Strabon

STRABON

GEOGRAPHIE.

LIVRE ONZE CHAPITRE III : L'IBERIE

Traduction française : Amédée TARDIEU

LIVRE ONZE CHAPITRE II - LIVRE ONZE CHAPITRE IV

 

 

 

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Géographie 

 

ΣΤΡΑΒΟΝΟΣ ΓΕΩΓΡΑΦΙΚΩΝ IA' 

 

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III. Καὶ δὴ ἥ γε Ἰβηρία κατοικεῖται καλῶς τὸ πλέον πόλεσί τε καὶ ἐποικίοις, ὥστε καὶ κεραμωτὰς εἶναι στέγας καὶ ἀρχιτεκτονικὴν τὴν τῶν οἰκήσεων κατασκευὴν καὶ ἀγορὰς καὶ τἆλλα κοινά.

[2] Τῆς δὲ χώρας τὰ μὲν κύκλῳ τοῖς Καυκασίοις ὄρεσι περιέχεται· προπεπτώκασι γάρ, ὡς εἶπον, ἀγκῶνες ἐπὶ τὴν μεσημβρίαν εὔκαρποι, περιλαμβάνοντες τὴν σύμπασαν Ἰβηρίαν καὶ συνάπτοντες πρός τε τὴν Ἀρμενίαν καὶ τὴν Κολχίδα· ἐν μέσῳ δ' ἐστὶ πεδίον ποταμοῖς διάρρυτον, μεγίστῳ δὲ τῷ Κύρῳ, ὃς τὴν ἀρχὴν ἔχων ἀπὸ τῆς Ἀρμενίας, εἰσβαλὼν εὐθὺς εἰς τὸ πεδίον τὸ λεχθέν, παραλαβὼν καὶ τὸν Ἄραγον ἐκ τοῦ Καυκάσου ῥέοντα καὶ ἄλλα ὕδατα διὰ στενῆς ποταμίας εἰς τὴν Ἀλβανίαν ἐκπίπτει· μεταξὺ δὲ ταύτης τε καὶ τῆς Ἀρμενίας ἐνεχθεὶς πολὺς διὰ πεδίων εὐβοτουμένων σφόδρα, δεξάμενος καὶ [ἄλλους] πλείους ποταμούς, ὧν ἐστιν ὅ τε Ἀλαζόνιος καὶ ὁ Σανδοβάνης καὶ ὁ Ῥοιτάκης καὶ Χάνης πλωτοὶ πάντες εἰς τὴν Κασπίαν ἐμβάλλει θάλατταν. Ἐκαλεῖτο δὲ πρότερον Κόρος.

[3] Τὸ μὲν οὖν πεδίον τῶν Ἰβήρων οἱ γεωργικώτεροι καὶ πρὸς εἰρήνην νενευκότες οἰκοῦσιν ἀρμενιστί τε καὶ μηδιστὶ ἐσκευασμένοι, τὴν δ' ὀρεινὴν οἱ πλείους καὶ μάχιμοι κατέχουσι Σκυθῶν δίκην ζῶντες καὶ Σαρματῶν, ὧνπερ καὶ ὅμοροι καὶ συγγενεῖς εἰσιν· ἅπτονται δ' ὅμως καὶ γεωργίας, πολλάς τε μυριάδας συνάγουσιν καὶ ἐξ ἑαυτῶν καὶ ἐξ ἐκείνων, ἐπειδάν τι συμπέσῃ θορυβῶδες.

[4] Τέτταρες δ' εἰσὶν εἰς τὴν χώραν εἰσβολαί· μία μὲν διὰ Σαραπανῶν φρουρίου Κολχικοῦ καὶ τῶν κατ' αὐτὸ στενῶν, δι' ὧν ὁ Φᾶσις γεφύραις ἑκατὸν καὶ εἴκοσι περατὸς γινόμενος διὰ τὴν σκολιότητα καταρρεῖ τραχὺς καὶ βίαιος εἰς τὴν Κολχίδα, πολλοῖς χειμάρροις κατὰ τὰς ἐπομβρίας ἐκχαραδρουμένων τῶν τόπων. Γεννᾶται δ' ἐκ τῶν ὑπερκειμένων ὀρῶν πολλαῖς συμπληρούμενος πηγαῖς, ἐν δὲ τοῖς πεδίοις καὶ ἄλλους προσλαμβάνει ποταμούς, ὧν ἐστιν ὅ τε Γλαῦκος καὶ ὁ Ἵππος· πληρωθεὶς δὲ καὶ γενόμενος πλωτὸς ἐξίησιν εἰς τὸν Πόντον καὶ ἔχει πόλιν ὁμώνυμον ἐφ' αὑτῷ καὶ λίμνην πλησίον. Ἡ μὲν οὖν ἐκ τῆς Κολχίδος εἰς τὴν Ἰβηρίαν ἐμβολὴ τοιαύτη, πέτραις καὶ ἐρύμασι καὶ ποταμοῖς χαραδρώδεσι διακεκλεισμένη.

