BIBLIOTHÈQUE DE PHOTIUS

          

     85 HERACLIEN.

          Contre les Manichéens.

 
   

       Oeuvre numérisée par Marc Szwajcer

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


85. Héraclien, Contre les Manichéens
.

 

 

Ἀνεγνώσθη Ἡρακλειανοῦ ἐπισκόπου Καλχηδόνος κατὰ Μανιχαίων ἐν βιβλίοις κʹ.

Ἔστι δὲ τὴν φράσιν συντετμημένος καὶ ἀπέριττος καὶ ὑψηλός, οὐδὲ τοῦ σαφοῦς ἐκκλίνων· ἀλλὰ σύγκρατος αὐτοῦ τῷ μεγέθει ἡ σαφήνεια, ἅτε καὶ τῷ ἀττικισμῷ τὸ καθωμιλημένον μιγνύντος καὶ παίδων ἡγουμένου εἰς ἅμιλλαν καθισταμένων τῷ (ὡς ἂν εἴποι τις) ὑπεραττικισμῷ.

Ἀνατρέπει δὲ τὸ παρὰ τοῖς Μανιχαίοις καλούμενον εὐαγγέλιον καὶ τὴν Γιγάντειον βίβλον καὶ τοὺς Θησαυρούς. Καταλέγει καὶ ὅσοι πρὸ αὐτοῦ κατὰ τῆς τοῦ Μανιχαίου συνέγραψαν ἀθεότητος, Ἡγεμόνιόν τε τὸν τὰς Ἀρχελάου πρὸς αὐτὸν ἀντιλογίας ἀναγράψαντα, καὶ Τίτον ὃς ἔδοξε μὲν κατὰ Μανιχαίων γράψαι, ἔγραψε δὲ μᾶλλον κατὰ τῶν Ἄδδου συγγραμμάτων, ἔτι δὲ καὶ τὸν Λαοδικέα Γεώργιον, τοῖς αὐτοῖς σχεδὸν οἷς ὁ Τίος κατὰ τῆς ἀσεβείας κεχρημένον ἐπιχειρήμασι, καὶ Σεραπίωνα τὸν τῆς Θμουέως ἐπίσκοπον, καὶ τὸν Διό5δωρον, ἐν κʹ καὶ εʹ βιβλίοις τὸν κατὰ Μανιχαίων ἀγῶνα ἀγωνισάμενον, ὃς διὰ μὲν τῶν πρώτων βιβλίων ἑπτὰ οἴεται μὲν τὸ τοῦ Μανιχαίου ζῶν εὐαγγέλιον ἀνατρέπειν, οὐ τυγχάνει δὲ ἐκείνου, ἀλλὰ ἀνατρέπει τὸ ὑπὸ Ἄδδα γεγραμμένον, ὃ καλεῖται Μόδιον· διὰ δὲ τῶν ἐφεξῆς τὴν τῶν γραφικῶν ῥητῶν, ἃ οἱ Μανιχαῖοι ἐξοικειοῦνται πρὸς τὸ σφίσι βεβουλημένον, ἀνακαθαίρει χρῆσιν καὶ διασαφεῖ. Καὶ ὁ μὲν Διόδωρος οὕτω.

Τούτων δὲ τῶν (ὡς αὐτός φησιν ὁ θεοσεβέστατος Ἡρακλειανός) πατέρων μνήμην πεποιηκώς, ὅσα μὲν ἀσθενῶς αὐτοῖς εἴρηται, ἐπισημαινόμενος παρατρέχει, ὅσα δὲ ἐλλιπῶς, εὐλαβῶς ἀναπληροῖ, καὶ ὅσα ἀρκούντως, ἀδεκάστως ἀποδεχόμενος δι´ εὐφημίας ποιεῖται, συντάττων αὐτοῖς καὶ ἅπερ αὐτῷ διενοήθη.

 Ἔστι δὲ ὁ ἀνὴρ πνέων καὶ τὴν ἀπὸ φιλοσοφίας ἰσχύν, καὶ τὴν ἀπὸ τῶν ἄλλων μαθημάτων πλουτῶν θεωρίαν· διὸ καὶ τὰ παραλόγως μυθολογηθέντα τῷ Μανιχαίῳ εἰς τὸ σφοδρότατον ἀνατρέπει, ἐξ αὐτῆς τῆς τῶν ὄντων θεωρίας τὴν περὶ τοῦ ὄντος αὐτῷ μεμυθολογημένην ἀπελέγχων φλυαρίαν.

