Gesta Hungarorum

ANONYME Notaire anonyme du roi BELA

 

GESTA HUNGARORUM

Les 52 premiers paragraphes sont la traduction du comte Potocki ; les 5 derniers sont  traduits par Marc Szwajcer

 

 

 

 

ANONYME,

 

Notaire anonyme du roi BELA (1)

 

GESTA HUNGARORUM (2)

 

NOTICE DE WIKIPEDIA

La Gesta Hungarorum (latin pour la geste des Hongrois), une chronique de l'histoire hongroise primitive écrite par l'auteur inconnu Magister P., qui pourrait être Gallus Anonymus. Elle est contenue dans un manuscrit écrit aux alentours de 1200. Elle est un mélange de traditions orales, de sources anciennes, et d'inventions de la part de son auteur.

La chronique a été écrite selon un genre littéraire populaire à cette époque, la vie d'un héros. L'auteur essaie de définir les familles régnantes du royaume de Hongrie comme les descendants des Árpáds ou de leurs alliés, et de glorifier les mérites des Árpáds en rapport avec l'occupation magyare du bassin des Carpates au Xe siècle.

La "Gesta Hungarorum" contient des faits authentiques, des faits inexacts, et des informations qui ne peuvent pas être recoupées par d'autres sources. Quelques parties du texte sont considérées par la plupart des auteurs contemporains comme de pures inventions (par l'auteur ou par ses prédécesseurs), et contredisent les autres chroniques franques et tchèques. Beaucoup de noms de personnes ne sont simplement que des dérivations de toponymes locaux.

Le grand sujet de controverse de la Gesta Hungarorum concerne la mention de l'existence des souverains locaux de Gelou, Glad et Menumorout en Transylvanie à l'arrivée des Magyars au Xe siècle (voir : origines des Roumains). L'existence de ces trois duchés habités principalement par des Valaques et des Slaves est controversée, et niée par presque tous les historiens hongrois et slovaques, alors que des historiens roumains et serbes soutiennent la thèse inverse. Les arguments principaux contre cette existence est la présence d'informations prouvées comme fausses dans la Gesta Hungarorum, et le fait que la Gesta Hungarorum mentionne la présence de Coumans parmi les peuples qui auraient vécu en Transylvanie en ce temps-là, alors les Coumans n'arrivèrent que 150 ans après les Hongrois. L'opinion adverse soutient que la Gesta confond en fait les Coumans avec les Petchenègues, qui parlaient une langue très proche de celle des Coumans, et qui vivaient sur un territoire à peu près identique.

Les hypothèses sur la réelle identité de l'auteur incluent :

·            Le notaire (chancelier) du roi King Bela III de Hongrie (1172-1196) - Cette version est celle acceptée généralement aujourd'hui

·            Le chancelier du roi Bela II de Hongrie (1131-1141). Si ceci était vrai, l'auteur pourrait être un certain Petrus, chancelier en 1124 de l'ancien roi Étienne II de Hongrie.

·            Péter Pósa, évêque de Bosnie

 

 

 

 

Incipit Prologus in Gesta Hungarum

P. dictus magister ac quondam bone memorie gloriosissimi Bele regis hungarie notarius N. suo dilectissimo amico viro uenerabili et arte litteralis scientie inbuto, salutem et sue peticionis effectus.

Dum olim in scolari studio simul essemus et in hystoria trojana, quam ego cum summo amore complexus ex libris darethis frigii ceterorumque auctorum, sicut a magistris meis audiveram in unum volumen proprio stilo compilaveram, pari voluntate legeremus, petisti a me ut sicut hystoriam trojanam bellaque grecorum scripseram; ita et genealogiam regum hungarie et nobilium suorum qualiter septem principales persone que Hetumoger vocantur de terra scithica descenderunt, vel qualis sit terra scithica et qualiter sit generatus dux almus, aut quare vocatur almus primus dux hungarie a quo reges hungarorum originem duxerunt, vel quot regna et reges sibi subjugaverunt, aut quare populus de terra scithica egressus per ydioma alienigenarum hungarii et in sua lingua propria mogerii vocantur tibi scriberem.

Promisi enim me facturum; sed aliis negotiis impeditus, tue peticionis et mee promissionis jam pene eram oblitus, nisi mihi per litteras tua dilectio debitum reddere monuisset. Memor igitur tue dilectionis quamvis multis et diversis hujus laboriosi seculi impeditus sim negotiis, facere tamen aggressus sum que facere jussisti, et secundum tradiciones diversorum hystoriographorum divine gratie fultus auxilio optimum estimans ut ne posteris in ultimam generationem oblivioni tradatur. Optimus ergo duxi ut vero et simpliciter tibi scriberem, quod legentes possint agnoscere quomodo res geste essent. Et si tam nobilissima gens hungarie primordia sue generationis, et fortia queque facta sua, ex falsis fabulis rusticorum vel a garrulo cantu joculatorum quasi sompniando audiret, valde indecorum et satis indecens esset. Ergo potius ammodo, de certa scripturarum explanatione, et aperta hystoriarum interpretatione rerum veritatem nobiliter percipiat.

Felix igitur Hungaria,
Cui sunt dona data varia.
Omnibus enim horis
Gaudeat de munere sui litteratoris.

Quia exordium generalogie regum suorum et nobilium habet, de quibus regibus sit laus et honor regi eterno et sancte marie matri eius per gratiam cujus reges hungarie et nobiles regnum habeant felici fine hic et in euum. AMEN.

 

PROLOGUE

P. appelé le maître et notaire du défunt et très glorieux Béla, roi de Hongrie, d’heureuse mémoire, à N. son plus cher ami, homme vénérable et imprégné de la connaissance des lettres: Salutations, et achèvement de sa demande.

Quand autrefois nous étudiions ensemble et lisions avec un égal enthousiasme l'histoire de Troie que j'avais eu grand plaisir à composer en un volume avec mon style personnel à partir des livres de Dares Phrygius (3), d'autres auteurs, et ce que j'avais entendu de mes maîtres. Tu m’as demandé que, de la même manière que j'avais écrit l'histoire de Troie et les guerres des Grecs, d'écrire pour toi la généalogie des rois de Hongrie, sa noblesse, la manière dont les sept personnes appelées les Hetumoger (4), vinrent de la terre Scythe, à quoi ressemblait cette terre Scythe, comment naquit le duc Almos et pourquoi Almos, dont les rois de Hongrie tirent leur origine, est nommé le premier duc de Hongrie, combien de royaumes et de dirigeants furent conquis et pourquoi les peuples venant juste après de la terre Scythe furent appelés Hongrois dans le parler des étrangers, et Magyars dans leur propre pays.

Je t’ai vraiment promis de le faire, mais empêché par d'autres problèmes, j'aurais peut-être entièrement oublié ta demande et ma promesse, si, dans une lettre, ta gentillesse ne m’avait pas admonesté pour me décharger de cette dette. Conscient donc de ton amour, et bien que freiné par les nombreuses et diverses affaires de ce monde ennuyeux, je me suis mis à faire ce que tu m’as demandé, soutenu par la grâce de Dieu et selon les traditions provenant des divers historiens, visant au mieux pour que tout cela ne soit pas perdu pour la postérité dans la génération à venir. Je pense qu'il vaut mieux écrire honnêtement et simplement, de sorte qu’en le lisant, ils puissent savoir ce qui s’est passé. Et il serait plus indigne et complètement indécent pour le si noble peuple de Hongrie d’entendre, comme dans un rêve, l’origine de sa race, de sa bravoure et de ses actes à partir de fausses fables paysannes et du babillage des chansons de ménestrels. Ne peuvent-ils pas percevoir plus noblement la vérité des sujets à partir d’une explication claire des textes et d’une interprétation directe des faits historiques?

Heureuse Hongrie donc, à laquelle sont attribués des talents variés. Chacun devrait se réjouir à chaque heure du cadeau de son écrivain. Car il fait le commencement de la lignée de ses rois et des nobles. Pour de tels rois, louange et honneur au Roi éternel et à la sainte Marie, mère de Dieu, grâce auxquels les rois de Hongrie et leur noblesse règnent de façon heureuse maintenant et à jamais. AMEN.


 

 

 


 

 

Anonymus Bele regis Hungarie notarius (Magister P.)

GESTA HUNGARORUM

 

De Scithia

Scithia igitur maxima terra est que dentumoger dicitur; uersus orientem finis cuius ab aquilonali parte extenditur usque ad nigrum pontum. A tergo autem habet flumen quod dicitur thanais cu paludibus magnis ubi ultra modum habundanter inueniuntur zobolini ita quod non solum nobiles et ignobiles uestiuntur inde, uerum etiam bubulcj et subbulci ac opiliones sua decorant uestime(n)ta in terra illa. Nam ibi habundat aurum et argentum et inueniuntur in fluminibus terre illius preciosi lapides et gemme. Ab orientali uero parte uicina scithie fuerunt gentes gog et magog, quos inclusit magnus alexander.

Scithica autem terra multum patula in longitudine et latitudine. Homines uero qui habitant eam uulgariter dentumoger dicuntur usque in hodiernum diem, et nullius umquam imperatoris potestate subacti fuerunt. Scithici enim sunt antiquiores populi, et est potestas scithie in oriente, ut supra diximus. Et primus rex scithie fuit magog filius iaphet et gens illa a magog rege uocata est moger. A cuius etiam progenie regis descendit nominatissimus atque potentissimus rex athila, qui anno dominice incarnationis cccc.L.i. de terra scithica descendes cum ualida manu in terram pannonie uenit, et fugatis romanis regnum obtinuit.

Et regalem sibi locum constituit iux(ta) danubium super calidas aquas et omnia antiqua opera que ibi inuenit renouari precepit, et in circuitu muro fortissimo edificauit, que per linguam hungaricum dicitur nunc buduuar, et a theotonicis ecilburgu uocatur. Quid plura? Iter hystorie teneamus. Longo autem post tempore de progenie eiusdem regis magog descendit vgek pater almi ducis, a quo reges et duces hungarie originem duxerunt, sicut in sequentibus dicetur. Scithici enim sicut diximus sunt antiquiores populi de quibus hystoriographi qui gesta romanorum scripserunt sic dicunt: quod scithica gens fuissent sapientis-sima et mansueta qui terram nonlaborant, et fere nullum peccatum erat inter eos. Non enim habebant domos artificio paratas sed tantum temptoria de filtro parata. Carnes et pisces et lac et mel manducabant et pigmentia multa habebant. Vestiti enim erant de pellibus zobolorum et aliarum ferarum. Aurum et argentum et gemmas habebant sicut lapides, quia in fluminibus eiusdem terre inueniebantur.

Non concupiscebant aliena, quia omnes diuites erant, habentes animalia multa et uictualia suficienter. Non erant enim fornicatores sed solummodo unusquisque suam habebat uxorem. Postea uero iam dicta gens fatigata in bello, ad tantam crudelitatem peruenit ut quidam dicunt hystoriographi, quod iracundia ducti humanan manducassent carnem et sanguinem bibissent hominum. Et credo quod adhuc eos cognoscetis duram gentem fuisse de fructibus eorum. Scithica enim gens a nullo fuit subiugata. Nam darium regem persarum cum magna turpitudine scithici fecerunt fugere, et perdidit ibi darius octoginta milia hominum, et sic cum magno timore fugit in persas. Item scithici cirum regem persarum cum trecentis et XXX. milibus hominum occiderunt. Item scithici Alexandrum magnum filium phylippi regis et regine olympiadis, qui multa regna pugnando sibi subiugauerat, ipsum etiam turpiter fuauerunt. Gens namque scithica dura erat ad sustinendum omnem laborem et erant corpore magni scithici et fortes in bello. Nam nichil habuissent in mundo, quod perdere timuissent pro illata sibi iniuria. Quando enim scithici uictoriam habebant, nichil de preda uolebant, ut moderni de posteris suis, sed tantummodo laudem exinde querebant.

Et absque dario et cyro atque alexandro, nulla gens ausa fuit in mundo in terram illorum intrare. Predicta uero scithica gens dura erat ad pugnandum, et super equos ueloces et capita in galeis tenebant, et arcu ac sagittis meliores erant super omnes nationes mundi, et sic cognoscentis eos fuisse de posteris eorum. Scithica enim terra quanto a torrida zona remotior est, tanto propagandis generibus salubrior. Et quamuis admodum sit spatiosa tamen multitudinem populorum in ibi generatorum nec alere sufficiebat, nec capere. Qua propter septem principales persone, qui hetumoger dicti sunt (,) angusta locorum non sufferentes ea maxime deuitare cogitabant. Tunc hee septem principales persone habito inter se consilio constituerunt, ut ad occupandas sibi terras quas incolere possent, a natali discederent solo, sicut in consequentibus dicetur.

Quare hungari dicitur

Nunc restat dicere quare populus de terra scithica egressus hungari uocantur. Hungari dicti sunt a castro Hungu, eo quod subiugatis sibi sclauis, VII. principales persone intrantes terram pannonie diutius ibi moratj sunt. Vnde omnes nationes circumiacentes, uocabant almum filium vgek ducem de hunguar, et suos milites uocabant hunguaros. Quid plura? His omissis redeamus ad propositum opus, iterque hystorie teneamus, et ut spiritus sanctus dictauerit inceptum opus perficiamus.

De almo primo duce

Anno dominice incarnationis, D. CCC. XVII II, vgek, sicut supra diximus, longo post tempore de genere magog regis erat quidam nobilissimus dux scithie, qui duxit sibi uxorem in dentumoger filiam eunedubeliani ducis, nomine emesu. De qua genuit filium, qui agnominatus est almus. Sed ab euentu diuino est nominatus almus, quia matri eius pregnanti per sompnium apparuit diuina uisio in forma asturis, que quasi ueniens eam grauidauit. Et innotuit ei quod de utero eius egrederetur torrens, et de lumbis eius reges gloriosi propagarentur, sed non in sua multiplicarentur terra. Quia ergo sompnium in lingua hungarica dicitur almu, et illius ortus per sompnium fuit pronosticatum, ideo ipse uocatus est almus. Vel ideo uocatus est almus id est sanctus, quia ex progenio eius sancti reges et duces erant nascituri. Quid ultra?

De duce almo

Dux autem almus postquam natus est in mundum, factum est duci vgek, et suis cognatis magnum gaudium et fere omnibus primatibus scithie, eo quod pater suus vgek erat de genere magog regis. Erat enim ipse almus facie decorus, sed niger et nigros habebat oculos sed magnos, statura longus et gracilis. Manus uero habebat grossa et digitos prolixos et erat ipse almus pius, beniuolus, largus, sapiens, bonus miles hylaris dator omnibus illis qui in regno scithice tunc tempore erant milites. Cum autem ipse almus peruenisset ad maturam etatem, uelut donum spiritus sancti erat in eo licet paganus, tamen potentior fuit et sapientior omnibus ducibus scithie. Et omnia negotia regni eo tempore faciebant consilio et auxilio ipsius. Dux autem almus dum ad maturam etatem iuuentutis peruenisset, duxit sibi uxorem in eadem terra, filiam cuiusdem nobilissimi ducis, de qua genuit filium nomine arpad quem secundum duxit in pannoniam, vt in sequentibus dicetur.

De electione almi ducis

Gens itaque hungarorum fortissima et bellorum laboribus potentissima, ut superius diximus, de gente scithica, que per ydioma suum proprium dentumoger dicitur (,) duxit originem. Et terra illa nimis erat plena, ex multitudine populorum in ibi generatorum, ut nec alere suos sufficeret, nec capere ut supra diximus. Qvapropter tunc, VII. principales persone qui hetumoger uocantur usque in hodiemum diem, angusta locorum non sufferentes, habito inter se consilio, ut a natali solo discederent, ad occupandas sibi terras, quas incolere possent, armis et bello querere non cessarunt. Tunc elegerunt sibi querere terram Pannonie, quam udiuerant fama uolante terram athile regis esse, de cuius progenie dux almus pater arpad descenderat.

Tunc ipsi VII. principales persone conmuni et uero consilio intellexerunt, quod inceptum iter perficere non possent, nisi ducem ac precetorem super se habeant. Ergo libera uoluntate et communi consensu, VII. uirorum elegerunt sibi ducem ac preceptorem in filios filiorum suorum usque ad ultimam generationem Almum filium vgek, et qui de eius generatione descenderent, quia almus dux filius vgek et qui de generatione eius descenderent, clariores erant genere et potentiores in bello. Isti enim, VII. principales persone erant uiri nobiles genere, et potentes in bello fide stabiles. Tunc pari uoluntate almo duci sic dixerunt: Ex hodierna die te nobis ducem ac preceptorem eligimus. Et quo fortuna tua te duxerit, illuc te sequemur. Tunc supra dicti uiri pro almo duce more paganismo fusis propriis sanguinibus in unam uas ratum fecerunt iuremantum. Et licet pagani fuissent, fidem tamen iuramenti quam tunc fecerant inter se, usque ab obitum ipsorum seruauerunt tali modo.

De iuramento eorum

Primus status iuramenti sic fuit: ut quam diu uita duraret, tam ipsis, quam etiam posteris suis semper ducem haberent de progenie almi ducis.

Secundus status iuramenti sic fuit: ut quicquid boni per labores eorum acquirere possent, nemo eorum expers fieret.

Tercius status iuramenti sic fuit: ut isti principales persone qui sua libera uoluntate almum sibi dominum elegerant, quod ipsi et filij eorum nunquam a consilio ducis et honore regni omnino priuarentur.

Quartus status iuramenti sic fuit: ut siquis de posteris eorum infidelis fieret contra personam ducalem, et discordiam faceret inter ducem et cognatos suos, sanguis nocentis fuderetur, sicut sanguis eorum fuit fusus in iuramento, quod fecerunt almo duci.

Quintus status iuramenti sic fuit: ut siquis de posteris duci almi et aliarum personarum principalium iuramentj statuta ipsorum infringere uouerit, anathemati subiaceat in perpetuum.

Quorum VII. uirorum nomina hec fuerunt: Almus pater arpad, (1) Eleud pater Zobolsu a que genus saac descendit, Cundu pater curzan, Ound pater ete, a quo genus calan et colsoy descendit, Tosu pater lelu, huba, a quo genus zemera descendit. VII-us Tuhutum pater Horca, cuius filij fuerunt Gyyla et zombor, a quibus genus moglout descendit, ut inferius dicetur. Quid plura? Iter hystorie teneamus.

De egressu eorum

Anno dominice incarnationis D. CCC. V. XXX. IIII. sicut in annalibus continetur cronicis.Septem principales persone, qui hetumoger uocantur, egressi sunt de terra Scithia uersus occidentem. Inter quos almus dux filius ugek de genere magog regis uir bone memorie, dominus et consiliarius eorum, una cum uxore sua et filio suo arpad, et duobus filiis Hulec auunculi sui, scilicet zuard et cadusa, necnon cum multitudine magna populorum non numerata federatorum de eadem regione egressus est. Venientes autem dies plurimos per deserta loca, et fluuium etyl super tulbou sedentes ritu paganismo transnatauerunt, et nunquam uiam civitatis uel habitaculi inuenerunt. Nec labores hominum comederunt, ut mos erat eorum. Sed carnibus et piscibus uescebantur, donec in Rusciam, que Susudal uocatur, uenerunt.

Et iuuenes, eorum fere cottidie erant in uenatione. Vnde a die illo usque ad presens hungarij sunt pre ceteris gentjbus meliores in uenatu. Et sic almus dux cum omnibus suis uenientes terram intrauerunt ruscie, que uocatur susudal.

De Rutenia

Postquam autem ad partes rutenorum peruenerunt, sine aliqua contradicione usque ad ciuitatem Kieu transierunt et dum per ciuitatem Kyeu transissent fluuium deneper transnauigando, uolerunt regnum rutenorum sibi subiugare.

Tunc duces rutenorum hoc intelligentes timuerunt ualde, eo quod audiuerunt Almum ducem vgek, de genere athile regis esse, cuj proauj eorum annuatim tributa persoluebant. Attamen dux de hyeu conuocatis omnibus primatibus suis, habito inter se consilio, elegerunt ut pugnam promouerunt contra almum ducem, et magis uellent mori in bello, quam amitterent regna propria, et subiugati essent sine sua sponte duci almo. Statim dux de kieu missis legatis, VII. duces cumanorum suos fidelissimos amicos in adiutorium postulauit. Tunc hij VII. duces, quorum nomina hec fuerunt: Ed, Edum, Etu, Bunger, Ousad, pater ursuur, Boyta, Ketel pater oluptulma, non modica multitudine equitum insimul coadunata, causa amicicie ducis de Kyeu celerrimo cursu contra almum ducem uenerunt. Et dux de Kyeu cum exercitu suo obuiam processit eis, et adiutorio cumanorum armata multitudine contra almum ducem uenire ceperunt. Dux uero almus, cuius adiutor erat sanctus spiritus armis indutus ordinata acie, super equum suum sedendo,ibat huc et illuc confortans suos milites, et facto impetu, stetit ante omnes suos et dixit eis, O scithici et conmilitones mei, uirj fortissimi memores, estote initium uiarum uestrarum, quando dixistis, quod terram quam incolere possetis, armis et bello quereretis. Ergo nolite turbari de multitudine ruthenorum et cumanorum, qui assimilantur nostris canibus. Nam canes statim ut audiunt uerba dominorum suorum, nonne in timorem uertuntur? Quia uirtus non ualet in multitudine populi, sed in fortitudine animi. An nescitis quia unus leo multos ceruos in fugam uertit, ut dicit quidam philosophus? Sed hijs omissis dicam uobis, Quis enim potuit contra stare militibus Scithie? Nonne darium regem persarum scithici in fugam conuerterunt, et sic cum timore et maxima turpitudine fugiit in persas? et perdidit ibi octoginta milia hominum. Aut nonne cyrum regem persarum scithici cum trecentis XXX-ta milibus occiderunt? Aut nonne magnum alexandrum filium philippi et regine olimpiadis, qui multa regna pugnando sibi subiugauerat, ipsum etiam scithici turpiter fugauerunt? Vnde strennue et fortiter pugnemos contra eos, qui assimilantur nostris canibus, et sic multitudinem eorum timeamus, ut muscarum multitudinem. Hoc audientes milites almi ducis, multum sunt confortati. Statimque sonuerunt tubas bellicas per partes, et conmixta est utraque acies hostium, ceperuntque pugnare acriter inter se. Et interficiebantur plurimi de ruthenis et cumanis. Predicti uero duces ruthenorum et cumanorum, uidentes suos deficere in bello, in fugam uersi sunt, et pro salute uite properantes in ciuitatem Kyeu intrauerunt. Almus dux et sui milites persequentes ruthenos et cumanos usque ad ciuitatem Kyeu, et tonsa capita cumanorum almi ducis milites mactabant, tamquam crudas curcubitas. Duces uero ruthenorum et cumanorum in ciuitatem ingressi, uidentes audatiam scithicorum, quam muti remanserunt.

De pace inter ducem et ruthenos

Dux uero almus et sui milites adepta uictoria, terras ruthenorum sibi subiuga-uerunt, et bona eorum accipientes, in secunda ebdomada ciuitatem Kyeu ceperunt expugnare. Et dum scalas ad murum ponere cepissent, uidentes duces cumanorum et ruthenorum audatiam scithicorum timuerunt ualde. Et dum hoc intellexissent, quod eis obsistere non ualerent, tunc missis legatis dux de Kyeu et alij duces ruthenorum necnon cumanorum qui ibi fuerunt rogauerunt almum ducem, et principes suos, ut pacem facerent cum eis. Cum autem legati uenissent ad almum ducem et cum rogassent, ut domini eorum de sedibus non expellerentur suis, tunc dux almus inito consilio cum suis, sic legatos remisit rethenorum, ut duces et primates sui, filios suos in obsides darent, tributumque annuatim persoluerent decem milia marcarum, et insuper uictum uestitum et alia necessaria. Duces uero ruthenorum licet non sponte tamen hec omnia almo duci concesserunt. Sed rogauerunt almum ducem, ut dimissa terra galicie, ultra siluam Houos uersus occidentem in terram pannonie descenderent, que primo athila regis terra fuisset. Et laudabant eis terram pannonie ultra modum esse bonam. Dicebant enim, quod ibi confluerent nobilissimi fontes aquarum, danubius et tyscia, et alij nobilissimi fontes bonis piscibus habundantes. Quem terram habitarent sclauij, Bulgarij et Blachij, ac pastores romanorum. Quia post mortem athila regis terram pannonie romani dicebant pascua esse, eo quod greges eorum in terra pannonie pascebantur. Et iure terra pannonie pascua romanorum esse dicebatur, nam et modo romani pascuntur de bonis Hungarie. Quid plura?

De VII ducibus cumanorum

Dvx uero almus et sui primates, inito inter se consilio peticioni ducum ruthenorum satisfacientes, pacem cum eis facerunt. Tunc duces ruthenorum scilicet de Kyeu, et Sudal, ut ne de sedibus suis expellerentur, filios suos in obsides dederunt almo duci, et cum eis miserunt X-cem milia marcarum, et mille equos cum sellis et frenis more ruthenico ornatis, et centum pueros cumanos et XL. camelos ad onera portanda, pelles ermelinas et griseas sine numero, ac alia multa munera non numerata. Tunc prenominati duces cumanorum scilicet, Ed, Edumen, Etu, Bunger, pater Borsu, Ousad pater Vrsuuru, Boyta, a quo genus Brucsa descendit, Ketel, pater Oluptulma, cumuidissent pietatem almi ducis, quam fecit circa ruthenos, pedibus eius prouolutj se sua sponte duci almo subiugauerunt dicentes. Ex hodierna die nobis te dominum ac preceptorem usque ad ultimam generationem eligimus. Et quo te fortuna tua duxerit, illuc te sequemur. Hoc etiam, quod uerbo dixerunt almo duci, fide iuramenti more paganismo firmauerunt. Et eodem modo dux almus et suj primates eis fide se et iuramento se constrixerunt. Tunc hij VII. duces cumanorum cum uxoribus et filiis suis necnon cum magna multitudine in pannoniam uenire concesserunt.

Similiter etiam multi de ruthenis almo duci adherentes, secum in panoniam uenerunt, quorum posteritas usque in hodiernum diem per diuersa loca in Hungaria habitat.

 

 

GESTA HUNGARORUM

 

[1]I. De la Scythie.

LA Scythie est une grande terre située vers l'orient, & qui s'appelle Dentumoger ; ses frontières, s'étendent vers le nord jusques à la mer Noire, & elle a à dos, le fleuve Thanaïs & de vastes marais, là se trouvent les Zibelines, & elles y sont en grande quantité, que ce ne font pas seulement les riches qui en font usage, mais même les pâtres & les bergers. A l'orient de cette Scythie, sont les nations de Gog & de Magog que renferma Alexandre.

