RETOUR À L’ENTRÉE DU SITE

ALLER à LA TABLE DES MATIERES D'ORIBASE

ORIBASE.

COLLECTION MÉDICALE.

LIVRE VI

DES EXERCICES

LIVRE VI.

[DES EXERCICES.]

1. Du coucher, tiré d'ANTYLLUS
2. Du repos (Hipp. Vict. rat. II, § 6o, t. VI, p. 574.)
3. De l'abstinence (Cels. II, 16)
4. Du sommeil et de la veille, tiré de GALIEN (Hipp. Vict. rat. II, § 6o,t. VI, p. 570; Paul. I, 97 et 98; Act. Spir. anim. II, 6)
5. De l'utilité du sommeil, tiré d'ANTYLLUS
6. Des veilles
7. De la conversation
8. De la déclamation
9. Quelle est la meilleure méthode de déclamation (Aët. III, 5)
10. De la déclamation salutaire (Synops. I, 5; Aët. III, 5; Paul. I, 19)
11. Des exercices, tiré de GALIEN (Synops. I, 2; Aët. III, 2; Paul. I, 16;Act. Spir. anim. II, 11 ; Meth, med. III, 11 )
12. Quel est le temps convenable pour les exercices
13. De la friction préparatoire (Synops. I, 1; Aët. III, 1; Paul. I, 15)
14. Des diverses espèces d'exercices et de leur efficacité (Synops. I, 3;Aët. III, 3; Paul. I, 17)
15. Comment il faut s'exercer
16. De la friction apothérapeutique
17. De la friction considérée en elle-même (Hipp. Vict. rat. II, § 64 et 65, t. VI, p. 580-82; Cels. II, 14; Synops. I, 4; Aët. III, 4 ; Paul. I, 18)
18. De la friction du matin (Ath. IV, 48 [Ét. 49])
19. De la friction du soir (Aët. IV, 49)
20. De la friction comme moyen curatif, tiré d'HÉRODOTE, (Cels. 11, 14)
21. De la promenade, tiré d'ANTYLLUS (Hipp. Vict. rat. II, § 62, t. VI, p. 576; Cels. II, 2)
22. De la course (Hipp. Vict. rat. II, § 63, t. VI, p. 578)
23. Du mouvement passif (Cels. II, 15; Aët. III, 6)
24. De l'équitation (Aët. III, 7)
25. Du mouvement passif qui convient dans les fièvres, tiré d'HÉRODOTE (Cels.II, 15)
26. De l'exercice du cerceau, tiré d'ANTYLLUS (Hipp. Vict. rat. II, § 63, t. VI, p. 578-80)
27. De la natation
28. De la lutte (Hipp. Vict. rat. II, § 64, t. VI, p. 580)
29. Du combat simulé
30. De la gesticulation
31. Du saut simple et du saut progressif
32. Du jeu de paume
33. Du corycos (Hipp. Vict. rat. II, § 64, t. VI, p. 580)
34. De la manière de lancer des haltères
35. De la marche sur un terrain accidenté
36. Du combat en armes (Athen. IV, 39-41)
37. Du coït, tiré de GALIEN (Hipp. Vict. rat. II, § 58, t. VI, p. 572; Ad Eun. I, 13
38.  Sur le même sujet, tiré de RUFUS; ce chapitre contient aussi le régime (Synops. I, 6; Ad Eun. I, 13; Aët. III, 8, et XI, 35; Paul. I, 35)

LIVRE VI.

1. DU COUCHER.

(Tiré d'Antyllus.)

[Du quatrième livre, lequel traite De ce qu'on fait soi-même en vue de la santé.]

Il convient de faire coucher ceux qui sont affectés de maladies aiguës, car ceux qui sont dans cet état ne doivent pas se fatiguer; quant à ceux qui ont des affections chroniques, ils doivent se coucher seulement pendant les exacerbations ; dans les intervalles, rien ne les empêche de prendre du mouvement, car ils ont besoin de quelque chose qui les remue et d'excitations variées. Quant à la position que les malades doivent tenir dans le lit, celle où la tête est plus élevée que le reste du corps convient aux malades qui souffrent de la tête, excepté aux frénétiques ; car, chez eux, nous préférons la position horizontale sur le dos, parce que la position élevée pourrait occasionner du trouble. De même, dans les affections de la poitrine, la position élevée doit être recommandée. La position horizontale sur le dos convient aux dysentériques, aux malades qui souffrent de l'estomac, de l'utérus ou des flancs. Dans la gonorrhée, le satyriasis et l'affection des reins, il est bon de se coucher sur l'un des deux côtés, car ces maladies s'aggravent par la position horizontale sur le dos : la gonorrhée et le satyriasis, parce que cette position échauffe les parties malades; l'affection des reins, parce que les lombes sont comprimés dans cette position. Ceux qui se nourrissent mal et digèrent lentement font bien de se coucher sur le côté gauche, parce que, dans cette position, le foie enveloppe l'estomac et le réchauffe; cependant, dans les affections squirrheuses, les gonflements et les dépôts inflammatoires du foie, la position sur le côté droit est la meilleure; de même, si la rate est atteinte d'affections semblables, il vaut mieux se coucher sur ce viscère. Dans les douleurs de ventre, dans l'iléus et dans les affections du colon, il faut préférer la position moyenne entre la position horizontale sur le dos et le coucher sur le côté gauche; mais il faut remarquer que ceux dont le colon est affecté sont soulagés par la position où les pieds sont plus élevés que le reste du corps. Le coucher sur le ventre remplit la tête et les organes des sens, mais cette position n'est pas sans avantage pour ceux qui ont le ventre lui-même douloureux ou refroidi.

2. DU REPOS.

(Tiré du même livre.)

La tranquillité et le repos conviennent aux mêmes malades que le décubitus, mais ils conviennent surtout soit au commencement, soit pendant l'accroissement des accès et quand on vient de prendre de la nourriture. Le repos est également convenable immédiatement avant le sommeil.

3 DE L'ABSTINENCE.

(Tiré du même livre.)

Réprimer la surabondance de chair et de sang, cuire les aliments non digérés, évacuer la pléthore, dessécher les fluxions, surtout celles qui tiennent à la pléthore, [tels sont les effets de l'abstinence]. Elle diminue aussi l'excès d'humidité, elle apaise encore les douleurs, non pas celles qui tiennent à l'acrimonie, mais celles qui viennent d'un arrêt de la pléthore dans les pores.

4. DU SOMMEIL ET DE LA VEILLE.

(Tiré de Galien.)

Le sommeil humecte toujours, de même que les veilles dessèchent toujours, tandis que par sa nature le sommeil ne réchauffe ou ne refroidit pas toujours; mais, quand les malades n'ont pas de fièvre, et que, trouvant dans le corps des humeurs pituiteuses, crues, ou enfin froides de telle ou telle façon, il les élabore et les amène à maturité en les changeant en bon sang, il réchauffe le malade en augmentant sa chaleur innée; si, au contraire, la putréfaction de ces humeurs a déjà causé la fièvre, il refroidira, en éteignant la chaleur fébrile, tandis qu'il augmente la chaleur propre. Si donc le sommeil augmente et renforce la chaleur propre et naturelle, et qu'il détruise et épuise la chaleur acquise et contre nature, on aura raison de dire que notre corps est devenu en même temps plus chaud et plus froid par le sommeil. Les inconvénients du sommeil étant de deux espèces, les uns communs, quand les malades dorment au commencement des accès, les autres propres à certaines maladies, quand ils dorment à une autre période, il faut admettre que ces derniers inconvénients sont dangereux ; car les premiers n'indiquent ni la mort, ni quelque autre chose, puisqu'ils tiennent à la nature de la période; en effet, au commencement des accès, la chaleur et les humeurs convergent vers le centre du corps, et, s'il y a quelque inflammation d'un viscère, il est naturel qu'elle s'augmente, et, si quelques humeurs se rassemblent dans le ventre, elles ne sont pas élaborées comme dans tout autre sommeil, mais elles deviennent beaucoup plus abondantes. Voilà pourquoi nous exhortons les malades à veiller dans cette période afin d'opposer la tendance qu'ont le pneuma, le sang et la chaleur qui les accompagne à se porter vers l'extérieur par suite de la veille, comme un remède efficace, à celle qui les pousse vers la profondeur du corps à l'époque de l'invasion. Quant au sommeil qui arrive aux autres périodes de l'accès, il est généralement suivi d'un avantage évident, surtout s'il arrive au déclin; car celui qui arrive à l'acmé même, ou même quelquefois vers la dernière partie de l'augment qui touche à l'acmé, fait quelquefois aussi un bien manifeste, il est vrai, mais de tous les avantages, le plus évident se montre pendant le déclin. De même, le sommeil, s'il nuit, est moins pernicieux pendant l'acmé et l'augment de l'accès, tandis que celui qui a lieu au déclin l'est beaucoup, car, si une chose quelconque, à l'époque où elle est habituellement très-avantageuse, non seulement ne fait aucun bien, mais même cause encore du dommage, il est probable qu'elle présage la mort. Les inconvénients du sommeil sont l'opposé de ses avantages; ces inconvénients sont d'empêcher la fièvre de se résoudre ou de l'augmenter, d'aiguiser les douleurs, de rendre les fluxions plus abondantes et d'accroître l'inflammation. Le sommeil est utile aux humeurs qui doivent être élaborées, la veille l'est à celles qui doivent être enlevées par la perspiration. Le sommeil augmente la tendance des humeurs vers l'estomac, les intestins et le foie; la veille, au contraire, opère sur elles une révulsion. Quand il existe une hémorragie produite par une plaie, le sommeil l'arrête, la veille la rappelle. Quand il faut atténuer les humeurs épaisses ou visqueuses, la veille est utile, pourvu qu'elle ne soit pas prolongée outre mesure, car il faut que ces humeurs soient élaborées à leur tour, ce qui se fait parle sommeil. Il est très-nuisible aux humeurs éminemment froides qu'on permette aux malades de dormir autant qu'ils veulent, car, à cause du refroidissement, ils ont de la tendance au sommeil, quoi-qu'il ne leur soit pas utile, mais, dans tous les cas semblables, on dormira autant qu'il faut pour rétablir les forces qui s'épuisent pendant la veille et pour opérer quelque coction; car le sommeil est produit soit parce que la chaleur innée, par quelque fatigue ou par un excès de sécheresse, se porte là où s'élabore la nourriture, soit parce que l'excès d'humidité la rend impuissante à rayonner vers l'extérieur; or le sommeil dont nous avons parlé en premier lieu est salubre et naturel, et celui que nous avons mentionné en second lieu est semblable au sommeil du coma et du léthargus.

5. SUR L'UTILITÉ DU SOMMEIL.

(Tiré d'Antyllus.)

[Du quatrième livre, lequel traite De ce qu'on fait soi-même en vue de la santé.]

Le sommeil relâche ce qui est tendu, ramollit ce qui est dur, fond ce qui est coagulé, rend lisse ce qui est raboteux; en outre il apaise les secousses du corps et les troubles de l'âme, rend la respiration uniforme, arrête les flux, en épaississant les humeurs dans le corps. Le temps favorable pour le sommeil dans les maladies intermittentes est l'intervalle des accès ; si l'accès est long, la période de l'acmé et celle du déclin sont les plus convenables, celle du début est la moins avantageuse ; le temps qui précède l'accès est également peu convenable. Si la durée de l'augment est courte, il ne faut pas permettre de dormir pendant cette période; si, au contraire, elle est longue, et que l'augment arrive après le milieu du jour, il faut empêcher les malades de dormir, car tout sommeil du soir est naturellement mauvais mais, si le milieu de l'augment vient après minuit et coïncide à peu près avec le lever du soleil, il faut permettre de dormir. Dans les maladies continues, la nuit est plus propre au sommeil que le jour, et, parmi les diverses parties de la nuit, celle qui vient après la troisième heure, surtout la dernière partie, est plus propice que celle qui la précède; parmi les diverses parties du jour, celle du lever du soleil est préférable jusqu'à midi.

6. DES VEILLES.

(Tiré du même livre.)

Les veilles dissipent la pléthore, font descendre les matières con-tenues dans le ventre et les préparent à être évacuées par en bas: elles dissipent la torpeur, chassent la pesanteur, excitent les parties épuisées, donnent du ton à la nature et à l'âme, et répriment les sueurs. On doit conseiller à ceux qui prennent un médicament purgatif de veiller jusqu'à ce que la purgation soit entièrement terminée. Il faut aussi veiller quand on vient de prendre des aliments ou des boissons ainsi que pendant et avant l'invasion des accès, comme nous l'avons dit dans la chapitre sur le sommeil. Les moyens qui produisent la veille sont les suivants : friction un peu rude et sans graisse, surtout si elle se fait avec du linge grossier et nouveau (il faut surtout frotter les jambes); liniments plus ou moins âcres, comme ceux qui contiennent de la soude brute, de l'euphorbe, de l'adarce, de l'armarinte, du cresson, de la pariétaire d'Espagne, de la dauphinelle, des baies de Guide ou de la moutarde; il faut aussi placer des cataplasmes de moutarde sur les jambes. Les moyens suivants produisent également la veille : prurit violent, arrachement des poils, tiraillement des doigts, titillation de l'oesophage au moyen de l'introduction des doigts, suppositoires appliqués au siège, desquels nous avons décrit la composition; parmi les médicaments qu'on fait flairer, ceux qui sont de mauvaise odeur et provoquent des éternuements, médicaments âcres appliqués aux yeux, ainsi que l'huile elle-même qu'on verse dedans, ventouses appliquées aux aines, cris continuels poussés à l'oreille, nouvelles qui troublent, exhortations pressantes, choses terribles à voir ou dures à entendre. Et, si ces moyens de traitement ne produisent pas seulement la veille, mais dissipent aussi le cataphora, qu'y aurait-il à cela d'extraordinaire?

