'on retrouve dans le ms. de Paris. Le texte de l'éd. Tornberg n'est pas grammaticalement admissible.

[20] Il s'agit probablement du personnage qui est appelé Abou Fehr Mohammed ben 'Abd Allah par le Bayân, i, 97.

[21] Il y a là un mot corrompu que je ne peux rétablir. Fleischer et Amari ont voulu lire l'un et l'autre des mots féminins auxquels le pronom masculin qui suit ne permet pas de songer.

[22] Le ms. de Paris ajoute ici : « La mort de l'émir Ziyâdet Allah, qui avait régné vingt et un ans neuf mois et huit jours, arriva en redjeb 223 ». Après quoi vient, ainsi que le dit Tornberg un chapitre qui, dans son édition, figure sous l'année 223 mais avec de légères différences.

[23] Il n'est pas question de cette affaire dans le Bayân.

[24] Ailleurs on trouve aussi la date de 202 (Ibn-Khallikan, ii, 132), On vit alors pour la première fois deux kadis exercer simultanément dans la même ville (Bayân, i, 89, où cette nomination est rapportée à l'année 203).

[25] A peut-être un sens quelque peu différent ; ou retrouve cette expression dans Makkari, i, 220, l. 2. Sur les faits dont il s'agit, cf. Makkari,  i, 219, l. 4 ; 220, l. 2, 15 et 17 ; Madjmoû'a, texte, 129 ; Bayân, ii, 81 ; Dozy, ii, 68.

[26] En 208, comme il est dit un peu plus bas.

[27] Ce passage figure dans la Biblioteca, i, 372. L'expédition dont il s'agit a aussi été mentionnée ci-dessus, p. 85.

[28] Je ne retrouve pas ailleurs ce nom ainsi orthographié. Je suis porté à croire qu'il s'agit du nom qui est écrit El-Bochârât par Edrisi (texte, p. 174 et 175), de nos jours Alpujarras, et j'ai par conséquent transcrit Velez le nom qui vient ensuite et qui est, dans notre texte, dépourvu de points diacritiques.— D'après M. Fr. Codera, il faut lire probablement : le djond d'Elvira, ainsi que l'écrivent Ibn Khaldoun (iv, 128) et Noweïri (ms. 60 de la Real Academia, f. 24) ; ce pourrait être le Velez de Benaudalla de la province de Grenade, mais en remarquant que d'autres lieux portent ce nom, p. ex. Velez Blanco, Velez Malaga, Velez Rubio.

[29] Si le texte est réellement correct, il faudrait comprendre « qu'il faisait subir à (ceux qu'on appelait) les infants (qui étaient) les tributaires ».

[30] Sur Elvira (la région de Grenade et aussi la capitale), voir Dozy, Recherches, 3e éd., p. 327.

[31] La lecture de ce nom est incertaine ; le Bayân (ii, 84, l. 1 et 17) l'écrit une fois Eç-Çâra, l'autre fois El-Moçâra, et place l'envoi de Yahya ben 'Abd Allah au début des hostilités.

[32] Ce dernier nom est écrit « Khalaf » dans le Bayân, ii, 83.

[33] Cette disette est aussi mentionnée dans ledit ouvrage, p. 84.

[34] D'après le Bayân (i, 155), Elyâs (sic) ben Abou'l-K'âsim régna de 168 à 170, fut supplanté par son frère El-Yasa' El-Montaçir, qui mourut en 208 (ou en 207, ibid., p. 89) et qui eut pour successeur son fils Midrâr. Cf. Fournel, i, 351 et 508 ; Bekri, 330 ; Berbères, i, 261 ; Bayân, intr., i, 114.

[35] Il est aussi parlé de cette campagne par le Bayân (ii, 84) et par Makkari (i, 222).

[36] La lecture « Nasr », rejetée en note par l'éditeur, qui a imprimé « Noçayr », est très probablement la bonne (supra, p. 85, ii. 3).

