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LA STATUE VOCALE DE MEMNON

ANTHOLOGIE PALATINE

QUELQUES INSCRIPTIONS DU COLOSSE DE MEMNON (456).

391. (457) Cambyse m'a brisée, moi cette pierre que voici, représentant l'image d'un roi de l'Orient. Jadis je possédais une voix plaintive qui déplorait les malheurs de Memnon. Depuis longtemps Cambyse me l'a enlevée. Maintenant mes plaintes ne sont plus que des sons inarticulés et dénués de sens, triste reste de ma fortune passée.

392. (458) La pierre ayant rendu un son, moi. Publius Balbinus, j'ai entendu la voix divine de Memnon ou Phaménoph. J'étais accompagné de cette admirable reine Sabine. Le soleil commençait le cours de la première heure, la quinzième année de l'empereur Adrien ; Athyr était à son vingt-quatrième jour. Le vingt-cinquième jour du mois Athyr.

393. (459) Et moi aussi, je t'honorerai, ô Memnon, fils de Tithon, assis en face de la ville thébaine de Jupiter, ou bien Aménoth, roi égyptien, à ce que disent les prêtres instruits des anciens mythes.

394. (460) J'avais appris que l'Égyptien Memnon, échauffé parles rayons du soleil, faisait entendre une voix sortie de la pierre thébaine. Ayant aperçu Adrien le roi du monde, avant le lever du soleil, il lui dit bonjour, comme il pouvait le faire. Mais lorsque le soleil, traversant les airs avec ses blancs coursiers, occupait la seconde mesure des airs, marquée par l'ombre [du cadran], Memnon rendit de nouveau un son aigu, comme celui d'an instrument de cuivre frappé ; et plein de joie [de la présence de l'empereur], il rendit pour la troisième fois un son. L'empereur Adrien salua Memnon autant de fois. Et Balbilla (461) a écrit ces vers composés par elle-même, qui montrent tout ce qu'elle a vu et entendu. Il a été évident pour tous que les dieux aiment Adrien.

395. (462) Hier, n'ayant pas entendu Memnon, nous l'avons supplié de n'être pas une seconde fois défavorable (car les traits de l'impératrice s'étaient enflammés de courroux), et de faire entendre un son divin, de peur que l'empereur lui-même ne s'irritât, et qu'une longue tristesse ne s'emparât de son auguste épouse ; aussi Memnon, craignant le courroux de ces princes immortels, a fait entendre tout à coup une douce voix, et a témoigné qu'il se plaisait dans la compagnie des dieux.

396. (463) Moi, Marcius Hermogène, j'ai entendu la grande voix de Memnon, saluant avec respect sa mère à son lever.

397. (464) Ta mère, la déesse Aurore aux doigts de rose, ô célèbre Memnon, t'a rendu la parole pour moi qui désirais t'entendre. La douzième année de l'illustre Antonin, le mois de pachôn comptant treize jours, deux fois, être divin, je t'ai entendu parler, lorsque le soleil quittait les flots majestueux de l'Océan. Jadis le fils de Saturne, Jupiter, te fit roi de l'Orient ; maintenant tu n'es plus qu'une pierre, et c'est d'une pierre que sort ta voix. Gémellus a écrit ces vers à son tour, étant venu ici avec sa chère épouse Rufilla et ses enfants.

398. (465) Cæcilia Trébulla, ayant entendu une seconde fois Memnon, a écrit ces vers : Auparavant Memnon, fils de l'Aurore et de Titbon, nous a seulement fait entendre sa voix; maintenant il nous a salués comme connaissances et amis. La nature, créatrice de toutes choses, a-t-elle donc donné à la pierre le sentiment et la voix ? 

399. (466) Moi, Panion de Sydé, j'avais appris auparavant, mais je sais maintenant pour en avoir été le témoin, ô Memnon, que tu es doué d'une voix.

400. (467) Quoique des mutilateurs aient brisé ce colosse, je suis venu de nuit (468) pour entendre la voix du très divin Memnon. Je l'ai entendue, moi Catulus, chef de la Thébaïde. 

401. (469) Grands dieux ! quel prodige étonnant frappe mes regards ! C'est quelque dieu, l'un de ceux qui habitent le vaste ciel, qui, enfermé dans cette statue, vient de faire entendre sa voix, et retient tout le peuple assemblé. En effet, jamais mortel ne pourrait produire de tels prodiges. 

402. (470) Moi, Pétronianus, qui tiens de mon père le nom de Duillius, Italien de naissance, je t'honore par ces vers élégiaques, en faisant au dieu qui me parle un présent poétique. Mais en retour, ô roi, accorde-moi une longue vie. Beaucoup viennent en ce lieu pour savoir si Memnon conserve une voix dans la partie du corps qui lui reste. Quant à lui, assis sur son trône, privé de sa tête, il résonne, en soupirant, pour se plaindre à sa mère de l'outrage de Cambyse ; et lorsque le brillant soleil lance ses rayons, il annonce le jour aux mortels ici présents.