7. DE LA CONVERSATION.

(Tiré du quatrième livre.)

La conversation a, jusqu'à un certain point, la faculté de remplir la tête et de causer de la pesanteur; elle épuise aussi les forces, surtout dans les fièvres, et à plus forte raison pendant l'invasion ; elle donne de la soif, dessèche la langue et provoque des vomissements. Elle ne convient pas non plus à ceux qui ont des ophtalmies ou des hémorragies nasales, et bien moins encore à ceux qui ont des hémoptysies; mais elle est utile à ceux qui ont une tendance démesurée à s'endormir.

8. DE LA DÉCLAMATION.

(Tiré du quatrième livre.)

La déclamation est un exercice de la poitrine et des organes de la voix, et encore plus de la chaleur naturelle, puisqu'elle augmente, purifie, renforce et atténue la chaleur, et qu'elle rend les parties solides du corps fortes, pures et résistantes. Nous employons la déclamation tantôt pour guérir une maladie, que la voix soit fatiguée ou que ce soit tout le corps, tantôt pour améliorer la voix, qu'elle soit affectée accidentellement ou congénialement. La déclamation convient dans les cas de vomissements qui tiennent à une affection de l'orifice de l'estomac, aux gens qui ont des renvois acides ou qui sont sujets aux mauvaises digestions; elle est également utile à ceux qui abondent en pituite et aux femmes qui ont des appétits contre nature; mais elle ne convient pas aux affections de la tête parce qu'elle a, jusqu'à un certain point, la propriété de causer de la plénitude dans cette partie et dans les organes des sens qui y sont logés. Elle est encore utile à ceux qui n'ont point d'appétit ou qui profitent mal de la nourriture, et bien plus encore aux paralytiques, aux hydropiques et aux asthmatiques; elle est aussi très avantageuse dans la convalescence des maladies. La voix souffre tantôt d'une conversation démesurément prolongée, tantôt parce qu'on a crié trop fort, tantôt à cause de l'acuité et de l'intensité des sons proférés, et enfin elle souffre aussi du silence, oubliant pour ainsi dire ses propres fonctions; dans tous les cas énumérés, le traitement par la déclamation est utile, car il dissipe [les inconvénients causés par] la conversation trop longtemps prolongée, il guérit le mal produit par les cris trop forts en le détruisant doucement, et il remédie [au dommage causé par] les sons aigus en faisant descendre la voix aux tons graves. Quoiqu'on ne puisse pas appeler proprement fatigue de la voix le mal qui résulte du silence, il a cependant quelque chose de semblable à la fatigue, et la déclama­tion est également utile dans cette espèce d'affection, puisqu'elle exerce la voix; elle est encore utile comme traitement secondaire quand les organes de la voix sont fatigués ou que tout le corps est affaibli ou en proie à la lassitude.

9. QUELLE EST LA MEILLEURE MÉTHODE DE DÉCLAMATION.

(Tiré du quatrième livre.)

Quand on veut déclamer, on doit auparavant aller à la selle, subir une friction douce, surtout aux parties inférieures, essuyer sa figure avec une éponge ou la laver, causer auparavant doucement et attendre ensuite quelques instants, ou, ce qui vaut mieux encore, se promener auparavant et passer ensuite à la déclamation. Celui qui ne manque pas d'éducation littéraire doit réciter un morceau qu'il sait par coeur, qui lui paraît beau et qui passe fréquemment du langage doux au langage âpre. Si on ne sait pas de vers épiques, on récitera des ïambes ; les élégies occupent le troisième rang, et la poésie lyrique le quatrième. Il vaut mieux, pour celui qui déclame, réciter par coeur que de lire. Il faut d'abord déclamer, en se tenant dans les notes les plus basses, faisant descendre la voix autant que possible, ensuite on montera aux notes les plus élevées, et, après cela, ne s'arrêtant pas longtemps à ces notes élevées, on reviendra au point de départ, en faisant descendre peu à peu la voix, jusqu'à ce qu'on arrive à la note la plus basse, par laquelle on avait commencé. La durée de la déclamation se détermine d'après les forces, le plaisir qu'on y trouve et l'habitude.

10. DE LA DÉCLAMATION SALUTAIRE.

Ayant appris par l'expérience que l'exercice de la voix, exécuté selon la règle, est le plus efficace de tous les moyens qu'on ordonne pour raffermir et pour conserver la santé, je me suis efforcé, autant qu'il m'était possible, de décrire la nature de ce mode de traitement et les diverses manières de l'employer. Il est temps maintenant de dire quelle est la véritable méthode d'exercer la voix pour raffermir la santé du corps et prolonger la vie. Toute voix doit son origine à l'air qui se répartit pendant l'inspiration et l'expiration et qui est façonné (articulation et timbre) par le moyen des organes que la nature a construits à cet effet; ainsi la matière de la voix est l'air qu'on respire, et l'art (moyens expressifs) de la voix, s'il faut s'exprimer de cette façon, réside dans les parties du corps qui donnent une forme à l'air. Les bonnes ou les mauvaises qualités de la voix tiennent donc indispensablement soit à l'air soit aux organes qui lui donnent sa forme ; or ces organes sont la partie supérieure de la trachée, celle qu'on appelle épiglotte, et les diverses parties de la bouche, la langue, le palais, les dents, les lèvres, toutes parties qui sont, construites dans une harmonie et une proportion parfaites avec les fonctions. Il faut donc examiner dans quel état et dans quelles conditions de distribution l'air produit la meilleure voix. Pendant les tons très aigus, il arrive que le cou et la région hyoïdienne sont comprimés et rétrécis, la partie postérieure de la langue étant appuyée fortement vers le haut contre les parties qui environnent la luette, que le reste du tronc éprouve un resserrement proportionné à celui des parties susdites, et que le volume de l'air qui parcourt les organes de la voix est en raison du degré de dilatation de ces parties; au contraire, si on émet ou si on chante les notes les plus graves, le cou se dilate et s'aplatit autant que possible, les parties postérieures de la langue s'éloignent fortement des parties voisines de la luette, beaucoup d'air est poussé à travers ces parties pendant la production de la voix, et tout le reste du corps est détendu et relâché par l'effet de la raréfaction. Il faut donc renoncer sans hésiter à l'émission des notes aiguës, à l'exercice inutile qui consiste à remonter peu à peu depuis les notes les plus graves, et de lutter en forçant sa voix sur les notes aiguës; sous quel rapport, en effet, la beauté du chant et de la voix contribuera-t-elle à raffermir la santé du corps? mais ce sont les notes graves qu'il faut cultiver, car la source principale et la plus importante des bienfaits de la voix, c'est l'air attiré à l'intérieur par l'inspiration en aussi grande quantité que possible, à travers la trachée et les conduits imperceptibles qui s'ouvrent à la surface du corps; on y arrivera surtout par une dilatation considérable des canaux qui attirent l'air; or cette dilatation est opérée par un exercice fait avec soin, qui consiste à faire des efforts pour élargir et pour dilater ces conduits, et à les forcer peu à peu à admettre [par l'inspiration], et à rejeter de nouveau [par l'expiration] autant d'air que possible; car on trouvera que presque tous les bienfaits de la voix viennent de l'abondance de l'air; en effet, on n'émettra jamais une voix forte sans un air puissant par sa quantité, jamais de voix étendue sans disposer d'un air abondant; jamais on ne soutiendra sa voix pendant un long espace de temps, si la quantité de l'air ne suffit pas à la durée de la voix ; il n'y aura pas de voix corsée, claire ou pleine, si l'air par la petitesse et la faiblesse de son émission ne produit qu'un son creux, sourd et mat; les mots ne seront ni entiers ni clairs, s'ils sont dérobés et coupés à cause de la petite quantité d'air qui ne peut suffire à leur émission; [en un mot] ou ne tirera jamais rien de bon de la voix, à moins de mettre en mouvement un air abondant et copieux. Ainsi, puisque la quantité de l'air qu'on respire paraît être le point le plus important sous le rapport des bonnes qualités de la voix, c'est à cela que doivent, avant tout, s'appliquer ceux qui exercent leur voix ; mais quelle est la manière de s'exercer fructueusement? c'est ce qui reste à dire. Or, comme l'attraction de l'air dans l'intérieur du corps se fait par la dilatation de la poitrine, du ventre et des conduits disséminés partout dans la chair (car l'air est poussé forcément dans l'espace vide formé par la dilatation, en vertu de la nécessité qu'impose la nature de remplir le vide), nous admettrons des flots d'air par la bouche, le nez, et aussi une grande quantité par les conduits répandus sur toute la surface, et nous introduirons dans notre intérieur une quantité d'autant plus grande de l'air ambiant, que nous aurons agrandi davantage l'espace vide des parties qui doivent l'attirer. Voilà pourquoi les gens dont la chair est dense et pourvue de pores étroits ont la voix grêle et produisent des sons faibles, tandis que ceux qui ont la chair rare et les pores dilatés ont la voix forte; par conséquent, à cause de l'étroitesse des pores, les enfants, les femmes et les eunuques ont la voix plus faible que les hommes, et les malades plus faible que ceux qui se portent bien. Puisque nous avons prouvé que l'utilité des exercices de la voix dépend de l'abondance de l'air attiré par la respiration et que cette abondance tient à son tour à la dilatation et à l'élargissement des pores, il nous reste à rechercher comment ce dernier effet se produit. Comme tout espace vide et toute cavité dans le corps s'étendent et se dilatent de deux manières, soit que les membranes qui limitent les cavités soient refoulées peu à peu [de l'intérieur] dans l'espace qui les environne de tous côtés, soit que les parties qui enveloppent ces cavités en augmentant peu à peu de volume [augmentent en même temps le leur], nous devons, avec un soin égal, dilater les conduits à l'aide de ces deux moyens. Il faut donc éviter tout resserrement et tout ce qui peut le produire, relâcher autant que possible en maintenant le corps, non pas étendu en longueur, mais ramassé en largeur. On doit, en outre, augmenter la quantité d'air, en s'efforçant tour à tour d'en attirer peu à peu, pendant l'inspiration, plus que de coutume, par la dilatation préalable et volontaire des cavités qui doivent l'admettre, et d'en expulser graduellement autant d'air qu'il est possible à l'extérieur, d'exprimer et d'évacuer avec plus ou moins de force celui qui était entré auparavant; car le relâchement et la diffluence de la chair élargiront les conduits, l'inspiration forcée d'une plus grande quantité d'air les dilatera toujours de plus en plus, et les efforts qu'on fait pendant l'expiration pour rejeter autant d'air que possible, élargissent considérablement les conduits; en effet, la quantité d'air dont on aura besoin pour remplacer celui dont on a usé est d'autant plus grande, qu'un se sera efforcé de vider plus exactement la poitrine d'air pendant l'expiration. Par conséquent, l'exercice de la voix raréfie le corps par la dilatation des conduits, tandis que tous les autres exercices foulent les chairs, les condensent et les épaississent; il rend le corps léger par la dilatation des conduits qui sont au milieu des chairs, les autres le rendent lourd, pesant et épais. On peut voir que la chair façonnée par l'exercice de la voix, au moyen de la raréfaction qu'elle entraîne, cède et prête facilement à toutes les fonctions possibles, tandis que, par les autres exercices, elle devient résistante, dure et insensible ; voilà pourquoi la plupart des athlètes ont l'intelligence plus stupide que le commun des hommes. Il faut donc donner la préférence à l'exercice de la voix, car d'abord elle amène, pendant la lecture et la prononciation même une excrétion manifeste d'humeurs surabondantes; pour ceux qui lisent avec effort, cette excrétion est plus considérable et se fait par là sueur; pour ceux qui y mettent moins d'action, elle se fait par la perspiration insensible, laquelle s'effectue par tout le corps; pour les uns et les autres, elle est produite par les humeurs abondantes rejetées en soufflant pendant l'expiration qui accompagne l'émission des mots, et par les superfluités abondantes expulsées en raclant pendant l'atténuation et l'éréthisme causés par l'émission de la voix aussi bien que par les crachats, le mucus et la pituite qui s'évacuent [ en même temps]. Il se fait aussi, pendant la respiration intense produite à dessein par l'exercice de la voix, à la suite de la dilatation des canaux, une grande dépense d'humeurs, soit qu'elles s'échappent imperceptiblement à la surface du corps, soit qu'on les rejette en soufflant par le nez et par la bouche. Quel autre remède serait plus utile que l'activité produite pendant l'exercice intelligent de la respiration à ceux qui demandent à être échauffés pour cause de froideur? car le souffle, au moyen de son mouvement de progression très varié, excite et allume en nous, pendant le frottement, la chaleur interne, et cause, par la continuité de son action, un tel incendie dans notre corps, que, si nous ne nous rafraîchissions pas à chaque instant par le refroidissement inhérent à l'inspiration, il nous arriverait, sans que nous nous en fussions aperçus, la même chose qu'a ceux qui sont surpris par un accès de chaleur. Nous venons de démontrer que ceux qui exercent convenablement la voix dépensent l'excès d'humidité qui est en eux et corrigent l'excès de refroidissement. Quand, au contraire, le sec ou le chaud semble prédominer outre mesure dans le corps, la grande quantité d'air qui entre pendant l'inspiration, par suite de la dilatation des conduits, humectera fortement les parties desséchées, et ramollira la dureté causée par la sécheresse, car l'air est plus subtil et plus humide que toute espèce d'eau. Est-il encore besoin de dire que rien ne refroidira et n'éteindra mieux la chaleur démesurée du corps que l'air attiré incessamment pendant l'inspiration? Il faut, par conséquent, lire et déclamer souvent, en relâchant tout le corps, et, quand la chair est devenue assez diffluente pour se raréfier, on doit, en s'efforçant de dilater la trachée et les autres conduits de l'air, déclamer dans les notes les plus graves de la voix et renoncer sans hésiter aux sons qui montent graduellement, avec une recherche artistique, à la note de la dernière corde, car l'acuité de la voix est ce qu'il y a de plus contraire à la force, à la puissance et à la dilatation des conduits, tandis qu'elle est favorable à la beauté du chant, à la variété des sons ainsi qu'aux modulations bien ménagées dans le chant, mais on trouvera qu'aucune de ces choses n'est bonne pour raffermir la santé du corps ; il faut étendre, autant que possible, l'émission de la voix dans les notes graves en forçant le son; car il se fait une dépense très évidente de l'humidité intérieure chez ceux qui lisent ou qui parlent tout haut. Ceci se reconnaît par la vapeur abondante qu'on voit sortir de la bouche chez ceux qui lisent, par l'excrétion des superfluités retenues depuis longtemps et qui s'échappent à travers les conduits qui leur sont respectivement destinés, non seulement par ce, qu'on appelle l'expiration, mais aussi, immédiatement, d'une manière perceptible aux sens, par les crachats, le mucus et la pituite pendant l'expuition ; et par tous ces moyens le corps se débarrasse des causes morbifiques. Il ne faut pas employer au hasard et imprudemment les exercices de la voix dont nous venons de parler, recommandation qui s'applique surtout à ceux qui se livrent à cet exercice sans y être accoutumés; on ne doit donc pas s'y livrer ni quand on est rempli d'humeurs mauvaises et corrompues, ni quand on souffre d'une indigestion considérable et évidente, de peur qu'il ne se fasse dans le corps une distribution trop forte de vapeurs corrompues causée par l'activité de l'inspiration et de l'expiration devenue plus intense et plus forcée pendant qu'augmentent la grandeur et l'étendue de la voix.

