Du blé,
de l'orge cantherinum, de l'ers, des
lupins, des pois, du sésame et des haricots.
I. On sèmera le blé
adoreum et le froment au mois d'octobre.
L'époque convenable est, dans les climats tempérés, depuis le dix
des calendes de novembre jusqu'aux ides de décembre. On transporte
aussi à présent et l'on disperse le fumier dans les champs. On sème
encore, ce mois-ci, l'orge appelée cantherinum
dans une terre maigre et sèche, ou dans une terre très grasse. En
effet, comme elle amaigrit les guérets, un terrain gras triomphe de
son influence ; d'un autre côté, elle ne peut nuire à une terre que
sa maigreur met hors d'état de rapporter autre chose. On ne la
sèmera pas dans un champ fumé. Semez aussi maintenant l'ers, les
lupins, les pois et le sésame, comme je l'ai dit. Le sésame et le
haricot se sèment jusqu'aux ides d'octobre, mais dans une terre
grasse et dans un sol qui rapporte tous les ans. Quatre boisseaux
couvrent un arpent.
De la
graine de lin.
II. On sèmera, ce mois-ci, la graine
de lin, si on le juge convenable, quoiqu'il vaille mieux s'en
abstenir, parce qu'elle nuit à la terre, dont elle épuise les sucs.
Néanmoins, si cet inconvénient ne vous rebute pas, vous en sèmerez
huit boisseaux par arpent dans un terrain très gras et peu humide.
Quelques-uns le sèment dru dans un sol maigre, et obtiennent ainsi
du lin très fin.
Du choix
des ceps les plus féconds.
III. C'est à présent le temps de la
vendange. Vous examinerez quelles sont les souches les plus
fécondes, et vous les marquerez d'un signe quelconque, afin de
pouvoir en tirer des sarments propres à être plantés. Columelle dit
qu'il ne faut pas seulement un an, mais quatre, pour reconnaître la
fécondité d'une souche, et que c'est alors qu'on est sûr de la
vigueur de ses rejetons.
De la
plantation des vignes.
IV. A la fin de ce mois, dans les pays
où l'air est chaud et sec, où la campagne est pauvre et aride, où
les coteaux sont maigres ou escarpés, il est très à propos de
planter les vignes. J'ai suffisamment parlé de cette opération au
mois de février. C'est à présent le meilleur temps pour faire, dans
les terrains secs, chauds, maigres, chétifs, sablonneux, arides,
tout ce que j'ai dit relativement aux façons des terres, à la
plantation et à la taille des vignes, à la manière de les provigner,
de les renouveler et de les marier aux arbres, afin que les pluies
d'hiver les aident à combattre la pauvreté du sol. Elles seront
ainsi désaltérées, sans être coupées par la glace ou ensevelies sous
la neige, parce qu'on ignore en ces lieux la rigueur et l'âpreté des
frimas.
Du
déchaussement des nouvelles vignes.
V. Après les ides d'octobre,
déchaussez toutes les jeunes vignes dans les terrains façonnés, dans
les fosses ou dans les tranchées, afin de couper les racines
superflues qu'elles ont jetées en été. En se fortifiant, ces racines
étoufferaient celles qui sont inférieures, et la vigne, dont le pied
serait ainsi libre, aurait également à souffrir du froid et du
chaud. Néanmoins ne coupez pas les petites racines qui sont hors de
terre, de peur qu'il n'en sorte un plus grand nombre, ou que la
plaie faite au corps de la vigne ne soit surprise toute fraîche par
la rigueur du froid. Vous les couperez à un doigt au-dessous du sol,
et, si les hivers sont doux, vous laisserez les vignes découvertes;
s'ils sont rudes, vous les recouvrirez avant les ides de décembre;
s'ils sont très rigoureux, vous répandrez au pied des jeunes vignes,
à l'entrée de l'hiver, un peu de fiente de pigeon. Columelle veut
qu'on emploie ce moyen durant cinq années consécutives pour
combattre l'âpreté du froid.