[37] 'Obeyd Allah tâcha de se soustraire à l'obéissance du khalife El-Mamoun et de rester maître indépendant de l'Egypte (Weil, Geschichte der Chalifen, ii, 230 ; Nodjoûm, i, 593, etc.).

[38] 'Obeyd Allah ben es-Serî fut proclamé par le djond et détint le gouvernement de l'Egypte de 207 à 210 (Nodjoûm, I, 593). L'arrivée des Espagnols aurait donc été bien postérieure à l'affaire du faubourg de Cordoue (supra, ann. 1897 ; Dozy, ii, 353) ; voir aussi Weil, l. l., p. 233 n. pour ce qui a trait à la date de la conquête de la Crète.

[39] Célèbre juriste, traditionniste et historien, élève de Châfi'i, à qui Ibn Khallikan a consacré un article (t. IV, 591) ; mort en 264.

[40] Cette expédition n'est mentionnée ni par Makkari ni dans le Bayân.

[41] Bayân, ii, 85.

[42] J'ai lu le verbe à la première et non à la quatrième forme en comparant ce passage avec celui du Bayân (ii, 85, l. 1 ; cf. ligne 9).

[43] Il y a ici un blanc ; d'après le Bayân II, 94), l'amour d' 'Amir pour la boisson provoqua de menaçants reproches de la part de Mansour. Le motif de la brouille survenue entre ces chefs n'est pas indiquée par Noweïri (Berbères, i, 410) ; cet événement y est rattaché à la levée de deux cents guerriers que fit Sofyân ben Sawâda pour le prince Aghlabide, mais la date de 218 ne peut être qu'une faute typographique (supra, p. 89).

[44] C'est de la même manière aussi qu'est lu ce nom, déjà cité et que nous retrouverons, par Ibn Khaldoun (Desvergers, 102), et il faut probablement corriger la lecture « Feredj » des Berbères (i, 411).

[45] Ce nom est lu de diverses manières : le Bayân aussi écrit « Djerba ».

[46] Je lis les mots arabes qui constituent cette réponse et qui sont défigurés dans le texte.

[47] 'Amir mourut à Tunis en 214 selon Ibn Khaldoun (Desvergers, 103). Le Bayân (i, 95) dit simplement en 213, et le Kitab el-'Oyoûn (p. 371) dit le 29 rebi' I 213.

[48] Dans la mention que fait aussi le Bayân (ii, 85) de cette révolte, le gouverneur qui attaqua T'oûrîl est nommé Ibn Ghânim ; mais le texte est fautif, selon Dozy, Corrections, p. 41. Taurel est un nom berbère qu'on retrouve ailleurs (Dozy, Recherches, i, 134, 2e éd., 123, 3e éd.).

[49] Cette incursion fut dirigée par 'Obeyd Allah ben 'Abd Allah Balensi (Bayân, l. l.).

[50] Cette ville entretint alors des rapports avec Louis le Débonnaire (Dozy, ii, 96). Le Bayân (ii, 86) fournit fort peu de renseignements et se borne à mentionner le siège qu'eut à subir Mérida en 217 ; le Madjmoû'a (texte, 138 et 139) raconte les circonstances dans lesquelles le siège fut levé.

[51] Selon Bekri, la mort d'Idris ben Idris arriva en rebi I 213 (pp. 263 et 280) ; sur cette date, cf. Fournel (1, 496).

[52] Sur le partage auquel procéda Mohammed, voir Bekri, p. 280 ; Bayân, i, 95 ; Fournel, i, 498 ; Berbères, ii, 563.

[53] Je ne retrouve pas de traces de ce Mansour ailleurs.

[54] Voir année 1897. Cf. Dozy, ii, 98. Hâchim était un des otages emmenés par El-Hakam (Bayân, ii, 85).

[55] Groupe de six caractères entièrement dépourvus de points diacritiques. La lecture Tadjoûniya (le Rio Tadjuna) m'est suggérée par M. Fr. Codera.

[56] Ce chapitre est résumé dans une note des Berbères, i, 411 où la date 219 n’est qu’un lapsus; cf. Desvergers, p. 103 ; Fournel, i, 504; Bayân, i, 97.

