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table des matières de PAUSANIAS

 

 

PAUSANIAS

 

LIVRE VI.

 

ÉLIDE 2.

 

 

texte grec

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DESCRIPTION DE LA GRÈCE, PAR PAUSANIAS.

LIVRE VI.

ÉLIDE.

CHAPITRE I.

Statues des Athlètes qui ont remporté des prix, et d'autres particuliers.

Après avoir décrit les offrandes, il me reste à parler des chevaux qui ont remporté des prix, des athlètes, et même de ceux qui ne l'étaient pas. On n'a pas érigé des statues à tous ceux qui ont remporté la victoire à Olympie; il y a même des gens qui se sont distingués, soit dans les jeux, soit de toute autre manière, qui n'ont cependant point eu de statues, et il n'entre pas dans mon plan d'en parler, puisque je n'ai pas entrepris de faire le catalogue des athlètes qui ont remporté des victoires aux jeux olympiques, mais seulement la description des statues élevées par motif de religion ou pour honorer quelqu'un. Je ne parlerai même pas de tous ceux qui ont eu des statues, sachant combien il y en a qui n'ont dû la couronne qu'à un effet surprenant du hasard et non à leur propre force.
Je me contenterai donc de rappeler ceux qui se sont plus particulièrement fait remarquer et dont les statues ont quelque mérite qui les distingue.
Il y a à la droite du temple de Junon la statue d'un lutteur Éléen, Symmaque fils d'Eschyle, et tout auprès Néolaïdas fils de Proxène, de Phénée en Arcadie, qui remporta le prix du pugilat parmi les enfants; ensuite Archidamus, fils de Xénius, aussi Éléen, qui remporta également parmi les enfants le prix de la lutte. Ces trois statues sont l'ouvrage d'Alypus de Sicyone, élève de Naucydes d'Argos. L'inscription qui est sur la statue de Cléogène, fils de Silène nous apprend qu'il était aussi de l'Élide, et qu'il avait remporté le prix de la course à cheval avec un cheval de son propre haras. Tout auprès de la statue de Cléogène sont celles de Dinolochus, de Pyrrhus et de Troïlus, fils d'Alcinus, tous trois Éléens; leurs victoires cependant ne furent pas du même genre, car il arriva à Pyrrhus de remporter le prix de la course du char et d'être Hellanodice en même temps. Troïlus fut vainqueur à la course des chars attelés de deux chevaux d'âge fait, et à celle des chars attelés de poulains. Il remporta ces deux victoires en la cent deuxième olympiade. Ce fut à l'occasion de la victoire de Pyrrhus que les Éléens ordonnèrent par une loi, qu'à l'avenir aucun Hellanodice ne pourrait faire concourir ses chevaux pour les prix. Sa statue est l'ouvrage de Lysippe. Quant à Dinolochus, il était encore enfant lorsque sa mère eut un songe où il lui sembla qu'elle tenait son fils couronné entre ses bras; d'après ce songe Dinolochus s'exerça pour les jeux, et il remporta le prix de la course parmi les enfants. Sa statue est de Cléon de Sicyone. En parlant des rois de Sparte, j'ai déjà fait mention de Cynisca, fille d'Archidamus, de sa famille et de ses victoires olympiques. On voit à Olympie, auprès de la statue de Troïlus, un soubassement de pierre sur lequel il y a un char attelé, le conducteur et la statue de Cynisca elle-même, le tout de la main d'Apelle. Il y a aussi des inscriptions en l'honneur de Cynisca. On voit ensuite auprès de Cynisca différentes statues de Lacédémoniens qui ont remporté la victoire en faisant courir leurs chevaux. Anaxandrus fut le premier couronné pour la course des chars ; l'inscription qui est sur sa statue nous apprend que son aïeul paternel avait été couronné pour le pentathlon. Anaxandrus semble adresser des prières au dieu. Polyclès, qu'on surnommait Polychalcos, a aussi été vainqueur à la course des chars à quatre chevaux; sa statue le représente tenant de la main droite une bandelette, il a auprès de lui deux enfants, dont l'un tient une toupie et l'autre lui demande la bandelette. L'inscription nous apprend que Polyclès avait remporté avec ses chevaux d'autres victoires à Pythos, dans l'Isthme et à Némée.

CHAPITRE II.

Statues des Lacédémoniens possesseurs de chevaux. Statues du devin Thrasybule. Divination par les entrailles des chiens. Origine des devins nommés Iamides. Diverses autres Statues. Ce qui arriva aux Messéniens relativement aux jeux Olympiques.

La pancratiaste qu'on voit ensuite est de la main de Lysippe, il se nommait Xénargès de Philandride; il est le premier des habitants de Strate et même de l'Acarnanie qui ait remporté la victoire au pancrace. Après l'expédition du roi des Mèdes dans la Grèce, les Lacédémoniens furent de tous les Grecs ceux qui s'adonnèrent le plus à élever des chevaux; car outre ceux dont j'ai déjà parlé, en voici d'autres dont les statues sont après celle de l'athlète Acarnanien ; savoir : Xénargès, Lycinus, Arcésilas et Lichas son fils. Xénargès fut aussi couronné à Delphes, à Argos et à Corinthe. Lycinus ayant amené des poulains à Olympie, et l'un deux n'ayant pas été admis comme poulain, il les fit courir avec les chevaux faits et remporta la victoire; il plaça deux statues à Olympie, toutes deux de Myron d'Athènes. Arcésilas remporta deux victoires à Olympie ; mais les Lacédémoniens étant exclus des jeux, lorsque Lichas son fils s'y présenta, il mit son char sous le nom du peuple Thébain, et quand il eut remporté la victoire, il orna lui-même son conducteur de bandelettes, en punition de quoi les Hellanodices le firent frapper de verges, et ce fut à cause de ce Lichas que les Lacédémoniens, commandés par Agis, firent leur expédition contre l'Élide, et qu'il y eut un combat dans l'Altis même: lorsque la paix fut faite, il y plaça sa statue; ce n'est cependant pas lui, mais le peuple Thébain que les Éléens ont inscrit sur le registre qu'ils tiennent des victoires olympiques. Près de la statue de Lichas est celle du devin Trasybule, Éléen, de la famille des lamides, qui employait son savoir en faveur des Mantinéens contre les Lacédémoniens et leur roi Agis, fils d'Eudamidas, ce que j'expliquerai plus au long dans mon livre sur les Arcadiens. Thrasybule est représenté avec un lézard qui lui grimpe sur l'épaule droite, et il a devant lui un chien qu'on vient de sacrifier qui est coupé en deux, et dont on voit le foie. Il est certain que la divination par l'inspection des entrailles des chevaux, des agneaux ou des veaux, est depuis longtemps en usage parmi les hommes; les Cypriens ont imaginé de chercher l'avenir dans, celles des porcs, mais nulle part on ne s'est servi de chiens pour cela, et il paraît que Trasybule s'était créé un genre particulier de divination par le moyen des entrailles de ces animaux. Les devins connus sous le nom d'Iamides, descendent d'Iamus, et Pindare dit dans une ode qu'il était fils d'Apollon, de qui il avait reçu le don de prédire l'avenir. Près de la statue de Thrasybule sont celles de Timosthène, Éléen, qui remporta parmi les enfants le prix de la course du  stade, et d'Antipater Milésien, fils de Clinopater, qui remporta celui du pugilat dans la même classe. Des Syracusains qui étaient venus à Olympie de la part de Denys pour offrir des sacrifices, gagnèrent par argent le père d'Antipater, pour qu'il fit proclamer son fils comme Syracusain; mais Antipater ne tenant pas compte des dons du tyran, s'annonça lui-même comme Milésien, et fit inscrire sur sa statue qu'il était de Milet, et le premier des Ioniens qui eût placé sa statue à Olympie : elle est l'ouvrage de Polyclitus. Celle de Démosthène est l'ouvrage d'Eutychidès de Sicyone, élève de Lysippe. Cet Eutychidès a aussi fait pour les Syriens des bords de l'Oronte une statue de la Fortune qui est dans la plus grande vénération dans le pays. On voit dans l'Altis, auprès de la statue de Démosthène, celle de Timon et celle d'Æsypus son fils; l'enfant est assis sur un cheval. Il remporta en effet le prix de la course à cheval et Timon celui de la course des chars. Ces deux statues sont de Timon de Sicyone, qui a aussi fait pour les Éléens le trophée érigé dans l'Altis pour leur victoire sur les Lacédémoniens. Quant au Samien qui fut vainqueur au pugilat, l'inscription porte qu'elle lui a été érigée par Mycon, son maître de gymnastique, et que les Samiens sont les meilleurs athlètes de tous les Ioniens, ceux qui combattent le mieux sur mer; mais elle ne nous apprend rien sur l'athlète lui-même. On voit aussi la statue de Damiscus de Messène, qui remporta à douze ans une victoire aux jeux olympiques. Une des choses qui m'étonnent, c'est que dès l'instant que les Messéniens eurent quitté le Péloponnèse, la fortune sembla les abandonner dans les jeux olympiques : à l'exception en effet de Léontiscus et de Symmachus, tous deux de Messène sur le Détroit, je ne vois aucun Messénien, soit de la Sicile, soit de Naupacte, qui ait remporté de victoire à Olympie, et même les Siciliens disent que les deux dont je viens de parler descendaient des anciens habitants de Zancle, et non des Messéniens, car l'année qui suivit la fondation de Messène, les Éléens célébrant les jeux olympiques, ce Damiscus dont il est ici question, obtint le prix de la course parmi les enfants, et il remporta dans la suite cinq autres victoires, soit à Némée, soit dans lIsthme.

CHAPITRE III.

Statues d'Athlètes. Expédition des Éléens et des Thébains contre Sicyone. Statue de Cratinus le plus bel homme de son temps. Diverses autres Statues. Fondation de la ville de Caulonia en Italie et sa destruction. Statue de Lysandre.

Tout auprès de Damiscus est une statue d'un inconnu, car on ne dit pas son nom ; c'est une offrande de Ptolémée, fils de Lagus, qui prend dans l'inscription le nom de Macédonien, quoiqu'il fût roi d'Égypte. l'inscription qui est sur la statue de Cheréas de Sicyone, nous apprend qu'il avait remporté le prix du pugilat parmi les enfants, qu'il était fils de Chærémon, et que sa statue est l'ouvrage d'Astérion, fils d'Eschyle. Après Chæréas vient Sophius, enfant Messénien, et Stomius Éléen, homme fait. Le premier fut vainqueur à la course parmi les enfants, et Stomius remporta trois victoires de pentathle à Olympie et à Némée : l'inscription qui est sur sa statue ajoute que, commandant la cavalerie éléenne, il fit ériger un trophée, et qu'il tua le général ennemi qui l'avait provoqué en combat singulier : les Éléens disent que ce général était de Sicyone, et qu'il commandait les troupes de cette ville, contre laquelle, par amitié pour les Thébains, ils avaient entrepris une expédition avec quelques forces de la Béotie. Il paraît que cette expédition des Éléens et des Thébains contre Sicyone eut lieu après la défaite des Lacédémoniens à Leuctres. Vous voyez ensuite la statue de Labax, fils d'Euphron, de Léprée, ville des Éléens, qui fut vainqueur au pugilat, et celle d'Aristodème, fils de Thrasis, de l'Élide même, et vainqueur à la lutte ; il remporta aussi deux victoires à Pythos sa statue est l'ouvrage d'Aristodème, élève de Dédale de Sicyone, et fils de Patrocle. La statue d'Hippon Éléen, qui fut vainqueur an pugilat parmi les enfants, a été faite par Démocrite de Sicyone, qui tenait son talent, à la cinquième main, de Critias d'Athènes ; en effet, Ptolichus de Corcyre avait appris de Critias lui-même; Amphion était élève de Ptolichus ; Pison de Calaurée avait été formé par Amphion, et Démocrite avait étudié son art sous Pison. Cratinus d'Égine, dans l'Achaïe, était en même temps le plus bel homme de son temps, et celui qui luttait avec le plus d'art. Ayant remporté la victoire à la lutte parmi les enfants, les Éléens lui permirent de faire aussi ériger une statue à son maître de gymnastique, et elle fut faite par Cantharus de Sicyone, fils d'Alexis et élève d'Eutychidès. La statue d'Eupolémus Éléen, est de Dédale de Sicyone, et l'inscription qui est dessus nous apprend qu'il fut vainqueur à Olympie à la course du stade parmi les hommes faits ; qu'il remporta deux fois le prix du pentathle aux jeux pythiques, et une foin aux jeux néméens. On raconte au sujet de cet Eupolémus, que des trois Hellanodices qui étaient à l'extrémité de la carrière, il y en eut deux qui lui adjugèrent le prix, et que le troisième prétendit qu'il appartenait à Léon d'Ambracie : ce Léon accusa devant le sénat olympique les deux autres Hellanodices de s'être laissés corrompre par argent; mais le sénat donna la victoire à Eupolémus. Les Achéens, d'après un oracle de Delphes érigèrent en la quatre-vingtième olympiade une statue à Œbotas; il avait remporté dans la sixième le prix de la course du stade, et d'après cela comment se peut-il faire qu'il ait combattu à Platée avec les Grecs? car la défaite de Mardonius et des Mèdes eut lieu dans la soixante-dixième olympiade. Je suis forcé de rapporter tout ce que disent les Grecs, mais on peut se dispenser de le croire. Toutes les autres choses qu'on raconte sur Œbotas trouveront leur place dans la description de l'Achaïe. C'est Nicodamus qui a fait la statue d'Antiochus. Cet Antiochus était de Léprée, il remporta un prix de pancrace à Olympie parmi les hommes faits, deux aux jeux isthmiques et autant aux jeux néméens; car les habitants de Léprée n'étaient point retenus par cette terreur qui empêchait les Éléens même à l'époque où vivait Hysmon, de se trouver aux jeux isthmiques. La statue de cet Hysmon est près de celle d'Antiochus : il s'était exercé au pentathle, et il remporta une victoire à Olympie et une aux jeux néméens; il est évident qu'il s'abstint des jeux isthmiques par la raison commune à tous les Éléens. On dit que cet Hysmon étant encore enfant eut les nerfs attaqués d'un rhumatisme, et qu'alors il s'exerça au pentathle pour se fortifier et se guérir par le travail; cet apprentissage le conduisit à remporter ces victoires si célèbres. Sa statue est l'ouvrage !de Cléon, et il tient des haltères à l'ancienne mode. Nicostratus, fils de Xénoclide, d'Héraca en Arcadie, qui a remporté le prix de la lutte parmi les enfants, est tout auprès d'Hysmon; sa statue est l'ouvrage de Pantias qui sortait de l'école d'Aristocle, de Sicyone, dont la doctrine avait passé par sept maîtres différents avant de lui parvenir. Dicon, fils de Callimbrotus, remporta cinq prix de la course aux jeux pythiques, trois aux jeux isthmiques, quatre à Némée, et à Olympie un parmi les enfants, et deux parmi les hommes faits : il a à Olympie autant de statues qu'il a remporté de victoires. Lorsqu'il obtint la première, étant enfant, il se fit proclamer Cauloniate, comme il l'était effectivement; ayant ensuite été gagné par des présents il se fit annoncer comme Syracusain. Caulonia était une ville d'Italie qui avait été fondée par les Achéens, et Typhon d'Ægium en était le fondateur; mais lorsque la guerre éclata entre Pyrrhus, fils d'Æacide, et les Tarentins d'un côté et les Romains de l'autre, beaucoup de villes d'Ionie furent détruites, les unes par les Romains, les autres par les Épirotes, et Caulonia fut de ce nombre ; elle fut prise et entièrement ruinée par les Campaniens qui formaient la majeure partie des alliés des Romains. Vous voyez auprès de Dicon la statue de Xénophon, fils de Ménéphylus, pancratiaste d'Ægium, dans l'Achaïe, et de Pyrilampès, Éphésien, vainqueur à la course du dolichus. La statue du premier est l'ouvrage d'Olympus; celle de Pyrilampès est d'un sculpteur du même nom que lui, qui n'était cependant pas de Sicyone, mais de Messène, au pied du mont Ithome. Les Samiens ont placé à Olympie la statue de Lysandre, Spartiate, fils d'Aristocritus ; c'est ce qu'annonce la première des inscriptions, qui porte : J'ai été placée dans la célèbre enceinte de Jupiter (Zeus), le souverain des dieux, par le peuple de Samos. L'inscription suivante est un éloge de Lysandre : En donnant par tes actions une gloire immortelle à ta patrie et à Aristocritus ton père, tu as acquis toi-même, Lysandre, la réputation d'un homme vertueux. On voit par-là que les Samiens et les autres Ioniens, suivant le proverbe des Ioniens eux-mêmes, blanchissaient les deux murailles; car tant qu'Alcibiade fut en force dans les environs de l'Ionie avec les vaisseaux d'Athènes, il était courtisé par la plupart des Ioniens, qui lui érigèrent même une statue en bronze auprès de la Junon de Samos, et lorsque les vaisseaux des Athéniens eurent été pris à Ægos-potamos, les Samiens élevèrent à Olympie une statue à Lysandre, et les Éphésiens placèrent dans le temple de Diane, non seulement Lysandre, mais encore Étéonicus, Pharas et d'autres Spartiates qui étaient très peu connus dans la Grèce. Les affaires ayant de nouveau changé de face, et Conon ayant remporté une victoire navale dans les environs de Gnide et du mont Dorien, les Ioniens changèrent encore, et on peut voir à Samos, dans le temple de Junon, et à Éphèse, dans celui de la déesse d'Éphèse, les statues en bronze de Conon et de Timothée; au reste cela a été ainsi de tout temps, et tous les hommes, ainsi que les Ioniens, s'attachent toujours à celui qui est le plus fort.