Des
provins.
VI. C'est à présent le meilleur temps
pour provigner les vignes dans les pays dont j'ai parlé, parce que,
débarrassée du soin de donner des branches à fruits, la sève ne
travaille qu'à fortifier les racines.
De la
greffe de la vigne et des arbres.
VII. Quelques-uns sont dans l'usage de
greffer, ce mois-ci, les vignes et les arbres dans les climats très
chauds.
Des
plants d'oliviers.
VIII. On fera encore à présent, dans
les pays chauds et exposés au soleil, des plants d'oliviers d'après
la méthode et l'ordre que j'ai prescrits pour le mois de février. On
fera également, en ce temps-ci et dans les mêmes pays, des
pépinières d'oliviers, et tout ce qui concerne cette espèce
d'arbres. On confira aussi les olives blanches, comme je le dirai
plus tard. C'est maintenant qu'on déchausse les oliviers dans les
pays chauds et secs, afin qu'ils puissent être humectés par l’eau du
ciel. Columelle veut qu'on arrache tous les rejetons. Pour moi, je
pense qu'il convient d'en laisser croître toujours quelques-uns de
forts. On en choisira un pour remplacer son vieux père; et, après
l'avoir bien élevé et engraissé de plusieurs couches de terre, on
transplantera le jeune arbuste muni de ses racines, afin de se
procurer ainsi des plants d'oliviers sans former de pépinières.
Si vous le pouvez, fumez ce mois-ci,
dans les pays très froids, les plants d'oliviers de trois en trois
ans. Six livres de crottin de chèvre ou un boisseau de cendres
suffiront à chacun. Ratissez constamment la mousse des arbres, et
taillez-les, suivant Columelle, quand ils auront passé huit ans. Il
me semble néanmoins qu'il faut en couper chaque année les branches
sèches, infécondes et naturellement faibles. Si un olivier vigoureux
ne rapporte point de fruits, percez-le jusqu'à la moelle avec une
tarière gauloise, et enfoncez-y fortement une bouture informe
d'olivier sauvage; ensuite déchaussez l'arbre, et arrosez-le avec du
marc d'huile sans sel ou de la vieille urine. Tout arbre stérile
devient fécond par cette espèce d'accouplement. Ne cessez pas de
greffer les sujets affectés de ce vice. Nettoyez, à cette époque,
les fossés et les ruisseaux.
Remède
contre l'humidité du raisin qui a souffert de la pluie.
IX. Quand le raisin a trop souffert de
la pluie, les Grecs veulent qu'on transvase le moût qui a déjà
fermenté par l'effet naturel de son poids, l'eau l'este ainsi au
fond, et le vin transvasé se conserve pur, après avoir déposé toute
la partie aqueuse dont il était chargé.
De
l'huile verte et de l'huile de laurier.
X. On fera maintenant l'huile verte de
la manière qui suit. Cueillez les olives les plus nouvelles
lorsqu'elles commencent à tourner ; et, si vous avez mis quelques
jours il les cueillir, étendez-les pour qu'elles ne s'échauffent
pas. Ne jetez celles qui sont sèches ou pourries. Quand vous en
aurez amassé suffisamment pour remplir le pressoir, vous les
saupoudrerez de sel égrugé, ou mieux de gros sel, et vous en mettrez
trois boisseaux sur dix d'olives. Vous les écraserez, puis vous les
déposerez dans des paniers neufs ou vous les laisserez toute la nuit
avec leur sel pour qu'elles s'en imprègnent. Vous commencerez à les
pressurer le matin, pour en extraire une huile d'autant plus exquise
qu'elle aura pris le goût du sel. Vous laverez à l'eau chaude les
canaux et tous les réservoirs, pour qu'ils ne conservent rien de
rance de l'année précédente. Vous n'approcherez pas, non plus, le
feu de l'huile, de peur que la fumée n'en altère le goût. On cueille
à la fin de ce mois, dans les pays secs et chauds, les baies de
laurier pour en faire de l'huile.
