ARISTOTE
éthique de nicomaque
LIVRE II
LA VERTU
CHAPITRE PREMIER : La vertu, résultat de l’habitude s’ajoutant à la nature.
La vertu apparaît sous un double aspect, l'un intellectuel, l'autre moral ; la vertu intellectuelle provient en majeure partie de l'instruction, dont elle a besoin pour se manifester et se développer ; aussi exige-t-elle de la pratique et du temps, tandis, que la vertu morale est fille des bonnes habitudes ; de là vient que, par un léger changement, du terme moeurs sort le terme moral (44). 2. Cette constatation montre clairement qu'aucune des vertus morales ne naît naturellement en nous ; en effet, rien ne peut modifier l'habitude donnée par la nature ; par exemple, la pierre qu'entraîne la pesanteur ne peut contracter l'habitude contraire, même si, un nombre incalculable de fois, on la jette en l'air ; le feu monte et ne saurait descendre ; et il en va de même pour tous les corps, qui ne peuvent modifier leur habitude originelle. 3. Ce n'est donc ni par un effet de la nature, ni contrairement à la nature que les vertus naissent en nous ; nous sommes naturellement prédisposés à les acquérir, à condition de les perfectionner par l'habitude. 4. De plus, pour tout ce qui nous est donné par la nature, nous n'obtenons d'elle que des dispositions, des possibilités ; c'est à nous ensuite à les faire passer à l'acte. Cela est visible en ce qui concerne les sens ; car ce n'est pas par de fréquentes sensations de la vue et de l'ouïe que nous avons acquis ces deux sens ; bien au contraire, nous les possédions déjà et nous les avons employés ; ce n'est pas l'usage qui nous les a donnés. Quant aux vertus, nous les acquérons d'abord par l'exercice, comme il arrive également dans les arts et les métiers. Ce que nous devons exécuter après une étude préalable, nous l'apprenons par la pratique ; par exemple, c'est en bâtissant que l'on devient architecte, en jouant de la cithare que l'on devient citharède. De même, c'est à force de pratiquer la justice, la tempérance et le courage que nous devenons justes, tempérants et courageux. 5. La preuve en est ce qui se passe ordinairement dans les cités ; les législateurs, en les habituant, forment les citoyens à la vertu. Et c'est bien là l'intention de tout législateur. Tous ceux qui ne s'y prennent pas ainsi manquent leur but, attendu que c'est par là seulement qu'une cité diffère d'une autre cité, et une bonne cité d'une mauvaise. 6. En outre, les mêmes causes expliquent encore la naissance et l'altération de toute vertu, comme de toute technique. C'est par la pratique de la cithare que se forment les bons et les mauvais musiciens. Il en va de même pour les architectes et les autres spécialistes. À force de bien ou de mal construire, l'on devient bon ou mauvais architecte. 7. S'il n'en était pas ainsi, on n'aurait pas le moins du monde besoin des leçons d'un maître et l'on serait de naissance bon ou mauvais spécialiste. Il en va donc de même des vertus. C'est par nos manières d'observer les contrats avec nos semblables que nous devenons, les uns justes, les autres injustes. À force d'affronter les situations dangereuses et de nous habituer à la crainte et à l'audace, nous devenons courageux ou pusillanimes. Il n'en va pas autrement en ce qui concerne le désir et la colère ; les uns arrivent à la tempérance et à la douceur, les autres à l'intempérance et à l'irascibilité, parce que la manière de se comporter des uns et des autres est différente. Et, en un mot, des activités semblables créent des dispositions correspondantes. 8. Aussi faut-il exercer nos activités d'une manière déterminée ; car les différences de conduite engendrent des habitudes différentes. La façon dont on est élevé dès l'enfance n'a pas, dans ces conditions, une mince importance. Que dis-je ? Cette importance est extrême, elle est tout à fait essentielle.
CHAPITRE II : Théorie et pratique dans la morale — Rapports du plaisir et de la peine avec la vertu.