[57] J’ai vainement cherché ce nom ailleurs.

[58] Voir le récit du Bayân, ii, 86, et de Dozy, ii, 98.

[59] Le Bayân est muet à ce sujet.

[60] Les traîtres avaient Ibn Mohâdjir à leur tête (Bayân, ii, 87). Cf. Dozy, ii, 99.

[61] C'est-à-dire le château élevé par 'Amrous.

[62] Sur ce chapitre, qui est traduit dans la Biblioteca, I, 372, comparez la note 1 de la p. 97.

[63] On lit Abou Tk'âl dans le Bayân, i, 99, et dans Ibn Khaldoun (Berbères, i, 414 ; Desvergers, 111).

[64] En l'année 223, une expédition contre la Galice fut commandée par El-Welîd ben el-Hakam (Bayân, ii, 87).

[65] J'ai corrigé le texte, qui lit « 'Abd Allah », tant par ce que nous savons d'autre part qu'à cause de la leçon correcte imprimée dans Makkari (i, 222), qui parle de cette campagne. D'après le Bayân, le chef de l'expédition aurait été El-Hakam, fils du khalife.

[66] Le Bayân parle seulement d'une campagne entreprise en 225 par 'Abd er-Rah'mân en personne. Makkari parle de l'attaqué du roi chrétien et d'une campagne du khalife, qu'il semble mettre l'une et l'autre sous l'année 224. Voir plus bas.

[67] Cette affaire, que Noweïri passe sous silence, est aussi rappelée par le Bayân, i, 99, et par Ibn Khaldoun (Desvergers, p. 111) ; Cf. Fournel. i, 507.

[68] Comparez Bayân, i, 100 et 155 ; Bekri, p. 333 ; Fournel, i, 508. On trouve aussi l'orthographe Ibn Bakiya.

[69] Voyez p. 206, n. 1. — Makkari (i, 223) mentionne aussi sous cette année un échange d'ambassades entre les cours de Cordoue et de Constantinople.

[70] D'autres allongent cette période d'une couple de mois (Fournel, i, 509).

[71] Sur le règne de ce prince, voir le Bayân, i, 100 ; Desvergers, 112 ; Fournel, i, 509 ; Berbères, i, 415.

[72] La fondation de cotte ville ainsi que sa destruction, sont encore rappelées ailleurs (Berbères, i, 419 ; Belâdhori, p. 234 ; Desvergers, p. 112, où la date 237 est probablement une faute typographique ; Fournel, i, 513).

[73] D'autres disent son oncle (p. ex. le Bayân, i, 105) ; voir Fournel, i, 515.

[74] La plupart des auteurs disent de même, probablement avec raison ; certains disent son père, leçon qui se retrouve dans le ms. de Paris (mais cf. Berbères, i, 422 ; Fournel, i, 518).

[75] Ce chapitre figure dans la Biblioteca, i, 389.

[76] Ce qui suit est presque entièrement extrait de Belâdhori, p. 234 et 235.

[77] H'abla (Djabala ?), d'après Belâdhori.

[78] Sellâm (ibid.).

[79] Cette campagne est rappelée par le Bayân (ii, 88) sous l'année 227. Makkari (t. I, 222) la place sous l'année 226.

[80] Alphonse II le Chaste, roi des Asturies.

[81] Le Bayân (i, 100) rappelle aussi la mort de ce disciple de Malik ben Anas et rapporte une anecdote le concernant ; il l'appelle Abou Mohammed 'Abd Allah ben Abou Hassan Yah'çobi, nom sous lequel parle aussi de lui Ibn Farhoun (ms arabe 5032 de Paris, f. 65 v°) ; ce biographe hésite entre les années 226 et 227 pour la date de la mort de ce juriste.

[82] Ce chapitre figure dans la Biblioteca (i, 374).

[83] J'adopte la leçon d'Aman et du ms. de Paris, au lieu de celle du texte imprimé.

[84] Amari (l. l. i, 374) croit qu'il s'agit de Mih'ikân, aujourd'hui Alimena.