CHAPITRE IV.

Statues d'Athlètes. Sostrate surnommé Acrochersite, et Lédontiscus. Les Éléens ne comptent point la cent quatrième olympiade. Statue de Chilon de Patras. Celle d'Aristote de Stagire. Celle d'Archidamus roi des Lacédémoniens. Celle d'Ergotélès de l'île de Crète.

Auprès de la statue de Lysandre est celle d'un Éphésien nommé Athénée, qui fut vainqueur au pugilat parmi les enfants; ensuite vient celle de Sostrate, pancratiaste Sicyonien, qu'on avait surnommé Acrochersite, parce que prenant l'extrémité des mains de ses antagonistes, il les serrait si fort qu'il les obligeait à s'avouer vaincus. Il remporta douze fois le prix, tant aux jeux néméens qu'aux jeux isthmiques, trois fois à Olympie et deux fois à Pythos. Les Éléens n'ont pas écrit sur leurs registres la cent quatrième olympiade, qui fut celle où Sostrate remporta sa première victoire, parce que les jeux ne furent point célébrés par eux, mais par les Pisæens et les Arcadiens qui s'étaient emparés d'Olympie. Près de la statue de Sostrate est celle d'un lutteur nommé Léontiscus; il était Sicilien d'origine, né à Messène sur le Détroit, il fut couronné par les Amphictyons de Delphes et par les Éléens. On dit qu'il employait à la lutte le même moyen que Sostrate le Sicyonien au pancrace; qu'il ne savait pas terrasser ceux avec qui il luttait, et qu'il leur faisait céder la victoire en leur serrant les doigts. Sa statue est de Pythagore de Rhégium, l'un des meilleurs sculpteurs connus, élève de Cléarque, qui était aussi lui-même de Rhégium, et qui avait eu pour maître Euchirus de Corinthe; ce dernier avait appris son art de Syadras et de Chartas, Spartiates. Je ne dois pas oublier un jeune garçon dont la tête est ceinte de bandelettes, ne fut-ce qu'à cause de Phidias et de sa supériorité dans l'art de la sculpture ; du reste nous ne savons pas qui il a voulu représenter. Satyras, fils de Lysianax et de la famille des Iamides, remporta cinq victoires au pugilat dans les jeux néméens, deux à Pythos et deux à Olympie : sa statue est l'ouvrage de Silamon. Un autre sculpteur Athénien, nommé Polyclès, élève de Stadieus, aussi Athénien, a fait la statue d'Amyntas, fils d'Hellanicus, Éphésien, et pancratiaste parmi les enfants. Chilon, Achéen de Patras, remporta à la lutte deux victoires à Olympie, une à Delphes, quatre dans l'Isthme et trois à Némée : il perdit la vie dans une bataille, et les Achéens lui donnèrent la sépulture aux dépens de l'état; j'en ai pour preuve l'inscription suivante qu'on voit à Olympie : Chilon de Patras a vaincu ses antagonistes à la lutte, deux fois à Olympie et à Pytlios, trois fois à Némée, et quatre fois dans l'Isthme; il perdit la vie à la guerre, et mérita par sa valeur que le peuple Achéen lui fit donner la sépulture. C'est-là tout ce que porte l'inscription. Comme sa statue est de Lysippe, on peut conjecturer que la bataille où Chilon perdit la vie est celle de Chéronée, à laquelle il put se trouver avec tous ses concitoyens; ou peut-être fut-il entraîné par sa valeur et son audace à aller seul de tous les Achéens combattre à Lamie dans la Thessalie contre Antipater et les Macédoniens. Les deux statues qu'on voit après celle de Chilon sont celles d'un nominé Molpion, qui fut couronné par les Éléens, à ce que porte l'inscription ; l'autre qui n'a pas d'inscription représente, à ce qu'on dit, Aristote de Stagire, ville de Thrace : elle lui a été érigée ou par quelqu'un de ses disciples ou par quelque militaire, car Aristote eut beaucoup de crédit sur Antipater, et il en avait eu auparavant beaucoup sur Alexandre. Sodamas, dont la statue se présente ensuite, était d'Assos, ville de la Troade, située au pied du mont Ida; il fut le premier Éolien de cette contrée qui remporta à Olympie le prix de la course du stade parmi les enfants. Auprès de sa statue est celle d'Archidamus, fils d'Agésilas et roi des Lacédémoniens ; il est le premier, que je sache, à qui les Lacédémoniens aient érigé une statue hors de leur pays. Ils envoyèrent cette statue à Olympie, entre autres raisons, à ce que je crois, à cause de sa mort, parce qu'ayant perdu la vie dans un pays barbare, il était le seul roi de Sparte qui eut été privé des honneurs du tombeau; c'est, au reste, ce que j'ai expliqué plus au long dans l'endroit où je parle des rois de Sparte. Évanthe de Cyzique, qui vient après, a remporté trois victoires au pugilat, une à Olympie, parmi les hommes faits, et parmi les enfants une à Némée et une dans l'Isthme. Il y a auprès de la statue d'Évanthe celle d'un homme qui entretenait des chevaux pour les courses, et un char sur lequel est montée une jeune fille; cet homme se nommait Lampus, et il avait pour patrie la ville qui a été fondée la dernière dans la Macédoine, celle qui a pris le nom de Philippe, fils d'Amyntas, son fondateur. C'est Polyclète qui a fait la statue de Cyniscus de Mantinée, qui remporta parmi les enfants le prix du pugilat. Ergotélès, fils de Philénor, qui remporta à Olympie deux victoires de la course du dolichus, et autant dans chacun des autres jeux de Pythos, de l'Isthme et de Némée, n'était point natif d'Himère, comme le porte l'inscription pli est sur sa statue, mais de Gnosse, dans l'île de Crète ; chassé de cette ville par une faction, il se retira à Himère, où on lui accorda les droits de citoyen; on lui décerna aussi beaucoup d'autres honneurs : il était donc naturel qu'il se fit proclamer Himéréen dans les jeux publics.

CHAPITRE V.

Statue de Polydamas de Scotusse, l'homme le plus grand de son temps. Désastre arrivé aux habitants de Scotusse. Combats célèbre de Polydamas ; sa mort.

La statue qu'on voit sur un piédestal très élevé, et qui a été faite par Lysippe, est celle de l'homme de la plus haute stature qu'on ait vu depuis le temps des héros et la race d'hommes qui les a précédés, si toutefois il y en a eu avant eux ; certainement ce Polydamas, fils de Nicias, a été l'homme le plus grand de l'âge où nous vivons. Scotusse, sa patrie, n'est plus habitée maintenant; en effet, Alexandre, tyran de Phères, s'empara de cette ville, quoique en paix avec elle, et y étant entré au moment où les habitants étaient tous réunis dans le théâtre pour une assemblée, il les fit entourer par ses troupes légères et ses archers, et les fit tuer à coups de flèches; il fit ensuite massacrer tous ceux qui étaient au-dessus de l'âge de puberté, et vendit les femmes et les enfants pour avoir de quoi payer les troupes étrangères qu'il avait à sa solde. Ce désastre des Scotussiens arriva dans la seconde année de la cent deuxième olympiade, où Dumon, de Thurium, remporta pour la seconde fois le prix ; Phrasiclide était alors archonte à Athènes. Il n'échappa qu'un petit nombre d'habitants à ce massacre, et ils abandonnèrent de nouveau leur ville, se trouvant trop faibles pour la défendre, lorsque la fortune eut fait succomber pour la seconde fois tous les Grecs dans leur guerre contre les Macédoniens. D'autres athlètes ont aussi remporté des victoires célèbres au pancrace, mais outre celles-là, en voici d'un autre genre que Polydamas a remportées. La partie montueuse de la Thrace qui entoure le fleuve Nestus, à travers le pays des Abdéritains, produit des bêtes féroces, et particulièrement des lions. Ces animaux se jetèrent sur l'armée de Xerxès, et déchirèrent les chameaux qui portaient les vivres. Les lions s'écartent souvent jusques dans les pays adjacents à l'Olympe (on sait que cette montagne regarde d'un côté la Macédoine et de l'autre la Thessalie et le fleuve Pénée); c'est dans ces environs de l'Olympe que Polydamas, sans aucune arme, tua un lion grand et vigoureux; il se porta à cette action téméraire par envie de rivaliser avec Hercule, qui avait dompté le lion de Némée, selon la tradition. Voici une autre preuve non moins étonnante de la force de Polydamas. En entrant dans un troupeau de bœufs, il saisit le taureau le plus grand et le plus farouche par l'un des pieds de derrière, et le tenant par la corne, il ne le lâcha pas, quelques sauts et quelques efforts qu'il fît; de sorte que le taureau ne parvint enfin à se dégager qu'en employant toutes ses forces, et en laissant la corne de son pied dans la main de Polydamas. On dit que celui-ci arrêtait un char, malgré tous les efforts du conducteur pour pousser ses chevaux en avant, et n'avait besoin que de saisir d'une main le derrière du char. Darius, fils naturel d'Artaxerxés, qui, secondé par les Perses, avait détrôné Sogdianus, fils légitime d'Artaxerxés, et s'était fait roi à sa place, ayant entendu parler des actions de Polydamas, lui envoya des gens qui l'engagèrent par des promesses à venir à Suses, et à paraître devant lui. A son arrivée, Polydamas ayant été défié par trois de ces Perses qu'on nomme les immortels, il les tua tous trois, quoiqu'ils l'eussent attaqué ensemble. De toutes les actions dont je viens de parler, les unes sont sculptées sur la base de sa statue à Olympie, les autres sont rapportées dans l'inscription. Ce qui a été prédit par Homère à ceux qui comptent trop sur leurs forces, devait arriver à Polydamas. Étant entré au moment de la grande chaleur avec quelques-uns de ses compagnons de table dans une caverne, le malheur voulut que la voûte s'entrouvrit : il était évident qu'elle ne tarderait point à tomber ; dès qu'on s'aperçut du danger dont on était menacé, tous prirent la fuite, hors Polydamas qui voulut rester ; il étendit les mains comme pour soutenir la caverne, persuadé que le poids de la montagne ne serait pas au-dessus de ses forces; et ce fut là qu'il trouva la fin de ses jours.

CHAPITRE VI.

Autres statues d'athlètes. Euthymus, athlète célèbre au pugilat. Son combat contre un Génie à Témesse.

Vous voyez ensuite à Olympie, près de la statue de Polydamas, celles de trois athlètes, deux de l'Arcadie et le troisième Athénien. Le premier est Protolaüs, Mantinéen, fils de Dialcès, qui vainquit les enfants au pugilat; sa statue est de Pythagore de Rhégium. Celle de Narcydas, fils de Damarétus de Phigalie, et vainqueur à la lutte parmi les hommes faits, est de Dédale de Sicyone; celle de Callias d'Athènes, pancratiaste, est de Micon, peintre Athénien. Nicodamus, de Mænale, a fait celle d'Androsthène, fils de Lochæus, aussi de Mænale, qui remporta deux victoires au pancrace parmi les hommes faits. On voit ensuite celle d'Euclès, fils de Callianax, Rhodien de naissance, et de la famille des Diagorides. Sa mère était fille de Diagoras; il remporta à Olympie le prix du pugilat parmi les hommes. Sa statue est l'ouvrage de Naucydès. Polyclétus d'Argos, non celui qui a fait la statue de Junon, mais l'élève de Naucydès, a fait Agénor, Thébain, qui fut vainqueur à la lutte parmi les enfants ; elle a été érigée par le peuple Phocéen, envers qui Théopompe, père d'Agénor, exerçait à Thèbes les droits de l'hospitalité. Nicodamus de Mænale a aussi fait la statue de Damoxénidas, du même pays, vainqueur au pugilat. On voit ensuite celle de Lastratidas, Éléen, qui, à Olympie, remporta parmi les enfants une victoire à la lutte, et en obtint aussi une à Némée parmi les enfants. Paraballon, son père, avait remporté le prix de la course du double stade; et ce fut lui qui, pour augmenter l'émulation parmi les athlètes, établit l'usage d'inscrire dans le gymnase d'Olympie les noms des vainqueurs. Voilà pour ce qui les concerne. Quant à ce qui regarde Enthymus, athlète célèbre au pugilat, je ne dois passer sous silence ni ses victoires ni les autres actions qui firent sa réputation. Il était né parmi ces Locriens d'Italie qui habitent le pays vers le promontoire Zéphyrium; Astyclès passait pour son père, mais on dit qu'il était fils du fleuve Cæcinus, qui sépare la Locride du pays de Rhégium, et qui donne lieu à une remarque étonnante au sujet des cigales; c'est que dans toute la Locride, jusqu'à ce fleuve, les cigales chantent de même que partout ailleurs, tandis que de l'autre côté, dans le pays de Rhégium, elles sont absolument muettes. On dit donc qu'Euthimus était fils de ce fleuve. Ayant remporté la victoire au pugilat en la soixante-quatorzième olympiade, il ne put pas obtenir le même succès dans l'olympiade suivante; car Théagène de Thase, qui voulait remporter dans les mêmes jeux le prix du pugilat et celui du pancrace, eut l'avantage sur Euthymus dans le premier de ces exercices; mais ses forces se trouvant épuisées par ce premier combat, il ne put pas remporter le prix du pancrace, et les Helladonices le condamnèrent à cause de cela à un talent d'amende envers le Dieu, et de plus à un talent de dédommagement envers Euthymus, parce qu'il semblait que c'était à dessein de lui nuire qu'il avait entrepris de combattre au pugilat ; c'est pourquoi ils le condamnèrent à lui payer une somme. L'olympiade suivante, Théagène paya l'amende à laquelle il avait été condamné envers le Dieu, et pour indemniser Euthymus, il ne se présenta pas au pugilat, dont Euthymus remporta le prix en cette olympiade et en la suivante. Sa statue est de Pythagore, et c'est un ouvrage de la plus grande beauté. Euthymus étant ensuite retourné en Italie combattit contre un génie, et voici comment cela se passa. On dit qu'Ulysse errant sur les mers après la prise de Troie, fut porté par les vents dans différentes villes d'Italie et de Sicile, et qu'il aborda ensuite à Témesse avec ses vaisseaux. Un de ses matelots s'y étant enivré viola une fille, et les gens du pays le lapidèrent en punition de cet attentat. Ulysse, sans faire attention à sa mort s'embarqua et partit; mais le génie de celui qui avait été lapidé se mit à tuer sans relâche les habitants de Témesse, n'épargnant aucun âge; ils étaient prêts à déserter l'Italie, lorsque la Pythie leur défendit de quitter Témesse. Elle leur ordonna d'apaiser le génie en lui consacrant une enceinte, lui bâtissant un temple, et lui offrant tous les ans pour femme la plus belle des filles de Témesse. Ayant exécuté tout ce que le Dieu leur avait ordonné, ils n'avaient plus rien autre chose à craindre de ce génie. Euthymus vint par hasard à Témesse à l'époque où se faisait l'offrande accoutumée ; il s'informa de ce qui se passait, et eut envie d'entrer dans le temple pour voir la fille qu'on offrait. A peine l'eut-il vue que d'abord la compassion, et ensuite l'amour s'emparèrent de lui; et la jeune fille lui ayant juré de l'épouser s'il parvenait à la délivrer, il s'arma, attendit ainsi l'arrivée du génie et le vainquit. Chassé de Témesse, le génie disparut en se plongeant dans la mer. Voilà comment Euthymus fit un mariage célèbre, et comment le pays fut pour toujours délivré de ce génie. Tai aussi appris au sujet d'Euthymus, qu'il parvint à la vieillesse la plus avancée, et que cherchant à éviter la mort, il disparut d'une autre manière du nombre des mortels. J'ai su d'un commerçant qui avait été par mer à Témesse, que cette ville était encore habitée. Tout cela, je rai appris par ouï-dire ; mais voici ce que j'ai vu. Un tableau que j'ai eu sous les yeux, copie d'une peinture très ancienne, représentait le jeune Sybaris, le fleuve Calabrus, la fontaine Calyce, la ville de Héra et celle de Témesse, ainsi que le génie qui Euthymus chassa. Il est fort noir de figure, vêtu d'une peau de loup, et d'un aspect très effrayant. Une inscription qui est sur le tableau lui donne le nom de Libas. Mais c'en est assez sur ce sujet.

CHAPITRE VII.

Statues de Diagoras de Rhodes et de sa famille. Histoire de Doriéus son fils. Statues d'autres athlètes.