456. On en trouvera d'autres dans l'excellente étude historique sur la statue vocale de Memnon, par Lettonne, 1833.
457
.  Pococke, Inscriptiones, p. 81, n° 21.
458
.Pococke, Inscriptiones, p, 84, n° 25.
459
. Pococke, Inscriptiones, p. 83, n° 5. Variante du troisième vers : …H ƒAmenÆy, basileè AÞgæptie, tÆw ¤n¡poisin,, préférée par Letronne.
460
. Pococke, Inscriptiones, p. 82, n° 3.
461
. Voici le texte de la fin de l'épigramme .
KoÛranow ƒAdrianòw tos‹kiw d' Žsp‹sato kaétòw
M¡mnvna: kaÜ BalbÛlla k‹men oåsi pñnoiw
Gr‹mmata shmaÛnonta t' ÷s' eï àde, k÷ss' ¤p‹koue.
D°lon psi d' ¦gent' Èw g' ¥ fÛloisi yeoÛ.

462
Xyisdòn men. Letronne, Statue vocale de Memnon, p. 168.
463
M‹rkiow „Ermog¡nhw. Letronne, Statue de Memnon, p. 183.
464
.  Y°k¡ se fvn®enta. Letronne, Statue vocale de Memnon, p. 193 ; et Welcker, Sylloge epigrammatum, p. 254.
465
Aéd°w tò prñsyen. Letronne, Statue vocale de Memnon, p. 203 ; et Welcker, Sylloge epigrammatum, p. 253.
466
. Aéd®ent‹ se. Letronne, Statue vocale de Memnon, p. 209.
467
EÞ kaÜ lvbht°rew. Letronne. Statue vocale de Memnon, p. 212 ; et Welcker, Sylloge epigrammatum, p. 255.
468
. Næktvr , sans doute pour ne pas manquer l'instant du lever du soleil.
469
. Î pñpoi, · m¡ga. Letronne, Statue vocale de Memnon, p. 217.
470
. Toætoiw toÝw ¤l¡goiw. Letronne, Statue vocale de Memnon, p. 224. Après la belle épigramme ZÅein eÞnalÛh, Appendix, 16, on peut mettre celle-ci au nombre des meilleures que Memnon ait inspirées.

PAUSANIAS : Livre I, 43.

Je viens de dire d'après les Mégaréens, qu'Apollon avait posé sa lyre sur une pierre pour aider Alcathoos à bâtir les murs de la ville ; s'il vous arrive de frapper cette pierre avec un petit caillou, elle rend le même son qu'une lyre. Cela est surprenant sans doute, mais beaucoup moins que ce que j'ai vu à Thèbes en Egypte ; de l'autre côté du Nil, près du lieu nommé les Syringes, est une statue colossale assise, qui représente le soleil, quoiqu'on lui donne généralement le nom de Memnon, qui étant, dit-on, parti de l'Ethiopie avec une armée, traversa l'Egypte et s'avança jusqu'à Suses. Mais les Thébains ne veulent pas que cette statue soit Memnon, et ils y voient Phaménophis, Egyptien.
     J'ai aussi entendu dire qu'elle représente Sésostris. Cambyse l'ayant fait briser, la moitié supérieure du corps est étendue à terre ; l'autre moitié est restée en place et rend chaque jour au lever du soleil un son que je ne puis mieux comparer qu'à celui d'une corde de cithare ou de lyre qui se rompt.

TACITE : Annales

[2,61] LXI. D'autres merveilles attirèrent encore les regards de Germanicus : il vit la statue en pierre de Memnon, qui, frappée des rayons du soleil, rend le son d'une voix humaine ; et ces pyramides, semblables à des montagnes, qu'élevèrent, au milieu dé sables mouvants et presque inaccessibles, l'opulence et l'émulation des rois ; et ces lacs creusés pour recevoir les eaux surabondantes du Nil débordé, et ailleurs ce même fleuve pressé entre ses rives et coulant dans un lit dont nul homme n'a jamais pu sonder la profondeur. De là il se rendit à Éléphantine et à Syène, où furent jadis les barrières de l'empire romain, reculées maintenant jusqu'à la mer Rouge .

LICIEN.

TOXARIS

Démétrius se rendait par mer en Égypte avec Antiphile d'Alopèce ; ils étaient amis d'enfance, du même âge, vivant et élevés ensemble. Démétrius avait étudié la philosophie cynique sous le sophiste de Rhodes  ; Antiphile s'appliquait à la médecine. Le désir de voir les Pyramides et la statue de Memnon attirait Démétrius en Égypte. Il avait entendu dire que les Pyramides, malgré leur élévation, ne projetaient pas d'ombre , et que la statue de Memnon rendait un son au lever du soleil . Démétrius, voulant donc voir les Pyramides et entendre Memnon, remontait le Nil depuis six mois, après avoir laissé en route Antiphile fatigué du voyage et de la chaleur.

LE MENTEUR.

Moi, je vais vous raconter un fait qui m'est arrivé, et que je ne tiens pas d'un autre. Peut-être, en l'entendant, Tychiade, serez-vous forcé de rendre hommage à la vérité de mon récit. Lorsque, dans ma jeunesse, je vivais en Égypte, où mon père m'avait envoyé pour m'instruire dans les sciences, il me prit envie de remonter le Nil jusqu'à Coptos ,et d'aller de là voir la statue de Memnon , afin d'entendre ce son merveilleux qu'elle rend aux premiers rayons du soleil levant. Je l'entendis, non pas, comme le commun des hommes, rendre un son inarticulé ; Memnon lui-même ouvrit la bouche pour moi et me rendit un oracle en sept vers, qu'il serait inutile de vous réciter.