Des
jardins.
XI. Semez au mois d'octobre des
chicorées que vous consommerez en hi ver. Les chicorées aiment l'eau
et un sol léger. Dans les terrains sablonneux, salés et voisins de
la mer, clics montent très haut. Préparez-leur des planches battues
pour en assurer les racines contre le dégravoiement du sol. Quand
elles auront quatre feuilles, vous les transplanterez dans un
terrain fumé.
Plantez à présent les artichauts en
pied. Avant de les enterrer, coupez avec le fer le bout de leurs
racines, et trempez-les dans du fumier. Pour en favoriser le
développement, mettez-en deux ou trois ensemble dans des fosses d'un
pied, et à trois pieds de distance les uns des autres. Dans les
temps secs, à l'entrée de l'hiver, répandez-y souvent de la cendre
et du fumier.
Semez la moutarde ce mois-ci. Elle se
plaît dans une terre travaillée, et, s'il se peut, rapportée,
quoiqu'elle vienne partout. Il faut la sarcler constamment pour la
couvrir d'une poussière qui l'échauffe; elle n'en aime pas moins
l'humidité. Laissez à sa place la moutarde dont vous voulez
recueillir la graine; quant à celle que vous destinez à la table,
vous la rendrez plus forte en la transplantant. La vieille graine
n'est bonne ni à semer ni à manger. Celle qui paraît verte à
l'intérieur, quand on la casse sous les dents, est nouvelle; au
contraire, la blancheur de la graine indique qu'elle est vieille.
Semez la mauve ce mois-ci: plus tard,
l'hiver l'empêcherait de se développer. Elle se plaît dans les
terrains gras et humides; elle aime le fumier. On la transplante
quand elle commence à avoir quatre ou cinq feuilles. Jeune, elle
prend mieux; transplantée déjà grande, elle languit. Son goût est
meilleur quand elle l'este où elle a été semée pour l'empêcher de
monter trop vite, mettez au milieu de sa tige un peu de terre ou de
petits cailloux. Semez-la clair. Elle aime à être sarclée
constamment. Débarrassez-la, sans en ébranler les racines, des
herbes qui l'entourent. Si vous nouez les racines en la
transplantant, elle pommera.
Semez aussi à cette époque l'aneth
dans les pays chauds ou tempérés. Semez encore ce mois-ci les
ciboules, la menthe, le panais, le thym et l'origan, ainsi que la
câpre au commencement du mois. Semez également la poirée dans les
terrains secs, de même que le raphanisaigre, ou transplantez-le,
pour l'adoucir, dans un sol cultivé; car c'est un raifort sauvage.
Transplantez maintenant le poireau semé au printemps, afin que sa
tête prenne de l'accroissement. Sarclez-le constamment; saisissez-le
en le soulevant comme avec des pinces, afin que le développement de
sa tête remplisse le vide laissé sous les racines. Semez aussi à
présent le basilic. On prétend qu'il vient plus tôt en ce temps-ci
quand on l'arrose légèrement de vinaigre.
Des
arbres fruitiers.
XII. Celui qui veut travailler pour
les siècles futurs, pensera à semer des palmiers. Il enterrera, ce
mois-ci, des noyaux frais de dattes jeunes et grasses, en mêlant de
la cendre avec la terre. S'il veut planter l'arbre en pied, il le
devra faire au mois d'avril ou de mai. Le palmier se plaît dans les
terrains chauds et exposés au soleil. On l'arrose souvent pour le
faire croître. Il demande une terre meuble ou du sablon; cependant,
quand on le plante en pied, il veut autour de lui ou sous lui une
couche de terre grasse. On le transplante au bout d'un an ou de
deux, au mois de juin ou au commencement de juillet. On le fouit
constamment pour qu'un arrosement continuel le fasse résister aux
feux de l'été. L’eau un peu salée lui est salutaire. On met du sel
dans de l'eau, si l'on n'en a pas qui soit naturellement salée.