Après la statue d'Euthymus, vous voyez celle de Pytharchus de Mantinée, qui remporta le prix de la course parmi les enfants, et celle de Charmidès, Éléen, qui fut vainqueur au pugilat dans la même classe. Après avoir vu ces statues, vous arrivez à celles des athlètes Rhodiens, Diagoras et toute sa famille; ils sont à la suite les uns des autres, et dans l'ordre suivant : d'abord Acusilas, qui remporta le prix du pugilat parmi les hommes; Doriéus, le plus jeune de tous, qui fut vainqueur au pancrace pendant trois olympiades de suite ; et Damagétus qui avait remporté avant lui le prix du pancrace. Ils étaient tous trois fils de Diagoras. Au-dessus d'eux est Diagoras, qui avait remporté le prix du pugilat parmi les hommes faits. Sa statue est l'ouvrage de Calliclès, Mégaréen, fils de Théocosmus, qui a fait la statue de Jupiter (Zeus) à Mégare. Les fils des filles de Diagoras s'exercèrent aussi au pugilat, et remportèrent des victoires aux jeux olympiques. Euclès, fils de Callianax et de Callipatira, fille de Diagaras, fut vainqueur parmi les hommes faits, et Pisirhodus, que sa mère, habillée en maître de gymnastique, exerça elle-même aux jeux olympiques, le fut parmi les enfants. Ce Pisirhodus est dans l'Altis auprès du père de sa mère. On dit que Diagoras se trouvant une fois à Olympie, avec Acusilas et Damagitus, ses fils, ces deux jeunes Grecs, après avoir remporté la victoire, le portèrent par toute l'assemblée, au milieu des acclamations de tous les assistants qui lui jetaient des fleurs et le félicitaient d'avoir de tels fils. Diagoras était Messénien d'origine du côté des femmes, et descendait de la fille d'Aristomène. Doriéus, fils de Diagoras, outre ses victoires olympiques, en remporta huit dans l'Isthme, et sept à Némée; on dit aussi qu'il eut le prix aux jeux pythiques sans combattre. Pisirhodus et lui se firent proclamer vainqueurs comme Thuriens, ayant été chassés de Rhodes par une faction contraire à la leur, et s'étant retirés à Thurium en Italie. Doriéus retourna dans la suite à Rhodes, et il s'y montra si ouvertement le partisan des Lacédémoniens, qu'il arma à ses frais des vaisseaux pour combattre contre les Athéniens, jusqu'à ce qu'ayant été pris par eux, il fut conduit vivant à Athènes. Les Athéniens qui, avant qu'on l'eût amené dans leur ville, étaient furieux et se portaient à toutes sortes de menaces contre lui, n'eurent pas plutôt vu dans leur assemblée un homme si célèbre paraître en habit de captif, que leurs dispositions changèrent entièrement, et qu'ils lui permirent de se retirer où il voudrait; ils ne lui firent éprouver aucun traitement fâcheux, quoiqu'ils eussent bien sujet de le faire sans injustice. Quant à la mort de Doriéus, Androtion raconte, dans son ouvrage sur l'Attique, que les forces navales du roi de Perse se trouvant à Caune, Conon qui en avait le commandement engagea les Rhodiens à abandonner l'alliance des Lacédémoniens pour embrasser celle du roi et des Athéniens; alors Doriéus quitta Rhodes et se retira dans la Grèce hors du Péloponnèse : il y fut pris par quelques Lacédémoniens qui le conduisirent à Sparte, où il fut accusé de s'être mal conduit, et en conséquence condamné à mort; si le récit d'Androtion est vrai, on peut faire aux Lacédémoniens le même reproche de précipitation qu'on fit aux Athéniens, lorsqu'ils condamnèrent à mort Thrasyllus et ceux qui commandaient avec lui au combat des Arginuses. Telle fut la glorieuse destinée de Diagoras et de ses descendants.
Alcænétus, fils de Théantus de Léprée, remporta ainsi que ses enfants, plusieurs victoires aux jeux olympiques. Il fut lui-même vainqueur au pugilat, d'abord parmi les enfants, et ensuite parmi les hommes faits. Hellanicus et Théantus ses fils remportèrent le prix du pugilat parmi les enfants, l'un dans la quatre-vingt-neuvième olympiade, et l'autre dans la quatre-vingt-dixième; ils ont tous leurs statues à Olympie. Au-dessus des fils d'Alcénétus sont les statues de Gnathon de Dipée, ville du pays des Mantinéens, et de Lycinus Éléen, qui furent tous deux à Olympie vainqueurs au pugilat parmi les enfants, et même l'inscription qui est sur la statue de Gnathon, nous apprend qu'il était très jeune lorsqu'il remporta le prix. Sa statue est de Calliclès de Mégare ; celle qui suit représente Droméus de Stymphale, qui remporta le prix de la course du dolichus à Olympie, deux à Delphes, trois dans l'Isthme et cinq à Némée. On dit que ce fut lui qui imagina le premier de se nourrir de viande : jusques-là du fromage nouvellement égoutté avait été la nourriture des athlètes. Sa statue est de Pythagore; celle qui suit, représentant Pythoclès, Éléen, vainqueur au pentathle, est l'ouvrage de Polyclète.

CHAPITRE VIII.

Statues d'Athlètes. Damarchus, athlète, changé en loup. Mort singulière de l'athlète Timanthe. Timasithéus, autre athlète.

On ne sait pas de qui est la statue de Socrate de Pellène, qui remporta le prix de la course parmi les enfants. Celle d'Amertus, Éléen, qui fut vainqueur à la lutte parmi les enfants à Olympie, et à Delphes parmi les hommes faits, est de Phradmon Argien. Evandridras Éléen, remporta le prix de la lutte parmi les enfants, à Olympie et à Némée. Étant devenu dans la suite Hellanodice, il écrivit aussi les noms de ceux qui avaient remporté des prix à Olympie. Quant à Damarchus de Parrhasie en Arcadie, à l'exception de la victoire au pugilat qu'il remporta à Olympie, je ne crois point ce que quelques imposteurs rapportent, qu'il fut changé en loup ait sacrifice qu'on fait à Jupiter (Zeus) Lycéen, et que dix ans après il reprit la forme humaine; ce conte ne me paraît même pas avoir été accrédité chez les Arcadiens, car il en serait question dans l'inscription qu'an a mise sur sa statue à Olympie, qui porte seulement: Damarchus, fils de Dinyttas, de Parrhasie en Arcadie, dédia cette statue. Eubotas, de Cyrène, ayant appris de l'oracle de la Libye qu'il obtiendrait une victoire à la course à Olympie, il fit faire sa statue d'avance, et la plaça à Olympie le jour même qu'il fut proclamé vainqueur. On dit aussi qu'il remporta le prix de la course des chars dans l'olympiade que les Éléens rejettent de leur catalogue, parce que les Arcadiens fusent célébrer les jeux. La statue de Timanthe de Cléones, qui fut vainqueur au pancrace parmi les hommes faits, est de Myron Athénien, et celle de Baucis Thrézénien, vainqueur à la lutte dans la même classe, est l'ouvrage de Naucydes. Voici, à ce qu'on raconte, comment Timanthe termina sa carrière. Il avait quitté la profession d'athlète, néanmoins il essayait tous les jours ses forces en bandant un grand arc. Il lui arriva de faire un voyage, et de suspendre pendant ce temps-là cet exercice. Voulant le reprendre à son retour, et ne pouvant plus bander cet arc, il se fit dresser un bûcher, et rayant allumé il s'y jeta vivant. J'avoue que tout ce qui s'est fait et tout ce qui se fera dans ce genre parmi les hommes, me paraît beaucoup plus tenir de la folie que du courage. Après Baucis viennent les statues de plusieurs athlètes de l'Arcadie, savoir; Euthymène de Mænale, le même qui après avoir remporté une victoire à la lutte parmi les enfants, en remporta plusieurs parmi les hommes faits; Philippe, fils d'Azan de Pellène, et Critodamus de Clétor, qui furent tous deux vainqueurs au pugilat. Leurs statues ont été faites, celle d'Enthymène enfant, par Alypus; celle de Critodamus par Cléon; et celle de Philippe, fils d'Azan, par Myron. On voit ensuite la statue de Promachus, fils de Dryon, pancratiaste, de Pellène; mais j'en parlerai dans la description de l'Achaïe. A peu de distance de sa statue vous voyez celle de Timasithéus de Delphes, qui est l'ouvrage d'Agéladas d'Argos. Ce Timasithéus remporta deux fois la victoire du pancrace à Olympie, et trois fois à Pythos: il se distingua aussi à la guerre par des actions audacieuses, et oit le bonheur l'accompagna toujours, excepté dans sa dernière entreprise, qui lui coûta la vie; car ayant aidé Isagoras Athénien, à s'emparer de la citadelle d'Athènes pour se rendre tyran de son pays, il fut pris dans la citadelle, et les Athéniens le firent mourir en punition de cet attentat.

CHAPITRE IX.

Statues de Théognétus et d'autres Athlètes. Char de Gélon, natif de Géla. Histoire de Cléomède.

Théognétus d'Égine obtint le prix de la lutte parmi les enfants, et sa statue fut faite par Ptolichus du même pays, qui avait eu pour maître Synnoon, son père, et celui-ci était élève d'Aristoclès de Sicyone, frère de Canachus, auquel il n 'était pas très inférieur en réputation. II ne m'a pas été possible de deviner pourquoi il tient une pomme de pin cultivé, peut-être les Éginètes ont-ils à ce sujet quelque tradition particulière. Vient ensuite la statue d'un homme que les Éléens, à ce qu'ils disent, n'ont pas inscrit avec les autres parce qu'il remporta le prix de la course nommée Calpé; après lui vous voyez celles de Xénoclès de Mende, qui fut vainqueur à la lutte parmi les enfants, et d'Alcétus, fils d'Alcinus, qui remporta le prix du pugilat dans la même classe; il était aussi Arcadien de Clétor; sa statue est de Cléon, celle de Xénoclès est de Polyclète. Aristéus d'Argos eut le prix de la course du dolichus; Cheimon son père avait obtenu celui de la lutte. Leurs statues sont auprès l'une de l'autre; celle du fils est de Pantias de Chios, qui avait eu Sostrate son père pour maître ; celles de Cheimon sont, à mon avis, du nombre des meilleurs ouvrages de Naucydes : l'une est à Olympie, et l'autre a été transportée d'Argos à Rome dans le temple de la Paix. On dit que Cheimon vainquit à la lutte Taurosthènes d'Égine, et qu'à l'olympiade suivante Taurosthène défit tous ses antagonistes. On ajoute qu'un spectre qui avait pris sa ressemblance annonça le même jour sa victoire à Égine. Cratinus de Sparte a fait la statue de Phyllès Éléen, qui avait été vainqueur à la lutte parmi les enfants. Quant au char de Gélon, je ne suis pas de l'avis de ceux qui en ont parlé avant moi, et qui disent que ce char est une offrande de Gélon, tyran de Syracuse: l'inscription qui porte qu'il a été dédié par Gélon, fils de Dinomène, natif de Géla, et l'époque de sa victoire est fixée à la soixante-treizième olympiade; or Gélon, tyran de Sicile, s'empara de Syracuse, sous l'archontat d'Hybrilide à Athènes, dans la seconde année de la soixante-douzième olympiade, dans laquelle Tisicrate de Crotone remporta le prix de la course ; il est évident d'après cela que Gélon se serait qualifié Syracusain, et non natif de Géla: je crois donc que celui qui a dédié le char était un simple particulier, dont le père s'appelait aussi Dinomène comme celui du tyran; ce char et la statue même de Gélon sont l'ouvrage de Glaucias Éginète. On raconte qu'en l'olympiade qui précéda celle dont je viens de parler, Cléomède d'Astypalée tua Iccus d'Épidaure en combattant contre lui au pugilat. Les Hellanodices ayant jugé qu'il l'avait fait méchamment, le privèrent de la victoire ; le chagrin lui ayant fait perdre la raison, il retourna à Astypalée, et étant entré dans une école où il y avait soixante enfants, il renversa la colonne qui soutenait le toit. Ce toit étant tombé sur les enfants, les citoyens se mirent à le poursuivre à coups de pierres. Il se réfugia dans un temple de Minerve (Athéna), entra dans un coffre vide qu'il y trouva, et en tira le couvercle sur lui. Les Astypaléens s'étant donné inutilement beaucoup de peine pour l'ouvrir, se décidèrent à le briser; mais il n'y trouvèrent plus Cléomède, ni vivant ni mort. Ils envoyèrent alors des députés à Delphes pour demander ce qu'il était devenu, et la Pythie leur répondit, à ce qu'on prétend : Cléomède d'Astypalée est le dernier des héros, honorez-le par des sacrifices, et ne le regardez plus comme un mortel. Depuis ce temps-là les Astypaléens rendent à Cléomède le culte en usage pour les héros. On voit auprès du char de Gélon la statue de Philon, qui a été faite par Glaucias d'Égine. Simonide, fils de Léoprépès, a fait sur ce Philon une inscription élégiaque très élégante dont le sens est : Ma patrie est Corcyre; mon nom Philon; je suis fils de Glaucus, et j'ai remporté au pugilat deux victoires olympiques. Vous voyez ensuite la statue d'Agamétor de Mantinée, qui remporta le prix du pugilat parmi les enfants.

CHAPITRE X.

Statue de Glaucus, athlète au pugilat. Statues d'autres athlètes.

A la suite de toutes les statues dont je viens de parler, est celle de Glaucus de Carystos. Il était, à ce qu'on dit, originaire d'Anthédon, ville de la Béotie, et descendait de Glaucus, l'un des dieux marins. Glaucus de Carystos était fils de Démylus. Il commença d'abord, dit-on, par travailler à la terre; le soc de sa charrue s'étant un jour démanché, il le rajusta en se servant de sa main comme d'un marteau. Démylus voyant ce que faisait son fils, le conduisit à cause de cela à Olympie pour y combattre au pugilat. A son arrivée Glaucus, qui ne connaissait point du tout l'art de combattre, reçut des coups de ses antagonistes, et lorsqu'il en fut aux mains avec le dernier, on crut qu'il allait renoncer au prix à cause du grand nombre de ses blessures. On dit qu'alors son père lui cria : enfant, frappe comme sur la charrue. Alors Glaucus porta un coup si violent à son adversaire qu'il remporta sur le champ la victoire. On ajoute qu'il obtint dans la suite d'autres prix, savoir; deux aux jeux pythiques, huit aux jeux néméens, et autant aux jeux isthmiques. La statue de Glaucus fut placée à Olympie par son fils; elle est l'ouvrage de Glaucias d'Égine. Il y est représenté agitant les bras comme pour s'exercer; car il fut, à ce qu'on prétend, l'homme le plus habile de son temps à régler les mouvements de ses mains. Les Carystiens disent qu'après sa mort il fut enterré dans l'île qui porte encore, maintenant le nom de Glaucus. Damarétus d'Hérée, son fils, et ses petits-fils remportèrent chacun deux victoires à Olympie; Damarétus fut vainqueur dans la soixante cinquième olympiade, où l'on introduisit pour la première fois la course avec les armes, et en l'olympiade suivante. Sa statue le représente avec un bouclier tel que ceux dont on se sert maintenant, un casque sur la tête et des Cnémides aux jambes; mais dans la suite les Eléens ainsi que les autres Grecs en débarrassèrent les coureurs. Théopompe, fils de Damarétus, et son fils du même nom que lui furent tous deux vainqueurs au pentathle. Théopompe le second remporta de plus des victoires à la lutte; on ne sait pas de qui est la statue de ce dernier ; mais l'inscription qui se lit sur les statues du père et du grand-père, nous apprend qu'elles sont, la première d'Eutélidas, et l'autre de Chrysethemis, tous deux Argiens ; elle est conçue en ces termes : Ces statues sont l'ouvrage d'Eutélidas et de Chrysothémis Argiens, à qui leur art a été transmis par leurs prédécesseurs. Iccus, fils de Nicolaïdas de Tarente, remporta le prix du pentathle à Olympie; et il fut depuis le meilleur maître de gymnastique de son temps. On voit après la statue d'Iccus celle de Pantarcès, Éléen, qui vainquit les enfants à la lutte et qui fut aimé de Phidias. Au-dessus de Pantarcès est le char de Cléosthène d'Épidamne. Ce char est l'ouvrage d'Ageladas; il est derrière la statue que les Grecs dédièrent à Jupiter (Zeus) après la bataille de Platée. Cléosthène remporta le prix en la soixante sixième olympiade. Il plaça à Olympie sa propre statue, celle de ses chevaux et de leur conducteur. Il a inscrit sur les chevaux leurs noms; les 'deux en dehors se nommaient Phœnix et Corax, et les deux contre le timon, Cnacias celui qui est à droite, et Samus celui qui est à gauche; il y a sur le char une inscription élégiaque qui porte : Cléosthène, fils de Pontios d'Épidamne, m'a dédié après avoir remporté le prix dans les jeux célébrés en l'honneur de Jupiter (Zeus). De tous les Grecs qui ont entretenu des chevaux pour la course, ce Cléosthène est le premier qui ait placé sa statue à Olympie, car Miltiade d'Athènes et Évagoras de la Laconie y ont bien fait placer, ce dernier un char, et Miltiade les statues dont je parlerai ailleurs; mais Évagoras n'est pas sur son char. Les Épidamniens habitent toujours le même pays qu'ils eurent dès le principe, mais non la même ville ; car celle où ils sont est à quelque distance de l'ancienne, et elle a pris de son fondateur le nom de Dyrrhachium. On voit ensuite la statue de Lycinus d'Hérée, d'Épicradius de Mantinée, de Tellon de Thase et d'Agiadas Éléen, qui remportèrent parmi les enfants, le pemier la victoire de la course, et les trois autres celle du pugilat. Les statues d'Épicradius et d'Agiadas sont, la première de Ptolichus, et l'autre de Sérambus, tous deux Éginètes. Cléon a fait celle de Lycinus; on ne dit pas de qui est celle de Tellon.

