BIBLIOTHÈQUE DE PHOTIUS
266.
Hypéride, Discours
Ἀνεγνώσθη Ὑπερείδου λόγοι διάφοροι. Τούτων οἱ μὲν εἰς τὸ τοῦ ῥήτορος ἀναφερόμενοι γνήσιον βʹ καὶ νʹ εἰσίν, οἱ δὲ παρασχόντες ἀμφισβήτησιν εʹ καὶ κʹ· τὸ γὰρ ὅλον αὐτῶν πλήρωμα εἰς ζʹ συντείνει καὶ οʹ. Ἄριστος δὲ γέγονεν ἐν ταῖς τῶν λόγων ἐργασίαις, ὥς τισι μὲν ἀμφισβήτησιν παρασχεῖν πότερον ὁ Δημοσθένης κατὰ τοὺς λόγους ἐκείνου προέχει, ἢ Δημοσθένους ὁ Ὑπερείδης· εἰσὶ δὲ οἳ καὶ τὴν νικῶσαν ἔθεντο ψῆφον Ὑπερείδῃ. Ἀλλὰ καὶ τὸ ἐπίγραμμα ὅ τινες ἐγγράφουσι τῇ τοῦ Δημοσθένους στήλῃ, εἰς ἐκεῖνον μεταφέρουσι, τὸ ὄνομα μόνον ἀμειψάμενοι· γράφουσι γάρ· Εἴπερ ἴσην γνώμῃ ῥώμην Ὑπερείδης εἶχεν, οὔποτ´ ἂν Ἑλλήνων ἦρξεν Ἄρης Μακεδών. Οὗτος δὲ ὁ Ὑπερείδης παῖς μὲν γέγονε Γλαυκίππου τοῦ Διονυσίου, Κολλυτεὺς δὲ τὸν δῆμον. Ἔσχε δὲ καὶ ὁμώνυμον υἱὸν τῷ πατρὶ Γλαύκιππον ῥήτορα, ὃς καὶ λόγους συνεγράψατο. Πλάτωνος δὲ τοῦ φιλοσόφου ἠκροάσατο, καὶ δὴ καὶ Ἰσοκράτους. Ἐπολιτεύσατο δὲ Ἀθήνῃσιν, ὅτε Ἀλέξανδρος ὁ Μακεδὼν τῶν ἑλληνικῶν ἥπτετο πραγμάτων, καὶ δείκνυται ἀντειπὼν αὐτοῦ τῇ αἰτήσει, ἥτις τοὺς στρατηγοὺς τῶν Ἀθηναίων καὶ τὰς τριήρεις ἀπῄτει. Συνεβούλευσε δὲ τοῖς Ἀθηναίοις καὶ τὸ ἐπὶ Ταίναρον ξενικὸν διαλῦσαι. Ἔγραψε δὲ καὶ Δημοσθένει τιμάς, καὶ γραφέντος ὑπὸ Διοδότου παρανόμων τοῦ ψηφίσματος ἀπέφυγε. Φίλος δὲ τοῖς περὶ Δημοσθένην καὶ Λυσικλέα καὶ Λυκοῦργον γεγονὼς οὐ μέχρι τέλους τὴν φιλίαν συνετήρησεν, ἀλλ´ ἐπεὶ Λυσικλέα μὲν καὶ Λυκοῦργον ὁ βίος ἀπέλιπε, Δημοσθένης δὲ εἰς κρίσιν ἤγετο ὡς παρὰ Ἁρπάλου δωροδοκήσας, ἐξ ἁπάντων αὐτὸς κατήγορος προεχειρίσθη τοῦ ῥήτορος. Κριθεὶς δὲ παρανόμων ὑπὸ τοῦ Ἀριστογείτονος, διότι μετὰ τὴν Χαιρώνειαν τοὺς μετοίκους πολίτας ἔγραψε ποιήσασθαι, ἐλευθέρους δὲ τοὺς δούλους, ἱερὰ δὲ καὶ παῖδας καὶ γυναῖκας εἰς τὸν Πειραιᾶ παραθέσθαι, κἀνταῦθα κρείττων τοῦ δοῦναι δίκην ἐγένετο. Αἰτιωμένων δὲ αὐτὸν οὐκ ὀλίγων ὡς πολλοὺς τῶν νόμων ἐν τῷ ψηφίσματι παριδόντα· «Ἐπεσκότει γάρ μοι τὰ Μακεδόνων, ἔλεγεν, ὅπλα· καὶ οὐκ ἐγὼ μᾶλλον τὸ ψήφισμα, ἀλλ´ ἡ ἐν Χαιρωνείᾳ μάχη ἔγραψε». Πρότερον δὲ μήπω δημήγορος αἱρεθεὶς Ἀθηναίοις μισθοῦ δίκας ἔλεγε. Δόξας δὲ τῶν Περσικῶν μετεσχηκέναι χρημάτων Ἐφιάλτῃ, εἶτα τριήραρχος αἱρεθείς, ὅτε Φίλιππος ἐπολιόρκει Βυζάντιον, καὶ βοηθήσας προθύμως Βυζαντίοις, ὑπέστη χορηγῆσαι κατὰ τὸν ἐνιαυτὸν τοῦτον τῶν ἄλλων ἁπάσης λειτουργίας ἀφειμένων. Ἐψηφίσατο δ´ οὗτος πολιτευόμενος καὶ τιμὰς Ἰόλᾳ, ὃς Ἀλεξάνδρῳ τὸ δηλητήριον ἐκεράσατο φάρμακον. Ἐκοινώνησε δὲ καὶ τοῦ λαμιακοῦ πολέμου τῷ Δημοσθένει, καὶ ἐπὶ τοῖς ἐν τῇ μάχῃ πεσοῦσιν ἐπιτάφιον εἶπε, πολλῶν ἐπὶ τούτῳ θαῦμα καὶ ἔπαινον καρπωσάμενος. Φιλίππου δὲ πλεῖν ἐπ´ Εὐβοίας παρασκευασαμένου, καὶ τῶν Ἀθηναίων εὐλαβῶς διακειμένων, τριήρεις ἤθροισεν οὗτος μʹ ἐξ ἐπιδόσεως, καὶ πρὸ τῶν ἄλλων αὐτὸς ὑπέρ τε αὑτοῦ καὶ τοῦ παιδὸς δύο τριήρεις ἐπέδωκε. Συστάντος δὲ τοῦ πρὸς Δηλίους ἀμφισβητήματος, ποτέρους δεῖ προΐστασθαι τοῦ ἱεροῦ, ἡρέθη μὲν Αἰσχίνης συνειπεῖν, ἡ δὲ ἐξ Ἀρείου πάγου βουλὴ Ὑπερείδην προεστήσατο· καὶ ἔστιν ὁ λόγος τὴν ἐπιγραφὴν Δηλιακὸς ἐπιφερόμενος. Ἡκόντων δὲ καὶ παρὰ Ἀντιπάτρου πρέσβεων, καὶ δι´ ἐπαίνου τὸν Ἀντίπατρον ποιουμένων καὶ πολλὴν ἐπιμαρτυρομένων χρηστότητα· «Οἶδα μέν, εἶπεν, ὡς χρηστὸς ὁ Ἀντίπατρος, ἀλλ´ ἡμεῖς γε οὐ δεόμεθα χρηστοῦ δεσπότου». Γραψάμενος μέντοι γε τὴν Φωκίωνος δωρεάν, ἣν εἶπε Μειδίας Μειδίου Ἀναγυράσιος, κατὰ τοῦτον τὸν ἀγῶνα τὸ ἔλαττον ἤνεγκε. Συμβάντος δὲ τοῦ περὶ Κράνωνα πάθους ἐξαιτηθεὶς ὑπὸ Ἀντιπάτρου, ἐπεὶ ἔμελλεν αὐτὸν ὁ δῆμος ἐκδιδόναι, τῆς Ἀθηναίων πόλεως εἰς Αἴγιναν ἀποφεύγει. Καὶ συγγεγονὼς Δημοσθένει, καὶ ἀπολογησάμενος ὑπὲρ ὧν πρὸς αὐτὸν διηνέχθη, ἀπαλλαγεὶς ἐκεῖθεν ὑπ´ Ἀρχίου τοῦ ἐπονομασθέντος φυγαδοθήρα ἐν αὐτῷ τῷ τοῦ Ποσειδῶνος ἱερῷ συνελήφθη, καίτοι τοῦ ἀγάλματος ἐχόμενος. Ἐντεῦθεν πρὸς Ἀντίπατρον ἀχθεὶς ἐν Κορίνθῳ διατρίβοντα, καὶ βασανιζόμενος ἐφ´ ᾧ τὰ ἀπόρρητα τῆς πόλεως ἐξειπεῖν, ἐπὶ τοσοῦτον ἠνδρίσατο μηδὲν κατὰ τῆς πατρίδος εἰπεῖν, ὥστε καὶ τὴν γλῶσσαν διαφαγών, ἵνα μὴ ἄκων τι παραφθέγξηται, μετήλλαξε τὸν βίον. Εἰσὶ δὲ οἵ φασιν αὐτὸν εἰς Μακεδονίαν ἀχθέντα τήν τε τῆς γλώσσης ἐκτομὴν ὑποστῆναι καὶ μετὰ θάνατον ἄταφον ῥιφῆναι· πλὴν οἵ γε προσήκοντες αὐτῷ, παρὰ τὸ δόγμα τῶν Μακεδόνων, καύσαντες τὰ ὀστᾶ εἰς Ἀθήνας μετεκόμισαν. |
J'ai lu aussi toutes les oraisons d'Hypéride. Il y en a cinquante-deux que l’on croit être véritablement de lui & vingt-cinq dont on doute : ce qui fait en tout soixante sept. La composition de cet orateur est si excellente, que quelques-uns [24] n'oseraient décider si Démosthène est au-dessus d'Hypéride, ou Hypéride au-dessus de Démosthène & qu'ils appliquent à Hypéride cette inscription que j'ai rapportée, changeant seulement le nom de l'un en celui de l'autre. Il eut pour père Glaucippe, fils de Denys, du bourg de Colitée. Il laissa un fils qui eut nom aussi Glaucippe : ce fils s'appliqua à l'éloquence & fît quelques plaidoyers. Pour Hypéride, après avoir été disciple de Platon & d'Isocrate, il gouverna la République d'Athènes, dans le temps qu'Alexandre donnait la loi à la Grèce. Ce Prince demandait aux Athéniens des galères & des Officiers ; Hypéride fut d'avis qu'on ne lui accordât ni l'un ni l'autre & conseilla aux Athéniens de congédier les troupes étrangères qu'ils entretenaient au Ténare. Il décerna