Quand un palmier est malade, on le déchausse, et on l'arrose avec de
la lie de vin vieux, ou l'on en coupe les racines superflues, ou
bien on perce les racines, et l'on y enfonce un coin de saule. Le
terrain où naît cet arbre ne convient il presque aucune espèce de
fruits.
On plante les pistachiers en automne,
au mois d'octobre, soit en rejetons, soit en amandes; mais il vaut
mieux encore semer les pistaches en nature, mâles et femelles
accouplés ensemble. On appelle pistache mâle, celle dont l'écorce
renferme des noyaux pareils à des testicules. Quand on veut cultiver
avec soin le pistachier, on prépare des pots percés qu'on remplit de
terreau, et dans lesquels on met trois pistaches ensemble, afin que
chacune donne un germe. Lorsque la plante a pris des forces, on la
transfère ainsi plus aisément au mois de février. Le pistachier se
plaît dans un sol chaud, mais humide; il aime les arrosements et le
soleil, On le greffe sur le térébinthe au mois de février ou de
mars; des auteurs cependant assurent qu'on peut le greffer sur
l'amandier.
Le cerisier aime les climats froids et
les terrains humides. Il est de petite venue dans les pays tempérés.
Il ne peut supporter le chaud. Il se plaît dans les pays montagneux
ou sur les collines. Transplantez, au mois d'octobre ou de novembre,
des pieds de cerisier sauvage que vous grefferez au commencement de
janvier, quand ils auront pris. On forme des pépinières de cerisiers
en semant dans ces mêmes mois, des cerises qui viendront avec une
extrême facilité. J'ai acquis la preuve de l'heureuse disposition
qu'a le cerisier à pousser, en voyant monter en arbre des baguettes
que j'avais échalassées dans un vignoble. On peut encore semer les
cerises au mois de janvier.
On greffe avantageusement le cerisier
au mois de novembre, ou, s'il est nécessaire, à la fin de janvier,
Des auteurs prétendent qu'on le greffe aussi en octobre, Martialis
veut qu'on greffe les cerisiers sur le tronc. Pour moi, je me suis
toujours bien trouvé de les avoir greffés entre l'écorce et le bois,
Ceux qui les grefferont sur le tronc, d'après Martialis, ôteront
tout le duvet qui l'entoure, et qui, comme l'assure cet auteur,
nuirait aux greffes si on le laissait. On aura soin de ne greffer
les cerisiers et tous les autres arbres à gomme qu'à l'époque où la
gomme n'a pas encore paru, ou quand elle a cessé de couler. On
greffe le cerisier sur lui-même, sur le prunier, sur le platane et,
selon quelques auteurs, sur le peuplier. Il aime les fosses
profondes, un emplacement large, il demande à être foui souvent.
Vous en élaguerez les branches pourries et sèches, et vous
éclaircirez celles qui seront trop serrées. Il est ennemi du fumier,
qui le fait dégénérer.
Voici la méthode de Martialis pour
faire venir des cerises sans noyaux. Coupez un jeune arbre à deux
pieds de terre, et fendez-le jusqu'à la racine; ratissez avec le fer
la moelle de chaque moitié ; rapprochez-les immédiatement après avec
un lien, et enduisez de fumier la tête de l'arbrisseau, ainsi que
les joints des cotés. Au bout d'un an, la fente aura disparu. Vous
grefferez cet arbre avec des rejetons qui n'aient pas encore porté
de fruits, et, comme cet auteur l'assure, il en naîtra des cerises
sans noyaux.