CHAPITRE XI.

Statues des rois de Macédoine et d'autres. Statues de Théagène dans plusieurs villes de la Grèce et chez les barbares.

Vous voyez après ces statues celles de Philippe, fils d'Amyntas; d'Alexandre, fils de Philippe; de Séleucus et d'Antigone, qui ont toutes été érigées par les Éléens; les autres sont à cheval, mais celle d'Antigone est à pied : on voit à peu de distance de ces rois celle de Théagène de Thase, fils de Timosthène. Les Thasiens disent que Timosthène n'était pas son père, et qu'Hercule Thasien, dont il était prêtre, prit sa ressemblance et eut commerce avec la mère de Théagène. On dit qu'à neuf ans, revenant de l'école, il vit sur la place publique une statue en bronze, de je ne sais quelle divinité, qui lui plut fort; il l'enleva de son piédestal, et rayant mise sur une de ses épaules, il l'emporta chez lui. Cette action ayant irrité contre lui la multitude, un personnage marquant et d'un âge avancé, empêcha qu'il ne fût tué, et lui ordonna de reporter cette statue de sa maison sur la place publique. Théagène l'ayant reportée, acquit sur le champ une grande célébrité par sa force, et le bruit de cette action se répandit dans toute la Grèce. J'ai déjà parlé des principaux triomphes qu'il obtint aux jeux olympiques, comment il vainquit Euthymus au pugilat, et comment il fut condamné à ramende par les Éléens. Alors il arriva que le prix du pancrace fut adjugé à Droméus de Mantinée, le premier à notre connaissance, qui passe pour l'avoir remporté sans combattre. L'olympiade suivante, Théagène fut vainqueur au pentathle. Il remporta trois prix au pugilat dans les jeux pythiques; il en eut soit au pancrace, soit au pugilat, neuf à Némée, et dix dans l'Isthme; mais à Phthie, dans la Thessalie, il renonça à ces deux exercices, et ne songea qu'à se rendre célèbre à la course parmi les Grecs. Il obtint le prix du dolichus, ce qu'il fit, à ce que je pense, pour rivaliser avec Achille, voulant remporter le prix de la course dans la patrie du plus vaillant de ceux qu'an nomme héros. Il obtint en tout quatorze, cents couronnes.
Lorsqu'il eut terminé ses jours, un de ceux qui avaient été ses ennemis durant sa vie, allait toutes les nuits à sa statue et la frappait de verges, comme si Théagène avait crû sentir les coups qu'il donnait au bronze; mais cette insulte ne resta pas impunie, et cette statue le tua en tombant sur lui. Les enfants du mort attaquèrent en justice la statue, comme coupable de meurtre, d'après une loi de Dracon, qui, dans celles qu'il a données aux Athéniens sur les meurtres, a ordonné qu'on portât hors des frontières, les choses même inanimées, qui, en tombant, ôteraient la vie à un homme. Les Thasiens jetèrent la statue de Théagène dans la mer. Depuis ce temps, comme leur pays ne produisait aucun fruit, ils envoyèrent des députés à Delphes, et l'oracle leur ordonna de rappeler les exilés : ils les rappelèrent, mais la stérilité ne cessa pas pour cela. Ils allèrent donc une seconde fois vers la Pythie, et lui dirent que quoiqu'ils eussent fait ce qui leur avait été ordonné, la colère des dieux durait toujours. Alors elle leur répondit: Vous avez laissé dans l'oubli Théagène, le plus grand de vos concitoyens. Comme ils étaient très embarrassés sur les moyens de retrouver la statue de Théagène, on dit que des pêcheurs s'étant avancés dans la mer pour chercher des poissons, ramenèrent dans leurs filets et la reportèrent ensuite à terre. Les Thasiens qui font replacée dans l'endroit ù elle était primitivement, lui offrent des sacrifices comme à une divinité. Je sais qu'on a érigé à Théagène des statues dans beaucoup d'autres endroits de la Grèce, et même chez des peuples barbares : les gens de ces différents pays lui rendent un culte, et croient qu'il procure la guérison aux malades. La statue qu'il a dans l'Altis, est l'ouvrage de Glaucius d'Égine.

CHAPITRE XII.

Hiéron, fils de Dinomène, tyran de Syracuse. Autre Hiéron, fils d'Hiéroclès, tyran de Syracuse. Statues d'Ardus et d'Aratus.

Il y a près de cette statue un char de bronze qui porte un homme ; de chaque côté du char est un cheval de selle monté par un enfant. Ce sont les monuments des victoires olympiques remportées par Hiéron, fils de Dinomène, qui fut tyran de Syracuse après Gélon son frère. Ces offrandes n'ont pas été envoyées par Hiéron lui-même, mais par Dinomène son fils. Le char est d'Onatas d'Égine ; les chevaux qui sont de chaque côté, et les enfants qui les montent, ont été faits par Calmis. Il y a auprès du char d'Hiéron, fils de Dinomène, la statue d'un homme qui portait le même nom que lui, et qui fut aussi tyran de Syracuse. Ce dernier Hiéron était fils d'Hiéroclès; il s'empara de l'autorité après la mort d'Agathoclès, qui avait été auparavant tyran de Syracuse; ce fut dans la seconde année de la cent vingt-deuxième olympiade, en laquelle Idaïus de Cyrène remporta le prix à la course du stade. Ce Hiéron contracta des liaisons d'hospitalité avec Pyrrhus, fils d' Éacide, et cimenta en même temps cette alliance par le mariage de Gélon, son fils, avec Néréide fille de Pyrrhus. La guerre s'étant allumée au sujet de la Sicile entre les Romains et les Carthaginois, qui avaient plus de la moitié de cette île, Hiéron, en entrant dans cette guerre, crut devoir se mettre du côté des Carthaginois; mais peu de temps après, voyant que les Romains étaient plus forts et que leur amitié était plus solide, il changea de parti en leur faveur. La mort lui fut donnée par Dinomène, Syracusain, et l'homme du monde qui détestait le plus la tyrannie; car quelque temps après, lorsque Hyppocrate d'Erbesse, frère d' Épicyde, arrivé depuis peu en Sicile, commençait à haranguer le peuple, Dinomène s'élança sur lui pour le tuer; mais Hyppocrate s'étant mis en défense, ses gardes eurent le dessus et massacrèrent Dinomène. Les statues de Hiéron, l'une à cheval, l'autre à pied, qu'an voit à Olympie, y ont été placées par ses fils; elles sont l'ouvrage de Micon, fils de Nicératus de Syracuse. Après la statue de Hiéron, sont celles d'Aréus, fils d'Acrotatus, et roi de Lacédémone; d'Aratus, fils de Clinius, et encore une autre d'Aréus à cheval. Celle d'Aratus a été érigée par les Corinthiens, et celle d'Ardus par les Éléens; je ne les ai oubliés ni l'un ni l'autre dans mes livres précédents. Aratus avait remporté à Olympie le prix de la course des chars. Timon, fils d'Égyptus, Éléen, envoya des chevaux à Olympie; c'est à lui qu'est ce char en bronze sur lequel il est monté, ce qui est, je pense, une marque de sa victoire. Callon, fils d'Harmodius, et Hippomachus, fils de Moschion, tous deux Éléens, furent vainqueurs au pugilat parmi les enfants. La statue du premier est de Daïppus; je ne sais pas de qui est celle d'Hippomachus. On dit que ce dernier vainquit trois antagonistes, sans recevoir un seul coup et sans être blessé. Théochreste de Cyrène, qui entretenait des chevaux suivant la coutume des Libyens, remporta des prix à la course des chars à Olympie, ainsi que l'avait fait précédemment son aïeul paternel qui portait le même nom que lui; et l'inscription qui est sur le char nous apprend que le père de Théochreste en avait remporté aux jeux isthmiques. Agésarchus, fils d'Hémostrotus de Tritée, fut, parmi les hommes faits, vainqueur au pugilat à Olympie, à Némée, à Pythos et dans l'Isthme, comme nous rapprend l'inscription élégiaque qui est sur sa statue. On y voit aussi que Tritée était une ville de l'Arcadie, ce que je n'ai pas trouvé vrai ; car on connaît même les fondateurs des villes de l'Arcadie qui ont quelque réputation. Quant à celles que dès leur origine leur faiblesse fit rester dans l'obscurité, et qui depuis, pour cette raison, furent confondues dans Mégalopolis, elles sont nommées dans le décret des Arcadiens pour la fondation de cette ville, et l'on ne trouve pas qu'il y ait eu dans la Grèce d'autre Tritée, que la ville de l'Achaïe de ce nom: on pourrait donc supposer que les Tritéens étaient alors réunis aux Arcadiens, comme on voit encore maintenant quelques Arcadiens réunis à l'Argolide. La statue d'Agésarchus est l'ouvrage des fils de Polyclès. Je parlerai d'eux dans la suite de cet ouvrage.

CHAPITRE XIII.

Colonne sur laquelle sont écrites les victoires de Chionls de Lacédémone. Hermogène, surnommé le Coursier. Politès et Léonidas, excellents Athlètes à la course. Statues d'autres Athlètes. La jument de Phidolas.

Pythagore a fait la statue d'Astylus de Crotone, qui remporta dans trois olympiades consécutives le prix de la conne du stade et de celle du diaulus. Comme dans les deux dernières il se fit proclamer Syracusain par complaisance pour Hiéron, fils de Dinomène, les Crotoniates ordonnèrent que sa maison servirait de prison publique : ils ôtèrent sa statue de l'enceinte de Junon Lucinia où ils l'avaient placée.
On voit aussi à Olympie la colonne sur laquelle sont écrites les victoires de Chionis Lacédémonien. Il faut avoir bien peu de bon sens pour croire, comme le font quelques personnes, que cette colonne a été érigée par Chionis lui-même, et non par le peuple lacédémonien; je veux bien en effet que la course avec les armes ne fût pas encore établie comme on le voit sur cette colonne, mais comment Chionis aurait-il pu deviner qu'on l'établirait dans la suite? C'est une erreur encore plus grossière, d'imaginer que la statue qu'on voit auprès de cette colonne, est celle de Chionis, car elle est l'ouvrage de Myron Athénien. Hermogène de Xanthe, ville de la Lycie, ne se distingua pas moins que Chionis, puisqu'il fut couronné huit fois dans trois olympiades, et les Grecs le nommèrent le Coursier. On ne doit pas moins admirer Politès; il était de Cérame, ville de la Carie pierreuse. Il se fit remarquer à Olympie par la légèreté étonnante de ses pieds, en faisant paraître court par le peu de temps qu'il mettait à le parcourir, le plus long espace proposé pour la course, et en remportant dans le même jour le prix du dolichus, et immédiatement après, celui de la course du stade, enfin celai du diaulus. Il fut aussi vainqueur en l'olympiade suivante, et voici comment. On ne faisait pas courir tous les athlètes à la fois; on les divisait par la voie du sort, en bandes chacune de quatre. Ceux qui avaient été vainqueurs dans chaque bande couraient ensuite ensemble, de manière que celui qui était couronné se trouvait avoir été vainqueur deux fois. Léonidas de Rhodes a aussi excellé dans ce genre d'exercice, ayant été célèbre par sa légèreté, et invincible durant quatre olympiades : il remporta quatorze victoires à la course. On voit à Olympie, à peu de distance de la colonne de Chionis, la statue de Duris de Samos, qui fut vainqueur au pugilat parmi les enfants; elle est l'ouvrage d'Hippius ; on y voit une inscription qui nous apprend qu'il remporta le prix à l'époque où les Samiens furent chassés de leur île; quant à celle de leur retour.......... Auprès de Tyrannus est celle de Diallus de Smyrne, fils de Pollis, qui est, à ce qu'on dit, le premier des Ioniens qui ait remporté le prix du pugilat parmi les enfants. La statue de Thersilochus de Corcyre, et celle d'Aristion d'Épidaure, fils de Théophile, qui furent vainqueurs au pugilat, le premier parmi les enfants, et l'autre parmi les hommes faits, sont de Polyclète d'Argos. Celle de Bucélus, qui le premier des Sicyoniens remporta le prix du pugilat parmi les enfants, est de Canacus de Sicyone, qui avait appris son art de Polyclès d'Argos. Près de la statue de Bucélus est celle de Mnaséas de Cyrène, surnommé le Libyen, qui fut vainqueur à la course avec les armes; elle est de Pythagore de Rhégium. L'inscription qui est sur la statue d'Agémaque de Cyzique, ville du continent de l'Asie, nous apprend qu'elle a été faite à Argos. De mon temps on ne voyait même plus les ruines de Naxos, ville qui avait été fondée dans la Sicile par les Chalcidéens des bords de l'Euripe, et si son nom a été transmis à la postérité, c'est à Tisandre, fils de Cléocrite qu'elle en a principalement l'obligation. Il remporta à Olympie quatre victoires au pugilat parmi les hommes faits, et autant à Pythos. Les Corinthiens et les Argiens ne conservaient point encore la mémoire de ceux qui étaient vainqueurs dans l'isthme et à Némée; on ne peut donc pas savoir s'il y a remporté des prix. La jument de Phidolas de Corinthe se nommait Aura, à ce que disent les Corinthiens, il arriva à celui qui la montait, de se laisser tomber dès le commencement de la course, et elle n'en continua pas moins à courir, tourna suivant les règles autour de la borne, accéléra encore plus sa course, lorsqu'elle entendit la trompette, arriva la première vers les Hellanodices, et s'y arrêta comme sachant qu'elle avait remporté le prix. Les Éléens proclamèrent Phidolas vainqueur, et lui permirent de placer à Olympie la statue de sa jument. Les fils de Phidolas remportèrent aussi le prix de la course des chevaux ; on voit à Olympie un cheval sculpté sur un cippe avec cette inscription : Le léger Lycas a orné la maison des fils de Phidolas de trois couronnes obtenues, l'une aux jeux isthmiques, et les deux autres ici. Les registres que les Éléens tiennent des victoires olympiques, ne sont pas d'accord avec cette inscription, car ils placent la victoire des fils de Phidolas en la soixante huitième olympiade et non' auparavant. Ceci soit observé en passant. On voit ensuite les statues d'Agathinus, fils de Thrasybule, et de Télémaque, tous deux Éléens. Télémaque avait remporté le prix de la course des chevaux ; quant à Agathinus, ce sont les Achéens de Pellène qui lui ont érigé cette statue. Le peuple athénien en a aussi élevé une à Aristophon, fils de Lycinus, qui avait à Olympie vaincu au pancrace les hommes faits.

CHAPITRE XIV.

Statues d'Athlètes. Statue de Milon de Crotone. Force extraordinaire et mort de cet athlète. Statue du roi Pyrrhus. Cippe de Pythocrite, joueur de flûte.