11. DES EXERCICES.

(Tiré de Galien)

Tout mouvement n'est pas un exercice, mais seulement les mouvements plus ou moins forts, or la force est quelque chose de relatif; par conséquent le même mouvement sera pour tel homme un exercice, tandis qu'il ne l'est pas pour tel autre. La limite de la force de l'exercice est le changement de la respiration, en sorte que, pour les mouvements qui ne changent pas la respiration, on ne se sert pas encore du nom d'exercice. Ainsi, puisque l'exercice est un mouvement fort, les trois premières conséquences suivantes en résulteront indispensablement pour tout corps qui s'exerce : les organes deviennent plus durs en se frottant l'un contre l'autre, la chaleur innée est augmentée et le mouvement du pneuma devient plus violent; ces conséquences donnent lieu, à leur tour, à tous les autres avantages partiels que les corps retirent des exercices ; la dureté des organes amène leur résistance aux causes morbifiques et la force pour l'exécution des fonctions, la chaleur [augmentée], une attraction plus forte des matières à distribuer, une transformation plus facile, une nutrition meilleure et une fonte des parties elles-mêmes, fonte par laquelle les parties solides deviennent plus molles, les fluides plus ténus et les conduits plus larges [qu'auparavant] ; par le mouvement violent du pneuma indispensablement les conduits seront purgés et les superfluités seront évacuées. Les exercices donc échauffent et dessèchent, en dissipant les fluides superflus; mais, accidentellement, ils causent des maladies froides ou humides; chez ceux donc qui ont une accumulation de pituite, les exercices fondent la partie coagulée de cette humeur et la forcent à couler vers quelqu'un des organes principaux ; de cette manière une partie capitale étant refroidie ou humectée, tout le corps est atteint d'une maladie froide ou humide. L'oisiveté engendre ordinairement une pléthore froide, mais, dans quelques cas rares, elle réchauffe aussi, quand la nature du corps est si mal tempérée, qu'il devient le siège de sécrétions âcres ; en effet, comme ces sécrétions sont retenues pendant l'oisiveté absolue, ils vont même jusqu'à allumer une chaleur fébrile. Cependant l'oisiveté dessèche aussi par accident, en affaiblissant les forces qui président à la distribution de la nourriture [et à la nutrition des parties elles-mêmes, de la même manière que le défaut d'aliments] dessèche les solides. On ne doit pas du tout négliger les mouvements du corps, comme le font quelques-uns de ceux qui cultivent les sciences avec ardeur; il faut, au contraire, autant que possible, le mouvoir tout entier aussi bien que ses parties par des mouvements dé force égale, en se livrant à toutes les espèces d'exercices, au moyen desquels chaque partie exécutera sa fonction propre. Les mouvements que nous faisons par nous-mêmes sont les plus utiles, parce qu'ils ont leur point de départ dans la profondeur du corps et que ce sont nos actions propres.

12. QUEL EST LE TEMPS CONVENABLE POUR LES EXERCICES.

Puisque les exercices peuvent produire ces effets, il n'est pas difficile de déterminer le temps où ils conviennent; en effet, comme ils sont favorables à la distribution de la nourriture, il faut que l'estomac ou les intestins ne contiennent pas une surabondance d'aliments mal digérés ou d'humeurs crues, car alors il y aurait danger que ces matières ne fussent attirées vers toutes les parties du corps avant que la coction ne les eût rendues propres à la nutrition. Les exercices détergeant les conduits et évacuant les superfluités, il vaut mieux les employer avant le repas; car, plus vous nourrirez un corps impur, plus vous lui nuirez; de ce que nous venons de dire il ressort par conséquent que le meilleur temps pour les exercices est le moment où le repas de la veille est parfaitement élaboré, et a subi les deux coctions, celle qui se fait dans l'estomac et celle qui se fait dans les vaisseaux, et où le temps de prendre un nouveau repas s'approche. Si vous permettez à quelqu'un de s'exercer avant ou après ce temps, vous remplirez son corps d'humeurs mal digérées, ou vous donnerez lieu à la formation d'une quantité trop grande de bile pâle. Le moyen de déterminer ce temps est fourni par la couleur de l'urine ; ainsi l'urine aqueuse signifie que les vaisseaux contiennent encore les humeurs mal digérées qu'ils ont reçues du ventre, l'urine jaune et bilieuse indique que ces hu­meurs sont élaborées depuis longtemps, et l'urine légèrement teinte de jaune est un signe que la seconde coction vient d'être achevée ; c'est alors par conséquent qu'il faut permettre les exercices après que toutes les superfluités contenues dans la vessie et dans la partie inférieure des intestins ont été évacuées; car il y a danger qu'une certaine quantité de ces superfluités ne se porte vers les parties solides du corps, entraînée par le mouvement de la chaleur qui se dé­veloppe pendant les exercices.

13. DE LA FRICTION PRÉPARATOIRE.

Si, après s'être déshabillé, on passe immédiatement aux mouvements très forts avant que tout le corps se soit ramolli, que les superfluités soient atténuées et que les conduits soient dilatés, il y a danger de rupture ou de tiraillement de quelqu'une des parties solides, il y a danger aussi que les superfluités n'obstruent les conduits par la rapidité du pneuma qui les met en mouvement. Afin donc que cela n'arrive pas, il faut auparavant réchauffer le corps en le frottant modérément avec un linge de coton, ensuite avec de l'huile ; car je ne conseille pas d'employer l'huile avant que la peau ne soit réchauffée, que les conduits ne soient dilatés et, pour le dire en un mot, que le corps ne soit préparé à recevoir l'huile ; pour obtenir ces conditions il suffit de passer, un très petit nombre de fois, avec une vitesse modérée, les mains sur le corps sans le comprimer, en ayant pour but de le réchauffer sans le froisser. Après avoir agi de la sorte vous verrez une belle rougeur s'étendre sur toute la surface de la peau; alors il est temps d'appliquer l'huile et de faire frotter avec les mains nues ; elles ne doivent être ni trop dures ni trop molles, afin que le corps ne soit ni condensé et resserré, ni affaibli et relâché plus qu'il ne faut, mais qu'il reste dans son état naturel. On doit frotter doucement pendant les premières passes, ensuite on augmentera peu à peu et on se rapprochera de la friction rude, en l'arrêtant au point on le corps est évidemment comprimé, mais où il ne subit pas encore de contusion. Il ne faut pas faire pendant longtemps une friction aussi forte, mais seulement une ou deux fois sur chaque partie ; car nous ne frottons pas ainsi pour endurcir le corps, quand nous faisons passer un jeune garçon aux exercices, mais pour exciter son activité, pour condenser la tonicité, et pour compenser la raréfaction produite par la friction molle; il convient en effet de conserver son corps dans un état moyen et de ne le rendre en aucune façon ni trop dur ni trop sec, de peur d'empêcher en quelque chose son accroissement naturel. Quand il avance en âge et qu'il va devenir jeune homme, nous nous servirons aussi d'une friction plus rude et des bains froids après les exercices. Il faut, dans les frictions, appliquer et passer les mains de plusieurs façons, et les mouvoir non seulement de haut en bas et de bas en haut, mais aussi suivant une ligne qui se rapproche de la perpendiculaire, obliquement, horizontalement, enfin suivant une ligne qui se rapproche de l'horizontale (voyez la figure dans les notes), afin que toutes les fibres des muscles soient, autant que possible, frottées de tous côtés. La pièce dans laquelle il va s'exercer ne doit être ni trop chaude ni trop froide, afin que le corps prenne une température exactement tempérée durant la friction ; car, si la chambre était plus chaude ou plus froide qu'il ne le faut, on commencerait à suer dans la chambre chaude avant que le corps ne Mt suffisamment ramolli, et dans la chambre froide le corps n'arriverait pas même à être réchauffé ni bien ramolli [sous l'influence des exercices], il ne s'élèverait pas de belle rougeur et le corps ne se tuméfierait pas; en effet ce sont là les signes d'une friction modérée pratiquée dans un air tempéré chez un individu d'une complexion tempérée.

14. DES DIVERSES ESPÈCES D'EXERCICES ET DE LEUR EFFICACITÉ.

Ce qui est commun à tous les exercices c'est qu'ils procurent à l'économie une augmentation de chaleur propre ; quant aux propriétés spéciales des exercices particuliers, l'exercice qui exige de la force, c'est-à-dire qui fatigue efficacement sans que les mouvements soient rapides, tend fortement les muscles et les parties fibreuses. Bêcher, retenir quatre chevaux à la fois, soulever un poids considérable en restant en place ou en avançant un peu, appartiennent à ce genre d'exercice. Se promener sur un terrain montant, grimper le long d'une corde, tenir les poings serrés en étendant ou en soulevant les bras et rester pendant longtemps dans cette position, résister aux efforts d'une personne qu'on a engagée à vous faire baisser le bras étendu, surtout si on porte dans ses mains quelques poids comme sont les haltères, et qu'on les tienne immobiles en étendant ou en soulevant les bras, rentrent dans la même catégorie. Il y a dans la palestre des milliers d'autres exercices analogues qui exigent de la force ; l'expérience et l'habitude de tous ces exercices se trouvent chez le pédotribe, personnage aussi différent du gymnaste que le cuisinier l'est du médecin. Nous venons donc d'énumérer les exercices qui exigent de la force; il est temps maintenant de passer aux exercices rapides sans intensité ni violence ; à ce genre appartiennent les courses, le combat simulé, la gesticulation, l'exercice du corycos et celui de la petite balle. Ceux qu'on appelle ecplethriser et pityliser sont également de la même espèce : ecpléthriser, c'est courir à diverses reprises tour à tour en avant et en arrière, en se restreignant dans un espace de cent pieds, en ne se retournant pas et en diminuant un peu à chaque course la longueur de l'espace parcouru, jusqu'à ce qu'on s'arrête à la fin à un point fixe; pityliser, c'est marcher sur la pointe des pieds, soulever les bras et les faire mouvoir très rapidement, l'un en arrière, l'autre en avant. D'autres exercices rapides, mais n'exigeant point de force, sont ceux qu'on fait dans la palestre en se roulant rapidement soit plusieurs ensemble, soit tout seul. On peut aussi s'entrelacer étant debout, et exécuter un exercice du genre rapide en saisissant vivement tour à tour ceux qui sont près de vous. On peut encore exécuter debout un exercice du même genre pour les jambes seulement, en restant à la même place, en sautant plusieurs fois non seulement en arrière, mais quelquefois aussi en avant et en soulevant tour à tour chacune des jambes. On peut aussi exécuter de la même manière un exercice du même genre pour les bras, si l'on s'évertue à les mouvoir à la fois fréquemment et rapidement sans tenir des haltères, soit qu'on tienne le poing serré, soit qu'on se contente de lever vivement le bras sans fermer le poing. Tel est l'exercice rapide, borné aux espèces que nous venons d'énumérer ; il est temps de passer à l'exercice violent, qui est composé de l'exercice qui réclame de la force et de l'exercice rapide ; car on peut se servir comme d'exercices violents de tous ceux que nous venons de ranger dans la classe des exercices qui réclament de la force, pourvu qu'on y ajoute la rapidité du mouvement. Les exercices suivants sont certainement aussi du nombre des exercices violents : bêcher, lancer des disques, sauter constamment sans se reposer, de même lancer un projectile lourd quel qu'il soit en rassemblant ses forces, ou travailler rapidement étant couvert d'une armure pesante. Par conséquent tous ces exercices sont des espèces qui diffèrent par les points dont nous venons de parler, et, en outre, parce que les uns fatiguent davantage les lombes, les bras ou les jambes, d'autres l'épine du dos, ou la poitrine seulement, ou le poumon. La marche et la course sont des exercices propres des jambes; la gesticulation et le combat simulé, des exercices propres des bras; se baisser et se relever continuellement est un exercice propre aux lombes. Les respirations très grandes sont des exercices propres de la poitrine et du poumon, de même que les vociférations très fortes sont en même temps des exercices propres des parties susdites et de tous les organes de la voix. Nous tenons de nous-mêmes les mouvements dont nous venons de parler ; les suivants, au contraire, nous viennent de l'extérieur : la navigation, l'équitation et les déplacements qui se font dans les voitures et les lits suspendus ou dans les berceaux qu'on remue, ou pour les petits enfants dans les bras de leurs nourrices; on peut aussi ranger la friction dans la classe des mouvements qui viennent de l'extérieur. Quelques mouvements sont mixtes, par exemple, l'équitation; car il n'en est pas pour ce mouvement comme pour le transport en voiture, pendant lequel on est uniquement secoué par son véhicule sans rien faire par soi-même, mais, dans l'équitation, il faut tenir l'épine droite, serrer exactement avec les deux cuisses les côtés du cheval, tenir les jambes tendues et regarder en avant ; et par là on exerce aussi la vue et on fatigue le cou. Les viscères ne sont pas moins secoués, quand on va à cheval, mais moins quand on se promène en voiture; si, par conséquent, on veut mettre en mouvement avec une certaine force les viscères au-dessous du diaphragme, il faut passer aux exercices susdits, en outre aux frictions qu'on pratique à l'aide de bandes qui entourent le corps. Respirer et vociférer très largement et souffler fortement secouent aussi les viscères situés au-dessous du diaphragme; enfin la rétention du souffle elle-même n'est pas moins un exercice des muscles du ventre que de ceux de la poitrine. Tels sont les mouvements qui viennent de l'extérieur.