de grands honneurs à Démosthène. Diodote l'accusa d'avoir violé les lois, mais il se défendit si bien, qu'il fut absous. Après avoir été en liaison avec Lycurgue, avec Lysiclès & avec Démosthène, dès que les deux premiers furent morts, il changea de conduite à l'égard du troisièmecar Démosthène étant soupçonné d'avoir pris de l'argent d'Harpalus, Hypéride fut choisi par préférence, [25] pour être son accusateur. Mais il fut accusé à son tour par Aristogiton d'avoir agi contre les lois, en donnant un décret qui accordait le droit de bourgeoisie aux étrangers & la liberté aux esclaves, dont il ordonnait que les Dieux, les femmes & les enfants fussent transportés au Pirée. A cette accusation il ne répondit autre chose, sinon qu'il avait pris conseil de la nécessité : Ce n’est pas moi, dit-il, qui ai porté ce décret, c'est l'épouvante où vous étiez. C’est la bataille de Chéronée & il ne fut point condamné. Avant que d'être orateur de la République, il subsistait de sa profession d'avocat. On le soupçonna d'avoir eu sa part de l'argent des Perses, aussi bien qu'Ephialte ; ce qui n'empêcha pas qu'on ne le fit Capitaine de galère, dans le temps que Philippe assiégeait Byzance ; & en cette qualité, il secourut si promptement & si à propos les Byzantins, que la même année il fut nommé Surintendant du théâtre, lorsqu'on dépouillait tous les autres de leurs emplois. Pendant qu'il gouvernait la République, il décerna [26] de grands honneurs à Iolas, qui avait donné à Alexandre un breuvage empoisonné. Il n'eut pas moins de part que Démosthène à la· guerre de Lamia & il fit avec un succès étonnant l'oraison funèbre de ceux qui avaient péri dans cette guerre. Lorsqu'il vit Philippe dans le dessein de descendre en Eubée & les Athéniens justement alarmés des mouvements de ce Prince, il ordonna qu'il serait levé sur le public une taxe, dont les fonds seraient employés à équiper quarante galères ; & voulant montrer l'exemple aux autres, il donna lui-même deux galères pour lui & pour son fils. Les habitants de Délos & les Athéniens ayant eu une dispute entre eux, à qui des deux aurait la préséance dans le temple d'Apollon, le peuple d'Athènes nomma Eschine pour parler sur cette affaire & les Juges de l'Aréopage nommèrent Hypéride ; c’est ce qui donnât lieu à l'oraison que nous avons de lui sous le titre de Déliaque. Quelque temps après il vint à Athènes des députés d'Antipater : ces députés admis à l'audience, firent un grand éloge de leur maître & parlèrent de lui comme du plus honnête-homme du monde. Je sais que c'est