La statue de Phérias d'Égine est prés de celle d'Aristophon. On le trouva trop jeune en la soixante-dix-huitième olympiade pour combattre à la lutte parmi les enfants, et on le rejeta du nombre des athlètes : il fut admis dans l'olympiade suivante, et remporta le prix. Hyllus de Rhodes éprouva à Olympie une difficulté d'un genre absolument différait de celle qu'on fit à Phérias; car s'étant présenté à l'âge d'environ dix-huit ans, les Éléens ne voulurent pas le laisser lutter parmi les enfants, il se fit inscrire parmi les hommes et fut victorieux. Il fut ensuite couronné à Némée et dans l'Isthme, et mourut à vingt ans, sans avoir revu Rhodes sa patrie. La témérité du lutteur Rhodien n'égale pas suivant moi celle d'Artémidore de Tralles, qui, ayant succombé à Olympie, en combattant au pancrace contre les enfants, parce qu'il était encore trop jeune, alla dès la même année, lorsque l'époque en fut arrivée, aux jeux que les Ioniens de Smyrne faisaient célébrer; ses forces s'étaient tellement accrues pendant cet intervalle, qu'il vainquit au pancrace dans le même jour, non seulement ceux qui avaient été ses antagonistes à Olympie, mais encore les enfants plus grands, qu'on nomme Imberbes, et en troisième lieu ce qu'il y avait de plus vaillants parmi les hommes. Il en vint aux mains avec les imberbes, sur la provocation d'un maître de gymnastique, et avec les hommes à cause de l'insulte d'un athlète pancratiaste. Il remporta aussi à Olympie, en la deux cent douzième olympiade, la victoire parmi les hommes faits. Il y a près de la statue d'Hyllus un petit cheval de bronze, que Crocon d'Érétrie dédia après avoir remporté la victoire de la course des chevaux. On voit près de ce cheval Télestas de Messène, qui fut vainqueur au pugilat parmi les enfants; c'est Silanion qui a fait sa statue. Celle de Milon, fils de Diotimus, est de Daméas, qui était de Crotone ainsi que lui. Milon remporta à Olympie six victoires à la lutte, dont une parmi les enfants ; six à Pythos, dont une, aussi parmi les enfants; il se présenta une septième fois à Olympie pour lutter, mais il n'eut pas l'avantage de vaincre Timosthène son compatriote, qui, fort jeune encore, refusa de se mesurer avec lui. On dit que Milon porta lui-même sa propre statue dans l'Altis. On raconte aussi de lui, au sujet de la grenade et au sujet du disque, qu'il tenait une grenade dans sa main de telle manière, qu'on ne pouvait ni la lui ôter, ni la lui faire écraser; et que debout sur un disque huilé, il se jouait des efforts de ceux qui se jetaient sur lui et le poussaient pour l'en faire sortir. Voici encore ce qu'il faisait pour montrer sa force : il se ceignait le front d'une corde, comme si c'eût été une bandelette ou une couronne, et retenait ensuite sa respiration, jusqu'à ce que le sang en remontant gonflât les veines de sa tête et rompît la corde. On dit aussi qu'il laissait tomber son bras droit jusqu'au coude le long de son corps, et tenait l'avant-bras horizontalement, le pouce élevé et les autres doigts dans leur ordre naturel, sans qu'il fût possible à personne de séparer. des autres doigts le petit qui se trouvait au-dessous. On ajoute qu'il fut tué par les bêtes féroces, voici comment: Il trouva dans les environs de Crotone un vieux tronc d'arbre qu'on avait commencé à fendre, et dans lequel les coins étaient restés; Milon mit hardiment les mains dans la fente pour l'achever : les coins tombèrent par l'effort qu'il fit, et se trouvant ainsi pris dans le bois, il fut la proie des loups; il y a en effet une quantité prodigieuse de ces animaux dans le pays de Crotone. Telle fut la fin de Milon. Thrasybule, Éléen, a érigé dans l'Altis une statue à Pyrrhus, fils d'Éacide, roi de la Thesprotide d'Épire, et qui s'est distingué par beaucoup d'actions mémorables dont j'ai parlé dans la description de l'Attique. On voit près de la statue de Pyrrhus un cippe, sur lequel est sculpté en bas relief un petit homme tenant des flûtes : il fut le premier, après Sacadas d'Argos, qui remporta le prix de la flûte aux jeux pythiques. En effet, Sacadas avait été vainqueur au concours que les Amphictyons avaient établi pour cet instrument, avant qu'on y eût mis une couronne pour prix, et il le fut encore deux fois depuis que cette couronne a été instituée. Pythocrite de Sicyone, celui dont il s'agit ici, fut couronné seul pendant les six pythiades consécutives après celles dont je viens de parler ; il est également évident qu'il joua six fois de la flûte aux jeux olympiques durant le combat du pentathle ; c'est pourquoi on l'a représenté à Olympie sur ce cippe, sur lequel est cette inscription : A la mémoire du joueur de flûte Pythocrite Callinicus. Les Étoliens ont aussi érigé en commun une statue à Cylon, qui affranchit les Éléens de la tyrannie d' Aristomus. La statue de Gorgus, Messénien, fils d'Euclétus, vainqueur au pentathle, et de Damarétus du même pays, vainqueur au pugilat parmi les enfants, sont, la première de Théron, Béotien, et l'autre de Silanion, Athénien. On ne sait pas de qui est celle d'Anauchidas, fils de Philys, Éléen, qui remporta le prix de la lutte parmi les enfants. La statue d'Anochus de Tarente, fils d'Adamatas, qui remporta le prix de la course du stade et celui du diaulus, est d'Agiladas d'Argos. L'enfant qui est sur un cheval et l'homme qui est auprès, sont, suivant l'inscription, Xénombrote de Cos la Méropide, qui remporta le prix de la course des chevaux, et Xénodique, vainqueur au pugilat parmi les enfants; ce dernier est de Panthias : la statue de Xénombrote est de Philotime d'Égine. Les deux statues de Pythès d'Abdère, fils d'Andromaque, ont été faites par Lysippe, et dédiées par des militaires. Il paraît que ce Pythès commandait un corps de troupes étrangères, et qu'il était d'ailleurs très versé dans l'art militaire, On voit ensuite les statues de Méneptolème d'Apollonie, ville sur les bords du golfe Ionien, et de Philon de Corcyre, qui furent tous deux vainqueurs à la course parmi les enfants. Au-dessus d'eux est celle de Hiéronyme d'Andros, qui vainquit Tisamène, Éléen, lorsqu'il voulut disputer à Olympie le prix du pentathle. Ce Tisamène servit dans la suite de devin aux Grecs, lorsqu'il combattirent à Platée contre les Mèdes, commandés par Mardonius. Cet Hiéronyme est placé là, et on voit au auprès de lui Proclès, fils de Lycastidas, aussi Andrien, qui remporta le prix de la lutte parmi les enfants; cette dernière statue est de Somis. Celle d'Hiéronyme a été faite par un sculpteur nommé Stomius. Eschine, Éléen, fut deux fois vainqueur au pentathle, et il a autant de statues qu'il obtint de victoires.

CHAPITRE XV.

Statues d'Athlètes. Statues d'Archidamus, fils d'Agésilas; du roi Démétrius et de son fils Antigone; d'Aréus, roi des Lacédémoniens; du roi Ptolémée, fils de Lagus.

Archippe de Mitylène, dont on voit la statue ensuite, fut vainqueur au pugilat parmi les hommes faits. Les Mitylénéens, pour le rendre encore plus célèbre, prétendent qu'à l'âge de vingt ans il avait déjà été couronné à Olympie, à Pythos, à Némée et dans l'isthme. La statue de Zénon, fils de Callitélès de Léprée, dans la Triphylie, qui remporta le prix de la course du stade parmi les enfants, est de Pyrilampès de Messène. On ne sait pas de qui est celle de Chaomaque, Éléen, qui fut vainqueur au pentathle. La statue de Pantarcès, Éléen, est une offrande des Achéens, comme on le voit par l'inscription qu'on y lit et qui nous apprend de plus que c'est parce que Pantarcès avait négocié la paix entre les Achéens et les Éléens, et fait relâcher tous les prisonniers de part et d'autre. Ce même Pantarcès remporta aussi à Olympie le prix de la course des chevaux, et on lui a érigé une autre statue à cause de sa victoire. Celle d'Olidas, Éléen, a été offerte par le peuple Étolien en commun. Charinus, Éléen, a mérité une statue par une victoire à la course du diaulus, et par une autre à la course avec les armes. Il a auprès de lui Agélès de Chio, qui vainquit les enfants au pugilat, et dont la statue est l'ouvrage de Théomestus de Sardes. La statue de Clitomaque le Thébain, lui a été érigée par Hermocrate son père. Voici quels sont ses exploits : il obtint dans l'Isthme, le même jour, le prix de la lutte, celui du pugilat et celui du pancrace ; les victoires au pancrace qu'il remporta à Delphes sont au nombre de trois : il est après Théagène de Thase le premier qui ait le même jour concouru à Olympie pour le prix du pancrace et celui du pugilat. II avait déjà remporté celui du pancrace dans la cent quarante et unième olympiade. Il se présenta à la suivante pour le pancrace et le pugilat; Caprus devait le même jour concourir pour 'la lutte et pour le pancrace. Ce dernier ayant déjà remporté le prix de la lutte, Clitamaque fit observer eux Hellanodices qu'il serait juste d'appeler les combattants au pentathle avant qu'il eût été blessé au pugilat. Sa demande parut juste; en conséquence les Pancratiastes étant entrés en lice, il fut vaincu par Caprus, ce qui ne lui ôta rien de sa vigueur ni de son courage pour le pugilat. Les Ioniens d'Érythrée ont érigée une statue à Épithersès, fils de Métrodore, qui remporta au pugilat deux victoires à Olympie, autant à Pythos, à Némée et dans l'Isthme. Le peuple Syracusain a érigé deux statues à Hiéron, et ses enfants lui ont érigé la troisième. J'ai déjà dit un peu plus haut que ce Hiéron, qui portait le même nom que le fils de Dinamène, avait été comme lui tyran de Syracuse. Les Paléens, qui sont la quatrième partie des Céphalléniens, ont aussi érigé une statue à Timoptolis, Éléen, fils de Lampis; ces Paléens portaient très anciennement le nom de Dulichiens. Vous voyez ensuite la statue d'Archidamus, fils d'Agésilas, et celle d'un homme inconnu, en habit et en attitude de chasseur. J'apprendrai à ceux qui veulent le savoir que ce sont les Byzantins qui ont érigé la statue de Démétrius, qui, dans une expédition contre Séleucus, fut fait prisonnier, et celle d'Antigone son fils. Eutélidas, Spartiate, remporta dans la trente-huitième olympiade deux victoires, l'une à la lutte, l'autre au pentathle, parmi les enfants; ce fut la première et la dernière fois que les enfants furent admis à disputer le prix du pentathle. La statue d'Eutélidas est très ancienne, et l'inscription est presque effacée par le temps. Après Eutélidas vous trouvez une autre statue d'Aréus, roi des Lacédémoniens, et tout auprès celle de Gorgus, Éléen, qui jusqu'à présent est le seul qui ait remporté aux jeux olympiques quatre victoires au pentathle, une à la course du diaulus, et une autre à la course avec les armes. Celui qui a des enfants auprès de lui est, à ce qu'on dit, Ptolémée, fils de Lapis. Près de lui sont deux statues de Caprus, Éléen, fils de Pythagore, et le premier qui ait obtenu le même jour le prix de la lutte et celui du pancrace. J'ai dit quel était celui sur qui il avait eu l'avantage au pancrace; il avait vaincu à la lutte Pænius, Éléen, qui en avait remporté le prix en l'olympiade précédente; ce Pænius avait obtenu aux jeux pythiques celui du pugilat parmi les enfants, et dans les mêmes jeux, avait remporté le même jour la victoire à la lutte et au pugilat parmi les hommes faits. Les deux victoires que Caprus remporta durent lui coûter beaucoup d'efforts et lui être vivement disputées.

CHAPITRE XVI.

Statues d'Athlètes. Statues représentant la Grèce et l'Élide. Course nommée Hippias. Char de Polypeithès. Statues de simples particuliers de l'Élide. Colonne de Dinosthène.

On a aussi érigé à Olympie des statues à Anauchidas et à Phéténicus, tous deux Éléens, qui furent vainqueurs à la lutte parmi les enfants. Ce sont les Thespiens qui y ont placé celle de Plistanus, fils d'Eurydamus, qui commanda les Étoliens dans la guerre contre les Gaulois. Tydée, Eléen, y a fait ériger celles d'Antigone, père de Démétrius et de Séleucus. Le nom de ce dernier s'est répandu dans tous les pays, tant à cause de ses autres actions que parce qu'il fit Démétrius prisonnier. Timon, Éléen, remporta des victoires au pentathle dans tous les jeux de la Grèce, excepté à ceux de l'Isthme où il lui était défendu de se présenter, ainsi qu'à tous les autres Éléens ; l'inscription qui est sur sa statue dit de plus, qu'il se trouva avec les Étoliens dans l'expédition qu'ils firent contre les Thessaliens, et que par amitié pour eux il prit le commandement de la garnison qu'ils mirent à Naupacte. Les statues de la Grèce et de l'Élide sont à peu de distance de celle de Timon. La Grèce couronne d'une main Antigone, celui qui fut tuteur de Philippe, fils de Démétrius, et de l'autre, Philippe lui-même; l'Élide pose une couronne sur la tête de Démétrius, qui fit la guerre à Séleucus et à Ptolémée, fils de Lagus. L'inscription qu'on voit sur la statue d'Aristide, Éléen, nous apprend qu'il remporta le prix de la course avec les armes à Olympie ; celui du diaulus à Pythos; et à Némée parmi les enfants, celui de la course nommée Hippias; cette course équivaut à deux de celle qu'on nomme diaulus : elle avait été abolie tant à Némée que dans l'Isthme, mais l'empereur Hadrien a permis aux Argiens de la rétablir dans les jeux qui se célèbrent à Némée pendant l'hiver. Menalcès, Éléen, qui a été couronné vainqueur au pentathle à Olympie, est tout auprès d'Aristide, ainsi que Philonidès, fils de Zotus, de la Chersonèse de l'île de Crête ; ce Philonidès était Hémérodrome d'Alexandre, fils de Philippe. Vous voyez après lui Brimias, Éléen, vainqueur au pugilat parmi les hommes faits, et Léonidas de Naxos, île de la mer Égée ; la statue de ce dernier a été érigée par les Psophidieus de l'Arcadie. Asamon et Nicandre, tous deux Eléens, ont remporté, le premier, la victoire du pugilat à Olympie parmi les hommes faits, et le second, deux victoires à la course du diaulus aux jeux olympiques, et six tant de cette course que de celle du stade aux jeux néméens; sa statue est de Daïppus; celle d'Asamon est de Pyrilampès de Messène. Evalcis, Éléen, vainqueur au pugilat parmi les enfants, et Séléadas, Lacédémonien, qui remporta le prix de la lutte parmi les hommes faits, y ont aussi leurs statues, auprès desquelles est un petit char dédié par Polypeithès de la Laconie ; et sur le même cippe on voit la statue de Callitélès, son père, vainqueur à la lutte. Les Psophidiens ont placé là les statues de deux simples particuliers de l'Élide, Lampus, fils d'Arniscus, et Aristarque ; ils leur ont rendu cet honneur, ou parce qu'ils étaient leurs hôtes, ou parce qu'ils leur avaient rendu quelques autres services. Entre ces deux statues est celle de Lysippe, Éléen, qui remporta parmi les enfants le prix de la lutte ; elle est d'Andréas d'Argos. Dinosthène, Lacédémonien, a remporté à Olympie, parmi les hommes faits, le prix de la course du stade, et il a placé dans l'Altis, auprès de sa statue, une colonne; il y a, à ce qu'on dit, six cent soixante stades de distance entre cette colonne et une autre qui est à Lacédémone. Théodore qui fut vainqueur au pentathle, Pyttalus, fils de Lampis, qui remporta le prix du pugilat parmi les enfants, et Nélaïdas qui obtint celui de la course simple et celui de la course avec les armes, étaient tous trois Éléens. On dit de plus au sujet de Pyttalus, que quelques difficultés s'étant élevées entre les Éléens et les Arcadiens au sujet des limites de leur territoire, il fut choisi pour juge de ce différent. Sa statue est de Sthénis Olynthien. Vous voyez ensuite Ptolémée à cheval, et près de lui l'athlète Pæanius, fils de Damatrius, Éléen, qui remporta à la lutte une victoire à Olympie et deux à Delphes; ainsi que celle de Cléarete, Éléen, vainqueur au penthlate, et le char de Glaucon, fils d'Étéocle, Athénien. qui remporta le prix de la course da char avec des chevaux faits.

CHAPITRE XVII.

Statues d'athlètes placées de l'autre côté de l'Altis. Statues de Ptolémée, petit-fils de Lagus; d'Hermésianax; d'Épérastus; de l'orateur Gorgias.

Voila tout ce qui mérite de fixer l'attention de celui qui entre dans l'Altis par le côté dont j'ai parlé. Si en y entrant par le côté du Léonidæum, vous dirigez vos pas comme si vous vouliez aller à la droite du grand autel, voici les objets qu'on peut remarquer. Vous voyez d'abord les statues de Démocrate de Ténédos, vainqueur à la lutte parmi les hommes faits, et de Crianius, Éléen, vainqueur à la course avec les armes dans la même classe. La première est de Dionysiclès de Milet, et la seconde de Lysus, Macédonien. Celle d'Hérodote de Clazomènes et de Philinus, fils d'Hégépolis, de Cos, leur ont été érigées par leur patrie, à Hérodote parce qu'il fut le premier Clazoménien qui obtint la couronne à Olympie; il fat en effet vainqueur à la course du stade parmi les enfants; et ceux de Cos en érigèrent une à Philinus à cause de la grande célébrité qu'il acquit en remportant cinq victoires de la course à Olympie, quatre à Pythos, autant à Némée, et onze dans l'Isthme. La statue de Ptolémée, fils de Ptolémée fils de Lagus, lui a été érigée par Aristolaüs, Lacédémonien. On voit ensuite celles de Butas, fils de Polynice, Milésien, vainqueur au pugilat parmi les enfants, et de Callicratès de la Magnésie sur les bords du Léthée, qui remporta deux fois le prix de la course avec les armes ; cette dernière est de Lysippe. Emaution et Alexibius vainqueurs, le premier à la course du stade parmi les enfants, et le second au pentathle, étaient tous deux d'Héræa en Arcadie; la statue d'Alexibius est d'Acestor : quant à Emaution, l'inscription sur sa statue ne nous apprend pas de qui elle est, on y voit seulement que le sculpteur était aussi Arcadien. Hermésianax, fils d'Agonéus, et Eicasius, fils de Lycinus et de la fille d'Hermésianax, tous deux Colophoniens, furent aussi tous deux vainqueurs à la lutte parmi les enfants. La statue d'Hermésianax lui a été érigée par le peuple Colophonien. Des deux enfants Éléens, vainqueurs au pugilat, qui sont auprès, l'un est Chœrilus; sa statue est de Sthénis, Olynthien : et l'autre Théotimus, dont la statue est de Dætondas, Sicyonien. Théotimus était fils de Moschion qui fut de l'expédition d'Alexandre, fils de Philippe, contre les Perses et Darius leur roi. Vous voyez ensuite deux Éléens, Archidamus qui fut vainqueur à la course des chars, et Épérastus, fils de Théogonus, qui le fut à la course avec les armes; la fin de l'inscription qui est sur la statue de ce dernier, nous apprend qu'il était Devin, et de la famille des Clytides. Je me glorifie d'être Devin de la famille sacrée des Clytides, et de l'illustre sang de Mélampus. En effet, Mélampus, fils d'Amythaon, fut père de Mantius, qui eut pour fils Oïdès, père d'Amphiaraüs, et Clytius était fils de la fille de Phégéus et d'Alcméon, fils d'Amphiaraüs; il vint dans l'Élide parce qu'il ne voulut pas rester avec les frères de sa mère, sachant bien qu'ils étaient les auteurs du meurtre d'Alcméon. Parmi quelques autres statues, qui ne sont pas très remarquables, vous trouvez celle d'Alexinicus, Éléen, vainqueur à la lutte parmi les enfants, qui est de Cantharus de Sicyone, et celle de Gorgias, Léontin, qui lui a été érigée à Olympie par Eumolpus, descendant à la troisième géné¬ration,de Déicrate, qui avait épousé la sœur de Gorgias. Gorgias était fils de Carmantidus : on dit qu'il fut le premier restaurateur de l'art oratoire, négligé depuis longtemps, et presque entièrement tombé dans l'oubli ; qu'il se fit admirer par son éloquence dans l'assemblée des jeux olympiques et dans l'ambassade dont il fut chargé conjointement avec Tisias auprès des Athéniens. Tisias fit faire quelques progrès à l'éloquence, et il écrivit d'une manière bien plus persuasive que tous ses contemporains, relativement à la possession de certains biens qu'on disputait à une femme de Syracuse ; cependant Gorgias reçut beaucoup plus d'honneurs que lui à Athènes; et fut mis par Jason, tyran de la Thessalie, fort au-dessus de Polycrate, qui tenait à Athènes une école assez distinguée. On dit que Gorgias vécut cent cinq ans. La ville de Léontine qui avait été détruite par les Syracusains a été de nouveau peuplée de mon temps.

