Extraits des auteurs grecs concernant la géographie et l'histoire des Gaules
Edm. Cougny et Henri Lebègue
TOME I
DENYS LE PÉRIÉGÈTE (01).
Description de la [terre] habitée.
V. 69. La mer d'Ibérie se présente tout d'abord...
V. 74. Puis lui succèdent les ondes Galatiques, où s'étend la terre de Massalie, avec son port contourné (02). À la suite se déploie, la mer Ligystique...
V. 288. Après eux (les Ibères), ce sont les Pyrénées et les demeures des Celtes, près des sources de l'Éridan aux belles eaux. Sur ses bords jadis dans la nuit solitaire, les Héliades gémissantes pleuraient Phaéton, et là, les enfants des Celtes, assis sous les peupliers, recueillent les larmes de l'ambre qui a l'éclat de l'or. À la suite sont les demeures de la terre Tyrsénide (Tyrrhénienne), à l'orient de laquelle on voit commencer les Alpes, et du milieu d'elle les eaux du Rhin roulent au bout (du monde), vers les flots de la boréale Amphitrite.
V. 570. Près (des îles Bretonnes), il est un autre groupe d'îlots, et sur la côte opposée, les femmes des braves Amnites (03) célèbrent en des transports conformes au rite les fêtes de Bacchus, elles sont couronnées de corymbes de lierre, et c'est pendant la nuit, et de là s'élève un bruit, des sons éclatants. Non, même dans la Thrace, sur les rives de l'Absinthe, les Bistonides n'invoquent pas ainsi le frémissant lraphiotès; non, le long du Gange aux noirs tourbillons, les Indiens avec leurs enfants ne mènent pas la danse sacrée du frémissant Dionysos, comme en cette contrée les femmes crient : Evan!
Commentaire d'Eustathe.
V. 69. Le golfe Ibérique est le commencement de l'Europe et de la Libye : et en effet, dit-il, il se creuse entre elles deux.
V. 74. À ce golfe succède l'eau Galate, c'est-à-dire la mer Galatique.... Or il faut savoir que près de cette eau Galate, appelée ainsi du nom des Galates, près de cette mer Galatique habitent les Celtogalates, et ces Galates, à ce qu'on dit, sont adonnés au vin : on dit aussi que ce nom leur vient d'un certain Galatès, fils d'Apollon.
V. 75. Massalie aussi est Galate. - Or, elle fut fondée par des Phocéens qui fuyaient loin de l'Orient le joug de Cyrus. Massalie a un port contourné, c'est-à-dire circulaire, rond, recourbé sur lui-même ; ou bien cette épithète peut venir de ce que les navigateurs se tournent, ¤pistr¡fontai (se dirigent), vers ce port, qui est bon : il se nomme Lacydon On dit qu'autrefois les Massaliens étaient célèbres comme mécaniciens et ingénieurs de constructions navales. - Massalie n'est pas seulement une contrée, c'est aussi une ville des Ligyes, dans les environs de la Celtique ; son nom vient de massai qui en dialecte éolique signifie amarrer, et d'un certain pécheur, halieus. Et en effet, naviguant, dit-on, en ces parages, le pilote des Phocéens fugitifs aperçut en cet endroit un pêcheur et le pria d'amarrer, massai, c'est-à-dire de lier son câble à la terre : de là le nom de Massalie, de massein et halieus (04).
V. 76. Après les Massaliotes viennent les Ligyes, que Lycophron appelle Ligystins (05). Ils sont ainsi nommés d'un certain Ligys, qui voulait arrêter Héraclès (Hercule) allant à la conquête des boeufs de Géryon : et alors, à ce que disent les fables, Héraclès manquant de toute espèce d'armes pour se défendre, pria Zeus (Jupiter) de lui venir en aide; le dieu, ayant rassemblé un nuage, en fit pleuvoir des pierres : de là entre Massalie et Rhèginè la plaine de pierres, toute couverte de pierres grosses à remplir la main, qui, selon les savants, seraient des fragments de rochers brisés par des coups de foudre incessants ou des exhalaisons typhoniques : c'est ainsi que de grandes roches plates auraient été mises en menus morceaux, à ce que disent ceux qui laissent la fable radoter à son aise.
V. 281. De ces Ibères d'Europe les Ibères orientaux sont une colonie, comme des Galates européens ceux d'Asie, près d'Ancyre (06)... Celtus et Iber sont fils d'Héraclès et d'une femme barbare, et c'est d'eux que viennent ces peuples, les Celtes et les Ibères.
V. 285. L'Ibérie a la forme d'une peau de boeuf, dont les parties, pour ainsi parler, cervicales tombent, dit-on, sur la Celtique qui y est contiguë à l'Orient. Dans la langue des Romains le nom des Germains s'explique par le mot genuini, parce qu'ils sont de la même race, genus, que les Galates, à qui ils ressemblent par la figure, le genre de vie et les mœurs, l'emportant sur eux seulement par leur naturel farouche, leur taille et la couleur blonde de leurs cheveux. Ils habitent au delà du Rhin, à l'est, après les Celtes. Quelques-uns prennent Germani dans le sens de frères, ce qui en certaine façon revient au sens de genuini.
V. 288. Aux environs de la Pyrènè, c'est-à-dire des Pyrénées, habitent les Celtes, près de la source de l'Éridan aux belles eaux, qui, au dire de quelques-uns, est le fleuve appelé aujourd'hui Pade (07)..... « Les enfants des Celtes, assis sous les peupliers, expriment les larmes de l'ambre qui a l'éclat de l'or. » cela veut dire qu'ils recueillent l'ambre qui est tel. D'autresécrivent Žm¡rgontai par un r ... Il est évident que ledit
ambre, en raison de son éclat doré, passe pour être les larmes des Héliades. Car l'or est le métal consacré au soleil. Notez que Dionysios (Denys) appelle plus loin l'ambre pierre parapotamienne (08). - Les Pyrénées sont une très-grande montagne qui sépare l'Ibérie et la Celtique. Au lieu de KeltoÛ, le géographe (Strabon) dit K¡ltai comme on dit Xrèsai. Les Celtes, dit-on, s'étendent jusqu'au Rhin. C'est de leur nom que tous les Galates d'Europe ont été appelés Celtes par les Hellènes.
V. 294. Après l'Éridan sont les Tyrrhéniens......... C'est de chez eux, à l'est, que part les Alpes, du milieu de laquelle descend le Rhin, fleuve celtique, qui par une double embouchure se jette dans l'Océan boréal; son cours est rapide, sinueux, et il n'est pas facile d'y construire des ponts. Ce fleuve, dit-on, distingue les enfants bâtards des enfants légitimes; il soutient les uns, ceux qui sont légitimes; les autres, qui ne sont pas tels, il les confine dans le fond de l'oubli et de l'eau (09). - L’Alpe est une très grande montagne ; aussi dit-on également au pluriel les Alpes. On affirme que ce mot, traduit en langue hellénique, serait bien rendu par kleisoèra, clôture. Cette montagne est si haute, à ce qu'on rapporte, qu'en cinq jours on n'en atteindrait pas le sommet. Elle commence aux mêmes lieux que les monts Apennins, près de Génua, le marché des Ligyes. On disait aussi au neutre tŒ …Alpia et tŒ …Albia, par un b.
V. 298. Hérodote voit dans l'Ister un fleuve celtique; c'est dans un passage où il dit que l’Iister est grossi par plusieurs fleuves, qu'il prend sa source chez les Celtes, et qu'il traverse toute l'Europe (10).
V. 338. La Pyrènè très grande montagne.... La Pyrènè commence à l'Océan boréal, et s'étend jusqu'à la mer Hespérienne (occidentale) : elle sépare les Celtes et les Ibères. Elle ne s'appelle pas seulement, comme il a été dit ci-devant, mont Pyrènèe , mais encore au pluriel monts Pyrénées. De même pour les Alpes et l'Hercynium, on emploie les deux nombres.
V. 378. Plusieurs affirment que ces Enétes des environs d'Aquileia sont une colonie de leurs homonymes parocéanites, qui sont appelés non seulement Enétes, mais aussi Belges. Or les Belges sont un peuple celtique. Le géographe (11) dit que ces Vénètes, j'entends les parocéanites, sont les fondateurs de la colonie des Vénètes de l'Adrie, et que ce sont eux qui combattirent contre César pour l'empêcher de passer en Bretagnee. D'autres affirmant (12) que ces Enétes sont des Paphlagons échappés de la guerre de Troie, et venus dans ce pays avec le troyen Anténor, allèguent comme preuve les soins qu'ils se donnent pour l'élevage des chevaux, ainsi que faisaient les Enétes Paphlagons dans Homère. Le dressage des chevaux tel qu'il est pratiqué chez les Enétes était en renom dans l'Hellade.
V. 570-579. Comparant avec ces îles (les îles Britanniques) celles de ces parages, il dit, par un diminutif, les îlots des Amnites. « Là les femmes des braves Amnites, etc. » On dit à la vérité qu'il y a dans l'Océan, non pas tout à fait au large, une petite île qu'habitent les femmes des Amnites, qui sont possédées de Dionysos. Aucun homme ne met le pied dans cette île ; ce sont les femmes qui vont trouver les hommes, et après avoir eu commerce avec eux, elles s'en reviennent. Puis, par une comparaison oratoire entre ces pratiques sacrées et d'autres qui leur ressemblent, non, dit-il, il n'y en a pas... qui
Žneu‹zousi comme les femmes de ces îles, c'est-à-dire qui célèbrent comme elles Evios Dionysos, en criant évohé ! évan ! acclamations de l'enthousiasme dionysiaque. On dit, en effet, que les femmes des Amnites dansent en choeur les nuits entières, si bien que sur ce point leur cèdent même les Thraces, même les Indiens, quoique ces peuples possédés de Dionysos soient entièrement adonnés à ces orgies sacrées.ANONYME.
Paraphrase de Denys le Périégète.
V. 69-75. À cet océan Ibérique succède l'eau galatique, c'est-à-dire la mer Galatique près de laquelle habitent les Celtogalates. [Les Galates de l'Asie sont des colons de ce pays, comme les Ibères de l'Asie viennent de l'Ibérie.] C'est là qu'est Massalie, contrée ou ville, avec de bons ports, et un havre de forme circulaire et d'un accès facile.
V. 76-83. À la suite du golfe Galatique s'étend la mer Ligystique...
V. 288-301. À côté de ces Ibères est le mont Pyrènée et les demeures des Celtes, dans le voisinage des sources de l'Éridan aux belles eaux : près des bouches de ce fleuve, dans la nuit solitaire les Héliades pleurèrent en gémissant la mort de Phaéton qui était leur frère. Là les enfants des Celtes, montés sur les peupliers, recueillent les larmes ou les gouttes de l'ambre qui a l'éclat de l'or, et les amassent. Vient tout de suite après le pays des Tyrrhènes. À l'est de cette contrée se montre le commencement des Alpes. Du milieu de cette montagne s'échappent, c'est-à-dire partent les eaux du Rhin, fleuve qui se dirige vers les extrémités de l'Océan boréal, où en effet il se jette.
V. 330-344. Au-dessus de ce (promontoire) d'Alybè est située l'heureuse Tartèsus... puis viennent les Cempses, qui habitent au pied du mont Pyrènée, lequel sépare les Celtes et les Ibères.
V. 565-569. Vers les parties boréales de l'Océan, il y a deux autres îles, les îles Britanniques, en face du fleuve du Rhin. Là, en effet, le Rhin vomit à son extrémité l'amas de ses eaux dans la mer.
V. 570-579. Près des îles dites Cassitérides (13), il y a une autre série de petits îlots, où les femmes des Amnites, à l'opposite, c'est-à-dire en face, dans leurs transports, célèbrent selon le rite le culte de Dionysos : c'est pendant la nuit, et elles se couronnent des corymbes du lierre au noir feuillage, c'est-à-dire de branches de cet arbre avec leurs fruits en forme de grappes ; et le bruit des tambours et des cymbales qu'elles frappent retentit au loin. Nulle part,.... ni les Bistonides ou Thraces ni les Indiens ne mènent les fêtes du bruyant Dionysos avec l'ardeur que mettent en cette contrée les femmes des Amnites à chanter : Évohé Bacchos ! c'est-à-dire l'hymne sacré des Dionysies.
Scholies sur Denys le Périégète.
V. 74 . Les Galates de l'Asie sont des colons détachés de ceux de l'Europe, de même que les Ibères de l'Asie sont des colons partis du même pays. C'est au sujet des Galates que Callimaque a dit :
Ceux que Brennos de la mer du couchant a conduits à la ruine des Hellènes.
V. 76. Après l'océan Ibérique et Galatique vient de suite le Ligystique.
V. 289. Philostéphane (14) dit que de son temps l'Éridan a été nommé par les indigènes le Rhodan (le Rhône). Quelques-uns pensent que les deux ne font qu'un; c'est l'avis d'Apollonius (15) :
... et ils franchirent le cours profond du Rhodan, qui se jette dans l'Eridan, où se mêlent leurs eaux.
V. 290. L'Éridan (sort) de la montagne appelée Héliou Cape, l'étable du soleil , ou, selon quelques-uns, des (monts) Cérauniens. Il se trouve entre les Germains et les Celtes.
V. 338. Au pied des Pyrénées sont les Cempses. La Pyrènè est une montagne qui commence à l'Océan boréal, s'étend jusqu'à notre mer, et sépare les Celtes des Ibères.
Géographie synoptique (16).
V. 270-330.... À côté d'eux (les Ibères) se trouvent les Pyrénées et les habitations des Celtes, près du fleuve Éridan. Tout de suite après est la contrée Tyrsénique, à l'est de laquelle est le commencement des Alpes adjacents à l'Italie. Vers le milieu de cette contrée Tyrsénique, le fleuve du Rhin commence son cours qui se dirige vers la mer Boréale. Près du fleuve du Rhin coule le grand fleuve Ister...
V. 334-402. Au-dessus de cette contrée (celle des Ibères) est Tartesus l'heureuse puis les Cepses, qui habitent la région au pied des Pyrénées; commençant à l'océan Boréal, d'étendant jusqu'à la mer, et séparant les Celtes et les Ibères.
V. 551-619 Près des îles Cassitérides (îles Scilly), il est une autre série de petites îles, où les femmes des Amnites, en face (du continent), fêtent Dionysos.
ANONYME, VULGAIREMENT SCYMNUS DE CHIO (17).
Description de la terre.
V. 415... Elles sont appelées par quelques-uns les colonnes d'Héraclès. Dans le voisinage de l'une d'elles, il y a une ville massaliote, appelée Maenacè.
V. 162-195. Après cette ville (Gadira), et à deux jours de distance par mer, on rencontre un marché très florissant, la ville illustre qu'on appelle Tartessus, où par un fleuve arrive de la Celtique l'étain, l'or et le cuivre qu'elle reçoit en abondance. Puis vient la contrée appelée Celtique, jusqu'à la mer qui s'étend ,auprès de Sardo (la Sardaigne), et ce peuple est le plus grand qu'il y ait au couchant. Car presque toute la terre située dans tes limites du levant est habitée par les Indiens, celle qui regarde au midi par les Aethiopes (Éthiopiens) situés sous le vent qui souffle du sud. Depuis le Zéphyr (vent d'ouest) jusqu'au couchant d'été habitent les Celtes, et dans la région boréale, les Scythes. Les Indiens habitent donc entre le levant d'été et le [levant] d'hiver, les Celtes à l'opposite, entre le couchant équinoxial (18) et le [couchant] d'été, à ce qu'on dit. Ces quatre races sont égales par le nombre des habitants et par la densité des populations. La contrée des Ethiopiens et celle des Scythes sont plus étendues, mais ce sont en grande partie des déserts (19), parce que l'une est trop brûlante, l'autre trop humide. Les Celtes ont des usages et des moeurs helléniques, et ils les doivent à leurs relations habituelles avec l'Hellade et à l'hospitalité qu'ils donnent souvent aux étrangers de ce pays. Ils tiennent leurs assemblées avec de la musique, demandant à cet art le moyen d'adoucir les coeurs. À l'extrémité de leur pays se trouve la colonne dite boréale, très haute et projetant sa pointe dans une mer houleuse. Les lieux voisins de cette colonne sont habités par les Celtes qui ont là leurs derniers rameaux, les Enètes et ceux des Istres (Istriens) qui en deçà s'avancent jusqu'à l'Adrie : c'est là, dit-on, que l'Ister commenceson cours (20).
V. 201-216. Puis, le long de la mer, au-dessous (des Bébryces) (21), se trouvent les Ligyes et les villes helléniques que les Phocéens massaliotes ont colonisées. La première est Emporium (22), Rhodé (23), la seconde, fondée par les Rhodiens qui jadis avaient de grandes forces navales. Après eux, étant allés en Ibérie, les Phocéens qui avaient fondé Massilia occupèrent Agathè (24), Rhodanusie (25), que le grand fleuve Rhône baigne de ses eaux. Tout près est Massilia très-grande ville, colonie des Phocéens. Ils la fondèrent dans la Ligystique cent vingt ans, dit-on, avant que fût livrée la bataille de Salamine. C'est ce que rapporte de sa fondation l'historien Timée. Puis vient après elle Tauroïs (26) et, dans le voisinage, Olbia (27) et, à l'extrémité, Antipolis.
V. 250-252. Puis il y a (dans la Lucanie) Éléa, ville de Massaliotes et de Phocéens, que fondèrent vers les [temps] Persiques des Phocéens fugitifs.
V. 773-778. Le fleuve, Ister : il vient des contrées de l'Occident et se jette [dans la mer] par cinq bouches : partagé en deux branches, il coule aussi vers l'Adrie. Il est bien connu jusqu'à la Celtique... toujours le même, l'été [comme l'hiver], en tout temps.