[85] Amari (ib. i, 375) propose de lire (Butira ?).

[86] Voir sur cet endroit Edrisi, dans la portion traduite par Amari, l. l. i, 120.

[87] D'après la table des gouverneurs du Sicile dressée par Amari (Biblioteca, trad. ii, 723), ce personnage commença d'occuper cette situation en 217, mais fut remplacé en 220 par Ibrahim ben 'Abd Allah (supra, p. 95). Ce dernier ne fit probablement qu'un intérim de courte durée, si l'on accepte la durée de dix-neuf ans qu'assigne notre auteur au commandement de Mohammed ben 'Abd Allah, lequel était d'ailleurs en Ifrîkiyya en 218 (Bayân, i. 97), et qu'on retrouve' en Sicile en 220 (ib., 98).

[88] Cet officier est probablement celui dont le nom est écrit El-Hârith ben Bezî' par le Bayân, ii, 98. Le nom Bezî figure plus haut, sous l'année 198.

[89] Les événements qui suivent sont indiqués très brièvement dans le Bayân, ii, 89. Makkari n'en parle pas.

[90] Il s'agit certainement de la Borja située au sud de Tudèle et autre que la Berja dont parle Edrisi, qui se trouve près d'Almeria.

[91] Sur cette attaque des Normands, voir Dozy, Recherches, 3e éd., t. II, p. 252, où l'on trouve les divers récits arabes, en texte, et en traduction, qui y sont relatifs, moins toutefois celui d'Ibn el-Athir, qui a échappé à ce savant, et qui a d'ailleurs été à peu près copié par Noweïri. Cf. A. Kristoffer, La première invasion des Normands dans l'Espagne musulmane en 844, Lisbonne, 1892.

[92] Ils arrivaient d'Afrique, où ils avaient opéré un débarquement à Asila' ou Arzilla, d'après Bekri (p. 254) ; Bayân, I, 240 ; II, 89. Cf. Fournel, I, 530.

[93] J'ai respecté la leçon du texte, qui se retrouve aussi dans un ms. de Noweïri ; Dozy a lu « se rendirent maîtres d'une galère ».

[94] Les ruines de cette ancienne ville épiscopale sont au nord de Faro, au lieu nommé aujourd'hui Estoy (Dozy, l. l.).

[95] Le Bayân (ii, 91) parle aussi de cette affaire ; il donne également aux murailles une épaisseur de dix-sept à dix-huit coudées, de même que Makkari, i, 2.23. Voir Dozy, Recherches, t. i, p. 153 de la 2e éd. et 140 de la 3e

[96] On trouve de longs détails sur la guerre entre les deux, frères dans les Berbères, i, 416 ; Bayân, i, 101-102 ; Fournel, i, 509. D'après Ibn Khaldoun-Desvergers (p. 113), ce fut en 232 que Mohammed l'emporta définitivement sur Ahmed.

[97] Cette disette est aussi mentionnée par le Bayân (ii, 91).

[98] Dans le récit du Bayân (i, 403), il n'est pas parlé de ce château.

[99] Correspondant au 9 nov.-8 déc. 850 ; dans le récit de ces événements par le Bayân (i, 103), on lit le 10 rebi I, ou 20 sept.

[100] Le Bayân, qui ne parle d'aucune des trois expéditions qui précèdent, mentionne par contre, sous les années 234 et 235, des opérations militaires aux îles Baléares.

[101] Les ravages causés par cette inondation sont aussi rappelés par le Bayân (ii, 91-92).

[102] Il est appelé Habib Bernesi par le Bayân (ii, 92).

[103] Ni le Bayân ni Makkari n'ont mentionné cette campagne.

[104] Ce chapitre et le suivant figurent dans la Biblioteca, i, 377. Il faut aussi comparer le Bayân sous les années correspondantes.

[105] Ou, selon le ms. de Paris, « de nombreux châteaux-forts ».

[106] C'est-à-dire le Château-Neuf ; le Bayân lit « K'açr el-h'adid » ; peut-être Gagliano (Amari, Storia dei Mus., i, 327).