CHAPITRE XVIII.

Char dédié par Cratisthène de Cyrène. Statue du sophiste Anaximène. Ambassade de ce sophiste auprès d'Alexandre eu faveur des habitants de Lampsaque ; son inimitié contre Théopompe. Statue de Sotade de Crète. Les plus anciennes statues d'Athlètes.

Vous voyez ensuite un char en bronze qui a été dédié par Cratisthène Cyrénéen : la victoire est montée sur ce char ainsi que Cratisthène lui-même; il est évident qu'il avait remporté le prix de la course des chars. On dit qu'il était fils de Mnaséas, coureur que les Grecs nommaient le Libyen. Ce char et ces statues sont de Pythagore de Rhégium. J'ai trouvé dans le même endroit la statue d'Anaximène, qui dans le même ouvrage écrivit l'Histoire des anciens temps de la Grèce, ainsi que tout ce qu'avaient fait Philippe, fils d'Amyntas, et ensuite Alexandre. La statue qu'il a à Olympie, lui a été érigée par le peuple de Lampsaque. Voici ce qui Anaximène a fait de digne de mémoire : il surprit par ruse, comme on va le vair, Alexandre, fils de Philippe, qui n'était pas un prince fort traitable et qui se laissait souvent emporter par la colère. Les Lampsacéniens favorisaient le roi des Perses, ou tout au moins en étaient accusés ; Alexandre, irrité contre eux, les menaçait de leur faire éprouver les plus grands maux : alarmés sur le sort de leurs enfants et de leur patrie elle-même, ils envoyèrent Anaximène intercéder pour eux; il avait en effet été connu' de Philippe et ensuite d'Alexandre lui-même. Anaximène alla donc au-devant de ce prince, qui, lorsqu'il le vit venir, jura, dit-on, en prenant à témoin tous les dieux de la Grèce, qu'il ferait tout le contraire de ce qu'il lui demanderait. Alors Anaximène lui dit: Je vous prie, sire, de me faire la grâce de réduire à l'esclavage les femmes et les enfants des Lampsacéniens, de brûler les temples de leurs dieux, et de détruire leur ville de fond en comble. Alexandre ne sachant comment éluder cet artifice, se vit obligé par son serment de faire malgré lui grâce à la ville de Lampsaque. Il paraît qu'Anaximène se vengea d'un de ses ennemis d'une manière très adroite et en même temps très sanglante. Il était sophiste lui-même, et de plus très habile à imiter le style des autres sophistes. Ayant eu quelques différents avec Théopompe, fils de Damasistrate, il écrivit un livre rempli d'invectives contre les Athéniens, les Lacédémoniens et les Thébains ; et ayant imité parfaitement le style de Théopompe, il y mit son nom et l'envoya dans ces villes : il attira ainsi, par un ouvrage qu'il avait fait lui-même, la haine de toute la Grèce sur Théopompe. Personne avant lui ne s'était exercé à parler sans préparation sur toutes sortes de sujets. Il ne me paraît pas certain que les vers sur Alexandre soient de lui. Sotades, dont on voit ensuite la statue, remporta plusieurs prix de la course du dolichus, en la cent quatre vingt-dixième olympiade; il se fit proclamer Crétois, et il l'était réellement. En l'olympiade suivante, ayant reçu de l'argent du peuple d'Éphèse, il se fit Éphésien, et pour l'en punir, les Crétois l'exilèrent. Les premiers athlètes à qui on ait érigé des statues à Olympie sont Praxidamas d'1Egine, vainqueur au pugilat, en la cin¬quante-neuvième Olympiade, et Rhexibius, Opon¬tien, qui remporta le prix du pancrace en la soixante et unième. Leurs statues sont à peu de distance de la colonne d'Œnomaüs, elles sont en bois; celle de Rhexibius, en bois de figuier, et celle de Praxidamas en cyprès :, elle a bien moins souffert que l'autre.

CHAPITRE XIX.

Édifices dans l'Altis nommés Trésors. Trésor des Sicyoniens. Du fleuve Tartesse, et de la ville du même nom. Trésor des Carthaginois. — Des Épidammiens. — Des Sybarites. — Des Libyens de Cyrène. — Des Sélinontiens. — Des Métapontins. — Des Mégaréens près de l'Attique. — Des habitants de Géla.

Il y a dans l'Altis, au nord du temple de Junon, une levée en pierre de tuf qui est adossée au mont Cronius ; sur cette levée sont (les édifices nommés Trésors, semblables à ceux que différents peuples grecs ont érigé à Delphes en l'honneur d'Apollon. On voit d'abord à Olympie celui des Sicyoniens, qui est une offrande de Miron, tyran de Sicyone; il le fit construire après avoir remporté la victoire de la course des chars dans la trente-troisième olympiade. Il y a fait faire deux lits, l'un à la manière dorienne, l'autre à la manière ionienne ; ils sont tous deux de cuivre, et je les ai vus moi-même; je ne sais s'ils sont de cuivre de Tartesse, comme l'assurent les Éléens. Ils disent que le Tartesse est un fleuve de l'Ibérie qui se jette dans la mer par deux embouchures, entre lesquelles est la ville qui porte le même nom. Ce fleuve qui est le plus considérable de tous ceux de l'Ibérie, et qui a un flux et un reflux comme la mer, se nomme maintenant le Bæetis. D'autres prétendent que la ville de Carteïa, dans l'Ibérie, se nommait très anciennement Tartesse. Il y a à Olympie, sur le plus petit de ces lits, une inscription qui nous apprend qu'il pèse cinquante talents, et qu'il a été dédié par Myron et le peuple Sicyonien. On voit aussi dans ce trésor trois disques de la grandeur de ceux dont on fait usage au pentathle ; un bouclier revêtu de cuivre et orné de peintures dans l'intérieur; un casque et des cnémides. L'inscription qui est sur ces armes nous apprend qu'elles sont des prémices de butin offertes à Jupiter (Zeus) par les Myonéens. On ne sait point précisément quels étaient ces Myonéens; cependant je me souviens que Thucydide, en parlant des Locriens, voisins de la Phocide, nomme parmi leurs villes celle de Myones; et les Myonéens, dont le nom se trouve sur ce bouclier, sont, à ce que je crois, les mêmes que ceux du continent de la Locride. Les lettres qui sont sur ce bouclier ne paraissent plus guère, ayant été détruites en partie par la vétusté. Il y a dans ce trésor d'autres choses qui méritent qu'on en parle, savoir : l'épée de Pélops, dont la poignée est en or; une corne d'Amaltée en ivoire, offrande de Miltiade, fils de Cimon, le premier de cette famille qui ait régné sur la Chersonèse de la Thrace. Il y a sur cette corne l'inscription suivante en anciennes lettres attiques: Je suis une offrande des peuples de la Chersonèse, qui me dédièrent à Jupiter (Zeus) Olympien, lorsque sous les ordres de Miltiade ils eurent pris le fort d'Aratus. On y voit aussi une statue d'Apollon en bois, dont la tête est dorée, elle a été offerte par les Locriens du promontoire Zéphyrium; elle est l'ouvrage de Patrocle, fils de Catillus, Crotoniate. A côté du trésor des Sycioniens est celui des Carthaginois, qui est l'ouvrage de Pothæus, d'Antiphile et de Mégaclès. Les offrandes qu'on y voit sont une très grande statue de Jupiter (Zeus) et trois cuirasses de lin ; le tout fut offert par Gélon et les Syracusains, lorsqu'ils eurent vaincu les Carthaginois sur terre et sur mer : le troisième et le quatrième de ces trésors ont été érigés par les Épidamniens ; on y voit Atlas soutenant le globe ; Hercule ; l'arbre du jardin des Hespérides qui portait ces pommes si célèbres et le serpent entortillé autour de cet arbre ; tous ces ouvrages sont en cèdre et de la main de Théoclès, fils d'Hégylus; il les fit pour l'enfant d'Autonome à ce que dit l'inscription qui est sur le globe. Les Hespérides qui étaient aussi là ont été ôtées de leur place par les Éléens, et elles étaient encore de mon temps dans le temple de Junon. Ce trésor des Épidamniens est l'ouvrage de Pyrrhus et de ses deux fils Lacratès et Hermon ; les Sybarites ont aussi fait construire un trésor qui tient à celui des Épidamniens. Tous ceux qui se sont occupés de l'Italie et des villes qu'elle renferme, disent que l'ancienne Sybaris est la même ville que celle qu'on nomme maintenant Lupia, qui est située entre Brindes et Hydrunte ; son port, qui est fait de main d'hommes, est dû à l'empereur Hadrien. Le trésor des Libyens de Cyrène est près de celui des Sybarites; on y voit la statue des empereurs romains. Les Sélinontiens étaient un peuple de la Sicile qui furent vaincus et chassés de leur ville par les Carthaginois; avant ce malheur ils avaient aussi dédié un trésor à Jupiter (Zeus) Olympien. Il renferme une statue de Bacchus (Dionysos), dont le visage, les pieds et les mains sont en ivoire. On voit dans celui des Métapontins, qui tient à celui des Sélinontiens, un Endimion tout entier en ivoire, à l'exception de son vêtement. Je ne sais pas quelle a été la cause de la ruine de Métaponte; il n'en restait plus de mon temps, que le théâtre et l'enceinte des murs. Les Mégaréens du voisinage de l'Attique ont aussi fait construire un trésor; ils y ont mis pour offrande de petites figures de cèdre marquetées d'or, qui représentent le combat d'Hercule et d'Achéloüs. On y voit Jupiter (Zeus), Déjanire, Achéloüs et Hercules ; le dieu Mars est là pour secourir Achéloüs; Minerve (Athéna) y était aussi comme la protectrice ordinaire d'Hercule; mais sa statue est maintenant auprès des Hespérides dans le temple de Junon. On a représenté sur le fronton de cet édifice la guerre des dieux et des géants ; il y a au-dessus du fronton un bouclier avec une inscription, qui nous apprend que c'est du butin pris sur les Corinthiens que les Mégaréens ont construit ce trésor. Je crois que les Mégaréens remportèrent cette victoire sous l'archontat de Phorbas à Athènes ; il était archonte à vie, les Athéniens n'ayant pas encore réduit à un an la durée de cette charge. Les Éléens ne tenaient pas encore de registres des olympiades ; on dit que les Argiens se trouvèrent avec les Mégaréens à ce combat contre les Corinthiens. Les Mégaréens firent construire ce trésor à Olympie plusieurs années après la bataille ; mais il est probable qu'ils avaient depuis longtemps les figures qu'ils y mirent, car elles sont de Dontas, Lacédémonien, élève de Dipœnus et de Scyllis. Le dernier de ces trésors est tout auprès du stade : l'inscription qu'on y voit porte que ce trésor et toutes les offrandes qu'il renferme, sont un don des habitants de Géla, mais il n'y reste plus maintenant aucune statue.

CHAPITRE XX.

Mont Cronius et Sacrifices qu'on y offre à Saturne. Temple d'Ilithye Olympienne. Sosipolis, divinité particulière aux Éléens. Temple d'Hippodamie. Entrée secrète dans le Stade. Prêtresse de Cérès (Déméter) Chamyne. Tombeau d'Endymion. L'Aphésis et son inventeur. Autel nommé Taraxippus. Autres Taraxippus qu'on trouve ailleurs. Statue d'Hippodamie.