Si un cerisier vient à se carier à
cause de l'humidité, percez-en le tronc pour la faire écouler. S'il
est infesté par des fourmis, versez-y du jus de pourpier mêlé, à
parties égales, avec du vinaigre, ou bien frottez le tronc avec de
la lie de vin lorsque l'arbre est en fleur. S'il est fatigué par les
chaleurs de la canicule, rafraîchissez-en les racines, entre le
coucher du soleil et le lever de la lune, avec trois setiers d'eau
puisés il des sources différentes. Vous pourrez encore tresser
autour du tronc de la jusquiame en forme de festons, ou étendre au
pied de l'arbre une couche de la même plante. La seule manière de
conserver les cerises, est de les faire sécher au soleil jusqu'à ce
qu'elles soient ridées.
Quelques-uns plantent au mois
d'octobre les pommiers dans les pays chauds et secs, mettent en
terre dans des pépinières, vers les calendes de novembre, les
coings, les sorbes ou les amandes, et sèment la graine de pin. Il
faut confire les fruits à cette époque, et les conserver à mesure
qu'ils mûrissent, d'après la méthode que j'ai indiquée sous les
titres qui concernent chacun d'eux,
Des
abeilles.
XIII. Vous châtrerez les ruches, ce
mois-ci, de la manière que j'ai prescrite, en vous réglant sur la
quantité de miel. Vous en enlèverez la plus grande partie, s'il s’en
trouve abondamment; s'il y en a peu, vous en laisserez la moitié
pour les besoins de l'hiver; si les alvéoles sont pauvres, vous n'en
ôterez absolument rien. J'ai enseigné plus haut la méthode pour
préparer le miel et la cire.
De la
manière de travailler les vins d'après les Grecs.
XIV. Afin de ne rien omettre de ce que
j'ai lu, je vais faire connaître ce qu'ont dit les Grecs, avec leur
bonne foi équivoque, de la manière de travailler le vin. Voici les
différences qu'ils établissent, suivant la nature et la qualité des
vins : le vin doux est lourd; le vin blanc et peu salé est
diurétique; le vin dont la couleur orangée flatte la vue, facilite
la digestion; le vin blanc et styptique donne du ton à l'estomac; le
vin d'outre mer rend pâle et ne fait que peu de sang; le raisin noir
donne du vin fort, le rouge du doux, et le blanc communément du
médiocre.
Pour travailler le vin, quelques
auteurs grecs y mettent du moût cuit jusqu'à réduction de moitié ou
d'un tiers. D'autres veulent que l'on conserve, durant un an, de
l'eau pure puisée dans la mer au moment où elle est calme et
limpide. Ils soutiennent que telle est la nature de cette eau, que
ce temps suffit pour lui faire perdre son goût salé, son amertume et
son odeur, et qu'elle s'adoucit en vieillissant. Ils en mêlent un
quatre-vingtième avec le moût en y joignant un cinquantième de
plâtre. Trois jours après, ils agitent fortement ce mélange, et
prétendent que cette opération non seulement permet au vin de
vieillir, mais encore lui donne une belle couleur. On remue et on
soigne le vin tous les neuf jours, ou, au plus tard, tous les onze
jours, parce qu'en le surveillant souvent on est à même de juger si
on doit le vendre ou le garder. Quelques-uns jettent dans une
futaille trois onces de résine sèche broyée et l'agitent. Par ce
moyen, disent-ils, le vin devient diurétique.
Suivant les Grecs, voici comment il
faut soigner le moût qu'auront affaibli des pluies fréquentes, ce
dont on pourra s'assurer en le goûtant. Laissez-le cuire en entier
jusqu'à diminution d'un vingtième, ou plutôt ajoutez-y un centième
de plâtre. Les Lacédémoniens le font cuire jusqu'à diminution d'un
cinquième, et le boivent quatre ans après.