STRABON (28)
Géographie.
LIV. 1, CH. II, III, IV.
SUJET. - Discours sommaires. Situation de la Gaule par rapport au reste de la terre.
II. 27. Suivant l'opinion des anciens Hellènes (Grecs), et attendu que les peuples du nord qu'ils connaissaient étaient désignés par eux sous le seul nom de Scythes ou de Nomades, comme dans Homère ; que, plus tard, ayant connu les contrées de l'Occident, ils en appelèrent les nations Celtes et Ibères, ou, en combinant ces noms, Celtibères et Celtoscythes, rangeant ainsi, par ignorance, sous une seule dénomination des peuples distincts, j'affirme que toutes les parties méridionales de la terre, voisines de l'Océan, étaient de même appelées par eux Éthiopie.
28. Éphore expliquant aussi l'opinion des anciens, ... place vers le couchant les Celtes...
III.21 . Les migrations des Cares (Cariens), des... des... et des Galates (Gaulois) ne sont pas également connues de tout le monde.
IV. 3.... La Brettanique (Bretagne), dont la longueur est à peu près celle de la Celtique, devant laquelle elle s'étend, n'a pas, dans ce sens plus de cinq mille stades, et les points extrêmes, en se faisant face dans les deux pays, déterminent, bien cette dimension. En effet les extrémités se font face à l'Orient comme à l'Occident, et même à l'est, ces extrémités, - le Cantium (29) et les bouches du Rhin, sont assez rapprochées pour être en vue l'une de l'autre. Or Pythéas déclare que la longueur de l'île est de plus de vingt mille stades, et il affirme que la distance du Cantium à la Celtique est de plusieurs jours de navigation...
4. Le parallèle qui passe par le Borysthène (30) est le même que celui qui coupe la Bretagne, suivant la conjecture d'Hipparque et de quelques autres, conjecture fondée sur ce que le parallèle de Byzance est le même que celui de Massilia. En effet, le rapport que Pythéas indique entre l'ombre et le gnomon de Massilia, Hipparque dit l'avoir trouvé tout pareil à Byzance, en un moment précis du même nom. Or, de Massilia au centre de la Bretagne il n'y a pas plus de cinq mille stades...
5. Toutes ces terres (l'île d'Uxisamé (31) avec les autres du même groupe), situées au nord, sont celtiques et non ibériques, ou plutôt ce sont des inventions de Pythéas.
LIVRE II, CH. I, III, IV, V.
Prolégomènes. Position géographique de la Gaule.
I, 12. D'abord, si le parallèle de Byzance est le même que celui de Massilia, comme l'a dit Hipparque sur la foi de Pythéas, et le méridien de Byzance le même que celui du Borysthène, ce qui est l'opinion d'Hipparque, comme son opinion est aussi que la distance de Byzance au Borysthène est de trois mille sept cents stades, le même nombre de stades devrait se trouver entre Massilia et le parallèle du Borysthène, lequel est aussi celui qui passe par la Celtique contiguë à l'Océan, car, après un trajet de cette longueur, on atteint l'Océan.
13 Comme, suivant Hipparque, de l'équateur au parallèle du Borysthène la distance est de trente-quatre mille stades, il resterait pour la distance du parallèle qui sépare la zone torride de la zone tempérée et le parallèle passant par le Borysthène et la Celtique parocéanique vingt-cinq mille deux cents stades. Mais le terme extrême de la navigation au nord de la Celtique est, dit-on, aujourd'hui Iernè (l’Irlande), située par delà la Bretagne, et difficilement habitable à cause du froid, au point qu'il croit inhabitées les contrées qui sont au delà. Or la distance de la Celtique à Iernè n'est pas, dit-on , de plus de cinq mille stades.
16. Où trouveriez-vous une nature aussi heureuse (que dans l'Asie), près du Borysthène et dans la Celtique voisine de l'Océan? La vigne n'y croit pas, ou bien elle n'y porte pas de fruit... S'il n'y a pas à comparer le climat des contrées que nous avons énumérées à celui du Bosphore, pas même à celui d'Amisus et de Sinope, qu'on pourrait trouver plus tempéré, bien moins encore rapprochera-t-on ces heureuses contrées de celles du Borysthène et des derniers confins de la Celtique. Car à peine pourrait-on ranger sous la même latitude qu'Amisus, Sinope, Byzance et Massilia, des contrées qui, tout le monde en convient, sont de trois mille sept cents stades plus au midi que le Borysthène et les Celtes.
17. Que ceux qui sont avec Déimaque ajoutent à ses trente mille stades la distance qu'il y a encore jusqu'à la Taprobane (32) et aux limites de la zone torride, distance qu'on ne peut supposer moindre de quatre mille stades, ils rejettent Bactres et l'Arie à trente-quatre mille stades de la zone torride. Ce qui est, au dire d'Hipparque, la distance de la ligne équinoxiale au Borysthène. Ainsi ces contrées sont repoussées à huit mille huit cents stades plus au nord que le Borysthène et la Celtique, et c'est aussi la distance de l'équateur au sud du cercle qui sépare la zone torride de la zone tempérée, et qui, disons-nous, se décrit précisément à travers la Cinnamomophore. Or, nous avons démontré qu'au-dessus de la Celtique jusqu'à Iernè (33), il y a un espace de cinq mille stades au plus qui est à peine habitable ; et les calculs de Déimaque n'en prétendent pas moins mettre sur un parallèle à trois mille huit cents stades au nord d'lernè, des contrées qu'on peut habiter. Bactres sera ainsi plus au nord et de beaucoup, que la bouche de la mer Caspienne ou Hyrcanienne, laquelle, éloignée d'environ six initie stades du fond de la Caspienne et des montagnes de l'Arménie et de la Médie, paraît bien être le point le plus septentrional de cette côte jusqu'à l'Inde : il paraît aussi qu'on peut y arriver de l'Inde par un voyage de circumnavigation , ainsi que l'affirme Patrocle, qui a gouverné ces contrées. En outre, la Bactriane s'étend de mille stades vers l'Ourse , et les peuples des Scythes occupent au delà une contrée beaucoup plus vaste : ils finissent à la mer Boréale, et vivent en nomades, mais ils vivent. Et comment font-ils, si Bactres elle-même est déjà rejetée en dehors de la terre habitable? Cette distance du Caucase à la mer Boréale, en passant par Bactres, peut bien être d'un peu plus de quatre mille stades. Ces quatre mille stades ajoutés au nombre de stades qu'on trouve depuis Iernè jusqu'aux régions boréales font, en sus de l'étendue d'Iernè évaluée en stades, un total de sept mille huit cents stades à travers les terres inhabitables. Mais quand même on négligerait les quatre mille stades, les parties de la Bactriane qui confinent au Caucase seraient encore de trois mille huit cents stades plus au nord que Iernè, et plus au nord que la Celtique et le Borysthène de huit mille huit cents stades.
18. Hipparque dit aussi que, dans la région du Borysthène et dans la Celtique, la lumière du soleil brille durant toutes les nuits d'été, entourant le ciel du couchant au levant, et qu'au solstice d'hiver, le soleil s'y élève de neuf coudées au plus; et qu'à la distance de six mille trois cents stades de Massilia, c'est-à-dire encore chez les Celtes, à ce qu'il croit, mais, selon moi, chez les Bretons, à deux mille cinq cents'stades au nord de la Celtique, ce phénomène est bien plus considérable; que, pendant les jours d'hiver, le soleil s'élève à six coudées, à quatre dans les pays qui sont à neuf mille cent stades de Massilia, à moins de trois dans les contrées situées au delà, lesquelles, selon notre calcul, seraient beaucoup plus au nord que Iernè. Mais notre géographe, sur la foi de Pythéas, place cette région plus au nord dans la Bretagne, et il affirme que le jour le plus long y est de dix-neuf heures équinoxiales ; or il est de dix-huit heures aux lieux où la hauteur du soleil est de quatre coudées, lieux qu'il dit être à neuf mille cent stades de Massilia de cette façon, les pays les plus méridionaux de la Bretagne sont plus au nord que ceux-là. Ils sont donc sous le même parallèle que la Bactriane du Caucase, ou sous un parallèle approchant. Car il a été dit que les calculs de Déimaque ont pour résultat de mettre les Bactriens du Caucase à trois mille huit cents stades plus au nord que Iernè. Qu'on ajoute ces trois mille huit cents stades à ceux de la distance qui sépare Iernè de Massilia, et cela fait un total de douze mille cinq cents stades.
41. Disons dès à présent que Timosthène, Eratosthène et leurs devanciers ignoraient complètement ce qui regarde l'Ibérie et la Celtique, et mille fois plus encore ce qui se rapporte à la Germanie, à la Bretagne, comme aussi aux Gètes et aux Bastarnes. Ils en étaient réduits à une grande ignorance par rapport à l'Italie, à l'Adria, au Pont et aux contrées septentrionales qui viennent à la suite.
III. 1 Posidonius, en ajoutant les zones qu'il place sous les tropiques, ne les ajoute pas aux cinq autres d'après le même rapport, ni en s'appuyant sur une différence semblable ; mais c'est comme s'il les désignait par des distinctions ethnographiques, en nommant l'une Ethiopique, l'autre Scythique et Celtique, la troisième, intermédiaire.
4. (Posidonius raconte) que Eudoxe, ayant conjecturé que le périple de la Libye était possible, se rendit dans son pays, et repartit après avoir embarqué tout son avoir ; qu'il passa d'abord à Dicéarchie, puis à Massalie, et ensuite longea toutes les côtes jusqu'à Gadira.
IV. 2.... Selon Dicéarque, il y a dix mille stades du Péloponnèse aux Colonnes (d'Hercule), et davantage jusqu'au fond de l'Adrie; il assigne à la partie de ce trajet qui s'arrête au Détroit (de Sicile) une longueur de trois mille stades ; il reste donc sept mille stades pour aller du Détroit. aux Colonnes. Polybe dit qu'il admet ces trois mille stades, qu'ils y soient ou non ; mais pour les sept mille qui restent, il les rejette de toute manière, qu'on mesure le trajet en suivant la côte, ou en prenant par le milieu de la mer. La côte, dit-il, a la forme d'un angle obtus, aboutissant d'une part au Détroit, de l'autre aux Colonnes, et ayant son sommet à Narbonne, de façon à constituer un triangle ayant pour base la droite passant par la mer, et pour côtés les côtés formant l'angle en question : de ces côtés l'un, allant du Détroit à Narbonne, a plus de onze mille deux cents stades, et l'autre un peu moins de huit mille. Et certes, dit encore Polybe, la plus grande distance entre l'Europe et la Libye, en suivant la mer Tyrrhénienne, n'est pas, on en convient généralement, de plus de trois mille stades, et par la mer Sardonienne, elle comporte une réduction. Mais soit, dit-il; admettons cette distance de trois mille stades, il faut en déduire deux mille pour la profondeur du golfe de Narbonne, selon la perpendiculaire abaissée du sommet sur la hase du triangle obtusangle. Il est donc évident, dit-il, et un enfant ferait ce calcul, que toute la côte, du Détroit aux Colonnes, dépasse à peu près de cinq cents stades la longueur de la droite tirée à travers la mer. Qu'on ajoute les trois mille stades du Péloponnèse au Détroit, le total sera celui des stades de la droite indiquée, et de plus du double du nombre donné par Dicéarque : or, d'après lui, dit Polybe, il faudrait une plus grande distance (du Péloponnèse) au, fond de l'Adriatique.
3... La perpendiculaire non plus n'a pas été bien prise, puisque Narbonne est située à peu près sur le même parallèle que Massilia ; puisque celle-ci est sur le parallèle de Byzance, comme le croit Hipparque lui-même ; puisque la ligne passant par la pleine mer est sur le parallèle qui traverse le Détroit et Rhodes, et que de Rhodes à Byzance, en tant que ces deux villes sont sur le même méridien, la distance est, à ce qu'on dit, d'environ cinq mille stades, la longueur de ladite perpendiculaire devrait en avoir le même nombre. Comme aussi le plus long trajet d'Europe en Libye par cette mer est, à ce qu'on dit, à peu près de cinq mille stades, à partir du fond du golfe Galatique, il me semble que c'est là une assertion erronée, ou bien que la Libye en cette partie incline beaucoup en avant vers l'Ourse (le Nord) et atteint le parallèle passant par les Colonnes. - Et voici encore qui n'est pas bien dit, c'est que ladite perpendiculaire se termine dans le voisinage de la Sardaigne. Car ce n'est, pas dans ce voisinage, mais beaucoup plus au couchant que la Sardaigne que se fait ce trajet, s'écartant presque entièrement, dans l'intervalle, et de la mer Sardonienne et de la mer Ligystique. Les longueurs de la côte ont été exagérées, non pas toutefois dans la même mesure.
4. Ensuite il redresse les opinions d'Ératosthène, ici disant bien, et là plus mal que lui. Ainsi d'Ithaque à Corcyre, où Ératosthène mettait trois cents stades, Polybe dit qu'il y en a plus de neuf cents, d'Épidamne (34) à Thessalonicée. où le premier trouvait neuf cents stades, l'autre affirme qu'il y en a plus de deux mille, et cela est bien. Mais quand Ératosthène compte de Massilia aux Colonnes sept mille stades et six mille à partir des Pyrénées, s'il prétend, lui, qu'il y en a plus de neuf mille à partir de Massilia, et depuis les Pyrénées un peu moins de huit mille, il a tort, et Ératosthène est, dans son dire, plus près de la vérité. Car les géographes d'aujourd'hui conviennent qu'en retranchant les inégalités des chemins, la longueur de l'Ibérie n'est pas de plus de six mille stades en totalité, depuis les Pyrénées jusqu'au côté occidental. Or, il donne pour la longueur du Tage huit mille stades de la source de ce fleuve à son embouchure, sans tenir compte des détours, - autrement le procédé ne serait pas géographique, - mais suivant la ligne droite. Et cependant, entre les Pyrénées et les sources du Tage il y a une distance de plus de mille stades. En revanche, un fait bien évident, c'est qu'Ératosthène ne connaît pas l'Ibérie, et que, au sujet de cette contrée, ses opinions sont en contradiction évidente. Après avoir dit que les contours extérieurs de l'Ibérie sont habités par des Galates, puisque ces peuples occupent jusqu'à Gadira les régions occidentales de l'Europe, oubliant cette assertion dans sa description des contours de l'Ibérie, il ne fait plus nulle part mention des Galates...
V. 8. Le Massaliote Pythéas mentionne, il est vrai, comme étant tout à fait à l'extrémité de la terre, une contrée de Thulé, la plus septentrionale des régions bretonnes, où le tropique d'été est le même que le cercle arctique... Le parallèle de Byzance passant à peu près par Massilia, comme le dit Hipparque sur la foi de Pythéas, - il dit en effet qu'à Byzance le rapport de l'ombre au gnomon est le même que Pythéas indique pour Massilia, - et le parallèle du Borysthène étant éloigné de celui de Byzance de trois mille huit cents stades environ d'après la distance de Massilia à la Bretagne, le cercle du Borysthène devrait tomber quelque part en cette dernière contrée. Mais ce Pythéas, qui partout trompe les gens, a ici encore fait quelque mensonge. Car la ligne qui, partant des Colonnes, court vers le Détroit, vers Athènes et Rhodes, est située sur le même parallèle, c'est-un fait qui a été maintes fois reconnu ; il est reconnu aussi que la ligne qui passe entre les Colonnes et le Détroit coupe la mer par le milieu. Or, les navigateurs affirment que le plus long trajet de la Celtique à la Libye, à partir du golfe Galatique, est de cinq mille stades, que c'est là la plus grande largeur de la mer; donc la distance de la ligne en question au fond du golfe serait de deux mille cinq cents stades, et un peu moindre jusqu'à Massilia, attendu que Massilia est plus méridionale que le fond du golfe. Mais la distance de Rhodes à Byzance est d'environ quatre mille neuf cents stades ; le parallèle de Byzance est donc bien plus septentrional que celui de Massilia. La distance de cette ville à la Bretagne peut bien concorder avec celle de Byzance au Borysthène ; mais alors il n'est plus aisé de reconnaître à combien on évaluera celle de ce fleuve à Iernè, ni s'il y a encore au delà des terres habitables, et en s'en rapportant à ce qui a été dit ci-dessus, il n'y a pas à s'en occuper.
19... Puis (le golfe qui forme la mer intérieuré par le détroit d'Hercule) a l'aspect d'une grande mer. Il est borné du côté droit par les rivages de Libye jusqu'à Carchèdon (Carthage), et de l'autre côté, par celui de l'Ibérie et celui de la Celtique, vers les villes de Narbonne et de Massilia, puis par la côte Ligystique, et finalement par celle d'Italie jusqu'au détroit de Sicile. Le côté oriental de cette mer est formé par la Sicile et les détroits que présente de part et d'autre cette île; celui qui avoisine l'Italie, large de sept stades, l'autre qui confine à Carthage, de quinze cents. Or la ligne tirée, depuis les Colonnes jusqu'à ce détroit: de sept stades est une partie de celle qui aboutit à Rhodes, et au Taurus, et elle coupe à peu près par le milieu la mer dont nous parlons. Cette ligne est, dit-on, longue de douze mille stades, et c'est là justement la longueur de la mer. Sa plus grande largeur est de cinq mille stades, d'un point du golfe Galatique entre Massilia et Narbonne, à un point de la Libye, juste en face. On appelle toute la partie qui baigne la Libye, mer Libyque, et la partie qui est en face, mer d'Ibérie, mer Ligystique, mer Sardonienne, et finalement, jusqu'à la Sicile, mer Tyrrhénienne. Il y a des îles près du littoral de la mer Tyrrhénienne jusqu'à la Ligystique, et elles sont nombreuses. Les plus grandes sont la Sardaigne et la Corse, après la Sicile toutefois...