Le mont Cronius est, comme nous l'avons vu, tout auprès de cette levée et des trésors qu'on y voit ; ceux qu'on nomme les Basiles sacrifient à Cronus sur le sommet de ce mont vers l'équinoxe du printemps, dans le mois qui porte chez les Éléens le nom d'Élaphius. A l'extrémité du Cronius, au nord, entre les trésors et cette montagne, est le temple d'Ilithye; c'est dans ce temple que les Éléens rendent un culte spécial à Sosipolis, divinité qui leur est particulière : ils donnent à Ilithye le surnom d'Olympienne, et lui choisissent tous les ans une prêtresse. La vieille femme qui est attachée au service de Sosipolis, après s'être purifiée suivant les rites des Éléens, lui porte elle-même des offrandes expiatoires, et met auprès de lui des gâteaux pétris avec du miel. L'autel d'Ilithye est dans la partie antérieure du temple (car le temple est double, et les hommes peuvent y entrer. Sosipolis est adoré dans la partie intérieure; personne ne peut y entrer que la femme qui le sert; alors elle se couvre la tête et le visage d'un voile blanc. Les filles et les femmes, qui sont restées dans le temple d'Ilithye, chantent un hymne et brûlent toutes sortes de parfums en l'honneur de Sosipolis ; il n'est pas permis de lui faire des libations avec du vin. Le serment fait par Sosipolis est regardé comme un des plus inviolables. On dit que lorsque les Arcadiens entrèrent dans l'Élide avec une armée, au moment où les Éléens étaient rangés en bataille devant eux, une femme vint trouver leurs généraux; elle avait à son sein un petit enfant elle leur dit que c'était elle qui avait mis cet enfant au monde ; que d'après des songes qu'elle avait eus, elle le donnait pour auxiliaire aux Éléens. Leurs chefs ayant ajouté foi à ce que disait cette femme, ils placèrent devant l'armée cet enfant tout nu; et lorsque les Arcadiens s'avancèrent sur eux, l'enfant se changea en serpent. Troublés à la vue dé ce prodige, les Arcadiens prirent la fuite ; les Éléens les poursuivirent et remportèrent la victoire la plus signalée. Ils donnèrent à. ce dieu le nom de Sosipolis, lui érigèrent un temple à l'endroit où après le combat le serpent avait paru s'enfoncer sous la terre ; et pensant que c'était Ilithye elle-même qui avait fait naître cet enfant pour eux, ils ordonnèrent qu'elle fût adorée dans le même temple. Le tombeau des Arcadiens qui perdirent la vie dans ce combat est sur la colline qu'on trouve après avoir traversé le Cladéus, en allant vers le soleil couchant. On voit auprès du temple d'Ilithye les ruines d'un temple de Vénus (Aphrodite)-Uranie, sur les autels duquel on fait encore des sacrifices. Il y a dans l'Altis, vers l'entrée par où passent les processions, ce qu'on nomme l'Hippodamium ; c'est une enceinte d'environ un plèthre, entourée d'une balustrade; les femmes y entrent une fois par an, elles y sacrifient à Hippodamie et font d'autres cérémonies en son honneur. Les Éléens disent que Pélops étant très irrité, surtout contre elle, à cause de la mort de Chrysippe, elle se retira à Midée dans l'Argolide, et que dans la suite, d'après un oracle, ils rapportèrent ses os à Olympie. A l'extrémité de l'endroit où sont les statues faites du produit des amendes des Athlètes, il y a une entrée qu'on nomme l'entrée secrète; c'est par elle, que les Hellanodices et les combattants entrent dans le Stade. Ce stade est une levée de terre, et on y a fait une tribune pour ceux qui président à la célébration des jeux; il y a vis-à-vis des Hellanodices un autel de marbre blanc, sur lequel la prêtresse de Cérès (Déméter) Chamyne s'assied pour regarder les jeux : c'est une charge que les Éléens donnent tantôt à l'une, tantôt à l'autre. Il n'est point défendu aux filles d'assister aux jeux. Le tombeau d'Endymion est, à ce que disent les Éléens, à l'extrémité du stade, où est l'Aphésis, d'où partent ceux qui disputent le prix de la course du stade.
En sortant du stade par l'endroit où se tiennent les Hellanodices, vous trouvez la place destinée aux courses de chevaux, et l'Aphésis, (lieu d'où ils partent) ; cette Aphésis a la forme d'une proue de vaisseau dont l'éperon est tourné vers l'espace où se font les courses, et elle s'élargit à l'endroit où elle touche le portique d'Agnaptus ; sur une traverse qui est à peu près au milieu de l'éperon, il y a un dauphin de bronze. Chaque côté de l'Aphésis a plus de quatre cents pieds de long ; on y a pratiqué des loges qu'on distribue par la voie du sort à ceux qui amènent des chevaux pour concourir aux prix. Devant les chars et les chevaux de course est étendue, au lieu de barre, une petite corde. A chaque olympiade on construit au milieu de cette proue un autel de briques crues blanchies en dehors ; sur cet autel est un aigle de bronze dont les ailes sont déployées de toute leur longueur; celui qui est préposé à la course fait agir une mécanique qui est dans l'autel ; alors l'aigle saute de manière à être aperçu par tous ceux qui sont venus pour voir les jeux, et en même temps que le dauphin qui est à l'éperon s'abaisse et descend jusques sous terre. A ce signal on lâche le câble du côté du portique, et aussitôt les chevaux s'avancent vers l'autre côté, où l'on en fait autant. La même chose se pratique dle tous les côtés de la barrière, jusqu'à ce que les combattants avec leurs chevaux et leurs chars se soient assemblés auprès de l'éperon où l'un a soin
de les apparier. Incontinent après ils entrent dans la lice; alors c'est l'adresse des écuyers et la vitesse des chevaux qui décident de la victoire. Cléœtas est celui qui a imaginé cette barrière, et il s'en savait si bon gré, que dans une inscription qui est au bas de sa statue à Athènes, il en tire toute sa gloire; car il fait parler ainsi sa statue: Cléœtas fils d'Aristoclès qui a inventé la barrière d'Olympie, est celui qui m'a faite. On dit pourtant qu'Aristide la perfectionna après lui.
La lice est composée de deux côtés, dont l'un est plus long que l'autre. Le premier est en manière de terrasse; au bout il y a un autel de figure ronde consacrée à un génie qui est l'effroi des chevaux, et que l'on appelle par cette raison Taraxippus. En effet, quand les chevaux viennent à passer devant cet autel, ils prennent l'épouvante sans
qu'on puisse en connaître la cause ; le désordre en est la suite, et il arrive le plus souvent que les chars se fracassent et que les conducteurs sont blessés ; c'est pourquoi ils offrent des sacrifices à Taraxippus, et le prient de leur être favorable. Les Grecs ne s'accordent point entre eux sur ce Taraxippus. Il y en a qui prétendent que c'est le tombeau d'un naturel du pays qui était très habile dans l'art de l'équitation, et qu'ils nomment Olénius; ils ajoutent que c'est de lui que la roche Olénienne en Élide a pris son nom. Suivant d'autres, c'est celui de Daméon de Phlionte, qui suivit Hercule dans son expédition contre Augias et les Éléens ; ils pensent qu'il fut tué ainsi que le cheval qu'il montait, par Ctéatus, fils d'Actor, et qu'il fut enterré en cet endroit avec son cheval. Quelques-uns disent que Pélops érigea dans ce même endroit un cénotaphe à Myrtilus, qu'il lui offrait des sacrifices pour apaiser son ressentiment, et qu'il le surnomma Taraxippus, parce qu'il eut l'adresse d'épouvanter les juments d'Œnomaüs. On dit aussi que c'est Œnomaiis lui-même qui se plaît à nuire à ceux qui courent avec des chevaux. j'ai aussi entendu des gens qui attribuaient cette influence à Alcathus, fils de Porthaon, qui, s'étant présenté pour obtenir la main d'Hippodamie, ayant été vaincu tué par  Œnomaüs, fut enterré là, et que depuis le malheureux succès qu'il eut à la course, jaloux de la gloire des combattants, il fait encore ce qu'il peut pour la leur ravir. Un Égyptien voulut me persuader que Pélops avait reçu d'Amphion de Thèbes quelque chose qu'il cacha en ce lieu-là, et que non seulement cette espèce de charme avait effarouché les chevaux d'Œnoma mais que l'on en éprouvait la vertu encore aujourd'hui. Ce même Égyptien prétendait qu'Amphion et Orphée étaient deux magiciens qui par la force de leurs enchantements commandaient, l'un aux bêtes sauvages, l'autre aux pierres mêmes. Pour moi j'estime que l'opinion la plus probable est l'opinion de ceux qui tiennent que Taraxippus est un surnom de Neptune (Poséidon) Hippius. Dans l'isthme ii v a aussi un Taraxippus que l'on croit être ce Glaucus, fils de Sisyphe qui fut foulé aux pieds de ses chevaux dans les jeux funèbres qu'Acaste fit célébrer en l'honneur de son père. A Némée, dans le pays d'Argos on ne parle d'aucun génie qui fasse peur aux chevaux ; mais au tournant de la lice il y a une grosse roche, rouge comme du feu, dont l'éclat les éblouit et les étonne de la même manière que ferait la flamme. Cependant, à Olympie Taraxippus leur fait bien une autre frayeur. A l'une des bornes on voit une statue d'Hippodamie qui tient un ruban dans sa main, comme pour couronner Pélops, sûr déjà de la victoire.

CHAPITRE XXI.

Temple de Cérès (Déméter) Chamyna. Gymnase dans Olympie. Monuments au-delà du Cladéus. Le fleuve Diagon. Temple d'Esculape Démænétus; de Bacchus (Dionysos) Leucyanite ; de Minerve (Athéna) Cydonia. Les fleuves Parthénias et Harpinnates. Tombeau des prétendants d'Hippodamie et leurs noms.

L'autre côté de l'Hippodrome est, non une levée de terre faite à main d'hommes, mais une colline peu élevée; le temple de Cérès (Déméter) Chamyna est à l'extrémité de cette colline : quelques-uns croient que ce surnom de la déesse est très ancien, et qu'il vient de ce que la terre s'ouvrit dans cet endroit pour donner passage au char de Pluton (Hadès), et se referma ensuite. Suivant d'autres, Chaminus était un habitant de Pise qui s'opposa à Pantaléon, fils d'Omphalion, tyran de cette ville, lorsqu'il voulut se révolter contre les Éléens ; Pantaléon le fit mourir, et on employa son bien à ériger un temple à Cérès (Déméter). Au lieu des anciennes statues de Cérès (Déméter) et de sa fille qu'on voyait dans le gymnase d'Olympie, Hérode l'Athénien en a fait mettre de marbre Pentélique : c'est dans ce gymnase que s'exercent les athlètes qui veulent concourir au pentathle et à la course. Il y a près delà un soubassement de marbre en plein air, sur lequel était anciennement un trophée pour la victoire remportée sur les Arcadiens.  En entrant dans le gymnase, vous voyez à main gauche une enceinte de moindre étendue, où s'exercent les athlètes. Le portique qui regarde le soleil levant est suivi de plusieurs autres édifices qui sont au midi et au couchant, et qui servent à loger les athlètes. Quand vous avez passé le Cladée, vous voyez le sépulcre d'Œnomaüs; c'est un tertre environné d'un petit mur. Au-dessus vous apercevez des ruines d'édifices qui étaient à ce que l'on croit, les écuries de ce Prince. La frontière d'Élide, du côté de l'Arcadie, appartenait autrefois aux Piséens; présentement elle appartient aux Éléens, et du reste elle subsiste telle qu'elle était. Au-delà du fleuve Érymanthe, vers le mont Saurus, on voit un vieux temple d'Hercule qui tombe en ruines, et la sépulture de Saurus, fameux bandit qui infestait tout ce canton et qui fin tué par Hercule. Une rivière qui a sa source au midi passe au pied du mont Saurus, et va tomber dans l'Alphée vis-à-vis du mont Érymanthe ; cette rivière se nomme Iaon et sépare le territoire de Pise d'avec l'Arcadie.
A quarante stades du mont Saurus, ou trouve le temple d'Esculape Déménète, ainsi appelé du nom de son fondateur; ce temple bâti sur une hauteur près de l'Alphée ne présente plus aujourd'hui que des ruines.
 Le temple de Bacchus (Dionysos) Leucyanite n'est pas très éloigné delà, et le Leucyanias passe tout auprès ; il prend sa source dans le mont Pholoé et se jette aussi dans l'Alphée. En traversant ce dernier au-dessous de l'embouchure du Leucyanias, vous vous trouvez dans le pays de Pise. Il y a dans cette contrée une colline finissant en pointe, sur laquelle sont les ruines de la ville de Phrixa, et le temple de Minerve (Athéna) surnommée Cydonia; il est encore maintenant absolument de la forme d'un autel : on dit qu'il avait été érigé à la déesse par Clyménus, l'un des descendants d'Hercules Idéen, et que ce Clyménus était venu de Cydonie, ville de l'île de Crète, près des bords du Jardanus. Les Éléens disent que Pélops y sacrifia à Minerve (Athéna)  Cydonia avant d'entrer en lice avec Œnomaüs. En allant un peu plus avant, vous trouvez le Parthénias, et tout auprès de cette rivière, le tombeau des chevaux de Marmax, qui fut, suivant la tradition, le premier qui demanda Hippodamie en mariage, et fut par conséquent le premier que tua Œnomaüs ; ses juments se nommaient Parthénias et Eriphas. Œnomaüs les égorgea sur le corps de leur maître, et permit qu'on leur donnât aussi la sépulture; ce fut à cause de l'une des juments de Marmax qu'on donna à ce fleuve le nom de Parthénias ;  l'Harpinnas est un autre fleuve près duquel vous voyez les ruines de la ville Harpinne, et entre autres quelques autels qui sont restés; cette ville avait été bâtie par Œnomaüs, qui, du nom de sa mère, la nomma Harpinne. A quelques pas de là vous trouvez un tertre fort élevé; c'est la sépulture des malheureux amants d'Hippodamie ; car Œnomaüs, pour tout honneur, se contentait de les faire enterrer les uns auprès des autre sur quelque éminence. Mais Pélops ensuite les honora d'un magnifique tombeau, ce qu'il fit, dit-on, autant pour la gloire d'Hippodamie que pour la leur. Peut-être aussi ne fut-il pas fâché de laisser un monument de la victoire qu'il avait remportée sur un Prince qui était fameux lui-même par tant de victoires. En effet, si l'on en croit l'auteur du catalogue des femmes illustres, après Marmax, le premier que Œnomaüs vainquit, et à qui il en coûta la vie, ce fut Alcathoüs fils de Parthaon. Euryalus, Eurymaque, et Crotalus eurent ensuite le même sort. Je n'ai pu savoir de quel pays, ni de quelle famille étaient ces trois combattons. Pour Acrias qui les suivit de prés, on peut croire *qu'il était Lacédémonien, et qu'il avait fondé la ville d'Acria. Œnomaüs triompha ensuite de Capetus, de Lycurgue, de Lasius, de Chalcodon, et de Tricolonus; ces cinq périrent comme les autres. Les Arcadiens disent que le dernier était petit-fils de ce Tricolonus qui eut pour père Lycaon. Après lui, Aristomaque, Prias, Pélagon, Eolius et Cronius eurent la même destinée; vaincus à la course, ils furent immolés à la cruauté du vainqueur : quelques-uns ajoutent à ceux-là, Érythrus fils de Leucon, fils d'Athamas, dont on a donné le nom à la ville d'Érythre dans la Béotie, et Éionéus, fils de Magnés, l'un des fils d'Éole. Le tertre dont j'ai parlé est leur tombeau; on dit que Pélops, tant qu'il fut maître de Pise, leur offrait tous les ans des sacrifices.

CHAPITRE XXII.

Temple de Diane Cordace. Fondateur de la ville de Pise. Inimitié des Piséens et des Éléens au sujet des jeux Olympiques. Ville de Pylos. Temple des Nymphes timides. Diane Alphiea ou Élaphiæa.

En avançant environ d'un stade, on trouve les vestiges du temple de Diane surnommée Cordace, parce que les compagnons de Pélops rendirent grâces, par des fêtes, à cette déesse, de la victoire de leur chef, et dansèrent la Cordace, danse particulière aux habitants des environs du mont Sipyle. Non loin de ce temple est un coffre de bronze, dans lequel on conservait les os de Pélops. Il ne reste plus aucun vestige des murs ni des autres édifices de Pise, et l'espace où était la ville est entièrement planté de vignes : on dit qu'elle avait eu pour fondateur Pisus, fils de Périérès, fils d'Eolus. Les Piséens s'attirèrent eux-mêmes leurs malheurs en s'aliénant les Éléens, et en faisant tous leurs efforts pour faire célébrer au lieu des Éléens les jeux olympiques. En la huitième olympiade ils amenèrent Phidon d'Argos, le tyran le plus insolent qu'il y ait eu dans la Grèce, et ils firent célébrer avec lui les jeux. En la trente-quatrième olympiade, Pantaléon leur roi, fils d'Omphalion, rassembla une année tant chez les Piséens que chez les peuples voisins, et fit encore célébrer ces jeux au préjudice des Éléens, qui n'ont point porté ces olympiades sur leurs registres non plus que la cent quatrième, où les jeux furent célébrés par les Arcadiens; ils nomment ces années-là Anolympiades. Les Éléens, en la quarante-huitième olympiade, ayant conçu quelque inquiétude, sur les projets de Damophon, fils de Pantaléon, entrèrent avec une armée dans le pays de Pise; cependant Damophon parvint à force de prières et de promesses à les faire retourner chez eux sans avoir commis aucune hostilité. Mais sous le règne de Pyrrhus, fils de Pantaléon, qui avait succédé à Damophon, son frère, les Piséens déclarèrent de leur propre mouvement la guerre aux Éléens, et soulevèrent contre eux les Macistiens, les Scillontiens de la Triphylie, et les Dyspontiens, peuple voisin des Éléens, mais qui avait de très grandes liaisons avec les Piséens, se souvenant qu'ils avaient pour fondateur Dyspontéus, fils d'Œnomaüs. Les Piséens et tous ceux qui s'étaient engagés dans cette guerre avec eux, furent chassés de leur pays par les Éléens. Il y a encore des vestiges sensibles de Pylos dans l'Élide, sur la route qui conduit d'Olympie à Élis par les montagnes. Ces ruines sont à quatre-vingt stades d'Élis. Pylos avait été fondée, comme je rai dit, par Pylon, fils de Cléson de Mégare; entièrement détruite par Hercule, et rétablie de nouveau par les Éléens, elle cessa dans la suite des temps d'être habitée. Le Ladon passe auprès, et va se jeter dans le Pénée. Les Éléens disent que c'est à cette ville que se rapporte ce que dit Homère : Il tirait son origine du fleuve Alphée qui coule à travers les champs des Pyliens. Je crois qu'ils ont raison, car le fleuve Alphée coule à travers ces ruines, et il est difficile d'entendre ces vers d'une autre Pylos; en effet, l'Alphée ne passe en aucune manière dans le pays des Pyliens, au-dessus de l'île de Sphactérie, et je ne connais dans l'Arcadie aucune ville du nom de Pylos.
A quelque cinquante stades d'Olympie, les Éléens ont le village d'Héraclée, près duquel passe le fleuve Cythérus. Près de-là il y a une fontaine qui va tomber dans ce fleuve, et, sur le bord de la fontaine, un temple consacré à des nymphes qui ont chacune leur nom particulier ; car on les nomme Calliphaé, Synallaxis, Pégée et Iasis ; ce qui n'empêche pas que d'un nom général on ne les appelle aussi les nymphes Ionides. Les bains de cette fontaine sont fort bons pour les lassitudes et pour toute sorte de rhumatismes. Quant aux nymphes, on croit que le nom d'Ionides leur a été donné à cause d'Ion fils de Gargettus, qui quitta Athènes pour venir s'établir là.
Que si vous aimez mieux aller à Élis par la plaine, quand vous aurez fait cent vingt stades vous arriverez à Létrins ; de Létrins à Élis il y a environ cent quatre-vingts stades. Létrins était autrefois une petite ville, bâtie par Létréus fils de Pélops. Aujourd'hui il n'en reste que quelques maisons et un temple de Diane Alphéa avec une statue de la déesse. Quant au surnom d'Alphéa, voici la raison que l'on en donne. Alphée, dit-on, devint amoureux de Diane, et, voyant que ni par prières, ni par aucun autre moyen, il ne pouvait l'engager à l'épouser, il résolut de l'enlever. Diane, qui se douta de son dessin, l'attire à Létrins, où, pour faire sa cour à la déesse, il avait accoutumé d'assister à des divertissements qu'elle donnait les soirs aux nymphes de sa compagnie. Mais, pour rompre les mesures de son amant, on dit qu'elle s'avisa de se barbouiller le visage avec de la boue, et qu'elle en fit autant à toutes ses compagnes
;  de sorte qu'Alphée, lorsqu'il entra, ne pouvant reconnaître la déesse, ni la distinguer des autres, se retira sans avoir pu exécuter son dessein. C'est donc à cause de l'amour qu'Alphée avait pour elle, que les Létrinéens ont donné à Diane le nom d'Alphiæa. Les Éléens, qui dans les commencements étaient amis des Létrinéens, transportèrent à Létrines le culte qu'ils rendaient à Diane
Élaphiæa, et l'assignèrent à Diane Alphiæa ; dans la suite ce dernier nom l'emporta entièrement sur l'autre. Je crois que les Éléens avaient donné à Diane ce surnom d'Élaphiæa à cause de la chasse aux cerfs ; ils prétendent, eux, que ce surnom vient d'une femme de leur pays nommée Élaphium, qui avait été, à ce qu'ils disent, la nourrice de Diane. A six stades ou environ de Létrines, il y a un lac qui ne tarit jamais; il a tout au plus trois stades de diamètre.