La Scythie a de grands pâturages, & les hommes qui l'habitent s'appellent Dentumoger. & elle n'a jamais été soumise à aucun Empereur. Les Scythes sont le plus ancien des peuples, & leur puissance est vers l'orient comme nous l'avons déjà dit. Le plus ancien Roi de Scythie fut Magog fils de Japhet, & de Magog vient le nom de Moger. De Magog descendait le fameux Attila, qui sortit de Scythie en l'année 451, se rendit maître de la Pannonie, après en avoir chassé les Romains & fit sa résidence sur les eaux chaudes, où il fit réparer tous les anciens édifices qui s'y trouvaient, & fit entourer la ville d'un mur très fort, cette ville s'appelle en Hongrois Buduvar, & les allemands l'appellent Ecilbourg.

Bien du temps après vivait Ugek père du Duc Almus & il descendait aussi de Magog, & de Ugek descendent les Rois & les Ducs de Hongrie, ainsi qu'il sera dit plus avant. Les Scythes sont le plus ancien des peuples, ainsi que nous l'a vous déjà dit plus haut, & voici ce qu'en disent les historiens de Rome, ils disent : Les Scythes sont sages & doux, ils ne travaillent point la terre, & les crimes sont inconnus chez eux ; ils n'ont point de maisons, mais seulement des tentes de toile, ils se nourrissent de viande de poisson, de lait & de miel, & ils ont beaucoup de troupeaux, ils s'habillaient avec les peaux des martres & des autres animaux. L'or l'argent & les pierreries étaient chez eux aussi communs que les pierres, parce qu'on les trouvait dans leurs fleuves.

Ils ne désiraient pas le bien d'autres, car ils étaient riches, & avaient des biens en abondance. Ils n'étaient point adultères & chacun d'eux se contentait de sa femme. Mais les guerres les rendirent si cruels, & les irritèrent tellement que l'on assure qu'ils mangeaient la chair des hommes & buvaient leur sang. — Et à présent même vous avouerez qu'ils sont encore assez durs & féroces. La terre de Scythie, n'a jamais été subjuguée par aucun Empereur. Et les Scythes ont fait fuir honteusement le Roi Darius, qui y perdit quatre-vingt mille hommes & retourna en Perse plein d'effroi & de terreur. Les Scythes ont aussi fait périr Cyrus avec trois cent & trente mille hommes des siens : ils ont aussi fait fuir devant eux, Alexandre le grand fils de Philipe & d'Olympias, qui avait subjugué tant de royaumes, car les Scythes étaient durs aux travaux, d'une haute stature, & très belliqueux, & lorsqu'ils avaient remporté la victoire, ils se contenaient de la gloire de l'avoir remportée, & dédaignaient le butin.

Excepté Darius, Cyrus, & Alexandre, personne n'a osé pénétrer dans leur pays. Les Scythes avaient d'excellents chevaux, ils avaient toujours le casque en tête, & tiraient de l'arc mieux qu'aucune nation du monde, & vous voyez la même chose chez les Hongrois qui descendent des Scythes. La Scythie éloignée des zones torrides, en est d'autant plus favorable à la propagation de l'espèce humaine, & quoiqu'elle fut très vaste, elle ne suffisait pas à nourrir la multitude d'hommes, qui y naissaient tous les jours. D'où il arriva que sept hommes des principaux du pays, formèrent le projet d'émigrer ; ces sept hommes sont connus sous le nom de Hetumoger. Et après avoir tenu conseil entre eux, ils convinrent de partir ensemble, & d'aller chercher d'autres terres, comme il sera dit plus loin.

II. Pourquoi ils ont été appelés Hongrois.

A présent, il faut dire pourquoi ce peuple sorti de Scythie s'est appelé Hongrois. Or donc il s'est appelé ainsi de la ville de Hungu, parce que les sept personnes principales étant entrées en Pannonie subjuguèrent les Slaves qui habitaient ce lieu, & y restèrent longtemps. Et les nations voisines appelaient Almus fils d'Ugek, le Duc de Hungvar & ses soldats les Hongrois. En voilà assez là-dessus, retournons à notre récit & achevons-le avec l'aide du saint esprit.[2]

III. De Almus premier Duc

EN l'année de J. C. 819, Ugek Duc de Scythie de la race de Magog, épousa Emesu fille du Duc Eunedubelien, & il en eut un fils qui fut appelé Almus. Mais ce fut un prodige qui donna lieu à l'appeler ainsi, car la mère d'Almus étant une fois endormie, une vision céleste lui apparut sous la forme d'un vautour, & la rendit enceinte, puis elle lui annonça que de son sein sortirait un torrent, & que de ses reins, sortiraient des Rois glorieux, mais qui ne régneraient pas dans leur pays. Et comme en Hongrois le sommeil se dit Almi, l'enfant conçu dans le sommeil fut appelé Almus, ou peut-être parce qu'Almus veut dire saint et que de saints Rois & de saints Ducs devaient naître de lui, mais en voila assez là-dessus.

IV. Du Duc Almus.

Almus étant venu au monde, donna bien de la joie à son père Ugek, & à tous ses parents, c'est à dire à presque tous les grands de la Scythie, parce que son père descendait de Magog. Almus était beau de visage, mais un peu noir ; il avait les yeux noirs & grands, la taille haute & mince, les mains grosses & les doigts longs. Au reste il était pieux, bienveillant, généreux, bon soldat & aimant à donner aux soldats ; enfin quoiqu'il fut païen le Saint Esprit lui accorda le don d’être le plus puissant & le plus sage prince de toute la Scythie. Le duc Almus se maria en Scythie avec la fille d’un Duc des plus illustres du pays, & il en eut un fils appelé Arpad, qu'il conduisit avec lui en Pannonie.

V. De l’élection du Duc Almus.

LA puissante & belliqueuse nation des Hongrois tire son origine de la nation Scythique, qui dans sa propre langue s'appelle Dentumoger, ainsi que nous l'avons dit plus haut. Et cette terre était trop pleine de monde, & ne pouvait ni contenir, ni nourrir ses habitants, ainsi que nous l'avons aussi dit plus haut. Alors sept personnes principales, qui jusqu'au jour d'aujourd’hui font appelées Detumoger tinrent conseil entre elles, & résolurent d'aller chercher de nouvelles terres, que l’on put acquérir par la voie des armes. Alors ils se déterminèrent à aller chercher la terre de Pannonie, parce que la renommée leurs avait appris que cette terre avait appartenue au Roi Attila, & que Almus père d'Arpad était de la même famille.

Ensuite les sept personnes principales convinrent d'élire un chef & toutes les voix se réunirent en faveur d'Almus fils d'Ugek, parce que sa famille était la plus illustre, & ils le firent leur Duc, lui & ses descendants jusqu’à la dernière génération ; & tous lui dirent : Depuis aujourd’hui tu seras notre Duc et notre commandant & nous te suivrons partout, où la fortune te conduira. Alors les hommes susdits suivant les rites du paganisme, versèrent leur propre sang dans un vase, et quoiqu'ils fussent païens, ils observèrent fidèlement leur serment jusques à leur mort.

VI. Du serment des sept chefs.

LE premier point du serment fut que : Tant qu'ils vivraient eux & leurs descendants, ils auraient toujours un Duc de la descendance du Duc Almus.

Le second point du serment fut : Que tout ce qu'ils pouvaient gagner par leurs travaux, tous y auraient part.

Le troisième point du serment fut : Que les sept personnes principales qui avaient élu le Duc de leur propre volonté, eux & leurs descendants ne pourraient jamais être écartés du conseil, ni privé des honneurs.

Le quatrième point du serment fut : Que si quelqu’un de leur postérité devenait infidèle à la personne, du Duc & faisait naître la discorde entre lui & ses parents, son sang devait être versé comme ils avaient versé le leur dans le serment qu'ils avaient fait au Duc Almus

Le cinquième point du serment fut : Que si quelqu'un des descendants du Duc Almus ou des sept personnes principales voulaient enfreindre quelqu'un des points du serment il devait être anathème.

Et les noms de ces sept personnes principales sont, Almus père d'Arpad, Eleud père de Zobolsu de qui descend la famille de Saac, Cundu père de Curzan, Ound père d'Ete de qui descendent les familles de Calan & de Colsoy, Tofu père de Lelu, Hubu de qui descend la famille de Zemera, & le septième était Tuhutum père de Horca, qui fut père de Gyyla & de Zombor, de qui descend la famille de Moglout comme il sera dit plus bas, mais en voila assez là-dessus.

VII. De leur sortie.

Or donc nos annales disent que l'an du seigneur 884, les sept personnes principales, appelées Hetumoger, ont quitté la Scythie & marché vers l'occident. Leur seigneur & leur conseiller fut Almus fils d'Ugek de la Race de Magog, Roi de glorieuse mémoire, Almus avait avec lui sa femme & son fils Arpad & deux fils de son oncle Hulec, savoir Zwafd & Cadusa & de plus une multitude immense de peuples alliés qui étaient sortis avec lui. Ils traversèrent pendant plusieurs jours des pays déserts, ils arrivèrent au fleuve Etel, qu'ils passèrent assis sur Tulbou à la manière des païens, & ils ne passèrent ni dans les villes ni dans les habitations, & ils ne mangèrent point le fruit du travail des hommes, mais ils se nourrissaient de chair & de poisson, jusques à ce qu'ils fussent arrivé à la Ruscie qui s'appelle Sussudal,

& leurs jeunes gens étaient tous les jours à la chasse, d’où il arrive qu’aujourd’hui même les Hongrois sont plus habiles à la chasse que tous les autres peuples. Et c'est ainsi que Duc Almus venant avec tous les siens, entra dans la terre de Russie qui est appelée Sussudal.[3]

VIII. De la Ruthénie.

Etant arrivés dans la contrée des Ruthéniens jusques à la ville de Kiev, l'envie leur prit de traverser le fleuve Denep, & de soumettre le royaume des Ruthéniens.

 Les chefs de ceux-ci l'ayant appris, furent en crainte, car on leur dit qu’Almus fils d’Ugek était de la même race qu'Attila, à qui leurs ancêtres avaient payé un tribut annuel. Cependant le duc de Kiev, convoqua les premiers de l'état, & ayant tenu conseil entre, eux ils y prirent la résolution de mourir plutôt que de perdre les royaumes qui leur appartenaient, ou les soumettre au Duc Almus. Ensuite le Duc de Kiev, envoya des Ambassadeurs demander du secours aux sept chefs des Coumans ses fidèles amis. Les noms des sept chefs étaient : Ed, Edum, Eru, Bunger, Ousad père d’Ursuur, Boyta, Retel, père d'Olouptulma, ils vinrent à la tête d'une nombreuse cavalerie combattre le Duc Almus. Mais celui-ci inspiré par le Saint-Esprit, se fit revêtir de son armure, rangea son armée en bataille & lui tint le discours suivant : « O Scythes ! ô mes compagnons de guerre, hommes vaillants, rappelez-vous qu'avant de vous mettre en marche, vous avez résolu d'acquérir par les armes & les combats, une terre que vous puissiez cultiver : ainsi ne vous effrayez pas de la multitude des Ruthéniens & des Coumans : ils ressemblent à nos chiens, car les chiens sont remplis de crainte, lorsqu'ils entendent la voix de leur maître. La force n'est pas dans la multitude du peuple, mais dans son courage, & ne savez-vous pas qu'un lion peut mettre en fuite une multitude de cerfs ; comme l'a dit un certain philosophe. Et qui pourra résister aux soldats de la Scythie. Les Scythes n'ont-il pas contraint Darius à fuir, après avoir perdu quatre vingt mille hommes des siens ? Les Scythes n'ont-ils pas fait périr Cyrus, avec trois cent trente mille de tes soldats ? Enfin n'ont-ils pas mis en fuite Alexandre le grand, fils du Roi Philipe & de la reine Olympias, qui avait fait la conquête de tant de pays. Ainsi combattons vaillamment contre ceux qui ressemblent à nos chiens, & ne craignons pas plus leur multitude que nous ne craindrions une multitude des mouches. » Les Soldats d'Almus se trouvèrent fort encouragés par ce discours. La trompette guerrière le fit entendre, & la bataille s'engagea, mais la perte d'un grand nombre de Ruthéniens & de Coumans obligea leurs chefs à se retirer dans la ville de Kyeu. Les soldats d'Almus les poursuivirent jusques aux portes, & ils hachaient les têtes rasées des Coumans, comme si elles n'eussent été que des courges crues. Quand aux chefs renfermés dans Kiev ils restèrent muets en voyant l'audace des Scythes.[4]

IX. De la paix entre le Duc & les Ruthéniens.

Almus ayant remporté cette victoire, s'empara des terres des Ruthéniens, fit enlever leurs biens, & dans la semaine suivante il commença le siège de Kyeu. Les chefs des Ruthéniens & des Coumans voyant que les Scythes posaient déjà des échelles, comprirent qu'ils ne résisteraient point à tant d'audace, & envoyèrent demander la paix. Almus l'accorda aux Ruthéniens, aux conditions que les chefs donneraient leurs fils en otage & qu'ils paieraient tous les ans un tribut de dix mille marcs, qu'ils fourniraient, des habits, des vivres, & autres choses de première nécessité.

Les Chefs de Ruthéniens furent obligés d'y consentir, mais ils prièrent Almus de traverser la terre de Galicie, ensuite la forêt de Hovos & d'entrer ainsi dans la terre de Pannonie, qui avait appartenu au Roi Attila, ils louèrent beaucoup cette terre, disant qu'elle était extraordinairement fertile, & que là était le confluent du Danube & de la Tyscia, & de beaucoup d'autres rivières poissonneuses. Cette terre était habitée par des Slaves, des Bulgares, des Blaques & des pâtres Romains, car ceux-ci y envoyèrent leurs troupeaux après la mort d'Attila, & c’est avec raison que la Pannonie a été appelée le pâturage des Romains, car encore aujourd’hui ils se nourrissent de la substance des Hongrois sur quoi il y aurait beaucoup à dire.[5]

X. Des sept Ducs des Coumans.

Almus & les autres Chefs, ayant tenu conseil entre eux, se résolurent à donner la paix aux Ruthéniens & à faire ce qu’ils leurs conseillaient. Alors les Duc de Kyeu & Sudal, donnèrent leurs fils en otage & envoyèrent dix mille marcs, mille chevaux avec des selles & des freins ornés à là manière des Ruthéniens, cent jeunes Coumans, quarante chameaux, des peaux hermelines & grises, & d'autres présents sans nombre. Alors les Chefs de Coumans dont nous avons déjà parlé, voyant avec quelle douceur Almus avait traité les Ruthéniens, se jetèrent à ses pieds & lui dirent : Depuis aujourd’hui nous te reconnaissons pour notre maître jusques à la dernière génération, & nous te suivrons partout où la fortune te conduira. Ensuite on se lia par des serments réciproques à la manière des païens. Les sept Chefs des Coumans allèrent en Pannonie avec leurs femmes, leurs enfants & une grande multitude de peuple.

 Beaucoup de Ruthéniens suivirent également Almus, & leur postérité subsiste encore dans plusieurs lieux de la Hongrie.[6]

 

De ciuitatibus lodomer et Galicia

Tvnc almus dux et alij principales persone qui hetumoger dicuntur, nec non duces cumanorum una cum cognatis et famulis ac famulabus suis egressi sunt de Kyeu, et in ductu ruthenorum Kyeuyensium uenerunt, usque ad cjuitatem lodomer. Dux uero lodomeriensis et sui primates obuiam amo duci usque ad confinium regni cum diuersis preciosis muneribus processerunt, et ciuitatem lodomeriam ultro ei aperuerunt. Et dux almus cum omnibus suis in eodem loco per tres ebdomadas mansit. In tercia uero ebdomada dux lodomeriensis duos filios suos cum omnibus filiis iobagionum suorum duci almo in obsides dedit. Et insuper duo milia marcarum argenti et centum marcas auri cocti, cum pellibus et paliis non numeratis et ccc. equos cum sellis et frenis, et XXV. camelos, et mille boues ad onera portanda, et alia munera non numerata tam duci quam suis primatibus presentauit.

Et in quarta ebdomada dux almus cum suis in galiciam uenit: et ibi requiei locum sibi et suis elegit. Hoc ducem galicie dux audiuisset, obuiam almo duci cum omnibus suis nudis pedibus uenit, et diuersa munera ad usum almi ducis presentauit, et aperta porta ciuitatis galicie quasi dominum suum proprium hospicio recepit, et unicum filium suum cum ceteris filiis primatum regni sui in obsidem dedit, et insuper x. farisios optimos, et ccc. equos cum sellis et frenis, et tria milia marcarum argenti, et cc. marcas auri, et uestes nobilissimas, tam duci quam omnibus etiam militibus suis condonauit. Dum enim dux almus requiei locum per mensem unum in galicia habuisset: tunc dux galicie ceterjque consocij suj quorum filij in obsides posti erant sic almum ducem et suos nobiles rogare ceperunt, ut utra howos uersus occidentem in terra pannonie descenderent.

Dicebant enim eis sic, quod terra illa nimis bona esset, et ibi confluerent nobilissimi fontes, quorum nomina hec essent, ut supra disimus, danubius, tyscia, Wag, Morisius, Crisius, Temus, et ceteri, que etiam primo fuisset terra athile regis. Et mortuo illo preoccupassent romani principes terram pannonie usque ad Danubium, ubi collocauissent pastores suos. Terram uero que iacet inter Thisciam et Danubium preoccupauisset sibi Keanus magnus dux bulgarie auus salani ducis, usque ad confinium ruthenorum et polonorum et fecisset ibi habitare sclauos et bulgaros. Terram uero que est inter thisciam et siluam igfon, que iacet ad erdeuelu, a fluuio morus usque ad fluuium zomus, preoccupauisset sibi dux morout, cuius nepos dictus est ab hungaris menumorout, eo quod plures habebat amicas, et terram illam habitarent gentes cozar qui dicuntur. Terram uero, que est a fluuio morus usque ad castrum vrscia, preoccupauissent quidam dux nomine glad de bundyn castro egressus adiutorio cumanorum ex cuius progenie ohtum fuit natus, quem postea longo post tempore sancti regis stephani, sunad filius dobuca nepos regis in castro suo iuxta morisium interfecit. Cuj etiam predictus rex pro bono seruicio suo uxorem et castrum ohtum cum omnibus apendiciis suis condonauit, sicut enim mos est bonorum suos fideles remunerare, quod quastrum nunc sunad nuncupatur. Quid ultra?

Quomodo pannoniam intrauerunt

Dvx uero alms et suj primates acquiescentes consiliis ruthenorum, pacem firmissimam cum eis fecerunt. Duces enim ruthenorum, ut ne de sedibus suis expellerentur filios suos ut supra diximus in obsides dederunt cum muneribus non numeratis. Tunc dux galicie, duo milia sagittatorum et III-a milia rusticorum ante ire precepit, qui eis per siluam houos uiam prepararent usque ad confinium hung. Et omnia iumenta eorum uictualibus et aliis necessariis onerauit, et pecudes ad uictum condonauit sine numero. Tunc VII. principales persone, quj hetumoger dicuntur, et hij VII. duces cumanorum, quorum nomina supra diximus una cum cognatis et famulis ac famulabus consilio et auxilio ruthenorum galicie sunt egressi in terram pannonie. Et sic uenientes per siluam houos ad partes hung descenderunt. Et cum illuc peruenissent, locum quem primo occupauerunt, Muncas nominauerunt, eo quod cum maximo labore ad terram quam sibi adoptabant peruenerant. Tunc ibi pro requie laborum suorum XL. dies permaserunt, et terram ultra quam dici potest dilexerunt, sclauj uero habitatores terre audientes aduentum eorum timuerunt ualde et sua sponte se almo duci subiugauerunt, eo quod audiuerant almum ducem de genere athile regis descendisse. Et licet homines fuissent salani ducis, tamen cum magno honore et timore seruiebant almo duci, omnia que sunt necessaria ad uictum, sicut decet domino suo offerentes. Et talis tjmor et tremor irruerat super habitatores terre et adulabantur duci et suis primatibus sicut serui ad suos proprios dominos. Et laudabant eis fertilitatem terre illius, et narrabant, quomodo mortuo athjla rege magnus keanus preauus ducjs salanj dux de bulgaria egressus, auxilio et consilio imperatoris grecorum preoccupauerat terram illam. Qualiter etiam ipsi sclaui de terra bulgarie conductu fuerunt ad confinium ruthenorum, et qualiter nunc salanus dux eorum se et suos teneret, et quante potestatis esset circa suos uicinos.

De hung castro

Tvnc dux almus et sui primates audientes talia leciores facti sunt solito, et ad castrum hung equitauerunt, ut caperent eum. Et dum castro metati essent circa murum, tunc comes eiusdem castri nomine Loborcy, qui in lingua eorum duca uocabatur, fuga lapsus ad castrum zemlum properabat. Quem milites ducis persequentes iuxta quendam fluuium comprehendentes, laqueo suspenderunt, in eodem loco. Et a die illo fluuium illum uocauerunt sub nomine eiusdem loborcy.

Tunc dux almus et sui castrum hung sunintrantes, diis immortalibus magnas uictimas fecerunt, et conuiuia per

IIII-or dies celebrauerunt. Quarto autem die inito consilio et accepto iuramento omnium suorum dux almus ipso uiuente filium suum arpadium ducem ac preceptorem constituit. Et uocatus est arpad dux hungarie et ab hungu omnes sui milites uocatj sunt hunguarie secundum linguam alienigenarum, et illa uocatio usque ad presens durat, per totum mundum.

De arpad duce

Anno domine incarnationis d. cccc°, iii°, arpad dux missis exercitibus suis totam terram que inter thisciam et budrug, usque ad vgosam sibi cum omnibus habitatoribus suis preoccupauit, et castrum borsoa obsedit, et tercio die pugnando apprehendit, muros eius destruxit, et milites salani ducis quos ibi inuenit, cathenis ligatos in castrum hung, duci precepit.

Et dum ibi per plures dies habitassent, dux et sui uidentes fertilitatem terre, et habundantiam omnium bestiarum et copiam piscium de fluminibus thiscie et Budrug, terram ultra quam dici potest dux arpad et sui dilexerunt.

Tandem uero dum hec omnia que acta fuerant dux salanus a suis fuga lapsus audiuisset, manum leuare ausus non fuit. Sed missis legatis suis more bulgarico ut mos est eorum minarj cepit, et arpadium ducem hungarie quasi deridendo salutauit, et suos pro riu hunguaros appelauit, et multis modi mirari cepit, qui essent et unde uenissent qui talia ausi facere fuissent. Et mandauit eis ut mala facta sua emendarent, et fluuium Budrug nullo modo transire auderent, ut ne ipse ueniens cum adiutorio grecorum et Bulgarorum, de malo facto eorum eis uicem reddens uix aliquem dimitteret, qui ad propria remeans salutis gaudia nuntiaret.

Missi uero salani ducis uenientes ad castrum zemlin, et transito fluuio Budrug secunda die ad ducem arpadium peruenerunt. Tercio autem die ducem arpadium uerbo domini sui salutauerunt, et mandata eius duci arpadio retulerunt. Dux autem arpad audita legatione salani superbi ducis, non superbe sed humiliter ei respondit dicens: Licet preauus meus potentissimus rex athila habuerit terram que iacet inter danubium et thysciam usque ad confinium bulgarorum, quam ipse habet. Attamen ego non propter aliquem timorem grecoru vel bulgarorum quod eis resistere non ualeam sed propter amiciciam salani duci uestri, peto de mea iusticia unam perticulam propter pecora mea, scilicet terram usque ad fluuium louiou et insuper peto ad ipso duce uestro, ut mittat mihi gratia ipsius duas langungulas plenas aqua danubij et unam sarcinam de herbis sabulorum olpar herbis scythicorum, idest dentumoger, et aque danubij si sint meliores aquis thanaydis.

Et data eis legatione diuersis eos muneribus ditauit, et capta beniuolentia eorum, repatriare precepit. Tunc dux arpad inito consilio eodem modo misit nuncios suos ad salanus ducem et misit ei: XII. albos equos, et XII. camelos, et XII. pueros cumanicos, et XII. puellas ruthenicas prudentissimas, et duodecim pelles ermelinas, et XII. zobolos et XII. pallia deaurata. Et missi sunt in legatione illa de nobilioribus personis: Oundu, pater ethe et alter Ketel, pater oluptulmae. Et tercium miserunt quendam strennuissimum militem nomine tursol, causa spectaculi qui inspiceret qualitatem terre, et cicius reuersus nuntiaret domino suo duci arpad.

De camaro castro

Missi uero arpad ducis oundu pater ethe et ketel pater oluptulma, et turzol miles cumanus cuius genealogia defecit in semetipso, uenientes fluuium budrug transnatauerunt in illo loco ubi paruus fluuius manans a saturholmu descendit in budrug.

Et sic transeuntes fluuium budrug, cum predictum paruum fluuium transirent quasi leti, tunc per inundationem aquarum, Ketel equo offendente in aquam submersus est, et sociis suis adiuuantibus uix a leto liberatus est. Tunc fluuius ille per socios Ketel uocatus est per risum ketelpotaca.

Et postea dux arpad per gratiam suam totam terram cum habitatoribus suis non tantum hec, sed etiam maiora hiis condonauit, quia dux arpad subiugata sibi tota terra pannonie pro fidelissimo seruicio suo eidem ketel dedit terram magnam iuxta danubium ubi fluuius Wag descendit. Vbi postea oluptulma filius ketel castrum construxit, quod camarum nuncupauit. Ad seruicium cuius castri, tam de populo secum ducto quam etiam a duce aquisito duas partes condonauit. Vbi etiam longo post tempore ipse ketel et filius suus tulma more pagnismo sepulti sunt. Sed terram illam que nunc Ketelpotaka uocatur, posteritas eius usque ad tempora andree regis filij caluj ladizlay habuit. Attamen rex andreas de posteris ketel canbium illum locum duabus de causis, unum quia utilis regibus erat ad uenationes, secundum quia diligebat partes illas habitare uxor sua eo quod propius ad natale solum esset, quia erat filia ducis ruthenorum, et timebat aduentum imperatoris theotonicorum, ut ne ulterius sanguinem petri regis hungariam intraret, ut in sequentibus dicetur.

XI. Des villes de Lodomerie & Galicie.

Alors le Duc Almus, & les sept personnes principales appelées Hetumoger, & les Ducs des Cumaniens avec leurs parents, leurs serviteurs & leurs servantes, sortirent de Kyeu, & conduits par les Ruthéniens de cette ville, ils arrivèrent à la ville de Lodomer ; le Duc de Lodomer & ses principaux vinrent à la rencontre d'Almus jusques aux frontières, lui apportant de riches présents, ils lui ouvrirent aussi les portes de Lodomer & le Duc Almus y passa trois semaines. Dans la troisième semaine le Duc de Lodomer donna en otage au Duc Almus deux de ses fils avec les fils des principaux du pays : de plus il lui donna deux mille marcs d'argent, & cent marcs d'or fondu, avec des pelisses & des manteaux sans nombre, trois cent chevaux avec des selles & des freins, vingt cinq chameaux, & mille bœufs, sans compter bien d'autres présents qu'il fit tant au Duc, qu'aux principaux de sa nation.