un fort honnête homme, leur dit Hypéride ; mais je sais aussi que nous ne voulons point d’un maître, quelque honnête homme qu'il soit. Sur la dénonciation de Midias, il accusa Phocion d'avoir voulu corrompre le peuple par ses largesses ; mais il eut du dessous dans cette affaire. Enfin après la malheureuse issue du combat de Cranon, voyant qu'Antipater avait juré sa perte & que le peuple voulait le livrer à ce redoutable ennemi, il se sauva d'Athènes à Egine. Il y trouva Démosthène, à qui il tâcha de se justifier du procédé qu'il avait eu avec lui. Son dessein était de chercher un autre lieu de sûreté ; mais il fut arrêté par ordre d'Archias, dans le temple même de Neptune, quoiqu'il embrassât sa statue. On le conduisit de là à Corinthe, où Antipater était alors. Là on lui donna la question pour l'obliger à révéler le secret de l'Etatmais en homme de courage, il aima mieux souffrir toute sorte de tourments, que de rien dire qui pût nuire à la patrie & il se déchira la langue, afin qu'on ne pût jamais lui tirer son secret. D'autres disent qu'il fut mené en Macédoine, que dans le chemin il se coupa la langue & qu'après sa mort, il demeura sans sépulture. Cependant quelques-uns de ses proches, malgré la défense des Macédoniens, mirent son corps sur un bûcher & en rapportèrent les cendres à Athènes. [27] |
[24] Quintilien, qui était bon juge en telle matière, décide la question. Hypéride, dit-il, a surtout la douceur du style, & la délicatesse de l'esprit en partage. Mais je le crois plus né, plus propre pour les petites causes, que pour les grandes. [25] Plutarque en dit la raison; c’est qu'Hypéride était le seul des orateurs d'Athènes, que l'on ne soupçonnait point de s'être laissé corrompre par les présents d'Harpalus. Ces présents avaient pour objet de gagner les orateurs de la république, & de les porter à animer le peuple contre Alexandre. [26] Voilà un étrange décret, & qui ne fait guère d'honneur à Hypéride, ni à la république d’Athènes. Les Romains avaient bien une autre conduite à l'égard de leurs ennemis. [27] On peut à ce qui est dit ici d'Hypéride, ajouter ce que Plutarque rapporte, que cet orateur était fort adonné aux femmes, & qu'il aimait éperdument la belle Phryné. Cette illustre courtisane fut accusée en justice, Hypéride la défendit, mais avec toute son éloquence, il allait perdre sa cause, lorsqu'arrachant tout à coup à Phryné le voile qui la couvrait. Il l'exposa nue aux yeux des Juges de l’Aréopage, & leur fît sentir qu'une si rare beauté pouvait les charmer comme les autres hommes. |