27. L'Europe, à l'examiner partie par partie, offre tout d'abord à l'occident l'Ibérie dont la forme est approchant celle d'une peau de boeuf, les parties cervicales tournées de manière à tomber sur la Celtique qui la continue; c'est-à-dire vers l'est, et par là se découpe le côté de l'Ibérie qui s'appuie aux monts appelé Pyrénées. Cette contrée est entourée par la mer, au midi (35), par notre mer jusqu'aux Colonnes, partout ailleurs par l'Atlantique jusqu'aux pointes septentrionales des Pyrénées. Sa plus grande longueur est de six mille stades environ, sa largeur de cinq mille.
28. Après l'Ibérie vient la Celtique à l'est, jusqu'au fleuve du Rhin ; son côté septentrional est baigné par le détroit breton tout entier : l'île en effet s'étend parallèlement en face sur une ligne de même longueur, d'environ cinq mille stades. Le côté oriental est circonscrit par le fleuve du Rhin, dont le cours est parallèle aux Pyrénées. Le côté du notus (sud) est formé par les Alpes, à partir du Rhin, puis par la mer même de chez nous, à l'endroit où s'enfonce le golfe appelé Galatique, avec les villes illustres bâties sur ses bords, Massilia et Narbonne. À l'opposite de ce golfe est situé un autre golfe appelé du même nom de golfe Galatique, mais regardant vers les Ourses et la Bretagne (36) : c'est là que la Celtique a le moins de largeur, car elle se réduit à un isthme ayant moins de trois mille stades et plus de deux mille. Au milieu s'élève une arête montagneuse, perpendiculaire aux Pyrénées, c'est la montagne appelée Cemméne qui vient mourir dans les plaines centrales des Celtes. Quant aux Alpes, qui sont des montagnes fort élevées, et décrivant une ligne courbe, la partie convexe de cette ligne est tournée vers lesdites plaines des Celtes et vers le mont Cemméne, et la partie concave vers la Ligurie et l'Italie. Ces montagnes (les Alpes) comprennent des peuples nombreux, tous Celtes, à l'exception des Ligures; ceux-ci sont sans doute d'une autre race,'mais ils se rapprochent beaucoup des Celtes par leur genre de vie. Ils habitent la partie des Alpes contiguë aux monts Apennins; ils occupent même une partie des monts Apennins : ces monts sont l'épine dorsale qui traverse l'Italie dans toute sa longueur, du nord au midi, et se termine au détroit de Sicile.
30. Au delà de l'Italie et de la Celtique, ce qui reste forme les régions orientales de l'Europe, coupées en deux par le fleuve Ister... En dedans des Colonnes... sont les petites îles... des Massaliotes et des Ligures....
... Dans l'intérieur (en Asie, la contrée en deçà de l'Halys renferme) la Phrygie de laquelle font partie le pays des Gallogrecs appelé Galatie, et l'Épictète.
LIVRE III, CH. I, II, III, IV.
Notions génerales : Les Celtes d'Ibérie et des Pyrénées.
I, 3. Cette montagne (les Pyrénées) forme une chaîne continue, qui, s'étendant du notus vers le borée (du S. au N.), sépare la Celtique de l'Ibérie. Or, la Celtique étant, comme l'Ibérie, de largeur variable, l'endroit le plus étroit de l'une et de l'autre, entre notre mer et l'Océan, est celui qui des deux parts se rapproche le plus des Pyrénées et forme des golfes tant dans l'Océan que dans la mer de chez nous. Mais les golfes celtiques qu'on appelle aussi golfes galatiques sont plus grands et rendent leur isthme plus étroit par rapport à celui de l'Ibérie. Le côté oriental de l'Ibérie est donc formé par les Pyrénées, le côté du sud par la mer de chez nous depuis les Pyrénées jusqu'aux Colonnes, et par la mer extérieure jusqu'au cap dit Sacré ; le troisième côté, le côté occidental, est à peu près parallèle aux Pyrénées, depuis le cap Sacré jusqu'à la pointe attenante au pays des Artabres, qu'on appelle Nérium ; le quatrième va de ce point aux extrémités septentrionales des Pyrénées...
6. L'Anas (37) tourne vers le notus, déterminant (38) une mésopotamie qu'habitent les Celtes (39) pour la majeure partie, et de plus, quelques peuplades des Lusitans...
II. 1. - À la Turdètanie se rattachent aussi les Celtiques d'au delà l'Anas...
2. Chez les Celtes, Conistorgis (40) est la ville la plus connue...
6. (Dans la Turdètanie), absence complète d'animaux nuisibles, mais il y a de petits lièvres qui se creusent des terriers; et que quelques-uns appellent Lébèrides; (ils sont nuisibles) en ce sens qu'ils gâtent les plantes, et les semis, dont ils rongent les racines. Ce fléau infeste presque toute l'Ibérie, et s'étend même jusqu'à Massilia.
8. Les Galates prétendent que chez eux se trouvent les mines les plus riches, celles qui sont dans le mont Cemméne et celles qui se trouvent au pied des Pyrénées.
9. (Posidonius dit que... l'étain... ) s'exporte des (îles) britanniques à Massilia.
11.... Artémidore contredisant (Ératosthène) prétend qu'il dit faussement... entre autres choses, que dans les parages septentrionaux de l'Ibérie, la navigation est plus commode que par l'Océan pour se rendre dans la Celtique, qu'il s'est trompé de même dans tout ce qu'il a avancé sur la foi de ce charlatan de Pythéas (41).
15. Cette heureuse nature du pays a eu pour conséquence une vie douce, civilisée, avantage commun aux Turdètans et aux Celtiques à cause du voisinage; ou, comme dit Polybe, à cause de leur parenté, mais bien moindre chez les derniers, parce qu'ils vivent dans des bourgades éparses..... Mais aujourd'hui se sont constituées des agglomérations urbaines, Pax-Augusta chez les Celtiques...
III. 5. Dans le voisinage du même (cap, appelé Nérium(42)), habitent aussi des Celtiques, de la même famille que ceux de l'Anas...
7. Dans la Bastètanie,... on se sert de vases de bois (43), comme chez les Celtes.
IV. 5... Si les Ibères avaient voulu unir leurs armes, il n'eût pas été possible aux Carchédoniens (Carthaginois) de les subjuguer après avoir envahi tout à leur aise la plus grande partie du pays ; cela n'eût pas été possible auparavant non plus aux Tyriens, ni ensuite aux Celtes, ceux que l'on appelle aujourd'hui Celtibères et Vèrons...
8... Jusqu'à Emporium (44) : cette ville est une création des Massaliotes, qui n'est qu'à quarante stades environ des Pyrénées, et des frontières de l'Ibérie vers la Celtique...
À Emporium, on honore Artémis d'Éphèse, nous en dirons la raison en parlant de Massilia.
10.... Par ces montagnes (du nord de l'Ibérie) passe la route qui de Tarracon (45) va à l'extrémité du pays des Vascons, sur l'Océan, à Pompelon et à Idanuse (46), ville bâtie sur l'Océan même : cette route est longue de deux mille quatre cents stades et aboutit aux frontières mêmes de l'Aquitanie et de l'Ibérie....
11. Le versant ibérique des Pyrénées est bien boisé; il y a des arbres de toute espèce et des arbres toujours verts; le versant celtique est nu.
1,2. ...Dans les contrées au nord des Celtibères habitent les Vèrons qui sont limitrophes des Cantabres Conisques et issus, eux aussi, de l'émigration celtique....
16... Cette coutume (de se laver, hommes et femmes, et de se frotter les dents avec de l'urine qu'ils ont laissée vieillir dans des réservoirs) et celle de coucher sur la dure sont communes aux Ibères et aux Celtes...
47 Dans la guerre des Cantabres , des mères tuèrent leurs enfants, avant qu'ils fussent pris, et un jeune garçon, dont les parents et les frères étaient prisonniers et enchaînés, les tua tous, sur l'ordre de son père, avec un fer dont il s'était emparé ; une femme en fit autant à tous ceux qui avaient été pris avec elle: : un autre captif, appelé par des soldats ivres, se jeta lui-même dans le feu d'un bûcher. Tous ces traits sont communs aux peuples Celtes, Thraces et Scythes.... Charmolaüs, Massaliote (hôte de Posidonius) ....
18... Dans la Cantabrie (47) (les Romains souffrant de la disette) tiraient leurs subsistances de l'Aquitainee, et cela à grand'peine, à cause de la difficulté des routes... 19... Les noms les plus illustres sont pour la plupart helléniques : ainsi nos devanciers appelèrent Ibérie toute la contrée au delà du Rhône et de l'isthme resserré entre les golfes Galatiques; aujourd'hui au contraire on donne les Pyrénées pour limite à ce pays.
LIVRE IV. CH. I, II, III, IV, V, VI.
SOMMAIRE. - Le quatrième livre comprend la Gaule et toutes les contrées que les Alpes séparent de l'Italie proprement dite.
I, 9 . A la suite (de l'Ibérie) et au delà des Alpes (par rapport à l'Italie) est la Celtique. La figure de ce pays a été précédemment retracée dans une simple esquisse, ainsi que son étendue. Maintenant il nous faut en parler en détail. Quelques-uns y distinguaient trois peuples, qu'ils appelaient Aquitains, Belges et Celtes, les Aquitains entièrement différents des autres, et non par la langue seule, mais par les formes corporelles, se rapprochant bien plus des Ibères que des Galates, les autres, bien Galates d'apparence, mais n'ayant pas tous la même langue, et quelques-uns présentant dans leur langage de légères différences. Leur gouvernement, leur genre de vie diffèrent aussi un peu. Ils appelaient donc Aquitains et Celtes les peuples voisins des Pyrénées, qui sont séparés par le mont Cemméne. Il a été dit, en effet, que cette partie de la Celtique est bornée à l'Occident par les monts Pyrénées, qui touchent aux deux mers, à la mer intérieure et à la mer extérieure ; à l'Orient, par le Rhin qui est parallèle aux Pyrénées. Les régions du Nord et du Midi sont comprises, les premières, entre l'Océan à partir de l'extrémité septentrionale des Pyrénées jusqu'à l'embouchure du Rhin; les autres, à l'opposite, entre la mer de Massilia et de Narbonne, et les Alpes, à partir de la Ligurie jusqu'aux sources du Rhin. Sur les Pyrénées, tombent à angles droits les monts Cemménes, qui traversent les plaines du centre; se terminent, dans le centre, près de Lugdunum, et ont une étendue d'environ deux mille stades. Ainsi on appelait Aquitains les habitants . des parties septentrionales ded Pyrénées et du Cemméne jusqu'à l'Océan, en deçà du fleuve Garonne, et Celtes, ceux qui s'étendent d'autre part vers la mer de Massilia et de Narbonne et qui atteignent certains points de la chaîne des Alpes ; on appelait Belges le reste des peuples riverains de l'Océan jusqu'aux bouches du Rhin et quelques-uns de ceux qui'habitent près du Rhin et des Alpes. C'est ce que dit le dieu César dans ses Commentaires. Mais Auguste César, ayant divisé le pays en quatre régions, déclara les Celtes partie intégrante de la province Narbonnaise, laissa les Aquitains comme au temps de son prédécesseur, en leur annexant quatorze des peuples qui habitent entre les fleuves Garonne et Loire; puis ayant divisé le reste (de la Gaule) en deux parties, il rattacha l'une à Lugdunum, avec le cours supérieur du Rhin pour limite, et l'autre aux Belges. Ainsi le géographe qui doit indiquer toutes les divisions physiques et ethnographiques, à condition encore qu'elles soient dignes de mémoire, peut se contenter de marquer sommairement les distributions diverses établies par les princes au gré d'une politique inspirée par les circonstances ; quant aux détails exacts, il faut les laisser à d'autres.
2. Tout ce pays est arrosé par des fleuves qui descendent, les uns des Alpes, les autres de la Cernménè et des Pyrénées, et qui se jettent, les premiers, dans l'Océan, les autres, dans notre mer. Les endroits qu'ils traversent sont en général des plaines ou des terrains dont la pente ménage aux eaux un cours favorable à la navigation. Puis, ces cours d'eaux se trouvent entre eux dans un si heureux rapport, qu'on passe aisément d'une mer dans l'autre, en charriant les marchandises sur un court espace et avec facilité, puisque c'est par des plaines ; mais le plus souvent, c'est bien la voie des fleuves que l'on suit, soit en montant soit en descendant. Le Rhône, à cet égard, présente quelque avantage ; car il reçoit, comme on l'a déjà dit (48), un grand nombre d'affluents; il se rattache à notre mer qui est bien autrement importante que la mer Extérieure, et il traverse la partie la plus fertile de ce pays. Toute la Narbonnaise, en effet, produit les mêmes fruits que l'Italie ; si au contraire l'on avance vers les Ourses et vers le mont Cemméne, l'olivier et le figuier font défaut, la terre n'est plus propice à ces plantes, mais les autres y viennent bien encore, si l'on avance davantage, la vigne ne réussit-elle plus aisément. Tout le reste du pays produit en abondance du blé, du millet, du gland et du bétail de toute espèce, nulle part le sol n'y étant inactif, si ce n'est dans les endroits où des marais et des bois empêchent toute culture. Et ces endroits-là mêmes sont habités aussi, grâce plutôt à la surabondance de la population. qu'à l'industrie des indigènes. Les femmes, en effet, y sont très fécondes et ce sont de bonnes nourrices, mais les hommes y sont plutôt guerriers qu'agriculteurs ; aujourd'hui pourtant qu'ils ont déposé les armes, ils sont forcés de cultiver la terre. Ce que nous disons ici convient à toute la Celtique extérieure ; maintenant prenons séparément chacune de ses quatre parties et parlons-en de manière à les décrire avec exactitude, en commençant par la Narbonnaise.
3. Cette province a à peu près la figure d'un parallélogramme tracé au couchant par les Pyrénées, du côté dés Ourses par le Cémméne ; les autres côtés sont formés, celui du midi par la mer entre les Pyrénées et Massilia, celui du levant par les Alpes en partie, et par une ligne passant tout droit entre les Alpes d'où elle prend, et les pentes du Cemméne dans la direction du Rhône, lesquelles font un angle droit avec ladite ligne qui part directement des Alpes. Au côté méridional s'ajoute pour terminer la figure en question le littoral qui vient à, la suite et qui est occupé par les Massaliotes et les Salyes jusqu'au pays des Ligures vers les confins de l'Italie et le fleuve du Var. Ce fleuve, comme je l'ai dit plus haut, est la limite de la Narbonnaise et de l'Italie : petit durant l’été, il a en hiver jusqu'à sept stades de largeur (49). Ainsi la côte s'étend de là jusqu'au temple d'Aphrodite Pyrènée (50) ; et ce point est la limite de la province en question et de l'Ibérique. Quelques-uns pourtant assignent le lieu où sont les trophées de Pompée, pour limite à l'Ibérie et à la Celtique. Or il y a de là (de l'Aphrodisium,) à Narbonne soixante-trois milles, d'ici (de Narbonne), à Némause (51) quatre-vingt-huit milles, de Némause , par Ugerne et Taruscon (52), aux Eaux-Chaudes, dites de Sextius, dans le voisinage de Massilia, cinquante-trois milles, enfin de là à Antipolis (53) et au fleuve du Var soixante-treize milles, ce qui fait en tout deux cent soixante-dix-sept milles. Quelques auteurs aussi ont compté de l'Aphrodisium jusqu'au Var deux mille six cents stades, d'autres en ajoutent encore deux cents ; car, on ne s'accorde pas sur les distances. Quant à l'autre route passant chez les Voconces. et par le pays de Cottius, elle ne fait qu'une avec la première: de Némause à Ugerne et à Taruscon ; de là aux frontières des Voconces et,au commencement de la montée des Alpes, en traversant le Druentias et Cavallion (54), elle mesure soixante-trois milles ; puis encore de ce point à l'autre frontière des Voconces, vers le pays de Cottius, au bourg d'Ebrodunum (55), cent milles moins un ; enfin il y en a encore autant pour aller, par les bourgs de Brigantium (56) et de Scingomagus (57) et par le col des Alpes, à Océle, où finit le pays de Cottius. À partir de Scingomagus, c'est déjà l'Italie, et de cette bourgade à Océle il y a vingt-huit milles.
4. Massilia est une création des Phocéens ; elle est située sur un sol pierreux; son port s'étend au-dessous d'un rocher en forme de théâtre, qui regardé le midi. Ce port est entouré de bonnes murailles, ainsi que la ville entière dont la grandeur est considérable. Dans la (ville) haute s'élèvent l'Ephésium et le temple d'Apollon Delphinien : ce dernier est commun à tous les Ioniens ; l'Ephésium est un sanctuaire dédié à Artémis d'Éphèse. Comme les Phocéens partaient de leur pays, un oracle, dit-on, leur fut donné, qui leur enjoignait de prendre pour guide la personne que leur aurait désignée Artémis d'Éphèse : s'étant donc rendus à Éphèse, ils s'enquirent des moyens d'obtenir de la déesse ce guide qui leur était imposé. Alors Aristarché, l'une des femmes les plus honorables du pays, vit en' songe la déesse qui, debout près d'elle, lui ordonnait de partir avec les Phocéens en emportant quelque représentation des choses consacrées à son culte. Cela s'étant fait et la colonisation achevée, les Phocéens érigèrent le sanctuaire, et décernèrent à Aristarché des honneurs extraordinaires, en la proclamant prêtresse (d'Artémis). Dès lors dans les villes, colonies de Massilia, on rendit partout les premiers honneurs à la même déesse, et pour la disposition de la statue comme pour les autres usages sacrés, on se fit une loi d'observer les mêmes rites que dans la métropole.
