ALLER A LA TABLE DES MATIÈRES DE LEPTINE
Oeuvre numérisée par Marc Szwajcer Paul TANNERY
RECHERCHES SUR L'HISTOIRE DE L'ASTRONOMIE ANCIENNE
MÉMOIRES DE LA SOCIETE (4ème Série) TOME I Paris,
Gauthier-Villars Didascalie céleste de Leptine.
EXTRAIT du livre de Paul Tannery - Recherches sur l'histoire de l'astronomie, chap. I.
………………………………………………………………………………………………………………. 25. Les vers se fixent plus facilement dans la mémoire, et leur usage pédagogique se répandit dès qu'il y eut des maîtres et des élèves. Pour nous borner à un exemple frappant, qui appartient d'ailleurs à notre sujet, mais qui, suivant la distinction que nous avons faite, est de l'époque de ['astrologie, nous pouvons prendre un petit traité qui résume les connaissances de ce second âge de la science et qui, malgré sa brièveté et les incorrections dont il fourmille, n'en est pas moins précieux par son ancienneté et par ce fait qu'il est le seul monument tant soit peu complet qui, de cette époque, nous reste sur la matière. Il s'agit du texte contenu dans le papyrus n° 1 du musée du Louvre, déchiffré par Letronne et publié, d'après ses papiers, par Brunet de Presle dans les Notices et extraits des Manuscrits (XVIII, 1865, p. 25 et suiv.). L'éditeur lui a donné le titre d'Art d’Eudoxe, sous lequel il est connu; je crois cependant préférable de lui restituer, avec Letronne, l'intitulé : Didascalie céleste, de Leptine. En tout cas, il a été écrit en Egypte entre les années 193 et 165 avant Jésus-Christ, c'est-à-dire une génération au moins avant Hipparque. Or, Fridrich Blass,[1] qui a récemment réédité ce texte à Kiel (Schmidt et Klaunig, 1887), a montré qu'il supposait une première rédaction en vers (iambiques senaires), que plusieurs morceaux sont intégralement conservés sous la forme primitive, que d'autres sont seulement plus ou moins défigurés, que de rares parties seules ne laissent pas soupçonner une versification antérieure. Quoique d'ailleurs Leptine ait dédié sa Didascalie aux rois d'Egypte, le papyrus a certainement été écrit par un homme peu instruit, et on l'a comparé, avec quelque raison, à un cahier d'élève. En tout cas, il n'est pas douteux que le texte ne représente un enseignement donné par un maître sur un manuel rédigé en vers. 26. J'insiste sur ce point pour une remarque qui pourra faire comprendre combien les vers grecs iambiques se prêtaient facilement aux exigences d'une rédaction scientifique, destinée à être apprise par cœur. Dans le traité de Leptine, on rencontre fréquemment des propositions présentées avec un appareil tout à fait géométrique (par exemple, celle-ci, que le ciel tourne autour de deux pôles fixes); l'énoncé, la démonstration (par l'absurde) et la conclusion répétant renoncé. Si la démonstration est écourtée, rien ne manque aux éléments du type classique, pas même la clause sacramentelle : < Ce qu'il fallait démontrer. > Or, le retour de l'énoncé dans la conclusion, retour si fatigant dans Euclide, produit dans le texte versifié de Leptine l'effet d'un refrain qui n'est pas sans quelque grâce, effet dont il use d'ailleurs dans d'autres cas que celui d'une démonstration. On pourrait donc être conduit à croire que le type de la démonstration géométrique remonte précisément à une forme versifiée semblable à celle que l’on distingue dans la Didascalie de Leptine et qui s'appliquait didactiquement aux sujets nécessitant l'emploi d'un raisonnement. Si, pour toutes les matières autres que les mathématiques, ce type fut abandonné assez tôt pour qu'on n'en retrouve pas de traces, ce serait parce que, dans ces matières, la forme du dialogue triompha de bonne heure et qu'elle conduisit naturellement à enchaîner les raisonnements suivant un procédé tout autre. Sans prétendre, bien entendu, que la géométrie ait été jamais traitée en vers, on n'en peut pas moins dire que la division par propositions du type classique représente une division en couplets libres, avec retour des premiers vers à la fin de chacun, forme sans doute favorable à la mnémonique d'un enseignement ayant à inculquer dans l'esprit un certain nombre de formules et en même temps à en rendre raison ou à en développer le sens. 27. Nous avons, dans ce chapitre, essayé de préciser ce que les Hellènes ont appelé astronomie; nous en avons montré l'origine populaire et les visées pratiques. Diviser le ciel en constellations pour arriver à une division de la nuit en heures et de l’année en saisons; chercher à prédire le temps, régler enfin l'année luni-solaire traditionnelle, tel fut le programme qui se développa successivement et que les premiers astronomes léguèrent à leurs successeurs. Dans leurs écrits, en vers ou en prose, dans leurs parapegmes, ils n'avaient touché qu'une bien faible partie de la science. Elle devait, pour grandir, puiser à d'autres sources, faire appel à d'autres doctrines.[2] ……………………………………………………………………………………………………………….