15. COMMENT IL FAUT S'EXERCER.

Que le jeune homme se déshabille, comme je l'ai déjà dit auparavant, quand les urines sont arrivées à une maturité complète, qu'il soit ensuite frotté modérément; on reconnaîtra le degré modéré de la friction à la rougeur fleurie qui se répand, à la facilité de croiser les bras et les jambes et à la promptitude pour toute sorte de mouvement. Qu'il s'exerce alors jusqu'à ce que son corps se tuméfie, prenne une rougeur fleurie, et que les mouvements soient faciles, égaux et bien cadencés; durant ce temps vous verrez aussi apparaître de la sueur chaude mêlée à de la vapeur. Mais il faut s'arrêter aussitôt qu'un des signes énumérés vient à se modifier, comme par exemple si on voit que la tuméfaction du corps s'affaisse, on fera de suite cesser l'exercice; car, si vous laissez le jeune homme s'exercer davantage, vous donnerez lieu aussi à l'évacuation de quelque chose d'utile, en sorte que vous rendrez par là son corps plus maigre et plus sec, et que vous en empêcherez la croissance. On doit s'arrêter de même, quand la fraîcheur de la couleur se fane; car vous refroidirez le corps et vous dissiperez ses particules par la perspiration, si vous continuez à l'exercer. Puis, quand la facilité, la cadence et l'égalité des mouvements paraissent compromises et anéanties, on fera aussitôt reposer le jeune homme; de même, s'il s'opère quelque changement dans la sueur, par rapport à la quantité ou à la qualité; car elle doit de-venir toujours de plus en plus abondante, plus forte et plus chaude à mesure que les mouvements augmentent d'intensité. Si elle de-vient moindre ou plus froide, le corps s'évapore déjà, se refroidit et se sèche plus qu'il ne convient. Par conséquent on donnera une attention suivie à celui qui s'exerce, et on le fera reposer immédiatement dès qu'un des symptômes susdits se montre; cependant. on ne l'enverra pas de suite au bain, mais on modérera la force des exercices et on lui ordonnera de s'arrêter, et, si on veut, on pourra remplir les lombes par la rétention du souffle, et passer à l'apothérapie en versant de l'huile sur le corps. Or l'apothérapie est de deux sortes, l'une est une partie de l'exercice et l'autre en est une espèce; nous parlerons dans la suite de celle qui est une espèce d'exercice.

16. DE LA FRICTION APOTRÉRAPEUTIQUE.

Traitons maintenant de l'apothérapie qui est une partie de l'exercice. La dernière partie de tout exercice qui se fait comme il faut s'appelle apothérapie; elle a deux buts, celui d'évacuer les superfluités et de préserver le corps de la fatigue. Le premier lui est commun avec l'exercice considéré comme un tout ; car nous disions que l'exercice avait en tout deux buts, celui de renforcer les parties solides du corps et celui d'évacuer les superfluités. Le but propre de l'apothérapie est de combattre et d'empêcher la fatigue qui suit habituellement les exercices plus ou moins immodérés, et la nature du but nous indiquera comment il faut faire l'apothérapie ; car, comme on se propose d'évacuer exactement les superfluités des parties solides de l'économie qui, après avoir été échauffées et atténuées par les exercices, restent encore dans l'organisme, il faut employer la friction qui se fait par un grand nombre de mains étrangères avec rapidité, afin qu'autant que possible aucune partie de l'individu que l'on frictionne ne soit à découvert; on doit tendre pendant la friction les parties qu'on frotte, et, en outre, on prescrira ce qu'on appelle la rétention du souffle. Il faut verser beaucoup d'huile sur le corps de celui qu'on frotte, car cette huile aide à la rapidité et à la douceur de la friction, et en même temps elle procure un autre avantage très-considérable, celui d'affaiblir la tension et de ramollir les parties qui se sont fatiguées pendant les exercices un peu forts. Que la friction tienne le milieu entre la friction molle et la friction rude, ce qui constitue en effet la friction moyenne. Ceci aura lieu si les mains de celui qui frotte sont fortement appliquées, de sorte que la pression qu'elles causent se rapproche en quelque sorte de la friction rude. Il faut modérer la quantité de l'huile et la rapidité du mouvement des mains, jusqu'à ce que la friction tienne exactement le milieu. Nous sommes d'avis de tendre alors les parties qu'on frotte afin d'évacuer à travers la peau toutes les superfluités qui se trouvent entre elle et la chair sous-jacente. C'est pour la même raison qu'une partie importante de l'apothérapie consiste dans la suspension et la rétention du souffle (fig. 1) qui se fait par la tension de tous les muscles de la poitrine et par le relâchement de tous ceux du ventre et du diaphragme; ainsi les excréments seront poussés vers le bas. En second lieu il faut, pour soumettre à l'apothérapie les viscères sous-diaphragmatiques, recourir à l'espèce de rétention du souffle qui tend modérément les muscles du ventre. C'est pour obtenir le même effet qu'il convient d'employer les frictions opérées par des enroulements de bandes autour du corps ; celui qu'on frotte doit se roidir contre tous les mouvements des bandes, mais il ne sera pas entraîné par tous, car, pendant l'apothérapie, il ne doit plus se livrer ni à des mouvements continuels ni à des mouvements forts, mais il en fera quelques-uns qui seront interrompus par des frictions; voilà pourquoi il doit être souvent enroulé dans les bandes, souvent repoussé ; souvent aussi, vers ce temps, il doit changer de place avec le progymnaste, souvent enfin, étant placé derrière lui, il enlacera ses jambes, tantôt l'une, tantôt l'autre, autour du progymnaste, avec une certaine tension qui ne doit pas être trop forte ; dans cette position il doit être frotté par des gens qui le massent convenablement; car c'est là la meilleure manière de conserver l'augmentation de chaleur qu'il doit à ses: exercices, et en même temps d'évacuer les superfluités par ses tensions et ses mouvements propres; il semble aussi que la rétention du souffle aide assez efficacement à produire cet effet. Les meilleurs gymnastes emploient donc aussi entre les exercices la rétention du souffle ainsi que la friction apothérapeutique, que nous venons de décrire; par là ils font reposer du même coup, quand ils commencent à être fatigués, ceux qu'on exerce, et ils détergent peu à peu les conduits, afin de rendre le corps pur et en même temps propre à la perspiration pour les exercices qui vont suivre; en effet. si le gymnaste ne prenait pas de pareils soins, il encourrait le danger de voir plutôt les conduits s'obstruer que se nettoyer; car les mouvements un peu forts des matières sont de nature à causer des effets opposés, s'ils se produisent dans des circonstances dissemblables et d'une manière différente ; ils produisent des obstructions., si la matière mise en mouvement est épaisse et abondante et si elle se précipite en grande quantité à la fois ; ils produisent, au contraire, des détersions, si elle est peu abondante, subtile, si elle ne marche pas très rapidement, et si elle ne fait pas. des efforts pour être évacuée d'un seul coup. Voilà pourquoi j'approuve ceux qui emploient l'apothérapie au milieu des exercices, surtout chez ceux qui s'occupent des combats d'athlètes appelés lourds.

17. DE LA FRICTION CONSIDÉRÉE EN ELLE-MÊME.

Quelquefois la friction est de nature à produire par elle-même quelque chose d'utile pour le corps, quelquefois aussi elle est l'auxiliaire des moyens qui agissent dans le même sens ; elle est auxiliaire quand il s'agit d'exercices, aussi bien quand elle y prépare que quand on l'emploie après eux; dans le premier cas, elle est appelée préparatoire, dans le second apothérapeutique; nous en avons déjà parlé précédemment. La friction qui produit par elle-même un effet utile peut relâcher, resserrer, donner de l'embonpoint et amaigrir : resserrer, si elle est rude, relâcher, si elle est molle, amaigrir, si elle est prolongée, donner de l'embonpoint, si elle est modérée; car ce sont là les quatre différences, eu égard au genre, dans lesquelles rentrent toutes les frictions, établies sur leurs quatre propriétés et sur leur quadruple utilité. Si nous y ajoutons encore les espèces moyennes dont nous saisissons la nature par la considération des espèces fondamentales, nous aurons en tout six espèces; car, si la friction rude peut resserrer, et la friction molle relâcher, il faut frictionner rudement les corps qui sont affaiblis outre mesure et mollement ceux qui sont resserrés ; mais, s'il y a un corps qui se trouve dans une situation moyenne, il est clair qu'il ne faut le frotter ni rudement ni mollement, mais en évitant autant que possible les deux extrêmes. De même que, dans ces différences qui tiennent à la qualité, il n'y a pas seulement une friction rude et une friction molle, mais encore une friction modérée, de même, dans les différences selon la quantité, il n'y a pas seulement une friction prolongée et une friction de courte durée, mais aussi une friction moyenne; en effet, comme il y a deux choses qui diffèrent entièrement en genre, c'est-à-dire l'actif qui diffère en genre du passif, les frictions appartiennent au genre actif et les modifications qu'elles produisent dans notre corps, au genre passif; voilà pourquoi il existe indispensablement des séries de qualités opposées qui tiennent aux frictions elles-mêmes, et d'autres qui tiennent aux modifications qu'elles produisent ; celles qui tiennent aux frictions sont la friction molle et la friction rude, la friction prolongée et la friction de courte durée, tandis que l'acte qui consiste à resserrer et à relâcher les corps, ainsi que celui d'amaigrir et de donner de l'embonpoint tiennent aux modifications. La première série d'effets opposés quant aux modifications est produite par la première série de qualités opposées quant à la friction, mais il n'en est plus ainsi pour la seconde ; car, dans cette série, l'amaigrissement est produit par la friction prolongée, et l'embonpoint par la friction modérée ; en effet la friction de courte durée ne saurait donner de l'embonpoint, parce que la partie dans laquelle nous voulons produire cet effet a besoin d'un appel modéré de sang et d'une force réelle, et que ces deux conditions sont remplies comme il faut par la friction modérée, tandis que ni l'une ni l'autre ne l'est complètement et suffisamment par la friction de courte durée. Par conséquent, en ramenant, pour ainsi dire, à leurs éléments les différences simples entre les frictions, Hippocrate a exposé toute la doctrine qui s'y rapporte, enseignant comment on nourrira, on amaigrira, on ramollira ou on resserrera suffisamment le corps. Les effets moyens et ceux qui sont produits par les combinaisons se comprennent tout de suite aussitôt qu'on connaît les effets principaux; il y a un effet moyen, par exemple, si nous ne voulons ni relâcher, ni resserrer le corps, ni lui donner de l'embonpoint, ni l'amaigrir; il y a une combinaison, si nous voulons en même temps resserrer le corps et lui donner de l'embonpoint ; qui ne comprendra pas en effet que, si nous voulons donner au corps de l'embonpoint constitué par une chair dure, il faut employer une friction rude qui soit en même temps moyenne eu égard à la quantité de même, si nous voulons procurer au corps un embonpoint constitué par une chair molle, il faut employer une friction molle mais moyenne par rapport à la quantité ; il en est de même pour les autres combinaisons ; car, si on combine alternativement les trois différences de frictions selon la qualité avec leurs trois différences selon la quantité, on obtiendra neuf combinaisons. Je vais les exposer dans un diagramme, dans lequel il faut comprendre que la première série de haut en bas se rapporte aux qualités, et la seconde aux quantités.

QUALITÉS. QUANTITÉS.

Rude........ Prolongée.
Rude ........ Courte.
Rude ........ Moyenne.
Molle ........ Prolongée.
Molle........ Courte.
Molle ........ Moyenne.
Moyenne........ Prolongée.
Moyenne........ Courte.
Moyenne........ Moyenne.

