De
l'aire.
I. Au mois de juin, préparez l'aire
pour battre le grain, et nettoyez-en d'abord le sol. Ensuite
remuez-le légèrement en y mêlant de la paille et du marc d'huile
sans sel, et aplanissez-le: cette précaution garantit les grains des
mulots et des fourmis. Puis durcissez le sol avec une pierre
cylindrique ou un tronçon de colonne que vous roulerez dessus pour
le raffermir, et laissez-le sécher au soleil. Quelques-uns arrosent
les aires après les avoir nettoyées, et les font longtemps fouler
par des troupeaux de menu bétail qui s'y promènent; quand le sol a
été passé sous leurs pieds, ils attendent qu'il soit entièrement
sec.
Des
moissons.
II. On commence à présent la récolte
de l'orge; mais il faut l’achever avant que le grain ne s'échappe
des épis desséchés, parce qu'il n'est point enfermé dans une capsule
comme le froment. Un bon moissonneur peut, en un jour, récolter cinq
boisseaux dans un champ bien fourni; un moissonneur ordinaire trois,
et le plus inhabile, moins encore. Laissez quelque temps le chaume
de l'orge couché par lent: c'est, dit-on, un moyen de la faire
grandir. C'est également à la fin de ce mois qu'on scie le froment
dans· les pays voisins de la mer, chauds et secs. On reconnaît qu'il
est mûr lorsqu'il présente une forêt d'épis uniformément dorés.
Les habitants des pays plats de la
Gaule emploient pour moissonner une méthode économique; outre
qu'elle épargne la main-d'œuvre, elle termine une récolte entière
avec la journée d'un bœuf. lis ont un chariot monté sur deux petites
roues; la surface carrée est garnie de planches renversées en dehors
qui en évasent la partie supérieure et qui ont moins d'élévation par
devant le char. Là sont rangées, à de légères distances et à la
portée des épis, plusieurs dents recourbées par le haut. Derrière le
char figurent deux timons très courts, comme les bras des litières à
l'usage des femmes. On y atèle à un joug avec des courroies, la tête
tournée vers le char, un bœuf paisible et docile aux mouvements
qu'on lui imprime. Dès qu'il pousse la machine à travers les blés,
tous les épis saisis par les dents s'y entassent, sans que la paille
rompue puisse y entrer, tandis que le bouvier élève ou abaisse le
char qu'il dirige par derrière. Ainsi, en quelques heures, moyennant
un petit nombre d'allées et de venues, il expédie toute la moisson.
Cette méthode est bonne pour les plaines ou les lieux unis, et pour
les pays où la paille n'est point regardée comme un objet
nécessaire.
Du
labourage des champs et de la vigne, de la récolte de la vesce, du
fenugrec, des lentilles, des fèves et des lupins.
III. Faites à présent, dans les
climats très froids, ce que vous avez négligé de faire au mois de
mai. Labourez les parties couvertes d'herbes, ainsi que celles qui
sont ombragées; hersez les vignobles; récoltez la vesce; coupez le
fenugrec pour avoir du fourrage. C'est maintenant qu'il faut achever
la récolte des légumes dans les pays froids. Conservez celle de
lentilles, soit dans la cendre, soit dans des jarres à huile ou à
salaisons, que vous boucherez aussitôt avec du plâtre. Cueillez
aussi les fèves avant le jour, au déclin de la lune, et serrez-les
écossées et rafraîchies, avant son premier quartier, pour les
garantir des charançons. On récolte les lupins ce mois-ci. On peut,
si l'on veut, les semer au sortir de l'aire; sinon on doit les
renfermer dans des greniers à l'abri de toute humidité. On les
conserve ainsi très longtemps, surtout si la fumée donne constamment
sur les greniers.
Des
jardins.
IV. Semez les choux, ce mois-ci, vers
le solstice, pour les transplanter, vers les premiers jours du mois
d'août, dans un lieu entrecoupé d'eaux vives ou humecté par les
pluies qui commencent. Il est également à propos de semer l'ache, la
poirée, les raiforts, les laitues et la coriandre, en n'oubliant pas
de les arroser.
Des
arbres fruitiers et de la greffe en écusson.
v.
On peut encore, ce mois-ci, comme je l'ai dit plus haut, renfermer
une branche de grenadier dans un vase d'argile, afin qu'il porte des
fruits assez gros pour remplir le vase. Dégagez à présent les
rameaux surchargés des poiriers ou des pommiers, en enlevant les
fruits gâtés, afin que la sève, qu'ils pourraient absorber en pure
perte, se reporte sur les bons. Plantez également, à cette époque,
le jujubier dans les pays froids. Faites à présent la caprification
des figuiers, suivant la méthode que j'ai exposée en parlant de leur
culture. Quelques-uns les greffent aussi maintenant. On écussonne le
pêcher dans les pays froids. On fouit le pied des palmiers.
C'est dans ce mois ou dans celui de
juillet qu'on écussonne les arbres fruitiers; mais cette sorte de
greffe ne convient qu'aux arbres dont l'écorce est grasse, comme aux
figuiers, aux oliviers, à d'autres semblables, et même au pêcher,
suivant Martialis. Voici comment elle se pratique. Choisissez, sur
de jeunes branches lisses et fécondes, un bourgeon qui promette
évidemment une belle venue, et cernez-le à la distance de deux.
doigts en carré, de manière qu'il se trouve au milieu du cerne; puis
enlevez légèrement l'écorce avec un instrument bien affilé, sans
blesser le bourgeon, et après avoir aussi enlevé sur l'arbre que
l'on veut greffer, et d'une place lisse et féconde, un écusson garni
de son bourgeon, on l'y attache convenablement, sans que le germe en
souffre, et on le fixe autour du bourgeon, de manière que celui de
l'écusson substitué remplace le précédent; ensuite on l'enduit de
boue, et on laisse le bourgeon libre. On coupe les branches
supérieures de l'arbre, ainsi que ses souches, et, en ôtant les
ligatures au bout de vingt et un jours, on s'aperçoit que ce
bourgeon s'est merveilleusement incorporé à l'arbre étranger,
De la
castration des veaux, de la confection du fromage et de la tonte des
brebis,
VI. Il est encore à propos, comme je
l'ai dit précédemment, de châtrer les veaux ce mois-ci, de faire le
fromage, et de tondre les brebis dans les pays froids.
Des
abeilles.
VII. On châtre les ruches ce mois-ci.
Des signes nombreux vous indiqueront l'époque précise où il faut
récolter le miel. D'abord, quand les ruches sont pleines, les
abeilles ne font entendre qu'un léger murmure. Quand, au contraire,
la place des rayons est vide, le bruit retentit davantage, comme
dans tout bâtiment caverneux. Lors donc que le bourdonnement est
fort et considérable, c'est une preuve que les gâteaux de cire ne
sont pas en état d'être récoltés. De même, lorsque les abeilles
réunissent tous leurs efforts pour chasser de leur domicile les gros
hourdons, elles annoncent qu'il est temps de recueillir le miel. On
châtre les ruches dans la matinée, quand les abeilles engourdies ne
sont pas encore irritées par la chaleur. On y introduit de la fumée
de galbanum et de bouse sèche, qu'on excite sur des charbons mis
dans un fourneau qui renvoie la fumée par une ouverture étroite et
semblable à celle d'un entonnoir renversé. Tandis que cette fumée
éloigne les abeilles, on détache les rayons, et on en laisse la
cinquième partie pour nourrir l'essaim; on enlève ceux qui sont
gâtés et en mauvais état.
On obtient le miel, à cette époque, en
enveloppant plusieurs rayons dans une serviette propre, et en les
pressant avec soin. Mais auparavant, on en retranche les parties
gâtées et celles qui contiennent des larves, parce qu'elles donnent
un mauvais goût au miel vous laisserez pendant quelques jours le
miel nouveau dans des vases ouverts, et vous l'écumerez jusqu'à ce
qu'il soit refroidi et cesse de fermenter comme du moût. Le meilleur
miel est celui qui, avant d'être exprimé une seconde fois, coule,
pour ainsi dire, naturellement.
On prépare également la cire ce
mois-ci pour l'amollir, on jette dans un vase d'airain plein d'eau
bouillante les restes des rayons concassés, puis on verse la cire
fondue dans d'autres vases sans eau, pour lui donner une forme. Si
les nouveaux essaims sortent, en ce temps-ci, à la fin du mois, on
mettra un gardien attentif pour les surveiller, parce que les jeunes
abeilles, que leur âge emporte çà et là, s'enfuient, si on ne les
garde à vue. Comme elles restent un ou deux jours à l'entrée de
leurs demeures, lorsqu'elles veulent en sortir, on se hâtera de les
recevoir dans de nouvelles ruches. Le gardien les observera donc
assidûment jusqu'à la huitième ou la neuvième heure du jour, parce
qu'il est assez rare qu'elles s'échappent ou qu'elles émigrent plus
tard: cependant quelques-unes ne craignent pas de s'évader dès
qu'elles sont dehors.
On reconnaît que les abeilles sont
prêtes à s'enfuir quand, deux ou trois jours auparavant, elles
s'agitent et bourdonnent plus qu'à l'ordinaire. Ainsi, dès que le
gardien en aura fait la remarque en approchant souvent son oreille
de la ruche, il redoublera de précautions pour éviter tout accident.
Ces symptômes indiquent également qu'elles se préparent au combat.