Traduction de la Didascalie céleste de Leptine. (Art d'Eudoxe).
Ici[3] je vous apprendrai à tous à connaître la savante composition du ciel ; dans un discours abrégé, je vous donnerai un clair enseignement de cet art. Personne ne manque assez d'intelligence pour y rien trouver d'étrange, si toutefois il veut s'y bien appliquer. Chaque vers est un mois, chaque lettre est un jour pour vous, et le nombre des lettres est égal à celui des jours que comprend en tout le temps dans lequel s'accomplit pour les mortels le tour de l'année, le temps qui règle les mouvements des constellations. Or, aucune de celles-ci ne devance l’autre, mais toutes reviennent toujours au même point, lorsque le temps est venu.
[INTERVALLES DES ASTRES].
2. ... [Du solstice d'été au] coucher (du matin) de l'étoile de l'Aigle [34 jours][4] [De là à] l'équinoxe d'automne [57 jours] [De là au] lever (du matin) de la Couronne [9 jours] [De là au] coucher (du matin) des Pléiades [30 jours] [De là au] solstice d'hiver [44 jours] [De là au milieu de] l'hiver [10 jours] [De là au commencement du] zéphyre [29 jours] < De là à l'équinoxe du printemps 52 jours > 3. [Le soleil], après sa marche d'hiver, [revient en sens contraire], allant de droite (à gauche)[5] jusqu'au [borée] (nord) pendant 180 jours. [Après avoir passé deux] jours au borée, [où il marque] le solstice d'été, il marche du borée vers le notos (sud), de [la même manière, pendant] 180 jours, jusqu'à ce qu'il arrive au [notos]. Après y avoir passé trois jours[6] et y [avoir marqué] le solstice d'hiver, [il fait augmenter le jour aux dépens] delà nuit, depuis le solstice d'hiver, jusqu'à ce qu'il arrive à l’apéliote (est). Là, à l'apéliote, le jour devient [égal à la nuit]; c'est l'équinoxe du printemps. [Marchant] de l'apéliote vers [le borée, le soleil ajoute encore] au jour, aux dépens delà nuit, 1/44e d'heure pendant 90 jours, et au borée, le jour devient de 14 heures, la nuit de 10 heures : c'est le solstice d'été.[7] 4. Ayant marqué le solstice d'été, le soleil marche comme vers le libs (ouest)[8] pendant 90 jours, en augmentant maintenant la nuit < jusqu'à ce qu'elle redevienne égale au jour > ; c'est alors l'équinoxe d'automne. Marchant du libs vers le notos pendant 90 jours, il continue à augmenter la nuit aux dépens du jour de 1/44 d'heure et, au notos, la nuit devient de 14 heures, le jour de 10 heures : c'est le solstice d'hiver. 5. Ayant marqué les solstices d'été et d'hiver, les équinoxes de printemps et d'automne, le soleil recommence le cours des jours, ajoutant tantôt à la nuit, tantôt au jour, constamment la fraction régulière, 1/1080e de jour. 6. Les solstices ont lieu de celte façon, le jour et la nuit y devenant tantôt l'un, tantôt l'autre, soit de 14 heures, soit de 10 heures; en sorte que la différence entre la plus grande et la moindre durée est, pour l'un et pour l'autre, de 4 heures. C'est là la variation qui se fait dans le laps de six mois, suivant que le soleil s'approche ou qu'il s'éloigne pendant le cours de l'année de douze mois. 7. Aussi pour les astrologues n'y a-l-il pas d'accord avec les jours ni avec les mois helléniques. En effet, l'année du soleil est de 365 jours, celle de la lune est de [354] jours; car il y a dans l'année [13] néoménies où elle ne paraît pas, et de plus 10 autres jours;[9] en sorte que la [lune] est en défaut de il jours. 8. Les astrologues et les hiérogrammales emploient les jours selon la lune, et ils fixent les fêtes populaires, les unes conformément à la loi, mais les Catachytéries,[10] le lever du Chien et les Sélénées, suivant le dieu, en comptant les jours d'après les Égyptiens, qui n'en retranchent ni n'en intercalent jamais. Il faut d'ailleurs, en comptant les jours du soleil et de la lune par période do quatre ans, avancer dans le mois en ajoutant chaque année un quart de jour. C'est ainsi qu'on fait la distinction des genèses et des agenèses[11] en dehors des planètes.