5.
Les Massaliotes ont un gouvernement aristocratique, et il n'y en a pas dont les
lois soient meilleures : ils ont établi un conseil de six cents membres qui
gardent cette dignité toute leur vie ; et qu'on appelle timuques. Ce conseil
est présidé par quinze membres à qui est attribuée l'administration des
affaires courantes : les Quinze sont à leur tour présidés par trois d'entre
eux qui ont la plus grande puissance, sous la direction d'Un seul. Nul ne peut
être timuque s'il n'a pas d'enfants, et si le titre de citoyen n'est pas dans
sa famille depuis trois générations. Les lois sont celles de l’lonie : elles
sont exposées en public. Le pays est planté d'oliviers et couvert de vignes,
mais il est bien pauvre en blé, à cause de sa sécheresse : aussi, ayant plus
de confiance dans la mer que dans la terre, les habitants ont-ils préféré les
ressources que leur offrait la navigation. Plus tard cependant, grâce à leurs
mâles vertus, ils purent s'emparer d'une partie des campagnes environnantes,
avec l'aide de cette même puissance militaire qui leur avait servi à fonder
des villes pour s'en faire des remparts. Les unes, du côté de l'Ibérie les
défendent contre les Ibères, à qui ils ont transmis même leur culte
national, - le culte d'Artémis d'Éphèse, - si bien que ce peuple sacrifie à
la manière des Hellènes, les autres, comme Rhoè (58),
Agathé (59), les protègent contre les Barbares
qui habitent le long du Rhône, ou, comme Taurôentium (60),
Olbie (61), Antipolis et Nicée, contre le peuple
des Salyes et contre les Ligures qui habitent les Alpes.
Les Massaliotes, ont encore des abris pour les vaisseaux et des magasins d'armes
: auparavant il y avait chez eux, en quantité et toujours prêts, des navires,
des appareils, des machines pour armer les vaisseaux et assiéger les villes :
ils avaient pu ainsi tenir tête aux Barbares et gagner l'amitié des Romains,
en se mettant à même de leur rendre tant de services que ceux-ci aidèrent
volontiers à l’accroissement de la puissance des Massaliotes. Ainsi Sextius,
celui qui défit les Salyes, ayant fondé non loin de Massilia une ville dont le
nom, qui est le sien; rappelle aussi ces eaux chaudes devenues, dit-on, en
partie froides, y établit une garnison romaine et chassa du littoral, à partir
de Massilia jusqu'en Italie, les Barbares que les Massaliotes n'avaient pu en
expulser tout à fait. Lui-même, n'obtint guère d'autre résultat que de
refouler, les Barbares à douze stades de la mer dans les parties où les côtes
sont abordables, et à huit seulement, là où elles sont abruptes. Mais le
terrain abandonné par les indigènes, il le livra aux Massaliotes. On voit
encore, dans la ville où elles sont exposées, un grand nombre des dépouilles
conquises par les habitants dans des batailles navales contre tous les rivaux
qui leur disputaient injustement la mer. C'est ainsi que jadis ils jouirent
d'une prospérité extraordinaire à tous égards, et, particulièrement en ce
qu'ils gagnèrent l'amitié des Romains, dont on pourrait trouver maintes
preuves : ainsi, il y a sur l'Aventin une statue d'Artémis qu'y érigèrent les
Romains, et elle est disposée comme celle qui est chez les Massaliotes. Mais au
temps, de la lutte de Pompée contre César, ce peuple, s'étant attaché au
parti qui fut vaincu, perdit la plus grande part de sa prospérité. Pourtant il
reste encore chez lui des traces de ses anciens goûts, particulièrement pour
la construction des machines et pour les armements maritimes. Mais comme les
Barbares du haut pays d'alentour s'apprivoisent sans cesse, et, grâce à la
domination romaine, ont déjà abandonné la guerre pour la vie civile et
l'agriculture, l'application aux travaux dont nous parlons ne saurait plus être
aussi grande chez les Massaliotes, on le voit bien à l'esprit qui aujourd'hui y
règne : tous les gens distingués s'y portent vers l'éloquence et la
philosophie, si bien que leur ville, qui depuis peu était- devenue une école
ouverte aux Barbares, et avait rendu les Galates philhellènes au point de
rédiger leurs contrats en langue hellénique, a présentement persuadé aux
plus illustres des Romains de renoncer au voyage d'Athènes et de venir à
Massilia pour l'amour de l'étude. Les voyant agir ainsi, et d'ailleurs
résignés à la paix ; les Galates consacrent avec plaisir leur temps à de
pareils genres de vie, et ce n'est pas là un caprice individuel, mais le goût
public. Aussi font-ils bon accueil à nos sophistes qui, comme les médecins,
reçoivent chez eux un riche salaire soit des particuliers, soit des villes.
Mais'il y a toujours dans les habitudes des Massaliotes de la simplicité et de
la modestie, et l'usage que voici n'est pas la moindre preuve que l'on en
pourrait donner : la plus grosse dot est chez eux de cent pièces d'or, plus
cinq pièces pour les vêtements et cinq antres pour les parures d'orfèvrerie :
on ne permet pas davantage. - César et les princes qui sont venus après lui,
en souvenir de l'amitié des Romains pour Massilia, ont apprécié avec mesure
les fautes commises durant la guerre, et ont conservé à cette ville
l'autonomie dont elle avait joui dès l'origine. Ainsi elle n'obéit pas, non
plus que les peuples qui sont sous son obéissance, aux préfets envoyés dans
la province. - Voilà ce qu'on peut dire au sujet de Massilia.
6. En même, temps que la montagne des Salyes, se détournant du couchant, incline davantage vers l'Ourse et s'éloigne peu à peu de la mer, la côte s'infléchit dans le sens de l'ouest; mais à quelque distance de la ville des Massaliotes, à cent stades environ en avant, vers un grand promontoire voisin de certaines carrières, elle commence de se creuser, pour former avec l'Aphrodisium, pointe des Pyrénées, le golfe Galatique, qu'on appelle aussi Massaliotique. Ce golfe est double. Car, déterminant deux golfes dans la même courbe, se projette le mont Sétium (62), qui emprunte aussi l'île Blascon (63) située dans le voisinage. De ces deux golfes le plus grand s'appelle proprement Galatique ; c'est celui où vomit la bouche du Rhône ; le plus petit est celui de Narbonne, qui s'étend jusqu'aux Pyrénées. Narbonne, située au-dessus de l'embouchure de l'Atax (64) et de l'étang Narbonitide (65), est le plus grand marché de ces contrées. Toutefois sur le Rhône se trouve une ville et un marché qui n'est pas sans importance, c'est Arelate (66). Ces deux marchés sont à peu près aussi éloignés l'un de l'autre que des promontoires que nous avons nommés, - aussi éloignés que Narbonne l'est de l'Aphrodisium et Arelate de Massilia. De chaque côté de Narbonne passent d'autres cours d'eau qui viennent les uns des monts Cemménes, les autres des Pyrénées, ayant sur leurs bords des villes où de petites embarcations peuvent remonter sans avoir à faire un long trajet. Ceux qui viennent des pyrénées sont le Ruscinon (67) et l'Iliberris (68) qui ont chacun sur leurs bords une ville du même nom (69). Dans le voisinage du Ruscinon se trouve un étang et un terrain humide, un peu au-dessus de la mer, rempli de sources salées, et dans lequel en creusant on prend des muges. On creuse à cet effet un trou de deux ou trois pieds, on enfonce un trident dans l'eau bourbeuse et il arrive qu'on harponne ainsi un de ces poissons d'une belle taille; car les muges se nourrissent de vase comme les anguilles. Ces fleuves, qui descendent des Pyrénées, passent entre Narbonne et l'Aphrodisium; de l'autre côté de Narbonne sont ceux qui, venant du Cemméne, se jettent dans la mer : de cette montagne descendent l'Atax (70), l'Orbis (71) et l'Arauris (72) : sur le premier est située Bæterra (73), ville forte, voisine de Narbonne, sur le second Agathè (74), fondation des Massaliotes.
7.
La côte ci-dessus décrite présente sans doute quelque chose d'incroyable dans
le fait de ces poissons qu'on déterre ; elle offre une autre particularité
peut-être plus remarquable encore et dont nous allons parler. Entre Massila et
les bouches du Rhône il y a une plaine qui est à cent stades de la mer, et
dont le diamètre en mesure autant; elle est de forme circulaire. On l'appelle
la Plaine de pierres (75), en raison du phénomène
qui s'y est produit. Elle est en effet remplie de pierres grosses comme le
poing, sous lesquelles croît l'agrostis, plante qui fournit aux troupeaux une
abondante pâture. Au milieu séjournent des eaux, des mares salées, des
dépôts de sel. Toute cette plaine et le pays au-dessus sont exposés aux vents
; mais celui qui y règne surtout est la bise noire qui y déchaîne son souffle
violent et glacial. On dit même qu'elle entraîne et roule une partie des
pierres, qu'elle jette les hommes à bas de leurs chariots et que la force du
vent les dépouille de leurs armes et de leurs vêtements. Aristote dit que ces
pierres, arrachées par quelques-uns de ces tremblements de terre appelés
brastes, ont été rejetées à la surface et ont roulé dans les creux de ces
terrains. Selon Posidonios, il y avait un lac qui, par suite d'une fluctuation
violente, s'est desséché; les pierres du fond ont été ainsi brisées en
plusieurs morceaux qui, comme les cailloux des fleuves et les galets des
rivages, sont semblables, polis, et, outre leur ressemblance, d'égale grosseur
(76). Les deux savants ont donné l'explication de
tous ces détails ; elle est plausible chez l'un comme chez l'autre ; car il
faut bien que des pierres ainsi constituées, non pas par elles-mêmes, aient
changé de nature et passé du liquide au solide, ou bien qu'elles se soient
détachées de grands rochers qui subirent des cassements continus. Toutefois
Eschyle, qui avait observé cette particularité, ou qui l'avait apprise de
quelque autre, la trouvant difficile à expliquer, la relégua dans le domaine
de la fable. Voici ce que chez lui Prométhée dit à Héraclès en traçant au
héros sa route du Caucase aux Hespérides :
Tu trouveras sur. ton chemin l'intrépide armée des Ligures, et, je le sais, si
brave que tu sois, tu verras là des combattants sans reproche; c'est le destin
que les traits te feront défaut en cet endroit; quant à prendre des pierres
sur le sol; impossible, car tout ce terrain est mou. Te voyant dans l'embarras,
Zeus aura pitié de toi :étendant sous (le ciel) une nuée, d'une grêle de
cailloux ronds il couvrira la terre, et toi, de ces armes, frappant (tes
ennemis) tu disperseras facilement l'armée Ligure.
Comme s'il n'eût. pas mieux valu, dit Posidonius, jeter ces pierres sur les
Ligures eux-mêmes et les en écraser tous, que de représenter Héraclès ayant
besoin de tant de pierres (contre ses ennemis). Mais en vérité il lui en
fallait bien autant, puisqu'il avait contre lui une foule innombrable ; en sorte
que sur ce point le mythographe mérite plus de créance que celui qui réfute
son mythe (sa fable). Pour le reste, le poète ayant allégué un arrêt du'
destin, il ne prête pas davantage aux chicanes de la critique ; et en effet,
qu'on raisonne sur la providence et sur le destin, on trouvera à propos des
choses humaines et des phénomènes naturels bien des occasions semblables
d'affirmer qu'il valait mieux que ceci fût et non pas cela; par exemple, que
l'Égypte eût des pluies abondantes au lieu d'être abreuvée par l'Éthiopie ;
que Pâris, voguant vers Sparte, se perdît dans un naufrage, au lieu d'enlever
Hélène et d'être trop tard puni de son crime par ceux qu'il avait offensés,
après avoir causé la destruction de tant d'hommes, Hellènes et Barbares; ce
qu'Euripide a rapporté à Zeus :
Ce malheur pour les Troyens, ces souffrances pour l'Hellade, Zeus, voulant les
leur infliger, en avait ainsi. décidé.
8. Au sujet des bouches du Rhône, Polybe censure Timée et prétend que ce fleuve n'a pas cinq bouches, mais deux : Artémidore dit qu'il en a trois. Plus tard Marius, voyant les bouches du fleuve s'aveugler par suite des atterrissements, et l'entrée en devenir difficile, creusa un nouveau canal qui, reçût la plus grande partie des eaux du Rhône, et le concéda aux Massaliotes comme prix de leur valeur dans la guerre contre les Ambrons et les Toygénes. Ce fut pour eux une source de grandes richesses, produites par les droits qu'ils font payer à ceux qui remontent ou descendent le fleuve. Toutefois la navigation reste difficile, à cause de la rapidité dut courant, des atterrissements et du peu d'élévation du sol qu'on n'aperçoit pas, même de près, par les temps brumeux. Aussi des tours servant de signaux y ont- elles été élevées par les Massaliotes, qui se sont ainsi de toute manière approprié le pays. En outre, ils ont bâti un temple d'Artémis Éphésiénne, dans le même endroit, où ils ont choisi pour emplacement une île formée par les bouches du fleuve. Au-dessus des embouchures du Rhône se trouve un étang marin, qu'on appelle Stomalimnè, qui fournit en grande quantité des huîtres et d'autres mets excellents. Quelques-uns ont compté cet étang parmi les bouches du Rhône ; ce. sont ceux-là surtout qui affirment que le fleuve a sept bouches, mais ils se trompent en ceci comme en cela ; car il y a une montagne qui sépare le fleuve de l'étang. Voilà quelle est la nature et quelle est l'étendue de la côte depuis les Pyrénées jusqu'à Massilia.
9. Celle qui s'étend vers le fleuve du Var et vers les Ligures, qui l'avoisinent, présente les villes massaliotes de Tauroentium (77), d'Olbie (78), d'Antipolis (79) et de Nicée (80), avec la station navale créée par César-Auguste et appelée le For Jules (81). Cette station est située entre Olbie et Antipolis, à six cents stades de Massilia. Le Var est dans l'intervalle qui sépare Antipolis et Nicée, mais environ à vingt stades de l'une et à soixante de l'autre, de sorte que d'après les limites aujourd'hui officielles, Nicée se trouve être en Italie, bien qu'appartenant aux Massaliotes. Ces villes, en effet, ont été bâties, pour arrêter les Barbares du haut pays, par les Massaliotes qui voulaient au moins avoir la mer libre, si ces Barbares étaient les maîtres de la terre. Dans cette région, tout est montagnes et pentes abruptes : pourtant tout près de Massilia, il s'en dégage une plaine d'une largeur raisonnable ; mais en avançant vers l'est, la montagne la resserre du côté de la mer et y laisse à peine assez d'espace pour une route praticable. Les abords en sont occupés par les Salyes, et à l'endroit où elle finit, habitent les Ligures dont le territoire est contigu à l'Italie, et dont il sera parlé dans la suite.. Seulement il faut ajouter ceci dès à présent : bien qu'Antipolis soit dans les limites de la Narbonnaise et Nicée dans celles de l'Italie, la dernière demeure soumise aux Massaliotes et fait partie de la province , et l'autre est rangée parmi les villes italiennes, en vertu d'un arrêt rendu contre les Massaliotes, lequel l'a affranchie de leur domination.
10. Devant ces passages étroits s'étendent, à partir de Massilia, les îles Stoechades (82), trois assez considérables et deux petites : les Massaliotes les cultivent. Anciennement même ils y entretenaient une garnison pour repousser les agressions des pirates; ils y avaient nombre de bons ports. Après les Stoechades viennent Planasie (83) et Lèron (84), avec des habitations. Dans l'île de Lèron, il y a même un héroon, celui du héros Lèron. Elle est située devant Antipolis. Il y a encore d'autres petites îles, qui ne méritent pas une mention : elles sont les unes en face de Massilia même, les autres devant quelque autre point de la côté ci-dessus décrite. Quant aux ports, celui de la station navale est considérable ; celui des Massaliotes aussi ; les autres sont de moyenne grandeur parmi ces derniers se trouve celui qu'on appelle Port Oxybius (85), du nom des Ligyes Oxybies. Voilà ce que nous disons de cette côte.