Dans la quatrième semaine le Duc Almus vint avec les siens en Galicie, & voulut s'y reposer. Lorsque le Duc de Galicie, l'eut appris, il alla avec tous les siens à la rencontre du Duc Almus, ayant les pieds nus & portants des présents divers, & ayant ouvert les portes de Galicia, il reçut le Duc, comme si c'était son maître. Il amena d'abord son fils unique, avec tous les fils des principaux de son royaume, de plus dix barbes excellents, trois cent chevaux avec des selles & des freins, trois mille marcs d'argent, deux cent marcs d'or, & des habits très nobles, voila les choses qu'il donna tant au Duc qu'à ses guerriers.

Lorsque le Duc Almus se fut reposé un mois en Galicie. Le Duc de Galicie & les autres dont les fils étaient en otages, commencèrent à prier le Duc Almus & ses nobles, qu'ils eussent à aller au delà de Howos à l'occident, & qu'ils descendissent en Pannonie, car ils disaient ainsi, que cette terre était extrêmement bonne. Que là était le confluent des nobles sources dont voici les noms : Danubius, Tysia, Wag, Morisius Crisius, & autres, enfin que cette terre avait appartenue au Roi Attila, & qu'après sa mort, les Princes romains avaient pris cette terre jusques au Danube, & y avaient placé leurs pâtres. Que la terre qui est entre la Theis & le Danube, fut occupée par Reanus le grand, Duc de Bulgarie aïeul du Duc Salanus, il l'occupa jusques aux frontières des Ruthéniens & des Polonais, & y fit habiter des Slaves & des Bulgares. Que la terre qui est entre la Theis & la forêt d'Igfon, qui est près d'Erdeleu (ou la Transylvanie) c'est à dire tout le pays depuis le fleuve Zomus, jusqu'au fleuve Morus, tout ce pays avait été pris par le Duc Morout, dont le petit fils était appelé Menoumorout, parce qu'il avait beaucoup de maîtresses, & cette terre était habitée par la nation appelée Cozar. Enfin que la terre qui est entre le fleuve Morus & la ville de Urscia, avait été prise par le Duc Gaad de Bundyn, qui s'en était emparé avec l'aide des Cumaniens. De la race de celui-ci était Ohtum, qui bien des années après, fut tué par Sunad fils de Dobuca neveu du Roi Etienne, parce qu'il était rebelle à ce Roi, qui fit présent à Sunad de la femme d'Ohtum & de son château. Car la coutume des bons rois, est de récompenser ceux qui les servent bien, & ce château qui est sur le Morizius s'appelle encore Sunad, mais en voilà assez la dessus.[7]

XII. Comment ils entrèrent en Pannonie.

LE Duc Almus & les principaux de la nation, goûtèrent le conseil des Ruthéniens, & firent la paix avec eux. Cependant les Ducs des Ruthéniens qui craignaient d'être chassés de leurs demeures, donnèrent leurs fils en otage, & y ajoutèrent un nombre prodigieux de présents. De plus le Duc de Galicie leurs donna deux mille fugitaires, & les fit précéder par trois mille paysans, qui leurs frayèrent un chemin à travers la forêt Howos, jusques aux frontières de la Hongrie. Il chargea toutes leurs bêtes de somme des vivres & d'autres choses nécessaires. C'est ainsi que se mirent en marche pour la terre de Pannonie les sept personnes principales que nous appelions à présent Hetumoger, aussi bien que les sept Chefs des Coumans, avec leurs parents, leurs serviteurs, & leurs servantes. Et venant par la forêt de Howos, ils descendirent du côté de Hung & le premier endroit qu'ils occupèrent, ils l'appelèrent Muncas, à cause de la peine qu'ils avaient à y parvenir. Ils restèrent là quarante jours & s'y plurent au-delà de tout ce qu'on peut imaginer.

Les Sclaves habitants de cette terre eurent grand peur & se soumirent au Duc Almus, parce qu'on leur dit, qu'Almus descendait d'Attila & quoique ce fussent des hommes du Duc Salanus, ils servirent le Duc Almus avec beaucoup de crainte & de respect, lui offrant tout ce qui est nécessaire à la vie, comme s'il eut été leur seigneur légitime. La crainte & la terreur s'était emparée des habitants de cette terre & ils flattaient le Duc & ses principaux seigneurs ; comme les serviteurs font à leurs seigneurs légitimes. Et ils louaient la fertilité de cette terre & ils contèrent comme quoi. Le Roi Attila étant mort, le grand Reanus Bisaïeul du Duc Salanus était sorti de la Bulgarie, & avait occupé cette terre par le conseil & le secours de l'Empereur des Grecs. Et ils contèrent aussi comment les Sclaves eux mêmes furent conduits de la terre de Bulgarie jusques à la frontière des Ruthéniens, & ils contèrent aussi comment leur Duc actuel se comportait chez lui, & quelle était sa puissance proportionnée à celle de ses voisins.

XIII. De la ville forte de Hung.

LE Duc Almus & les principaux de la nation ayant entendu ces choses, en furent fort aises & ils montèrent à cheval pour aller prendre la ville forte de Hung. Comme ils entouraient la ville le Comte de cette ville appelé Loborcy & dans leur langue Duca prit le parti de s'enfuir : & comme il approchait de la ville forte de Zemlun, les soldats du Duc Almus qui le poursuivaient, l'atteignirent auprès d’un certain fleuve, & le pendirent ; depuis lors ce fleuve fut toujours appelé Loborcy.

Alors le Duc Almus & les principaux de la nation, entrèrent dans la ville forte de Hung, offrirent un grand nombre de victimes aux Dieux immortels, & firent des festins pendant quatre jours.

Le quatrième jour Almus tint conseil, & ayant reçu le serment de tous, il fit nommer à sa place son fils Arpad ; & Arpad fut appelé Duc d'Hunguarie, &i cause de la ville de Hungu, les étrangers appelèrent ses soldats Hunguariens, & ce nom est encore aujourd’hui en usage dans tout le monde.

XIV. Du Duc Arpad.

L'An 904, Arpad envoya des soldats qui fournirent tout le pays qui est entre la Theiss & le Budrug, jusques à Ugosa : puis il assiégea la ville de Borsoa, & la prit d'assaut le troisième jour : il en fit raser les murailles & les soldats du Duc Salanus qu'il y trouva furent enchaînés & envoyé à Hung.

Arpad resta bien des jours à Borsoa (aujourd’hui Barzonos) & Arpad & les siens voyant la fertilité de cette terre, l'abondance des bestiaux dans les prairies, celle des poissons dans la Theiss & le Budrug, ils affectionnèrent ce pays au-delà de toute expression.

Le Duc Salanus ayant appris ces choses par les fuyards, n'osa pas lever la main, mais il envoya des ambassadeurs & les chargea de porter des menaces, comme c'est déjà l'usage des Bulgares : il appela Arpad comme par dérision Duc de Hungarie, & les siens Hunguariens, demandant avec surprise qui ils étaient, d'où ils venaient, comment ils osaient faire de telles choses, les avertissant de se corriger, & de ne point passer le Budrug, parce qu'autrement il marcherait contre eux avec l'aide des Grecs, & des Bulgares, leurs rendrait le mal pour le mal, & les détruirait jusqu'au dernier sans laisser personne, qui annonça chez eux la nouvelle de leur désastre.

Les envoyés de Salanus arrivèrent à la ville forte de Zemlin (aujourd’hui Zemblin) & le lendemain chez le Duc Arpad : le troisième jour ils furent introduits chez lui, & lui portèrent les ordres de Salanus. Le Duc écouta patiemment les discours orgueilleux de Salanus & y répondit avec humilité, disant : « Mon ancêtre le puissant Roi Attila, possédait à la vérité toute la terre qui est entre le Danube & la Theis, jusques à la frontière des Bulgares. Moi je ne crains véritablement ni les Grecs ni les Bulgares, & je sais que je puis leurs résister, mais je veux conserver l'amitié de votre Duc, c'est pourquoi je lui demande les pâturages qui vont d'ici au fleuve Soujou (aujourd’hui Sayo) & puis je demande de la grâce de votre Duc, qu'il m’envoie deux petits flacons pleins d'eau du Danube, & une botte des herbes qui croissent sur les fables d'Olpar, afin que je sache, si les herbes d'Olpar sont plus douces que les herbes Scythiques de Dentumoger & si l'eau du Danube est plus douce que celle du Thanaïs. » Puis Arpad fit des présents aux envoyés, & les renvoya dans leur pays pleins de bienveillance pour lui.

Ensuite le Duc Arpad tint conseil, & envoya aussi des ambassadeurs à Salanus, & il lui envoya douze chevaux blancs, douze chameaux, & douze garçons Coumaniens, & la Duchesse envoya douze filles Ruthéniennes très prudentes, douze pelisses hermelines, douze soboles, & douze manteaux brodés d'or, & les envoyés furent des personnes illustres, l'un était Oundu père d'Ethe, l'autre Retel père d'Oluptulmac. L'on envoya aussi avec eux un très brave soldat appelé Tursol, qui fut chargé d'examiner le pays & d'en rendre compte à Arpad.

XV. De la ville forte de Camarus.

Or donc les envoyés du Duc Arpad étaient Ourdu père d'Ethé, Rethel père d'Oluptulmac, & Tarzol guerrier Cumanien dont la race s'éteignit avec lui ; Ils traversèrent le Budrug dans l'endroit où ce fleuve reçoit les eaux de la petite rivière appelée Asaturholmu.

Or donc comme les Hongrois passaient le Budrug, la petite rivière était débordée, & le cheval de Retel tomba dans l'eau &, les compagnons de Retel eurent beaucoup de peine à le sauver : & ensuite comme ils étaient fort gais en faisant ce voyage, ils appelèrent ce fleuve Retel potaca (Patak en Hongrois veut dire Torrent & il y a une ville sur le Budrug qui s’appelle Patak.)

Dans la suite Arpad donna à Retel tout le pays qui est depuis la rivière d'Asatarholmu jusques à celle de Tulsuoa (peut-être la Tulsal) & comme Retel était un des plus fidèles serviteurs d'Arpad, celui-ci étant devenu maître de toute la Pannonie, lui donna bien d'autres terres, & entre autres celle où le Wag entre dans le Danube. Oluptulma fils de Retel y bâtit dans la suite une ville forte qu’il appela Camarus & il avait amené du monde pour y faire le service, & il y consacra les deux tiers tant de celui qu'il avait amené que de celui que le Duc avait acquis ; & bien du temps après Retel & son fils Tulma y furent ensevelis selon les rites du Paganisme. Quand à la terre qui s'appelle encore aujourd’hui Retel Potaca, la postérité de Rétel en fut en possession jusques au temps du Roi André fils de Ladislas le Chauve. Mais le Roi André échangea ce lieu avec les dépendants de Retel, & cela pour deux raisons. Premièrement, parce que ce lieu était agréable aux Rois qui venaient y chasser. Secondement parce que sa femme aimait à habiter ces contrées, peu éloignées de sa terre natale, car elle était fille du Duc des Ruthéniens & elle craignait l'arrivée de l’Empereur d’Allemagne, qui menaçait de venger le sang du Roi Pierre, ainsi qu’on le dira plus loin.

 

De monte turzol

Tvnc ound et ketel nec non turzol transeuntes siluam iuxta fluuium Budrug equitando, quasi brauium accipere uolentes. Super equos uelocissimos currentes, super uerticem unius alcioris montis ascenderunt. Quos turzol miles strennuissimus antecedens cacumen montis primus omnium ascendit. Et montem illum a die illo usque nunc montem turzol nominauerunt. Tunc hij tres domini super uerticem eiusdem montis terram undique perspicientes, quantum humanus oculus ualet, ultra quam dici potest dilexerunt et in eodem loco paganisimo, occiso equo pinguissimo magnum aldamas fecerunt.

Turzol a sociis accepta licentia, sicut erat uir audax et fidus in armis cum suis militibus ad ducem arpadium reuersus est ut ei utilitatem illius terre nuntiaret. Quod et sic factum est. Ound uero et ketel equitantes celerrimo curso egressi de monte turzol tercio die ducem salanum in castro opar iuxta thysiam inuenerunt.

Quem ex parte arpad salutauerunt, et ei secunda die post ingressum curie sue dona, que secum portauerant presentauerunt, ac mandata arpad ducis ei retulerunt. Dux salanus uisis muneribus et audita legatione tam suorum quam istorum, letior factus est solito, et missos arpad ducis benigne suscepit, et diuersis donis ditauit. Et insuper postulata arpad concessit.

Decimo autem die Ound, et Ketel accepta licentia a salano duce repatriare ceperunt. Per quos dux salanus duas lagungulas aqua danubij plenas et unam sarcinam de herbis melioribus sabulorum olpar, quasi pro risu deridendo, cum diuersis muneribus duci arpad misit. Et insuper cum habitatoribus suis terram usque ad fluuium Souyoy concessit.

Tunc ound et ketel ad ducem arpad cicius uenientes cum legatis salani ducis ac munera missa presentauerunt, et terram cum omnibus habitatoribus suis duci arpadio condonatam esse dixerunt. Vnde maxima leticia orta est in curia arpad ducis et per III. dies magnum conuiuium celebrauerunt. Et tunc roborata pace legatos salani ducis diuersis muneribus ditatos repatriare dimissit paciferos.

De Zerensze

Arpad uero dux et suj nobiles egressi de castro Hung cum magno gaudio ultra montem turzol castra metati sunt in campo iuxta fluuium tucota, usque ad montem zerenche, et inspicientes suer montana illa qualitatem illius loci et nominauerunt locum illum amabilem quod interpretatur in lingua eorum zerelmes eo quod multum dilexerunt illum locum, et a die illo usque nunc a zerelmu locus ille uocatur zerenche.

Vbi etiam dux arpad et omnes suj primates cum omni familia sua labore postposito, factis tuguriis requiei locum sibi elegerunt. Et non paucos ibi dies permanserunt, donec omnia loca sibi uicina subiugauerunt, scilicet usque ad fluuium Souyou et usque ad castrum salis.

Et ibidem iuxta tocotam et infra siluas dux arpad dedit terras multas diversorum locorum cum suis habitatoribus edunec et edumernec. Quas etiam terras posteritas eorum diduina gratia adiuuante, usque nunc habere meruerunt.

Predictus uero turzol per gratiam arpad ducis ad radicem eiusdem montis, ubi brudrug descendit in Tysciam, aquisiutit magnam terram. Et in eodem loco castrum construxit, terram quod nunc in presenti Hymusuduor nuncupatur.

De Borsod

Et dum ita radicati essent, tunc conmuni consilio et ammonicione omnium incolarum, missus est borsu, filius Bunger cum ualida manu uersus terram polonorum, qui confinia regni conspiceret et obstaculis confirmaret usque ad montem turtur, et in loco conuenienti castrum construeret, caausa custodie regni. Borsu uero accepta licentia egressus felici fortuna collecta multitudine rusticorum iuxta fluuium Buldua castrum construxit, quod uocatum est a populo illo Borsod eo quod parum fuerit.

Bors uero acceptis filiis incolarum in obsides, et factis metis per montes Turtur, reuersus est ad ducem arpad. Et de reuersione Borsu factum est gaudium magnum in curia ducis. Dux uero pro beneficio suo Borsum in eodem castro comitem constituit, et totam curam illius partis sibi condonauit.

De duce bycoriensy

Dvx uero arpad transactis quibusdam diebus, accepto suorum consilio nobilium, legatos misit in castrum Byhor ad ducem menumorout, petens ab eo quod de iusticia atthaui sui atthyle regis sibi concederet terram a fluuio Zomus usque ad confinium nyr, et usque ad portam mesesynam. Et misit ei donaria sua sicut primo miserat salano duci tytulensy. Et in legatione illa missi sunt duo strennuissimi milites, vsubuu pater zoloucu, et velec, a cuius progenie turda episcopus descendit. Erant enim isti genere nobilissimi sicut et alij de terra scythica egressi qui post almum ducem uenerant cum magna multitudine popu-lorum.

Qualiter contra byhor missum est

Missi uero arpad ducis vsubuu et veluc fluuium thyscie in portu lucy transnauigauerunt. Et hinc egressi in castrum Byhor uenientes ducem Menumorout salutauerunt, et donaria que dux eorum miserat ei presentauerunt. Tandem uero mandata arpad ducis ei referentes, terram, quam prenominauimus, postulauerunt.

Dux autem menumorout eos benigne recipit: et diuersis donis ditatos tercia die repatriare precepit. Quibus tamen ita respondit, dicens.

Dicite arpadio duci hungarie, domino uestro. Debitores sumus ei ut amicus amico in omnibus que ei necessaria sunt, quia hospes homo est et in multis indiget. Terram autem, quam petiuit a nostra gratia, nullatenus concedimus nobis uiuentibus. Hoc etiam indigne tulimus, quod salanus dux ei concessit maximam terram, aut propter amorem ut dicitur, aut propter timorem quod negatur. Nos autem nec propter amorem nec propter timorem ei condedimus terram, etiam quantum pugillus capere licet dixerit ius suum esse. Et uerba sua non conturbant animum nostrum, eo quod mandauerit nobis se descendisse de genere atthile regis qui flagellum dei dicebatur. Qui etiam uiolenta manu rapuerat terram hanc ab atthauo meo, sed tamen modo per gratiam domini mei imperatoris constantinopolitani nemo potest auferre de manibus meis.

Et hoc dicto dedit eis licentiam recendendi. Tunc vsubuu et veluc legati ducis arpad cursu celeriori ad dominum suum properaueruntt. Et uenientes mandata menumorout domino suo duci arpad retulerunt. Arpad uero dux et sui nobiles hoc audientes iracundia ducti sunt: et statim contra eum exercitum mittere ordinauerunt. Tunc constituerunt, quod tosu pater lelu et zobolsu filius eleud a que genus saac descendit, nec non tuhutum pater horca auus geula et zumbor a quibus genus moglout descendit irent. Qui cum a duce arpadio essent licentiati cum exercitu non modico egressi sunt et thysciam transnatauerunt in portu ladeo, nemine aduersario contradicente. Secundo autem die ceperunt equitare iuxta thysciam uersus fluuium zomus et castra metati sunt: in illo loco, ubi nunc est zobolsu. Et in eodem loco fere omnes habitatores terre, se sua sponte eis subiugauerunt, et pedibus eorum prouoluti filios suos in obsides dederunt: ut ne aliquid mali paterentur. Nam timebant eos fere omnes gentes, et quidam a facie eorum fugientes uix euaserrunt: qui uenientes ad menumorout facta eorum nuntiauerunt. Hoc audito talis et tantus irruit super menumorout, quod manum leuare ausus non fuit. Quia omnes habitatores timebant eos ultra quam dici potest, eo quod audiuerant almum ducem patrem arpadij a geonere atthile regis descendisse. Vnde nullus credebat se posse uiuere: nisi per gratiam arpad, filij almi ducis et suorum nobilium. Vnde plurimi se sua sponte subiugabant eis. Bene impleuit deus in almo duce et filio suo arpad propheciam quam cecinit moyses propheta a filiis israel dicens. Et locus quem calcuerit per uester, uester erit. Qua a die illo loca que calauerunt almus dux et filius suus arpad, cum suis nobilibus usque ad presens, posteritates eorum habuerunt et habent.

 

 

XVI. De la Montagne de Turzol.[8]

Ound, Retel, & Turzol sortirent de la forêt, & marchant le long du Budrug, ils se mirent à courir sur leur chevaux à qui plus vite, & ils arrivèrent ainsi sur le sommet d’une montagne, & le brave Turzol y arriva le premier & depuis lors cette montagne est appelée la montagne de Turzol. Ces trois seigneurs étant sur le haut de cette montagne, jetèrent les yeux autour d'eux sur la plaine, & elle leur plut extrêmement ; & suivant les rites du paganisme, ils tuèrent un cheval bien gras, & firent un grand Aldamas.[9]

Mais Turzol prit congé de ses compagnons, & retourna avec ses soldats chez Arpad, pour lui dire combien cette terre était belle. Ound & Retel allèrent très vite & ; ayant quitté le mont Turzol, ils arrivèrent le troisième jour dans la ville forte d'Opur[10] sur la Theiss où ils trouvèrent Salanus.

Les envoyés saluèrent Salanus de la part d'Arpad & deux jours après leur arrivée à sa cour, ils lui résentèrent les dons de leur maîtres, & expliquèrent les ordres dont ils étaient chargés : Salanus les ayant entendus & voyant leurs présents, en fut réjoui, reçut agréablement les envoyés, leurs donna diverses choses & leurs accorda ce qu'ils demandaient

Le dixième jour Ound & Retel prirent congé de Salanus : & celui-ci leurs donna deux flacons pleins d'eau du Danube, & une botte d'herbes qu'il fit en riant, choisir d'entre les meilleurs qu'il y eut dans les sables d'Olpar, & y joignant encore d'autres présents ; il céda aussi à Arpad tout le pays jusques au fleuve Souyou, avec ses habitants.

Ound & Retel retournèrent au plus vite elles le Duc Arpad, avec des envoyés de Salanus, ils présentèrent ses dons, & lui annoncèrent la cession de tout le pays qu'il avait demandé. Toute la cour d'Arpad en fit des réjouissances pendant trois jours, & le quatrième l'on fit des présents aux envoyés de Salanus, ils furent congédiés.

XVII. De Zerenze.

Mais le Duc Arpad & les plus nobles de la nation sortirent de la ville forte de Hung en montrant beaucoup de joie, & passant la montagne de Turzol, ils placèrent leur camp depuis le fleuve Tucota jusques au mont Zerenze. Car voyant la qualité du pays, ils lui donnèrent le nom d'aimable ce qui dans leur langue se dit Zerelmes, & parce que ce que ce lieu leur plut, ils l'appelèrent & il s'appelle encore aujourd'hui Zerenehé, qui vient du mot Zerelma.[11]

Le Duc Arpad & les premiers de la nation s’y plurent tellement qu'ils négligèrent tout travail & construisirent des cabanes & s'y reposèrent bien des jours avec leurs familles, jusques à ce que tous les environs leurs fussent fournis, jusques au fleuve Soyou & à la ville de Salis.[12]

Le Duc Arpad donna beaucoup des terres avec leurs habitants sur la rivière Tocato entre tes forets, à Edunec & à Edumernec, & la grâce divine les a conservé à leur postérité jusques au jour d'aujourd’hui.

Turzol dont nous avons parlé plus haut, obtint aussi d’Arpad les terres, qui sont au pied de ce mont, où le Budrug tombe dans la Theiss, & il y fit bâtir une forteresse en terre, qui aujourd’hui s'appelle Hymusu deor.[13]

XVIII. De Borsod.

Lorsqu'ils eurent pris racine, tous convinrent qu’il serait à propos de reconnaître la frontière du côté des Polonais, et de la fixer par des obstacles jusques au mont Tatur. Bunger fils de Borsu y fut envoyé avec une forte troupe ; il prit congé, & partit avec une fortune favorable, il rassembla un grand nombre des paysans & construisît un fort sur le fleuve Buldua, & ce fort fut appelle Borsod parce qu'il était petit.[14]

Bors reçut des otages des habitants, posa des bornes & revint par les montagnes de Tatur, & son retour fit naître bien de la joie dans le cœur d'Arpad.

XIX. Du Duc de Byhor.

LE Duc Arpad ayant tenu conseil avec les siens, envoya à la ville de Byhor[15] vers le Duc Menomorout, & lui demanda qu'en considération de son aïeul Attila, il lui donna la terre qui est entre le fleuve Zomus & les frontières de Nyr, & jusqu’à la porte Mezesyna, & il lui envoya des présents comme il en avait envoyé à Salanus Duc de Tytul. Deux braves soldats furent chargés de cette mission, savoir Usubuu père de Zoloucu, & Velec de qui descend l’Evêque Turda. C'étaient deux hommes très nobles venus de Scythie après le Duc Almus, avec une grande multitude de peuple.

XX. Comment l’on envoya contre Byhor

OR donc les envoyés d'Arpad traversèrent la Theiss, dans le port de Lucy, & étant sorti par là ils vinrent à Byhor, & saluèrent le Duc Menumorout, & s'acquittant de la commission dont ils étaient chargés, ils demandèrent la terre dont il a été fait mention plus haut.

Le Duc Menumorout les reçut avec bonté, & après leurs avoir fait divers présents, il leurs dit :

« Dites à votre seigneur Arpad Duc de Hongrie, qu'il peut attendre de nous, tous les services que l'on demande a ses amis, & auxquels il a droit en qualité d'hôte, car il est étranger & doit avoir besoin de beaucoup de choses. Mais pour ce qui est de la terre qu'il nous demande, il ne l'aura pas tant que nous vivrons. Nous avons souffert impatiemment que le Duc Salanus lui ait donné une si grande terre, à ce qu'il dit par amitié, mais dans la vérité il ne l'a fait que par crainte. Mais pour nous, nous ne lui donnerons pas seulement une poignée de terre, ni par amitié ni par crainte, à moins qu'il ne nous dise quel droit il y peut avoir. Ses paroles ne troublent point notre âme, il descend du Roi Attila, qui se disait le fléau de Dieu, & qui a enlevé ce pays-ci à mes ancêtres, mais moi je le tiens de la faveur des Empereurs de Constantinople & personne ne me l'enlèvera. » Après avoir dit ces paroles le Duc de Byhor congédia les envoyés d'Arpad. Usubuu & Velec envoyés du Duc Arpad retournèrent aussitôt chez lui & lui rapportèrent les paroles du Duc de Byhor. Alors le Duc Arpad & ses nobles se mirent en colère, & résolurent aussitôt d'envoyer une armée dans le pays de Byhor. Les Chefs de cette armée furent Tosu père de Lelu, Zobolsu fils de Eleud, de qui descend la famille de Saac, & Tuhutum père de Horca aïeul de Geula & de Zumbor de qui descend la famille de Moglout. Ils partirent à la tête d'une belle armée & passèrent la Theiss dans le port de Ladeo, sans que personne s'opposa à leur passage. Le second jour ils marchèrent le long de la Theis jusques au fleuve Zomus, & campèrent là ou est aujourd’hui Zobolsu. Les peuples qui y habitaient alors, tombèrent à leurs pieds & leurs offrirent leurs fils en otages. Car toutes les nations les craignaient & ceux qui échappèrent, vinrent auprès de Menumorout Duc de Byhor, qui s'effraya tellement qu'il n'osa pas lever la main : Car tous les habitants les craignaient au-delà de toute expression, car ils avaient entendu dire que le Duc Almus père d'Arpad, descendait du Roi Attila, en sorte que personne ne croyait pouvoir vivre que par la grâce d'Arpad, fils du Duc Aimas, & ils se soumettaient à lui & à ses nobles. Ainsi Dieu remplit bien dans la personne du Duc Almus & de son fils Arpad, la prophétie de Moïse au sujet d’Israël : « Partout où vous poserez votre pied, la terre sera à vous. » Car depuis lors, tous les lieux où le Duc Almus & son fils Arpad posèrent le pied, furent à eux, & leur postérité les possède aujourd’hui.