Le présent ouvrage ne se propose pas un but théorique, comme les autres ; car notre recherche ne vise pas à déterminer la nature de la vertu, mais le moyen à employer pour devenir vertueux, faute de quoi son utilité serait nulle. Dans ces conditions, il est nécessaire de rechercher ce qui concerne les actions et la manière dont nous pouvons les accomplir. Car les actes commandent souverainement nos dispositions, comme nous l'avons dit. 2. Qu'il faille agir selon la droite raison, voilà ce que l'on accorde généralement ; admettons-le donc comme point de départ. Nous dirons par la suite, à ce sujet, en quoi consiste la droite raison et quel rapport elle entretient avec les autres vertus (45). 3. Convenons aussi de ceci : tout notre raisonnement sur ce qui concerne l'action doit n'être que général et sommaire, comme nous l'avons dit au début, parce qu'il faut demander des raisonnements appropriés à la nature de la matière traitée. Or ce qui concerne l'activité et ce qui la favorise n'a rien de fixe, non plus que ce qui concerne la santé. 4. Puisque tel est le raisonnement général, il en va de même du raisonnement sur les cas particuliers, qui ne comporte pas de précision ; ces cas particuliers ne relèvent d'aucune connaissance technique ni d'aucune règle ; il faut donc que, dans tous les cas, ceux qui agissent observent les circonstances particulières, comme il en va dans la médecine et la navigation. 5. Eh bien ! malgré les conclusions auxquelles aboutit notre raisonnement, tâchons de parer à la difficulté. 6. Tout d'abord il faut remarquer que ce genre d'actions est compromis autant par défaut que par excès si, comme il faut le faire, nous nous servons du témoignage de ce que nous avons sous les yeux pour juger de ce qui échappe à notre vue ; c'est le cas pour les forces physiques et la santé. L'exercice, qu'il soit exagéré ou insuffisant, altère cette vigueur ; de même l'excès et l'insuffisance de boisson et de nourriture compromettent la bonne santé, alors que la mesure en ces matières crée, développe et sauvegarde la santé. 7. Il en va de même de la tempérance, du courage et des autres vertus. L'homme qui s'enfuit, plein de crainte, à la moindre alerte, qui est incapable de rien supporter devient lâche, tandis que celui qui n'a peur de rien et qui marche à travers tout fait preuve de témérité. De même celui qui goûte à toute espèce de plaisirs, sans s'en refuser aucun, montre de l'intempérance les tandis que celui qui les fuit tous, comme font les rustres, devient complètement hébété. Ainsi donc la tempérance et le courage se trouvent ruinés par l'excès ou une pratique insuffisante, tandis que la modération les conserve. 8. La naissance, le développement, l'altération de nos dispositions procèdent des mêmes causes et leur restent soumises ; nos forces agissantes apparaîtront dans les mêmes conditions. N'en va-t-il pas ainsi dans des cas concrets comme celui de la vigueur physique ? Elle est le résultat d'une nourriture abondante et de l'endurance à bien des travaux pénibles, ce à quoi l'homme vigoureux est particulièrement apte. 9. Il n'en va pas autrement des vertus. Le courage de résister aux plaisirs nous rend tempérants ; quand nous le sommes devenus, nous sommes parfaitement en mesure de nous en abstenir. Le raisonnement vaut aussi pour le courage ; en nous accoutumant à mépriser la peur et en supportant les dangers, nous devenons courageux ; en cet état nous serons parfaitement en mesure de supporter les dangers redoutables.
CHAPITRE III : Vertus et arts — Conditions de l’acte moral
C'est le signe d'une disposition acquise que le plaisir et la peine qui viennent s'ajouter aux actes. En effet, l'homme qui s'abstient des plaisirs des sens et qui se complaît dans cette privation est vraiment tempérant ; au contraire celui qui en souffre est intempérant. Par ailleurs quiconque supporte de terribles périls, tire de son endurance même un plaisir ou du moins n'en souffre pas, est vraiment courageux ; quiconque s'en afflige est lâche. La vertu morale est donc en relation avec le sentiment du plaisir et de la douleur ; le plaisir que nous espérons nous fait agir bassement ; la peine que nous redoutons nous détourne de bien agir. 2. Aussi faut-il, dès l'enfance, ainsi que le dit Platon (46), être entraîné, en quelque sorte, à extraire de nos actes, à bon escient, du plaisir et de la peine. Voilà en quoi consiste une saine éducation. 3. En outre, puisque les vertus entretiennent des rapports avec nos actions et nos passions ; puisque toute passion et toute action sont suivies de plaisir ou de peine, la vertu aurait donc des liens avec le plaisir ou la peine. 4. Les corrections obtenues par leur aide servent aussi de preuve. Ce sont des sortes de traitements. Or en médecine on guérit généralement par les contraires. 5. Ajoutons encore, comme nous l'avons dit précédemment, que toute disposition de l'âme, susceptible naturellement de la pervertir ou de l'améliorer, entretient un rapport naturel avec le plaisir et la peine et est amenée à s'en occuper. Les plaisirs et les peines engendrent de mauvaises dispositions, parce que l'on poursuit ceux-là et qu'on cherche à éviter celles-ci. Ou bien on veut atteindre ce qu'on devrait éviter, ou on agit dans des circonstances et des conditions inopportunes, bref on se comporte selon tous les modes d'action déterminés par la raison. Ce qui fait que certaines personnes définissent les vertus des états d'insensibilité et de calme (47). Vue inexacte, parce que l'on parle absolument, en omettant de dire comment et dans quelles circonstances il faut agir ou non, bref en laissant de côté toutes les autres précisions. 6. Nous admettons donc comme principe que la vertu est, en ce qui concerne les plaisirs et les peines, la capacité que nous avons dite d'exécuter les plus belles actions, le vice étant la disposition contraire. 7. Opinion qui se précise encore par ce que nous venons de dire à ce sujet. Nos impulsions et nos répulsions sont respectivement conditionnées par le bien, l'utile, l'agréable, pour les premières (48) ; pour les secondes, par ce qui est honteux, nuisible, pénible ; sur tous ces points l'homme de bien est assuré du succès, tandis que le vicieux manque son but, principalement en ce qui concerne le plaisir. En effet le plaisir est commun à tous les êtres vivants et il accompagne tous nos actes accomplis par choix ; c'est que le bien et l'utile, de l'avis commun, sont agréables. 8. Ajoutons que, dès la petite enfance, ce sentiment du plaisir se développe en même temps que nous tous sans distinction. Aussi est-il difficile de l'éliminer puisque toute notre vie en reçoit l'empreinte. Par conséquent, dans toutes nos actions, nous usons comme d'une règle du plaisir et de la peine, les uns davantage, les autres moins. 9. Il est donc inévitable que toute notre étude porte sur cette question ; car il est pour nos actions d'une grande importance de savoir si nos plaisirs et nos peines se justifient ou non par ce que nous éprouvons devant le bien ou le mal. 10. N'oublions pas qu'il est plus difficile de résister au plaisir que de contenir la colère, selon la parole d'Héraclite. Plus une chose est difficile, plus elle exige d'art et de vertu. Dans ce cas, le bien s'appelle le mieux. Nous conclurons donc en disant que toute étude, aussi bien dans le domaine de la vertu que de la science politique, s'intéresse au plaisir et à la peine. L'homme qui saura bien placer ces deux sentiments sera l'homme de bien ; qui les placera mal sera le vicieux. 11. Convenons donc que la vertu entretient des rapports avec les plaisirs et les peines ; que les causes qui la font naître sont aussi celles qui la développent et l'altèrent, quand se produit une influence opposée ; enfin que les causes qui la favorisent sont aussi l'objet de son activité.