11. Quant à la contrée qui s'étend au-dessus, ce qui détermine surtout son caractère géographique, ce sont les montagnes qui l'environnent et ses fleuves, principalement le Rhône, le plus grand de tous, celui qu'on remonte le plus haut, comme étant grossi par une multitude de cours d'eau ; il faut donc traiter ce sujet avec méthode. À partir de Massilia, si l'on avance dans le pays compris entre les Alpes et le Rhône jusqu'au fleuve Druentias (86), on trouve les Salyes qui occupent un territoire de cinq cents stades. Le bac vous passe à Cavallion (87), et tout le pays qui suit est celui des Cavares jusqu'à la rencontre de l'Isar (88) et du Rhône. Là le Cemméne se rattache en quelque sorte au Rhône. Du Druentias (la Durance) jusqu'à cet endroit la distance est de sept cents stades. Les Salyes donc, dans leurs limites, occupent les plaines et les montagnes au-dessus. Les Cavares, au contraire, ont au-dessus d'eux les Voconces, les Tricoriés, les Iconies et les Médulles. Entre le Druentias (la Durance) et l'Isar (l’Isère), il y a d'autres fleuves qui descendent des Alpes dans le Rhône ; deux baignent la ville des Cavares et, réunis en un seul cours d'eau, se jettent dans le Rhône ; le troisième, le Sulgas (89), qui se mêle au Rhône près de la ville d'Undale (90), à l'endroit où, dans une grande-bataille, Gn. Aénobarbus mit en déroute plusieurs myriades de Celtes. Dans ce même espace (entre les deux fleuves), il y a plusieurs, villes, Avénion, Arausion et Aérie, bien aérienne de fait, dit Artémidore, vu sa situation à une grande hauteur. Tout le pays est en plaines et en pâturages, mais d'Aérie (91) à Luérion (92) il présente des cols étroits et boisés. À l'endroit où se rencontrent l'Isar (l’Isère), le Rhône et le mont Cemméne, Q. Fabius Maximus Aemilianus, avec moins de trente mille hommes, tailla en pièces vingt myriades de Celtes : il dressa sur le lieu même un trophée en marbre blanc, et deux temples consacrés l'un à Arès (Mars), l'autre à Héraclès (Hercule). - De l'Isar à Vienne, métropole des Allobroges, située sur le Rhône, il y a trois cent vingt stades. Dans le voisinage et au-dessus de Vienne se trouve Lugdunum (93) à l'endroit où se mêlent le Rhône et l'Arar (94). Jusque-là, à pied, à travers le pays des Allobroges, il y a environ deux cents stades ; en remontant le fleuve, il y a un peu plus. Les Allobroges autrefois mettaient en campagne plusieurs myriades de combattants, aujourd'hui ils cultivent, avec leurs plaines, les vallons des Alpes. Généralement ils vivent dans des bourgades éparses ; cependant les plus notables habitent Vienne, simple bourgade aussi d'abord, bien qu'elle fût qualifiée de métropole dé la nation, et ils en ont fait une ville. Elle est située sur le Rhône. Ce fleuve sort des Alpes déjà si gros et si fort que, tandis qu'il traverse le lac Lèmennè (95), on voit bien distinctement ses eaux sur un espace de plusieurs stades. Descendant dans le pays des Allobroges et des Ségosians, il rencontre l'Arar (la Saône) à Lugdunum (Lyon), ville des Ségosians. L'Arar, qui vient aussi des Alpes, sert de limite aux Séquanes, aux Eduens et aux Lincasies. Ayant reçu ensuite le Dubis (96), qui, descend des mêmes montagnes, et qui est navigable, son nom domine; les deux fleuves réunis sont toujours l’Arar (la Saône) qui se mêle avec le Rhône. Mais à son tour c'est le Rhône qui domine et qui court sur Vienne. Il arrive ainsi que les trois fleuves en commençant se portent vers l'Ourse (le Nord), puis vers le couchant, qu'enfin l'unique cours d'eau formé par leur réunion ayant fait un autre coude, dirige ses eaux vers le midi jusqu'à son embouchure, après avoir reçu plusieurs autres rivières, et de là sans dévier continue sa course jusqu'à la mer. Telle est la contrée qui se trouve entre les Alpes et le Rhodan.
12. De l'autre côté du fleuve la plus grande partie du pays est occupée par les Volces qu'on appelle Arècomisces. Narbonne est, dit-on, leur port, il serait plus juste de dire qu'elle est aussi celui du reste de la Celtique, tant cette ville surpasse les autres par le nombre de ceux qui fréquentent son marché. Les Volces sont voisins du Rhône, et ils ont devant eux les Salyes qui s'étendent sur la rive opposée, et les Cavares. Le nom des Cavares y domine même, et déjà l'on appelle ainsi tous les Barbares de cette contrée ; je dis Barbares, ils ne le sont plus; ils se sont modelés sur les Romains presque en tout, langue, moeurs, vie publique même chez quelques-uns. Il y a d'autres peuples petits et sans nom qui habitent à côté des Arècomisces jusqu'aux Pyrénées. La métropole des Arècomisces est Némause (97), qui pour l'affluence des étrangers et des marchands le cède à Narbonne, mais l'emporte beaucoup sur elle comme centre politique. Elle tient en effet sous sa dépendance vingt-quatre bourgs, qui ont une population considérable, de même race, et qui payent leur part de contributions; en outre, elle jouit du droit dit latin, et en conséquence ceux qui à Némause (Nîmes) ont été honorés de l'édilité et de la questure, par ce fait deviennent Romains. Pour la même raison cette population n'est pas soumise aux ordres des préfets envoyés de Rome .La ville est, située sur la route même qui va d'Ibérie en Italie, route facile en été, mais, en hiver et au printemps, fangeuse et inondée par les rivières. On passe bien quelques-uns de ces cours d'eau à l'aide de bacs, d'autres, sur des ponts de bois ou de pierre; mais les difficultés résultant des eaux viennent des torrents qu'on voit parfois jusqu'à la saison de l'été descendre des Alpes après la, fonte des neiges. La route dont nous parlons a deux branches, l'une, qui mène directement aux Alpes, comme nous l'avons dit, c'est la route abrégée ; elle traverse le pays des Voconces ; l'autre, qui suit la côte massaliote et ligure, est plus longue, mais elle offre, pour pénétrer en Italie, des cols plus faciles, parce qu'à partir de là les montagnes s'abaissent. De Némause (Nîmes) au Rhône la distance est d'environ cent stades, à la prendre de la petite ville de Taruscon, sur la rive opposée, à sept cent vingt stades de Narbonne. Limitrophes du Cemméne, occupant même tout le versant méridional de la montagne jusqu'à ses extrémités, se trouvent ceux de Volces qu'on appelle Tectosages, et avec eux quelques autres peuples dont nous parlerons ci-après.
13. Ceux qu'on appelle Tectosages sont voisins des pyrénées ; ils atteignent même sur quelques points le versant septentrional des Cemménes ; la terre qu'ils habitent est riche en or. Ils semblent avoir eu autrefois, avec une grande puissance; une population mâle assez considérable pour pouvoir, à la suite d'une sédition, expulser du pays une multitude de ses habitants. Dans cette foule se confondirent d'autres bannis de diverses nations : de ce nombre étaient ceux qui occupèrent la Phrygie limitrophe de la Cappadoce et de la Paphlagonie : ceux qu'on appelle encore aujourd'hui Tectosages nous en offrent la preuve. Il y a en effet, dans ce pays, trois peuples, et l'un d'eux, celui qui habite Ancyre (98) et les environs de cette ville, est celui qu'on appelle Tectosages; les deux autres sont les Trocmes et les Tolistobogies : ils ont émigré aussi de la Celtique, leur parenté avec les Tectosages le montre. Mais de quelles contrées sont-ils sortis? Nous ne le pouvons dire, car il n'y a point présentement, que nous sachions, de Trocmes ni de Tolistobogies parmi les nations qui habitent au delà, au milieu ou en deçà des Alpes. Il est probable qu'ils disparurent par suite de fréquentes migrations, comme il est arrivé pour plusieurs autres. Ainsi l'autre Brennus, celui qui attaqua Delphes, au dire de quelques auteurs, était un Prause ; eh bien, nous ne saurions dire où habitèrent autrefois les Prauses. On dit que les Tectosages faisaient partie de l'expédition contre Delphes, et que les trésors trouvés par le général romain Cæpion chez eux, dans la ville de Tolosse (99), étaient une partie des richesses qui provenaient de ce pillage ; on dit aussi que ces gens-là y avaient ajouté des offrandes tirées de leurs propres maisons, pour les consacrer au Dieu et apaiser sa colère. Cæpion, pour avoir mis la main sur ces trésors, aurait fini sa vie dans la misère, ayant été rejeté par sa patrie comme sacrilège et ayant laissé pour héritières des filles qui, à ce que rapporte Timagène, condamnées à la prostitution, moururent dans la honte. La version de Posidonius est plus croyable : suivant lui, les richesses trouvées à Tolosse se montaient à quelque chose comme quinze mille talents, tant celles qui avaient été déposées dans les sanctuaires que celles-qui avaient été jetées dans les lacs sacrés : c'étaient des matières qui n'avaient reçu aucune façon, de l'or et de l'argent bruts; le temple de Delphes; en ces, temps-là, était déjà dépourvu de pareils trésors, pour avoir été pillé par les Phocidiens pendant la guerre sacrée. S'il y était resté quelque chose, bien d'autres mains se l'étaient partagé. Il n'était pas probable que ces étrangers fussent rentrés sains et saufs dans leur pays, étant tombés, après leur retraite de Delphes, dans la misère, et s'étant dispersés, les uns d'un côté, les autres de l'autre, à cause de leurs dissensions. Mais, dit Posidonius et bien d'autres avec lui, comme la contrée est riche en or, que les habitants sont superstitieux et n'ont rien de somptueux dans leur genre de vie, il s'y était formé en maints endroits des trésors. Les lacs avaient été pour eux des lieux particulièrement sûrs où ils jetaient leur argent ou même leur or en lingots. Les Romains donc, s'étant rendus maîtres du pays, vendirent ces lacs comme parties du domaine de l'État, et plusieurs de ceux qui en avaient acheté y trouvèrent des masses d'argent battu, en forme de meules. À Tolosse (Toulouse), le temple était sacro-saint, profondément vénéré des peuples d'alentour : de là les richesses qui s'y étaient accumulées, en raison du grand nombre des offrandes et de la crainte qui empêchait d'y toucher.
14. Tolosse (100) est située dans la partie la plus resserrée de l'isthme qui de la mer de Narbonne sépare l'Océan, et, selon Posidonius, a moins de trois mille stades. Une chose qui mérite autant que toute autre d'être signalée, et dont nous avons déjà parlé, c'est la concordance parfaite qu'il y a entre le pays, ses fleuves et, pareillement, ses deux mers, extérieures et intérieure. On trouverait, en effet, en y faisant attention, que ce n'est pas là ce qui contribue le moins à l'excellence de ce pays ; je veux dire que, grâce à cette circonstance, les rapports utiles à la vie s'y établissent aisément entre tous les peuples, et qu'il en résulte pour eux des avantages communs, aujourd'hui surtout qu'une existence paisible ayant succédé à des moeurs guerrières, ils. travaillent la terre avec soin et se façonnent aux habitudes de la vie civile. Aussi, en présence de pareils objets, pourrait-on croire que l'action de la Providence se manifeste dans une disposition des lieux, qui ne serait pas un effet du hasard, mais le résultat d'une sorte de calcul. Le Rhône peut être remonté très haut même par des bateaux pesamment chargés, qui pénètrent dans plusieurs parties du pays, parce que les rivières qui se jettent dans ce fleuve sont navigables et capables de charrier les plus lourds fardeaux. L'Arar (la Saône) les reçoit d'abord, puis le Dubis (le Doubs), affluent de l'Arar : transportés ensuite par terre jusqu'au fleuve Sécoanas, ils descendent de là tout droit vers l'Océan, chez les Lexovies et les Calétes, d'où, pour passer en Bretagne, il faut moins d'une journée. Mais, comme le Rhône est rapide et difficile à remonter, certaines marchandises de ces contrées sont expédiées par terre sur des chariots : ce sont celles à destination du pays des Arvernes et des rives de la Loire. On préfère cette voie, bien qu'en certains points le Rhône se rapproche de ces régions ; mais la route étant en plaine et peu longue - huit cents stades environ -invite à ne pas user de la navigation en amont du Rhône, vu la plus grande facilité du voyage par terre. - A partir de là succède fort à point la Loire qui des Cemménes coule vers l'Océan. De Narbonne on remonte un peu l'Atax (101), puis on fait par terre, jusque la Garonne, un trajet plus long, - de sept ou huit cents stades à peu près. La Garonne coule aussi vers l'Océan. Voilà ce que nous disons des peuples qui habitent le gouvernement dela Narbonnaise, et qu'autrefois on nommait Celtes. Or, c'est, je crois, de ces peuples que vient le nom de Celtes donné par les Hellènes aux Galates en général à cause de son illustration, ou parce que les Massaliotes l'avaient adopté , et pour cette raison et à cause du voisinage.
II. I . Il faut parler dès à présent de l'Aquitaine et des quatorze peuples qui y ont été annexés, lesquels habitent entre la garonne et la Loire et occupent, quelques-uns du moins, la vallée du Rhône et les plaines de la Narbonnaise (102). À vrai dire, les Aquitains diffèrent de la race galate et par leur constitution corporelle et par leur langage; ils ressemblent davantage aux Ibères. Ils ont pour limite la Garonne et habitent entre ce fleuve et les Pyrénées. Les peuples Aquitains sont au nombre de vingt, mais pour la plupart petits et inconnus; les uns sont voisins de l'Océan, les autres s'avancent dans l'intérieur des terres jusqu'aux extrémités des monts Cemménes et au pays des Tectosages. Vu le peu d'étendue de ce département réduit à ces limites, on y à ajouté le pays, compris, entre la Garonne et la Loire; ces deux fleuves, à peu près parallèles aux Pyrénées, forment avec elle deux parallélogrammes dont les autres côtés sont déterminés par l'Océan et les monts Cemménes : le cours de chacun des deux fleuves est à peu près de deux mille stades. La Garonne, après avoir été grossi des eaux de trois rivières, se jette dans l'Océan entre le pays des Bituriges surnommés Oïsces et celui, des Santons, deux peuples de race galate. Les Bituriges Vivisces sont le seul peuple étranger qui soit établi chez les Aquitains, mais ils ne sont pas avec eux en communauté d'intérêts ils ont pour marché Burdigale (103), ville située sur une sorte de lac marin que forme le fleuve à son embouchure. - La Loire débouche entre les Pictons et les Namnites. Autrefois sur ce fleuve se trouvait Corbilon (104), un autre marché dont Polybe a parlé en rappelant tous les contes débités par Pythéas : des Massaliotes auraient eu un entretien avec Scipion et pas un d'entre eux n'aurait pu faire à ses questions sur la Bretagne une réponse digne d'attention. Ceux de Narbonne et ceux de Corbilon ne l'auraient pas pu davantage , et pourtant c'étaient les principales villes de ces contrées. Voilà jusqu'où Pythéas poussait l'impudence du mensonge. - La ville des Santons est Médiolanium (105). Dans la région parocéanique de l'Aquitaine, le terrain, presque partout sablonneux et maigre, ne donne aux habitants pour nourriture que le millet, étant peu fertile en autres céréales. C'est là aussi que se trouve le golfe qui avec celui de la côte narbonnaise, appelé Galate, forme l'isthme pyrénéen et porte aussi le même nom. Les bords en sont occupés par les Tarbelles (106) qui ont chez eux les mines d'or les plus considérables. Dans des puits creusés à peu de profondeur on trouve des plaques d'or grosses à remplir la main, qui parfois n'ont besoin que d'être un peu épurées ; d'ordinaire ce sont des paillettes et des pépites qui n'exigent pas non plus un grand travail (d'affinage). À l'intérieur et dans la montagne, le terrain est meilleur, surtout près des Pyrénées, chez les Convénes (107), comme qui dirait chez les Synèlydes, où se trouvent une ville du Lugdunum (108) et les thermes des Onésies (109), dont les eaux sont excellentes à boire. Le pays des Auscies (110) est aussi très bon.
2. Entre la Garonne et la Loire, les peuples qui ont été réunis aux Aquitains sont, les Elves (111) à partir du Rhône ; après eux, les Vellaïes (112) qui jadis étaient rattachés aux Arvernes et qui aujourd'hui se gouvernent par eux-mêmes ; puis. les Arvernes, les Lémovices et Pétrocories (113) près de ces derniers, les Nitiobriges (114), les Cadurces (115) et les Bituriges appelés Cubes (116); près de l'Océan, les Santones et les Pictons, habitant, comme nous l'avons dit, les uns les rives de la Garonne , les autres, celles de la Loire; enfin, les Rutènes (117) et les Gabâles (118) qui sont voisins de la Narbonnaise. - Chez les Pétrocories, comme chez les Cubes Bituriges, il y a pour le travail du fer des usines bien montées ; chez les Cadurces, des fabriques de toiles de lin, et des mines d'argent chez les Rutènes ; il y en à aussi chez les Gabales. - Les Romains ont accordé le droit latin à quelques-uns des Aquitains, comme aux Auscies et aux Convénes (119).
3. Les Arvernes sont établis sur la Loire : leur métropole Némossus (120) est située sur ce fleuve, qui passe ensuite à Cènabum (121), le marché des Carnutes (122); à peu près au milieu de son cours et se jette dans l'Océan. - Les Arvernes donnent comme une grande preuve de leur ancienne puissance les guerres qu'ils ont faites maintes fois aux Romains, avec des armées fortes de vingt myriades d'hommes et même du double. Telle fut, en effet, celle qui combattit avec Vercingétorix contre le dieu, César. Auparavant ils étaient bien vingt myriades contre Maximus Aemilianus et autant contre Domitius Aénobarbus. Les combats contre César eurent lieu autour de Gergovie, ville des Arvernes, bâtie sur une haute montagne, et berceau de Vercingétorix; ils reprirent autour d'Alésia (123), ville des Mandubies, peuple limitrophe des Arvernes, laquelle est située aussi sur, une haute colline et entourée de montagnes et de deux rivières : le général (ennemi) y fut pris, et ce fut la fin de la guerre. - Avec Maximus Aemilianus la lutte s'engagea vers le confluent de la Saône et du Rhône, à l'endroit où le mont Cemméne se rapproche du Rhône ; avec Domitius, c'est plus bas encore, au confluent du Sulgas (la Sorgue) et du Rhône. - Les Arvernes avaient étendu leur empire jusqu'à Narbonne et aux frontières de la Massaliotide, et ils dominaient même sur tous les peuples jusqu'aux Pyrénées d'une part, et de l'autre jusqu'à l'Océan et au Rhin. Bituit, qui guerroya contre Maximus et Domitius, avait pour père, ce Luérius dont les richesses et le faste étaient si extraordinaires que, pour faire montre à ses amis de son opulence, il se promenait sur un char dans la campagne, en semant çà et là de la monnaie d'or et d'argent, que ramassaient les gens de sa suite.
