BIBLIOTHÈQUE DE PHOTIUS
268.
Lycurgue, Vie
Λυκούργου δὲ οὐδενὸς τῶν ἄλλων, ὅσα γε τελεῖν εἰς ῥήτορας καὶ δημαγωγούς, τὸ ἔλαττον φερομένου οὔπω παρέσχεν ἡμῖν ὁ χρόνος λόγους ἀναγνῶναι, φέρεσθαι δὲ αὐτοῦ ἐξ ἱστορίας ιεʹ μεμαθήκαμεν. Οὗτος δὲ υἱὸς μὲν ἦν Λυκόφρονος τοῦ Λυκούργου, ὃν ἡ τῶν λʹ τυραννὶς ἀνεῖλε, τὸν δῆμον Ἐτεοβουτάδης· ἠκροάσατο δὲ τὰ μὲν πρῶτα (ὡς ἡ ἱστορία λέγει) Πλάτωνος τοῦ φιλοσόφου, ἔπειτα δὲ καὶ τοῦ ῥήτορος Ἰσοκράτους. Ἐπολιτεύσατο δὲ καὶ λέγων καὶ πράττων ἐπιφανῶς, καὶ τὰ τῆς πόλεως χρήματα διοικεῖν καταπιστευθεὶς ἐπὶ γʹ πενταετηρίδας κατὰ τὸ ἄριστον ταῦτα καὶ φιλοπονώτατον, ταλάντων μυρίων ὄντα καὶ τετρακισχιλίων, διῳκήσατο. Χειροτονηθεὶς δὲ ἐπὶ τὴν τοῦ πολέμου παρασκευὴν ἄλλα τε πολλὰ τῆς πόλεως κατερρυηκότα ἐπανέλαβε, καὶ τριήρεις τῷ δήμῳ υʹ παρεσκεύασε. Πολλὰ δὲ καὶ τῶν ἔργων ἡμιτελῆ παρειληφὼς εἰς τέλος παρήνεγκε, νεώς τε οἴκους ἐδείματο, καὶ τὴν σκευοθήκην ἐπεσκευάσατο, καὶ τῷ παναθηναϊκῷ σταδίῳ τὴν κρηπῖδα ὑπεβάλετο. Ἐπιστεύθη δὲ καὶ τοῦ ἄστεος τὴν ἐπιμέλειαν, καὶ μὴν καὶ τῶν κακούργων τὴν ἀνεύρεσίν τε καὶ σύλληψιν· καὶ οὕτως ἐκάθηρε τὴν πόλιν τῶν κακούργων ἐξελάσας ἅπαντας, ὡς καὶ παρ´ ἐνίοις τῶν σοφιστῶν λέγεσθαι ὅτι μὴ μέλανι Λυκοῦργος ἀλλὰ τῷ θανάτῳ χρίων τὸν κάλαμον τὰ κατὰ τῶν πονηρῶν ψηφίσματα ἔγραψε. Τοσοῦτον δὲ πόθον αὑτοῦ καὶ αἰδῶ τοῖς Ἀθηναίοις ἐνεποίησε πολιτευόμενος, ὡς αἰτήσαντος αὐτὸν Ἀλεξάνδρου τοῦ βασιλέως, ὥσπερ καὶ τοὺς ἄλλους, ὁ δῆμος οὐ προήκατο. Ἐπρέσβευσε δὲ καὶ πρὸς διαφόρους πόλεις καὶ μετὰ Δημοσθένους εἰς Πελοπόννησον. Καὶ ἐτέλεσε τὸν τοῦ βίου χρόνον εὐδοκιμῶν καὶ δίκαιος εἶναι παρὰ Ἀθηναίοις νομιζόμενος· διὸ καὶ τὸ λόγον τινὰ προενεγκεῖν ἐν τοῖς δικαστηρίοις ὑπὲρ ὁτουοῦν μεγάλη τῷ συναγορευθέντι βοήθεια ἐγίνετο. Ἐποιήσατο δὲ καὶ νόμων εἰσφορὰς διαφόρων ὧν ἐστι πέμπτος, ὃς οὐκ ἐᾷ τὰς γυναῖκας Ἐλευσίναδε ἐπὶ ζεύγους ὀχουμένας ἀφικνεῖσθαι, ὡς ἂν αἱ δημοτικαὶ μὴ ὦσιν ὑπὸ τῶν πλουσίων ἐλαττούμεναι. Ξενοκράτει δέ ποτε τῷ φιλοσόφῳ τὰς χεῖρας ἐπιβαλόντος τελώνου, καὶ πρὸς τὸ μετοίκιον αὐτὸν ἄγοντος, συναντήσας τὸν μὲν φιλόσοφον ἀπέλυσε, τὴν δὲ κεφαλὴν τοῦ τελώνου ῥάβδῳ παίσας, ἅτε δὴ κατὰ τοῦ πρέποντος ἀποθρασυνομένου, δεσμωτήριον οἰκεῖν παραδέδωκε, καὶ πολλῶν ἐπαίνων ἐπὶ ταύτῃ τῇ πράξει τετύχηκε. Διὸ καὶ μεθ´ ἡμέρας τινὰς τοῖς παισὶ τοῦ Λυκούργου Ξενοκράτης συντυχών· «Ταχύ γε, ἔφη, τῷ πατρὶ ὑμῶν, ὦ παῖδες, ἀποδέδωκα τὴν χάριν· ἐπαινεῖται γὰρ ὑπὸ τῶν πλειόνων, ὅτι μοι γέγονε βοηθὸς προπηλακιζομένῳ». Ἓν δὲ ἱμάτιον περιεβάλλετο θέρους τε καὶ χειμῶνος, καίτοι τῶν τῆς πόλεως εὐπόρων οὐδενὸς ἐλαττούμενος. Ἀλλὰ καὶ ἀνυπόδετος τὰ πολλὰ διῆγεν, εἰ μὴ τὸ πρέπον αὐτὸν ἐβιάζετο πρὸς τὴν ὑποδημάτων κατελθεῖν χρείαν. Οὐκ εὖ δὲ πεφυκὼς πρὸς τὰ αὐτοσχέδια νυκτὸς καὶ ἡμέρας ἐμελέτα, τὸ ἐνδέον τῇ φύσει ἀναπληρῶν τοῖς πόνοις. Καὶ τὸ κλινίδιον δὲ αὐτῷ, ἐφ´ ᾧ ἐκάθευδε, κωδίῳ μόνῳ καὶ προσκεφαλαίῳ ἐστρώννυτο, ὡς ἂν ῥᾳδίως ἀνιστάμενος τοῦ ὕπνου μελετῴη. Καὶ παρρησιαστὴς δὲ διὰ τὴν εὐγένειαν ὑπῆρχε· διὸ καὶ Ἀθηναίων ποτὲ δημηγοροῦντος αὐτοῦ μὴ ἀνεχομένων εἰς