CHAPITRE IV : Définition générique de la vertu: la vertu est un "habitus".
On pourrait nous demander des explications sur cette proposition : pour devenir un homme juste, il faut pratiquer la justice, et pour devenir un homme tempérant, la tempérance. Car, si l'on pratique ces deux vertus, c'est que déjà on est juste et tempérant, de même que ceux qui font de la grammaire et de la musique sont déjà grammairiens et musiciens. 2. Ou bien n'en est-il pas ainsi dans les arts ? En effet il arrive qu'on fasse une remarque grammaticale par hasard ou sur la suggestion d'une autre personne. Pour moi, celui-là sera réellement un grammairien qui composera quelque ouvrage de grammaire, en s'inspirant de la méthode grammaticale, je veux dire en homme qui possède en lui-même la science grammaticale. 3. Voici encore une différence entre les arts et les vertus. Les produits des arts ont en eux-mêmes leur mérite intrinsèque. Mais dans le cas des vertus, il ne suffit pas pour qu'elles existent que l'homme agisse en juste et en tempérant ; il faut que l'agent sache comment il agit : ensuite que son acte provienne d'un choix réfléchi, en vue de cet acte lui-même ; en troisième lieu qu'il accomplisse son acte avec une volonté ferme et immuable. Ces conditions n'entrent pas en ligne de compte pour acquérir la maîtrise des arts, sauf la connaissance du métier. Pour ce qui est de la pratique des vertus, cette connaissance n'a que peu d'importance ou même n'en a pas du tout ; le reste a une importance qui n'est pas négligeable. Que dis-je ? Elle est essentielle, attendu que ces conditions ne s'obtiennent que par la pratique continue de la justice et de la tempérance (49). 4. Ainsi donc on qualifie les actions de justes et de tempérées, pour ainsi dire, quand elles sont telles que les accomplirait un homme juste et tempérant. Et l'homme juste et tempérant n'est pas celui qui se contente d'exécuter ces actes, mais celui qui les exécute dans les dispositions d'esprit propres aux hommes justes et tempérants. 5. On a donc raison de dire que c'est par la pratique de la justice et de la tempérance qu'on devient juste et tempérant. Faute de cette pratique, nul ne deviendra honnête homme. Mais la plupart des gens ne se donnent pas cette peine et, se réfugiant dans l'argumentation, s'imaginent faire oeuvre de philosophes et croient pouvoir devenir d'honnêtes gens, semblables en quelque sorte à ces malades qui, prêtant avec soin l'oreille aux prescriptions des médecins, ne se conforment pas à l'ordonnance. Ceux-ci ne retrouveront pas la santé en soignant leur corps de la sorte, non plus que les autres ne guériront leur âme en philosophant de cette manière.
CHAPITRE V : Définition spécifique de la vertu: la vertu est un juste milieu.