18. DE LA FRICTION DU MATIN.

Voici à peu près l'opinion qu'il faut se former sur la friction du matin, du moins quand il s'agit d'un individu dont le corps est bien tempéré : si l'individu est dans un état irréprochable, il est superflu de le frictionner, à moins qu'il ne soit parfois dans la nécessité de résister à un froid intense ; car, dans ce cas, nous préparons cet individu par la friction de la même manière que ceux qui vont prendre un bain froid; s'il y a quelque sentiment de fatigue, alors il faut oindre et frictionner doucement. De même, s'il existe une sécheresse exagérée, on doit oindre avec de l'huile douce (car cette pratique humecte le corps quand il est sec), mais on frottera très peu, et la friction ne sera ni rude ni molle; car il nous faut seulement activer la distribution de l'aliment et non pas changer la complexion ou dissiper par la perspiration quelque matière contenue dans le corps ; or la friction molle produit ces deux effets et la friction rude seulement l'un des deux, puisque la dernière resserre et durcit la peau, tandis que la friction molle favorise la perspiration, raréfie le corps et le ramollit. Si nous voulons remédier à un resserrement du corps produit par des frictions rudes accompagnées de pincements, ou par des exercices violents, ou par ceux pour l'exécution desquels on a employé beaucoup de poussière, nous frictionnerons mollement en usant abondamment d'huile douce ; quant aux parties resserrées par suite de refroidissement, nous les ramènerons à l'état normal en réchauffant d'abord par des frictions sèches et rapides, en second lieu, par des frictions faites avec de l'huile. La raréfaction qui tient à des bains fréquents, à des frictions molles ou aux rapprochements sexuels, se guérira par des frictions sèches et peu nombreuses, suivies de frictions également peu nombreuses, mais pratiquées avec quelque huile astringente. Quant à l'humidité produite par les excès de boisson, il n'y a que les frictions sèches avec des linges de coton ou des gants qui la gué-rissent, quelquefois aussi celles qui se font avec les mains toutes seules sans huile ou avec très-peu d'huile, mais il faut que cette huile favorise la perspiration et soit privée de toute qualité refroidissante.

19. DE LA FRICTION DU SOIR.

Voilà pour la friction du matin ; quant à la friction du soir, elle convient à ceux qui sont très fatigués, ou desséchés ou atrophiés. Mais ne parlons pas pour le moment du défaut de nutrition, symptôme que nous traiterons ailleurs avec tous les autres symptômes morbides; au contraire, chez un individu d'une nature bien tempérée, s'il existe une fatigue très-prononcée ou une sécheresse démesurée du corps, il faut que le déjeuner soit léger, qu'il y ait un intervalle assez long entre ce repas et le dîner, que la majeure partie de cet intervalle se .passe dans le repos ; il doit néanmoins se promener un peu aussi pour faire descendre les aliments qui sont secoués et poussés vers le bas par les mouvements qui se font de-bout; le résultat sera encore meilleur, si on peut aller à la selle; car, après tout cela, on peut frictionner sans danger avec de l'huile douce, pourvu qu'on ne malaxe pas trop le ventre; si on ne prend pas cette précaution, on court risque. de rendre plus difficile la digestion des aliments, de faire remonter de ces aliments dans le corps une humeur à demi digérée, de voir la tête se troubler et l'orifice de l'estomac se retourner. Le mieux par conséquent est de ne pas frictionner du tout au ventre; mais, s'il existe quelquefois un sentiment de fatigue ou s'il survient une sécheresse trop grande dans les muscles qui forment ses parois, il faut oindre modérément, en malaxant doucement.

20. DE LA FRICTION COMME MOYEN CURATIF.

(Tiré d'Hérodote.)

[Du livre Sur ce que les malades doivent faire pour se traiter.]

Les frictions qu'on emploie pour guérir les fièvres doivent se faire aux époques suivantes : elles conviennent pendant l'acmé de la maladie, mais non pendant toutes les parties de cette période, mais seulement vers la fin, de sorte qu'elles soient assez rapprochées du déclin. Quant aux diverses époques de l'accès, il faut préférer le commencement du déclin. On doit se défier des inflammations des parties centrales, car, dès que ces inflammations existent, il est impossible de faire cesser la fièvre. On se défiera aussi des respirations difficiles et des sueurs qui se montrent irrégulièrement soit sur tout le corps, soit à la figure et au cou. Quant à ceux donc qui ont eu une crise au commencement du déclin, il faut les coucher, en été et en automne, dans un endroit tempéré; et on aura tout prêt un mélange chaud d'huile et d'eau auquel on a ajouté de l'aphronitre grillé. La friction doit être pratiquée, chez les sujets jeunes et de petite taille, par quatre hommes, et par six hommes chez ceux qui ont atteint l'âge viril et qui ont une taille plus élevée. Les uns frotteront les membres supérieurs jusqu'aux doigts, d'autres le tronc jusqu'aux aines, d'autres enfin les membres inférieurs jusqu'aux pieds. Après avoir versé sur le corps le mélange gras, on doit frictionner chaque partie en passant les mains de haut en bas, ensuite on couchera le malade sur le ventre et on le frictionnera de la même manière. Au commencement, la friction devra être légère et lente, ensuite elle deviendra rapide et accompagnée de pression, tandis que, vers la fin, la friction redeviendra douce et en tout semblable à celle du commencement. Ceux qui frottent doivent aussi malaxer la tête et le cou après avoir versé dessus le mélange gras Chaque partie doit être frictionnée environ cent fois chez les jeune; gens, deux cents fois chez les adultes; chez ceux qui mènent une vie d'athlète, il faut doubler le nombre des frictions. S'il se développe, durant les frictions, une sensation très appréciable de bien-être, si la fièvre cesse en même temps, si la respiration est facile, si les malades ont une bonne couleur, si l'ampleur du pouls ne diminue pas beaucoup, s'il ne devient pas plus fréquent et si la chair se tuméfie et rougit, il faut augmenter le nombre des frictions. Si, pendant les frictions, il survient une sueur qui n'existait pas auparavant, il faut savoir que la friction a été employée à propos, qu'elle a fait du bien au malade, que cependant il a encore besoin d'une répétition de ce traitement. Si les accès restent les mêmes et qu'il ne se montre aucun symptôme ni bon ni mauvais qui soit appréciable aux sens, il faut que le médecin, trouvant ses raisons d'agir dans soi-même, s'en tienne au traitement qu'il a jugé bon d'abord ; car l'utilité de ce traitement se manifestera par la seconde application. Après les frictions il faut administrer à tous les malades une quantité suffisante d'eau chaude, et, s'il y a coïncidence de rémission, on les nourrira quand l'ébullition et le trouble causés par le traitement sont apaisés; quant à ceux qui n'éprouvent pas encore de rémission, nous les nourrirons après avoir attendu la rémission complète, et en attendant nous leur donnerons à boire abondamment, surtout à ceux qui restent dans un état de sécheresse. Il faut donner des aliments humides et chauds. Si c'est en hiver, on emploiera ce traitement dans un lieu suffisamment chaud ; on mêlera à l'huile de l'aphronitre et un dixième de vin. Si, pendant la répétition du traitement par les frictions, les malades ne sont pas relâchés, si les forces restent intactes, si le pouls conserve son ampleur et si la respiration ne montre aucune apparence de trouble, il faut les restaurer après les frictions, leur donner un bain de siège et faire des affusions, car les parties se relâcheront par ce traitement, et la sueur produira par sa chaleur quelque chose de semblable à la métasyncrise. Les bons effets des frictions se révèlent de diverses manières; d'abord les malades peuvent présenter les mêmes symptômes qu'avant, comme je l'ai déjà dit, et n'éprouver de l'amélioration que par rapport à leur situation générale; ensuite les types de la maladie peuvent se changer en formes d'une autre espèce, ou revêtir le caractère intermittent, ou bien la maladie s'arrête après s'être aggravée le jour même; souvent les frictions amènent une persistance de la maladie exempte de danger, cas dans lequel on renoncera à l'application héroïque de ce traitement, car alors il faut s'en tenir au traitement adopté auparavant et s'attendre à ce que son efficacité ne se montre qu'après un long espace de temps. Si les malades ne supportent pas l'application des mains, parce qu'elle leur donne la même sensation que lorsqu'on touche une plaie, il faut arrêter la friction. Si, pendant la friction, les malades sentent une chaleur plus forte dans leur intérieur, que ce symptôme aille toujours en augmentant, et qu'il y ait encore quelque autre signe de malaise, il faut, dans ce cas aussi, renoncer à ce traitement, administrer de l'eau bouillie refroidie, et attendre le temps de la rémission pour appliquer les. autres moyens de traitement. S'il arrivait que l'emploi de la friction dans des fièvres intermittentes de longue durée fût suivi d'une fièvre continue et intense, il ne faut pas s'en effrayer, comme s'il était survenu quelque chose de mauvais; car, plus tard, cet accident disparaît en peu de temps. On emploiera les frictions pour guérir les fièvres chez ceux où la fièvre, ayant été faible et sans grande chaleur dès son origine, est restée toujours dans le même état, ou chez ceux dont les fièvres, d'abord fortes et graves, se sont transformées, à leur déclin, en des fièvres égales en intensité aux premières. Si nous avons prescrit les frictions à ceux qui n'en avaient pas besoin, ou si non seulement nous n'avons pas su saisir avec sûreté le temps opportun, mais si, de plus, nous les avons employées en opposition avec l'idiosyncrasie, il faut admettre que cela leur a fait beaucoup de tort; par conséquent il est nécessaire de considérer les inconvénients qui résultent de cette manière d'agir : si la fièvre qui suit les frictions est forte et ne se transforme pas, il faut savoir que le traitement a été employé à tort; de même, si les malades deviennent lourds et plus ou moins somnolents durant toute la période de chaleur, s'ils ont le corps fatigué, la respiration plus rapide qu'auparavant, le pouls petit, faible et, de plus, fréquent, il faut juger également que la friction a été appliquée à tort; il peut se produire aussi des tremblements et des convulsions par des frictions inopportunes et répétées; il en est de même s'il survient quelque douleur ou quelque inflammation pendant que la chair de tout le corps se tuméfie. On fera soigneusement attention à ces symptômes, et on leur opposera immédiatement le traitement convenable.

21. DE LA PROMENADE.

(Tiré d'Antyllus.)

[Du quatrième livre; Sur ce que les malades font eux-mêmes pour se traiter.]