ἐπήκοον ἀνέκραγε πάντων· «Ὦ Κερκυραία μάστιξ, ὡς πολλῶν ταλάντων εἶ ἀξία;» Μέλλων δὲ τελευτᾶν εἰς τὸ μητρῷον καὶ τὸ βουλευτήριον προστάξας ἐκομίσθη, εὐθύνας δοῦναι τῶν πολιτευμάτων βουλόμενος. Οὐδενὸς δὲ κατηγορήσαντος πλὴν Μενεσαίχμου, τῶν διαβολῶν ὑπέρτερος φανεὶς εἰς τὴν οἰκίαν ἀπεκομίσθη καὶ ἐτελεύτησεν. Οὐκ ἐν τούτῳ δὲ μόνον τῷ ἀγῶνι τὴν νικῶσαν ἔσχεν, ἀλλὰ καὶ πολλάκις κατηγορηθεὶς καὶ τὰς αἰτίας εὖ μάλα διαλυσάμενος ἐκράτησε τῶν ἀνταγωνιστῶν· πολλάκις δὲ καὶ στεφάνων ἠξιώθη παρὰ τοῦ δήμου. Κατέλιπε δὲ καὶ παῖδας ἐκ Καλλιστοῦς Ἅβρωνα, Λυκοῦργον, Λυκόφρονα· οὓς καὶ τελευτήσαντος Λυκούργου οἱ ἀγνώμονες Ἀθηναῖοι τοῖς ἕνδεκα παρέδωκαν, Μενεσαίχμου μὲν κατηγορήσαντος, γραψαμένου δὲ Θρασυκλέους. Ὕστερον μέντοι τούτους ἠθώωσαν, Δημοσθένους ἐπιστείλαντος ἀπὸ τῆς φυγῆς τοῖς Ἀθηναίοις ὡς πολλὴν αὑτῶν κατεσκέδασαν διαβολήν, τηλικούτου παῖδας ἀνδρὸς δεσμωτήριον οἰκεῖν παραδεδωκότες ἀνθ´ ὧν ὁ πατὴρ ἐπολιτεύσατο, ὃν καὶ αὐτοὶ ζῶντα δι´ αἰδοῦς τε ἦγον καὶ ἐθαύμαζον. |
Pour Lycurgue, je n'ai pas encore eu le temps de lire ses oraisons ; je sais seulement qu'il en a fait quinze & qu'il n'a été inférieur à aucun des autres orateurs de la République d'Athènes. Il était fils de Lycophron, que les trente tyrans condamnèrent à mort. L'histoire nous apprend qu'il s'adonna d'abord à l'étude de la Philosophie, où il eut Platon pour maître. Il se fit ensuite disciple d’Isocrate & dès qu'il commença à avoir part au gouvernement, il le distingua autant par sa bonne conduite, que par son éloquence. On lui confia dès lors l'administration des deniers publics : il eut durant quinze ans la recette de quatorze mille talents & il s'acquitta de cet emploi avec tout le soin & toute l'intégrité que l'on pouvoir désirer. On lui donna ensuite la direction des affaires de la guerre dans ce nouvel emploi, il répara les fortifications de la ville & y en ajouta de nouvelles : il acheva divers ouvrages publics, qui étaient demeurés imparfaits. Il fit construire trois cents galères avec des loges pour les mettre à l'abri ; il pourvut l'arsenal de toute sorte de munitions & d'agrès ; il décora le stade des Panathénées d'un beau parapet qui régnait tout à l'entour. Chargé ensuite de la police d'Athènes, il fît de si bons règlements & les fit si bien observer, qu'en peu de temps, il eût nettoyé la ville de tout ce qu'il y avait de bandits & de scélérats. Il était d'une sévérité inexorable à l'égard de ces sortes de gens ; d'où l'on prit occasion de dire, que pour faire ses ordonnances, c'était moins dans l'encre que dans le sang qu'il trempait sa plume. Par ses services & par ses rares qualités, il avait inspiré aux Athéniens tant d'amour & de vénération pour sa personne, qu'Alexandre ayant demandé que Lycurgue lui fût livré avec les autres orateurs, le peuple ne pût jamais s'y résoudre. Il fut envoyé plusieurs fois en ambassade conjointement avec Démosthène & en dernier lieu, vers les peuples du Péloponnèse. Ainsi il