Qu'est-ce donc que la nature de la vertu ? Voilà ce qu'il faut examiner sans tarder. Puisque dans l'âme on trouve uniquement passions, capacités d'action, dispositions acquises, la vertu doit appartenir à une de ces classes. 2. Or, j'appelle passions le désir, la colère, la peur, la témérité, l'envie, la joie, l'amitié, la haine, le regret, l'émulation, la pitié, en un mot tout ce qui s'accompagne de plaisir ou de peine. J'appelle capacités nos possibilités d'éprouver ces passions, par exemple ce qui nous rend propres à ressentir de la colère, ou de la haine, ou de la pitié. Enfin les dispositions nous mettent, eu égard aux passions, dans un état heureux ou fâcheux ; par exemple, en ce qui concerne la colère, si l'on y est trop porté ou insuffisamment, nous nous trouvons en de mauvaises dispositions ; si nous y sommes portés modérément, nous sommes dans d'heureuses dispositions ; il en va ainsi dans d'autres cas. 3. Ainsi donc ni les vertus ni les vices ne sont des passions, car ce n'est pas d'après les passions qu'on nous déclare bons ou mauvais, tandis qu'on le fait d'après les vertus et les vices. On ne se fonde pas non plus sur les passions pour nous décerner l'éloge ou le blâme ; on ne félicite pas l'homme craintif ni l'homme porté à la colère ; le blâme ne s'adresse pas à un homme d'une façon générale, mais selon les circonstances, tandis que c'est d'après les vertus et les vices qu'on nous dispense l'éloge ou le blâme. 4. Ajoutons que la colère et la crainte ne proviennent pas de notre volonté, tandis que les vertus comportent un certain choix réfléchi, ou tout au moins n'en sont pas dépourvues. Enfin l'on dit que les passions nous émeuvent, les vertus et les vices ne nous émouvant pas, mais nous disposant l'âme d'une certaine manière. 5. Les mêmes raisons font que vertus et vices ne sont pas non plus en nous de simples possibilités. On ne dit pas que nous sommes bons et mauvais par le seul fait de pouvoir éprouver des passions ; ce n'est pas là ce qui nous vaut la louange et le blâme. En outre, si la nature nous a donné ces possibilités, ce n'est pas elle qui fait que nous sommes bons ou mauvais — nous nous sommes exprimé plus haut à ce sujet (50). Si donc les vertus ne sont ni des passions ni des possibilités, il reste qu'elles sont des dispositions acquises.
CHAPITRE VI : Définition complète de la vertu morale, et précisions nouvelles.
Voilà
notre explication sur la nature de la vertu. Mais il ne suffit pas de dire que
c'est une disposition ; encore faut-il préciser de quelle sorte elle est. 2. Il
faut dire que toute vertu, selon la qualité dont elle est la perfection, est ce
qui produit cette perfection et fournit le mieux le résultat attendu. Par
exemple la vertu de l'oeil exerce l'oeil et lui fait remplir sa fonction d'une
façon satisfaisante ; c'est par la vertu de l'oeil que nous voyons
distinctement. De même la vertu du cheval fait de lui un bon cheval apte à la
course, à recevoir le cavalier et capable de supporter le choc de l'ennemi (51).
3. S'il en va ainsi de même pour tout, la vertu de l'homme serait une
disposition susceptible d'en faire un honnête homme capable de réaliser la
fonction qui lui est propre. 4. Comment y parviendra-t-on ? Nous l'avons déjà
dit (52) ; mais on le verra plus clairement, si
nous déterminons la nature de la vertu. Dans tout objet homogène et divisible,
nous pouvons distinguer le plus, le moins, l'égal, soit dans l'objet même,
soit par rapport à nous. Or l'égal est intermédiaire entre l'excès et le
défaut. 5. D'autre part j'appelle position intermédiaire dans une grandeur ce
qui se trouve également éloigné des deux extrêmes, ce qui est un et
identique partout. Par rapport à nous, j'appelle mesure ce qui ne comporte ni
exagération, ni défaut. 6. Or, dans notre cas, cette mesure n'est ni unique,
ni partout identique. Par exemple, soit la dizaine, quantité trop élevée, et
deux, quantité trop faible. Six sera le nombre moyen par rapport à la somme,
parce que six dépasse deux de quatre unités et reste d'autant inférieur à
dix. Telle est la moyenne selon la proportion arithmétique. 7. Mais il ne faut
pas envisager les choses de cette façon par rapport à nous. Ne concluons pas
du fait que dix mines de nourriture constituent une forte ration et deux mines
une faible ration, que le maître de gymnastique en prescrira six à tous les
athlètes. Car une semblable ration peut être, selon le client, excessive ou
insuffisante. Pour un Milon (53), elle peut être
insuffisante, mais pour un débutant elle peut être excessive. On peut
raisonner de même pour la course et pour la lutte. 8. Ainsi tout homme averti
fuit l'excès et le défaut, recherche la bonne moyenne et lui donne la
préférence, moyenne établie non relativement à l'objet, mais par rapport à
nous. 9. De même toute connaissance remplit bien son office, à condition
d'avoir les yeux sur une juste moyenne et de s'y référer pour ses actes. C'est
ce qui fait qu'on dit généralement de tout ouvrage convenablement exécuté
qu'on ne peut rien lui enlever, ni rien lui ajouter, toute addition et toute
suppression ne pouvant que lui enlever de sa perfection et cet équilibre
parfait la conservant. Ainsi encore les bons ouvriers oeuvrent toujours les yeux
fixés sur ce point d'équilibre. Ajoutons encore que la vertu, de même que la
nature, l'emporte en exactitude et en efficacité sur toute espèce d'art ; dans
de telles conditions, le but que se propose la vertu pourrait bien être une
sage moyenne. 10. Je parle de la vertu morale qui a rapport avec les passions et
les actions humaines, lesquelles comportent excès, défaut et sage moyenne. Par
exemple, les sentiments d'effroi, d'assurance, de désir, de colère, de pitié,
enfin de plaisir ou de peine peuvent nous affecter ou trop ou trop peu, et d'une
manière défectueuse dans les deux cas. 11. Mais si nous éprouvons ces
sentiments au moment opportun, pour des motifs satisfaisants, à l'endroit de
gens qui les méritent, pour des fins et dans des conditions convenables, nous
demeurerons dans une excellente moyenne, et c'est là le propre de la vertu : de
la même manière, on trouve dans les actions excès, défaut et juste moyenne.