III.1. Après les départements de l'Aquitaine et de la Narbonnaise vient immédiatement la contrée qui s'étend jusqu'au cours entier du Rhin, à partir de la Loire et du Rhône, c'est-à-dire à partir d'une ligne allant de la source de ce dernier fleuve au point où il atteint Lugdunum (Lyon). Les parties hautes de cette région, celles qui confinent aux sources des fleuves du Rhin et du Rhône, à peu près jusqu'au milieu des plaines, sont sous la dépendance de Lugdunum ; le reste. et les territoires parocéaniques sont rangés dans un autre département, que l'on attribue proprement aux Belges. Quant à nous, nous suivrons un procédé plus commun dans l'exposé de tous ces détails. 2. Lugdunum même, bâti au pied d'une colline au confluent de la Saône et du Rhône, est une possession romaine. C'est la ville la plus peuplée de toutes, à l'exception de Narbonne, et le grand marché des Romains dont les préfets y font frapper leurs monnaies d'argent et d'or. Là se voit aussi l'hiéron ou sanctuaire, hommage public de tous lesGalates à César-Auguste, élevé en avant de la ville, au confluent des deux fleuves. C'est un autel considérable, avec une inscription portant les noms de soixante peuples, la représentation figurée de chacun de ces peuples et une autre grande [statue]. - Lugdunum est aussi le chef-lieu des Segosians, peuple qui habite entre le Rhône et le Doubs. Les, peuples qui s'étendent à la suite, vers le Rhin, ont pour limites, les uns, le Doubs, les autres, la Saône. Ces rivières, comme il a été dit plus haut, descendent aussi des Alpes, puis, s'étant confondues en un seul cours d'eau, se déchargent, ensemble dans le Rhône. Il y en a encore une autre qui à pareillement sa source dans les Alpes; Sécoanas est son nom (124) ; elle coule parallèlement au Rhin et traverse le territoire d'un peuple du même nom, qui touche le Rhin à l'est, et la Saône du côté-opposé. C'est de là que proviennent les meilleures salaisons de viande de porc, qu'on transporte à Rome. - Entre le Doubs et la Saône habite le peuple des Eduens, qui possède la ville de Cabyllinum (125) sur la Saône et la place forte de Bibracte (126). Les Eduens étaient aussi nommés les frères des Romains : ils furent en effet, dans ces contrées, les premiers admis à leur amitié et à leur alliance. - Au delà de la Saône habitent, les Sécoanes (127) qui, de bonne heure, ont eu des démêlés avec les Romains et les Eduens, pour s'être souvent joints aux Germains dans les incursions de ces peuples en Italie ; et ils ont bien montré que leur puissance n'était pas commune, puisque ces peuples étaient grands ou petits, selon que les Séquanes s'unissaient avec eux ou s'en séparaient. Outre ces griefs, un autre motif de haine existait entre eux et les Eduens : c'étaient leurs disputes au sujet du fleuve qui les sépare, chacun des deux peuples s'attribuant la propriété de la Saône et la jouissance des droits de passage par cette rivière. Maintenant tout est sous la domination des Romains.
3. Les premiers de tous ceux qui habitent sur les bords du Rhin sont les Elvetties (128) chez qui sont les sources de ce fleuve, au mont Adulas. Ce mont est une partie des Alpes, et c'est de là que sort l'Aduas qui, coule en sens opposé vers la Celtique intérieure, alimente le lac Larie près duquel Côme est bâtie et se jette dans le Pô, il en sera parlé plus tard. - Le Rhin se perd dans de grands marais et dans un grand lac jusqu'où s'avancent les Rhaetes et les Vindolicès, peuples dont quelques portions sont dans les Alpes et d'autres au-dessus des Alpes. - La longueur de ce fleuve est de six mille stades, à ce que dit Asinius ; mais cela n'est pas. En ligne droite, il en dépasserait un peu la moitié : qu'on en ajoute mille pour les détours, et ce sera assez. Car il est rapide au point qu'il est difficile d'y établir des ponts, et une fois descendu des montagnes, il coule doucement incliné à travers des plaines. Comment donc serait-il possible qu'il restât rapide et violent, si à cette légère inclinaison nous ajoutions des détours nombreux et longs? Asinius dit encore que le Rhin a deux bouches et il censure ceux qui lui en attribuent, un plus grand nombre. - Ce fleuve et le Sécoanas (la Seine) embrassent dans leurs replis une certaine étendue de pays, mais non pas aussi grande (l'un que l'autre). Tous les deux coulent des régions du midi vers les Ourses. Devant eux s'étend la Bretagne, assez près du Rhin pour que de ses bords on aperçoive le Cantium, extrémité orientale de l'île; mais un peu plus loin du Sécoanas (la Seine). Aussi est-ce vers le premier que César le dieu établit ses chantiers de construction navale pour passer en Bretagne. - Le trajet à faire par le Sécoanas (la Seine) pour ceux qui ont reçu des marchandises venues par la Saône est un peu plus long que celui qui se fait par la Loire ou la Garonne. Puis, la distance de Lugdunum à la Garonne est de mille stades, et elle n'est pas le double de celle des bouches du Rhône à Lugdunum. - On dit aussi que les Helvètes, chez qui l'or abondait, ne s'en tournèrent pas moins vers le brigandage, à la vue de l'opulence des Cimbres, et que des trois tribus qui prirent part à l'expédition de ces derniers, deux furent anéanties. Cependant la guerre contre le dieu César montra bien que de ces restes un grand peuple avait pu renaître, puisqu'il y périt environ quarante myriades d'hommes (de cette race), et que le restant, allait bien, à huit mille, que le vainqueur laissa subsister, afin de ne pas abandonner le pays devenu désert aux Germains de la frontière. Après les Helvètes, les habitants des bords du Rhin sont les Séquanes et les Médiomatrices (129) chez ceux-ci sont établis les Tribocches (130), peuple germanique qu'on a fait passer der ses foyers dans cette contrée ; chez les Séquanes s'élève le mont Juras qui sépare les Helvètes et les Séquanes. - Au-dessus donc des Helvètes et des Séquanes habitent vers le couchant les Eduens et les Lingons (131) ; au-dessus des Médiomatrices les Leuces (132) et une partie des Lingons. Les peuples entre la Loire et les Séquanes, par delà le Rhône et la Saône, s'étendent au nord des Allobroges et des voisins de Lugdunum. Les plus illustres d'entre eux sont les Arvernes et les Carnutes, chez lesquels passé la Loire dans sa course vers l'Océan. Or, le trajet des fleuves de la Celtique à la côte Bretonne est de trois cent-vingt stades, car en partant le soir avec le reflux, on aborde dans l’île le lendemain vers la huitième heure. Après les Médiomatrices et les Tribocches, les riverains du Rhin sont les Trévires (133) : c'est chez eux qu'a été construit en ce temps-ci un pont par les généraux romains qui ont la conduite de la guerre en Germanie. De l'autre côté, en face, habitaient les Ubiens (134), qu'Agrippa a transplantés avec leur assentiment en deçà du Rhin. Les Trévires et les Nerviens (135) se touchent : ces derniers sont aussi un peuple germanique. Enfin viennent les Ménapiens (136), tout près des bouches du fleuve et sur l'une et l'autre rive; ils habitent des marais et des bois aux arbres peu élevés, mais serrés et épineux. Près d'eux sont établis d'autres Germains, les Sugambres (137). Au-dessus de toute cette région fluviale demeurent encore des Germains, ceux qu'on appelle Suèves, qui surpassent les autres par leurs forces militaires et leur nombre. C'est par eux qu'ont été expulsés les peuples qui ces temps-ci se sont réfugiés en deçà du Rhin. Ainsi des peuples passent d'un lieu dans un autre et s'y établissent en maîtres, toutes les fois que les premiers habitants ont été détruits, et ils en reçoivent les vivantes étincelles par qui se doit rallumer la guerre.
5. A l'ouest des Trévires et des Nerviens habitent les Sénons et les Rèmes (138), puis les Atrebates (139) et les Eburons (140). Tout voisins des Ménapiens et sur la mer se trouvent les Morins (141), les Belloaces (142), les Ambianes (143), les Suessions (144) et les Calétes jusqu'à l'embouchure du fleuve Sécoanas (la Seine). Au territoire des Ménapiens ressemble celui des Morins, des Atrébates et des Eburons : c'est une forêt d'arbres peu élevés, assez étendue, mais non pas autant que le disent les historiens : elle à mille stades, et on l'appelle l'Ardenne. Pendant les guerres d'invasion les habitants entrelaçant les branches de ses arbustes qui sont pareils à des buissons, en obstruaient les passages. Il y a même des endroits où ils enfonçaient des pieux; après quoi ils se cachaient dans ses profondeurs avec leurs familles entières. Occupant de petites îles dans les marais, ils avaient là, durant la saison des pluies, des refuges assurés, mais dans les temps secs on les y prenait aisément. Aujourd'hui tous les peuples en deçà du Rhin sont paisibles et obéissent aux Romains. - Le long du fleuve Sécoanas (la Seine), il y a, avec les Parisies qui occupent une île dans, ce fleuve et ont pour ville Lucôtocie (145), les Meldes et les Lexovies (146), ces derniers près de l'Océan. Des peuples de cette région le plus considérable est celui des Rèmes leur métropole Duricortore est la ville qui a le plus d'habitants; c'est la résidence des préfets romains.
IV, 1. Après les peuples dont on a parlé, ceux qui restent sont des Belges parocéanites, et parmi eux les Vénétes (147) qui livrèrent à César une bataille navale, s'étant mis en mesure d'empêcher son passage dans la Bretagne, où ils faisaient le commerce. César les défit aisément dans cette lutte navale, sans se servir d'éperons contre leurs vaisseaux, dont les bois étaient trop épais. Mais tandis que le vent les portait sur lui, les Romains déchiraient leurs voiles avec des faux à longue hampe. Ces voiles étaient faites en cuir à cause de la violence des vents et tendues avec des chaînes au lieu de câblés. Les Vénétes construisent leurs navires larges de fond, hauts de poupe et hauts de proue à cause des marées, et en chêne parce que ce bois abonde dans le pays (148). Aussi ne serrent-ils pas trop les joints des planches ; ils y laissent des interstices qu'ils bouchent avec des algues; de peur que, quand ils sont tirés sur le rivage, le bois ne se consume, faute d'humidité; car les algues sont humides de leur nature, tandis que le chêne est sec et maigre. - Je pense que ces Vénétes sont les pères de ceux de l'Adrie. Et en effet, les Celtes qui sont en Italie sont tous à peu près sortis du pays d'au-delà les Alpes, comme les Boïens et les Sénons. C'est l'identité des noms qui a fait dire que les Vénétes sont des Paphlagons. Je parle ainsi sans rien affirmer en pareille matière le vraisemblable suffit. Puis il y a les Osismies (149), que Pythéas nomme Ostimies, lesquels habitent un promontoire qui se projette assez loin dans l'Océan, mais non pas autant que le disent ce géographe et ceux qui ajoutent foi à ses paroles. Des peuples établis entre la Seine et la Loire les uns sont limitrophes dés Séquanes, les autres des Arvernes.
2. Toute la race appelée aujourd'hui Gauloise ou Galate a la manie de la guerre; elle est irascible, prompte à la bataille, du reste simple et sans malice. Aussi, une fois irrités, ils se rassemblent en foule pour courir aux combats, et cela avec éclat, sans aucune circonspection, de sorte qu'ils tombent facilement sous les coups de ceux qui veulent employer contre eux la stratégie. Et en effet, qu'on les excite, quand on veut, où l'on veut, pour le premier prétexte venu, on les trouve prêts à braver le danger, sans avoir pour entrer dans la lutte autre chose que leur force et leur audace. Si, l'on agit sur eux par la persuasion, ils s'adonnent aisément aux travaux utiles, jusqu'à s'appliquer à la science et aux lettres. Leurs forces tiennent en partie à leur taille qui est grande , en partie à leur multitude. S'ils se rassemblent en grande multitude avec tant de facilité, cela vient de leur simplicité et de leur fierté personnelle : grâces à ces qualités, ils s'associent toujours à l'indignation de quiconque leur paraît victime de l'injustice. Aujourd'hui, à la vérité, ils sont tous en paix, asservis; et ils vivent sous les ordres des Romains qui les ont conquis; mais nous nous les figurons ainsi d'après leurs anciens temps et d'après les maximes encore subsistantes aujourd'hui chez les Germains. Et, en effet, par leur nature et par leurs institutions politiques ces deux peuples se ressemblent et sont frères; de plus, ils habitent des contrées limitrophes, que sépare seul le cours du. Rhin, et qui presque à tous égards se rapprochent l'une de l'autre. Seulement la Germanie est plus au nord, (ce qui se voit) si l'on compare dans les deux pays le midi avec le midi, le nord avec le nord. C'est là même ce qui leur rend les migrations faciles; ils se transportent en bandes, par levées en masse; mieux encore, ils partent avec tout ce qui est à eux, lorsqu'ils sont chassés de leurs terres par des étrangers plus forts. C'est pour cela aussi que les Romains ont eu moins de peine à les dompter que les Ibères. En effet, le commencement de leur guerre contre ces derniers eut lieu plus tôt et la fin plus tard : dans l'intervalle, ils défirent tous les Celtes, tous ceux qui sont entre le Rhin et les monts Pyrénées.- Ces peuples, tombant sur l'ennemi en masses serrées et en foule, périssaient aussi en foule. Les Ibères ménageaient les luttes, les morcelaient, faisant la guerre, tantôt les uns, tantôt les autres, sur différents points, - une guerre de brigands. Les Celtes sont donc tous naturellement propres aux combats, mais ils valent mieux comme cavaliers que comme fantassins, et la meilleure cavalerie des Romains leur vient de ces peuples. C'est toujours plus au nord et le long de l'Océan que sont les plus braves combattants.
3. Parmi ceux-ci les meilleurs à cet égard sont, dit-on, les Belges, lesquels sont divisés en quinze peuples, et habitent entre le Rhin et la Loire, le long de l'Océan : seuls, en effet, ils tinrent tête à l'invasion des Germains, - Cimbres et Teutons. Entre les Belges mêmes, le premier rang appartient , dit-mi, aux Bellovaques, et après, eux, aux Suessions. Ces populations sont très nombreuses : la preuve en est qu'on pouvait, dit-on, compter jadis jusqu'à trente myriades de Belges en état de porter les armes. On a déjà parlé de la multitude des Helvètes, de celle des Arvernes et de leurs alliés, et par là se voit combien nombreuse était la population de la Celtique, et combien est vrai ce que j'ai dit de la supériorité des femmes de ce pays comme mères et, comme nourrices. - Les hommes sont vêtus de la saie; ils laissent croître leurs cheveux, se servent de braies qui enveloppent les jambes ; et au lieu de tuniques, ils portent des robes fendues, garnies de manches et tombant jusqu'aux parties honteuses et aux fesses. La laine dont sont tissus ces épais sayons appelés lenæ est rude et crépue. Cependant les Romains, même dans les régions les plus septentrionales; en couvrant les brebis de peaux, en obtiennent des laines assez jolies. - L'armure (des Celtes) est proportionnée à là grandeur de leurs corps : c'est un long sabre qu'ils suspendent à leur flanc droit; puis un long bouclier, des piques en rapport (avec le. reste) et la madaris qui est une espèce de javeline. Quelques-uns se servent en outre d'arcs et de frondes. Ils ont aussi un morceau . de bois semblable à une pique, qu'ils lancent avec la main, sans courroie, qui frappe plus loin qu'une flèche et dont ils se servent de préférence, notamment pour la chasse aux oiseaux. - Encore aujourd'hui la plupart d'entre, eux couchent sur la dure, et mangent assis sur des jonchées (d'herbes. ou de feuilles). Leur nourriture consiste généralement en lait, en viandes de toutes sortes et, surtout en viande de porc, fraîche ou salée. Les porcs vivent dans les champs, ce qui leur donne une taille, une force, une vitesse. extraordinaires ; et il y a, pour qui n'y est pas habitué, autant de danger à s'en approcher que d'un loup. Les Celtes se font avec des planches et des claies de grandes maisons, en forme de dômes, qu'ils recouvrent d'une large toiture. Ils ont de si nombreux troupeaux de moutons et de porcs qu'ils fournissent en abondance saies et salaisons non seulement Rome, mais la plupart des régions de l'Italie.- La plupart de leurs gouvernements étaient aristocratiques : ils choisissaient anciennement un chef unique chaque année, et de même pour la guerre un seul général, désigné par la multitude. Aujourd'hui ils se conforment presque en tout aux ordres venus de Rome. Voici une particularité qui est propre à leurs assemblées : quelqu'un . trouble l'orateur : l'appariteur s'avance l'épée nue, et avec menaces lui ordonne de se taire ; s le perturbateur ne cesse pas, l'appariteur lui donne un second, un troisième avertissement, et finalement lui enlève un morceau de sa saie, assez grand pour mettre le reste hors de service. - Quant au partage des travaux entre les hommes et les femmes, il se fait à l'inverse de ce qui a lieu chez nous ; et c'est là un usage qui leur est commun avec bien d'autres parmi les barbares.
4. Chez tous en général il y a trois castes à qui l'on rend des honneurs extraordinaires : les bardes, les vates et les druides; les bardes sont chantres d'hymnes et poètes, les vates, sacrificateurs et interprètes de la nature ; les druides, outre la science de la nature, étudient aussi la philosophie morale. On a la plus haute opinion de leur justice : à ce titre on s'en remet à eux du jugement de tous litiges privés ou publics; c'est à ce point qu'autrefois ils étaient arbitrés même dans les guerres; arrêtaient les adversaires prêts à se ranger en bataille, et qu'on leur confiait le soin de prononcer dans les affaires de meurtre. Lorsqu'abondent ces sortes de jugements, ils estiment que c'est signe d'abondance pour le pays (150). Ces druides, et d'autres comme eux, professent que les âmes sont impérissables, le monde aussi, mais qu'un jour pourtant régneront seuls le feu et l'eau.