[5] Ἐκ δὲ τῶν πρὸς ἄρκτον νομάδων ἐπὶ τρεῖς ἡμέρας ἀνάβασις χαλεπή, καὶ μετὰ ταύτην ποταμία στενὴ ἐπὶ τοῦ Ἀράγου ποταμοῦ τεττάρων ἡμερῶν ὁδὸν ἔχουσα ἐφ' ἕνα, φρουρεῖ δὲ τὸ πέρας τῆς ὁδοῦ τεῖχος δύσμαχον· ἀπὸ δὲ τῆς Ἀλβανίας διὰ πέτρας πρῶτον λατομητὴ εἴσοδος, εἶτα διὰ τέλματος ὃ ποιεῖ ὁ ποταμὸς [Ἀλαζόνιος] ἐκ τοῦ Καυκάσου καταπίπτων. Ἀπὸ δὲ τῆς Ἀρμενίας τὰ ἐπὶ τῷ Κύρῳ στενὰ καὶ τὰ ἐπὶ τῷ Ἀράγῳ· πρὶν γὰρ εἰς ἀλλήλους συμπεσεῖν, ἔχουσιν ἐπικειμένας πόλεις ἐρυμνὰς ἐπὶ πέτραις διεχούσαις ἀλλήλων ὅσον ἑκκαίδεκα σταδίους, ἐπὶ μὲν τῷ Κύρῳ τὴν Ἁρμοζικὴν ἐπὶ δὲ θατέρῳ Σευσάμορα. Ταύταις δὲ ἐχρήσατο ταῖς εἰσβολαῖς πρότερον Πομπήιος ἐκ τῶν Ἀρμενίων ὁρμηθείς, καὶ μετὰ ταῦτα Κανίδιος.

[6] Τέτταρα δὲ καὶ γένη τῶν ἀνθρώπων οἰκεῖ τὴν χώραν· ἓν μὲν καὶ πρῶτον ἐξ οὗ τοὺς βασιλέας καθιστᾶσι κατ' ἀγχιστείαν τε καὶ ἡλικίαν τὸν πρεσβύτατον, ὁ δὲ δεύτερος δικαιοδοτεῖ καὶ στρατηλατεῖ. Δεύτερον δὲ τὸ τῶν ἱερέων οἳ ἐπιμελοῦνται καὶ τῶν πρὸς τοὺς ὁμόρους δικαίων. Τρίτον δὲ τὸ τῶν στρατευομένων καὶ γεωργούντων. Τέταρτον δὲ τὸ τῶν λαῶν, οἳ βασιλικοὶ δοῦλοί εἰσι καὶ πάντα διακονοῦνται τὰ πρὸς τὸν βίον. Κοιναὶ δ' εἰσὶν αὐτοῖς αἱ κτήσεις κατὰ συγγένειαν, ἄρχει δὲ καὶ ταμιεύει ἑκάστην ὁ πρεσβύτατος. Τοιοῦτοι μὲν οἱ Ἴβηρες καὶ ἡ χώρα αὐτῶν.

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XI, 3 - L'Ibérie

1. L'Ibérie, en particulier, nous offre l'aspect d'un pays singulièrement riche et populeux à en juger par le nombre de ses villes et de ses villages, par l'emploi qu'on y a fait de la tuile dans les toitures, par l'ordonnance architectonique des habitations et enfin par l'existence d'agoras et d'emplacements affectés aux autres services publics.

2. Quelques-uns des cantons de l'Ibérie sont comme enveloppés par le Caucase. Il se détache en effet, nous l'avons déjà dit, de la chaîne principale du Caucase, et dans la direction du midi, un certain nombre de contreforts aux pentes verdoyantes et cultivées qui rejoignent les monts d'Arménie et de Colchide, formant ainsi une sorte de ceinture tout autour de l'Ibérie. Au centre du pays est une vaste plaine arrosée par plusieurs cours d'eau, dont le plus considérable est le Cyrus. Ce fleuve, qui prend sa source en Arménie, pénètre presque aussitôt dans la plaine dont nous venons de parler, y reçoit l'Aragus lequel descend du Caucase même, et, avec l'Aragus, quelques [autres cours] d'eau, puis entre par une étroite vallée dans l'Albanie, sert ensuite de limite commune à cette contrée et à l'Arménie, et, après avoir largement arrosé de riches prairies couvertes de bestiaux, après s'être grossi encore de plusieurs cours d'eau, tels que l'Alazonius, le Sandobanès, le Rhoetacès et le Chanès, toutes rivières navigables, va se jeter dans la mer Caspienne. Il s'appelait primitivement le Corus.