12. Ainsi donc la vertu se rapporte aux actions comme aux passions. Là l'excès
est une faute et le manque provoque blâme ; en revanche, la juste moyenne
obtient des éloges et le succès, double résultat propre à la vertu. 13. La
vertu est donc une sorte de moyenne, puisque le but qu'elle se propose est un
équilibre entre deux extrêmes. 14. Ajoutons que nos fautes peuvent présenter
mille formes (la faute, selon les Pythagoriciens (54),
se caractérisant par l'illimité, le bien par ce qui est achevé), en revanche,
il n'y a qu'une façon de réaliser le bien. C'est pourquoi il est facile de
manquer le but et difficile de l'atteindre. Toutes raisons qui font que l'excès
et le défaut dénoncent le vice, tandis que la juste moyenne caractérise la
vertu :
Il n'est qu'une façon d'être bon,
il y en a mille d'être mauvais (55).
15. La vertu est donc une disposition acquise volontaire, consistant par
rapport à nous, dans la mesure, définie par la raison conformément à la
conduite d'un homme réfléchi. Elle tient la juste moyenne entre deux
extrémités fâcheuses, l'une par excès, l'autre par défaut. 16. Disons
encore ceci : tandis que dans les passions et les actions, la faute consiste
tantôt à se tenir en deçà, tantôt à aller au-delà de ce qui convient, la
vertu trouve et adopte une juste mesure. 17. C'est pourquoi si, selon son
essence et selon la raison qui fixe sa nature, la vertu consiste en une juste
moyenne, par rapport au bien et à la perfection, elle se place au point le plus
élevé (56). 18. Mais toute action, de même que
toute passion, n'admet pas cette moyenne. Il peut se faire que le nom de
quelques-unes suggère aussitôt une idée de perversité ; par exemple, la joie
éprouvée du malheur d'autrui, l'impudence, l'envie ; et, dans l'ordre des
actes, l'adultère, le vol, l'homicide. Toutes ces actions, ainsi que celles qui
leur ressemblent, encourent le blâme, parce qu'elles sont mauvaises en
elles-mêmes et non dans leur excès ou leur défaut. À leur sujet, on n'est
jamais dans le droit chemin, mais toujours dans la faute. En ce qui les
concerne, la question de savoir si l'on fait bien ou mal ne peut se poser ; on
n'a pas à se demander à l'égard de quelle femme, ni quand, ni comment on peut
commettre l'adultère. Le seul fait de commettre l'une ou l'autre de ces actions
constitue une faute. 19. Ce serait la même prétention que de soutenir qu'il y
a dans la pratique de l'injustice, de la lâcheté, de la licence juste moyenne,
excès et défaut. Dans ces conditions, il y aurait dans l'excès ou le défaut
une moyenne, et un excès de l'excès et un défaut du défaut. 20. Mais, de
même que la tempérance et le courage n'admettent ni excès ni défaut, parce
que la juste moyenne ici constitue en quelque sorte un point culminant, de même
les vices que nous avons cités n'admettent ni moyenne, ni excès, ni défaut,
parce qu'en s'y livrant on commet toujours une faute. En un mot, ni l'excès, ni
le défaut ne comportent de moyenne, non plus que la juste moyenne n'admet ni
excès ni défaut.
CHAPITRE VII : Élude des vertus particulières.