On les apaise avec un peu de poussière ou en jetant sur elles une
pluie d'hydromel, élixir souverain pour calmer le peuple qui le
produit. Mais lorsque les bataillons ainsi pacifiés se suspendent en
un seul groupe à une branche d'arbre ou à tout autre endroit, c'est
une preuve que l'essaim entier n'a qu'un roi, ou que les abeilles
sont réconciliées et que l'union règne entre elles. Si, au
contraire, elles forment deux ou plusieurs groupes suspendus, c'est
un signe de discorde: elles ont autant de rois que vous voyez de ces
espèces de mamelons. Vous chercherez ces rois dans les groupes les
plus nombreux, après avoir frotté votre main d'ache ou de mélisse,
Ils sont un peu plus gros et plus longs que les autres abeilles; ils
ont les pattes plus droites, les ailes courtes, la couleur belle et
brillante, le corps lisse et sans poil, à l'exception d'une espèce
de cheveu qui sort du ventre des plus gros, et dont ils ne se
servent pas néanmoins pour blesser. Il y en a d'autres qui sont
noirs et velus: tuez-les, sauf le plus beau que vous conserverez.
S'il vague souvent avec les essaims, coupez-lui les ailes pour le
fixer; alors aucune abeille ne s'écartera. S'il ne naît aucun essaim
d'une ruche, vous pourrez réunir ceux de deux ou trois ruches. Vous
aurez soin d'arroser les abeilles d'hydromel, et de les tenir
l'enfermées pendant trois jours, un les nourrissant de miel, et en
ne les laissant respirer que par de petites ouvertures.
Quand vous voudrez repeupler une ruche
dévastée par quelque maladie contagieuse, en y introduisant de
nouvelles abeilles, vous examinerez dans d'autres ruches bien
fournies la cire des rayons et les extrémités qui l'enferment les
larves. Dès que vous aurez découvert le signe d'un roi futur, vous
détacherez le rayon avec la postérité qu'il renferme, et vous le
déposerez dans la ruche. Voici à quel signe on connaît qu'il doit
naître un roi. Parmi les alvéoles qui contiennent les larves, s'en
élève un comme un mamelon, plus grand et plus long que les autres.
Mais il ne faut transporter les rayons que lorsque les larves,
prêtes à éclore, s'efforcent, après avoir rongé leur coque, de
dégager leurs têtes: transférées trop tôt, elles périraient.
Si un essaim s'élève subitement en
l'air, effrayez-le en frappant sur un vase d'airain ou de terre : il
regagnera la ruche ou se suspendra aux feuillages voisins. Dans ce
dernier cas, vous l'attirerez avec la main ou avec une cuiller pour
le mettre dans une nouvelle ruche frottée avec les herbes
convenables et du miel. Quand il y sera tranquille, le soit, vous
placerez la ruche parmi les autres.
Des
carreaux à paver et des briques.
VIII. Faites également, ce mois-ci, en
plein air, des carreaux à paver et des briques, suivant la méthode
que j'ai indiquée.
De
quelques expériences faites sur les semences des fruits.
IX. Les Egyptiens, selon les Grecs,
s'assurent ainsi de la bonne réussite de toute semence. Ils
cultivent, à cette époque, un coin de terre dans un champ laboure et
humide, et y sèment toutes les espèces de blés et de légumes sur des
planches séparées. Ensuite, au lever de la canicule, que les Romains
placent au quatorzième jour des calendes d'août, ils examinent les
semences qu'elle brûle et celles qu'elle épargne. Ils négligent les
premières et cultivent les secondes, parce que la constellation
dévorante, en étouffant les unes et en ménageant les autres, a
présagé le bon ou le mauvais succès qui les attend l'année suivante.
De
l'huile de camomille.
X. Quand la camomille est en fleur,
arrachez-en la corolle blanche pour n'en conserver que les étamines
d'or, et faites-en infuser une once par litre d'huile; puis laissez
cette infusion exposée au soleil pendant quarante Jours.
De la
fleur de la vigne sauvage.
XI. Cueillez les raisins sauvages
lorsqu'ils sont en fleur et quand la rosée a disparu; étendez-les au
soleil pour que toute leur humidité s'évapore, et que la fleur
desséchée se détache plus aisément. Ensuite passez-les par un petit
crible à trous assez serrés pour arrêter les graines, et ne laissez
tomber que la fleur. Vous conserverez cette fleur infusée dans du
miel, et, lorsqu'elle y aura été confite pendant trente jours, vous
la préparerez de la même manière et avec les mêmes ingrédients que
le vin rosat.
De
l'orge grillée.
XII. Bottelez de l'orge à demi mûre
qui n'ait pas entièrement perdu sa couleur verte, et faites-la
griller dans un four pour qu'on puisse aisément la moudre. Pendant
qu'on la moudra, vous mêlerez par boisseau une certaine quantité de
sel, et vous la conserverez pour l'usage.
Des
heures.
XIII. Les mois de juin et de juillet
se ressemblent pour la durée des heures.
Ie |
et |
XIe |
heures |
XXII |
pieds |
IIe |
et |
Xe |
heures |
XII |
pieds |
IIIe |
et |
IXe |
heures |
VIII |
pieds |
IVe |
et |
VIIIe |
heures |
V |
pieds |
Ve· |
et |
VIIe |
heures |
III |
pieds |
VIe |
|
|
heure |
II |
pieds. |
|