 

De Zobolsu

Tvnc zobolsu uir sapientissimus considerans quendam locum iuxta thysciam et cum uidisset qualitatem loci, intellexit esse munitissimum ad castrum faciendum. Communi ergo consilio sociorum suorum congregatione facta ciuium fecit fossatam magnam et castrum fortissimum edificauit de terra. Quod nunc castrum zobolsu nuncupatur.

Tunc Zobolsu et socij suj de incolis terre ad castrum illud multos ordinauerunt seruientes, qui nunc ciuiles uocantur. Et dimissis ibi militibus sub quodam nobilissimo milite nomine eculsu se longius ire preparauerunt. Tunc zobolsu et socij suj totum exercitum in duas partes diuiserunt, ut una pars iret iuxta fluuium zomus et altera parss per partes nir. Zobolsu et thosu pater Lelu cum medietate exercitus egressi sunt per crepidinem thyscie suiugando sibi gentes, et uenerunt uersus fluuium zomus ad illum locum qui nunc dicitur saruuar. Et in eodem loco infra paludes thosu pater lelu congregata multitudine populi fossatam magnam fecit, et castrum munitissimum de terra construxit, quod primo castrum thosu nominatum fuit: nunc uero saruuar uocatur. Et acceptis filiis incolarum in obsides, castrum militibus plenum dimisserunt.

Tunc thosu per peticionem ne populi domino suo duci arpad subiugati, fecit stare forum, inter nir et thysciam. Cui etiam foro nomen suum imposuit, quod usque nunc forum thosu nuncupatur. Post uero zobolsu et thosu hinc egressi usque ad castrum zotmar peruenerunt. Et castrum per tres dies pugnando obsidentes uictoriam adeptj sunt. Et quarto die castrum intrantes milites ducis menumorout quos ibi apprehendere potuerunt cathenis ferreis obligatos in teterrima carceris inferiora miserunt, et filios incolarum in obsides acceperunt. Et castrum militibus plenum dimiserunt. Ipsi uero ad portas mezesinas ire ceperunt.

De nyr

Tvhutum uero et filius suus horca per partes nyr aquitantes, magnum sibi populorum subiugauerunt, a siluis nyr usque ad umusouer. Et sic ascendentes usque ad zyloc peruenerunt, contra eos nemine manum leuante: qui dux menumorout et sui non sunt ausi pugnare contra eos, sed fluuium cris custodire ceperunt. Tunc tuhutum et filius suus horca de ziloc egressi uenerrunt in partes mesesinas ad zobolsum et thosum. Et cum se ad inuicem uidissent gaudio gauisi sunt magno, et facto conuiuio unusquisque laudabat se ipsum de sua uictoria.

Mane autem facto zobulsu, thosu et tuhutum, inito consilio constituerunt ut meta regni ducis arpad esset in porta mezesina. Tunc incole terre iussu eorum portas lapideas edificauerunt, et clausuram magnam de arboribus per confinium regni fecerunt.

Tunc hij tres pernominati uiri omnia facta sua duci arpad et suis primatibus per fideles nuntios mandatauerrunt. Quod cum renuntiatum fuisset duci arpad et suis yobagyonibus, gauisi sunt gaudio magno ualde. Et more paganismo fecerunt aldumas, et gaudium adnuntiantibus diuersa dona presentauerunt. Dux uero arpad et suis primates ob hanc causam leticie per totam unam ebbdomadam sollempniter comedebant, et fere singulis diebus inebriebantur propter euentum tante leticie. Et hoc audito dux arpad et sui egressi sunt a zeremsu et castra metati sunt iuxta fluuium souiou, a thyscia usque fluuium honrat.

De uictoria thosu, zobolsu et tuhutum

Thosu et zobolsu nec non tuhutum cum uidissent, quod deus dedit eis uictoriam magnam, et subiugauerunt domino suo fere plures nationes illius terre. Tunc exal-tati sunt nimis: super habitatores illius terre. Et dum ibi nullus inuentes esset eis, plures dies ibi manserunt, donec confinia regni firmauerunt obstaculis firmissimis.

De terra ultra siluana

Et dum ibi diutius morarentur, tunc tuhutum pater horca sicut erat uir astutus dum cepisset audire ab incolis, bonitatem terre ultra siluane, ubi gelou quidam blacus dominium tenebat. Cepit ad hoc hanelare quod si posse esset, per gratiam ducis arpad domini sui terram ultra siluanam sibi et suis posteris acquireret. Quod et sic factum fuit postea. Nam terram ultra siluanam posteritas tuhutum usque ad tempus sancti regis stephani habuerunt: et diucius habuissent, si minor gyla cum duobus filiis suis biuia et bucna christiani esse, uoluissent et semper contrarie sancto regni non fecissent, ut in sequentibus dicetur.

De prudentia tuhutj

Predictus uero tuhutum uir prudentissimus misit quendam uirrum asututm patrem opaforcos ogmand, ut furtiue ambulans preuideret sibi qualitatem et fertilitatem terre ultra siluane: et quales essent habitatores eius. Quod si posse esset, bellum cum eis committeret. Nam uolebat tuhutum per se nomen sibi et terram aquirere.

Vt dicunt nostri ioculatores: omnes locaa sibi aquirebat, et nomen bonum accipiebant. Quid plura? Dum pater ogmand speculator tuhutum per circuitum more uulpino, bonitatem et fertilitatem terre et habitatores eius inspexisset, quantum humanus uisus ualet. Vltra quam dici potest dilexit, et celerrimo cursu ad dominum suum reuersus est. Qui cum uenisset: domino suo de bonitate illius terre multa dixit. Quod terra illa irrigaretur optimis fluuiis, quorum nomina et utilitates seriatim dixit.

Et quod in arenis eorum aurum colligerent, et aurum terre illius optimvm esset. Et ut ibi foderetur sal et salgenia, et habitatores terre illius uiliores homines essent tocius mundi. Quia essent blasij et sclaui, quia alia arma non haberent, nisi arcum et sagittas, et dux eorum geleou minus esset tenax et non haberet circa se bonos milites, et auderent stare contra audatiam hungarorum, quia a cumanis et picenatis multas iniurias peterentur.

Quomodo contra Gelu item est

Tunc Tuhutum audita bonitate terre illius, misit legatos suos ad ducem arpad ut sibi licentiam daret ultra siluas eundi contra gelou ducem pugnare. Dux uero arpad inito consilio uoluptatem tuhutum laudauit, et ei licentiam ultra siluas eundi contra gelou pugnare concessit. Hoc dum tuhutum audiuisset a legaato, preparauit se cum suis militibus, et dimissis ibi sociis suis egressus est ultra siluas uersus orientem contra Gelou ducem blacorum. Gelou uero dux ultra siluanis audiens aduentum eius, congregauit exercitum suum et cepit uelocissimo cursu equitare obuiam ei ut eum per portas mezesinas prohiberet. Sed tuhutum uno die siluam pertransiens ad fluujum almas peruenit.

Tunc uterque exercitus ad inuicem perruenerunt medio fluuio interiacente. Dux uero gelou uolebat, quod ibi eos prohiberet cum sagittariis suis.

De morte Gelu

Mane autem facto tuhutum ante auroram diuisit exercitum suum in duas partes. Et partem alteram misit parum superius: ut transito fluuio militibus gelou nescientibus pugnam ingrederentur. Quod sic factum est. Et quia leuem habuerunt transitum utraque acies pariter ad pugnam peruenerunt. Et pugnatum est inter eos acriter, sed uicti sunt milites ducis gelou, et ex eis multi interfecti, plures uero capti. Cum gelou dux eorum hoc uidisset, tunc pro defensione uite, cum paucis fugam cepit. Qui cum fugeret, properans ad castrum suum iuxta fluuim zomus positum, milites tuhutum audacj cursu persequentes, ducem geloum iuxta fluuium copus interfecerunt.

Tunc habitatores terre uidentes mortem domini sui, sua propria uoluntate dextram dantes, dominum sibi elegerunt tuhutum pa-trem horca. Et in loco illo, qui dicitur esculeu fidem cum iuramentu firmauerunt. Et a die illo locus ille nuncupatus est esculeu eo quod ibi iurauerunt.

Tuhutum uero genuit horcam, horca genuit geulam et zubor. Geula duas filias, quarum una uocabatur caroldu et altera saroltu, et sarolt fuit mater sancti regis stephani. Zumbor uero genuit minorem geulam, patrem bue et bucne tempore cuius sanctus rex stephanus subiugauit sibi terram ultra siluanam. Et ipsum geulam uinctum in hungariam duxit, et per omnes dies uite sue carceratum tenuit, eo quod in fide esset uanus, et noluit esse hristianus, et multa contraria faciebat regi stephano quamuis fuisset ex cognatione matris sue.

De duce menumorout

Tosu uero et zobolsu adepta uictoria reuersi sunt ad ducem arpad, subiugando totum populum a fluuio zomus usque ad crisium et nullus contra eos ausus fuit manus leuare. Et ipse menumorout dux eorum magis preparabat uias suas in greciam eundi, quam contra eos ueniendi. Et deinde egressi descenderunt iuxta quendam fluuium nomine humusouer, et uenerunt usque ad lutum zerep. Et deinde egressi uenerunt usque ad zeguholmu et ibi uolebant transire crisium ut contra menumorout pugnarent, sed uenientes milites menumorout, eis transitum prohibuerunt. Deinde egressi per diem unum equitantes castra metali sunt iuxta paruos montes. Et hinc juxta fluuium turu equitantes, usque ad thysciam peruenerunt. Et in portu drugma fluuium thyscie transnauigantes, ubi etiam per gratiam arpad ducis cuidam cumano militi nomine huhot magnam terram aquisiuerun, quam posteritas eius usque nunc habuerunt.

De reditu eorum

Dvm nauigassent fluuium thyscie nuntios suos ad ducem arpadium premiserunt, qui gaudia salutis nuntiarent. Qui cum, ad ducem arpad uenissent et gaudia ei annuntiassent, quod zobolsu et tuso cum exercitu suo sani et incolumes reuersi essent, et portum drugma cum omnibus exercitibus suis transnauigassent. Hoc cum audiuisset dux arpad, quod thosu et zobolsu cum omnibus exercitibus suis sani et incolumes reuersi essent, et fluuium thyscie transnauigassent, fecit magnum conuiuium et gaudium annuntiantibus diuersa dedit donaria. Tunc thosu et zobolsu cum curiam ducis intrare uellent, dux omnes suos milites obuiam eis promissit, et sic eos cum magno gaudio recepit. Et sicut mos est bonorum dominorum suos diligere fideles, fere cottidie eos faciebat ad mensam suam comedere et multa eis dona presentabat. Similiter etiam ipsi duci arpad diuersa dona ac filios incolarum in obsides ejs positos presentauerunt.

De duce salanus

Dvx uero arpad transactis quibusdam diebus inito consilio, et sui nobiles miserunt nuntios suos ad ducem salanus, qui nuntiarent et uictoriam Thos et bulsuu, quasi pro gaudio, et peterent ab eo terram usque ad fluuium Zogea. Quod sic factum est. Missi sunt enim etu et voyta, qui cum inuenissent ducem salanum in sabulo olpar, mandata gaudia nuntiauerunt; et terram ab eo usque ad fluuium Zogea postulauerunt. Salanus dux hoc audito in maximum irruit timorem et terram ab ipso postulatam timore percussus usque ad fluuium Zogeua duci arpad concessit, et legatis diuersa dona presentauit. Septimo autem die etu et voyta accepta licentia: ad dominum suum sunt reuersi. Quos dux arpad honorifice recepit, et audita legatione eorum, factum est gaudium magnum in curia ducis. Et cepit dux donare suis fidelibus loca et possessiones magnas.

 

XXI. De Zobolsu.

Zobolsu qui était un homme très sage, ayant bien considéré le lieu qui est près du fleuve Zomus, vit qu'il était très propre à s'y fortifier & il y fit bâtir un fort de terre qui s'appelle aujourd’hui Zobolsu. Alors Zobolsu & ses compagnons ordonnèrent à beaucoup d'habitants de cette terre, de rester dans le fort pour y servir & ce sont eux que l’on appelle à présent, Civiles,

Alors Zobolsu & ses compagnons divisèrent leur armée ; une partie devant aller le long du fleuve Zomus, & l'autre du côté de Nyr. Zobolsu & Thosu père de Lelu ayant pris la moitié de l'armée, marchèrent sur les hauteurs de la Theiss, & vinrent vers le fleuve Zomus, au lieu qui s'appelle aujourd’hui Sarunar. Là, ils rassemblèrent beaucoup de peuple, & firent construire un vaste retranchement en terre & ce lieu s'appelait d'abord Thosu, mais il s'appelle aujourd’hui Sarunar. Puis ils prirent des otages, & laissèrent une garnison dans le fort.

Ensuite le peuple s'étant soumis volontairement au Duc Arpad, Thosu fit construire une ville entre Nyr & la Theis, & cette ville s'appelle encore aujourd’hui Thosu. Ensuite Zobolsu & Thosu se mirent en marche, & vinrent à la ville de Zotmar, qu'ils assiégèrent pendant trois jours ; le quatrième ils la prirent d'assaut & y étant entrés, ils enchaînèrent les soldats de Menumorout, prirent des otages, & laissèrent une garnison dans la ville. Puis ils marchèrent vers les portes Mezesines.

XXII. De Nyr.

Cependant Tuhutum & son fils Horca marchant vers Nyr, y soumirent un peuple nombreux, depuis les portes de Nyr jusques à Umusover, & remontant ainsi ils arrivèrent à Zyloc, sans que personne osa lever la main contre eux, parce que le Duc Menumorout & les siens n'osaient point les combattre & ainsi ils commencent à garder le fleuve Cris ; Alors Tuhutum & son fils Horca, sortirent de Ziloc, & passèrent les portes Mezesines, pour retrouver Zolbolsu, & Thosu, & lorsqu'ils se furent retrouvés, ils eurent beaucoup de joie & firent un grand festin, où chacun se loua lui même de ses victoires.

Le lendemain matin ils tinrent conseil, & ordonnèrent que la limite du royaume d'Arpad serait aux portes Mezesines.[16] Alors ils ordonnèrent aux habitants d'y bâtir une porte en pierre, & de faire un enclos d'arbres le long des frontières.

Puis ils envoyèrent au Duc Arpad des hommes fidèles, qui lui rendirent compte de ce qu'ils avaient fait. Ceux-ci s'acquittèrent de leur commission, & leurs nouvelles causèrent tant de joie au Duc Arpad, qu'il leurs fit de grands présents, & ayant rassemblé sa cour, il célébra un grand Aldumas à la manière des païens, puis pendant une semaine entière, on fit des festins solennels, & l'on s'enivra presque tous les jours. Puis le Duc Arpad quitta Zeremsu, & campa près du fleuve Soiou depuis la Theis jusqu’au fleuve Honrat.

XXIII. De la victoire de Thosu, Zobolsu, & Tuhutum.

X Hosu, Zobolsu, & Tuhutum, voyant que Dieu leur avait accordé la victoire, & qu'ils avaient soumis plusieurs nations, exaltèrent leur cœur, et s'élevèrent trop sur les habitants de cette terre, & comme personne ne vint les trouver, ils restèrent là plusieurs jours, & assurèrent les frontières par divers obstacles.

XXIV. De la terre Transylvaine.

Tandis qu'ils demeuraient dans ce lieu, Tuhutum père de Horca, entendit souvent les habitants qui parlaient de la terre Transylvaine, & en louaient la bonté & disaient qu'elle était sous la puissance d'an certain Blaque appelé Gelon. Tuhutum qui était un homme rusé songea au moyen d'avoir cette terre pour lui et ses descendants, ce qu’il obtint aussi par la suite. Car la postérité de Tuhutum a possédé la terre Transylvaine, jusques au règne d'Etienne, & elle l’aurait gardé plus longtemps, si le jeune Gyla avec ses fils Bivia & Bucna eussent voulu se faire chrétiens & ne pas toujours contrarier le Roi, ainsi qu'on verra plus loin.

XXV. De la prudence de Tuhutum,

Tuhutum qui était un homme très prudent, résolut d'envoyer dans la terre Transylvaine un vieillard fort rusé, dont le nom était Ogmad père d'Opasorcos et il le chargea de parcourir furtivement le pays, & de lui dire quels en étaient les habitants & si l'on pouvait leur faire la guerre, car Tuhutum voulait acquérir un nom & un pays, & comme disent nos amuseurs.[17]

Omnes loca sibi aquirebant

Et magnum nomen accipiebant

Le Père Ogman esion de Tuhutum s'introduisit comme un renard dans la terre, Transylvaine et en ayant connu la bonté, & la qualité de ses habitants, il y prit un plaisir extraordinaire, & vint en rendre compte, à son seigneur, & lui dit bien des choses sur les fleuves qui arrosent cette terre & qui roulent de paillettes d’Or, sur les mines de sel & sur les habitants de cette terre, qui étaient les gens du monde les plus vils puisque c'étaient des Blasiens, & des Sclaves, qui ne connaissaient pas d’autres armes que l’arc & les flèches, & il assura que leur duc Gelon ne pouvait pas faire résistance, n’ayant autour de lui que de mauvais soldats incapables de combattre les hongrois, puisqu'ils souffraient les injures des Coumans & des Picenates.[18]

XXVI. Comment on marcha contre Gelon.

Alors Tuhutum ayant entendu parler de la bonté de cette terre, envoya vers le Duc Arpad pour lui demander la permission de passer les forêts & de combattre le Duc Gelon, Le Duc Arpad ayant tenu conseil permit à Tuhutum de passer les forêts & de combattre le Duc Gelon. Les envoyés de Tuhutum lui ayant rapporté cette réponse favorable, il prépara son armée & ayant pris congé de ses compagnons, il traversa les forêts vers l'orient pour combattre Gelon Duc des Blaques.

Gelon le Duc Transylvain ayant su la marche de Tuhutum, marcha aussi avec beaucoup de célérité vers les portes Mezesines, pour lui en disputer le passage. Mais Tuhutum ne mit qu'un jour à traverser la forêt & parvint au fleuve Almus ; l'armée de Gelon était de l'autre côté, & lançait une nuée de flèches.

XXVII. De la mort de Gelon.

Le matin Tuhutum divisa son armée en deux, la moitié passa le fleuve plus haut, & vint attaquer les soldats de Gelon. Tandis que ceux là se battaient, Tuhutum passa lui même, & ayant combattu vaillamment il remporta la victoire : & le Duc Gelon prit la fuite accompagné d'un petit nombre des siens. Et comme il approchait d'une ville à lui située près du fleuve Zomus, les soldats de Tuhutum le poursuivant audacieusement l'atteignirent près du fleuve Copus, & le tuèrent.

Alors les habitants de cette terre voyant leur prince mort, donnèrent la main de bonne volonté, & proclamèrent Tuhutum père de Horca : & ils prêtèrent serment dans le lieu appelle Esculeu, qui fut appelé ainsi à cause du serment que l’on y prêta. Tuhutum y régna paisiblement ainsi que sa postérité, jusques au règne de saint Etienne.

Tuhutum fut père de Horca, Horca fut père de Geula & Zubor. Geula eut deux filles dont l'une s'appelait Caroldu, & l'autre Saroltu, & Sarolt fut la mère de saint Etienne. Zumbor fut père du jeune Geula père de Bue, & de Bucne. C'est sous le règne du jeune Geula que le saint Roi Etienne conquit la Transylvanie, & fit mettre Geula aux fers & le conduisit en Hongrie où il resta prisonnier le reste de ses jours, parce qu'il n'avait pas gardé sa foi, qu'il ne voulait pas être chrétien, & qu'il avait toujours contrarié le Roi, quoiqu'il fut son oncle maternel.

XXVIII. Du Duc Menumorout.

Mais, Tosu et Zobolsu voulaient revenir auprès du Duc Arpad, après avoir subjugué tous les peuples qui sont entre le Zomus & Crisius, sans que personne osa lever la main contre eux & le Duc Menumorout songeait à aller en Grèce & non pas à les attaquer. Ensuite ils sortirent & descendirent vers un fleuve qui s'appelle Humusover & ils vinrent à un lieu appelé Zerep, puis ils vinrent dans un lieu appelé Zeguholmu, où ils voulaient passer le Krisius, pour combattre Menumorout, mais les soldats de ce Duc les empêchèrent de passer. Puis ils marchèrent encore un jour & campèrent près de certaines collines ; puis ils marchèrent le long du fleuve Turu & parvinrent à la Theis, qu'ils passèrent à Drugma, & ils y acquirent une terre que le Duc Arpad donna à un soldat Cumanien appelé Huhot, & sa postérité la possède encore aujourd’hui.

XXIX. De leur retour.

Ayant passée la Theys, ils envoyèrent vers le Duc Arpad pour lui annoncer leur retour, & ceux-ci vinrent et annoncèrent au Duc, que Zobolsu & Tosu étaient de retour avec toute leur armée, sains & saufs, & qu'ils avaient passé la Theys au port de Drugma. Alors le Duc fit des présents considérables aux envoyés, & donna un grand festin. En comme Thosu & Zobolsu approchaient de la cour, le Duc envoya tous ses soldats à leur rencontre, & les reçut avec beaucoup de joie. Et comme les bons princes ont coutume d'aimer les bons serviteurs, le Duc les faisait manger presque tous les jours à sa table, & leurs faisait beaucoup de présents, & eux de leurs côtés en firent au Duc, & lui présentèrent les fils des habitants qu'ils avaient reçu en otage.

XXX. Du Duc Salanus.

Après plusieurs jours Arpad tint conseil & envoya vers le Duc Salanus pour lui apprendre les victoires de Thosu Bulfsuu, & Tuhutum, & lui demander tout le pays jusques au fleuve Zogea.[19] Les envoyés étaient Etu & Voyta. Ils trouvèrent le Duc Salanus dans les sables d'Olpar, lui annoncèrent leurs victoires & demandèrent le pays jusques au Zogea. Le Duc Salanus les ayant entendu, eut peur, donna à Arpad tout le pays jusques au Zogeva & fit divers présents aux envoyés. Le septième jour Etu & Voyta prirent congé, & retournèrent chez leur seigneur. Le Duc Arpad les reçut honorablement, & avant entendu leur relation, toute la cour se réjouit beaucoup & le Duc distribuait à ses fidèles, des villages & des possessions.

 

De egressu zeremsu

Postea dux et sui principes egressi sunt de zeremsu et transnauigauerunt fluuium Souyou, in jllo loco ubi fons honrad descendit. Et castra metatj sunt iuxta fluuium heuyou, usque ad thysciam et usque ad emeud, et permanserunt ibi per unum mensam. Ibi etiam dux dedit Bungernec patri borsu terram magnam a fluuio topulucea usque ad fluuium Souyou, que nunc uocatur miscoucy, et dedit ei castrum, quod dicitur geuru, et illud castrum filius suus Borsu cum suo castro quod dicitur borsod, unum fecit comitatum.

De castro vrsuur et fluuio egur

Postea dux arpad et sui nobiles hinc egressi uenientes usque ad fluuium naragy et castra metati sunt iuxta riuulos aquarum a loco illo, qui nunc dicitur casu. Vbi etiam dedit terram magnam ousadunec patri ursuur, et ibi postea ursuur filius eius ad caput eiusdem fluminis castrum construxit, quod nunc castrum ursuur nuncupatur.

Hinc uero dux arpad et sui egressi uenerunt usque ad fluuium egur, et ibi paratis tuguriis plures dies permanserunt, et montes illum super quem duci foliata fecerunt, nominauerunt zenuholmu,

et castra eorum fuerunt a fluuio ystoros usque ad castrum purozlou. Deinde egressi uenerunt usque ad fluuium zogea et castra metati sunt per crepitudinem eiusdem fluminis a thyscia usque ad siluam matra, et subiugauerunt sibi omnes habitatores terre a grisio usque ad fluuium zogeua et usque ad siluam zepus. Tunc dux arpad in silua matra dedit terram magnam edunec et edumernec ubi postea pota nepos eorum castrum construxit, ex quorum etiam progenie longo post tempore rex samuel descendit, qui pro sua pietate oba uocabatur.

De castro nougrad et nitra

In eiusdem temporibus dux arpad, dum se per milites suos uidisset ita sublimmatum et tutum esse, tunc habito inter se consilio misit multos milites in expedicionem qui subiugarent sibi populum de gumur et nougrad. Et si fortuna eis faueret, tunc ascenderent uersus fines Boemorum usque ad castrum nitra. Quibus etiam militibus in expeditionem euntibus principes et ductores constituit duos filios auunculi sui hulec, zuardum et cadusam, nec non hubam unum de principalibus personis. Tunc hij tres domini accepta licentia a duce arpad egressi sunt a loco illo qui dicitur paztuh, equitantes iuxta fluuium hongvn et eundem fluuium transierunt iuxta fluuium Souyou. Et inde egressi sunt per parts castri gumur, et uenerunt usque ad fluuium caligaperuenerunt. Hinc uero egredientes per crepitudinem danubij iuerunt, et fluuium Wereuecca transeuntes, castra metati suntiuxta fluuium ypul. Et quia diuina gratia in eis erat timuit eos omnis homo, et maxime ideo timebant eos quia audierant ducem arpadium filium almj ducis ex progenie athile regis descendisse.

Tunc omnes sclaui habitatores terre qui primo erant salani ducis, propter timorem eorum, se sua libera sponte subiugauerunt eis, nullo manum subleuante. Et ita cum magno timore et tremore seruiebant eis: ac si olim domini eorum fuissent. Tunc zuardu et cadusa nec non huba a quo prudens zemera descendit, cum uidissent populum multum sine bello ipsis subiugatum, fecerunt magnum conuiuium, et melioribus habitatoribus terre, qui filios suos in obsides dederant, diuersa dona presentauerunt, et blandis uerbis sub dominium ducis arpad sine bello subiugauerunt, et ipsos secum in expedicionem duxerunt, filios uero eorum in obsides accipientes, ad ducem arpad cum diuersis muneribus remiserunt. Vnde dux et sui nobiles leciores facti sunt solito, nuntiis gaudia ferentibus multa dederunt dona.