Or, il ne faut pas se contenter de cette affirmation générale sur la vertu ; il faut aussi que notre théorie soit en harmonie avec les cas particuliers. En effet, en ce qui concerne les actions, qui raisonne en général raisonne dans le vide, tandis que sur les cas particuliers, on a chance d'obtenir plus de vérité. Car les actions ne portent que sur des cas d'espèces ; elles doivent donc s'harmoniser avec eux. Aussi importe-t-il de les saisir d'après le tableau suivant (57). 2. Le courage est une juste moyenne entre la crainte et la hardiesse. L'excès dans l'absence de crainte n'a reçu aucun nom — il en est souvent ainsi en grec ; l'excès dans la hardiesse s'appelle témérité. Qui montre un excès de crainte ou un manque de hardiesse, on l'appelle lâche. 3. Par rapport aux voluptés et aux peines — non point toutes, et d'une manière moindre en ce qui concerne les peines —, la moyenne donne la tempérance et l'excès la débauche. Ceux qui pèchent par insuffisance dans la recherche du plaisir sont très peu nombreux ; aussi les gens de cette sorte ne reçoivent-ils pas d'appellation particulière ; contentons-nous de les appeler insensibles. 4. La juste moyenne en ce qui concerne l'argent qu'on donne ou qu'on reçoit prend le nom de générosité ; l'excès et le défaut à ce sujet les noms de prodigalité et d'avarice. Les deux manières d'être sont en complète opposition dans l'excès et le défaut. En effet, le prodigue est dans l'excès en faisant des largesses, dans le défaut lorsqu'il reçoit ; tandis que l'avare exagère quand il prend et pèche par défaut pour la dépense. 5. Pour le moment donc, nous ne parlons qu'en gros et en général, ce qui nous suffit pour l'instant ; par la suite, nous apporterons sur cette question de plus grandes précisions (58). 6. Il existe encore ; par rapport à la richesse, d'autres comportements ; la juste moyenne s'appelle aussi magnificence ; or le magnifique diffère du généreux, le premier distribuant de grosses sommes, l'autre de petites. L'excès Porte le nom de manque de goût et de vulgarité, le défaut celui de mesquinerie ; ces défauts sont différents de ceux qui ont rapport avec la générosité, mais sur la nature de cette différence nous insisterons plus tard. 7. La juste mesure entre l'amour et le mépris des honneurs porte le nom de grandeur d'âme ; l'excès est une sorte de jactance, le défaut petitesse d'âme. 8. Le rapport qui existe entre la générosité et la magnificence, et qui consiste dans le fait que la première n'a à sa disposition que de faibles ressources, peut exister relativement à la grandeur d'âme, celle-ci ayant en vue de grandes marques d'honneur, tandis que la simple ambition n'en envisage que de faibles. Il se peut que l'on vise aux honneurs comme il convient, mais aussi trop ou trop peu. Celui qui dépasse la mesure dans ses aspirations s'appelle un ambitieux ; celui qui pèche par défaut est un indifférent ; qui reste dans la juste mesure ne porte pas de nom particulier. Les comportements correspondants n'ont pas de nom, eux non plus, sauf celui de l'ambitieux qui est l'ambition, de sorte que les extrêmes revendiquent la place du milieu. Aussi il nous arrive de donner à celui qui demeure dans le juste milieu tantôt le nom d'ambitieux, tantôt celui d'indifférent. Il peut se faire aussi que nous louions tantôt l'ambitieux, tantôt l'indifférent. 9. La raison en sera donnée par la suite ; pour l'instant, donnons quelques précisions sur les autres vertus, de la manière indiquée. 10. La colère présente aussi excès, défaut et moyenne ; mais ces comportements sont à peu près dépourvus d'appellations particulières ; néanmoins, appelant doux l'homme modéré, nous appellerons douceur cet état intermédiaire. Pour les extrêmes, on dira irascible et irascibilité en parlant de l'excès ; on dira flegmatique et flegme en parlant du défaut. 11. Il y a aussi trois attitudes moyennes, ayant entre elles quelque analogie, mais différant les unes des autres. Toutes intéressent les rapports qu'ont entre eux les hommes, soit en paroles, soit en actes ; mais elles diffèrent en ce sens que l'une s'occupe de la vérité des choses mêmes, les deux autres de l'agrément qui est en elles. Parmi ces dernières, une partie est en rapport avec le jeu, l'autre avec tous les événements de la vie. Il faut donc en parler également pour faire mieux voir qu'en tout la mesure est chose louable, que les extrêmes ne sont ni satisfaisants ni louables, que tout au contraire ils sont blâmables. Or la plupart de ces comportements sont eux aussi dépourvus d'appellations particulières ; néanmoins nous devons tâcher, comme nous l'avons fait pour le reste, de les caractériser par un nom, aussi bien en vue de la clarté que pour faciliter la compréhension. 12. En ce qui concerne la vérité, celui qui garde la juste mesure est en quelque sorte un homme vrai ; sa qualité est la véracité. Nommons le goût de l'exagération vantardise et celui qui en est atteint vantard ; la tendance à se diminuer, dissimulation, et celui qui agit ainsi dissimulé. 13. En ce qui concerne l'agrément qu'on trouve dans la plaisanterie, l'homme mesuré est l'enjoué, et son caractère l'enjouement ; l'excès est la bouffonnerie, l'homme qui s'y adonne un bouffon ; celui qui reste en deçà de la mesure est un rustre et le manque la rusticité ; en ce qui concerne l'agrément que pour le reste on apporte dans les relations, celui qui est agréable comme il convient est l'homme aimable et la mesure l'amabilité. L'excès, sans intention intéressée, s'appelle désir de plaire, et, avec l'espoir d'un profit, flatterie. Celui qui reste en deçà de la juste moyenne et qui, en toute circonstance, se montre désagréable est un homme d'humeur bourrue et déplaisante. 14. Les états émotifs et les passions comportent aussi un juste milieu. Car si la pudeur (59) n'est pas une vertu, on loue néanmoins l'homme qui éprouve ce senti-ment, car dans ce genre d'émotions, les uns restent dans le juste milieu, les autres le dépassent ; tel l'homme qui manque d'assurance et qui craint en tout de donner de soi une mauvaise opinion. Celui qui manque de pudeur ; et que rien ne fait rougir est un impudent ; celui qui garde la juste mesure, un homme qui se respecte. 15. L'indignation que cause le bonheur immérité d'autrui tient le milieu entre l'envie et la malignité ; ces sentiments ont rapport à la peine et au plaisir causés par ce qui arrive aux autres. C'est qu'en effet l'homme qui ressent cette indignation s'afflige d'un bonheur immérité, tandis que l'envieux, allant plus loin, s'afflige du bonheur d'autrui, en toutes circonstances, et celui qui est réellement atteint de malignité, loin de s'affliger du malheur d'autrui, s'en réjouit. 16. Mais sur ce sujet nous trouverons ailleurs encore l'occasion de revenir. Comme la notion de justice n'est pas simple, nous ferons par la suite les deux divisions nécessaires et nous en parlerons pour dire comment chacune admet un juste milieu ; nous en ferons autant pour les vertus intellectuelles.
