BIBLIOTHÈQUE DE PHOTIUS

     Jugement sur les dix plus célèbres orateurs de la Grèce.

       Traduction françaisel'Abbé GEDOYN.

       Oeuvre numérisée par Marc Szwajcer

          

      264 ESCHINE.

          Discours.   

      

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

264. Eschine, Discours

 

 

Ἀνεγνώσθη Αἰσχίνου λόγοι, ὧν τὸ πλῆθος ὁ τρεῖς ἀριθμὸς περιορίζει, καὶ ἐπιστολαὶ θʹ. Ὁ δὲ Δηλιακὸς ἐπιγραφόμενος οὐκ ἔστιν Αἰσχίνου. Ἔστι δὲ τοῖς λόγοις αὑτοῦ γλυκύς τε καὶ καθαρὸς καὶ εὐκρινὴς καὶ τῇ τῶν ἐνθυμημάτων σαφηνείᾳ σεμνυνόμενος. Ὁ μέντοι κατὰ Τιμάρχου λόγος ἑταιρήσεως τὸν Τίμαρχον γράφεται· καὶ ὁ Τίμαρχος καταπλαγεὶς καὶ λιπὼν τὸν ἀγῶνα ἑαυτὸν ἀνήρτησεν.

Ἐπήγγειλε δὲ καὶ τὴν ἐν Ταμύναις νίκην πρῶτος Ἀθηναίοις τὸ δεύτερον· διὸ καὶ ἐστεφανώθη. Φασὶ δὲ τὰ μὲν πρῶτα εἰπεῖν αὐτὸν ἐν τῷ δήμῳ κατὰ Φιλίππου, ἐνευδοκιμήσαντα δὲ τῷ λόγῳ πρεσβευτὴν πρὸς Ἀρκάδας χειροτονηθῆναι, εἰς οὓς παραγεγονὼς συνεστήσατο τοὺς μυρίους ἐπὶ Φίλιππον.

Οὗτος ὁ Αἰσχίνης παῖς γέγονεν Ἀτρομήτου, φυγόντος μὲν ἐπὶ τῶν λʹ, συγκαταγαγόντος δὲ τὸν δῆμον.

Τούτου δὴ καὶ Γλαυκοθέας γίνεται υἱός, Κοθωκίδης μὲν τὸν δῆμον, οὔτε δὲ τῶν ἐπὶ γένει περιφανῶν, οὔτε δὲ τῶν ἐπὶ χρήμασι λαμπρῶν. Ἐν δὲ τῷ νέῳ τῆς ἡλικίας τὸ σῶμα φέρων ἐρρωμένον τὰ γυμνάσια ἐπονεῖτο, λαμπρόφωνος δὲ πεφυκὼς τραγῳδίαν ἤσκησε μετὰ ταῦτα, ὡς δὲ λέγει Δημοσθένης, ὑπογραμματεύων καὶ τριταγωνιστῶν Ἀριστοδήμῳ ἐν τοῖς κατὰ δήμους Διονυσίοις. Καὶ παῖς μὲν ὢν ἐδίδασκε σὺν τῷ πατρὶ γράμματα, εἰς τὸ μειράκιον δὲ προελθὼν ἐστρατεύετο. Ἠκροάσατο δέ, οἱ μέν φασιν Ἰσοκράτους καὶ Πλάτωνος, Καικίλιος δὲ Λεωδάμαντος λέγει.

Πολιτευόμενος μέντοι γε οὐκ ἀφανῶς ἐκ τῆς ἐναντίας μερίδος, συνεπρέσβευε τοῖς περὶ Δημοσθένην ἄλλας τε πρεσβείας πολλὰς καὶ πρὸς Φίλιππον ὑπὲρ τῆς εἰρήνης, ἐφ´ ᾗ καὶ παρὰ Δημοσθένους κατηγορήθη, ἔτι δὲ ὡς πόλεμον ἐξάψειε πυλαγόρας αἱρεθεὶς πρὸς Ἀμφισσεῖς Ἀμφικτύοσι, καὶ τὸν λιμένα ἐργαζομένοις· ἐξ ἧς πράξεως συνέβη Φιλίππῳ προσφυγεῖν Ἀμφικτύονας, τὸν δὲ ὑπὸ τοῦ Αἰσχίνου συνεργούμενον ἐπιθέσθαι τοῖς πράγμασι καὶ τὴν Φωκίδα λαβεῖν. Συνειπόντος μέντοι γε αὐτῷ Εὐβούλου τοῦ Σπινθάρου Προβαλεισίου δημαγωγοῦντος, ψήφοις μόναις λʹ ἀπέφυγε.