De fluuio gron et castro Borsu

Interea zuard et cadusa filij hulec, nec non huba et omnis exercitus eorum fluuium ypul iuxta danubium transierunt. Et alio die transito fluuiu gron castra metatj sunt in campo iuxta quoddam castellum terreum quod nuncupatur uarod. Et capto illo castro manserunt ibi tres dies expectantes aduentum Borsu filij Bumger. Quem dux arpad cum magno exercitu miseratin auxilium eorum. Quarto die cum Borsu ad eos uenisset cum ualide manu timuerunt eos omnes incole terre, et nullus ausus fuit leuare manus contra eos. Tunc hij IIII-or domini initio inter se consilio per peticionem incolarum sibi fidelium constituerunt, ut tercia pars de exercitu cum incolis terre irent in siluam zouolon qui facerent in confinio regni municiones fortes tam de lapidibus, quam etiam de lignis, vt ne aliquando boemi uel polony possent intrare causa furti et rapine in regnum eorum. Tunc communi consilio hac de causa missus est borsu filius buger cum suis militibus. Et cum equitarent iuxta fluuium gron, ceruus fuga lapsus, ante eos cacumina montium ascendit.

Quem Borsu celerrimo cursu persecutus ictibus sagittarum in uertice montium interfecit. Et tunc Borsu cum montes illos in circum aspexisset, in memoriam duxit ut ibi castrum construeret. Et statim congregata multitudine ciuium in uertice unius altioris montis castrum fortissimum construxit, cui nominem suum imposuit proprium, ut castrum borsu nuncupatur. Et inde cum exercitibus suis usque ad siluam zouolun porrexit, et maximam municionem de lapidibus facere precepit, quod nunc castrum Borsed Zouolun uocatur.

De nitra ciuitate

Zvardu et cadusa nec non huba post discessum borsucum omnibus suis egressi de castro, quod dicitur Warod, ultra siluam tursoc castra metati sunt iuxta fluuium sytua. Altera autem die miserunt quosdam speculatores uiros, quos sociebant esse audaces, qui transirent fluuium nitra et uiderent si sine bello possent transmeare usque ad ciuitatem nytra. Qui cum uelocissimo cursu uenissent usque ad riuulum turmas ubi descendit in riuulum nytra, uiderunt habitatores illius prouincie sclauos et boemos eis obsistere cum auditorio ducis boemorum. Quia mortuo athila rege terram que iacet inter wag et gron, a danubio usque ad fluuium moroua dux boemorum sibi preoccupauerat et in unum ducatum feceret. Et tunc tempore per gratiam ducis boemorum dux nitriensis factus erat zubur.

De speculatoribus missis a ducibus

Cvm autem speculatores illi qui fuerant missi a zuard et cadusa, uidissent sclauos et boemos eis obsistere non ualentes, miserunt sagittas tribus uicibus super eos, et quosdam ex ipsis ictibus sagittarum interfecerunt. Hoc cum uidissent sclaui et boemi quos ad custodiam constituerat zubur, quod isti qui dicuntur hetumoger talibus uterentur armis, timuerunt ualde quia talis armatura nunquam uisa fuit eis. Statim nuntiauerunt zuburio domino eorum, ceterisque principibus eiusdem prouintie.

De pugna ducum arpadij

Tunc zubur hoc audito cum adiutorio boemorum armata multitudine, obuiam eis uenit pugnaturus. Et dum uterque exercitus ad fluuium nitra peruenissent, zuardu, cadusa et huba uolebant transire fluuium. Sed zubur dux nitriensis et sui milites contra eos diutissime certantes nollomodo eis transitum concedere uolebant. Et cum diu inter se certassent, hungarij ex boemis et sclauis icttibus sagittarum multos interficiebant. Sed per tres dies nullomodo hungarij propter inundationem aquarum transitum habuissent, tandem iiii. die boemi et omnes nytrienses sclaui uidentes audatiam hungarorum, et percussiones sagittarum non sufferentes, fuga lapsi sunt. Et uelocissimo cursu pro defensione uite in ciuitatem nitriam inclusi sunt cum magno timore. Quos zuardu, cadusa et huba nec non ceteri milites, persequentes eos usque ad ciuitatem, et ex eis quosdam interfecerunt, et quosdam uulnerauerunt et alios ceperunt. zubur uero dux eorum dum fugiendo contr eos pugnare uellet, per lancem caduse cecidit, et captas in custodiam traditus est. Ceteri uero in ciuitatem inclusi, quasi multi remanserunt.

Alio namque die zuard, cadusa et huba armata multitudine exercituum, ceperunt fortiter expugnare ciuitatem nitriam multis modis. Et dedit eis deus uictoriam magnam, et pugnantes intrauerunt eam et fusus est per eos ibi sanguis multorum aduersariorum. Tunc iracundia ducti zuburium ducem illius prouincie quem nudius tercius ceperant, supra mentem excelsum ducentes laqueo suspenderunt.

Vnde mons ille a die ille usque nunc, mons zubur nuncupatur. Et propter hoc factum timuerunt eos omnes homines illius patrie et omnes nobiles filios suos in obsides eis dederunt. Et omnes nationes illius terre se subiugauerunt sibi usque ad fluuium Wag. Et quia gratia dei antecedebat eos, non solummodo ipsos subiugauerunt, uerum etiam omnia castra eorum ceperunt, quorum nomina hec sunt usque modo: Stumtey, Colgoucy, Trusun, Blundus et Bana, et ordinatis custodibus castrorum: iuerunt usque ad fluuium moroa. Et firmatis obstaculis constituerunt terminos regni hungarorum usque ad Boronam, et usque ad saruuar. Et adepta uictoria reuersi sunt ad ducem arpad, et omnes infideles illius terre ferreis caathenis ligatos secum duxerunt. Cumque zuard, cadusa nec non huba ad ducem arpad cum omnibus captiuis suis uenissent sani et incolumes, factum est gaudium magnum in curia ducis. Dux arpad consilio et peticjone suorum nobilium donauit accepto iuramento infidelium terras in diversis locis predictis infidelibus de partibus nytrie ductis. Vt ne aliquando infideliores facti, repatriando nocerent sibi fidelibus in confinio nitrie habitantibus. Et in eodem gaudio dux arpad hubam fecit comitem nitriensem et aliorum castrorum. Et dedit ei terram propriam iuxta fluuium sytuua usque ad sil(uam) tursoc.

De exercitu grecorum et bulgarorum

Interea dux salanus dum intellexisset potentiam et facta hungarorum timuit ut ne aliquando iracundia ducti eum expellerent de regno suo. Tunc inito consilio suorum misit legatos suos ad imperatorem grecorum et ducem bulgarorum ut sibi auxilium darent causa pugne contra arpad ducem hungarorum.

Imperator grecorum et dux bulgarorum magnum exercitum salano duci miserunt. Qui cum ad ducem salanum peruenissent, in illo loco, qui dicitur tetel, factum est gaudium magnum in curia ducis. Secundo autem die dux salanus et sui nobiles inito consilio miserunt legatos ad ducem arpad dicendo, ut terram eorum dimitteret, et ad natale solum repatriare inciperet. Qui cum ad ducem arpad peruenissent, ac mandata salani ducis ei dixissent dux arpad et suis nobiles egre ferentes, sic per eosdem legatos ducj salano remandauerunt: Terram que inter danubium et thysciam iacet, et aquam danubij, que a ratispona in greciam descendit pecunia nostra comparauimus. Tunc tempore quando nouj fuimus, et pro precio et misimus xii. albos equos et cetera ut supra. Ipse etiam laudans bonitatem terre sue, misit unam sarcinam de herbis sabulorum olpar, et duas langungulas de aquis danubij. Vnde precipimus domine uestro duci salano ut dimissa nostra terra, celerimo cursu terram bulgarorum eat, unde preauus suus descenderat mortuo athila rege atthauo nostro. Sj autem hoc non fecerit, sciat non in proximo tempore contra eum dimicaturos. Legati uero hoc audientes, accepta licentia tristi uultu ad ducem salanus properauerunt.

Dux autem arpad et sui nobiles egressi de fluuio zogea cum omni exercitu, castra metati sunt iuxta montem teteuetlen (Tetétlen, culme in apropierea Szolnok-ului) usque ad thysciam. Deinde uenientes per crepidinem thyscie usque ad sabulum olpar peruenerunt.

De egressu salani ducis contra arpium ducem

Dux autem Salanus cum adiutorio grecorum et bulgarorum egressus de Tetel furiata mente per ammonicionem suorum contra ducem arpad equitare cepit. Et dum uterque exercitus ad inuicem prope perrnoctassent neuter eorum dormire per totam noctem ausus fuit, sed equos sellatos in manibus tenendo, pernoctauerunt. Mane autem facto ante auroram utraque pars se ad bellum preparauit. Dux uero arpad cuius adiutor erat deus omnium armis indutus, ordinata acie fusis lacrimis deum orans, suos confortans milites dicens: O Scithici qui per superbiam bulgarorum a castro hungu uocati estis hungarij, nolite obliuisci propter timorem grecorum gladios uestros, et amittatis uestrum bonum nomen. Vnde strennue et fortiter pugnemus contra grecos et bulgaros, qui assimilantur nostris feminis, et sic tjmeamus multitudinem grecorrum, sicut multitudinem feminarum. Hoc audito milites sui multum sunt confortati: statimque lelu filius tosu tuba cecinit, et bulsuu filius bogar, eleuato uexillo in prima acie contra grecos pugnaturi uenire ceperunt. Et commixta est utraque acies hostium ad bellum, et ceperunt pugnare acriter inter se. Et dum totus exercitus ducis arpad accessisset pugnaturus contra grecos, plurimi interficiebantur de grecis et bulgarijs. Predictus uero dux salanus cum ei uidisset suos deficere in bello, fuga lapsus est, et pro salute uite albam bulgarie (= actualul Belgrad) properauit. Greci uero et bulgari timore hungarorum percussi, uiam quam uenerent obliuioni tradiderunt, fuga lapsi pro salute uite thysciam pro paruo fluuio reputantes transnatare uolebant. Sed quia talis timor et terror irruerat super eos, ut propter timorem hungarorum fere omnes in fluuio thyscie mortui sunt, ita quod aliqui uix remanserunt qui imperatori eorum mala salutis nuntiarent. Vnde locus ille, ubi greci mortuj fuerunt, a die illo usque nunc portus grecorum nuncupatur.

De victoria arpad ducis

Dux uero arpad et sui milites adepta uictoria hinc egressi uenerunt usque ad stagnum, quod dicitur curtueltou (Körtvelytó, in dreapta Tisei), et manserunt ibi iuxta siluam gemelsen (Gyümölcsény, padure in dreapta Tisei) xxx.iiii-or diebus. Et jn illo loco dux et sui nobiles ordinauerunt omnes consuetudinarias leges regni, et ommnia iura eius qualiter seruirent duci et primatibus suis, uel qualiter indicium facerent pro quolibet crimine commisso. Ibi etiam dux condonauit suis nobilibus secum uenientibus diuersa loca cum omnibus habitatoribus suis. Et locum illum ubi hec omnia fuerunt ordinata, hungarij secundum suum idioma nominauerunt scerij (Szeri, in dreapta Tisei), eo quod ibi ordinatum fuit totum negotium regni. Et dux locum illum dedit oundunec patri ete, a thyscia usque ad stagnum Botua, et a curtueltou usque ad sabulum olpar. Postea uero transactis quibusdam temporibus ethe filius oundu congregata multitudine sclauorum fecit inter castrum olpar et portum beuldu edificari castrum fortuissimum de terra, quod nominauerunt sclaui secundum ydioma suum surungrad, id est nigrum castrum.

 

XXXI. De la Sortie de Zeremsu.

Ensuite le Duc & les princes sortirent de Zeremsu : ils traversèrent le fleuve Soyou, dans l'endroit où le Hunrad y mêle ses eaux, & ils placèrent leurs camp près du fleuve Henou, jusqu’à la Theis & jusqu’à Emeud, & ils y restèrent un mois. C'est là que le Duc fit présent à Bungernec père de Borsu de tout le pays depuis le fleuve Topulucea jusques au fleuve Soyou qui s'appelle aujourd’hui Misoucy : & il lui donna la ville forte qui s'appelle Geuru. Et Borsu fit construire une ville qui s'appelle Borsod & dans la suite il en fit un seul comitat.

XXXII. De la ville d'Ursuur & du fleuve Egur.

Ensuite le Duc Arpad & ses nobles étant sortis de là, vinrent au fleuve Naragy, & ils campèrent le long des ruisseaux dans l'endroit qui s'appelle Casu : Arpad y donna une belle terre à Ousadunec père d'Ursuur : & dans la fuite Ursuur y bâtit un château qui porte son nom jusqu'au jour d'aujourd’hui.

Le Duc Arpad & les siens étant sorti de là, vinrent au fleuve Egur & là ils construisirent des cabanes & y restèrent plusieurs jours ; ils firent aussi des couverts en feuilles pour le Duc, & ils appelèrent cette montagne Zennholmu.[20]

Et leur camp s'étendait depuis le fleuve Ystoros, jusques à la ville forte de Puroslu, & étant sorti de la, ils vinrent au fleuve Zogea sur les escarpements du rivage, depuis la Theiss, jusqu’à la forêt Matra ; & ils subjuguèrent tous les habitants de cette terre depuis le Crisius jusqu’au Zogeva, & jusqu’au fleuve Zepus. Alors Arpad donna dans la forêt de Matra beaucoup de pays à Edunec & Edurmenec : dans la suite leur neveu Pota y fit construire un fort, & c'est de la même race qu'était le Roi Samuel surnommé Oba, à cause de sa piété.[21]

XXXIII. Des villes de Nougrad & de Nitra.

Vers le même temps le Duc Arpad, considérant l'élévation où l’avaient placé ses soldats, tint conseil & envoya une troupe nombreuse, pour lui soumettre ses villes de Gumdr & de Nougrad & si la fortune les favorisait, ils devaient avancer vers les frontières des Bohèmes jusques à la ville de Nitra. Les chefs de cette armée furent Zuard & Cadusa fils de son oncle Hulec, & de plus Huba l'un des Hetumoger ou personnes principales. Les trois chefs prirent congé du Duc Arpad et sortant du lieu appelé Paztuh, ils allèrent le long du fleuve Hongu, qu'ils passèrent près du fleuve Soyou, ensuite ils le tournèrent vers Gumur, & vinrent au mont Bulhadu, puis se tournant vers Nougrad, ils arrivèrent an fleuve Caliga, puis ils marchèrent sur le bord escarpé de Danube, puis ils traversèrent le fleuve Verveca, & campèrent sur les bords du fleuve Ypul. Et parce que la grâce divine était en eux, chaque homme les craignait, & surtout on les redoutait par ce que l'on entendait dire, que le Duc Arpad fils du Duc Almus, descendait du Roi Attila.

Alors tous les Sclaves habitants de cette terre & sujets du Duc Salanus se soumirent, sans qu'aucun d'eux osa lever la main, & ils les servaient avec crainte & respect : comme s'ils eussent toujours été leurs maîtres. Nos chefs étaient Zuard & Cadusa, & Huba de qui descend le prudent Zemera ; ceux-ci voyant donc qu'un peuple nombreux se soumettait à eux de gré, firent un grand festin & offrirent des présents considérables aux principaux habitants de ce pays, qui avaient donné leurs fils en otages, & usant avec eux de paroles caressantes, ils les conduisirent avec eux dans leur expédition, & envoyèrent les enfants au Duc Arpad avec d'autres présents. Ces nouvelles réjouirent le Duc & ses nobles, & ceux qui les portaient reçurent des dons magnifiques.

XXXIV. Du fleuve Gron & de la ville de Borsu.

Cependant Zuard & Cadusa, fils de Hulec & Huba, et toute l'armée traversa le fleuve fort près du Danube, & le lendemain ils passèrent le fleuve Gron, & campèrent près d'une certaine ville entourée d'un rempart de terre, qui aujourd’hui s'appelle Yrod ; & ayant pris cette ville ils y restèrent trois jours, pour attendre Borsu fils de Bouger que le Duc Arpad leurs envoyait à la tête d'un corps nombreux. Borsu arriva le quatrième jour, & tous les habitants de cette terre furent remplis de crainte & aucun n’osa lever la main contre eux. Alors ces quatre seigneurs tinrent conseil, & ayant pris l'avis des habitants qui leurs étaient fidèles, ils se déterminèrent à envoyer le tiers de l'armée & beaucoup d'habitants vers la forêt Zouolon & d'y construire des forts, pour que les Bohèmes & les Polonais ne pussent pas s'introduire dans leur royaume, pour y exercer des brigandages.

Borsu fils de Bunger fut chargé de cette expédition, & comme il conduisait son armée le long du fleuve Gron, un cerf se mit à fuir devant eux, Borsu l'atteignit au sommet de la montagne & le tua à coups de flèches, & Borsu voyant de là tout le pays des environs, résolut d'y construire une ville fortifiée. Et tout de suite il rassembla les habitants, & construisit une ville qu'il appela Borsu, & ensuite il marcha avec toute son armée vers la forêt de Zouolon, & y fit construire se ville fortifiée qui s'appelle aujourd’hui Borsed Zouolon.

XXXV. De la ville de Nitra.

Lorsque Borsu fut parti, Zuard & Cadusa &Huba, sortirent de la ville de Warod, passèrent la forêt de Tursoc, et campèrent près du fleuve Sytus ; le lendemain ils envoyèrent quelques hommes audacieux qui passèrent le fleuve Nitra & examinèrent s'il était possible d'arriver à la ville de Nitra, sans être forcé à combattre. Ceux-ci arrivèrent à l'endroit où le ruisseau Turmas tombe dans le fleuve Nitra, & virent que les habitants de cette terre Sclaves & Bohèmes voulaient leurs disputer le passage avec l'aide du Duc des Bohèmes. Car après la mort d'Attila, le Duc des Bohèmes, avait pris la terre qui est entre le Vag & le Gron, depuis le Danube, jusqu’au fleuve Morova & y avait fait un Duché, & alors Zubor avait été fait Duc de Nitra par la grâce du Duc des Bohèmes.[22]

XXXVI. Des spéculateurs envoyés par les chefs.

Alors ces spéculateurs envoyés par Zuard & Cadusa, voyants que les Sclaves & les Bohèmes ne pouvaient pas leur résister, leur envoyèrent trois décharges de leurs flèches. Alors les Sclaves & les Bohèmes, qui faisaient la garde pour le Duc Zubur, voyant que les Hetumoger se servaient de pareilles armes furent remplis de crainte, car ils n’en avaient jamais vu de semblables[23] & tout de suite ils allèrent le dire à leur seigneur Zubur, & aux autres seigneurs de cette province.

XXXVII. Du combat des généraux d’Arpad.

Zubur ayant entendu cela, vint à leur rencontre à la tête des Bohèmes, & d'une grande multitude armée. Et les deux armées, étant arrivées sur le bord du fleuve Nitra, Zuardu, Cadusa, et Huba voulurent le traverser, mais Zubur leurs disputa longtemps le passage. Et comme il était favorisé par l’inondation, les Hongrois ne purent rien faire pendant trois jours ; quoique leurs flèches eussent tué beaucoup de monde aux Sclaves & aux Bohèmes. Mais le quatrième jour les Bohèmes, & tous les Sclaves de Nitra, voyant l’audace des Hongrois, & ne pouvant plus résister à leurs flèches, prirent la fuite, & se renfermèrent dans la ville de Nitra. Zuardu, Cadusa & Huba les poursuivirent, en blessèrent beaucoup, en tuèrent aussi un grand nombre & firent quelques prisonniers. Zubur qui voulut combattre en fuyant, fut renversé par la lance de Cadusa, & fait prisonnier, & les autres renfermés dans la ville restèrent comme muets.

Le lendemain, Zuard, Cadusa & Huba attaquèrent Nitru de tant de manières & avec tant de courage, qu'ils y entrèrent, & y répandirent à grands flots le sang de leurs ennemis. Et comme ils étaient en colère ils conduisirent le Duc Zubur sur une montagne & le pendirent,

& depuis lors cette montagne fut appelée la montagne de Zubur. Et cela fut cause que tous les hommes de ce pays-là les craignirent & donnèrent leurs fils en otage, & toutes les nations de cette terre se soumirent jusqu’au fleuve Vag, & comme la grâce de Dieu précédait les Hongrois, non seulement ils soumirent ces nations, mais ils prirent encore toutes leurs villes dont les noms sont : Stumrey, Colgoucy, Trusun, Blundus & Bana & y ayant mis des garnirons, ils allèrent jusqu’au fleuve Morava, où ils mirent des obstacles, & déterminèrent les limites de leur royaume, jusqu’à Borona & jusqu’à Sarvar, & ils revinrent auprès du Duc Arpad, lui conduisant enchaînés tous les habitants qui n'avaient pas été fidèles. Et lorsque Zuard, Cadusa, & Huba furent revenus sains & saufs avec leurs captifs toute la cour du Duc Arpad s'en réjouit extrêmement. Le Duc Arpad, ayant pris conseil des siens, donna des terres en différents lieux à ces habitants infidèles de Nitra, dans la crainte que s'ils retournaient dans leur patrie, ils ne gâtassent ceux qui lui étaient fidèles. Et ce fut au milieu de ces réjouissances que le Duc Arpad, créa Huba comte de Nitra & des autres villes, & lui donna en propriété la terre qui est depuis le fleuve Sytua jusqu’à la forêt de Tursoc.

XXXVIII. De l’année des Grecs & des Bulgares.

Cependant Salanus, voyant la puissance & les actions des Hongrois, craignit qu'ils ne finissent par le chasser de ses états c'est pourquoi après avoir pris le conseil des siens, il envoya demander des secours à l'Empereur des Grecs & au Duc des Bulgares.

L'Empereur des Grecs & le Duc des Bulgares envoyèrent une puissante armée au Duc Salanus & lorsque cette armée fut parvenue à l'endroit qui s'appelle Tetel, il y eut une grande joie dans la cour du Duc Salanus & celui-ci envoya vers le Duc Arfiad pour lui dire qu'il serait temps pour lui d'abandonner leurs terres & de retourner dans sa patrie. Mais ce discours déplut à Arpad & à ses nobles, & ils répondirent. « Dans le temps où nous étions encore nouveaux ici, nous avons acheté de Salanus la terre qui est entre le Danube et la Theys ; ainsi que l'eau du Danube qui descend de Ratisbonne dans la Grèce &pour le prix de cet achat nous lui avons envoya douze chevaux blancs & le reste comme ci-dessus. Lui-même, louant la bonté de sa terre, nous a envoyé une botte d'herbe des sables d’Olpar & deux flacons pleins d'eau du Danube. C’est pourquoi nous ordonnons à votre maître, le duc Salanus, qu’il abandonne notre terre et s’en aille au plus tôt dans la terre des Bulgares, d’où son aïeul était venu, après la mort d’Attila notre aïeul & s'il ne fait pas ce que nous lui disons, nous irons bientôt le combattre. » Les envoyés ayant entendu cela, prirent congé & retournèrent auprès de Salanus avec un visage fort triste.

Cependant le Duc Arpad, & ses nobles, quittèrent le fleuve Zogea, & campèrent avec toute leur armée près du mont Teretlen jusques à la Theiss : & ensuite suivant les escarpements de la Theiss, ils arrivèrent aux sables d'Olpar.

XXXIX. De la sortie du Duc Salanus contre le Duc Arpad.

Cependant le Duc Salanus accompagné, des Grecs, & des Bulgares sortit de Tetel, plein de furie & monta à cheval contre Arpad. Les deux armées passèrent la nuit proche l'une de l'autre, mais personne ne se livra, au sommeil, & les uns & les autres tinrent leurs chevaux par la bride, & l'aurore étant venue ils se préparèrent à combattre. Mais le seigneur de toutes choses était pour Arpad, & Arpad se revêtit de ses armes, rangea ses troupes en bataille, pria le seigneur en répandant des larmes, & parla ainsi à ses soldats : « O Scythes, que la superbe des Bulgares a osé appeler Hongrois à cause de la ville de Hungu. Que la peur des Grecs ne vous fasse pas oublier vos sabres & ne perdez pas votre gloire, combattez fortement contre les Grecs & les Bulgares qui ressemblent à nos femmes & ne craignent pas plus la multitude des Grecs, que si c’était une multitude de femmes.

Les soldats ayants entendu ce discours, en furent fort encouragés. Lelu fils de Tosu sonna de la trompette, Bulstra fils de Bogor éleva l'étendard ; ils se mêlèrent aux Grecs, & il périt beaucoup de ceux-ci & des Bulgares. Le Duc Salanus voyant que les siens avaient le dessous, prit la fuite, & vint à Alba Bulgariae, [24] mais les Grecs & les Bulgares eurent si peur des Hongrois, qu'ils oublièrent le chemin par lequel ils étaient venus. Ils pensèrent que la Theis était un petit fleuve, & voulurent le traverser à la nage, & presque tous y périrent, & à peine en resta-t-il quelques uns pour donner à l'Empereur la nouvelle de ce désastre, & l'endroit où périrent tous ces Grecs, s'appelle encore aujourd’hui le port des grecs.

XL. De la victoire du Duc Arpad.

LE Duc Arpad & les siens ayant remporté la victoire, sortirent de là & vinrent au marais qui s'appelle Curtueltu, auprès de la forêt Gemelsen, & ils restèrent là trente quatre jours. Le Duc & les Nobles y ordonnèrent les coutumes, & les droits du royaume, comment ils devaient servir le Duc & les principaux de la nation, comment se feraient les jugements, & quelles peines l'on infligerait aux différents crimes. Pendant qu'ils étaient là, le Duc donna des terres avec leurs habitants à différents nobles qui étaient avec lui. Et ce lieu fut appelé dans l'idiome des Hongrois Scerii, parce que toutes les choses du royaume y avaient été ordonnées.[25] Le Duc donna ce lieu à Oundunec père d'Eté, depuis la Theis, jusqu’au marais de Bothua & depuis Cortueltu jusques aux sables d'Olpar. Quelque temps après, Ethé fils d'Oundu rassembla une multitude des Slaves, & fit bâtir un fort entre le fort d'Olpar & le port de Beuldu, & les Slaves appelèrent ce fort Soruograd, ce qui veut dire le fort noir, selon leur idiome.[26]

 

De egressu arpad

Postea uero dux arpad et sui nobiles hinc egressi uenerunt usque ad titulum subiugando sibi populum. Deinde egressi uenerunt usque ad portum zoloncamam, et totum populum infra thysciam et danubium habitantem sub iugum suum constituerunt. Hinc uero uenientes ad partes budrug paruenerunt, et iuxta fluuium uoyos castra metati sunt. Et in partibus illis dux dedit terram magnam cum omnibus habitatoribus suis Tosunec patri lelu, cum auunculo suo culpun patre Botond.