CHAPITRE XXIII.

Gymnase d'Élis. Ce qu'on y trouve digne de remarque. Sénat des Éléens, nommé Lalichmium. Rue du Silence. Temple de Diane Philomirax.

Ce qu'Élis offre de remarquable, c'est d'abord un gymnase ancien, où les athlètes font tout ce qu'il leur est prescrit de faire avant de se rendre à Olympie. Il y a dans l'intérieur des platanes très élevés qui couvrent les lieux destinés aux courses; toute cette enceinte se nomme le Xyste, parce qu'Hercule, fils d'Amphitryon, pour s'exercer, travaillait tous les jours à arracher les épines qui y croissaient. Un endroit séparé, où l'on dispute le prix de la course, se nomme Dromos héros, le cours sacré : il y en a un autre où les athlètes pour la course et pour le pentathle s'exercent à courir. On distingue aussi dans le gymnase un endroit nommé Plethrium ; c'est là que les Hellanodices apparient les athlètes suivant leur âge et le genre d'exercice auquel ils se livrent : ils les apparient parla voie du sort. Les autels des dieux qu'on voit dans ce gymnase sont, celui d'Hercule Idæen, surnommé Parastatès, celui d'Éros (l'Amour), celui du dieu que les Éléens ainsi que les Athéniens nomment Antéros, et celui de Cérès (Déméter) et de sa fille. Achille n'y a point d'autel ; mais, d'après un oracle, on lui a érigé un cénotaphe; et au commencement de la solennité olympique, à un jour fixé et vers le coucher du soleil, les femmes Éléennes font différentes cérémonies en son honneur et le pleurent en se frappant. Il y a un autre gymnase plus petit et qui tient à celui dont je viens de parler; on le nomme le tétragone à cause de sa forme : les athlètes qui doivent disputer le prix s'y exercent; on y fait aussi combattre les uns contre les autres les athlètes qui ne luttent plus, et qui se servent de gantelets plus légers. On y voit des statues qui furent érigées à Jupiter (Zeus) du produit de l'amende à laquelle furent condamnés Sosandre de Smyrne, et Polyctor, Éléen. Il est encore un troisième gymnase qu'on nomme Malco, parce que le sol en est mou, et il est permis aux adolescents de s'y exercer pendant tout le temps que dure la fête; à l'un des angles du gymnase on remarque un buste d'Hercule jusqu'aux épaules, et dans une des palestres un bas relief représentant Éros et Antéros; Éros tient une branche de palmier qu'Antéros cherche à lui arracher. De chaque côté du Malco vous voyez la statue d'un jeune athlète au pugilat ; le Nomophylaque des Éléens m'a dit que cet athlète Soit un nommé Sarapion d'Alexandrie, au-dessus de l'île de Pharos; et qu'étant arrivé à Élis dans un moment où le blé manquait, il en donna aux habitants. Par reconnaissance on lui décerna ces statues. Sa victoire à Olympie et sa bienfaisance envers les Éléens sont de la deux cent dix-septième olympiade. C'est dans l'enceinte de ce gymnase qu'est le sénat des Éléens : là, ceux qui ont le talent de parler sur toutes sortes de sujets sans être préparés, et ceux qui ont composé un ouvrage en quelque genre que ce soit, viennent faire preuve de leurs talents. Cet endroit porte le nom de Laliclunium, de celui qui l'a fait construire; il y a tout autour des boucliers faits seulement pour la montre et non pour le service militaire. Pour aller du gymnase aux bains, vous passez par la rue du Silence, et vers le temple de Diane Philomirax; on a donné ce surnom à la déesse à cause du gymnase voisin; quant à la rue du Silence, voici ce qu'on dit de l'origine de son nom. Oxylus ayant envoyé quelques hommes de son armée à la découverte, pour reconnaître ce qu'on faisait dans Élis, ces hommes s'exhortaient mutuellement dans le chemin à observer le plus grand silence, lorsqu'ils seraient près de la ville, afin d'écouter s'ils pourraient apprendre quelque chose par les discours des habitants; ils y entrèrent par cette ruse sans qu'on s'en aperçût, et ayant appris ce qu'ils voulaient savoir, ils retournèrent au camp des Étoliens : ce fut à cause de leur silence qu'on donna ce nom à la rue.

CHAPITRE XXIV.

Place publique des Éléens. Hellanodicée. Portique Corcyraïque. Statue et tombeau de Pyrrhon. Monuments les plus remarquables de la place publique. Temple de Silène. Édifice pour les seize femmes.

Le gymnase a une autre issue qui conduit à la place publique et à l'Hellanodicée ; cette issue passe au-dessus du tombeau d'Achille, et c'est par-là que les Hellanodices ont coutume d'entrer dans le gymnase; dès qu'ils y sont entrés, et avant le lever du soleil, ils apparient ceux qui se livrent à la course, et vers le milieu du jour ceux qui se livrent au pentathle et à tout ce qu'on nomme les exercices pesants.
La place publique des Éléens ne ressemble point à celles des Ioniens, ou des autres villes grecques qui les ont imitées; mais elle est faite d'une manière beaucoup plus ancienne ; elle est composée de portiques séparés les uns des autres par des rues. Cette place porte maintenant le nom d'Hippodrome, et c'est là que les gens du pays dressent leurs chevaux. Le portique qui est au midi est d'ordre dorique; les colonnes le divisent en trois parties. Les Hellanodices y passent presque toute la journée; on érige des autels à Jupiter (Zeus) auprès de ces colonnes; il y en a aussi en plein air dans la place publique, mais en petit nombre, et comme on les construit à la hâte, il n'est pas difficile de les défaire. En allant dans la place publique par ce portique, à son extrémité et à gauche, vous trouvez l'Hellanodicée, qui est séparé de la place publique par une rue. C'est dans cet édifice que demeurent pendant dix mois ceux qui ont été choisis pour Hellanodices, et les Nomophylaques leur apprennent tout ce qu'ils ont à faire pour la célébration des jeux. Il y a un autre portique qui n'est séparé que par une rue de celui où les Hellanodices passent leur journée; on le nomme le portique Corcyraïque. Ils disent que les Corcyréens, étant venus avec des vaisseaux dans leur pays, emportèrent beaucoup de butin; mais qu'ils en prirent eux-mêmes aux Corcyréens beaucoup plus qu'ils n'en avaient emporté, et que ce fut de la dîme de ce butin qu'ils firent construire ce portique. Il est d'ordre dorique, il est double et a des colonnes sur la place publique et sur le côté opposé; il n'y en a point au milieu, mais seulement un mur qui soutient le toit ; des statues sont de chaque côté de ce mur. Celle de Pyrrhon, fils de Pistocrate, sophiste, et qui n'affirmait jamais rien, est sous ce portique, du côté de la place publique. On voit aussi son tombeau à peu de distance de la ville ; l'endroit où il est se nomme Pétra, et on dit que c'était anciennement un bourg. Ce qu'il y a de plus remarquable dans la partie de la place publique qui est à découvert, c'est le temple et la statue d'Apollon Acésius, surnom qui est le même que celui d'Alexicacus chez les Athéniens. Dans un autre endroit sont les statues en marbre du Soleil et de la Lune; celle-ci a des cornes sur la tête, et le Soleil des rayons. Les Grâces ont aussi un temple ; leurs statues sont en bois, et leurs vêtements seuls sont dorés; le visage, les pieds et les mains sont en marbre blanc: elles tiennent, l'une une rose, celle du milieu un osselet, et la troisième un rameau de myrte. On peut facilement conjecturer pourquoi elles ont ces attributs; la rose et le myrte, emblème de la beauté, sont consacrés à Vénus (Aphrodite); et les Grâces sont les compagnes ordinaires de cette déesse : les osselets servent d'amusement aux jeunes garçons et aux jeunes filles, dont la vieillesse n'a pas encore obscurci le front. A la droite des Grâces et sur le même piédestal s'élève une statue d'Éros. On voit aussi dans cet endroit un temple de Silène; c'est à ce dieu seul qu'il est érigé, et non à lui et à Bacchus (Dionysos) à la fois. L'Ivresse lui présente du vin dans une coupe. Les Silènes sont une race mortelle, comme on peut le conjecturer par leurs tombeaux. On voit un tombeau de Silène dans le pays des Hébreux, et un autre dans les environs de Pergame. J'ai vu aussi dans la place publique d'Élis un autre temple de la forme suivante: il n'est pas élevé, il n'a point de murs, mais seulement un toit soutenu par des colonnes de bois de chêne travaillé ; les gens du pays conviennent que c'est un monument sépulcral ; mais de qui, c'est ce qu'ils ne disent pas. S'il en faut croire un vieillard à qui je l'ai demandé, ce serait le monument d'Oxylus. Il y a de plus dans la place publique un édifice pour les femmes appelées les Seize, et c'est là qu'elles tissent le voile de Junon.

CHAPITRE XXV.

Temple consacré aux Empereurs romains. Statue de Vénus (Aphrodite) Uranie. Statue de Vénus (Aphrodite) populaire. Temple de Pluton (Hadès). Temple de la Fortune. Statue d'un Corybante surnommé Satrapès.

Un ancien temple, attenant à la place publique, est entouré d'un cercle de portiques formés par des colonnes; le toit en est tombé, et il n'y reste plus de statue : il est consacré aux empereurs romains. Derrière le portique construit des dépouilles des Corcyréens, il y a un temple de Vénus (Aphrodite)  et une enceinte découverte qui est peu éloignée du temple. On donne le surnom d'Uranie à la Vénus (Aphrodite) qui est dans le temple : sa statue, qui est en or et en ivoire, a été faite par Phidias ; elle a le pied gauche appuyé sur une tortue. L'enceinte qui lui est consacrée, est entourée d'une balustrade. Il y a dans cette enceinte un soubassement sur lequel est Vénus (Aphrodite), assise sur un bouc, le tout en bronze ; cette statue est de Scopas, et on la nomme Vénus (Aphrodite)  populaire. Je laisse aux curieux le soin de rechercher ce que signifient cette tortue et ce bouc. L'enceinte et le temple consacrés à Pluton (Hadès) (car ce dieu a un temple et une enceinte à Élis), ne s'ouvrent chacun qu'une fois par an, et même à cette époque le prêtre est le seul à qui il soit permis d'y entrer. Les Éléens sont les seuls à ma connaissance qui rendent un culte à Pluton (Hadès), et voici quelle en est la cause. Hercule étant venu à la tête d'une armée assiéger Pylos en Élide, Minerve (Athéna)  à ce qu'on dit, l'assista dans cette entreprise, et Pluton (Hadès) vint an secours des Éléens à cause du culte qu'il recevait à Pylos et par haine pour Hercule. Les Éléens citent à l'appui de leur tradition, le passage suivant d'Homère: Le dieu des enfers, tout redoutable qu'il est, ne fut-il pas percé d'un coup de flèche par le fils de Jupiter (Zeus) qui le livra aux plus affreuses douleurs en le perçant à Pylos, parmi les morts? Si, comme Homère le dit, Neptune (Poséidon) alla au secours d'Agamemnon et de Ménélas au siége de Troie, il n'est pas surprenant que le même poète ait cru que Pluton (Hadès) était allé au secours des Pyliens. Les Éléens, en conséquence, ont érigé un temple à ce dieu comme à leur protecteur et à l'ennemi d'Hercule. Je pense qu'ils ont coutume de ne l'ouvrir qu'une fois par an, parce que le chemin des enfers ne s'ouvre qu'une fois aux hommes. La Fortune a aussi un temple à Élis ; il y a sous le portique de ce temple une grande statue en bois doré, à l'exception des pieds, des mains et du visage qui sont en marbre blanc. Là aussi est établi le culte de Sosipolis dans une petite chapelle qui est à gauche du temple de la Fortune. On a peint ce dieu d'après l'idée qu'en avait donné un songe; on lui a donné la forme d'un enfant, et il est revêtu d'une tunique parsemée d'étoiles; il tient de la main gauche la corne d'Amalthée. Il y a dans l'endroit de la ville le plus fréquenté, une statue en bronze qui n'est pas plus grande qu'un homme d'une taille élevée; elle représente un personnage sans barbe, qui a un de ses pieds croisé sur l'autre, et qui s'appuie des deux mains sur une lance. On le revêt d'une robe de laine, d'une de lin et d'une de byssus; j'ai entendu dire que cette statue représente Neptune (Poséidon), qu'elle était autrefois à Samicum dans la Triphylie où on lui rendait de très grands honneurs; on lui en rend de plus grands encore à Élis où on l'a transportée. D'autres disent que c'est Satrapès et non Neptune (Poséidon); Satrapes est un nom qu'ils ont appris des habitants de Patras, leurs voisins; et c'est le surnom d'un Corybante.

CHAPITRE XXVI.

Théâtre et temple de Bacchus (Dionysos). Fête nommée Thyia. Temple de Minerve (Athéna). Statue de Mercure (Hermès). Productions du sol de l'Élide. Le byssus. Vêtements que les Sères fabriquent du fil produit par un insecte. L'île Série. Limite entre le pays des Éléens et celui des Achéens.

Entre la place publique et le Ménium, il y a un ancien théâtre et un temple de Bacchus (Dionysos) dont la statue est de Praxitèle. Bacchus (Dionysos) est un des dieux pour qui les Éléens ont le plus de vénération, et ils disent qu'il honore de sa présence la fête nommée Thyia. A environ huit stades de la ville est un endroit qu'ils nomment Thyion, où ils célèbrent ces fêtes. Les prêtres y portent trois chaudières qu'ils déposent vides dans l'édifice en présence des habitants et même des étrangers, s'il s'en trouve quelqu'un dans le pays. Les prêtres apposent leur sceau sur les portes ainsi que toutes les autres personnes qui veulent en faire de même ; le lendemain chacun peut venir reconnaître son sceau; ensuite on entre dans le temple, et on trouve les trois chaudières pleines de vin. La vérité de ce fait m'a été certifiée par ce qu'il y a de plus recommandable parmi les Éléens et même par des étrangers ; car je ne m'y suis pas trouvé à l'époque de cette fête. Les Andriens disent aussi que tous les ans, aux fêtes de Bacchus (Dionysos), le vin coule spontanément de son temple ; il faut croire les Grecs sur ce point, et l'on doit par la même raison s'en rapporter à ce que les Éthiopiens au-dessus de Syène racontent de la table du Soleil. Il y a dans la citadelle d'Élis un temple de Minerve (Athéna); sa statue est en or et en ivoire ; on dit qu'elle a été faite par Phidias. Un coq a été mis sur son casque, parce que cet oiseau aime les combats ; il est possible qu'il soit consacré à Minerve (Athéna) Ergané. Cyllène, à cent vingt stades d'Élis, est tournée vers la Sicile ; elle a un port très commode pour les vaisseaux ; c'est là que les Éléens conservent les leurs; elle a pris son nom d'un Arcadien. Homère n'a point fait mention de cette ville dans le catalogue; cependant il a fait voir plus loin dans ses vers qu'il n'en ignorait pas l'existence, car il dit: Polydamas tua Otus de Cyllène, le compagnon du fils de Phylée, et le chef des courageux Épéens. On voit dans cette ville un temple d'Esculape et un autre de Vénus (Aphrodite); la statue de Mercure (Hermès), dieu pour lequel ils ont la plus grande vénération, n'est autre chose qu'un membre viril debout sur un piédestal.
L'Élide est un pays fertile en productions de tous les genres, et entre autre en byssus ; on y sème du chanvre, du lin ou du byssus, suivant la qualité du terrain. Les fils que les Sères emploient à faire des vêtements ne sont point tirés d'une écorce; voici comme ils sont produits. Ils ont dans leur pays une espèce d'insecte que les Grecs nomment Ser, mais à qui les Sères donnent un autre nom. Cet insecte est deux fois plus fort que le plus gros des scarabées ; il ressemble pour tout le reste aux araignées qui font leurs toiles sous les arbres, et il a huit pieds comme elles. Les Sères nourrissent ces insectes dans des maisons construites exprès pour eux, où ils sont à l'abri du froid et de la chaleur; leur ouvrage consiste en des filets très déliés qui s'entortillent autour de leurs pieds. On les nourrit durant quatre ans avec des panics, et la cinquième année (car on sait qu'ils ne vivraient pas plus longtemps), on leur donne du roseau vert. Cette nourriture est la plus agréable à ces animaux; ils se jettent dessus avec avidité, et s'en remplissent tellement qu'ils crèvent : on trouve encore beaucoup de ce fil dans leur corps. On sait que la Série est une île dans le fond de la mer Érythrée ; d'autres disent que ce n'est pas la mer Érythrée, mais un fleuve nommé Ser, qui l'embrasse comme le Nil embrasse le Delta, et qu'elle n'est pas entourée par une seule mer; ils ajoutent qu'il y a une autre île Série. Les Sères et ceux qui habitent Abasa et Sacæa, îles voisines, sont Éthiopiens d'origine ; cependant ils ne se disent pas Éthiopiens, et ils se prétendent un mélange de Scythes et d'Indiens.
Il y a cent cinquante-sept stades de chemin d'Élis au fleuve Larisus, qui forme maintenant la limite entre le pays des Éléens et celui des Achéens dans des temps plus anciens c'était le promontoire Araxus qui formait la limite.

FIN DU TOME SIXIÈME.

 

 

FIN DU LIVRE VI DE PAUSANIAS.