Χρόνῳ δὲ ὕστερον Φιλίππου μὲν τετελευτηκότος, Ἀλεξάνδρου δὲ διαβαίνοντος εἰς τὴν Ἀσίαν, ἐπὶ ταῖς Δημοσθένους τιμαῖς Κτησιφῶντα παρανόμων ἐγράψατο. Οὐ μεταλαβὼν δὲ τὸ πέμπτον μέρος τῶν ψήφων εἰς Ῥόδον ἔφυγε, δραχμὰς χιλίας οὐ βουληθεὶς ὑπὲρ τῆς ἥττης καταβαλεῖν. Ἐν δὲ τῇ Ῥόδῳ σχολὴν καταστησάμενος ἐδίδασκεν· ἐν ᾧ τοῖς Ῥοδίοις τὸν κατὰ Κτησιφῶντος ἐπεδείξατο λόγον, θαυμαζόντων δὲ εἰ ταῦτα δημηγορήσας ἡττήθη· «Οὐκ ἄν, εἶπε, θαῦμα κατεῖχεν ὑμᾶς, ὦ Ῥόδιοι, εἰ Δημοσθένους ἀντιδημηγοροῦντος ἠκούσατε». Ἐκεῖθεν δὲ πλεύσας εἰς Σάμον, καὶ διατρίψας ἐπὶ τῆς νήσου, ὀλίγον ὕστερον ἐτελεύτησεν.  

Les oraisons d'Eschine dont j'aie connaissance, sont au nombre de trois & ses lettres au nombre de neuf ; car la Déliaque n’est pas de lui. Son style est pur, doux & coulant. Il excelle, surtout à traiter l'enthymème avec une grande netteté de raisonnement. Son oraison contre Timarque est célèbre. Ce Timarque était accusé de faire de sa maison un lieu de prostitution. Eschine plaidant contre lui, le couvrit de confusion, au point qu'il sortit de l'audience & s'alla pendre de désespoir.

Eschine fut le premier qui annonça aux Athéniens la victoire qu'ils avaient remportée pour la seconde fois à Tamynes. On dit qu'il fut aussi le premier qui parla contre Philippe dans l'assemblée du peuple : ce qui lui réussit si bien, qu’il fut député en Arcadie, où il persuada à ces peuples de lever dix mille hommes pour faire la guerre à ce prince.

Il était de Cothoce, bourgade de l'Attique & fils de cet Atromete, qui sous la domination des trente, fut exilé & qui dans la suite anima le peuple à recouvrer sa liberté.

Sa mère avait nom Glaucothée. A le considérer du côté de la naissance & du côté de la fortune, il n'y aurait rien à en dire. Dans ses jeunes ans il fit plus d'un métier ; né robuste, il s'adonna aux exercices de la gymnastique, il porta même les armes. Ensuite, voyant qu'il avait la voix belle & forte, il embrassa le métier de comédien : si nous en croyons Démosthène, il faisait l'office de souffleur & jouait même les troisièmes rôles dans la troupe d'Aristodème, qu'il suivait de bourgade en bourgade durant les Bacchanales. Il n'était encore qu'enfant, qu'il secondait son père dans la profession d'enseigner les Lettres. Selon quelques-uns, il l'était attaché à Socrate & à Platon ; mais suivant Cecilius il avoir été disciple de Léodamas.

Dès qu'il eut commencé à se mêler des affaires de la République, il y acquit beaucoup de gloire : à quoi l'esprit de faction ne contribua pas peu ; car en le faisant l'antagoniste de Démosthène, il devint chef de parti. Cependant il fut député plusieurs fois avec Démosthène & une entre autres vers Philippe, pour traiter de la paix. Au retour de cette ambassade, Démosthène l'accusa de prévarication, sur ce qu'ayant été élu Pythagore,[17] & se trouvant député des Amphictyons à Amphisse, dans le temps qu'ils y faisaient construire un port, il suscita la guerre sacrée ; d'où il arriva, que les Amphictyons furent obligés de se réfugier auprès de Philippe, qui à l'instigation d’Eschine, voulut se mêler de cette affaire, entra dans la Phocide & s'en rendit maître. Mais par la complaisance d'Eubulus fils de Spinthare & par les sollicitations de Pronallusius, qui alors pouvait tout sur l'esprit du peuple, Eschine eut trente suffrages pour lui & ne fut point condamné.

Quelque temps après, Philippe étant mort & Alexandre projetant de passer en Asie, Eschine entreprit Ctésiphon sur les honneurs qu'il avait décernés à Démosthène. Dans cette fameuse affaire, n'ayant pu avoir la cinquième partie des suffrages, il fut condamné à une amende de mille drachmes ; mais ne pouvant se résoudre à les payer, il alla s'embarquer au port Sisyphe & passa à Rhodes. Là il ouvrit une école d'éloquence, où prononçant un jour son oraison contre Ctésiphon & voyant les Rhodiens surpris de ce qu'il avait perdu sa cause après un tel plaidoyer, Rhodiens, leur dit-il, vous cesseriez, d'être surpris, si nous aviez entendu Démosthène. De Rhodes il fit voile à Samos & peu après son arrivée en cette île, il finît ses jours.

[17] On appelait ainsi un orateur député de la république, pour assister à l’assemblée des Amphictyons aux Thermopyles.