Aristote : Physique

ARISTOTE

PHYSIQUE.

TOME DEUX : LIVRE VI. DE LA DIVISIBILITÉ DU MOUVEMENT. CHAPITRE IV
 

Traduction française : BARTHÉLÉMY SAINT-HILAIRE.

chapitre III - chapitre V

paraphrase du livre VI

 

 

 

LEÇONS DE PHYSIQUE

 

LIVRE VI.


DE LA DIVISIBILITÉ DU MOUVEMENT.

 

 

 

 

 

 

CHAPITRE IV.


Des deux manières dont le mouvement est divisible, selon le temps, et selon les parties du mobile. Examen du ces deux divisions du mouvement; démonstration de la division du mouvement selon les parties; démonstration selon le temps.

1   Κίνησις δ' ἐστὶν διαιρετὴ διχῶς, ἕνα μὲν τρόπον τῷ χρόνῳ, ἄλλον δὲ κατὰ τὰς τῶν μερῶν τοῦ κινουμένου κινήσεις,

2 οἷον εἰ τὸ ΑΓ κινεῖται ὅλον, καὶ τὸ ΑΒ κινήσεται καὶ τὸ ΒΓ. Ἔστω δὴ τοῦ μὲν ΑΒ ἡ ΔΕ, τοῦ δὲ ΒΓ ἡ ΕΖ κίνησις τῶν μερῶν. Ἀνάγκη δὴ τὴν ὅλην, ἐφ' ἧς ΔΖ, τοῦ ΑΓ εἶναι κίνησιν. Κινήσεται γὰρ κατὰ ταύτην, ἐπείπερ ἑκάτερον τῶν μερῶν κινεῖται καθ' ἑκατέραν· οὐθὲν δὲ κινεῖται κατὰ τὴν ἄλλου κίνησιν· ὥστε ἡ ὅλη κίνησις τοῦ ὅλου ἐστὶν μεγέθους κίνησις.  3 Ἔτι δ' εἰ πᾶσα μὲν κίνησις τινός, ἡ δ' ὅλη κίνησις ἡ ἐφ' ἧς ΔΖ μήτε τῶν μερῶν ἐστιν μηδετέρου (μέρους γὰρ ἑκατέρα) μήτ' ἄλλου μηδενός (οὗ γὰρ ὅλη ὅλου, καὶ τὰ μέρη τῶν μερῶν· τὰ δὲ μέρη τῶν ΑΒ ΒΓ καὶ οὐδένων ἄλλων· πλειόνων γὰρ οὐκ ἦν μία κίνησις), κἂν ἡ ὅλη κίνησις εἴη τοῦ ΑΒΓ μεγέθους.

4 Ἔτι δ' εἰ ἔστιν ἄλλη τοῦ ὅλου κίνησις, οἷον ἐφ' ἧς ΘΙ, ἀφαιρεθήσεται ἀπ' αὐτῆς [235a] ἡ ἑκατέρων τῶν μερῶν κίνησις· αὗται δ' ἴσαι ἔσονται ταῖς ΔΕ ΕΖ· μία γὰρ ἑνὸς κίνησις. Ὥστ' εἰ μὲν ὅλη διαιρεθήσεται ἡ ΘΙ εἰς τὰς τῶν μερῶν κινήσεις, ἴση ἔσται ἡ ΘΙ τῇ ΔΖ· εἰ δ' ἀπολείπει τι, οἷον τὸ ΚΙ, αὕτη οὐδενὸς ἔσται κίνησις (οὔτε γὰρ τοῦ ὅλου οὔτε τῶν μερῶν διὰ τὸ μίαν εἶναι ἑνός, οὔτε ἄλλου οὐθενός· ἡ γὰρ συνεχὴς κίνησίς ἐστι συνεχῶν τινῶν), ὡσαύτως δὲ καὶ εἰ ὑπερβάλλει κατὰ τὴν διαίρεσιν· ὥστ' εἰ τοῦτο ἀδύνατον, ἀνάγκη τὴν αὐτὴν εἶναι καὶ ἴσην. 5 Αὕτη μὲν οὖν ἡ διαίρεσις κατὰ τὰς τῶν μερῶν κινήσεις ἐστίν, καὶ ἀνάγκη παντὸς εἶναι τοῦ μεριστοῦ αὐτήν·

6 ἄλλη δὲ κατὰ τὸν χρόνον· ἐπεὶ γὰρ ἅπασα κίνησις ἐν χρόνῳ, χρόνος δὲ πᾶς διαιρετός, ἐν δὲ τῷ ἐλάττονι ἐλάττων ἡ κίνησις, ἀνάγκη πᾶσαν κίνησιν διαιρεῖσθαι κατὰ τὸν χρόνον.

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§ 1. Le mouvement peut être divisé de deux manières, d'abord selon le temps, et ensuite selon les mouvements des diverses parties du mobile.