5. À la franchise, à la fougue se joignent chez ces peuples le défaut de sens, la fanfaronnade et le goût de la parure : ils portent des bijoux d'or, chaînes autour du cou, anneaux autour des bras et des poignets, et ceux qui sont dans les honneurs portent des habits d'étoffes teintes et brodées en or. Par suite de cette grande légèreté, ils se montrent insupportables dans la victoire et abattus dans la défaite. À leur manque de bon sens se rattache une coutume barbare, monstrueuse inhérente au caractère des peuples du nord, au sortir du combat, ils suspendent au cou de leurs chevaux les têtes de leurs ennemis, et quand ils les ont apportées chez eux, ils les clouent dans les vestibules de leurs maisons. Posidonius dit avoir vu en maints endroits ce spectacle, qui d'abord, faute d'y être accoutumé, lui faisait horreur, mais qu'ensuite l'accoutumance le lui rendait supportable. Les têtes des personnages illustres étaient imprégnées d'huile de cèdre ; on les étalait aux yeux des étrangers et l'on ne consentait pas à les rendre contre leur pesant d'or. Les Romains mirent fin à ces usages; de même qu'aux sacrifices et aux pratiques divinatoires en opposition avec nos institutions. Ainsi un homme avait-il été voué aux dieux, on le frappait par dernière avec une épée de combat, et l'on devinait l'avenir d'après les convulsions du mourant; on ne sacrifiait jamais sans l'assistance des druides. Il y avait encore, dit-on, d'autres espèces de sacrifices humains : ainsi parfois ils tuaient les victimes à coups de flèches, ou les crucifiaient dans leurs temples, ou bien encore ils fabriquaient un colosse avec du foin et du bois, y introduisaient des animaux domestiques et sauvages de toute sorte avec des hommes, et brûlaient le tout.
6. Il (Posidonius) parle d'une petite île située dans l'Océan, non pas tout-à-fait en pleine mer, mais vis-à-vis de l'embouchure de la Loire : elle est habitée par les femmes des Samnites, qui sont possédées de Dionysos et qui cherchent à se rendre ce dieu propice par des cérémonies mystiques et autres pratiques sacrées singulières. Aucun homme n'aborde en cette île : ce sont les femmes elles-mêmes qui passent sur le continent pour avoir commerce avec les hommes, et s'en retournent ensuite. C'est aussi l'usage qu'une fois par an on enlève le toit du temple, et qu'on le refasse le même jour avant le coucher du soleil, chaque femme apportant à cet effet sa charge de matériaux. Si l'une d'elles laisse tomber cette charge, les autres la mettent en pièces, et portant avec des cris d'évohé les membres de la malheureuse autour du temple, elles ne cessent point qu'elles n'aient senti cesser leur fureur. Or chaque fois il arrive à quelqu'une de tomber et de souffrir cette mort. Il y a encore quelque chose de plus fabuleux dans les récits d'Artémidore ; c'est l'histoire des corbeaux. Il raconte qu'il y a sur la côte de l'Océan un port dit des deux corbeaux, qu'on y voyait en effet deux corbeaux ayant l'aile droite blanchâtre; que ceux qui avaient quelque contestation venaient en cet endroit et plaçaient sur un lieu élevé une planche avec des gâteaux dessus, chacun ayant à part les siens, que les oiseaux s'abattant sur ces gâteaux mangeaient les uns et dispersaient les autres, que celui-là était vainqueur, dont les gâteaux avaient été dispersés. Voilà une histoire qui ressemble bien trop à une fable ; ce qu'il raconte de Dèmèter (Cérès) et de Corè (Proserpine) est plus digne de foi. Il y a, dit-il, près de la Bretagne, une île où l'on sacrifie à Dèmèter et à Coré suivant des rites semblables à ceux de la Samothrace. Encore un fait du genre de ceux auxquels on ajoute foi : il croît dans la Celtique un arbre semblable au figuier, lequel porte un fruit dont la forme se rapproche de celle du chapiteau corinthien. Si l'on fait une incision dans ce fruit, il en sort un suc mortel dont les habitants imprègnent leurs flèches. - Des traits caractéristiques généralement connus, c'est que tous les Celtes sont querelleurs, et qu'à leurs yeux il n'y a point de honte pour les jeunes gens à ne point ménager la fleur de leur bel âge. - Ephore donne à la Celtique une étendue exagérée : il lui attribue la plus grande partie du pays que nous appelons aujourd'hui Ibérie, jusqu'à Gadira, il nous en représente les habitants comme amis des Hellènes, et il signale maintes particularités où nous ne retrouvons pas les Celtes d'aujourd'hui. En voici une : ils s'étudieraient à ne devenir ni gras ni ventrus, et tout jeune homme dont l'embonpoint dépasserait la mesure marquée par une ceinture, serait puni. Voilà pour la Celtique de par delà les Alpes.
V. 1. La Bretagne est de forme triangulaire ; son plus grand côté s'étend en face de la Celtique et ne la dépasse ni ne lui cède en longueur. Chacun (des deux côtés opposés) a bien de quatre mille trois cents à quatre mille quatre cents stades, celui de la Celtique partant des bouches du Rhin jusqu'à la pointe boréale des Pyrénées, en Aquitaine, et l'autre, du cap Cantium, en face dès bouches du Rhin, point le plus oriental de la Bretagne, jusqu'à la pointe occidentale de l'île qui fait face à l'Aquitaine et aux Pyrénées. C'est là la moindre distance des Pyrénées au Rhin, puisque, comme il a été dit, la plus grande est de cinq mille stades. Mais il y a apparence que le fleuve et la montagne, d'abord parallèles, inclinent l'un vers l'autre, puisqu'ils font l'un et l'autre une certaine courbe qui rapproche leurs extrémités du côté de l'Océan.
2. Il y a quatre points d'où l'on part habituellement pour passer du continent dans l'île : ce sont les bouches des fleuves, du Rhin, de la Seine, de la Loire et de la Garonne. En partant des environs du Rhin, on ne s'embarque pas aux bouches mêmes du fleuve, mais dans le pays des Morins, limitrophe de celui des Ménapiens, où se trouve Ilium (151), station navale que choisit le dieu César lors de son passage dans l'île. On leva l'ancre pendant la nuit, et il aborda le lendemain vers la quatrième heure, après une traversée de 32O stades; il trouva le blé encore dans les champs. - La plus grande partie de l'île est en plaine et couverte de bois; il y a pourtant en beaucoup d'endroits des collines : elle produit du blé, du bétail, de l'or, de l'argent et du fer. On en exporte en outre des peaux, des esclaves et de bons chiens de chasse, que les Celtes emploient à la guerre comme ceux de leur pays. Les hommes sont plus grands que les Celtes, ils ont les cheveux moins blonds et le corps plus flasque. Une preuve de leur grande taille : nous en avons vu nous-mêmes à Rome, qui étaient presque des enfants et qui dépassaient bien d'un demi-pied les hommes les plus grands de cette ville, mais ils étaient cagneux et d'ailleurs mal dessinés dans leur ensemble. Les moeurs de ce peuple, semblables à celles des Celtes, sont aussi plus simples et plus barbares ; c'est au point que quelques-uns d'entre eux, ayant du lait en abondance, n'en font pas de fromage, faute d'expérience ; ils sont également inexpérimentés par rapport au jardinage et aux autres travaux de la terre.- Il y a chez eux des principautés. - À la guerre ils se servent le plus souvent de chars, comme quelques-uns des Celtes. Pour villes ils ont leurs bois : après y avoir fortifié au moyen d'arbres abattus un vaste espace circulaire, ils y construisent des huttes, y parquent leurs bestiaux, mais non pas pour longtemps. - Chez eux le ciel est plutôt pluvieux que neigeux ; dans les beaux jours le brouillard tient assez longtemps pour ne laisser voir le soleil que trois ou quatre heures par jour, aux alentours de midi; c'est ce qui a lieu aussi chez les Morins, les Ménapiens et les autres peuples des contrées voisines.
3. César le dieu passa deux fois dans cette île et en revint en toute hâte sans avoir accompli rien de grand, sans même être allé bien avant, à cause de certains mouvements qui se produisirent chez les Celtes, parmi les barbares et ses propres soldats, et à cause de la perte d'un bon nombre de ses vaisseaux surpris par les grandes marées des jours où la lune arrive à son plein. Il remporta toutefois sur les Bretons deux ou trois victoires, bien qu'il n'eût fait passer dans leur île que deux légions de son armée : il en ramena des otages, des esclaves et d'autre butin en quantité (152). De nos jours quelques-uns des souverains de ce pays ayant par des ambassades et des soins officieux gagné l'amitié de César Auguste, ont consacré des offrandes dans le Capitole et mis, ou peu s'en faut, à la disposition des Romains leur île tout entière. Ils n'ont plus à supporter de lourds impôts pour les marchandises qu'ils exportent dans la Celtique et pour celles qu'ils importent de ce pays, - ornements de freins et colliers en ivoire, ustensiles d'ambre et de verre et autres menus articles de ce genre, - en sorte que l'île n'a plus besoin d'être gardée, par des troupes. Il faudrait au moins une légion avec quelque cavalerie si l'on voulait y lever des tributs. Or les dépenses d'un corps d'armée égaleraient bien les revenus qu'on en tirerait, car nécessairement les produits des douanes diminuent du moment qu'on établit des impôts, et en même temps on a certains dangers à courir quand on emploie la violence.
4... Pour ce qui est de l'anthropophagie, on dit que c'est une coutume scythique ; mais dans les besoins urgents de villes assiégées, les Celtes eux-mêmes, les Ibères et beaucoup d'autres ont eu recours, dit-on, à cette extrémité (153).
VI. 4 Après la Celtique delà les Alpes et les peuples qui occupent cette contrée, il faut parler des Alpes elles-mêmes et de leurs habitants, puis de l'Italie entière en gardant dans cette description le même ordre qu'indique la nature de cette contrée. - Les Alpes commencent non pas au port de Monoeque (154) comme quelques-uns l'ont dit, mais aux lieux mêmes d'où partent les monts Apennins, près de Génua (155), le marché des Ligures, et ce qu'on appelle les vada, c'est-à-dire les marais de Sabates (156). Car l'Apennin a son point de départ à Génua (Gênes), et les Alpes à Sabates (Savone). Or, entre Gênes et Savone, il y a deux cents stades plus soixante. À trois cent soixante-dix stades de là se trouve la ville d'Albingaunum (157), dont les habitants sont appelés Ligures Ingaunes. De là au port de Monaco il y a quatre cent quatre-vingts stades. Dans l'intervalle s'élève une grande ville, Albium Intémélium (158), habitée par les Intémélies. À preuve que les Alpes ont leur point de départ à Savone, on cite ces noms mêmes. Pour Alpia, comme pour Alpionia, on aurait dit autrefois Albia, et maintenant encore cette haute montagne du pays des lapodes qui est en quelque façon contiguë au mont Ocra et aux Alpes, serait appelée Albium pour indiquer que les Alpes s'étendent jusque-là.
2. Attendu donc qu'il y a les Ligures Ingaunes et les Ligures Intémélies, leurs colonies maritimes auraient été nommées avec raison, l'une Albium Intémélium, comme qui dirait l'Intémélium des Alpes, l'autre d'une façon plus concise, Albingaunum. Polybe ajoute aux deux tribus des Ligyes (Ligures) sus-mentionnées celle des Oxybies et celle des Deciètes. En général, toute la côte depuis le port de Monaco jusqu'à la Tyrrhènie est d'un seul tenant, et sans autres ports que des mouillages et des ancrages peu profonds. Au-dessus s'élèvent des montagnes aux escarpements énormes, ne laissant le long de la mer qu'un étroit passage. Elles sont habitées par des Ligyes (Ligures) qui vivent particulièrement de leur bétail, de lait et d'une boisson faite avec de l'orge. Ils paissent leurs troupeaux sur les terres voisines de la mer, et plus encore dans les montagnes. Ils ont là en abondance des bois propres aux constructions navales, de grands arbres parmi lesquels on en trouve qui ont jusqu'à huit pieds de diamètre, quantité aussi de bois, qui par la variété de leurs veines ne le cèdent en rien au thuya pour faire de belles tables. Ils transportent ces bois au marché de Génua (Gênes) avec du bétail, des peaux, du miel, et ils en rapportent en échange de l'huile et du vin d'Italie; car celui qui se fait chez eux, outre qu'il est peu abondant, sent la poix, et est dur. C'est de là que viennent les chevaux et les mulets appelés ginnes, les tuniques et les saies ligystines (ligures). On trouve aussi en abondance dans ce pays le lingurium que quelques-uns appellent aussi électrum. Dans la guerre, ces peuples n'ont pas du tout de cavalerie, mais une bonne infanterie et de bons tirailleurs : de ce qu'ils portent des boucliers d'airain, quelques-uns ont conjecturé qu'ils sont d'origine hellénique.
3. Dans le port de Monoeque (Monaco) ne peuvent mouiller ni de grands ni de nombreux navires : il possède un temple d'Héraclès Monoeque. D'après ce nom il y a apparence que jusque-là s'étendait la côte massaliotique. La distance depuis Antipolis est d'un peu plus de deux cents stades. Puis de cette ville à Massalie et même un peu au-delà, le peuple des Salyes, habite les Alpes qui dominent la côte et aussi certaines parties du littoral où il se trouve mêlé aux Hellènes. Les anciens Hellènes appellent les Salyes Ligyes, et Ligystique la contrée que possèdent les Massaliotes; plus tard, on les nomme Celtoligyes (Celtoligures), on leur attribue toute la plaine jusqu'à Luérion et au Rhône, et l'on ajoute qu'ils envoyaient en guerre non seulement de l'infanterie, mais de la cavalerie, et qu'ils s'étaient partagés en dix cantons. Des Celtes transalpins ce sont les premiers que domptèrent les Romains, après une longue guerre contre eux et les Ligyes (Ligures) qui leur avaient fermé les routes de l'Ibérie par le littoral. Et, en effet, les Ligyes (Ligures) exerçaient leurs brigandages et sur terre et sur mer, et cela avec des forces telles que la. route était à peine praticable pour de grandes armées. Après quatre-vingts ans de guerre, les Romains obtinrent non sans peine un traité en vertu duquel une bande de terrain large de douze stades laissait un libre passage aux voyageurs pour affaires d'État. Mais dans la suite, ils subjuguèrent tous ces peuples, et réglèrent eux-mêmes leur vie politique, après leur avoir imposé un tribut.
4. Après les Salyes viennent les Albiens, les Albioeques et les Voconties qui habitent les parties les plus septentrionales des monts. Les Voconties s'étendent jusqu'aux Allobroges, occupant dans le fond de la montagne des vallons considérables et qui ne valent pas moins que ceux qu'occupent ces derniers. Du reste, les Allobroges et les Ligures sont gouvernés par les préteurs envoyés dans la Narbonnaise; les Voconties, au contraire, comme les Volces des environs de Némause (Nîmes), dont nous avons parlé, se gouvernent par eux-mêmes. Quant aux Ligyes placés entre le Var et Génua (Gênes), ceux d'entre eux qui habitent près de la mer sont réputés Italiotes; aux autres, ceux de la montagne, on envoie un préfet de l'ordre équestre, comme on fait pour les peuples qui sont encore tout-à-fait barbares.
5. Après les Voconties se trouvent les Iconies et les Tricories que suivent les Médulles, habitants des plus hautes cimes. La hauteur de ces cimes en ligne droite est, dit-on, de cent stades pour monter, et d'autant pour en descendre aux frontières de l'Italie. En haut, dans certains endroits creux est enfermé un grand lac, et il y a aussi deux sources à peu de distance l'une de l'autre. De l'une sort le Druentias, fleuve qui court à travers des ravins et se précipite avec fracas dans le Rhône, et, dans une direction opposée, le Durias qui se mêle au Pô, après être descendu, par le pays des Salasses, dans la Celtique en deçà des Alpes ; de l'autre source, bien au-dessous de ces hautes régions, naît le Pô, fort et rapide, qui, en s'avançant, devient plus grand et plus tranquille, car il se grossit de plusieurs affluents dès qu'il est arrivé dans les plaines; il s'élargit alors, et dans cette diffusion de ses eaux, il étend et ralentit son courant. Il tombe dans la mer Adriatique, après être devenu le plus grand des fleuves de l'Europe, l’Ister excepté. - Les Médulles sont placés tout juste au-dessus du confluent de l'Isar et du Rhône.