Il faut distinguer deux espèces de promenades; celle qu'on emploie comme moyen de traitement et celle qu'on emploie pour restaurer le corps. Nous prescrivons donc la promenade comme moyen de traitement dans les affections de la tête, des yeux, de la luette, et dans celles de la poitrine, en exceptant le crachement de sang; elle est éminemment utile quand l'orifice de l'estomac est saturé d'humidité ou douloureux, qu'il rend acides ou corrompt les aliments; elle convient aussi quand les femmes ont une rétention des règles, quand le ventre est resserré, quand les aliments surnagent dans l'estomac, quand il y a rétention d'urine. Elle fait beaucoup de bien aussi à ceux qui ont la sciatique, et, en général, à tous ceux chez qui quelque humeur doit couler d'en haut vers les parties inférieures, ou chez qui les matières, bien qu'elles aient une tendance vers le bas, ont néanmoins besoin d'excitation pour être excrétées. Nous employons la promenade apothérapeutique après les exercices lourds, les purgations produites par les médicaments, l'onction des yeux, les vomissements abondants; en un mot la promenade apothérapeutique peut détendre l'âme, déplacer le pneuma et le ramener à l'état normal, relâcher les parties tendues, purger la poitrine, faciliter la respiration, renforcer les organes des sens et l'estomac, et, ce qui est le plus important, dissiper tout état pénible qui ressemble à la fatigue. La promenade, employée comme moyen de traitement, doit être longue et accompagnée de déploiement de force; elle doit se faire en appuyant fortement les pieds et en marchant plutôt sur les talons que sur la plante des pieds et en tendant le jarret; au début elle doit être douce, ensuite plus forte, et après cela elle doit de nouveau se ralentir; on calculera la durée d'après les forces; la promenade apothérapeutique, au contraire, doit être courte, douce, sans tension, modérée et accompagnée de distractions de l'âme et du corps. Les promenades douces conviennent aux gens faibles, à ceux qui font usage de la promenade après le repas, à ceux qui viennent de se lever après le sommeil, à ceux qui en usent pour se préparer à de grands exercices, à ceux qui y ont recours à cause d'une douleur quelconque; les promenades dans lesquelles on emploie de la force conviennent aux gens vigoureux, à ceux qui sont refroidis, à ceux chez qui le pneuma est difficile et long à mettre en mouvement, bien qu'ils conservent leurs forces, à ceux qui ont le corps un peu paresseux, et aux convalescents qui ont un faux embonpoint. Celles qui sont accompagnées d'une forte tension des jambes et dans lesquelles on appuie sur les talons sont très avantageuses, si la tête souffre d'une maladie quelconque, si la poitrine est trop humide, si l'utérus est rétracté vers le haut, si les règles sont arrêtées, si les parties inférieures sont mal nourries, en un mot dans tous les cas où la matière tend à se porter en haut. Les promenades qui ne sont pas accompagnées de tension étant semblables aux marches modérées, conviennent dans les mêmes cas. On a observé que la marche qui se fait sur la pointe des pieds est spécialement utile contre les ophtalmies et la constipation, et que la promenade qui se fait en montant convient quand la respiration est courte, ainsi qu'avant le repas, et quand cette promenade remplace quelque grand exercice. Se promener en descendant fatigue les jambes, mais est plus propre que les autres promenades à faire descendre les matières en les entraînant de la tête vers le bas. La promenade irrégulière convient à ceux que cet exercice ennuie promptement. Les promenades dans la plaine sont plus fatigantes que ces dernières, mais elles ramènent plus facilement à leur état naturel le pneuma aussi bien que le corps. Celles qui se font sur une pente rapide remplissent la tête. Celles qui se font dans le sable, surtout s'il est épais, constituent un des exercices les plus lourds et ont une grande efficacité pour renforcer toute partie du corps et pour faire descendre les matières des parties supérieures. Celles qui se font dans de la terre molle se rapprochent en quelque sorte de celles qui se font dans le sable. Celles qui se font dans une prairie sont très-douces, ne frappent point fortement [la tête] et ne produisent pas de trouble, mais elles remplissent la tête à cause des odeurs parfumées et de l'humidité propre aux prairies. Les promenades sur les routes sont moins fatigantes que les promenades dans les promenoirs. Celles où on fait beaucoup de détours nuisent à la tête. Les promenades dans lesquelles on va toujours en ligne droite sont semblables à celles qui se font sur les routes. Les promenades qui se font dans les étages supérieurs du promenoir sont préférables à toutes les autres, car on est à l'abri de l'évaporation de la terre, et on jouit d'un air plus pur que dans les autres; celles de cette espèce qui se font sur un plancher sont les plus convenables, car les planches, en cédant, rendent la tête légère et attirent la matière vers le bas. Se promener peu convient quand on est fatigué, quand on ne prend pas de bain après les exercices, quand on a besoin de se promener après le repas et quand on se sent le corps pesant. Se promener beaucoup profite à ceux qui ont une affection de la tête ou de la poitrine, à ceux dont les parties inférieures du corps sont mal nourries et à ceux qui ont besoin d'un exercice un peu lourd. Les promenades le long de la mer dessèchent et atténuent les matières. Les promenades près des rivières ou des lacs humectent, mais celles qui se font au bord des lacs sont les plus mauvaises. Les promenades au centre du pays sont meilleures que les autres dont nous venons de parler, mais elles sont inférieures aux promenades le long de la mer. Les promenades dans la rosée sont semblables à celles qui se font près des lacs. Dans des plaines ouvertes, elles sont plus propres à favoriser la perspiration et à rendre légers que toutes les autres ; il en est de même pour celles qui se font dans les endroits élevés. Les promenades dans les vallées profondes et les précipices [sont mauvaises], car l'air dans ces endroits est mal tempéré et vicieux. De même, les promenades sous un toit sont pires que celles qui se font en plein air, car elles remplissent la tête, surtout si le toit est bas. Les promenades par un temps calme favorisent la perspiration, dissipent les superfluités, relâchent et ne frappent pas [la tête]. Quant aux promenades qu'on fait au vent, celles qui se font au vent du nord produisent de la toux et nuisent à la poitrine, mais elles renforcent l'orifice de l'estomac quand il est affaibli, rassemblent les forces qui se dissipent et rendent les sens plus subtils ; au vent du sud elles remplissent la tête, obscurcissent les organes des sens, mais elles relâchent le ventre et elles affaiblissent; au vent d'ouest, elles sont les meilleures de toutes celles qui se font au vent, car elles n'ont pas les désavantages des promenades au vent du nord, et de plus elles sont douces et donnent de la distraction; les promenades au vent d'est sont mauvaises et frappent [la tête]. Les promenades au soleil donnent de la distraction, remplissent la tête et produisent du malaise. Sous les arbres, elles sont meilleures que sous un toit, (car l'air y est renouvelé et devient plus salubre) ; elles font du bien ou du mal au corps, selon la nature des arbres. Les promenades, quand le ciel est pur, rendent léger, favorisent la perspiration, atténuent et rendent la respiration et les mouvements faciles. Quand le ciel est couvert, elles remplissent la tête, produisent de la pesanteur, mais favorisent moins la perspiration. Les promenades du matin relâchent le ventre, dissipent la lourdeur produite par le sommeil et atténuent le pneuma. Celles du soir préparent au sommeil et dissipent les accumulations de gaz.

22. DE LA COURSE.

(Tiré du même livre.)

La course, étant une promenade violente, se range parmi les exercices violents; elle convient bien en hiver et aussi au milieu de l'été. Elle sert à réchauffer le corps, à rappeler l'appétit, à fortifier l'activité naturelle, à renforcer l'orifice de l'estomac et à arrêter les fluxions, car, quoiqu'elle semble aggraver les fluxions le premier jour, elle les réprimera dans la suite, mais elle remplit la tête. Dans les maladies des reins et dans la gonorrhée nous employons la course comme un moyen de traitement éprouvé par l'expérience. La course est utile aux gens affectés de sciatique, qui ont de la peine, il est vrai, à commencer à courir, mais qui oublient pour ainsi dire leur maladie quand ils sont en train. Nous avons observé nous-même que la course profite à ceux qui ont des coliques, qui ont mangé des champignons [vénéneux] et à ceux qui ont été piqués par un scorpion. Quant aux diverses espèces de courses, d'après la qualité, la quantité et de semblables points de vue, nous les déduirons de ce que nous avons dit auparavant sur les promenades, et nous parlerons actuellement de celles dont il n'a pas encore été question, et qui sont peu nombreuses. Il y a donc d'abord une espèce de course qui consiste à marcher en avant en ligne droite et qu'on a appelée du nom générique de course; il y en a une autre qui consiste à marcher en arrière et qu'on appelle anatrochasme; enfin il y en a une troisième espèce qui consiste à marcher en cercle et qu'on nomme péritrochasme. La course en avant a les propriétés que nous avons déjà énumérées. L'anatrochasme fait du bien â la tête, aux yeux, à la nuque, à l'orifice de l'estomac et aux lombes, parce qu'elle n'est pas rapide (pour cette raison elle ne remplit pas non plus la tête) et que la rétrogression, en forçant d'appuyer plus fortement et de marcher sur la pointe des pieds de peur de tomber, attire les matières vers le haut. Le péritrochasme est favorable à la poitrine et aux jambes, mais il ne convient pas aux affections de la tête. Les courses avec des vêtements échauffent la chair et produisent de la sueur. Les courses sans vêtements ne produisent pas beaucoup de sueurs, mais elles dissipent efficacement [les humeurs] par la perspiration insensible et elles durcissent et dessèchent le corps.

23. DU MOUVEMENT PASSIF.

(Tiré du même livre.)

Les autres exercices consistent dans le mouvement du corps; mais le mouvement passif a pour éléments le mouvement et la position qu'on observe, les parties du corps étant en repos, tandis que le tout est mu par impulsion ; voilà pourquoi c'est un exercice très utile et très doux, qui ne fatigue pas les parties, quoiqu'il ne les mette pas moins en mouvement que les grands exercices. Tout mouvement passif peut exciter la chaleur innée, disperser la surabondance des matières, renforcer les parties solides et exciter les fonctions engourdies; en outre il chasse la lourdeur, apaise le trouble du corps, procure du sommeil aux gens frappés d'insomnie; il excite, au contraire, l'attention et produit la veille chez ceux qui sont lourds ou affaiblis, car il amène le sommeil en dissipant les superfluités de la tête et de l'orifice de l'estomac, puisque ce sont justement ces parties qui ont le plus d'influence pour la production de l'insomnie, tandis qu'il devient une cause de veille parce qu'il excite et renforce la tension des parties. Outre les différences communes dont nous avons déjà parlé dans le chapitre [21] Sur la promenade, le mouvement passif présente encore les espèces suivantes, qui lui sont propres : le mouvement dans un lit, qui est de deux sortes, selon que le lit est suspendu ou qu'il a des supports aux pieds qui sont diagonalement opposés ; le mouvement dans une litière, qui est double aussi, puisque, dans quelques litières, ceux qu'on transporte sont assis, et que, dans d'autres, ils sont couchés; le mouvement dans une voiture, le mouvement dans un navire qui diffère aussi selon qu'il s'agit d'un navire à voiles ou à rames. Il faut encore ranger l'équitation parmi les mouvements passifs, quoique quelques auteurs en traitent séparément. On emploiera le mouvement dans le lit chez les fébricitants ou chez ceux qui sont affectés d'une maladie chronique, ainsi que chez les individus traités par l'ellébore; il est utile aussi pendant la convalescence à ceux qui sont encore faibles, à ceux qui souffrent d'insomnie, qui ont une disposition à la paresse, qui ont la faim canine (car il fait cesser la tension), chez qui les aliments se distribuent lentement dans le corps, enfin qui sont trop faibles pour supporter les autres exercices; c'est de la même manière qu'il soulage ceux qui sont depuis longtemps malades. Mais l'une des espèces de mouvement dans le lit, celui qui se fait dans le lit suspendu est également bonne avant le repas et après, tandis que l'autre ne saurait s'employer après le repas ; quant à la manière de l'employer, nous l'avons expliquée dans le chapitre Sur l'ellébore (VIII, 6 ). Nous donnons un mouvement passif aux fébricitants dans une litière où ils sont couchés, surtout à ceux qui ont du léthargus ou de l'assoupissement, et à ceux qui sont affectés d'une fièvre simple, enracinée et longue. Si les forces ne font pas défaut, on doit prolonger la durée du mouvement passif; car celui qui meut le corps pendant un court espace de temps rend quelquefois la fièvre plus forte. S'il s'agit de fébricitants, on donnera un mouvement passif, dans une litière où on s'assied, à ceux qui arrivent à une rémission complète, ou qui ont au moins une rémission de longue durée, et aussi dans les fièvres qui durent long-temps, même quand les intervalles ne sont pas de longue durée; s'il s'agit d'individus apyrétiques [aux ............................... ]. Une litière découverte est préférable à une litière fermée. Quant au temps approprié au mouvement passif, aux endroits où on le met en usage et à la manière dont on l'emploie, nous les déduirons de ce que nous avons dit dans le chapitre [21] Sur la promenade. Le mouvement passif dans une voiture agit, en quelque sorte, comme un levier: il met en mouvement les maladies enracinées. De tous les mouvements passifs produits par un vaisseau, celui qu'on fait dans un navire à rames est ordinairement peu considérable ; on le fait près de la terre et dans une mer sans vagues; par conséquent il ne produit pas beaucoup de trouble, ni de ballottement; aussi convient-il à peu près dans les mêmes cas que le mouvement en voiture; seulement il a l'avantage de se faire dans un air pur qui con-tient des évaporations sèches, âcres et non pas humides ; pour cette raison il est préférable. Le mouvement passif dans un navire mu par le vent dans la haute mer est très varié et composé d'éléments diamétralement opposés; car il se fait avec un mouvement incessant très rapide et très-intense par suite de la marche du navire; il est accompagné à la fois de quiétude et de peur, puisqu'il amène des changements très faciles et très rapides; or, de pareils changements guérissent de toute disposition invétérée aux maladies. Le ballottement pendant la navigation a la même efficacité qu'un traitement léger par l'ellébore blanc.

24. DE L'ÉQUITATION.

(Tiré du même livre.)

L'équitation est peu employée chez les malades ; car, si le cheval marche doucement, l'équitation ne produira d'autre effet que de la fatigue, surtout aux aines; si, au contraire, il marche avec véhémence, l'équitation secoue tout le corps d'une manière pénible; cependant elle a quelque chose d'utile, car elle renforce le corps et surtout l'orifice de l'estomac plus que tous les autres exercices; elle purge les organes des sens et les rend plus déliés, mais c'est un exercice très-nuisible à la poitrine.

25. DU MOUVEMENT PASSIF QUI CONVIENT DANS LES FIÈVRES.

(Tiré d'Hérodote.)

[Du livre Sur ce que les malades font pour se traiter.]

La mesure du mouvement passif dans une litière ou dans une chaise, qu'on prescrit en cas de fièvre, doit ne pas rester d'abord au-dessous de cinq stades, et ne pas dépasser non plus dix stades; le second jour il faut s'en tenir également à la même distance, mais, à partir du troisième jour, on ajoutera, chaque jour, cinq stades, jusqu'à ce qu'on arrive à trente stades. Ceux qui ont besoin d'un mouvement passif plus prolongé doivent se servir d'un char à bras; on commencera en leur faisant faire trente stades, et on ira jusqu'à soixante. Ceux qui ont de l'insomnie dans les fièvres doivent être soumis au mouvement passif jusqu'à ce que le sommeil les prenne ; de même les individus qui éprouvent une douleur, ou quelque autre accident semblable, doivent continuer le mouvement passif jusqu'à la suppression de l'accident qui les incommodait. Il n'est pas facile d'exprimer en nombres la mesure du mouvement passif qui se fait dans le lit suspendu, mais on calculera le temps dans lequel on ferait quarante stades, si on était porté dans une litière. Ceux qui se font transporter par un attelage doivent faire, au commencement, trente ou quarante stades et aller jusqu'au double. Ceux qui ont l'habitude de monter à cheval ont besoin d'un mouvement passif plus prolongé; on le détermine d'après leur nature et leurs habitudes. Ceux qui font usage du mouvement passif dans un navire doivent faire, au commencement, soixante stades, et s'arrêter au double.

26. DE L'EXERCICE DU CERCEAU.

(Tiré d'Antyllus.)

[Du quatrième livre, Sur ce que les malades doivent faire eux-mêmes pour se traiter.]