MARCHE DE LA LUNE.[12]
9. Commencement de la marche de la lune en son cours. Elle paraît dans le premier signe pendant la néoménie et le quart du troisième jour; dans le second signe, les fractions restantes et jusqu'à la moitié du cinquième jour; le troisième signe va jusqu'aux trois quarts du septième jour. Elle brille dans le quatrième signe jusqu'au neuvième jour, depuis l'aurore jusqu'à la fin ; dans le cinquième signe, depuis le dixième jour jusqu'au quart du douzième; le sixième signe laisse la moitié du quatorzième jour. Le septième signe laisse un quart du seizième jour, et le huitième signe termine le dix-huitième jour. Puis le neuvième signe prend un quart sur le vingt et unième jour. Le dixième signe prend la moitié sur le vingt-troisième jour; le onzième signe, trois quarts sur le vingt-cinquième jour; enfin, le douzième signe, avec le vingt-septième jour, termine la sainte course, qui recommence éternellement. Ajoute les fractions suivantes[13] depuis le point de départ cl compte le tout jusqu'au trentième jour, où reprend la marche de la lune en son cours.
MARCHE DES CINQ ÉTOILES ERRANTES.[14]
10. Eôsphoros, qu'on appelle l'étoile d'Aphrodite (Vénus), parcourt sa spirale[15] en un an, sept mois et quatre jours. Hespéros, qui est la même étoile sous un autre nom, a la même course et la même marche dans le même temps. 11. Stilbon, l'étoile d'Hermès (Mercure), parcourt la spirale en 3 mois et [2]6 jours. 12. Pyroeidès (Mars) parcourt le cercle du zodiaque en [2 ans]. 13. Phaéton, l’étoile de [Zeus], (Jupiter), parcourt le cercle du zodiaque en 12 ans. 14. Phainon, l'étoile d'Hélios, (Saturne),[16] parcourt le cercle du zodiaque en 30 ans. CERCLES DE LA SPHERE CÉLESTE.
15. On imagine le cercle horizon comme celui que paraît former la rencontre commune de la terre < et du ciel > et qui divise le monde en deux moitiés, l'une au-dessus de la terre, l'autre au-dessous. 16. Le cercle toujours visible, celui qui ne se couche jamais[17] et qui renferme les Ourses; le cercle toujours invisible, celui qui ne se lève jamais. 17. Le tropique d'été, celui que suit le soleil lorsqu'il fait le· jour le plus long et la nuit la plus courte; le tropique d'hiver, celui que suit le soleil lorsqu'il fait le jour le plus court et la nuit la plus longue. 18. L'équateur, celui que suit le soleil lorsqu'il fait le jour égal à la nuit. 19. Le cercle des douze signes, celui que parcourt le soleil pendant l’année. 20. Le cercle de la lune, celui que la lune décrit à travers les douze signes dans son mouvement au-dessous du soleil. 21. Il y a au monde deux pôles, autour desquels il tourne. La terre, qui a la forme d'une sphère, est située au milieu du monde également sphérique, et les pôles autour desquels tourne le monde sont immobiles. — Preuve. — Si, en effet, le pôle montait ou descendait, les Ourses se coucheraient et se lèveraient; or, elles ne se lèvent pas. Si le pôle se déplaçait vers le levant ou le couchant, les astres fixes ne se lèveraient plus aux mêmes points de la terre ; or, ils s'y lèvent toujours. Donc le monde tourne autour de deux pôles immobiles; ce qu'il fallait montrer. (Figure du zodiaque incomplète.) ORDRE DU MONDE CÉLESTE.