passa tout le temps de sa vie dans une grande considération à Athènes, sa droiture était si bien connue, que d'avoir le suffrage de Lycurgue, était une présomption en faveur de ceux à qui il l'accordait. Il fut l'auteur de plusieurs Lois, entre autres de celle-ci, qui était la cinquième : Qu'aucune femme Athénienne, ne pourrait à l’avenir aller en char à Eleusis, [28] parce que cela mettait trop de différence entre celles qui étaient riches &· celles qui ne l'étaient pas. Un commis de la Douane osa mettre la main sur le philosophe Xénocrate & vouloir l'arrêter ; Lycurgue survint, délivra le philosophe, donna cent coups de canne au commis & le fit mettre en prison. Cette action plut infiniment au peuple d'Athènes & attira mille bénédictions à Lycurgue : aussi quelques jours après, Xénocrate ayant rencontré les fils de Lycurgue, Votre père, leur dit-il, m’a vengé de ce coquin de commis ; mais je suis quitte envers lui ; car je lui ai valu bien des louanges. Quoi que riche & aussi riche qu'aucun autre de la ville, il n'avait jamais qu'un habit, qu'il portait l'hiver comme l'été. Pour l'ordinaire, il marchait nus pieds & ne connaissait guère de chaussure que dans les occasions où la bienséance le demandait. La nature lui avait refusé le talent de bien parler sur le champ ; il y remédiait par un travail assidu, occupé jour & nuit de ce qu'il avait à dire. Une peau d'ourse étendue sur le plancher de sa chambre avec un oreiller lui servait de lit. Il en tenait moins au chevet & se levait plus volontiers pour reprendre son travail. En parlant, il s'exprimait avec énergie & disait librement ce qu'il pensait. Un jour qu'il haranguait les Athéniens & qu'ils ne voulaient pas l'écouter. Peuple ingrat, s'écria-t-il, que tu mériterais les étrivières. Devenu vieux & sentant sa fin approcher, il se fit porter dans le temple de la mère des Dieux & ensuite au Sénat, où il voulut rendre compte de son administration : mais à la réserve de Ménesechme, tous s'écrièrent que Lycurgue était au dessus de la calomnie. On le reconduisit donc dans sa maison & il mourut peu d'heures après. Il avait triomphé de l'envie en plusieurs autres occasions ; & plus d'une fois le peuple lui avait fait l'honneur de le couronner. Il laissa de Calliste sa femme trois fils, Abron, Lycurgue & Lycophron. Après sa mort les Athéniens poussèrent l'ingratitude jusqu'à faire mettre en prison ces trois enfants, sur l'accusation de Ménesechme, qui avait pour greffier Thrasyclès. Démosthène, du lieu de son exil, écrivit au peuple d'Athènes, pour lui représenter qu'il se déshonorait à jamais, en abandonnant les enfants d'un père à qui il avait marqué tant d'estime & qui lui avait rendu de si grands services ; cette lettre eut son effet & les enfants de Lycurgue furent déclarés innocents. |
[28] Plutarque dit que la première qui transgressa cette loi, ce fut la femme de Lycurgue, & que son mari la condamna à une amende d'un talent. |