Tunc dux arpad et sui primates inito consilioi constituerunt quod exercitum miterent propter salanum ducem ultra danubium contra albam Bulgarie. Super quem exercitum constituti sunt principes et ductores: lelu filius tosu, bulsuu filius Bogat, Botond filius culpun.

Qui accepta licentia a duce arpad equitantes transnauigauerunt danubium nullo contradicente, in illo loco, ubi fluuius zoua descendit in danubium. Et inde egressi contra albam Bulgarie ciuitatem equitare ceperunt.

Tunc dux Bulgarorum consanguineus salani ducis, cum magno exercitu contra eos pugnaturus cum adiutorio grecorum accessit. Altera autem die ordinate sunt utreque acies in campo iuxta ripam danubij. Statim lelu filius tosu eleuato uexillo suj signi, et Bulsuu filius Bogat tubas bellicas sonando pugnaturi accesserunt. Et commixte sunt per partes manus utriusque hostis: Et ceperunt pugnare inter se acriter. Et interfecti sunt de grecis et bulgaris plurimi, et quidam capti sunt ex eis. Vident ergo dux bulgaris suos deficere in bello fuga lapsus, pro defensione uite albam ciuitatem ingressus est. Tunc lelu, bulsuu nec non botond adepta uictoria castra metati sunt iuxta danubium parum inferius in campo. Et omnes captiuos bulgarorum et grecorum ante se ducj fecerunt, quos ferro ligatos duci arpad remiserunt in hungariam.

De nuntiis ducis bulgarie

Secundo autem die dux bulgarie misit nuntios suos cum diuersis donis ad lelu et bulsuu atque botond et deprecans eos ut paci faueant. Et insuper mandauit quod partem salani ducis auuncili sui non foueret. Sed arpadio duci hungarie subiugatus fideliter seruiret et annuale uectigal persolueret. Illi uero paci fauentes proprium filium ducis in pignus accipientes, cum multis bonis rebus bulgarie discesserunt : et ducem eorum illesum dimiserunt. Deinde egressi usque ad portam Wazil iuerunt, et ex hing egressi terran racy subiugauerunt, et ducem eius captum in ferro ligatum tenuerunt. Hinc uero egressi usque ad mare peruenerunt, et omnes nationes illius patrie dominatui arpad ducis hungarorum potenter et pacifice subiugauerunt. Et ciuitatem spaletensem ceperunt et totam crouatiam sibi subiugauerunt. Et inde egressi filios nobilium in obsides acceperunt et in hungariam reuersi sunt ad ducem arpad. Quorum etiam bella et fortia queque facta sua, si scripti presentis pagine nun uultis, credite garrulis cantibus ioculatorum, et falsis fabulis rusticorum qui fortia facta et bella hungarorum usque in hodiernum diem obliuioni non tradunt. Sed quidam dicunt eos iuisse usque ad constantinopolim, et portam auream constantinopolis botondium cum dolabro suo incidisse. Sed ego quia in nullo codice hystoriographorum inueni, nisi ex falsis fabulis rusticorum audiui, ideo ad persens opus scribere non proposuj.

De castris zabrag, posaga et vlcou

Bulsuu, lelu et botond hinc egressi siluam que dicitur peturgoz, descendentes iuxta fluuium culpe castra metati sunt. Et transito fluuio illo usque ad fluuium zoua peruenerunt. Et transito zoua castrum zabrag ceperunt, et hinc equitantes castrum posaga et castrum vlcou ceperunt. Et hinc egressi danubium in portu greci transnauigantes in curiam ducis arpad peruenerunt. Cumque lelu, Bulsu et botond ceterjque milites sani et incolumes cum magna uictoria in secundo anno ad ducem arpad reuersi fuissent, factum est gaudium magnum per totam curiam ducis, et fecerunt conuiui(u)m magnum et epulabantur cottidie splendide hungarij una cum diuerses nationibus. Et uicine nationes audientes facinora facta eorum confluebant ad ducem arpad et pura fide subditi serujebant ej sub magna cura, et plurimi hospites facti sunt domesticj.

De insula Danubij

Post hec uero egressus dux arpad de partibus illis, ubi nunc est castrum budrug et descendit iuxta danubium usque ad insulam magnam. Et castra metati sunt iuxta insulam, et dux arpad suique nobiles intrantes insulam, uisa fertilitate et ubertate illius loci, ac municionem aquarum danubij, dilexerunt locum ultra quam dici potest. Et constituerunt ut ducalis esset insula, et unusquisque nobilum personarum suam ibi haberet curiam et uillam. Statim dux arpad conductis artificibus percepit facere egregias domos ducales, et omnes equos suos longitudine dierum fatigatos ibi introductos pascere precepit. Et agasonibus suis magistrum prefecit quendam cumanum uirum prudentissimum, nomine sepel. Et propter sepel magistrum agasonum in ibi morantem, uocata est insula illa nomine sepel usque in hodiernum diem. Dux uero arpad et sui nobiles perma(n)serunt ibi cum famulis et famulabus suis pacifice et potenter, a mense aprilis usque ad mense(m) octobris. Et dimissis ibi uxoribus suis communi consilio ab insula exeuntes constituerunt ut ultra danubium irent, et terram pannonie subiugarent. Et contra carinthinos bellum promouerent ac in marciam lombardie se uenire prepararent. Et antequam hoc fieret, mitterent exercitum contra glad ducem, qui dominium habebat a fluuio morus usque ad castrum horom ex cuius etiam progenie longo tempore descenderet ohtum, quem sunad interfecit. Ad hoc autem missi sunt zuardu et cadusa atque boyta, qui cum accepta licentia equitarent, tysciam in Kenesna transnauigauerunt et descensum fecerunt iuxta fluuium seztureg Et nemo aduersarius inuentus est eis, qui leuaret manus contra eos, quia timor eorum irruerat super omnes homines illius terre. Ex hinc egressi ad partes beguey peruenerunt, et ibi per duas ebdomadas permanserunt, donec omnes habitatores illius patrie a morisio usque ad fluuium temes sibi subiugauerunt, et filios eorum in obsides acceperunt. Deinde amoto exercitiu uenerunt uersus fluuium temes et castra metati sunt iuxta uadum arenarum. Et cum uellent transire amnem temes uenit obulam eis glad, a cuius progenie ohtum descendit, dux illius patrie cum magno exercitiu equitum et peditum, adiutorio cumanorum et bulgarorum atque blacorum. Altera autem die dum utraque acies interiacente fluuio temes ad inuicem nullatenus transire ualuisset.

Tunc zuardu inuinxit fratri suo caduse ut ut cum dimidia parte exercitus sui descenderet inferius. Et quodlibet modo posset transmeare pugnare contra hostes. Statim cadusa preceptis fratris suis obediens cum medietate exercitus equitans descendit inferius celerrimo cursu. Et sicut diuina gratia erat eis preuia: leuem habuit transitum. Et dum una pars exercitus hungarorum cum cadusa ultra esset, et dimidia pars cum zuard citra esset. Tunc hungarij tubas bellicas sonuerunt, et fluuium transnatando acriter pugnare ceperunt. Et quia deus sua gratia antecedebat hungaros, dedit eis uictoriam magnam, et inimici eorum cadebant ante eos, sicut manipuli post messores. Et in eodem bello mortuj sunt duo duces cumanorum, et tres kenezy bulgarorum. Et ipse glad dux eorum fuga lapsus euasit, sed omnis exercitus eius liquefacti tamquam cera a fecie ignis, in ore gladij consumti sunt. Tunc zuard et cadusa atque boyta adepta uictoria hinc egressi uenerunt uersus fines bulgarorum, et castra metati sunt iuxta fluuium ponoucea. Dux uero glad fuga lapsus ut supra diximus, propter timorem hungarorum castrum keuee ingressus est. Et tercio die zuardu et cadusa nec non boyta a quo genus brucsa descendit, ordinato exercitu contra castrum keuee pugnare ceperunt. Hoc cum glad dux eorum uidisset, missis legatis pacem ab eis petere cepit, et castrum sua sponte cum diuersis donis condonauit. Hinc euntes castrum ursoua ceperunt, et per mensem unum ibi habitauerunt et boytam cum tertia parte exercitus ac fillis incolarum in obsides positis ad ducem arpad remiserunt. Et insuper legatos suos miserunt, ut eis licentiam daret in greciam eundi, ut totam macedoniam sibi subiugarent, a danubio usque ad nigrum mare.

Nam mens hungarorum tunc tempore nichil aliud optabat, nisi occupare sibi terras, et subiugare nationes et bellico uti labore. Quia hungarij tunc tempore ita gaudebant de effusione humani sanguinis, sicut sanguisuga et nisi ita fecissent, tot bonas terras nosteris suis non dimisissent. Quid plura? Boyta et legati eorum ad ducem arpat peruenerunt, et res gestas sibi narrauerunt. Dux uero opus eorum conlaudauit, et zuardu ac caduse licentiam concessit liberam in greciam eundi, et terram preoccupandi sibi. Et boyte pro suo fidelissimo seruicio dedit terram magnam iuxta thysciam nomine torhus. Tunc legati zuard et fratris sui caduse accepta licentia letj ad dominos suos reuersi sunt.

De ciuibus bulgarorum et macedonum

Transactis quibusdam diebus zuard et cadusa cum omni exercitu suo, eleuatis uexillis signiferis aquam danubij transnauigauerunt, et castrum borons ceperunt, deinde ad castrum scereducy iuerunt. Audientes hoc ciues bulgarorum et macedonum, tumerunt ualde a facie eorum. Tunc omnes incole illius miserunt nuntios suos cum donarris multis, ut terram sibi subiugarent, et filios suos in obsides traderunt. Zuard et cadusa paci fauentes et dona et obsides eorum accipientes eos quasi suum proprium populum in pace dimisserunt. Ipsi uero ceperunt ecuitare ultra portam Wacil, et castrum philippi regis ceperunt, deinde totam terram usque ad cleopatram ciuitatem sibi subiugauerunt. Et sub potestate sua habuerunt totam terram a ciuitate durasu usque ad terram rachy. Et zuardu in eadem terra duxit sibi uxorem, et populus ille qui nunc dicitur sobamogera, mortuo duce zuard in grecia remansit. Et ideo dictus est soba secundum grecos id est stultus populus, quia mortuo domino suo uiam non dilexit redire ad patriam suam.

De portu Moger

Transactis quibusdam diebus dux arpad et omnes sui primates conmuni consilio et pari consensu ac libera uoluntate, egredientes de insula, castra metati sunt ultra surcusar usque ad fluuium racus. Et dum uidissent quod undique tuti esent, nec aliquis eis obsistere ualeret, transierunt danubium. Et portum ibi transitum fecerent, portum moger nominauerunt, eo quod vii. Principales persone qui hetumoger dicti sunt ibi danubium transnauigauerunt. Transito danubio castra metati sunt iuxta danubium usque ad aquas calidas superiores. Et hoc autido omnes romani per terram pannonie habitantes uitam fuga seruauerunt. Secundo autem die dux arpad et omnes sui primates cum omnibus militibus hungarie intrauerunt in ciuitatem atthile regis. Et uiderunt omnia palacia regalia quedam destructa usque ad fundamentum quedam non, et ammirabantur ultra modum omnia illa edificia lapidea. Et facti sunt leti ultra quam dici potest, eo quod capere meruerunt sine bello ciuitatem atthile regis, ex cuius progenie dux arpad descenderat. Et epulabantur cottidie cum gaudio magno in palatio attile regis conlateraliter sedendo. Et omnes simphonias atque dulces sonos cythararum et fistularum cum omnibus iocolatorum habebant ante se. Fercula pocula portabantur duci et nobilibus in uasis aureis, seruientibus et rusticis in uasis argenteis. Quia omnia bone aliorum regnorum circumiacentium dederat deus in manus eorum. Et uiuebant large ac splendide cum omnibus hospitibus ad se uenientibus. Et hospitibus secum commorantibus dux arpad terras et possessiones magnas dabat,

et hoc auditio multi hospitum confluebant ad, eum et ouanter morabantur cum eo. Tunc dux arpad et sui propter leticiam permanserunt in ciuitate atthile regis per xx-ti dies. Et omnes milites hungarie ante presentiam ducis fere cottidie super destrarios suos sedendo, cum clipeis et lanceis maximum turnamentum fejebant. Et alij iuuenes more paganismo cum arcubus et sagittis ludebant. Vnde dux arpad ualde letus factus est. Et omnibus militibus suis diuersa donaria tam in auro quam in argento, cum ceteris possessionibus donauit. Et in eodem loco cundunec patri curzan dedit terram a ciuitate Atthile regis usque ad centum montes, et usque ad gyoyg, et filio suo dedit unum castrum ad custodiam populi sui. Tunc curzan castrum illud sub suo proprio nomine iussit appellari. Quo nomen usque in hodiernum diem non est obliuioni traditum.

De terra pannonie

Dvx uero arpad xx.i. die, inito consilio egressus est de ecilburgu ut subiugaret sibi terram pannonie usque ad fluuium droua. Et prima die castra metatus est iuxta danubium uersus centum montes. Tunc ordinatum est quod dux de exercitu suo unam partem mitteret iuxta danubium uersus castrum borona , cui prefecit principes et ductores duos de principalibus personis, scilicet ete pater eudu et boyta, a quo genus brugsa descendit. Quibus etiam pro suo fidelissimo obsequio dux arpad donauit munera non minima et eudunec filio ete dedit terram iuxta danubium cum populo non numerato. Et in loco illo eudu subuigato populo illius partis, edificauit castrum quod nominauit uulgariter Zecuseu, eo quod sibi sedem et stabilitatem constituit. Et boyte eodem modo dedit terram magnam uersus saru cum populo non numerato, que usque modo nuncupatur boyta.

De ciuitate bezprem

In secunda parte exercitus missus est vsubu pater zoloucu et cusee, qui iret uersus ciuitatem bezprem et subiugaret omnes habitatores terre usque ad castrum ferreum. Tunc usubu princeps et ductor illius exercitus licentiatus a duce, eleuato uexillo egressus est, et castra metatus est iuxta montem pacoztu . Hinc uero equitantes in campo peytu castra metati sunt, et per tres dies ibi permanserunt. Quatro autem usque ad castrum bezprem peruenerunt.

Tunc usubu et eusee ordinato exercitu contra romanos milites qui castrum bezprem custodiebant, pugnare acriter ceperunt. Et pugnatum est inter eos per ebdomadam unam. In secunda autem ebdomada feria iiii-ta, dum utraque pars esercitus labore belli nimis esset fatigata. Tunc usubu et eusee plures milites romanorum in ore gladij consumpserunt, et quosdam ictibus sagittarum interfecerunt. Reliqui uero romanorum uidentes audaciam hungarorum, dimisso castro bezprem fuga lapsi sunt: et pro remedio uite in terram theotonicorum properauerunt. Quos usubuu e eusee usque ad confinium theotonicorum persecuti sunt. Quadam autem die, dum hungarij et romanij in confinio essent, romanj fugiendo latenter fluuium qui est in confinio pannonie et theotonicorum transnatauerunt. Vnde fluuius ille ab hungaris uocatus loponsu eo quod romani propter metum hungarorum latenter transnatauerunt.

De castro ferreo

Et ex hinc usubuu pater zoloncu et eusee pater urcun reuersi, castrum ferreum ceperunt et filios incolarum in obsides acceperunt. Hinc uero equitantes iuxta fluuium bolotun usque ad thyon peruenerunt. Et subiugatis sibi gentibus xiiii. die castrum bezprem intrauerunt. Tunc usubuu et eusee inito consilio nuntios suos cum diuersis muneribus et filiis incolarum in obsides positis, duci arpad transmiserunt. Et qualiter dedit eis deus uictoriam, et quomodo romani dimisso castro bezprem ante eos fuga lapsi fluuium loponsu latenter transnatauerunt. Missi uero eorum ducem arpad in silua turobag arpalice ambulantem inuenerunt, et eum cum diuersis ex parte usubuu et eusee salutauerunt, et filios incolarum in obsides positos duci presentauerunt. Dux uero arpad audito hoc lecior factus est solito, et iterum in etiburgu reuersus, magnum fecit conuiuium. Et legatis gaudia nuntiantibus, munera magna condonauit.

De deuastatione pannonie

Tunc dux arpad et suis nobiles cum tercia parte exercitus sui de elciburgu egressi castra metati sunt iuxta campum putej salsi. Et inde equitantes usque ad montem bodoctu peruenerunt. Dux uero arpad ab orientali parte dedjt eleudunec patri zolsu, siluam magnam que nunc uertus uocatur, propter clipeos theotonicorum in ibi dimissos. Ad radicem cuius silue iuxta stagnum ferteu Sac nepos Zobolsu longo post tempore castrum construxit. Quit ultra? Dux autem arpad et sui milites sic eundo iuxta montem sancti martinj castra metati sunt, et de fonte sabarie tam ipsi quam eorum animalia biberunt. Et montem ascendentes et uisa puchritu(di)ne terre pannonie, njimis leti facti sunt. Et inde egressi usque ad rabam et rabuceam uenerunt, sclauorum et pannoniorum gentes et regna uastauerunt et eorum regiones occupauerunt. Sed et carinthinorum moroanensium fines crebris incursibus irrupuerunt. Quorum multa milia hominum in ore gladij occiderunt, presidia subuerterunt, et regiones eorum possiderunt, et usque in hodiernum diem adiuuante domino potenter et pacifice posteritas eorum detinet. Tunc usubuu et eusee pater urcun cum omnj exercitu eorum sani et incolumes cum magna uictoria reuersi sunt ad ducem arpad. Deus enim, cuius mina preuia erat, tradidit duci arpad et suis militibus inimicos eorum et per manus suas labores populorum possederunt.

Vbi cum radicati fuissent, et fere omnia uiciniora regna sibi subiugassent reuersi sunt iuxta danubium, uersus siluam causa uenationis, et dimissis militibus ad sua propria dux et suj nobiles manserunt in eaden silua per x. Dies. Et inde uenerunt in ciuitatem atthile regis, et ad insulam sepel descenderunt, ubi ducissa et alie mulieres nobilium fuerunt.

Et eodem anno dux arpad genuit filium nomine zulta, et factum est gaudium magnum inter hungaros, et dux et sui nobiles per plurimos dies faciebant conuiuia magna. Iuuenesque eorum ludebant ante faciem ducis et suorum nobilium sicut agni ouium ante arietes.

Transactis autem quibusdam diebus dux arpad et sui nobiles communi consilio miserunt exercitum contra menumorout ducem byhoriensen. Cui exercituj principes et ductores facti sunt usubuu et velec. Qui egressi sunt de insula equitantes per sabulum et fluuium thyscie in portu beuldu transnauigauerunt. Et inde equitantes iuxta fluuium couroug castra metati sunt, et omnes siculi qui primo erant populi atthyle regis audita fama usubuu obuiam pacifici uenerunt, et sua sponte filios suos cum diuersis muneribus in obsides dederunt. Et ante exercitum usubuu in prima acie contra menumorout pugnaturj ceperunt. Et statim filios siculorum duci arpad transmiserunt, et ipsi precedentibus siclis una contra menumorout equitare ceperunt. Fluuium cris in ceruino monte transnatauerunt, et inde equitantes iuxta fluuium tekereu castra metati sunt.

 

XLI. De la sortie d’Arpad.

Ensuite le Duc Arpad & ses nobles sortirent de là & subjuguant toujours des peuples, ils arrivèrent à Titul[27] & de la ils arrivèrent au port de Zaioncaman, & ils mirent sous le joug tout le peuple qui habite entre la Theiss & le Danube.

Et de là, ils allèrent dans les parties de Budrug & ils campèrent près du fleuve Voyos. Et le Duc donna une grande terre avec ses habitants, à Tosunec père de Lelu, ainsi qu'à son oncle Culpun, père de Botond.

Et Arpad tint conseil avec les principaux de la nation, & à cause de Salanus ils envoyèrent une armée au-delà du Danube contre Belgrade. Les chefs de cette armée furent Lelu fils de Tosu, Bulsuu fils de Bogad, & Botond fils de Culpun.

Ils montèrent à cheval, & passèrent le Danube à la nage dans l'endroit où il reçoit les eaux du fleuve Lora, & de là ils allèrent vers Albe de Bulgarie.

Alors le Duc des Bulgares parent du Duc Salanus marcha contre eux avec le secours des Grecs. Le lendemain les deux armées se rangèrent le long du Danube. Aussitôt Lelu fils de Tosu, éleva son étendard, & Bulsuu fils de Bogat fit sonner les trompettes guerrières. Le choc des armées fut terrible, & il y fut beaucoup de Grecs & de Bulgares pris & tués. Le Duc de Bulgarie voyant le désavantage des siens, s'enfuit & entra dans la ville d'Alba. Alors Lelu, Bulsuu, & Botond, campèrent sur le champ de bataille, & ils se firent amener tous les captifs Grecs & Bulgares, & les envoyèrent en Hongrie au Duc Arpad.

XLII. Des envoyés du Duc de Bulgarie.

Deux jours après, le Duc de Bulgarie envoya des présents à Lelu, Bulsuu, & Botond, leurs demandant la paix & promettant de ne point aider son oncle Salanus, mais de servir fidèlement le Duc Arpad & de lui payer un tribut annuel. Ceux-ci se montrèrent favorables à la paix, & prenant pour otage un propre fils du Duc, ils quittèrent la Bulgarie après en avoir emporté un grand nombre de bonnes choses, mais ils ne firent aucun mal au Duc des Bulgares ; ensuite ils partirent & prirent la terre de Racy & en ayant pris le Duc, ils l'enchaînèrent & l'emmenèrent avec eux. De la ils allèrent jusques à la mer, & subjuguèrent toutes les nations de ce pays, ils prirent la ville de Spalatro, [28] subjuguèrent toute la Croatie, prirent des otages & revinrent auprès du Duc Arpad. Et si vous ne voulez pas en croire à ce que j'écris, croyez en les chansons des Joculateurs, & les fables des gens de la campagne, qui transmettent d'âge en âge les hauts faits de nos ancêtres. Mais quelques-uns disent qu'ils ont été jusques à Constantinople, & que Bontod frappa de son sabre la porte d'or, mais comme je ne le fais que par les récits du peuple de la campagne, & que je ne l'ai trouvé dans aucun livre, je n'ai pas jugé, à propos d'en parler dans mon ouvrage.

XLIII. Des villes de Zabrag, Possaga & Ulcou.

Bulsuu, Lelu & Botond, étant parti, de Centrèrent dans la forêt qui s'appelle Peturgoz & campèrent près du fleuve Culpe, & l’ayant passé ils arrivèrent, près du fleuve Zoya, & ils prirent la ville de Zabrag puis la ville de Posaga, enfin la ville de Vulcou. Enfin ils traversèrent le Danube au port du Grec, & arrivèrent à la cour du Duc Arpad. Lorsque Lelu, Bulsu, & Botond, furent ainsi revenus sains et saufs dans la seconde année de leur absence, il y eut bien de la joie & l’on fit tous les jours des festins splendides, auxquelles on invitait les nations voisines : car elles venaient en foule auprès du Duc Arpad. Quelques peuples servaient comme sujets, & d'autres étaient traités en hôtes.

XLIV. De l’île du Danube.

LE Duc Arpad quitta le pays où est aujourd’hui la ville de Budrug, & descendit le long du Danube jusqu’à une grande île, & il plaça son camp près de cette île. Le Duc alla à cette île avec ses nobles, & lorsqu'ils eurent vu sa fertilité, & comme elle était défendue par les eaux du Danube, ils décrétèrent que cette île serait ducale, & que chacun des nobles y aurait une maison. Le Duc Arpad y fit aussitôt venir une foule d'ouvriers qui construisirent des maisons magnifiques, puis il ordonna que l'on fit venir dans l'île tous les chevaux pour les faire repaître, il donna le commandement des palefreniers à un certain Cumanien appelé Sepel, homme d'une grande prudence, & depuis lors cette île s'est toujours appelée Sepel.

Le Duc Arpad & ses nobles relièrent là depuis le mois d'Avril jusqu'au mois d’Octobre, puis ils se déterminèrent à renvoyer leurs femmes & à sortir de cette île pour subjuguer la Pannonie, & se préparer à attaquer les Carinthiens & la marche de Lombardie. Mais auparavant ils voulaient envoyer une armée contre Glad qui possédait le pays entre le Morus & la ville de Horom, & c'est de lui que descendait Obtum qui fut tué par Sunad.

Les chefs chargés de cette expédition fuirent Zuardu, Cadusa, & Boyta, qui ayant pris congé du Duc Arpad passèrent la Theys à Renesna, & descendants vers le fleuve Seztureg, ils ne trouvèrent personne qui osa lever la main contre eux, car l'effroi avait saisi tous les habitants de cette terre. Alors ils allèrent du côté de Begey, & y restèrent deux semaines, jusqu’à ce que tous les habitants se fussent soumis, & eussent donné des otages, savoir depuis le Morisius, jusqu’au fleuve Ternes. Alors ils s'approchèrent de ce fleuve, & campèrent auprès du gué des sables, mais comme ils voulurent passer, le Duc Glad l'un des ancêtres d'Ohtum, s'opposa à leur passage avec une armée nombreuse de Blaques, de Coumans, & de Bulgares. Le lendemain Zuardu ordonna à son frère Cadusa, de passer le fleuve plus bas, & d'attaquer les ennemis. Celui-ci obéit & comme il était précédé par la grâce divine, son passage fut facile, & aussitôt qu'il fut de l'autre côté, Zuard fit sonner les trompettes guerrières, & les Hongrois remportèrent la victoire, car leurs ennemis tombaient devant eux, comme les gerbes sous la main du moissonneur. Et dans cette expédition moururent deux Ducs des Coumans, & trois Knez des Bulgares. Leur Duc Glad s'enfuit mais son armée fut fondue comme la cire se fond devant le feu.

Alors Zuard, Cadusa, & Boyta ayant remporté la victoire allèrent plus loin, & s'approchant des frontières des Bulgares, ils campèrent près du fleuve Ponoucea. Glad qui avait pris la fuite, s'enferma dans la ville de Kevée, & le troisième jour les Hongrois commencèrent à l'assiéger, ayants à leur tête Zuardu Cadusa & Boyta de qui descend la famille de Brucsa. Mais le Duc Glad voyant qu’on se préparait à l'attaquer, leur rendit le fort. Ensuite ils prirent la ville d'Ursova & ils y habitèrent pendant un mois, & de là ils envoyèrent à Arpad Boyta avec un tiers de l'armée & les otages, & ils le chargèrent de demander pour eux la permission de conquérir toute la Macédoine depuis le Danube, jusqu’à la mer. Car alors toutes les pensées des Hongrois étaient tournées à subjuguer des nations, & ils aimaient le sang humain comme des sangsues, & sans cela ils n'auraient pas laissé tant de bonnes terres à leurs descendants.