22. On conçoit le monde comme formé de la terre, de la lune, du soleil, des cinq étoiles errantes, des fixes et de l'air qui enveloppe le ciel et la terre. 23. Nous disons les étoiles fixes, parce qu'elles conservent leurs dispositions; dans la révolution de la sphère, les astres gardent, en effet, leurs figures en triangles, tétragones, cercles et lignes droites. 24. Ainsi l'épaule d'Orion,[18] le Chien et Procyon forment un triangle; les étoiles de Céphée[19] et la brillante de la Petite Ourse en forment un autre. Celles du Cheval[20] et d'autre part celles des Ourses sont en tétragones. Les pieds des Gémeaux[21] sont en ligne droite. Les étoiles de la Couronne ou bien celles de la télé du Lion[22] sont en cercles. 25. En général, aucun astre ne change sa disposition ; Orion ne s'éloigne pas des Pléiades, il descend et monte aux mêmes points; c'est pourquoi on considère les astres comme fixes.
ORDRE DES ASTRES.
26. Chaque étoile fixe se meut suivant un cercle; car chacune tourne autour du pôle immobile à une distance qui lui est particulière, mais qui reste toujours la même; aussi chacune doit se mouvoir suivant un cercle. 27. Les étoiles errantes, la lune et le soleil se meuvent suivant des spirales. En effet, ces astres tournent autour du pôle immobile sans rester à une même distance; mais lorsqu'ils sont dans le Cancer, leur distance est minima, dans les Pinces (Balance), elle est plus grande; dans le Capricorne elle est maxima; ce qui fait que les astres errants se meuvent suivant des spirales. 28. Les étoiles fixes décrivent des cercles parallèles; puisque, en effet, elles restent entre elles à des distances égales, il en sera de même de leurs cercles; et c'est là ce que sont des cercles parallèles. 29. Des étoiles fixes[23] qui se lèvent ensemble, celles qui sont au sud se couchent les premières; car le cercle d'hiver a plus de sa moitié, l'équateur sa moitié, le cercle d'été moins de sa moitié au-dessus de la terre; de la sorte, des étoiles qui se lèvent ensemble, celles qui sont au sud se couchent les premières. 30. Des étoiles qui se couchent ensemble, celles qui sont au nord se lèvent les premières; car le cercle d'été a moins de sa moitié, l'équateur a sa moitié, le tropique d'hiver plus de sa moitié au-dessus de la terre; de la sorte, des étoiles qui se couchent ensemble, celles qui sont au nord se lèvent les premières. 31. Le cercle du zodiaque est incliné vers le sud de l'endroit que nous habitons et les ombres sont dirigées vers le nord. Si, en effet, le cercle du zodiaque était verticalement au-dessus de nous, à midi le soleil ne nous donnerait pas d'ombre. Si le zodiaque était incliné vers le nord, nos ombres tomberaient vers le midi; or, elles n'y tombent pas. Donc le cercle du zodiaque est incliné vers le sud de l'endroit que 'nous habitons, et les ombres sont dirigées vers le nord. 32. La lune n'a pas de lumière propre, mais elle est éclairée, par le soleil. Si, en effet, la lune· avait une lumière propre, il faudrait que sa partie qui est en face du soleil fut obscure et le reste brillant. Or, tout au contraire, c'est sa partie en face du soleil qui est brillante et le reste est sombre. C'est précisément ce qui arrive pour la terre, qui n'a point de lumière propre. 