Pour rendre moelleux un vin dur, les
Grecs conseillent de mettre dans un petit vase de vin deux cyathes
de fleur de farine d'orge pétrie avec le vin, et de la laisser
reposer pendant une heure. Quelques-uns y mêlent de la lie de vin
doux; d'autres y ajoutent un peu de réglisse sèche, et le boivent
après avoir longtemps agité le vase. Les Grecs disent encore que le
vin acquiert en peu de jours un parfum exquis, lorsqu'on jette dans
un tonneau des baies sèches et pilées de myrte sauvage cueillies sur
des montagnes : on laisse reposer le vin pendant dix jours, et on le
passe avant de le boire, vous amasserez aussi des fleurs de vigne
mariée à des arbres, et vous les ferez sécher à l'ombre. Après les
avoir pilées et passées au crible avec soin, vous les conserverez
dans un vase neuf, pour en mettre, à votre gré, sur trois tonneaux
de vin, la valeur de la mesure appelée chœnica
par les Syriens. Vous boucherez ensuite ces pièces, et vous les
ouvrirez six ou sept jours après pour votre usage.
On rend, selon les Grecs, le vin
agréable en y plongeant une quantité suffisante de fenouil ou de
sarriette que l'on agite, ou en mettant dans un vase deux pignons
provenant de deux pins différents, grillés et enveloppés d'un linge:
on bouche ensuite le vase, et on boit le vin au bout de cinq jours.
Pour donner au vin nouveau le goût du vin vieux, concassez et pilez
ensemble une certaine quantité d'amandes amères, d'absinthe, de
gomme de pin à fruits et de fenugrec; mettez-en un cyathe par
amphore, et vous aurez un vin de première qualité. Si vous craignez
qu'il ne contracte quelque vice, ajoutez-y à doses égales de
l'aloès, de la myrrhe et du marc de safran battus et réduits en
poudre ; mêlez-y du miel, et mettez-en un cyathe par amphore. De
même, si vous voulez donner au vin de l'année l'apparence de vin
vieux, broyez et passez au crible une once de mélilot, trois de
réglisse et de nard celtique, deux d'aloès hépatique; mettez six
cuillerées de cette composition dans cinquante setiers de vin, et
exposez le vase à la fumée.
Voulez-vous changer du vin rouge en
vin blanc, suivant les Grecs, jetez-y de la fécule de fèves, ou
versez dans une amphore de vin rouge trois blancs d'œufs, et remuez
longtemps ce mélange: le lendemain le vin sera blanc. Ajoutez-y de
la fécule de pois d'Afrique; le même jour, il changera de couleur.
Telle est aussi la propriété des vignes: brûlez des ceps qui
produisent du raisin blanc ou du rouge, et mettez-en les cendres
dans du vin: elles lui imprimeront chacune leur couleur. La cendre
de la vigne qui porte du raisin rouge rougira le vin; l'autre le
blanchi ra, pourvu que vous versiez dans une futaille de dix
amphores un boisseau de cendres de sarment, et qu'après les a voir
laissées pendant trois jours dans le vin, vous le teniez couvert et
bouché: au bout de quarante jours, vous le trouverez blanc ou rouge,
selon la couleur que vous aurez choisie.
Voulez-vous fortifier un vin faible ;
d'après les Grecs, suivez la méthode que voici : Mettez dans le vin
une décoction de feuilles, ou de racines, ou de tiges tendres d'althéa,
c'est-à-dire de grande mauve, ou bien du plâtre, ou deux cotyles de
pois chiches, ou trois noix de cyprès, ou une poignée de feuilles de
buis, ou de la graine d'ache, ou des cendres de sarments que le feu
aura réduits à lin filet délié en les dépouillant de toute partie
solide. Pour clarifier et bonifier, en un même jour, du vin amer,
broyez ensemble dans une petite quantité de vin, dix grains de
poivre et vingt pistaches. Après les avoir remués, mettez-les dans
six setiers de vin; ensuite laissez le vin reposer, et passez-le
pour le boire peu de temps après. De même, pour clarifier
sur-le-champ un vin chargé de lie, mettez sept pignons dans un
setier de vin, remuez-le longtemps, puis laissez-le un peu reposer:
il s'éclaircira bientôt. Vous le passerez, et vous pourrez le boire.