CHAPITRE VIII : Les oppositions entre les vices et la vertu.
Ainsi donc, puisqu'il y a trois comportements, que deux d'entre eux sont des défauts, l'un par excès, l'autre par, manque, tandis que la vertu est unique et consiste dans la juste mesure, tous ces comportements s'opposent, de quelque manière, les uns aux autres ; les extrêmes s'opposent au comportement intermédiaire et l'un à l'autre, aussi bien que l'intermédiaire aux extrêmes. 2. De même que l'égal est plus grand que le moins et moins grand que le plus, de même les comportements moyens, dans les passions et les actions sont en excès à l'égard du défaut et, à l'égard de l'excès, présentent un défaut. En effet, le courageux, par rapport au lâche, paraît audacieux ; mais, par rapport à l'audacieux, il paraît lâche. De même le tempérant passe aux yeux de l'insensible pour intempérant et aux yeux de l'intempérant pour insensible. Le libéral, au regard de l'avare, est prodigue et, aux yeux du prodigue, un avare. 3. Ainsi chacun des extrêmes repousse respectivement celui qui occupe la position intermédiaire vers son propre contraire, si bien que la lâcheté qualifie de témérité le courage, que la témérité à son tour traite de lâcheté. Il en va de même pour les autres comportements. 4. Étant donné cette opposition réciproque des termes, les extrêmes s'opposent plus fortement l'un à l'autre qu'ils ne le font au comportement moyen. C'est que la distance entre eux est plus grande que par rapport au moyen, comme le grand terme et le petit sont plus distants l'un de l'autre que tous deux ne le sont du moyen terme. 5. Ajoutons encore que, par rapport au moyen, parfois les extrêmes laissent apparaître quelque ressemblance (60), comme entre l'audace et le courage, entre la prodigalité et la générosité. Mais les extrêmes entre eux montrent la plus grande dissemblance. Par conséquent, les extrêmes les plus éloignés l'un de l'autre reçoivent l'appellation de contraires ; c'est pourquoi l'opposition est d'autant plus vive que la distance est plus grande entre eux. 6. Tantôt c'est ce qui pèche par défaut, tantôt ce qui pèche par excès qui est plus éloigné de la position intermédiaire ; par exemple, en ce qui concerne le courage, la témérité, qui est un excès, en est moins éloignée que la lâcheté, qui est un manque ; par contre, en ce qui concerne la tempérance, l'insensibilité, qui est un manque, en est plus rapprochée que l'intempérance, laquelle est un excès. 7. À cela deux causes : l'une provenant de la chose même ; comme l'un des extrêmes est plus proche du moyen et plus semblable à lui, ce n'est pas cet extrême, mais l'autre que nous lui opposons plus volontiers ; par exemple, du moment que la témérité paraît plus semblable au courage et plus voisine, tandis que la lâcheté en diffère davantage, c'est cette dernière que nous lui opposons plus volontiers. En effet, les choses les plus éloignées du juste milieu semblent bien être davantage son contraire. 8. Telle est donc cette cause qui provient de l'objet même. La seconde provient de nous-mêmes. En effet, plus les objets nous attirent par une inclination naturelle, plus de toute évidence ils répugnent à la moyenne (61) ; par exemple, plus la nature nous entraîne vers les plaisirs, plus nous sommes enclins à la licence qu'à la décence. Aussi disons-nous qu'est plus contraire au juste milieu ce pour quoi nous avons une plus grande propension. Aussi l'intempérance qui est un excès est-elle plus opposée que l'insensibilité à la tempérance.
CHAPITRE IX : Règles pratiques pour atteindre la vertu
Ainsi
donc la vertu morale est une moyenne, dont nous avons précisé les conditions :
elle est un milieu entre deux défauts, l'un par excès, l'autre par manque ; sa
nature provient du fait qu'elle vise à l'équilibre aussi bien dans les
passions que dans les actions. Tout cela, nous l'avons dit suffisamment. 2.