33. La lune est sphérique. Si, en effet, sa forme était celle d'un disque, elle serait tout entière illuminée par le soleil dès le premier jour; or, elle ne devient tout entière lumineuse qu'après quinze jours; donc la lune n'a point la forme d'un disque. — Si elle avait la forme d'un bassin dont la concavité fût tournée vers nous, ce ne serait point le côté du soleil qui serait le premier éclairé. Or, tout au contraire, c'est le côté du soleil qui est le premier éclairé et le reste est sombre, comme cela arrive aussi pour la terre, qui n'a point de lumière propre. 34. Le mois suivant la lune est de 29 jours ½. Car la lune, partant du soleil, y revient deux fois en 59 jours, ce qui fait la durée de deux mois; le mois est donc de la moitié de ce temps, soit 29 jours ½. 35. L'année suivant le soleil comprend 12 mois suivant la lune, plus 11 jours, l'année suivant le soleil étant de 365 jours, suivant la lune de 354. 36. Dans l'octaétéride il y a trois mois intercalaires, disposés comme suit. L'année suivant le soleil étant de 365 jours, et le mois, suivant la lune, de 29 jours ½, la première et la seconde année seront de douze mois, la troisième de treize, la quatrième et la cinquième de 354 jours, la sixième de treize mois, la septième de douze, la huitième de treize mois et un jour; ainsi, dans l'octaétéride il y a trois mois intercalaires. 37. Au coucher du soleil, les astres ne paraissent pas aussitôt, mais seulement quand le soleil est descendu au-dessous de l'horizon d'un demi-signe, alors on voit les astres. Cela fait une demi-heure.[24] — Preuve : Au coucher du soleil, laisse couler l'eau de la clepsydre dans un vase jusqu'à ce que les astres se lèvent; immédiatement après, fais couler à nouveau la même eau tout entière, de la même façon, les astres étant levés : en même temps que l'eau finira le signe entier. 38. Le soleil fait le solstice d'été dans le Cancer, celui d'hiver dans le Capricorne, les équinoxes dans le Bélier et dans les Pinces. En général, le signe où se trouve le soleil ne se voit pas, car ce signe se lève pendant le jour. 39. On voit en tout onze signes chaque nuit; en effet, le signe où se trouve le soleil ne se voit pas, car ce signe se lève pendant le jour. Il est donc clair que l’on voit en tout onze signes chaque nuit. 40. La lune parcourt en un mois le cercle du zodiaque que le soleil met un an à décrire, et elle fait en outre sur ce cercle l’arc mensuel du soleil. Puisque, en effet, la lune, partie du soleil, revient au soleil en 29 jours ½, elle n'a pas seulement parcouru le cercle du zodiaque. 41. Le soleil reste dans chaque signe 30 jours et 5 heures,[25] puisque l'année solaire est de 365 jours et que le douzième de 365 jours est tel. Quant à la lune, elle reste dans chaque signe 2 jours ¼, car si l'on divise le mois en 13 parties, le treizième de 29 jours ½ est tel. Voilà le mouvement uniforme de la lune dans sa course, inférieure à celle du soleil. 42. Les étoiles fixes mettent un temps égal à leur révolution et leurs cercles sont parallèles. Nous en dirons la raison, qui est que le monde tourne sur deux pôles immobiles. 43. Il n'y a pas de temps intermédiaire entre le jour et la nuit; toute nuit ajoutée au jour suivant fait toujours le même temps. Le temps de l'aurore, du midi, du minuit, celui des levers et couchers est toujours compris dans l'intervalle du jour avec la nuit. 44. Le soleil est laissé en arrière par les fixes dans la révolution du monde. En effet, le signe où est le soleil ne se voit pas; car ce signe se lève pendant le jour; mais après 30 jours on le voit se lever avant le soleil. — Preuve : Imaginez le cercle du zodiaque divisé en 365 parties. Si chaque jour et nuit le soleil est laissé en arrière par la révolution du monde d'une partie toujours égale, dans l’année, cela fera en plus le temps d'un jour et une nuit. Ainsi donc le soleil est laissé en arrière par les fixes dans la révolution du inonde. 