Les Grecs prétendent encore (et c'est,
dit-on, un secret révélé aux Crétois par l'oracle d'Apollon Pythien)
que, pour rendre le vin blanc et lui faire prendre un goût de
vétusté, il faut broyer ensemble les drogues suivantes et les
réduire en une poudre très fine, passée au crible, savoir: quatre
onces de fleurs de jonc odorant et d'aloès hépatique, une once de
bon mastic, autant de cannelle et de poivre, une demi once de
spica-nard, et une once d'excellente myrrhe et d'encens mâle qui ne
soit pas rance. Quand le moût aura fermenté, on j'écumera et ou
enlèvera tous les pépins de raisin qu'il aura renvoyés à sa surface;
ensuite on mettra sur dix amphores de vin trois setiers italiques de
plâtre battu et passé au crible, après avoir transvasé le quart du
vin qu'on veut travailler. On y remettra du plâtre, et l'on agitera
fortement la pièce pendant deux jours avec un roseau vert et garni
de ses racines. Le troisième jour, on jettera doucement dans dix
amphores de vin quatre cuillerées de la poudre prescrite, et l'on
ajoutera par-dessus le quart du vin transvasé, comme je l'ai dit,
pour remplir la pièce, qu'on remuera encore longtemps, afin que
toute la masse du moût se pénètre de la vertu de ces drogues. On
couvrira et on fermera la pièce, en y laissant un petit trou qui
donnera de l'air au vin pendant sa fermentation. Mais, au bout de
quarante jours, on bouchera le trou, et alors on pourra goûter le
vin à son gré. On n'oubliera pas, avant tout, de faire remuer le vin
par un enfant impubère ou par une personne assez propre. On
n'enduira pas non plus la pièce avec du plâtre, mais avec de la
cendre de sarments.
Enfin, d'après les mêmes auteurs,
voici comment on fait un vin anti-pestilentiel et stomachique:
Déposez dans un métrétès d'excellent moût, avant que la
liqueur fermente, huit onces d'absinthe broyée et enveloppée dans un
linge; retirez les au bout de quarante jours, survidez le vin dans
de plus petits vases, et faites-en usage. Ceux qui ont coutume de
travailler le vin avec du plâtre, le font, ce mois-ci, quand le moût
a jeté sa première écume. Si le vin est naturellement trop doux et
d'un goût aqueux, il suffira d'y mettre deux setiers de plâtre sur
cent conges de vin. Mais s'il est fort, contentez-vous de la moitié
de cette dose pour une pareille quantité.
Du vin
rosat sans roses.
XV. Vous ferez à présent, de la
manière suivante, du vin rosat sans roses : Mettez dans une
corbeille de palmier des feuilles vertes de citronnier, et
déposez-les dans un vase rempli de moût qui ne fermente pas encore;
puis bouchez le vase. Quarante jours après, ajoutez-y du miel, et
servez-vous-en comme de vin rosat, quand vous le jugerez à propos.
Du vin
de divers fruits.
XVI. On fait, ce mois-ci, des vins
avec tous les fruits dont nous avons déjà parlé.
Du vin
miellé.
XVII. Prenez la quantité que vous
voudrez de moût provenant de grandes et belles vignes, vingt jours
après qu'on l'aura tiré de la cuve; mêlez-y un cinquième d'excellent
miel, non écumé après l'avoir fortement battu jusqu'à ce qu'il
blanchisse, et agitez-le vivement avec un roseau garni de ses
racines. Vous le remuerez ainsi pendant quarante ou mieux cinquante
jours consécutifs, et, après chaque opération, vous le couvrirez
d'un linge propre, il travers lequel pourra aisément passer le gaz
produit par la fermentation. Au bout des cinquante jours, vous
enlèverez avec la main, après l'avoir lavée, toutes les immondices
qui surnageront ; puis vous mettrez le vin dans un vase que vous
boucherez soigneusement avec du plâtre, et vous le laisserez
vieillir. Néanmoins il vaudra mieux le survider au printemps suivant
dans de plus petits vases enduits de poix, que vous couvrirez avec
soin après les avoir garnis de plâtre, et le serrer dans un cellier
frais et souterrain, ou dans du sable de rivière, ou le tenir, sur
ce même sol, en partie plongé dans l'eau. Moyennant ces précautions,
le temps ne l'altérera jamais.
