BIBLIOTHÈQUE DE PHOTIUS

          

     44 PHILOSTRATE,

      Vie d'Apollonius de Tyane.
   

       Oeuvre numérisée par Marc Szwajcer

 

 

 

 

 

 

 

 

 

44. Philostrate, Vie d'Apollonius de Tyane.


 

 

 

Ἀνεγνώσθη Φιλοστράτου Τυρίου εἰς τὸν Ἀπολλωνίου τοῦ Τυανέως βίον λόγοι ὀκτώ.

Ἔστι δὲ τὴν φράσιν σαφής, ἐπίχαρίς τε καὶ ἀφοριστικὸς καὶ βρύων γλυκύτητος, καὶ τῷ ἀρχαϊσμῷ καὶ ταῖς καινοπρεπεστέραις τῶν συντάξεων ἐμφιλοτιμούμενος.

Ἱστορεῖ δὲ τὸν Ἀπολλώνιον πρός τε Ἰνδούς, οὓς καλεῖ καὶ Βραχμᾶνας, ἀπιέναι, ἐξ ὧν καὶ πλεῖστα τῆς παρ´ αὐτοῖς θεοσοφίας ἐκμαθεῖν, καὶ πρὸς τοὺς τῶν Αἰθιόπων σοφούς, οὓς καὶ γυμνοὺς ὀνομάζει, ὅτι γυμνοὶ τὸν βίον ὅλον διάγουσι, μηδὲ τοῦ ἀέρος διοχλοῦντος αὐτοὺς εἰς περιβολὴν ἐλθεῖν.

Πολλῷ δέ φησι τοὺς Ἰνδῶν τῶν ἐν τῇ Αἰθιοπίᾳ σοφῶν προέχειν, ὅτι τέ φησι πρὸς ἀκτῖνα οἰκοῦντες ἡλίου μᾶλλόν εἰσι τὴν διάνοιαν ὀξεῖς καὶ καθαροί, καὶ ὅτι καὶ χρόνῳ προήκοντες.

Τῷ μέντοι Ἀπολλωνίῳ οὐδὲν ὅλως φησὶ τελεσθῆναι οἷα ὁ μυθώδης αὐτῷ χαρίζεται λόγος· φιλόσοφον δέ τινα καὶ ἐγκρατῆ βίον ἀποσεμνύνει αὐτὸν βιοῦντα, ἅτε καὶ Πυθαγορικὴν ἐπιδεικνύμενον φιλοσοφίαν ἔν τε ἤθεσι καὶ ἐν δόγμασι. Τὸν δὲ θάνατον αὐτοῦ ἄδηλόν τε καὶ πολλοῖς διαφωνούμενον λέγει γενέσθαι, αὐτοῦ ἐκείνου τοῦτο σπουδάσαντος· καὶ γὰρ καὶ ζῶντα ἐπιλέγειν ὡς δεῖ τὸν σοφὸν τοὺς πολλοὺς λαθόντα βιῶναι, εἰ δὲ μή, κἂν γοῦν ἀποβιῶναι λαθόντα· τάφον δὲ αὐτοῦ μηδαμοῦ γῆς φησιν ἐγνῶσθαι.