§ 2. Si, par exemple, AC se meut tout entier, la partie AB et la partie BC seront également en mouvement. Soit DE le mouvement de AB, et EF le mouvement de BC, c'est-à-dire des parties. Il faut nécessairement que le mouvement entier de AC soit DF. C'est, en effet, selon ce mouvement que le corps doit se mouvoir, puisque chacune des parties se meut selon chacun de ces mouvements particuliers, et que nul corps ne peut avoir le mouvement d'un autre. Ainsi, le mouvement total est le mouvement de toute la grandeur.  § 3. De plus, si toujours le mouvement est le mouvement de quelque corps, et si le mouvement total DF n'est, ni le mouvement d'aucune des deux parties, chaque mouvement particulier appartenant à chacune des parties, ni le mouvement d'aucun autre corps, car là où le mouvement total est celui du corps entier, les parties du mouvement sont les mouvements des parties du corps, et les parties de DF sont les mouvements de ABC et non d'un autre corps, puisqu'un mouvement un ne peut, comme on l'a vu, appartenir à plusieurs corps, il est clair que le mouvement entier DF est celui de toute la grandeur AC.

§ 4. Si, en effet, le mouvement du corps entier est autre, par exemple HI, on pourra en retrancher le mouvement [235a] de chacune des parties. Mais ces mouvements sont égaux à DE, EF; car il n'y a qu'un seul mouvement pour un seul corps. Par conséquent, si le mouvement total HI est partagé exactement dans les mouvements des parties, HI sera égal à HF. S'il manque quelque chose comme KI, ce ne sera le mouvement de rien; car ce n'est ni le mouvement du tout, ni le mouvement des parties, puisqu'il n'y a qu'un seul mouvement pour une seule chose, ni le mouvement de quoi que ce soit, puisque le mouvement est continu pour des mobiles continus. Il en serait d'ailleurs encore de même si, « au lieu de manquer, » il y avait de l'excès après la division. Par conséquent, comme tout cela est impossible, il faut nécessairement que le mouvement soit le même et qu'il soit égal. § 5. Telle est la division du mouvement d'après les mouvements des parties, et il faut qu'elle s'applique à tout corps qui a des parties.

§ 6. L'autre division du mouvement se rapporte au temps. Comme tout mouvement, en effet, est dans le temps, et comme le temps est toujours divisible, et que le mouvement est moindre dans un temps moindre, il en résulte nécessairement que le mouvement est toujours divisible selon le temps.

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Ch. IV, § 1. Selon le temps, c'est la manière la plus habituelle de diviser le mouvement, les parties du temps correspondant toujours à celles du mouvement.

Selon les mouvements des diverses parties du mobile, cette seconde division n'empêche pas la première, et les diverses parties du mouvement correspondent toujours aux diverses parties du temps, le mouvement total se composant de la somme des mouvements partiels.

§ 2. Si par exemple AC, Aristote commence par la seconde division du mouvement, et il s'y arrêtera beaucoup plus qu'à la première, dont il ne dira que quelques mots § 6.

 - La partie AB, et la partie BC, il faut tracer deux lignes parallèles l'une ABC, et l'autre DEF.

De ces mouvements particuliers, j'ai ajouté ce dernier mot, pour que la pensée fût plus précise. Ces mouvements particuliers sont ceux que représentent DE et CF, correspondant aux parties AB et BC du mobile.

Nul corps ne peut avoir le mouvement d'un autre, axiome peut-être pur trop évident.

§ 3.  De plus, autre argument pour prouver que le mouvement total est le mouvement de toute la grandeur qui se nient, et non point le mouvement de l'une de ses parties. — Le mouvement est toujours le mouvement de quelque corps, c'est-à-dire qu'il n'y a pas de mouvement possible sans mobile.

Chaque mouvement particulier, j'ai ajoute ce dernier mot.

Sont les mouvements de ABC, il vaudrait mieux dire: « De AB et de BC. »

Comme on l'a vu, le texte n'est pas tout à fait aussi précis. Voir plus haut Livre V, ch. 6. — Le mouvement entier DF, j'ai ajouté les deux lettres DF.

§ 4. Si en effet, troisième argument pour démontrer que la grandeur totale AC doit avoir le mouvement total DF: car si elle n'a pas en mouvement, elle en a un autre, ou plus grand, ou plus petit. Or, on démontre que ce mouvement ne peut être, ni plus grand, ni plus petit : donc elle a le mouvement DF, et non point un autre.

En retrancher le mouvement de chacune des parties, en supposant que HI est égal à DF, ou plus grand grand DF.

Est partagé exactement, j'ai ajouté ce dernier mot pour éclaircir la pensée.

S'il manque quelque chose, c'est-à-dire si HI est plus petit que DF, et par exemple, d'une partie KI plus petite que EF.

Ce ne sera le mouvement de rien, car celle partie ne correspondra à aucune partie du mobile.

Ni le mouvement de quoi que ce soit, répétition de ce qui précède.

Au lieu de manquer, j'ai ajouté ces mots, afin que la pensée soit plus claire.

S'il y avait de l'excès après la division, et que HI fût plus grand que DF au lieu d'être plus petit.

Que le mouvement soit le même, c'est-à-dire que, HI soit égal à DF.

§ 5. Telle est la division du mouvement, d'après les mouvements des parties, cette démonstration n'est rien moins que claire; et loin d'expliquer la division du mouvement, il a été seulement établi que le mouvement du tout se composait des mouvements divers des parties. Mais ce principe même aurait besoin d'explications, qui ne sont point données ici.

§ 6. L'autre division du mouvement, voir plus haut § 4.

- Tout mouvement en effet est dans le temps, c'est un fait d'observation qu'attestent tous les phénomènes.

Le temps est toujours divisible, en tant que continu, et l'instant n'est pas du temps à proprement parler.

Le mouvement est moindre dans un temps moindre, la vitesse étant supposée rester toujours la même.

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