Du
defrutum, du carœnam
et du sapa.
XVIII. Faites à présent le
defrutum, le carœnum
et le sapa. Comme ces vins se font également tous avec du moût, ce
n'est que la nature de la fabrication qui en change la qualité,
ainsi que le nom. En effet, le defrutum,
dont le nom dérive de defervere, est
le moût fortement bouilli jusqu'à ce qu'il soit épaissi; le
carœnum est le moût réduit aux deux
tiers; le sapa est le moût réduit à un tiers. Ce dernier vin
gagne en qualité lorsqu'on le cuit avec des coings, et qu'on le
chauffe avec du bois de figuier.
Du
passum.
XIX. Le passum
se fait à cette époque avant la vendange, tous les Africains
l'épaississent et lui donnent un goût agréable. Il préserve des
flatuosités lorsqu'on l'emploie, en guise de miel, pour faire du vin
épicé. On cueille une très grande quantité de grappes qu'on renferme
dans des paniers de jonc à claire voie, et qu'on bat vigoureusement
avec des verges. Ensuite, lorsque la masse entière des grappes est
divisée par la violence des coups, on pressure ce raisin. Tout ce
qui s'écoule du pressoir est du passum.
On le renferme dans un vase, et on le conserve comme le miel.
Du
cotignac.
xx.
Pelez des coings mûrs, coupez-les en petites tranches bien minces,
et rejetez les parties dures qui forment le cœur. Ensuite faites
bouillit, ces fruits dans du miel jusqu'à réduction de moitié, en
les saupoudrant de poivre fin pendant la cuisson. Autre recette:
Mêlez ensemble deux setiers de jus de coings, un et demi de vinaigre
et deux de miel; faites bouillir ce mélange jusqu'à ce qu'il soit
aussi épais que du miel pur; joignez-y deux onces de poivre pilé et
de gingembre.
De la
manière de conserver du levain pour faire des gâteaux au vin doux.
XXI. On compose une pâte avec du
froment nouveau bien mondé qu'on arrose avec du moût de première
serre, en mettant une amphore de moût sur un boisseau de farine, et
on la fait sécher au soleil. On renouvelle ces deux opérations
jusqu'à trois fois, et l'on fabrique avec cette pâte de petits pains
semblables à des gâteaux au vin doux. Après les avoir fait sécher au
soleil, on les met dans des vases d'argile neufs qu'on enduit de
plâtre. Ils servent de levain lorsqu'on veut faire des gâteaux au
vin doux.
Manière
de faire le raisin sec selon les Grecs.
XXII. Voici comment on fait le raisin
sec à la manière des Grecs. Tordez sur le cep même les grappes du
raisin le meilleur, le plus doux, le plus transparent, et
laissez-les y sécher d'elles-mêmes. Une fois cueillies,
suspendez-les, attachez-en plusieurs pour les mettre dans des vases,
posez-les sur des feuilles de vigne sèches et fraîches, et
pressez-les avec la main. Quand les vases seront pleins, remettez
par-dessus des feuilles fraîches comme les premières, couvrez les
vases et placez-les dans un lieu frais et sec, à l'abri de toute
fumée.
Des
heures.
XXIII. Le mois d'octobre ressemble à
celui de mars pour la longueur des ombres.
Ie |
et |
XIe |
heures |
XXV |
pieds |
IIe |
et |
Xe |
heures |
XV |
pieds |
IIIe |
et |
IXe |
heures |
XI |
pieds |
IVe |
et |
VIIIe |
heures |
VIII |
pieds |
Ve· |
et |
VIIe |
heures |
VI |
pieds |
VIe |
|
|
heure |
V |
pieds. |
|