Aussi est-il difficile de se montrer vertueux. En chaque cas atteindre le juste
milieu ne va pas sans peine, de même que déterminer le centre de la
circonférence est le propre, non du premier venu, mais du savant. De même il
est à la portée de n'importe qui de se mettre en colère, aussi bien que de
distribuer de l'argent et de faire des largesses. Par contre, savoir à qui il
faut donner, combien, quand, pour quelle fin et de quelle manière, voilà qui
n'est pas à la portée de tout le monde et qui est difficile. Aussi le bon
emploi de l'argent est-il rare, autant que louable et beau. 3. Par conséquent,
il faut que celui qui vise la juste moyenne commence par s'éloigner de ce qui
s'en écarte le plus, selon le conseil de Calypso :
Toi, pilote, tiens ta nef éloignée de cette fumée
et de cette agitation des flots (62).
En effet, l'un des extrêmes nous fait commettre une plus grosse faute que
l'autre. 4. Puisqu'il est extrêmement difficile d'atteindre le juste milieu, à
la seconde traversée, comme dit le proverbe, il faut se contenter des moindres
maux ; ce qui se produira si nous suivons la méthode indiquée. Il faut donc
examiner dans quel sens nous nous trouvons surtout entraînés. Car la nature
nous porte dans des directions opposées. Nous pourrons facilement comprendre
nos penchants par le plaisir et la peine que nous éprouvons. 5. Il faut donc
nous porter vivement dans le sens opposé à celui où nous nous sentions
entraînés. Quand nous nous serons éloignés à bonne distance de la faute,
nous arriverons à ce juste milieu. C'est ainsi que procèdent les ouvriers qui
redressent les branches tordues. 6. En tout, il faut particulièrement se garder
de l'agréable et du plaisir. Car nous n'en décidons pas en toute
impartialité. Aussi nous faut-il prendre vis-à-vis du plaisir la même
attitude que les chefs vis-à-vis d'Hélène et nous répéter en toutes
circonstances leur parole ce n'est qu'après nous en être débarrassés que
nous commettrons moins de fautes (63). 7. Ce
faisant, pour nous résumer, nous serons mieux en état de parvenir à un juste
équilibre. Voilà qui ne va pas sans difficulté dans les circonstances dont
chacun est juge ; il est difficile de déterminer comment, contre qui, à quel
sujet et combien de temps la colère peut se manifester. Il nous arrive, en
effet, de louer ceux qui se tiennent en deçà de la colère et de dire qu'ils
sont d'humeur facile ; mais il peut se faire aussi que nous appelions ceux qui
se fâchent de vrais mâles. 8. Eh bien ! celui qui s'écarte légèrement du
bien soit par excès, soit par défaut n'encourt pas le blâme ; seul le mérite
celui qui s'en écarte beaucoup, car sa faute ne nous échappe pas. D'ailleurs,
il n'est pas facile de déterminer raisonnablement jusqu'a quel point et dans
quelle mesure l'homme qui s'emporte est blâmable. La difficulté est identique
pour tout ce qui appartient au domaine du sensible ; car il n'y a là que des
cas d'espèce et le jugement relève des fonctions des sens.
9. En voilà assez pour montrer qu'une disposition moyenne est, en toutes
circonstances, louable, mais que selon les cas il convient de pencher tantôt
vers l'excès, tantôt vers le défaut. Dans ces conditions nous atteindrons
très facilement la position moyenne et le bien.
(44) …Enyow, coutume, usage, habitude; ¸yow, manière d'être, moeurs.
(45) Principe pythagoricien. Cf. l. VI, I.
(46)
Cf. Platon, Lois, I, II. C'est chez Platon qu'Aristote a trouvé tous les germes de ses théories sur le bien, la vertu, la tempérance, le courage, l'amitié. Mais si les doctrines particulières sont au fond les mêmes, le caractère général de la morale aristotélicienne est tout autre.(47) Idée reprise plus tard par les stoïciens et les épicuriens.
(48)
Conception appliquée l. VIII et IX.(49)
Il y a quelque exagération, consécutive au désir d'Aristote de contredire Platon et de faire de la vertu, non une science, mais une habitude.(50)
Cf. Éth. Nic., livre II, I.(51) Bien que les expressions vertu de l'oeil et vertu du cheval soient un peu étonnantes, on voit ce que veut dire Aristote. Vertu signifie excellence, supériorité.
(52) Dans le même livre, I, 4.
(53) Athlète célèbre qui vécut au
VIe s. av. J.-C.(54)
Cf. Éth. Nic., livre I, 3.(55) L'origine de cette citation est inconnue.
(56) Précision importante, qu'il ne faut pas perdre de vue.
(57)
Le tableau n'est pas donné ici. Il se trouve dans la Morale d'Eudéme, l. II.(58)
Cf. Éth. Nic., livre IV, I et suiv.(59) Peut-être, en raison de ce qu'Aristote dit plus loin de la pudeur, vaudrait-il mieux traduire : la modestie. Mais la modestie n'est pas une émotion.
(60)
Il faut se reporter aux Catégories (trad. Barthélemy-Saint-Hilaire) ch. 10, 11.(61)
Aristote n'a pas tiré de cette remarque toutes les conséquences qui en découlent.(62)
C'est Circé, non Calypso, qui dans Homère prononce ces paroles.(63) Iliade, III, 155 et suiv.