L'exercice du cerceau (fig. 2) peut ramollir les parties tendues et rendre flexibles celles qui sont desséchées, par les mouvements qu'on fait pour éviter le cerceau et par la multiplicité des positions du corps ; il peut renforcer et relâcher les nerfs affaiblis, exciter la chaleur, et rétablir une intelligence stupéfiée ou dérangée par l'effet de la bile noire. Que le diamètre du cerceau soit moindre que la taille de l'homme [qui s'en sert], de sorte qu'il lui vienne jusqu'aux mamelles. Il ne faut pas pousser le cerceau [seulement] en ligne droite, mais aussi en zig-zag. La baguette doit être en fer et avoir un manche de bois. Les petits anneaux qui sont à l'intérieur du cerceau ont été regardés par quelques-uns comme superflus, mais il n'en est pas ainsi, car le bruit qu'ils font donne de la distraction et du plaisir à l'âme. Au début, on poussera le cerceau en se tenant droit, mais, quand le corps est devenu chaud et humide [de sueur], alors il faut sauter et courir çà et là; vers la fin on poussera de nouveau le cerceau en se tenant droit afin d'apaiser le trouble produit par l'exercice. Le temps convenable pour le cerceau comme pour les autres exercices, c'est-à-dire pour les grands, est celui qui précède le repas ou le bain.

27. DE LA NATATION.

(Tiré du même livre.)

La natation ne convient que rarement et dans un nombre restreint de maladies chroniques; on n'y a recours qu'en été; elle peut amaigrir, favoriser la perspiration, renforcer, réchauffer, atténuer et donner la faculté de résister aux causes morbifiques. Si elle se fait dans la mer, elle convient aux hydropiques, à ceux qui ont la psore ou des dartres; elle convient aussi aux malades affectés d'éléphantiasis et à ceux qui ont des fluxions aux jambes ou à quelque [autre] partie du corps ; elle est également favorable aux individus émaciés et à ceux qui ont de l'enflure à la suite d'une maladie; mais la natation est nuisible à la tête, qu'elle se fasse dans la mer ou partout ailleurs. La natation dans l'eau douce produit les mêmes effets à un degré faible et peu intense; voilà pourquoi il faut la défendre ordinairement, car elle est nuisible au tissu nerveux à cause du froid et de l'humidité qu'elle produit chez ceux qui restent longtemps dans l'eau. La natation dans les eaux minérales chaudes ne convient pas parce qu'elle remplit [la tête] ; il faut rejeter, à plus forte raison, la natation dans de l'eau chauffée artificielle-ment. Mais, que l'on nage dans la mer ou dans quelque autre eau, on doit toujours auparavant s'oindre modérément, réchauffer le corps par la friction et ensuite se précipiter brusquement dans l'eau.

28. DE LA LUTTE.

La lutte violente donne au pneuma de l'activité et de la force d'expansion, rend le corps ferme et musculeux, renforce les nerfs, aiguise les sens et augmente l'activité des fonctions naturelles; elle donne de la chair dense et serrée, mais très peu abondante; elle détruit la graisse, les oedèmes, les tumeurs et toutes sortes d'hydropisies, mais elle convient peu à la poitrine. La lutte modérée, au contraire, produit beaucoup de chair; voilà pourquoi elle est plus utile que l'autre à ceux qui commencent à se rétablir. Ensuite la lutte qui se fait debout est favorable à la tête et à la poitrine, et renforce les nerfs. Celle qui se fait à terre est avantageuse pour les lombes, les genoux, les hypocondres et les intestins, s'ils sont malades, mais elle convient moins bien à la tête. (V. fig. 5, 6, 7 et 8.)

29. DU COMBAT SIMULÉ.

[Tiré du quatrième livre.]

Le combat simulé sert à dissiper un état qui tient de la fatigue, à renforcer les épaules et à guérir le désordre des nerfs et le tremblement. Il fait aussi descendre les matières, surtout chez ceux qui imitent les pugilateurs, en marchant sur la pointe des pieds; il est encore bon pour les reins et pour le colon ainsi que pour les accidents de la poitrine. Il faut simuler le combat, non seulement avec les bras, mais aussi avec les jambes, en faisant semblant tantôt de sauter, tantôt de donner des coups de talon.

30. DE LA GESTICULATION.

(Tiré du même livre.)

La gesticulation tient le milieu entre la danse et le combat simulé, mais elle se rapproche davantage du dernier. Elle convient dans les mêmes cas que le combat simulé, mais elle mérite la préférence chez les enfants, les femmes, les vieillards et ceux qui ont le corps très maigre ou très faible; car cet exercice leur est spécialement utile.

31. DU SAUT SIMPLE ET DU SAUT PROGRESSIF.

(Tiré du même livre.)

Le saut simple diffère du saut progressif, car le saut simple ressemble à une course où le corps reste dans le même endroit en fléchissant le jarret; le saut progressif, au contraire, est un mouvement continu de progression des jambes. Le saut contre les fesses, dont les Lacédémoniennes se servaient anciennement, se rapproche de ces exercices; c'est un saut simple où l'on fléchissait les jambes à un degré tel, que les talons touchaient aux fesses en frappant du talon, tantôt alternativement avec une seule jambe, tantôt avec les deux jambes à la fois. Le saut simple convient aux maladies chroniques de la tête, à la poitrine, aux individus chez qui les matières ont de la tendance vers le haut, et à ceux dont les jambes sont faibles, mal nourries, décharnées, engourdies ou tremblantes. Le saut progressif fait descendre les matières plus efficacement que le saut simple, mais, comme il secoue la poitrine, il ne convient pas aux affections de cette partie; cependant il procure au corps la faculté de se mouvoir très facilement et le rend très apte aux occupations journalières. Le saut contre les fesses purge et dessèche la tête, provoque les règles chez les femmes, et fait avorter les embryons qui ne sont pas encore formés, comme Hippocrate nous l'a rapporté dans le livre Sur la nature de l'enfant. Ce saut fait sortir aussi l'arrière-faix, quand il est retenu; il fait redescendre l'utérus quand il est remonté et provoque les hémorroïdes.

32. DU JEU DE PAUME.

(Tiré du même livre.)

Le jeu de paume facilite les mouvements de ceux qui s'y livrent, et fortifie les fonctions vitales. Ses diverses espèces tiennent à la différence des balles dont on se sert, car il y a une petite balle, une grande balle, une balle moyenne, une très grande balle et une balle creuse. Il y a trois espèces de petites balles qui diffèrent selon la grandeur, et qui servent chacune à un exercice spécial : il y a d'abord une balle qui est très petite, avec laquelle les joueurs s'exercent en appuyant fortement le corps l'un contre l'autre, et en tenant les mains très rapprochées pour lancer la balle; cet exercice est très profitable aux jambes, puisqu'il est accompagné de tension de ces parties; il l'est aussi au dos et aux côtés, ainsi qu'aux bras eux-mêmes, quand ces parties sont affaiblies; enfin il rend la chair ferme. ll y a une autre espèce de balle un peu plus grande que la première ; on s'en sert en appliquant l'avant-bras contre l'avant-bras des autres joueurs, mais sans que les corps se touchent et sans s'incliner les uns vers les autres tandis qu'on exécute des mouvements variés et qu'on change de place à cause du passage de la balle d'un des joueurs à l'autre. Cette espèce de jeu de paume est le plus beau des exercices qu'on fait avec la balle, parce qu'il rend le corps sain, qu'il facilite ses mouvements, en lui donnant en même temps de la force, qu'il fortifie la vue et qu'il ne remplit pas la tête. Il y a une troisième espèce de petite balle, qui est plus grande que la dernière, et avec laquelle on joue en se plaçant à une certaine distance; ce jeu est de deux espèces, selon qu'un le fait en restant en place ou en courant; quand on reste debout en place, on lance la balle avec force et en la suivant de la main; on en retire de l'avantage pour les bras et pour les yeux. Le jeu de paume qu'on fait en courant est tout aussi avantageux aux bras et aux yeux que le précédent, mais, en outre, il est utile aux jambes à cause de la course, et à l'épine du dos à cause des flexions qui ont lieu pendant la course. Voilà ce que nous avons à dire de la petite balle; quant à l'exercice avec la grande balle, il ne diffère pas seulement des précédents par la grandeur de l'instrument, mais aussi par la pose des bras; car, dans toutes les espèces dont nous avons parlé, les mains sont toujours placées plus bas que les épaules, tandis que, dans celui-ci, elles sont au-dessus de la tête, et par là la partie charnue des lombes est portée en arrière pendant cet exercice. Quelquefois aussi on marche sur la pointe des pieds en tâchant d'élever le bras, d'autres fois on saute, quand la balle passe par-dessus la tête. Cet exercice renforce tout le corps, et il convient à la tête parce qu'il fait descendre la matière. La très-grosse balle renforce les bras, pendant qu'on la lance (on la lance des deux mains, à cause de sa grandeur), mais, comme elle donne des coups rudes, elle est nuisible non-seulement aux malades et aux convalescents, mais aussi, sous quelques rapports, aux gens bien portants. La balle creuse, qu'on appelle aussi sac, produit, comme exercice, le même effet que le jeu de paume qui a lieu en courant; mais il n'est ni très facile, ni très élégant; c'est pourquoi il faut le rejeter.

33. DU CORYCOS.

(Tiré du même livre.)

On remplit le corycos de graines de figues ou de farine pour les gens faibles, et de sable pour les gens forts. La grandeur doit être appropriée aux forces et à l'âge. On le suspend en haut au plafond des gymnases à une distance du sol telle que le fond est à la hauteur du nombril de celui qui s'exerce. Ceux qui s'en servent le tiennent avec les mains et le font balancer avec les deux à la fois, d'abord doucement et ensuite plus fortement, de façon à courir après quand il s'en va, et à l'éviter quand il revient, pour ne pas être repoussés avec force; ensuite ils le lancent hors de leurs mains, en le poussant, de sorte qu'en revenant il frappe plus fortement le corps lorsqu'il le touche; enfin ils le lancent en le frappant très fortement, de manière à être repoussés quand il revient, s'ils ne sont pas très attentifs. Quelquefois ils vont à sa rencontre pour le recevoir dans les mains, d'autres fois ils le reçoivent sur la poitrine les bras étendus, d'autres fois enfin ils se retournent et le reçoivent sur le dos. Le corycos peut rendre le corps musculeux et donner de la force ; c'est un exercice efficace pour les épaules et pour tout le corps, et il est profitable à tous les viscères â cause des coups qu'on reçoit.

34. DE LA MANIÈRE DE LANCER LES HALTÈRES.

(Tiré du même livre.)

Le jeu des haltères (fig. 3 et 4) est un exercice rude; il convient à l'orifice de l'estomac affecté de fluxion, de faiblesse ou d'aigreur, et à l'estomac quand il digère difficilement; il exerce aussi fortement les épaules et les rend charnues, mais il ne convient ni à la tête ni à la poitrine. Il y a une différence quant à la manière de lancer les haltères eux-mêmes; tantôt on les lance en étendant et en fléchissant tour à tour les bras ; tantôt on les tient seulement [dans les mains] en étendant les bras au-devant de soi sans les mouvoir; ordinairement on fait aussi subir aux bras un petit mouvement, et ceux qui s'exercent marchent et les secouent à la manière des pugilateurs; quelquefois on fléchit l'épine du dos en faisant accorder ce mouvement avec une flexion légère des bras. Le premier genre d'exercice produit les effets énumérés; le second fortifie les jambes et les nerfs et fait descendre les matières; le troisième fait profiter l'épine du dos et les lombes, mais il met la tête dans un état très fâcheux.

35. DE LA MARCHE SUR UN TERRAIN ACCIDENTÉ.

(Tiré du même livre.)

Cet exercice fortifie le pneuma, rend le corps, et surtout les jambes, flexibles, en même temps qu'il donne de la force aux parties mises en mouvement; il donne aussi une fermeté durable et force à employer alternativement toutes les parties fibreuses; il déplace les matières et pousse les superfluités turgescentes vers les conduits excréteurs. Si on fait, en outre, porter des haltères à ceux qui marchent sur un terrain inégal, cet exercice devient un des plus lourds, parce qu'il met également en activité les parties supérieures et les parties inférieures du corps.

36. DU COMBAT EN ARMES.

(Tiré du même livre.)

Le combat en armes ne fait pas partie des exercices anciens, je veux dire de ceux qu'on prescrivait aux malades; car, du reste, le maniement des armes est ancien. Mais les Romains inventèrent l'espèce de combat en armes dont il s'agit ici ; d'abord on s'en servit pour se préparer à la guerre; actuellement on y a recours pour mettre le corps en activité, du moins pour les soldats, car ils se battent armés à la manière des gladiateurs, soit contre des adversaires, soit contre une colonne, comme si c'était un adversaire. Cet exercice peut faciliter les mouvements du corps et procurer de l'embonpoint, mais la chair qu'il donne est pétrie d'humidité; il est nuisible à la tête, parce qu'elle est fortement couverte par les feutres et le casque, et qu'elle souffre sous ce poids. Ce qu'on vante surtout dans cet exercice, c'est qu'il renforce le corps et qu'il agrandit le champ de la respiration, raison pour laquelle ceux qui s'y sent d'abord accoutumés sont capables de supporter toute autre expulsion rapide du souffle.

37. Du COÏT.

(Tiré de Galien.)