Λέγει δὲ αὐτὸν μάλιστα χρημάτων κρείττω  γενέσθαι, ὡς καὶ τὴν κτῆσιν αὐτοῦ τῷ τε ἰδίῳ ἀδελφῷ καὶ ἑτέροις καταλιπεῖν καὶ παρὰ μηδενὸς τῶν ὑπ´ ἐξουσίαις, καίτοι πολλὰ ἀξιούντων, πεισθῆναι λαβεῖν  χρήματα. Φησὶν αὐτὸν τὸν ἐν Ἐφέσῳ λοιμὸν καὶ προϊδεῖν καὶ γεγονότα παῦσαι. Καὶ λέοντα δὲ ἰδεῖν, καὶ εἰπεῖν ὡς ἡ τοῦ Ἀμάσιδος τοῦ Αἰγυπτίων βασιλέως ψυχὴ ἐν τῷ θηρίῳ εἴη, ὑπέχουσα δίκην τῶν βεβιωμένων· καὶ Ἔμπουσαν ἐλέγξαι ἐν ὑποκρίσει ἑταίρας ἐρᾶν Μενίππου προσποιουμένην· καὶ κόρην ἐν Ῥώμῃ ἄρτι τεθνάναι δοκοῦσαν ἐπαναστρέψαι τῷ βίῳ· καὶ λῦσαι τὸ σκέλος ἐν τῷ δεσμωτηρίῳ ὄντα δεδεμένον· καὶ ἀπολογήσασθαι μὲν πρὸς Δομιτιανὸν ὑπέρ τε αὑτοῦ καὶ Νερούα, ὃς μετὰ Δομιτιανὸν Ῥωμαίων ἐβασίλευσεν, ἀφανισθῆναι δὲ μετὰ τὴν ἀπολογίαν τοῦ δικαστηρίου 7καὶ πρὸς Δημήτριον καὶ Δάμιν, οὕτω καὶ συνθέμενον αὐτοῖς, παραγενέσθαι, οὐ διὰ χρόνου, παραυτίκα δέ, καίτοι ὁδὸν ἡμερῶν τινων διεστηκότας.

Ταῦτα μὲν περὶ αὐτοῦ ἀναπλάττει, οὐ μέντοι γε ὡς εἴη τελεστής, εἴ τινα διετελέσατο τῶν ἐνίοις διαθρυλλουμένων ὑπ´ αὐτοῦ πεποιῆσθαι τελεσμάτων· φιλοσοφίᾳ δὲ καὶ βίου καθαρότητι, καὶ ἅπερ αὐτὸς ἔφησεν, ἐκεῖνον εἰσάγει διαπεπράχθαι· ἀπεχθάνεσθαι δὲ μᾶλλον μάγοις καὶ φαρμακοῖς, μὴ ὅτι γε αὐτὸν τῇ μάγῳ προσανακεῖσθαι τέχνῃ.

Περὶ δὲ τῶν Ἰνδῶν οὗτος τὰ πάντα παραλογώτατα καὶ ἀπιστότατα διαρραψῳδεῖ· πίθους γὰρ αὐτοῖς πλήρεις ὄμβρων καὶ ἀνέμων δοὺς ὕειν τὴν χώραν ἀνομβρίας ἐπεχούσης ἐξικμάζειν τε αὖ καταρρηγνυμένων ὄμβρων ταῖς ἐκ πίθων ἀνὰ μέρος χορηγίαις κυρίους ἐκάθισε,  παραπλήσια τούτοις ἀνοίας μεστὰ καὶ ἕτερα πλεῖστα τερατευσάμενος. Ἐν ὀκτὼ δὲ λόγοις ἡ πᾶσα αὐτῷ τῆς ματαιοπονίας σπουδὴ κατηνάλωται.

J’ai lu les huit livres de la Vie d'Apollonius de Tyane par Philostrate (1) de Tyr (2).

Son style est clair, agréable, concis, et plein de charme, en raison de son penchant pour les archaïsmes et les nouvelles constructions.

Il nous dit qu’Apollonius rendit visite aux Indiens, qu’il nomme Brahmanes, et dont il a appris beaucoup de leur sagesse divine. Il a également rendu visite aux sages de l’Ethiopie, qu’il appelle Gymni (3), car ils passent toute leur vie nue et ne portent jamais de vêtements, même dans les temps extrêmes.

Mais il déclare que les sages de l'Inde sont de loin supérieurs à ceux de l’Ethiopie, car ils sont plus âgés dans le temps et leur intellect est plus pur et plus vif, en raison de leur vie proche des rayons du soleil.

Il ne prétend pas, cependant, affirmer qu’Apollonius a fait des merveilles telles que la légende lui en attri-bue ; il le vante simplement de mener une vie philosophique et tempérée, dans laquelle il expose l'enseigne-ment de Pythagore, tant dans les manières et la doctrine. Divers comptes rendus sont donnés de sa mort, dont les circonstances sont obscures, comme il l'a lui-même souhaité ; car pendant sa vie, il avait l'habitude de dire que l'homme sage devrait tenir sa vie secrète pour les autres, ou, si il ne le pouvait pas, devait au moins maintenir sa mort secrète (4). Le lieu de sa sépulture est inconnu.