6. De l'autre côté de ladite montagne, sur le versant italien, habitent les Taurins, nation ligystique,(ligure) et d'autres Ligyes. À eux appartient la terre dite terre d'ldéonnus et celle de Cottius. Au-delà de ces populations et du Pô sont les Salasses, et au-dessus d'eux, sur les cimes, les Centrons, les Catoriges, les Varagres, les Nantuates, le lac Lèmenne (Lémén), que traverse le Rhône, et la source de ce fleuve. Non loin de là sont les sources du Rhin, le mont Adulas d'où descend le Rhin qui. court vers les Ourses, et l'Aduas qui, à l'opposite, se jette dans le lac Larie, près de Côme. Au-dessus de Côme, qui est situé au pied des Alpes, habitent, d'une part, à l'est, les Rhoetes et les Vennons; de l'autre, les Léponties, les Tridentins, les Stones, et beaucoup d'autres petites peuplades qui, dans les temps antérieurs, sans ressources et vivant de brigandage, occupèrent l'Italie. Aujourd'hui elles sont en partie détruites, en partie apprivoisées, et les passages de leurs montagnes qui auparavant étaient peu nombreux et à peu près impraticables, offrent aujourd'hui en beaucoup d'endroits toute sécurité du côté des habitants, et, grâce aux travaux exécutés, la plus grande commodité possible. Car Auguste César, à la destruction du brigandage, a joint la construction de routes aussi bonnes qu'il était permis de les faire. On ne pouvait, en effet, violenter partout la nature à travers des rochers, des escarpements énormes, tantôt surplombant la route, tantôt s'écroulant en dessous, de façon que, pour peu qu'on s'écartât, on n'échappait guère aux dangers d'une chute dans des abîmes sans fond. Cette route est, en effet, si étroite en certains endroits, qu'elle donne le vertige aux piétons et même aux bêtes de somme qui n'en ont pas l'habitude. Celles du pays y passent avec leurs charges sans faire de faux pas. On n'a donc pu remédier à ces inconvénients ni aux éboulements de ces couches de glace, masses énormes qui, tombant de haut, peuvent culbuter des convois entiers et les pousser d'un coup dans les précipices creusés au-dessous de la route. Il y a, en effet, plusieurs couches de glace superposées, parce que les gelées succédant aux gelées cristallisent la neige, et de ces couches, celles qui sont à la surface se détachent aisément de celles de dessous, avant d'avoir été complètement dissoutes par le soleil.
7. Les Salasses occupent un vaste territoire dans une vallée profonde que ferment de part et d'autre des montagnes ; mais une partie de ce territoire s'élève jusqu'aux sommets qui la dominent. Ceux qui, partant de l'Italie, franchissent les montagnes, prennent la route de cette même vallée : ensuite, il y a une bifurcation ; des deux routes l'une passe par le mont dit Poeninus; mais elle est inaccessible aux attelages dans les hautes régions alpestres; l'autre, qui traverse le pays des Centrons, est plus au couchant. - Le territoire des Salasses renferme des mines d'or : jadis, au temps de leur puissance, les Salasses en avaient la propriété, de même qu'ils étaient les maîtres des passages. Le fleuve Durias leur était d'un grand secours dans le travail des mines, pour le lavage de l'or. Aussi, distribuant les eaux en plusieurs canaux sur différents points, épuisaient-ils le courant commun. Mais si ce procédé leur était utile pour la recherche de l'or, il était bien, incommode pour ceux qui cultivaient les plaines situées au-dessous, qu'il privait de tous moyens d'arrosage ; car la rivière, ayant son cours plus haut, pouvait abreuver tout le pays. De là une cause de guerres continuelles entre les deux populations. Quand les Romains furent devenus les maîtres, les Salasses furent privés et de cette exploitation de l'or et même de leur territoire. Mais, comme ils occupaient encore les montagnes, ils se mirent tout de suite à vendre de l'eau aux publicains, qui avaient pris à ferme les mines d'or, et ils eurent avec ces publicains avares de perpétuels démêlés. Il en résultait que des Romains toujours avides de commandements militaires, envoyés en ces lieux, ne manquaient jamais de prétextes pour faire la guerre. Jusqu'à ces derniers temps donc les Salasses, tantôt, en guerre avec les Romains, tantôt suspendant les hostilités, conservaient néanmoins assez de forces pour. causer, en faisande brigandage, des dommages considérables à ceux qui passaient par leurs montagnes. Ainsi exigèrent-ils de Décimus Brutus, s'enfuyant, de Mutinè, une drachme par homme, et Messala, en quartiers d'hiver dans leur voisinage, leur versa le prix du bois qu'il brûlait, et du bois d'orme dont on fait les hampes des javelots: et les armes pour les exercices. Bien mieux, ces gens-là pillèrent un jour la caisse de César, et poussèrent d'énormes rochers sur ses troupes, en, ayant l'air de travailler à leurs routes et de jeter des ponts sur leurs rivières. Ensuite pourtant Auguste les soumit complètement et les vendit tous comme butin, après les avoir transportés à Eporédie, colonie fondée par les Romains pour en faire un poste de défense contre ces Salasses. Mais les habitants ne purent guère leur tenir tête jusqu'à ce que la nation eût été anéantie. Elle s'élevait alors au nombre de trente-six mille personnes avec huit mille hommes en état de combattre. Ils furent tous vendus sous la haste par Térentius Varron, le général qui les avait vaincus. - Avec trois mille Romains qu'il envoya dans ce pays, César fonda la ville d'Augusta au lieu même où avait été le camp de Varron. Maintenant la paix règne dans toute la contrée voisine, jusqu'aux cols les plus élevés de la montagne.
8.
À la suite, les parties orientales des montagnes et celles qui sont tournées
vers le Notus sont occupées par les Rhoetes et les Vindolices, limitrophes des
Helvètes et des Boïens, dont ils dominent les plaines.
Tous ces peuples (159) inquiétaient de leurs
continuelles incursions les parties avoisinantes de l'Italie, du pays des
Helvètes, des Séquanes, des Boïens et des Germains...
10. Les Iapodes, peuple formé d'un mélange d'Illyriens et de Celtes, habitent dans les environs (160), et le mont Ocra est dans leur voisinage. Ils comptaient beaucoup d'hommes vaillants et s'étendaient de chaque côté de la montagne, dominant par le brigandage. Mais ils furent tout-à-fait épuisés à la suite des défaites que leur infligea Auguste César. Leurs villes sont Métulum, Arupins, Monétium et Vendon. Après eux, se trouve la ville de Ségestique, dans la plaine.
11. Des divers chemins qui par la montagne vont de l'Italie dans la Celtique ultérieure et septentrionale, c'est celui-du pays des Salasses qui conduit à Lugdunum. Ce chemin en fait deux, l'un, praticable pour les chars, mais plus long, c'est celui qui passe chez les Centrons; l'autre, à pic, étroit, mais abrégé, c'est celui qui traverse le Pæninus (161). Lugdunum, au centre de la contrée (162), en est comme l'acropole, grâce aux deux fleuves qui s'y rencontrent et à sa proximité de toutes les parties du territoire. Aussi Agrippa en fit-il le point de départ de toutes les routes qu'il ouvrit : la première, passant par les monts Cemménes et allant jusque chez les Santons et en Aquitaine ; la deuxième, aboutissant au Rhin, la troisième à l'Océan, par le pays des Belloaces et des Ambianes, et la quatrième, dans la Narbonaise et à la côte Massaliotique. Cependant, en laissant à gauche Lugdunum et le pays qui domine cette ville, on peut prendre dans le Poeninus même un autre sentier, qui, après qu'on a passé le Rhône ou le lac Léman, conduit dans les plaines des Helvètes ; et de là, en franchissant le mont Jura, on arrive chez les Séquanes et chez les Lingons. Là, le chemin se bifurque et va d'un côté au Rhin, de l'autre à l'Océan.
12. ... Le même auteur (163), parlant de la grandeur des Alpes et de leur altitude, compare avec elles les plus grandes montagnes de l'Hellade, le Taygète, le Lycée, le Parnasse, l'Olympe, le Pélion, l'Ossa, et celles de la Thrace, l'Hémus, le Rhodope, le Dunax ; et il affirme, à l'égard de chacune de ces montagnes, qu'un jour suffit ou peu s'en faut à un voyageur dispos pour arriver au sommet, et un jour aussi pour en faire le tour; qu'en cinq jours au contraire, on ne parviendrait pas !au haut des Alpes ; que leur étendue le long des plaines est de deux mille deux cents stades. Il nomme quatre passages seulement : 1 ° par le pays des Ligyes, tout près de la mer Tyrrhénienne ; 2° par le territoire des Taurins, c'est celui que prit Hannibal; 3° par le pays des Salasses et 4° par celui des Rhaetes, tous pleins de précipices. Il dit aussi qu'il y a dans ces montagnes plusieurs lacs, dont trois grands...
(01) 1er siècle av. J.-C. - Originaire de Bithynie (?).
(02) Comp. Strab., liv. IV, ch. I, 4.
(03) Comp. Strab., liv. IV, ch. II, 1.
(04) Comp. ci-après Timée, ap. Étienne Byz. v. MassalÛa.
(05) « Puis ils (les Tyrrhéniens) se ruèrent en débauche sur l'ausonienne Agylla, terrible aux Ligystins, etc. »
(06) Angora ou Engareh.
(07) Le Pô.
(08) C'est-à-dire « qui se trouve sur les bords des fleuves. »
(09) Comp. dans notre tome III, Anthol. Palat., IX, 125; Julien, Ep. XVI; 11 Panégyr. de Constance, 25; Liban. Disc. s. Julien.; Nonnus, Dionys.; Théophylacte, Ep. X; Théodore Hyrtac. Ep. 25, 37, 52. - Claudien Contre Ruffin, II, 112, etc..
(10) Hérodot. II, 33; IV, 48-49. V. tome II, Extraits des Historiens.
(11) Strab., liv. IV, ch. IV, 4.
(12) ld., liv. V, ch. II, 4.
(13) Iles Scilly ou Sorlingues.
(14) De Cyrène, disciple de Callimaque, historien, etc.
(15) Argonaut. IV, 627-628.
(16) Nicéphore le Blemmide est un moine du XIIIe siècle ; sa Géographie synoptique n'est autre chose qu'un Commentaire de Denys le Périégète.
(17) Av. J.-C. 90.
(18) Comp. Éphore, fr. 38, dans Cosmas lndopleustès, p.148, et Strab., I, ch. II, 28. Voir l'Extrait d'Éphore dans notre tome II, Historiens.
(19) Comp. Éphore, L c. - Strab., I, ib.
(20) Comp. Scymn. ib. infr. v. 387-391.
(21) Anc. population du pays de Narbonne.
(22) Ampurias.
(23) Rosas.
(24) Agde.
(25) Rhodé, dans Strabon, IV, I, 5; Plin., III, 5, et les médailles Monnet, I, p. 78, Suppl. 1, p. 148). - Étienne Byz., Rhodanusia s. v.
(26) La même que Tauroentum, Taurenti, la Ciotat ou La Seyne.
(27) Hières.
(28) Strabon, d'Amasée en Cappadoce, commencement de l'ère chrétienne. - Dix-sept livres, plus ou moins mutilés. - Abrégé fait au xe siècle par un Grec inconnu.
(29) Cap de Kent.
(30) Le Dniéper.
(31) Ouessant.
(32) Ceylan.
(33) L'Irlande.
(34) Dyrrachium, Durazzo.
(35) Littéralement « du côté du Notus, » vent qui, à partir du règne d'Auguste, se confond avec l'Auster, le vent du Sud.
(36) C'est le grand golfe ou océan Aquitanique.
(37) Guadiana.
(38) Avec le Tage.
(39) Ces Celtes, comme les Celtibères, sont des peuples de l'Ibèrie (Espagne), mais d'origine celtique.
(40) Couna sur le Tage (?)
(41) Bougainville, dans les Mémoires de l'Académie des Inscriptions, t. XXX, in-12, p. 280-319, a essayé de défendre le savant Massaliote et « de substituer une idée plus juste aux idées absolument fausses ou imparfaites, » qu'avaient données de lui Polybe et Strabon.
(42) Cap Finistère.
(43) Des tonneaux, si l'on s'en tient à la leçon Vulgate. Notez que Strabon parle ailleurs avec une sorte d'admiration de cette industrie gauloise de la tonnellerie (Liv. V, I, 12. - Cf. supr. ibid., 8).
(44) Ampurias.
(45) Tarragone.
(46) Lisez Oeasun.
(47) Guipuscoa, Biscaye et partie des Asturies.
(48) Le passage auquel se réfère Strabon ne se retrouve pas dans son livre.
(49) Le Var a des crues si fortes que ses eaux boueuses souvent troublent la mer jusqu'à la hauteur de Nice, et quelquefois jusqu'à la hauteur du cap Ferrat. - V. sur ce sujet le savant ouvrage de M. A. de Chambrun de Rosemont, Études géologiques sur le Var et le Rhône. Nice, 1873. C'est la première fois que le bassin du Var a été décrit avec toute l'attention qu'il mérite.
(50) Cap Creus.
(51) Nîmes.
(52) Beaucaire et Tarascon.
(53) Antibes.
(54) Cavaillon.
(55) Embrun.
(56) Briançon.
(57) Entre Briançon et Uxeau près de Suze.
(58) La même que Rhode et Rhodanusie. V. Étienne de Byz. s. v.
(59) Agde.
(60) Taurenti ou la Ciotat.
(61) Hyères.
(62) Cap de Cette.
(63) Brescon.
(64) L'Aude.
(65) Étang de la Roubine.
(66) Arles.
(67) La Têt.
(68) Le Tech.
(69) La Tour de Roussillon près de Perpignan, et Elne.
(70) L'Aude.
(71) L'Orbe.
(72) L'Hérault.
(73) Béziers.
(74) Agde.
(75) Solin place La Crau en Ligurie : In Liguria quoque Lapidarios Campos, quod, ibi eo (Hercule) dimicante, creduntur pluvisse saxa. - Cf. supr. p. 7. Comment. d'Eustathe sur les v. 76 et suiv. de Denys le Périégète, Eudoc. p. 214, et dans notre t. II, Historiens, Denys Halic. I, 41.
(76) D'après la conj. de Müller, v. n. 3 ci-contre : « semblables, polis, et d'égale grosseur. Les deux savants ont expliqué aussi la cause de cette ressemblance. »
(77) La Ciotat ou la Seyne, ou plutôt Taurenti, petite localité qui est dans les environs.
(78) Hières.
(79) Antibes.
(80) Nice.
(81) Fréjus.
(82) Les îles d'Hières.
(83) Pianosa.
(84) Île Sainte-Marguerite.
(85) Cannes (?).
(86) La Durance.
87) Cavaillon.
(88) L'Isère.
(89) La Sorgue.
(90) Védenne (d'Anville), Port de la Traille (Scaliger, Valois, Ménard).
(91) Château de Mornas sur le Rhône ou château de Lers vis-à-vis de Roquemaure, près d'Avignon.
(92) Lubéron.
(93) Lyon.
(94) La Saône.
(95) Le Léman.
(96) Le Doubs.
(97) Nîmes.
(98) Angora ou Engareh.
(99) Toulouse.
(100) Toulouse.
(101) L'Aude.
(102) Suppléez pour la liaison des idées : Ne confondons pas l'Aquitaine et les Aquitains, car, à vrai dire, etc. » -
(103) Bordeaux.
(104) Couéron.
(105) Saintes.
(106) Depuis les Pyrénées jusqu'à Arcachon.
(107) Canton de Comminges.
(108) S. Bertrand (?).
(109) Ozon, près de Bagnères-de-Bigorre.
(110) Environs d'Auch.
(111) L'ancien Vivarais, partie de l'Ardèche.
(112) Anc. Vélay, Haute-Loire.
(113) Auvergne, Limousin, Périgord.
(114) Agénais.
(115) Quiercy.
(116) Berry.
(117) Rouergue (Rhode,), départ de l'Aveyron.
(118) Gévaudan, partie de la Lozère et de la Haute-Loire.
(119) Quelques éditeurs ont cru devoir reporter cette phrase à la fin du paragraphe précédent.
(120) Clermont.
(121) Orléans.
(122) Pays de Chartres.
(123) Alise-Sainte-Reine (Côte-d'Or).
(124) En latin, Sequana, la Seine, César, G. G. .1, 1 VII, 57, 53; P. Méla, III, 2; Pline, IV, XXXIII, 19; Vib. Sequester « Luteciam Parisiorum circumfluit. » - Le peuple mentionné ensuite est le peuple des Séquanes, Sequani. César, ibid. 1, 2, 6, 8, 9, 31, 35; VI, 10, etc. V. la page suivante.
(125) Châlons-sur-Saône.Vulg. Cabillonum, César. G. G. VII, 42, 90.
(126) Le mont Beuvray, près d'Autun.
(127) Franche-Comté.
(128) Vulg. Helvetii, les Suisses.
(129) Pays messin.
(130) Alsace.
(131) Pays de Langres.
(132) Toul et Nancy.
(133) Pays de Trèves.
(134) Pays de Cologne.
(135) Pays de Cambray, de Tournay et de Bavay.
(136) Entre l'Escaut et la Meuse.
(137) Vulg. les Sicambres.
(138) Reims.
(139) Arras.
(140) Pays de Liège.
(141) Dép. du Pas-de-Calais et partie de la Flandre.
(142) Beauvaisis.
(143) Dép. de la Somme.
(144) Le Soissonnais.
(145) Vulg. Lutecia, Paris.
(146) Pays de Meaux et Lisieux.
(147) Morbihan, Vannes.
(148) Tous ces détails sur les vaisseaux des Vénètes sont empruntés à César, G. G. III, 11.
(149) Osismii, dans César. G. G. II, 34; 111, 9; VII, 72. Départ du Finistère, Concarneau ou Carhaix.
(150) Comp. César, Guerre des Gaules, VI, 16.
(151) Wissant.
(152) Pour les expéditions de César en Bretagne et les résultats de ces expéditions, v. les Commentaires G. G. IV, 23-36, et V, 8-23.
(153) V. le discours de Critognat dans César, G. G. VII, 77.
(154) Monaco.
(155) Gênes.
(156) Savone.
(157) Albenga.
(158) Vintimille.
(159) Les Vindolices, les Rhætes et leurs diverses tribus.
(160) Dans les Alpes au N.-E. de l'Adriatique, à l'E. des Hénétes.
(161) Cf. Strab. supr. § 7.
(162) La Celtique.
(163) Polybe, II, 14.