[107] Cet important événement n'est pas même rappelé par le Bayân sous cette année.

[108] Amari n'a pu déterminer ce nom (voir Storia dei Mus., i, 310 et 335 ; iii, 180).

[109] Il est aussi parlé de cette révolte dans le Bayân (ii, 92), qui en place le siège dans l'est de l'Espagne, où Yahya ben Khalid était alors gouverneur. Makkari est muet sur ce point.

[110] Peut-être faut-il entendre « affaire de Calatrava », car cette ville porte le nom d'El-Beyd'â (Makkari, i, 103, l. 18). Te n'ai pas trouvé cette affaire mentionnée dans les sources arabes qui me sont accessibles.

[111] Ailleurs il est dit cent cinquante garçons et cinquante filles (Makkari, i, 223). Je crois d'ailleurs que dans le texte d’Ibn el-Athir le il faut traduire « … mâles, sans parler des autres ».

[112] Sur cette femme on peut voir ce que dit Dozy, Mus. d'Espagne, II, 96 ; Bayân, ii, 94 ; Makkari, i, 22-4 ; Madjmoû'a, 136, etc.

[113] On retrouve la plupart de ces détails dans les auteurs cités à la note précédente.

[114] Le Bayân (ii, 96) écrit Boheyr ou Babîr. Le récit des intrigues qui accompagnèrent son avènement est fait par Dozy (ii, 150).

[115] D'après le Bayân (ib.), trente-trois fils et vingt-et-une filles.

[116] Ce prince a été jugé très sévèrement par Dozy, ii, 158. Comparez le Madjmoû'a, texte, p. 141 ; Bayân, ii, 109.

[117] Il est parlé de ces deux affaires dans le Bayân, ii, 97 ; Dozy, ii, 161.

[118] On peut voir le récit de cette affaire dans le Bayân (ii, 97), qui a été suivi par Dozy (ii, 162). Le roi de Léon Ordoño I envoya une armée commandée par Gaton, comte du Bierzo ; mais Ibn Khaldoun parle aussi d'un envoi de troupes fait par le roi de Navarre.

[119] Les mêmes renseignements sont fournis par le Bayân (ii, 98), qui cependant ne nomme pas Moussa comme ayant commandé l'armée ; qui ravagea l'Alava.

[120] Le nom de cette place se retrouve, sous la forme T'arrâh'a, dans le récit de ces événements que fait le Bayân, l. l. C'est, à ce que m'écrit M. Codera, Tarrega, sur la route de Lérida à Barcelone.

[121] Le Bayân (i, 105), en opposition avec la plupart des auteurs, dit son neveu ; il place aussi la mort de Mohammed à la date du 2 moharrem. Cf. Fournel, i, 514 et 515.

[122] Même récit dans le Bayân, ii, 98.

[123] J'ai corrigé le texte, qui porte, à deux reprises, Séhîd (bu Sobey'd) : il s'agit, si je ne me trompe, d'un membre de la célèbre famille des Benoû Chobeyd, mais peut-être s'est-il glissé une erreur dans ce nom (voir sous l'année 188 ; Makkari, ii, 31, éd. de Leyde ; Dbabbi, p. 304, ii, 841).

[124] Sans parler de tremblement de terre, le Bayân place sous cette année (et aussi en 243) les nombreuses constructions qui ont marqué le règne d'Abou Ibrahim Ahmed Aghlabi et que rappellent aussi Noweïri (Berbères, i, 420) et Ibn Khaldoun (Desvergers, pus).

[125] Sur cette seconde attaque des Normands contre l'Espagne, voyez Dozy, Recherches, ii, 2e éd., p. 290 ; 3e éd., p. 279. Ce savant n'a pas non plus consulté Ibn el-Athir, et reproduit seulement le récit de Noweïri, que paraît, encore ici, avoir copié notre auteur. Il accepte la date de 244, en opposition avec Ibn el-Athir.et le Bayân, qui parlent de 245. Cf. Fournel, i, 535.