Philostrate dit qu’Apollonius avait un grand mépris pour les richesses, il renonça à tout ce qu'il possédait pour son frère et pour d'autres, et ceux qui furent au pouvoir (5) ne purent jamais le persuader d'accepter de l'ar-gent, bien qu'ils insistassent auprès de lui comme il le méritait. Il affirme qu’il fit une prévision, longtemps à l’avance, de la famine d’Ephèse et la stoppa après qu'elle ait éclatée. Il vit une fois un certain lion, qu’il déclarât être l'âme d'Amasis, le roi des Egyptiens (6), entrée dans le corps de l'animal comme châtiment pour les crimes commis durant sa vie. Il révéla également un Empusa (7) qui, sous l’apparence d'une courtisane, fit semblant d'être amoureuse de Ménippe (8). Il rappela à la vie une jeune fille romaine qui apparemment venait de mourir, et libéra ses membres de ses fers, qui la liaient en prison. Avant Domitien il défendit lui-même et loua Nerva (le successeur de Domitien), après quoi il disparut de la cour, et rejoignit Démétrius (9) et Damis (10) comme cela avait été prévu de longue date, quelques instants après et non pas longtemps, bien que le voyage fut de plusieurs jours.

Telles sont les fictions de Philostrate concernant Apollonius. Il nie, toutefois, qu'il ait été un faiseur de merveilles, en affirmant que les quelques merveilles qui lui sont communément attribuées, furent le résultat de sa philosophie et la pureté de sa vie. Au contraire, il fut l'ennemi des magiciens et des sorciers et ne se consacra absolument pas à la magie.

Tout ce qu'il a écrit sur les Indiens est un tissu de déclarations absurdes et incroyables. Il affirme qu'ils ont certains pots plein de pluies et de vents, avec lesquels lors de sécheresses, ils peuvent irriguer le pays, et en ou-tre ôter la moisissure, une fois la pluie tombée, puisque dans ces fûts, ils ont les moyens de contrôler tant le vent que la pluie en remplacement d'approvisionnement. Il raconte des histoires semblables, tout aussi stupides et ridicules, et ces huit livres sont beaucoup d'études et de travail perdu.

 

[1]  Il y avait trois sophistes de ce nom appartenant à une famille Lemnienne: (1) qui vécut au deuxième siècle, (2) le fils de (1), qui vécut d'abord à Athènes, puis à Rome et à l’époque de Philippe l’Arabe (244-249), (3), le neveu de (1), qui vécut à l'époque de Caracal-la et d’Eliogabale. La vie d'Apollonius est de (2), Philostrate Flavius, qui a écrit selon la volonté de l'impératrice Julia Domna, l'épouse de Septime Sévère Septimius (mort en 217).

[2] Le nom de famille Tyrius est probablement dû à une confusion ou Photius l’a identifié à tort avec le lexicographe Philostrate de Tyr (Cod. CL.).

[3] Les nus, les Gymnosophistes.

[4] La maxime Epicurienne, Λάθε βιώσας, εἰ δὲ μή, Λάθε ἀποθανών.

[5] Ou « ceux qui ont de grands moyens ».

[6] 570-526.

[7] Une sorte de lutin ou de goule, censé dévorer des êtres humains.

[8] De Lycie. Peut-être le cynique qui vivait au temps de Lucien.

[9] Philosophe cynique de Sunium, qui enseignait à Rome, sous les empereurs Caius, Néron, et Vespasien. On dit qu’il a rencontré à Apollonius à Athènes, mais compte tenu du fait que son point de vue philosophique était opposé à celui d’Apollonius, le compte rendu de leur intimité est probablement faux. Démétrius a dû quitter Rome à cause de la liberté avec laquelle il a attaqué l'empereur et les autorités.

{10] De Ninive, élève et compagnon d’Apollonius, auteur réputé de la vie qui a constitué la base du roman de Philostrate. On dit qu’il avait remis le manuscrit à l'impératrice Julia Domna, qui ordonna à Philostrate de l'éditer.