Ἐγράφη δὲ αὐτῷ ἡ εἰκοσάβιβλος αὕτη ἡ κατὰ τῶν Μανιχαίων πρὸς Ἀχίλλιον αἰτησάμενον, ὃν καὶ πιστὸν καὶ ποθεινότατον ἀποκαλεῖ τέκνον· ὁ γὰρ Ἀχίλλιος, ὁρῶν τὴν τῶν Μανιχαίων εἰς πλάτος ἐπιδιδοῦσαν ἀσέβειαν, ᾔτησε τὴν κατ´ αὐτῆς ἀναγραφῆναι στήλην, καὶ εἰς ἀπαράγραπτον ἀναγέγραπται θρίαμβον. Ἦν δ´ οὗτος ὁ θεοσεβέστατος Ἡρακλειανὸς κατὰ τοὺς χρόνους ...

J’ai lu les vingt livres d’Héraclien (1), évêque de Calcédoine, Contre les Manichéens (2).

Son style est concis, sans termes inutiles, élevé & d'une netteté soutenue par la majesté des expressions, parce qu'il mêle la diction attique au discours ordinaire, comme un professeur d’école participant à un concours de super-atticisme.

Il réfute les livres que les manichéens appellent Évangile, le Livre des Géants, et les Trésors. Il fait mention de ceux qui avaient écrit avant lui contre ces hérétiques, savoir Hégémonius, auteur de la Dispute d'Archélaüs contre Manès; Tite (3), évêque de Bostres, qui, croyant écrire contre Manès, avait écrit contre les livres d'Adda (4) son maître ; George de Laodicée (5), qui s'était servi des mêmes arguments que Tite contre cette hérésie impie; Sérapion, évêque de Tmuis (6), enfin Diodore de Tarse (7), qui avait combattu les manichéens par un ouvrage divisé en vingt-cinq livres, dont les sept premiers étaient contre l'Évangile vivant de Manès, à ce qu'il croyait, mais en fait le livre d'Adda, intitulé Muid (8). Dans les autres livres, Diodore de Tarse expliquait avec netteté les passages de l'Écriture dont les Manichéens abusaient pour autoriser leurs erreurs.

Héraclien appuyait en peu de mots dans son ouvrage ce qui lui paraissait le plus faible dans les écrits de ces Pères (comme le pieux Héraclien les appelait lui-même), suppléait ce qui lui semblait oublié, et rapportait ce qu'ils avaient dit de meilleur, y ajoutant ce qui lui venait en pensée.

Cet écrivain était fort dans le raisonnement philosophique, faisant usage des autres sciences qu'il avait ac-quises. Il combat énergiquement et renverse les fables des manichéens (9) et confondait leurs erreurs, et à par tir de l’existant, il réfute le fabuleux non-sens de l’Etre.

Le traité d'Héraclien était adressé à un certain Achillius, à la prière de qui il l'avait composé et qu’il appelait son fils fidèle et bien-aimé. Cet Achillius, sentant l’hérésie manichéenne progresser, lui en demanda une réfu-tation publique et cet ouvrage en fut la conséquence, un triomphe exceptionnel contre l’impiété. Ce très pieux Héraclien vivait en …
 

[1] On ne sait apparemment rien de lui.

[2] Leur système est dualiste selon deux principes, le bien et le mal, le premier représentant la partie spirituelle de l’homme, le second sa nature corporelle. L’homme a deux âmes, l’une intellectuelle et rationnelle, l’autre mauvaise. Les Manichéens soutiennent que les âmes des hommes, des animaux et des plantes, sont éternelles avec Dieu ; que le baptême est inutile ; que l’homme n’est pas libre ; que le Christ était le soleil éclairant le monde ; que toutes les religions sont médiocres.

[3] En Arabia Auranitis (362-371).

[4] L’un des trois disciples de Manès.

[5] 335-347.

[6] En Egypte. Cet ouvrage nous est parvenu.

[7] Prêtre d’Antioche et évêque de Tarse ; le principal « fondateur de l’école rationnelle de l’interprétation des Ecritures ».

[8]  Ou Boisseau, St Marc, IV, 19.

[9] Manès (~240- 274) ou Mani, le fondateur de la secte.