3. La plaine est habitée par la partie de la population ibère qui s'est vouée plus spécialement à l'agriculture et dont les goûts sont plus pacifiques. Ces Ibères de la plaine ont adopté dès longtemps le costume et les moeurs des Arméniens et des Mèdes ; mais le plus grand nombre (et ce sont en même temps les plus belliqueux de la nation) habitent de préférence la montagne. Ils y vivent à la façon des Scythes et des Sarmates (dont ils sont du reste les voisins et jusqu'à un certain point les frères) sans renoncer pour cela tout à fait aux travaux agricoles, et peuvent mettre sur pied, au premier tumulte ou bruit de guerre, plusieurs myriades de soldats levés tant parmi eux que parmi les Ibères de la plaine.

4. Quatre passages seulement donnent accès en Ibérie : le premier est celui que commande la forteresse colchidienne de Sarapanes, et qui n'est autre que le défilé par où se précipitent en Colchide les eaux du Phase, qui d'abord lent et sinueux, comme l'indiquent les cent vingt ponts sur lesquels il faut le passer et repasser, devient justement en cet endroit impétueux et rapide, tout le pays étant là pro-fondément raviné par les nombreux torrents qui le sillonnent dans la saison des pluies. On sait que le Phase prend naissance dans les montagnes situées au-dessus de la Colchide et qu'il s'y grossit déjà des eaux de nombreuses sources ; qu'une fois dans la plaine il reçoit encore d'autres affluents, parmi lesquels on distingue le Glaucus et l'Hippus, et qu'ainsi accru et rendu navigable il va se jeter dans le Pont au-dessous d'une ville appelée elle-même Phasis, et près d'un grand lac ou étang. Tel est le premier pas-sage qui donne accès en Ibérie ; il part de la Colchide, comme on voit, et se trouve obstrué partout de rochers, de places fortes et de cours d'eau profondément encaissés.

5. Si, maintenant, l'on vient du nord, c'est-à-dire du pays des Nomades, on commence par gravir trois jours durant une montée très roide, à laquelle succède un col étroit suspendu en quelque sorte au-dessus du lit de l'Aragus, et qui, pour cette raison, ne peut être franchi en moins de quatre jours et autrement qu'en marchant un à un, sans compter qu'il se trouve fermé au bout par un mur ou retranchement inexpugnable. Le troisième passage mène d'Albanie en Ibérie : taillé dans le roc à son point de départ, il continue à travers les marais que forme l'Alazonius à sa descente du Caucase. D'Arménie, enfin, on peut entrer en Ibérie par le double défilé du Cyrus et de l'Aragus. On sait, en effet, que ces deux cours d'eau, avant de se réunir, passent respectivement au pied de villes fortes bâties sur des rochers distants l'un de l'autre de 16 stades environ, le Cyrus au pied d'Harmozicé et l'Aragus au pied de Seusamora. Ce dernier passage est le même que franchit Pompée pour entrer d'Arménie en Ibérie, le même aussi que suivit Canidius dans une expédition ultérieure.

6. C'est en quatre classes pareillement qu'est divisée la population de l'Ibérie. L'une de ces classes et la première [hiérarchiquement] a le privilège d'élire les rois dans son sein, ce qui se fait d'après l'ordre de proximité [par rapport au roi défunt] et aussi d'après l'âge, le nouveau roi devant [toujours] être le plus vieux des membres de sa famille, de même que le plus âgé après lui est de droit préposé à l'administration de la justice et au commandement des armées. La seconde classe est celle des prêtres, lesquels ont, indépendamment de leurs fonctions sacrées, la fonction spéciale de connaître des différends survenus avec les peuples voisins ; la troisième comprend les guerriers et les laboureurs ; et la quatrième les hommes du peuple, tous esclaves royaux et voués, comme tels, aux différents travaux que nécessite la vie matérielle. Ajoutons que les biens de chaque famille appartiennent en commun à tous ses membres, mais que le membre le plus âgé en a de droit l'administration et la surintendance. - Telles sont les moeurs et institutions des Ibères, tel est l'aspect du pays qu'ils habitent.

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