45. Les éclipses du soleil ont lieu en nouvelle lune, lorsque la lune fait écran entre le soleil et notre œil. Pourquoi le soleil s'éclipse-t-il en nouvelle lune? C'est que ce jour-là la lune se lève et se couche en même temps que le soleil. 46. Il n'y a pas éclipse de soleil à chaque nouvelle lune, mais quand le soleil et la lune se trouvent sur une même droite, au même nœud; alors a lieu la plus grande éclipse de soleil; plus il y a d'écart, moins grande à mesure est l'éclipsé de soleil. Ainsi il n'y a pas d'éclipse de soleil à chaque nouvelle lune, mais il n'y en a qu'à la nouvelle lune. 47. Les éclipses de lune arrivent à la moitié du mois, quand le soleil et la lune se trouvent sur la même droite, au même nœud. Pourquoi la lune s'éclipse-t-elle à la moitié du mois? C'est que ce jour-là le soleil se lève et se couche en même temps que la lune, à l'intervalle d'un demi-cercle. 48. Les éclipses de soleil et de lune sont les moindres en forme de croissant, les plus grandes en forme d'abside,[26] celles encore plus grandes en forme d'œuf. 49. Le soleil ne s'éclipse jamais entièrement partout, mais la lune s'éclipse de la sorte. Pourquoi la lune s'éclipse-t-elle ainsi < et non le soleil >? C'est à cause de l'ouverture du cône qui, partant de notre œil, embrasse le soleil. Car le soleil est plus grand que la lune et la lune plus grande que la terre[27] < qui voit l'éclipse >. — Démonstration: Une grandeur qui fait écran devant nos yeux et qui est supérieure à l'ouverture < du cône à sa distance >, masque la vue dans une plus grande étendue. Mais la lune qui est supérieure à l'ouverture < du cône pour sa distance >, ne peut pour cela, puisque la terre est éclairée au delà, faire complètement écran devant le soleil, même lors de la plus grande éclipse de soleil. Donc le soleil est plus grand que la lune et la lune plus grande que la terre < qui voit l'éclipse > ; le rapport est celui de la quinte à < la différence entre la quinte et > la quarte.[28] 50. (Répétition du paragraphe 27.) 51. Il y a pour le soleil trois levers tropiques et autant de couchers : ceux d'été, d'équinoxe et d'hiver. En été, le soleil se lève à l’hellespontin, il se couche dans l’argeste; à l'équinoxe, il se lève à l’apéliote, il se couche dans le zéphyre; en hiver, il se lève à l’euros, il se couche dans le libs. 52. Il y a deux mouvements du soleil, qui déterminent: l'un, l'été et l'hiver; l'autre, la nuit et le jour.
INTERVALLES DES ASTRES.[29]
53. 1 D'Orion au Chien (levers du matin) [10?] jours. 2 Du Chien au lever (du matin) de l’Arcturus. [49] jours. 3 Du solstice d'été à l'équinoxe d'automne [92] jours. 4 Du [coucher du matin de l'Aigle] au lever du matin de l'Arcture 43 jours. 5 Du coucher (du matin) des Pléiades à celui d'Orion 22 jours. 6 Du coucher (du matin) d'Orion à celui du Chien 2 jours. 7 Du (coucher du) Chien au solstice (d'hiver) 24 (lisez 21) j. 8 Du solstice d'hiver au Zéphyre 45 jours. 9 Du Zéphyre à l'équinoxe (du printemps) 44 jours. 10 De l'équinoxe de printemps à la Pléiade (lever du matin) 50 jours. 11 Du lever de la Pléiade au solstice d'été 45 jours. 12 Du solstice d'été à l'équinoxe d'automne 91 jours. 54. D’après Eudoxe et Démocrite, le solstice d'hiver tombe tantôt le 20, tantôt le 19 athyr.[30] 55.