Boyta vint auprès d'Arpad, lui conta tout ce qu'on avait fait, & demanda pour Zuard & Cadusa la permission d'aller conquérir la Grèce, le Duc loua leurs œuvres, donna à Zuard & Cadusa la permission de conquérir la Grèce, & pour récompenser Boyta, il lui donna une belle terre sur la Theys, appelée Torhus, & les envoyés de Zuard & Cadusa retournèrent contents auprès de leurs maîtres.

XLV. Des citoyens de Bulgarie & de Macédoine.

Au bout de quelques jours Zuard & Cadusa, levèrent leurs étendards, passèrent le Danube & prirent la ville de Borons, ensuite ils allèrent à la ville de Scereducy, & les citoyens de Bulgarie & de Macédoine eurent peur de voir leurs visages. Alors tous les habitants de cette terre députèrent vers les chefs Hongrois, leurs donnèrent leurs fils en otages & leurs firent divers présents. Zuard & Cadusa se montrèrent favorables à la paix & ne firent aucun mal à ce peuple. Alors ils passèrent la porte Wacil, & prirent la ville du Roi Philippe, puis ils soumirent tout le pays jusqu’à la ville de Cléopâtre, & ils le possédaient tout entier depuis la ville de Durasu, jusques à la ville de Rachy, & Zuard se maria dans cette terre, & ce peuple s'appelle aujourd’hui Soba mogera, parce qu'il resta en Grèce après la mort de son chef Zuard : car en grec Soba déligne un peuple insensé qui après la mort de son chef n'est pas retourné dans son pays.[29]

XLVI. De la sortie du Duc Arpad.

Après quelques jours le Duc Arpad & les principaux, après avoir tenu conseil résolurent à l'unanimité de sortir de l'île ; ils campèrent au-delà de Surcussar vers le fleuve Rachy. Et voyant qu'ils étaient en sûreté & que personne ne songeait à s'opposer à eux, ils passèrent le Danube, & l'endroit où ils traversèrent ce fleuve, ils l'appelèrent le Port Moger, car ce fut là que passèrent les sept personnes principales appelées Hetumoger. Après avoir passé le fleuve, ils campèrent encore auprès vers les eaux chaudes supérieures, & les Romains qui habitaient dans la Pannonie, prirent aussitôt la fuite. Le lendemain le Duc Arpad, & tous ses guerriers entrèrent dans la ville d'Attila, de qui descendait Arpad, & là on fit des festins très gais dans le palais du Roi Attila, avec des symphonies, des guitares & des flûtes, & les chants des Joculateurs. Le Duc Arpad ne mangeait & ne buvait que dans des vases d’or, & ses valets & ses paysans dans des vases d'argent, car Dieu avait mis dans leurs mains l'or & l'argent des nations voisines, et ils vivaient largement & splendidement avec tous les étrangers, qui se déclaraient leurs hôtes.

Et lorsque ces hôtes voulaient rester avec le Duc Arpad, il leurs donnait de grandes possessions, ce qui en fit venir en foule. Le Duc Arpad & les siens passèrent vingt jours à se réjouir dans la ville du Roi Attila. Et pendant ce temps là les guerriers de Hongrie, montaient à cheval devant le Duc armés de boucliers & de lances, & faisaient presque tous les jours des tournois mémorables. Les jeunes gens s'exerçaient à tirer l'arc à la manière des païens. Tout cela réjouit tellement le Duc Arpad qu'il fit de grands présents a ces guerriers, tant en or & en argent qu'en terres & en possessions. C’est là aussi qu'il donna à Cadunec père de Curzan toute la terre qui est depuis la ville d'Attila jusques aux cent montagnes, & jusqu’à Gyoyg, & il donna une ville à son fils pour y mettre son peuple. Curzan voulut que cette ville fût appelée de son nom, ce qui est encore en usage aujourd’hui.

XLVII. De la terre de Pannonie.

LE vingt et unième jour, le Duc Arpad tint conseil & sortit d'Ecilbourg, pour subjuguer toute la Pannonie jusqu’au fleuve Drova, & le premier jour il campa près du Danube vers les cent montagnes. Alors il fut résolu que le Duc enverrait, une partie de son armée le long du Danube vers la ville de Borona. Et cette armée eut pour chefs deux des personnes principales, savoir Eté père d'Eudu, & Boyta de qui vient la famille de Brugsa, & Arpad donna à Eudunec fils d'Eté une terre proche du Danube avec beaucoup de peuple. Eudu ayant subjugué tout ce peuple, y bâtit une ville forte, qu'il appela vulgairement Zecuseu, [30] parce qu'il y établit son domicile & son siège. Arpad donna aussi à Boyta une grande terre près de Saru & cette terre s'appelle encore aujourd’hui Boyta.

XLVIII. De la ville de Bezprem.

L’autre partie de l’armée était commandée par Usubu, père de Zolocu & d'Eusée, & elle devait vers la ville de Bezprem, pour subjuguer tous les habitants de cette terre jusqu’au Castrum ferreum. Usubu chef de cette armée, prit congé du Duc & ayant levé son étendard, il campa près du mont Pacoztu, puis il campa devant la ville de Peytu, ils y restèrent trois jours & le quatrième ils arrivèrent à la ville de Bezprem.

Alors Usubuu & Eusée ayant rangé leur armée, attaquèrent vaillamment les soldats Romains qui défendaient la ville de Bezprem ; l'on combattit une semaine, & la semaine suivante, & la quatrième férie, Usubu & Eusée tuèrent beaucoup de soldats Romains, les uns avec l’épée & d'autres à coups de flèches, & ceux qui restaient étonnés voyant l'audace des Hongrois, abandonnèrent la ville de Bezprem, & s'enfuirent jusques dans le pays des Theutoniens & Usubuu, & Eusée les poursuivirent jusqu’aux frontières des Theutoniens. Et un jour que les Hongrois, & les Romains étaient proches de cette frontière, les Romains passèrent un fleuve, qui fait la frontière entre les Theutoniens & la Pannonie. C'est pourquoi les Hongrois appelèrent ce fleuve Loponsu, parce que ce fut la crainte des Hongrois qui porta les Romains à se jeter à la nage.[31]

XLIX. Du Castrum Ferreum.

Usubu père de Zolocu, & Eusée père d'Urcun quittèrent Bezprem, & vinrent au Castrum ferreum dont ils s’emparèrent, & ils reçurent en otages les fils des habitants, & de là ils allèrent au fleuve Bolotum, & vinrent jusqu’à Thyon, & là ayant subjugué les nations, ils revinrent le quatorzième jour à Bezprem. Alors Usubu & Eusée firent partir des envoyés chargés de conduire au Duc Arpad les fils des habitants, & de lui offrir divers présents, & ceux-ci étant arrivés chez le Duc Arpad, lui contèrent comment Dieu leur avait accordé la victoire & comment les Romains ayant abandonné la ville de Bezprem, s'étaient enfui jusqu’au fleuve Loponsu, qu'ils avaient traversé à la nage. Le Duc Arpad était alors dans la forêt de Turobag, il se réjouit beaucoup & retourna à Ecilbourg, où il fit un grand festin, & combla les envoyés de présents.

L. De la dévastation en Pannonie.

Alors le Duc Arpad prit le tiers de son armée sortit d'Ecilbourg, & campa près du puits salé, & de là, il alla jusques au mont Bodoctu, & le Duc Arpad donna à Eleudenec père de Zolsu une grande forêt, qui s'appelle aujourd’hui Vetrus à cause des boucliers que les Theutoniens y ont perdu. Bien longtemps après, Saac petit fils de Zobolsu, fit construire un château, là où commence la forêt, proche du lac de Fertue. Le Duc Arpad & ses guerriers allants toujours ainsi devant eux, arrivèrent près de la montagne de St Martin, & eux & leurs chevaux burent dans la fontaine de Sabaria, puis ils montèrent la montagne & ayant vu de la toute la Pannonie, ils se réjouirent beaucoup de la beauté de cette terre, puis ils allèrent jusques à la Raba & la Rabucea, & s'emparèrent du pays des Slaves & des Pannoniens. Enfin ils arrivèrent au pays des Carinthiens Moroaniens, qu'ils dévastèrent, & toutes ces contrées sont encore aujourd’hui possédées par leurs descendants. Alors Usubu, & Eusée père d'Urcun vinrent rejoindre le Duc Arpad. Et Dieu dans se miséricorde lui livra ses ennemis, & accorda aux Hongrois, la grâce de jouir du labeur des peuples.

Et le Duc Arpad ayant soumis tout le pays des environs, voulut retourner vers les forêts pour chasser, & il revint le long du Danube. Alors le Duc Arpad permit aux guerriers de s'en retourner chez eux, & ayant passé dix jours dans cette forêt, il vint à la ville du Roi Attila, & ensuite à l'île de Sepel où se trouvait la Duchesse, & les femmes des Nobles.

Dans la même année le Duc Arpad eut un fils qui fut appelé Zulta, ce qui causa une grande joie aux Hongrois, & le Duc & ses nobles firent de grands festins, & ils s'amusaient à voir les jeux des jeunes gens, qui s'exerçaient devant eux, comme les agneaux s'exercent devant les béliers.

Au bout de quelques jours, le Duc Arpad tint conseil, & se détermina à envoyer une armée contre Menumorout Duc de Byhor, les chefs de cette armée furent Usubu & Velec, qui sortant de l'île & marchant le long des sables, passèrent la Theys au port de Beuldu, & puis allèrent camper près du fleuve Couroug. Et tous les Sicules, qui étaient les peuples du Roi Attila se présentèrent paisiblement & offrirent leurs enfants en otages, & ce furent eux qui combattirent contre Menumorout dans l'armée d'Usubuu dont ils formaient l'avant garde. L'on envoya donc les fils des Sicules au Duc Arpad, & eux mêmes faisant l'avant garde, traversèrent le fleuve Cris près du mont Cerumus, & campèrent ensuite près du fleuve Tekereu.[32]

 

De duce menumorout

Hoc cum addiuisset menumorout quod usubuu et velec nobilissimi milites ducis arpad cum ualida manu precedentibus siclis contra eum uenirent. Timuit ultra quam debuit, et contra eos ausus uenire non fuit, eo quod audiuerat ducem arpadium et suos milites ualidiores esse in bello, et romanos fugatos esse de pannonia per ipsos, et carinthinorum moroanensium fines deuastasse, et multa milia hominum occidisse in ore gladij eorum. Regnumque pannoniorum occupasse, et inimicos eorum ante faciem eorum fugisse.

Tunc dux menumorout dimissa multitudine militum in castro byhor, ipse cum uxore et filia sua fugiens a facie eorum, in nemoribus ygfon habitare cepit. Vsubuu et veluc omnisque exercitus eorum leti contra castrum byhor equitare ceperunt, et castra metati sunt iuxta fluuium iouxas. Tercio autem die ordinatis exercitibus ad castrum belland egressi sunt. Et e conuerso milites congregati ex diuersis nationibus, contra usubuu et suos milites pugnare ceperunt. Sycli et hu(n)garij ictibus sagittarum multos hominum interfecerunt. Vsubuu et velec per balistas c.xxv. milites occiderunt. Et pugnatum est inter eos xii. Dies et de militibus vsbuu xx. Hungarij et xv. Sjcli interfecti sunt. Terciodecimo die autem cum hungari et sycli fossata castri impleuissent, et scalas, ad murum ponere uellent milites ducis menumorout, uidentes audatiam hungarorum ceperunt rogare hos duos principes exercitus, et aperto castro nudis pedibus supplicantes ante faciem usubuu et velec uenerunt. Quibus usubuu et velec custodiam ponentes, ipsi in castrum byhor intrauerunt et multa bona illorum militum in ibi inuenerunt. Hoc cum menumorout per nuntios faga lapsos audiuisset irruit in maximum timorem. Et missit nuntios suos cum diuersis muneribus ad vsubuu et velec, et rogauit eos ut ipsi paci fauentes ut ipsi legatos suos ad ducem arpad eundi dimitterent, qui nuntiarent ei quod menumorout qui duci arpad primo per legatos proprios bulgarice corde superbe mandando, terram cum pugillo se daturum negabat, modo per eosdem nuntios uictus et prostratus totum regnum et zulte, filio arpad, filiam suam dare non dubitaret.

Tunc vsubuu et velec consilium eius laudauerunt, et cum laegatis suis nuntios miserunt, qui dominum suum ducem arpadium causa pacis rogarent. Qui cum insulam sepel intrauissent et ducem arpad salutassent, secunda die legati mandata menumorout dixerunt. Dux uero arpad inito consilio suorum nobilum, mandata menumorout dilexit et laudauit, et dum filiam menumorout eiusdam etatis ut filius suus Zultus, iam esse audiuisset, peticionem menumorout differre noluit, et filiam suam in uxorem zulte accepit, cum regno sibi promisso. Et missis legatis ad usubu et ueluc mandauit, et celebratis nuptiis filiam menumorout filio suo zulte in uxorem acciperent, et filios incolarum in obsides positos secum ducerent, et duci menumorout daret byhor castrum.

De usubuu, veluc

Usubuu et veluc nec non omnis exercitus preceptis domini sui fauentes filiam menumorout celebratis nuntiis acceperunt et filios incolarum in obsides positos secum duxerunt. Et ipsum menumorout in castro byhor dimisserunt. Tunc usubuu et ueluc cum magno honore et gaudio ad ducem arpad reuersi sunt. Dux uero et sui yobagyones obuiam eis processerunt, et filiam menumorout, sicut decet sponsam tanti ducis, honorifice ad ducalem domum duxerunt. Dux uero arpad et omnes sui primates celebrantes nuptias magna fecerunt conuiuia, et fere cottidie comedebant nuptialiter cum diuersis milibus circumiacentium regnorum. Et iuuenes eorum ludebant ante faciem ducis et suorum nobilium.

Dux arpad accepto iuramento primatum et militum hungarie, filium suum zultam ducem cum magno honore eleuari fecit. Tunc dux usubunec patri zoloucu pro suo fidelissimo seruicio dedit castrum bezprem cum omnibus appendiciis suis. Et veluquio dedit comitatum de zarand. Et sic ceteris nobilibus honores et loca condonauit. Menumorout post istam causam in secundo anno sine filio mortuus est, et regnum eius totaliter zulte generi suo dimisit in pace. Post hoc anno dominice incarnations d. Cccc. vii. dux dux arpad migrauit de hec seculo. Qui honorifice sepultus est supra caput unius parui fluminis qui descendit per alueum lapideum in ciuitatem atthile regis. Vbi etiam post conuersionem hungarorum edificata est ecclesia que uocatur alba sub honore berate Marie virginis.

De successione zulte ducis

Et successit ei filius suus zulta similis patri moribus dissimillis natura. Fuit enim dux zulta parum blesus, et candidus, capillo molli, et flauo, statura mediocri, dux bellicosus, animo fortis, sed in ciuibus clemens, uoce suaui, sed cupidus imperij. Quem omnes primates et milites hungarie miro modo diligebant. Transactis quibusdam temporibus, dux zulta cum esset, xiii-cim annorum, omnes primates regni sui communi consilio et pari uoluntate quosdam rectores regni sub duce prefecerunt, qui moderamine iuris consuetudinis dissidentium lites contentionesque sopirent. Alios autem contituerunt nomina hec fuerunt: Lelu filius tosu, bulsuu uir sanguinis filius bogat, bonton filius culpun. Erant enim isti uiri bellicosi, et fortes in animo, quorum cura nulla fuit alia, nisi domino suo subiugare gentes et deuastare regna aliorum. Qui accepta licentia a duce zulta cum exercitu caranthino decreuerunt. Et per forum julij in marchiam lombardie uenerunt, ubi ciuitatem paduam, cedibus et incendiis et gladio et rapinis magnis creduliter deuastauerunt. Ex hinc intrantes lombardiam multa mala facere ceperunt. Quorum uiolentie ac belluyno furori cum terre incole in unum augmen conglebate resistere conarentur tunc innumerabilis multitudo lombardorum per hungaros ictibus sagittarum periit, quam plurimis episcopis et comitibus tricidatis. Tunc lutuardus episcopus uercelensis ecclesie uir nominatissimus amicus ac fidelissimus consiliarius a secreto, hoc audito, assumptis secum opibus atque incoparabilibus thesauris quibus ultra quam estimari potest habundabat. Cum omnibus notis effugere laboraret eorum cruentam ferocitatem, tunc inscius super hungaros incidit, et mox ab eis captus interficitur, et thesaurum esistimationem humanam transcendentem quem secum ferebat rapuerunt. Eodemque tempore stephanus frater Waldonis comitis cum in secessu residens super murum castri in nocturnis aluum purgare uellet, tunc a quodam hungaro per fenestram cubiculi sui sagitte ictu grauiter uulneratur, de quo uuelnere eadem nocte extinguitur.

De deuastatione Lotoringie, alemanie et francie

Deinde lotoringiam et alemanniam deuastauerunt. Francos quoque orientales in confinio franconie et bauarie multis milibus eorum casis, ictibus sagittarum in turpem fugam conuerterunt. Et omnia bona eorum accipientes ad ducem zultam in hungariam reuersi sunt.

 

 

LI. Du Duc Menumorout.

Menumorout ayant entendu dire, qu'Usubu & Velec, nobles guerriers du Duc Arpad, marchaient contre lui à la tête d'une belle armée & précédés par les Sicules, Menumorout, dis-je eut grande peur, & n'osa point s'opposer à eux, car il avait entendu dire que le Duc Arpad & ses guerriers, étaient invincibles à la guerre, qu'ils avaient chassé les Romains de la Pannonie, & qu'ils avaient dévasté les frontières des Carinthiens Moroaniens.

Ainsi donc le Duc Menumorout, laissa ses soldats dans la ville de Byhor & se retira dans la forêt d'Ygson avec sa femme & sa fille. Usubu & Velue, en furent fort contents & marchèrent gaiement contre la ville, & ils campèrent près du fleuve Jouxes, le troisième jour ils formèrent leurs armées & vinrent à la ville de Bellarad. Et alors des soldats de différentes nations commencèrent à s'opposer à eux. Les Sicules & les Hongrois tuèrent beaucoup de monde à coups de flèches. Usubu & Velec tuèrent cent & vingt hommes avec leurs balistes, l'on se bâtit douze jours, & il n'y eut de tués que vingt Hongrois des guerriers d'Usubu, & quinze Sicules. Le treizième jour les Sicules & les Hongrois comblèrent les fossés de la ville & placèrent les échelles, mais les soldats de Menumorout voyant leur audace ouvrirent les portes, sortirent nu-pieds & se prosternèrent devant Usubu & Veiec, & ceux-ci entrèrent dans la ville & y trouvèrent de grandes richesses. Des fuyards vinrent chez Menumorout & lui apprirent cette mauvaise nouvelle. Alors il eut bien grande peur, & envoya vers Usubu & Velec, pour leurs demander la paix, & les prier de faire parvenir au Duc Arpad les envoyés, qu'il avait chargé de dire : « Que ce même Menumorout dont le cœur était naguère enflé d'un orgueil vraiment Bulgarique, qui avait refusé avec arrogance une seule poignée de terre, était prosterné & offrait tout son royaume ainsi que sa fille, si on voulait la marier à Zulta fils du Duc Arpad. »

Usubuu & Velec approuvèrent son dessein & firent partir ses envoyés avec des gens de leur part pour appuyer sa demande. Ceux-ci arrivèrent à l'île de Sepel, & saluèrent le Duc Arpad & le lendemain ils s'acquittèrent des ordres de leur Duc ; le Duc Arpad tint conseil avec ses nobles, & loua & approuva les paroles de Menumorout, & comme il apprit que la fille de ce Duc était du même âge que son fils Zulta, il la prit pour sa belle-fille avec le royaume qui devait lui servir de dot, & tout de suite il envoya vers Usubuu & Vélec, pour leurs dire de lui amener la fille de Menumorout, avec un nombre suffisant d'otages, & de donner à ce prince la ville de Byhor.

LII. De Usubuu & Veluc.

Usubuu & Veluc obéirent aux ordres de leur maître, & célébrèrent les noces de la fille de Menumorout, après quoi ils prirent des otages & rendirent à Menumorout la ville de Byhor. Puis ils revinrent auprès du Duc Arpad, qui vint à leur rencontre avec tous ses nobles, & recevant la fille de Menumorout de la façon qui convenait à une pareille épouse, il la conduisit dans le Palais ducal. Alors il y eut des festins presque tous les jours & l'on y invita les guerriers des royaumes voisins & les jeunes gens s'exerçaient à différents jeux devant le Duc & ses nobles.

Alors le Duc Arpad reçut le serment de ses nobles pour son fils Zulta, & le fit exhausser avec de grands honneurs. Puis le Duc Arpad donna la ville de Bezprem avec ses environs à Usubunec père de Zolocu, & il donna le comitat de Zarand à Veluc. Deux ans après Menumorout mourut sans laisser de fils & laissa son royaume à son gendre Zulta. Enfin le Duc Arpad mourut l'an 907 de Jésus-Christ, & il fut honorablement enterré vers la tête de ce fleuve, qui entre par un canal de pierre dans la ville du Roi Attila, & c'est là qu'après la conversion des Hongrois, l'on a bâti l'église appelée blanche, qui est consacrée à la Sainte Vierge.[33]

LIII. De la succession du duc Zulta

Et son fils Zulta lui succéda, semblable à son père de caractère, mais différent dans l’apparence. En effet le duc Zulta zézayait un peu, il avait la carnation blanche, une chevelure douce et blonde, une taille moyenne ; c’était un duc belliqueux, fort dans son âme, mais clément envers ses sujets ; il avait la voix douce, bien qu’avide de pouvoir; il fut merveilleusement aimé par tous les principaux et les soldats de Hongrie. Quelque temps après, quand le duc Zulta eut treize ans, tous les principaux du royaume, d’un commun accord et avec la même volonté, mirent sous le pouvoir du duc certains des juges du royaume afin que, dirigés par la loi et les us, ils temporisent les querelles et les différends de ceux qui étaient en désaccord. D’autres se nommèrent chefs de l'armée pour dévaster divers royaumes; voici leurs noms: Lelu, fils de Tosu; Bulsun, homme assoiffé de sang, fils de Bogat; Botond, fils de Culpun. C'étaient des hommes belliqueux et forts dans leur âme sans autre préoccupation que de soumettre des peuples pour leur seigneur et de dévaster les royaumes des autres. Avec la permission du duc Zulta, ils luttèrent contre l'armée carinthienne et ils arrivèrent via le Forum de Juillet,[34] à la marche de Lombardie, où ils saccagèrent cruellement la ville de Padoue en massacrant, incendiant, tuant et pillant. Tout de suite, entrant en Lombardie ils commencèrent à semer le malheur. Les habitants de cette terre se réunirent en une seule troupe et tentèrent de résister à leur violence et à leur fureur; alors une multitude innombrable de lombards périt à cause des flèches des Hongrois et de nombreux évêques et comtes furent massacrés. Alors Luitard,[35] évêque de l'église de Verceil, homme très renommé, très cher ami et fidèle conseiller de Charles le Mineur,[36] le précédent empereur, après avoir entendu cela, rassembla ses richesses et ses trésors incomparables qui ne pouvaient être estimés et s’empressa de fuir la férocité sanglante des hongrois ; il tomba sur eux. Tout de suite il fut pris, tué et on s’empara de son trésor qui dépassait l’imagination humaine. A la même époque, Etienne, frère du comte Waldo, se trouvant dans un lieu écarté sur le mur du château pendant une nuit, car il voulait se soulager, fut alors gravement blessé par une flèche hongroise à travers la fenêtre de sa chambre à coucher.[37] Et la même nuit il mourut de cette blessure.

LIV. De la dévastation de la Lotharingie, de l’Alamanie et de la France

Ensuite ils dévastèrent la Lotharingie et l’Alamanie; ils mirent aussi en fuite les Francs de l’est, aux confins de la Franconie et de la Bavière, tuèrent des milliers d'eux à coups de flèche, et, prenant tous leurs biens, ils retournèrent en Hongrie, vers le duc Zulta.

 

De morte lelu et bulsuu

Postea uero anno v. regnante cuonrado imperatore, lelu, bulsu, botond, incliti quondam et glorissimi milites zulte ducis hungarie missi a domino suo, partes alemannie irrupuerunt, et multa bona eorum acceperunt. Sed tandem bauarorum et alemannorum nefandis fraudibus lelu et bulsuu capti sunt, et iuxta fluuium hin in patibulo suspensi occiduntur. Botondu et alij hungarorum milites, qui ex eis residuj fuerant uidentes se malo dolo inimicorum coartatos, audaucter et uiriliter steterunt. Et ab inuicem non sunt alineati, sed alter alteram partem mensuram in periculum praecipue sumpserunt adiuuare et uulneratorum more leonum in media arma fremebundi ruentes in hostes suos grauissima cede prostrauerunt. Et quamuis erant uicti, tamen uictores suos forcius et uictoriosius uicerunt, et grauissima cede prostrauerunt. Felix igitur hungarorum embola, multa periculorum experientia, iam securior et exercitatior de ipsa continua exercitatione preliorum uiribus et potestate prestantior, totam bauariam et alemanniam ac saxoniam, et regnum lathariense igne et gaudio consumpserunt. Et erchargenus atque bartoldum duces eorum decollauerunt. Hinc uero egressi franciam et galliam expugnauerunt, et dum inde uictores reuerterentur, ex insidiis saxonum magna strage perierunt. Qui autem ex ipsis euaserunt, ad propria redierunt. Sed de morte lelu et bulsuu aliorumque suorum militum dux Zulta et sui primates non modicum sunt conturbati, et inimici theotonicorum sunt facti. Tunc dux zulta et sui milites propter illatum iniuriam inimicorum contra eos inspirare ceperunt, et quolibet modo possent eis uincere reddere non tacerent. Sed diuina gratia adiuuante, dux zulta anno dominice incarnationis d. cccc. xxxi. genuit filium quem nominauit Tocsun, pulchris oculis et magnis, capilli nigri et molles, comam habebat ut leo, ut in sequentibus audietis.