Selon Épicure le coït n'est jamais favorable à la santé; mais, en vérité, il l'est, lorsqu'on y a recours à des intervalles assez longs pour qu'on ne sente aucun affaiblissement et qu'on semble être devenu plus léger et avoir la respiration plus facile que de coutume. Le temps le plus favorable pour le coït est celui où le corps, étant dans un état exactement moyen par rapport à toutes les influences extérieures, n'est ni trop chargé de nourriture, ni sous l'empire du besoin, ni trop refroidi, ni trop échauffé, ni desséché, ni imbibé d'humidité outre mesure. Si, par fois, on s'écarte en quelque chose de cet état moyen, cet écart doit être peu considérable, et il vaut mieux recourir au coït quand le corps est échauffé que quand il est refroidi, quand il est chargé de nourriture que quand il éprouve du besoin, quand il est imbibé d'humidité que quand il est desséché. Le coït amène au comble de la faiblesse ceux dont les forces sont peu considérables, tandis que ceux dont les forces sont intactes et qui sont malades par l'effet de la pituite n'en seront point abattus; l'excès de pituite sera desséché par un surcroît d'évaporation d'humeurs, car le coït est sans inconvénient pour les individus humides et chauds, et pour tous ceux qui ont naturellement beau-coup de sperme. Mais le coït réchauffe aussi le corps de ceux dont les forces sont intactes; les gens faibles, au contraire, il les réchauffe aussi au moment même, mais il les refroidit ensuite considérablement. Quelques-uns, dès leur jeune âge, deviennent faibles après le coït; d'autres, s'ils n'en usent pas habituellement, ont la tête lourde, sont pris d'anxiété et de fièvre, perdent l'appétit et digèrent moins bien; nous avons donc observé que quelques-uns de ceux qui avaient une nature semblable, après s'être abstenus du coït, sont devenus engourdis et paresseux, que d'autres sont devenus bourrus sans aucune raison, et découragés comme ceux qui souffrent de la bile noire, et que tous ces accidents cessent rapidement parle coït. En réfléchissant à ce fait, il me paraît que la rétention du sperme nuit considérablement aux individus forts et jeunes, chez qui le sperme est naturellement abondant et formé d'humeurs non entièrement irréprochables, qui mènent une vie tant soit peu oisive, qui usaient auparavant très fréquemment du coït, et qui, tout d'un coup, gardent ensuite la continence; chez ces individus, le changement qu'éprouve la complexion du corps en se raréfiant prédomine sur celui qu'éprouvent les forces en s'affaiblissant; aussi se restaurent-ils par les moyens qui contractent et resserrent; à cette classe appartient l'exercice préparatoire. Dans le cas où le coït amène du refroidissement, il faut également avoir recours à l'exercice préparatoire, car il excite la chaleur. Si la saison le permet, il ne faut pas s'abstenir non plus du bain froid. On donnera des aliments humides en petite quantité, afin qu'on les digère bien et qu'on guérisse la sécheresse causée par le colt. Quant au tempérament de ces aliments, ils ne doivent pas être trop froids non plus, mais modérément chauds; car, puisque le coït raréfie, affaiblit, refroidit et dessèche à la fois le corps, il faut, en effet, donner des aliments qui condensent, réchauffent, humectent et renforcent, et c'est là ce qu'il faut se proposer comme but chez ces sujets.

38. DU COÏT.

(Tiré de Rufus.

[Ce chapitre contient aussi le régime.]

En général le coït refroidit le corps. Toutefois le coït avec une femme est moins violent : voilà pourquoi il est aussi moins pénible; le coït avec un homme, au contraire, est violent: il oblige à faire de plus grands efforts. De même le coït qui se fait debout est assez fatigant, ainsi que celui qu'on exerce après un repas abondant ou un excès de boisson, tandis que le coït avant le repas est le plus facile et le plus rapide, mais il n'est pas très vigoureux. La rétention du sperme au milieu de l'acte lui-même est très pernicieuse aux reins et à la vessie. Le coït, en vérité, n'est pas absolument mauvais sous tous les rapports, pourvu qu'on fasse attention aussi bien au temps qu'a la mesure; les avantages qu'il procure sont les suivants : il évacue la pléthore, il rend le corps léger, provoque la croissance et augmente la virilité; en outre, il dissipe les idées fixes de l'âme et adoucit les passions indomptables : voilà pourquoi il n'existe aucun autre remède aussi éminemment utile contre la mélancolie. Il ramène aussi à un état d'esprit plus sensé ceux qui délirent d'une autre manière ; je sais qu'il a suspendu l'épilepsie chez quelques sujets au moment de la puberté; chez d'autres il a dissipé la pesanteur et les maux de tête. Hippocrate a dit en un seul mot : « Le coït est excellent contre les maladies qui tiennent à la pituite. » Plusieurs individus, qui étaient émaciés à la suite de maladies, se restaurèrent aussi plus facilement (par le coït), d'autres acquirent une respiration facile, tandis qu'elle était auparavant gênée; chez eux l'appétit succéda au dégoût pour les aliments, d'autres enfin furent délivrés de pollutions nocturnes continuelles; on admet, il est vrai, que ces pertes de semence sont moins pénibles, mais je ne suis pas de cet avis, car les pollutions relâchent encore davantage le corps, qui est déjà relâché pendant le sommeil. Ce sont là les points essentiels de mon sujet; quant aux natures aptes au coït, ce sont les natures plus ou moins chaudes et humides; il en est de même pour le régime, la saison, ainsi que pour l'âge; pour la saison, c'est le printemps; pour l'âge, c'est la jeunesse; pour le régime plus ou moins propre, celui qui s'y prête mieux que les autres doit être un peu chaud et humide; les circonstances les moins favorables sont le régime desséchant et refroidissant, la vieillesse et l'automne, ainsi que les natures qui se rapprochent le plus des conditions énumérées. Me voilà déjà amené par la suite de mon raisonnement au point où je voulais arriver dès le commencement; car le régime approprié au coït, et le traitement de ceux qui ne peuvent pas en user se révèlent maintenant clairement à nous; en effet, le régime dont il s'agit doit être humide et chaud, et les éléments de ce régime seront la modération dans les exercices et l'abondance des aliments. C'est là, en résumé, ce qui regarde le régime; quant aux détails, les exercices consisteront en promenades violentes à pied, en courses douces et en promenades à cheval ni trop violentes ni trop prolongées, car inévitablement les lombes et les testicules se fatiguent considérablement dans ce cas. Celui qui a une constitution froide ou humide doit se livrer à tons ces exercices plus fréquemment et plus rapidement, tandis qu'il suffira, quand on a affaire à un individu d'une constitution plutôt sèche, de le faire reposer pour le mettre dans la disposition requise. Ce ne sont pas seulement les exercices susdits qui conviennent, mais il en est ainsi du coït lui-même; car il excite aux rapprochements sexuels, et il devient un peu plus facile par l'habitude; en effet, plusieurs gens qui en avaient perdu la coutume devinrent, les uns, tout à fait incapables de l'exercer, tandis que d'autres ne s'y livrèrent de nouveau qu'en se fatiguant beaucoup; seulement il faut ramener le corps à son état propre et normal par le régime qu'on suit après. La lutte et les frictions répétées, la gesticulation et le lancement du javelot sont des exercices moins convenables dans le cas dont il s'agit; elles favorisent, il est vrai, le développement des forces, mais elles détournent le cours circulaire de la matière nutritive, et on a besoin, avant tout, de matière nutritive abondante. Voilà comment on se servira avec avantage des exercices; quant aux aliments et aux boissons, on prendra pour boisson des vins paillets, car ces vins-là tiennent le plus exactement le milieu entre les autres vins; ils ne passent pas trop vite par la vessie, comme les vins blancs, et ils ne sont pas secs ou épais non plus comme les vins noirs, tandis qu'ils sont très bien supportés par la tête et digérés très facilement; or ce sont justement là des effets qu'on doit obtenir; quant aux aliments, on prendra du pain exempt de son, cuit au four chauffé de tous côtés, car ces pains-là sont plus humides que les autres; pour mets secondaires on prendra de la chair de jeune bouc, d'agneau, de jeune porc, et, en fait de volailles, des poules, des coqs de bruyère, des perdrix, des oies et des canards, car toutes ces choses sont très nourrissantes. On prendra, en fait de poissons, des poulpes (on admet en effet que ces animaux ont de plus une vertu excitante) et toutes les espèces de mollusques; en fait d'herbages, de l'ormin, de l'erysimum, de la roquette et des navets, mets qui peuvent aussi servir comme médicaments; en fait de légumes secs, des fèves, des pois chiches, des gesses à fleurs jaunes, des haricots, des pois grecs, qui sont utiles, non seulement parce qu'ils fournissent une nourriture abondante, mais aussi parce qu'ils remplissent de flatuosités, de même que la rue amortit les désirs vénériens, en amenant les flatuosités à coction et en les faisant disparaître. Je recommande fortement aussi les raisins pour le régime dont il s'agit maintenant, car ils sont abondamment remplis d'humidité; comme, en outre, ils passent plus facilement par le bas que la plupart des autres aliments, ils nourrissent très bien aussi et remplissent le sang de flatuosités, circonstance qui produit une excitation efficace. Pour traiter complètement mon sujet, il convient de considérer aussi le temps propre au coït; dans toutes les circonstances le temps varie beaucoup, il est vrai, selon la disposition où on se trouve, mais, pour le cas actuel, le point principal, c'est d'éviter les repas copieux et les excès de boisson peu de temps auparavant, car, dans ces circonstances, tout autre exercice ne convient pas. On évitera aussi l'insuffisance d'alimentation ; on se débarrasse, il est vrai, plus facilement de cet inconvénient que de celui des repas copieux; cependant cette insuffisance est un peu affaiblissante. Il faut éviter aussi les digestions incomplètes ; voilà pourquoi le coït au milieu de la nuit est trompeur, parce qu'alors les aliments ne sont pas encore élaborés; il en est de même pour le coït qu'on exerce de grand matin, parce qu'il pourrait se faire qu'il y eût encore des aliments mal digérés dans l'estomac, et parce que toutes les superfluités n'ont pas encore été évacuées par l'urine et par les selles, car il est mauvais d'exercer le coït avec des superfluités dans le corps ; il est moins dangereux d'exercer le coït avant les exercices et le bain, et celui qu'on accomplit avant de se livrer à ses occupations habituelles est peu vigoureux. Le mieux, par conséquent, c'est d'exercer le coït après le repas, pourvu qu'il n'ait pas été trop copieux, car cela favorise le développement des forces, puis le refroidissement qui vient habituellement après est moindre; si donc on veut exercer le coït après le déjeuner, il faut se reposer jusqu'à ce qu'on ait entièrement réparé les fatigues multipliées; si on veut le faire après dîner, il est nécessaire d'aller dormir, car c'est là le repos le plus complet. Il semble ici que la nature est d'accord avec le raisonnement, car d'abord c'est dans cette circonstance qu'elle excite le plus fortement, et ensuite, quand elle a des matériaux en abondance, elle opère plus facilement la sécrétion que si elle n'a justement que ce qu'il lui faut. C'est pour avoir pris cela en considération que les médecins recommandent, quand on veut avoir des enfants, que l'homme se livre aux rapprochements sexuels après avoir mangé et bien bu, tandis que la femme doit suivre un régime moins fortifiant, parce qu'il faut que l'un donne et que l'autre reçoive. Outre les circonstances dont nous venons de parler, on doit faire attention aussi aux autres états du corps, car il ne convient pas non plus de se livrer au coït après les exercices, quoiqu'on admette qu'il dissipe la fatigue, mais c'est à tort, car la faiblesse ne guérit pas la fatigue, seulement la fatigue excite certains désirs par la chaleur des nerfs des lombes. Il faut, par conséquent, éviter la fatigue et les vomissements, aussi bien ceux qu'on prévoit que ceux qui viennent d'avoir lieu; il en est de même pour les purgations et pour la diarrhée qui survient subitement, car le coït tarit la diarrhée chronique; il en est encore de même pour les maladies de la poitrine, qu'elles existent ou qu'on les attende, et pour les affections des nerfs : voilà pourquoi je n'approuve pas les désirs intenses, et que je recommande de résister plus, dans ce cas que dans tout autre, surtout à ceux qui ont une maladie de la vessie ou des reins, ou qui sont sujets à l'épilepsie ou à la manie, car, si les maladies sont sur le point de venir, il survient des désirs intenses. Le mieux est que l'homme s'adonne aux rapprochements sexuels, quand il est pressé en même temps par le désir de l'âme et par le besoin du corps, mais le désir de l'âme doit avoir le dessous et obéir au corps, car ce ne sont pas là de pures chimères, mais ce sont des préludes de la nature qui a besoin d'évacuation, préludes tels que les autres animaux en éprouvent de même habituellement. Tel est, par conséquent le régime; il est facile d'en déduire un traitement pour ceux qui ne peuvent pas exercer le coït; par exemple, l'homme qui vint nous voir de Corinthe disait qu'il désirait beaucoup exercer le coït, mais que, quand il s'y adonnait, il n'éjaculait pas de sperme, mais rendait [seulement] beaucoup de vent. Je soupçonnai que son affection résidait dans la sécheresse, ce qui fut confirmé par la guérison, car, aussitôt qu'il fit usage d'un régime humide, il éjacula du sperme. Le jeune homme de Milet avait environ vingt-deux ans; il disait que, quand il se livrait au coït, il ne pouvait éjaculer du sperme, tandis qu'il en perdait beaucoup pendant le sommeil. Il me semblait qu'a cause d'un fort refroidissement humide ce jeune homme n'était pas très échauffé pendant le coït, tandis qu'il était échauffé davantage pendant le sommeil, car on sait que le sommeil a la faculté de réchauffer l'intérieur et de refroidir l'extérieur; aussi n'eut-il pas besoin d'autre traitement, en fait d'exercice, que de se promener à cheval, et, pour médicament, de boire du castoréum, tandis que tout le reste du régime était sec et chaud.