[126] Le texte porte seulement el-djesira, « l'île », que j'ai traduit par « Algésiras » (proprement el-djezirat el-khad'râ), ii cause du récit du Bayân, ii, 99.

[127] Peut-être y a-t-il ici une confusion avec ce qui se passa à Séville, lors de la première attaque de ces pirates.

[128] Bekri (p. 213) mentionne aussi ce débarquement à Nekoûr en 244. A la p. 253, il parle également d'un second débarquement qu'ils opérèrent à Arzilla, sans qu'on voie bien s'il s'agit de l'année 230 ou de l'année 244 ou 245. Cf. Berbères, ii, 139.

[129] Garcia fils d'Inigo, roi de Navarre (Dozy, Recherches, ii, 285).

[130] Nom formé de six caractères, dont les quatre derniers sont l, s (ou ch), a, n ; les deux premiers peuvent être chacun b, t, n et y.

[131] Les Benoû' I-Lohân sont cités dans les Berbères (i, 170) et ; Ya'koubi, Descriptio al-Maghribi (p. 52). Le Bayân a passé sous silence cette insurrection, dont la mention se retrouve ailleurs (Berbères, i, 420 ; Ibn Khaldoun-Desvergers, p. 116).

[132] Cette expédition ne fut pas entreprise par le khalife : en personne, à en croire d'autres auteurs qui en parlent également (Bayân, ii, 79; Makkari, i, 225-6).

[133] J'ignore quelles sont ces localités, dont je ne retrouve-que la dernière dans le Bayân (ii, 10.0)

[134] Ce chapitre figure dans la Biblioteca, i, 382.

[135] Amari déclare n'avoir pu identifier ces trois localités.

[136] Sur ce nom, voir la note d'Amari (Biblioteca, trad., i, 383), qui est disposé à croire que ce nom est celui d'un autre fils de Khafâdja et ne doit pas être corrigé en « Mohammed » ; voir plus bas.

[137] Sous l'année 251 eut lieu « l'expédition des mille cavaliers » contre Syracuse (Bayân, i, 107-108).

[138] Le savant italien croit que ce nom figure ici par erreur.

[139] Ces expéditions de 254 et de 255, ainsi que l'assassinat de Khafâdja, figurent aussi dans le Bayân (i, p. 108).

[140] L'assassinat de Mohammed ben Khafâdja est, d'après le Bayân (i, p. 109) du 3 redjeb = 26 mai 871.

[141] Le Bayân ne cite pas le nom de Barcelone sous l'année 247.

[142] Le Bayân (ii, 100) place en cette année une expédition contre Ibn Salim, sur le Guadalajara ; Moussa ben Moussa, qui la commandait, mourut des suites des blessures qu'il y reçut. On retrouve plus loin le nom de Dhoû Teroûdja sous la forme Deyr Teroûdja.

[143] Le Bayân (i, 106) place en 248 une expédition de Rebâh' contre' Eri'ce.

[144] Le Bayân (ibid.) donne plus de détails sur cette expédition, à laquelle participèrent 'Abd er-Rah'mân, fils du khalife, et 'Abd el-Melik ben el-'Abbâs ; dix-neuf comtes chrétiens y mordirent la poussière.

[145] Aucun événement important ne signala le règne de ce prince, dont les qualités sont louées par le Bayân et par Noweïri.

[146] C'est à El-Mondhir aussi que Makkari (i, 226) attribue le commandement dans cette campagne. Le Bayân, qui en parle longuement (ii, 101), la fait diriger par 'Abd er-Rah'mân son frère.

[147] Cette orthographe, qu'on retrouve dans le Bayân (l. l. ligne 10) résulte d'une correction faite par l'éditeur au texte de ses mss.

[148] Ce nom paraît devoir plutôt s'écrire avec un z final et se prononcer Markwîz (Dozy, Corrections, p. 42).

[149] Ou 20472, d'après le Bayân, p. 102.

[150] D'après Makkari (l. l.), le khalife lui-même dirigea en la même année 251 une expédition contre la Galice.

[151] A propos de la campagne de 252, le Bayân ne parle pas de la ville de Mâno (?).