De inimicis athonis regis

Eodem anno inimici athonis regis theotonicorum in necem euis de testabili facinore machinabantur. Qui cum per se nichil mali ei facere potuissent, auxilium hungarorum rogare ceperunt. Quia sciebant quod hungarij essent insuportabiles in assuetis bellorum laboribus, et plurimis regni deus per eos furoris sui flagella propinaset. Tunc illi inimici athonis regis theotonicorum miserunt nuncios suos ad zultam ducem uirum bellicosum, et rogauit eum dato auro multo, ut adiutorio hungaro predictum regem athonem inuaderent. Dux uero zulta iracundia ductus, tam proeorum pace et precio, quam etiam pro morte lelu et bulsuu gemebundo pectore misit exercitum magnum contra athonem regem teothonicorum. Quibus principes et ductores fecit Botundium filium culpun et zobolsum filium eleud, nec non ircundium filium eusee. Qui cum egressi essent a duce zulta, rursum bauariam, alemanniam et saxoniam atque turingiam in gladio percusserunt. Et exinde egressi in quadragessima transierunt renum fluuium, et regnum latariensem in arcu et sagittis exterminauerunt. Vniuersam quoque galliam attrociter affligentes, ecclesias dei crudeliter intrantes spoliauerunt. Inde per abrupta senonensium per populos alimonos ferre sibi uiam et gladio apperuerunt. Superatis ergo illis bellicosissimis gentibus et naturali situ locorum tutissimis, montes senonum transcederunt et segusam ceperunt ciuitatem. Deinde egressi taurinam ciuitatem opulentissimam expugnauerunt. Et postquam planam regionem lambardie aspexerunt, totam pene italiam bonis omnibus affluentem et exuberantem conscitatis cursibus spoliauerunt. Deinde uero botond filius culpun et urcun filius eusee superatis omnibus gentibus prememoratis, felici uictoria fruentes ad propria regna reuertuntur. Tunc hoto rex teuthonicorum posuit insidias iuxta renum fluuium, et cum omni robore regni sui eos inuadens: multos ex eis interfecit. Botond et vrcun ac reliqui exercitum, magis uolentes mori in bello quam apropriatam sibi uictoriam amitterent. Tunc hostibus pertinaciter insistunt, et in eodem bello quendam magnum ducem uirum nominatissimum interficiunt. Et alios grauiter uulneratos in fugam conuertunt, quorum spolia diripiunt. Et exinde ad propria reeunt regna cum magna uictoria. Et cum Bohond et vrcun in terram pannonie leti reuerterentur, tunc Bothond longo labore belli fatigatus, miro modo infirmari cepit, ex luce migrauit, et sepultus est prope fluuium uereucea. Sed istud notum sit omnibus scire uolentibus quod milites hungarorum hec et alia huiusmodi bella usque ad tempora tucsun ducis gesserunt.

De constitucione regni

Dvx uero zulta post reursionem militum suorum fixit metas regni hungarie ex parte grecorum usque ad portam Wacil, et usque ad terram racy. Ab occidente usque ad mare, ubi est spaletina ciuitas. Et ex parte theotonicorum usque ad pontem guncil, et in eisdem partibus dedit castrum construere ruthenis qui cum almo duce auo suo in pannoniam uenerant. Et in eodem confinio ultra lutum musun collocauit etiam bissenos non paucos habitare pro defensione regni sui ut ne aliquando in posterum furibundi theotonici propter iniuriam sibi illatum, fines hungarorum deuastare possent. Ex parte uero boemorum fixit metas usque ad fluuium moroa, sub tali condicione ut dux eorum annuatim tributa persolueret duci hungarie. Et eodem modo ex parte polonorum usque ad montem turtur, sicut primo feceret regni metam borsu filius bunger. Et dum multa et sui milites ita radicati essent unque hungarij, tunc dux zulta duxit filio tocsun de uxorem de terra cumanorum. Et ipso uiuente accepit iuramenta suorum nobilium, et filium suum tocsun fecit ducem ac dominatorem super totum regnum hunarie. Et ipse dux zulta iii°, anno regni sui filij de ergastulo corporis uiam uniuerse carnis egressus est. Thocsun uero dux cum omnibus primatibus hungarie potenter et pacifice per omnes dies uite sue obtinuit omnia iura regni suj. Et audita pietate ipsius, multi hospites confluebant ad eum ex diuersis nationibus. Nam de terra bular uenerunt quidam nobilissimi domini cum magna multitudine hismahelitarum quorum nomina fuerunt: Billa et Bocsu. Quibus dux per diuersa loca hungarorum condonauit terras, et insuper castrum quod dicitur pest, in perpetuum concessit. Bylla uero et frater euis Bocsu a quorum progenie ethey descendit, inito consilio de populo secum ducto duas partes ad seruicium predicti castri concesserunt. Terciam uero partem suis posteris dimiserunt. Et eodem tempore de eadem regione uenit quidam nobilissimus miles nomine Heten, cui etiam dux terras et alias possessiones non modicas condonauit. Dux uero thocsun genuit filium nomine geysam quintum ducem hungarie. Et in eodem termpore de terra byssenorum uenit quidam miles de ducali progenie, cuius nomen fuit thonuzoba pater vrcund a quo descendit genus thomoy. Cui dux thocsun dedit terram habitandi in partibus Kemey usque ad tysciam, ubi nunc est portus obad . Sed iste thonuzoba uixit usque ad tempora sancti regis stephani nepotis ducis thocsun. Et dum beatus rex stephanus uerba uite predicaret et hungaros baptizaret, tunc thonuzoba in fide uanus noluit esse christianus. Sed cum uxore uiuos ad portum obad est sepultus, ut ne baptizando ipse et uxor sua uiuerent cum christo in eternum; sed vrcun filius suus christjanus factus uiuit cum christo in perpetuus.

 

LV. De la mort de Lelu et de Bulsuu

Mais la cinquième année du règne de l'empereur Conrad,[38] Lelu, Bulsuu et Botond, soldats très glorieux et illustres de Zulta, duc de Hongrie, envoyés par leur seigneur, firent irruption dans des parties d'Alamanie. Mais finalement Lelu et Bulsuu furent capturés par les ruses ignobles des Bavarois et des Allemands, et ils moururent pendus à un échafaud a côté de la rivière Inn ; Botond et d'autres soldats hongrois qui survécurent, se voyant eux-mêmes cernés par la ruse de l'ennemi, résistèrent avec audace et courage. Et ils ne se séparèrent pas les uns des autres, mais essayèrent d'arriver de toute façon à aider ceux qui étaient restées en danger; comme des lions blessés qui se jettent rugissants contre leurs ennemis et ils accomplirent un terrible massacre. Bien que vaincus ils surpassèrent leurs ennemis en bravoure et en courage par un terrible massacre. Heureux, donc, la fortune des hongrois, avec une plus grande expérience des dangers, plus exercés dans l'entraînement continu des batailles et dotés d’excellents et puissants hommes: ils mirent à un feu et à sang toute la Bavière, l’Alamanie, la Saxe et le royaume Lorrain[39] et ils décapitèrent leurs chefs Erchanger et Bertold.[40] Venant de là et ils attaquèrent la France et la Gaule et, s’en revenant vainqueurs, ils périrent et furent massacrés dans les embûches des Saxons. Ceux qui réussirent à s’échapper, revinrent sur leurs propres terres. Mais le duc Zulta et ses principaux furent très affligés par la mort de Lelu, Bulsuu et de ses autres soldats, et ils devinrent des ennemis des Teutons. Alors, le duc Zulta et ses soldats cherchèrent une vengeance contre leurs ennemis et demandèrent qu'on n’arrêtât pas de les punir. Mais, avec la grâce divine, l'année de l'Incarnation du Seigneur 931, un fils lui naquit, appelé Tocsun ; il était beau avec de grands yeux, des cheveux noirs et la chevelure d’un lion comme vous pourrez le voir dans ce qui suit.

LVI. Des ennemis du roi Otton

La même année les ennemis d’Otton,[41] empereur des Germains, complotèrent sa mort dans un crime odieux. Comme ils ne purent y arriver eux-mêmes, ils commencé à demander l'aide des Hongrois, parce qu'ils savaient que les hongrois étaient insurpassables dans les travaux habitués de la guerre et le Dieu à travers de ceux-ci avait administré à beaucoup de royaumes les fouets de sa colère. Alors ces ennemis d'Otton, roi des teutoniques, envoyèrent des messagers au duc Zulta, homme belliqueux, et, après lui avoir donné beaucoup d'or, lui demandèrent s’il pouvait attaquer avec l’aide des Hongrois, le roi précité Otton. Le duc Zulta, conduit par la colère, tant pour leur bonne volonté et l'or que pour le chagrin de la mort de Lelu et de Bulsuu, envoya une grande armée contre Otton, roi des teutoniques. Il nomma principaux et généraux Botond, fils de Culpun, et Zobolsu, fils d'Eleud, et aussi Urcund, fils d'Eusée. Ils quittèrent la présence du duc Zulta et à nouveau portèrent le glaive en Bavière, Alamanie, Saxe et Thuringe; et de là en quarante jours ils traversèrent le Rhin et ils exterminèrent le Royaume Lorrain avec arcs et flèches. Ils affligèrent atrocement aussi toute la Gaule et, entrant cruellement dans les églises de Dieu, les pillèrent. De là ils portèrent le glaive et le fer vers les lieux abrupts de Sénones[42] et un chemin fut ouvert par le fer entre les peuples Aliminos.[43] Ayant soumis ces peuples très belliqueux, qui étaient très protégés par la situation naturelle des lieux, ils traversèrent les montagnes des Sénones et prirent la ville de Segusa.[44] Continuant immédiatement, ils dévastèrent la riche ville de Turin; après avoir vu la plate région de Lombardie et toute Italie pleine et abondante de toutes sortes de biens, ils la dévastèrent par des incursions rapides. Mais alors Botond, fils de Culpun, et Urcund, fils d'Eusée, ayant vaincu tous les peuples mentionnés, jouissaient d'une victoire heureuse et revenaient vers leurs propres royaumes. A cette époque Otton, roi des teutoniques, leur tendit un piège à côté du Rhin et, en les attaquant avec toute les forces de son royaume, il tua plusieurs d'eux. Botond, Urcund et les autres de l'armée préférant mourir au combat plutôt que perdre une victoire proche, attaquèrent alors férocement leurs ennemis etau cours de ce combat, tuèrent un certain duc important, homme très renommé, et ils les mirent en fuite avec des blessés graves, les pillèrent, et tout de suite revinrent victorieux vers leur royaume. Botond et Urcund revenaient joyeux vres la terre de Pannonie, mais Botond, fatigué de long effort de guerre, commença curieusement à s'affaiblir et quitta ce monde ; il fut enseveli a côté de la rivière Uereucea. Mais ceux qui veulent savoir doivent noter que les soldats hongrois firent ces guerres et d'autres jusqu'aux temps du duc Tocsun.

LVII. De la constitution du royaume

En vérité, après le retour de ses soldats, le duc Zulta fixa les limites du royaume de Hongrie : du côté des grecs, jusqu'à la porte de Wacil[45] et jusqu'à la terre de Raç. A l'occident, jusqu'à la mer où est la ville de Spalao; et du côté des teutoniques, jusqu'au pont Guncil, et au même endroit Zulta donna aux Ruthènes, qui étaient venus en Pannonie avec son grand-père, le duc Almos un château à construire; et dans les mêmes confins, au-delà de la boue de Musun, il rassembla aussi un grand nombre de Petchénègues pour habiter là et défendre son royaume, de manière qu’à l'avenir les teutoniques, furieux des préjudices causés, ne pussent pas dévaster les frontières hongroises. Du côté des Bohémiens il fixa la limite à la rivière Morova, à condition que leur duc payât annuellement un tribut au duc de Hongrie. Et de la même façon, du côté polonais, il établit la limite à la montagne Turtur, ainsi qu'avant Borsu, fils de Bunger, en avait fixé la frontière. Et quand le duc Zulta et ses soldats hongrois se furent enracinés partout, il amena alors à son fils Tocsun une épouse de la terre des Coumans, et encore en vie, il reçut le serment de ses nobles et nomma son fils duc de tout le royaume de Hongrie. Et, durant la troisième année du règne de son fils, le duc Zulta quitta la prison de son corps et laissa le souffle de toute chair. Le duc Tocsun avec tous les principaux de l'Hongrie maintint énergiquement et pacifiquement, pendant toute sa vie, toutes les lois de son royaume et, après avoir entendu parler de sa piétié, beaucoup d'hôtes venaient le voir depuis de diverses nations. Et de la terre de Bular vinrent certains très nobles seigneurs avec une grande multitude d'Ismaélites,[46] dont les noms étaient Billa et Bocsu; le duc leur accorda, dans divers endroits de la Hongrie, des terres et de plus à perpétuité un château qui s'appelle Pest. Billa et son frère Bocsu, desquels descend Ethey, ayant pris conseil du peuple qu'ils conduisaient, assignèrent deux tiers au service de cette force et laissèrent l'autre tiers à leurs descendants. Et à cette époque, de la même région, vint un certain très noble guerrier du nom de Heten, à qui le duc attribua des terres et d'autres possessions. Le duc Tocsun engendra un fils du nom de Géza, cinquième duc de Hongrie. Et à cette même époque, depuis la terre des Petchénègues, vint un certain soldat de descendance ducale, dont le nom était Thonuzoba, père d'Urcund, dont descend le lignage des Thomoy. Le duc Tocsun leur attribua une terre pour habiter dans les districts de Kemey, jusqu'à la Tisza, où se trouve maintenant le port d'Obad. Ce Thonuzoba vécut jusqu'aux temps du roi saint Etienne, petit-fils du duc Tocsun. Et tandis que le bienheureux roi Etienne prêchait les paroles de la vie et baptisait les Hongrois, Thonuzoba de l'époque, revêche à la foi, refusa d’être chrétien et fut enterré vif avec son épouse au port d'Obad, afin que son épouse et lui ne vécussent pas, grâce au baptême, avec le Christ dans l’Eternité. Mais son fils Urcund, ayant été fait chrétien, vit dans le Christ pour l’Eternité.

 

 

[1] Béla III Árpád (né en 1148 ou 1149 et mort le 24 avril 1196) fut roi de Hongrie du 1er mars 1172 au 24 avril 1196. Tous les historiens ne sont cependant pas d’accord sur le roi Bela concerné.

[2] « Cette œuvre constitue l’un des textes les plus anciens de l’historiographie hongroise conservée jusqu’à nos jours. Sa valeur réside dans ses références à l’histoire de l’époque et dans la notation des légendes d’origine de la dynastie des Árpád. » Cf. Csernus & Korompay, Les Hongrois et l’Europe. Conquête et intégration, Publ. de l’Institut hongrois de Paris, 1999, p. 377.

[3] Auteur prétendu de l’Histoire de la ruine de Troie.

[4] Les sept chefs des sept nations appelés les Hetumoger (7 Magyars), qui choisirent la Pannonie, qui fut la terre d’Attila, ancêtre d’Almos, père d’Árpád. Cf. Légende de Touroul le Faucon. Touroul est le plus important oiseau mythologique du mythe originel des Magyars (Hongrois). C’est un messager de Dieu, dans la mythologie hongroise, assis au sommet de l'arbre de vie avec les autres esprits d’enfants à naître sous forme d'oiseaux. C’est probablement un grand faucon. Le touroul aurait indiqué à Almos le chemin à suivre pour acquérir une nouvelle terre; aujourd'hui la Hongrie.

 

 

 


 

[1] La traduction et les notes jusqu’au ch. LII inclus sont celles du comte Jean Potocki, né à Pikow (Pologne) le 8 mars 1761 et mort à Uładówka (Ukraine actuelle) le 2 décembre 1815, est un savant et écrivain polonais de langue française.

Les notes sont sans doute dépassées compte tenu de l’âge du texte, 1796. Le lecteur constatera des différences dans l’écriture de mêmes noms de lieux et de personnes ; c’est le texte original.

[2] La ville de Ungvar existe encore, & il est question des Ungvares comme d'un peuple Slave, dans le géographe de la bibliothèque de Bavière cité par de Buat.

[3] Le duché de Susdal, existait déjà du temps de notre auteur, qui donne aux différents pays les noms qu'ils portaient de son temps, mais au temps d'Almus le pays de Sufdal était occupé par la race Lachite de Watko, frère de Radym, ainsi qu'on l’a vu dans Nestor, & que je l'ai prouvé dans mes Essais sur la Sarmatie. Quand à l'époque du départ des Hongrois, fixée par les chroniques Hongroises a l’année 884, elle est très conforme à Nestor, qui dit qu'ils cassèrent à Kiev en l'année 888 & également conforme à Godefroy de Viterbe, qui dit qu'ils parurent en Europe en l'année 986.

Souzdal est le berceau de l'État russe car ses princes, devenus princes de Vladimir puis de Moscou allaient être les rassembleurs « de toutes les Russies » avant de prendre le titre de tsar.

[4] L'on sent bien que la citation de Darius & de Cyrus, interpellée dans sa sauvage harangue d’Almus, est une érudition de l’auteur & digne du siècle dans lequel il écrivait, mais il y a une remarque plus importante à faire sur ce chapitre. L'auteur dit que les Habitants de Kiev se rappelaient d'avoir payé tribut à Attila, & cette tradition, prouve en faveur de l'antiquité de cette ville & vient merveilleusement à l'appui de cette autre tradition qui disait que Kij fondateur de Kiow avait été à la cour de Constantin.

[5] Ce sarcasme sur la cour de Rome doit surprendre, si l'on fait attention au siècle où il a été écrit. Au reste ces pâtres Romains, joints aux légions émigrées pour cause de religion sur la fin du huitième siècle, doivent être regardés comme les véritables ancêtres des Valaches & des Moldaves d'aujourd’hui & les Blaques de notre auteur, existent encore sous le nom de Wlachs, & habitent dans les montagnes qui sont entre la Transylvanie & la Hongrie, & dans d'autres endroits.

[6] Il y a en Hongrie deux provinces qui s'appellent grande & petite Coumanie, et lorsque j'y passais en 1783, des vieillards me dirent qu'ils en avaient connu d'autres dans leur jeunesse qui se rappelaient encore d'avoir su & parlé la langue Cumanienne & cela n'est pas surprenant par la raison que cette première colonie Cumanienne, a été dans la suite rafraîchie par de nouvelles & très nombreuses, immigrations & entre autres lors de la grande invasion des tartares sous Batou khan. J'ai déjà dit que les Coumans sont les mêmes que les Kiptchats, & les Polowzes, dont la capitale était Saratov.

[7] Ce chapitre demande quelques éclaircissements ; d'abord les habitants, de Ledomer sont les anciens Dulebiens, qui furent ensuite appelés Luczaniens, de leur capitale Luck, & enfin Wlodzimierzanie de leur féconde capitale Wlodzimirz on Wolodimir, dont on a fait ensuite Lodomer, nom que l'Anonyme a adopté, vu qu'il conservait à chaque peuple le nom qu'on lui donnait de son temps. Les Lodomeriens sont aussi le même peuple que les Lenzeniniens de Constantin Porphyrogénète.

Galicia est certainement Halicz, & c'est la première fois que le nom de cette ville paraît dans l'histoire, mais on ne connait pas son origine & nous savons d'ailleurs que les sources du Dniester sont un des pays où les Slaves étaient autochtones.

J'en viens à présent aux Duchés de Tytul 8t de Byhor, gouvernas alors par Salanus & Menumorout & fondés par les aïeux de ceux-ci, ce qui nous mène non à la mort d'Attila, mais à la destruction des Avars par Charles Magne. Or donc nous voyons que les Avares ayants été dispersés & détruits, & les allemands ayant négligé leur conquête, les Bulgares s'en emparèrent. Reanus le grand paraît avoir été un Chef des Bulgares, mais il n'a surement pas été Grand Duc de Bulgarie, ainsi qu'on pourrait l'inférer du texte de l'Anonyme. Quant à Morout Duc des Cozars dans le duché de Byhor, Thurocz dit : qu'il était Polonais. Pour ce qui est de Gaad de Bundyn c'est très probablement le Chef des Timotiens, dont il est question dans les annales de Charlemagne & dont je parlerai aussi en son lieu.

[8] Aujourd’hui Tarzal.

[9] Ce terme tiré de l’ancienne religion des Hongrois s’est conservé dans la nouvelle. Aldomas dans la langue veut dire bénédiction, consécration, sacrifice, immolation & il a un grand nombre de dérivés.

[10] Peut-être Opar ou Obra.

[11] Je ne trouve rien de semblable dans le dictionnaire Hongrois, au contraire je vois que Amabilis se dit Kellemes, Kedoes.

[12] Peut-être Zalas dans le comitat de Zatmar.

[13] Ceci peut vouloir dire cour peinte, mais il faut convenir que ta langue a éprouvé de grands changements.

[14] Petit en Hongrois se dit Kitsiny, Kis. Borsod est peut être le Bartzan d’aujourd’hui.

[15] Aujourd’hui Bihar.

[16] Quand aux portes Mezesines, il paraît que c'était un passage à travers le grand marais, qui va du petit au grand Warsadin, probablement, à rendrait appelé aujourd’hui Mozi.

[17] Joculatores.

[18] Les Picenates sont les Patzinaces, qui effectivement pouvaient déjà molester la Transylvanie puisque Constantin Porphyrogénète fixe leur migration à cinquante, ou cinquante cinq ans, avant l'année 949 où il écrivait lui-même. Quant aux Coumans, qui sont les Kipczats de Saratov, je ne sache pas qu’ils aient eu alors aucun établissement dans ces contrées-là, mais ils pouvaient y venir de leur pays, ces forces de courses n'offrant aucune difficulté au peuple tartare.

Les deux vers latins cités par notre auteur méritent quelque attention, ils semblent prouver que les Joculatores Hongrois, se servaient de cette langue pour raconter ou plutôt chanter leurs romances historiques : & j'ai vu moi-même en Esclavonie de ces romanciers qui s’accompagnaient d’un instrument à deux cordes, la même sans doute que Strykowski appelle Serbska Skrzypica.

[19] Aujourd’hui Zagyva.

[20] Foliatum en Hongrois se dit Falevel holtsinat kenet, ainsi l'étymologie est encore ici en défaut.

[21] Ce Roi est appelé dans l'histoire Aba, & non pas Oba, mais ni Aba ni Oba ne sont plus aujourd'hui des mots Hongrois. Pieux dans cette langue se dit Isztenfélo, Jambor, Isztenes. Tout cela prouve que la langue a dévié de son origine & changé même depuis le règne des Bela, qui étaient les temps de notre auteur, & voilà ce qui fait que les Hongrois ne comprennent plus les Baszkirs & les Metcheriaks, au lien qu'ils les comprenaient dans le treizième siècle, au temps des ambassades de Plan Carpin, & de Rubruquis.

[22] Le seul anachronisme que l'on puisse reprocher à notre auteur, et où il paraît même se complaire, est de dater toutes choses de la mort d'Attila. Mais les historiens Allemands, Bohêmes & Grecs, s'accordent à nous prouver que le pays qui est entre le Gran & la Moravie, faisait partie de la Grande Moravie, & qu'il ne tomba au pouvoir des Bohèmes, qu'à la mort ou à la disparition de Swatopolug & c'est alors qu'ils en firent la conquête, aidé des allemands.

[23] Les arcs des Hongrois étaient probablement faits de corne, comme sont ceux de toutes les nations Scythiques, & pouvaient lancer des flèches plus pesantes, & mieux armées, que celles des Sclaves dont les arcs étaient de bois.

[24] Belgrade.

[25] Szeri en Hongrois veut dire ordre.

[26] Aujourd’hui Czongrad.

[27] Aujourd’hui Titul.

[28] Les Hongrois n'entreprirent aucune expédition contre Constantinople avant l'année 934, ainsi l'auteur a bien fait de ne pas croire à celle des trois capitaines, qui ont pu aller jusques dans la Croatie maritime, mais n'ont probablement pas pris Spalatro, car nous voyons que cette ville, fut encore longtemps libre & payant tribut aux Slaves.

[29] Je prouverai dans le livre suivant que les Soba Moger de l'anonyme, sont les Sobartoi-asphaloi de Constantin Porphyrogénète, & que Zuard est le même que Lebedias. Constantin dit que les Patzinaces chassèrent les Turcs de la Lebedie cinquante ans avant l'année 949, qui était celle où il écrivait. Il dit de plus que les mêmes Turcs Sobartoasphales y avaient demeuré trois ans, ce qui nous conduit à l'année 896, & l'année 895 est celle, où les annales de Fulda placent l'expédition des Hongrois en Bulgarie.

Cadusa frère de Zuard est le Cusan de Léon Grammairien. Et certainement l'anonyme a eu tort de confondre cette expédition de l'année 895 & de la placer dans le cours des conquêtes en Hongrie, qui de son aveu n'ont commencé que l'an 903, époque qui coïncide parfaitement avec tout le reste des notions chronologiques.

[30] Zecuseu aujourd’hui Zegzard. Szek veut dire siège.

[31] Ici l'étymologie est encore en défaut, la crainte se dit en Hongrois Feletem. Je crains Felek.

[32] Les soldats Romains qui habitaient Bezprem semblent avoir formé une garnison destinée à protéger les pâtres romains, dont il est plus d'une fois question dans cet ouvrage, tout cela tenait encore aux villes Romaines de la Dalmatie, & l'on en trouve des traces dans le prêtre de Dioclée.

Les Carinthiens Morvaniens étaient ceux de Cozel fils de Pribina.

[33] La traduction du comte Potocki s’arrête là.

[34] Forum Iulii, où se trouve aujourd'hui Cividale, au nord de l'Italie ; c’était une grande ville et la capitale de ce qu'on appelle aujourd'hui le Frioul.

[35] Archichancelier de l’empire carolingien à partir de 878 puis évêque de Verceil en 880.

[36] Charles III dit le Gros (839 -† 13 janvier 888 à Neudingen), inhumé au monastère de Reichenau situé sur une île du lac de Constance. Il est roi de Francie orientale de 876 à 887, roi d'Italie de 879 à 887, empereur d'Occident de 881 à 888 et régent de Francie occidentale de 885 à 887.

[37] Histoire confuse et peu crédible.

[38] Conrad Ier (?-918), roi de Germanie (911-918), duc de Franconie, petit-fils du dernier empereur carolingien, Arnoul.

[39] En latin, regnum lathariense.

[40] Les comtes Erchanger et Berthold appartenaient à une famille extrêmement ancienne, celle des Alaholfinger, implantée dans la région du Neckar supérieur et ayant conservé de ses illustres origines agilolfingiennes, outre des positions de pouvoir considérables, une conscience aigue de son identité et de sa noblesse. Berthold, le père des deux comtes, jouissait d’une position éminente à la cour sous Charles III le Gros, avec le titre de comte palatin. Il était apparenté par son épouse à l’impératrice Richarde qui appartenait à la famille alsacienne des Erchanger.

[41] Othon Ier le Grand. Le 10 août 955, Otton Ier écrasera les Hongrois au Lechfeld, au sud de l'actuelle ville d'Augsbourg, en Bavière, sur l'un des principaux champs de bataille européens. Cette victoire mettra définitivement fin à la menace hongroise en Europe.

[42] Sens ?

[43] Personne ne semble savoir de quel population il s’agit.

[44] Aujourd’hui Susa en Italie du nord.

[45] Voir le ch. XLV.

[46] Arabes et islamiques.