[152] Le Bayân (ii, 102 ; cf. 84), qui met à la tête de cette expédition El-Hakam, fils du khalife, ne parle pas de Foûtab ( ?).

[153] Makkari (l. I.) rappelle très sommairement la conquête de Mérida, sur laquelle le Bayân s'étend assez longuement (pp. 102-3.)

[154] Ordoño I, roi d'Oviedo, mort le 17 mai 866, eut pour successeur son fils Alfonse III, dit le Grand, âgé de dix-huit ans (Art de vérifier les dates.

[155] Sous l'année 253, une disette de longue durée est mentionnée par le Bayân (ii, 102).

[156] Ce fragment et le suivant figurent dans la Biblioteca, i, 328.

[157] T'oreycha ben Mâsaweyb, dit le Bayân (ii, 104), d'après lequel ce chef disputait l'exercice exclusif du pouvoir à Mot'arref ben 'Abd er-Rah'mân. En admettant l'exactitude de cette assertion, confirmée par ce que dit Ibn el-Athir un peu plus bas, on devrait lire ici quelque chose comme Ibn 'Abd er-Rah'mân ben H'abîb.

[158] Le Bayân ne dit rien de cet 'Amr bon 'Amroûs, mais mentionne l'expédition contre Pampelune. Le nom de Huesca est défiguré dans le texte en Amechk'a ; je dois cette correction à M. Codera, qui a retrouvé la bonne leçon dans Noweïri.

[159] Alfonse le Grand battit les Tolédans, leur tua douze mille hommes, puis remporta presque aussitôt une victoire plus complète encore sur des troupes de Cordoue qui suivaient les Tolédans. Telle est la version des chroniqueurs espagnols, dont les uns assignent à ces exploits la date de 870, d'autres celle de 874.

[160] Cette famine est aussi rappelée dans le Bayân, i, 109 ; ii, 104.

[161] Une grande partie de ce chapitre figure dans la Biblioteca, i, 391. — Sur le règne d'Ibrahim, voir Berbères, i, 424 ; Bayân, i, 109 et s. ; Desvergers, 126 ; Fournel, i, 523.

[162] Lecture peu certaine, Amari croit qu'il s'agit de Nardo (voir sa note, Biblioteca, i, 393, où il est aussi parlé de la date de cette conquête).

[163] Expression qui paraît ici avoir ce sens plutôt que celui de « uomini di più alto consiglio ». (Amari) Cf. Dozy, Supplément ; le Bayân, i, p. 95, 1. 11. Peut-être, aussi, « ceux qui avaient à venger, des parents ou des amis » ; voir le dictionnaire Lane.

[164] Corrigé en 17 par Amari (i, 395), parce que c'est le samedi qui coïncide avec le 17.

[165] Il fut inhumé en Sicile (Bayân, i, 126), et Noweïri dit même, à Palerme (Berbères, i, 434). — C'est ici que s'arrête la traduction de ce chapitre par Amari.

[166] En arabe, K’al'at el-h'anech, qui est cité par Edrisi, p. 265. On voit par le récit plus détaillé du Bayân (ii, 104-105) que ce chef avait été interné à Cordoue à la suite de l'affaire de Mérida (supra, p. 238).

[167] Le Bayân passe cette affaire sous silence.

[168] On trouve le nom de cette place forte, dont il est parlé par Edrisi (p 226), sous diverses formes, voir le Bayân, ii, 105, l. 10 ; 143, l. 4 ; 164, l. 7 ad f. Ce dernier ouvrage parle plus, longuement des deux expéditions dirigées en 262 et en 263 contre Ibn Merwân.

[169] Le texte doit probablement être corrigé en « neuf cents » sur un simple déplacement des points diacritiques — Le Bayân (ii, 105) passe sous silence la défaite des musulmans.

[170] Sur cette ville, située à quatre milles ouest ou sud-ouest de Kayrawân, voir Bekri, p. 68 ; Bayân, i, 110 ; Fournel, i, 526.

[171] Il est parlé plus bas de cette affaire.