56. Aux rois, Didascalie céleste de Leptine.[32]
[1] C'est d'après cette réédition que j'ai traduit ce petit traité, qu'on trouvera comme Appendice à la fin de ce volume, et auquel j'aurai souvent l'occasion de renvoyer sous la rubrique Leptine. [2] Pour divers détails se rapportant à l'objet de ce chapitre, voir dans les Mémoires de la Société des Sciences physiques et naturelles de Bordeaux mes articles sur l'année grecque : La grande année d'Aristarque de Samos (t. IV p. 79-96); sur les parapegmes : Autolycus de Pitane (t II„ p. 173-199). [3] Ce paragraphe représente un acrostiche de 12 vers, dont chacun a 30 lettres, sauf le dernier qui en a 35. C'est de fait l'année vague égyptienne de 365 jours. Les parapegmes nous apparaissent réduits à une année de même durée. [4] Le commencement du traité est mutilé; les mots entre crochets correspondent à des restitutions plus ou moins conjecturales. Les nombres de jours indiqués sont ceux qu'on tiré du parapegme de Geminus comme attribués à Eudoxe. [5] Cette indication du sens du mouvement est populaire (de même, dans Homère, l'observateur des augures se tourne vers l'orient), sinon orientale; les pythagoriens et Aristote rapportaient la droite au levant, la gauche au couchant. [6] Cette singulière représentation de l'anomalie, d'après laquelle le soleil Ferait tout à fait stationnaire aux solstices pendant deux ou trois jours, tandis que le reste du mouvement s'opérerait avec variation uniforme des longueurs du jour et de la nuit, doit être antérieure à toute observation réelle de solstice. [7] Le climat indiqué est celui de la Basse-Egypte. [8] Proprement, le libs serait plutôt le couchant d'hiver, l'ouest véritable appartenant au zéphyre. Quoique les divers vents indiqués le soient suivant le sens de la marche du soleil, opposée au mouvement diurne, il n'y en a pas moins un abus évident dans cette façon de distinguer les équinoxes de printemps et d'automne. [9] Le texte est ici corrompu et incertain. [10] Les fêtes de l'inondation du Nil. Toutes ces fêtes sont égyptiennes. Autant qu'on peut le comprendre, les fêtes fixées conformément à la loi suivent l'année solaire vague; celles suivant le dieu, l'année fixe. Les astrologues rapportent ces fêtes à l'année hellénique, probablement officielle. Les Sélénées, d'après leur nom, seraient des fêtes de la lune, mais on ne comprend guère leur rapport à l'année solaire. [11] Ce qui doit arriver et ne pas arriver, termes d'astrologie judiciaire. Il semble que l'on rencontre là la doctrine proprement égyptienne, de la prédiction d'après le signe où se trouve le soleil. Les influences des planètes appartiendraient à l'école chaldéenne. [12] Tout ce morceau revient à admettre que la révolution sidérale de la lune est de 27 jours et qu'elle met uniformément 27/12 j, soit 2j ¼ traverser un signe. [13] C'est-à-dire les 2j ½ pour achever la révolution synodique. [14] Avant ce passage, est d'abord une figure analogue à celle qui, dans les manuscrits grecs, désigne conventionnellement le soleil; elle parait symboliser le jour. — Suit un dessin du zodiaque avec les noms des signes, entouré de six planètes (Vénus étant dédoublée en étoile du matin et isochrone — étoile du soir). — Les symboles des planètes, cercles avec diverses figures à l'intérieur et croissants, sont reproduits ensuite séparément avec leurs noms; mais le dessinateur semble avoir mal rendu ses modèles et fait diverses confusions, en sorte qu'on ne peut guère rien conclure de précis de toutes ces figures. [15] Il s'agit pour Vénus et pour Mercure de la révolution synodique. Le texte pour Vénus porte 1 an 3 mois 4 jours. Simplicius donne, d'après Eudoxe, pour ces révolutions, les nombres ronds et moins exacts de 19 mois et 3 mois 2/3. J'ai traduit par spirale le mot eλιξ, suivant le sens du paragraphe 27. Il peut ici désigner l’hippopède d'Eudoxe. [16] Cette appellation, confirmée par Simplicius comme employée par Eudoxe, parait venir du nom divin d'El (Syrie). [17] On remarquera que dans l'alinéa précédent, cercle désigne expressément la circonférence; ici c'est l'espace qu'elle renferme. [18] Bételgeuse. [19] Les pieds de Céphée (γ et k) avec notre Polaire. D'après le témoignage d'Hipparque, Eudoxe aurait donné ce triangle comme équilatéral, tandis qu'il ne serait qu'isocèle. [20] Pégase. [21] Les étoiles μ, ν, γ, ζ des Gémeaux. [22] Les étoiles k, l, e, μ du Lion. [23] Les propositions des paragraphes 29 et 30 sont démontrées dans la Sphère mobile d'Autolycus, 9. [24] Ici, comme au paragraphe 41, le nychthémère est divisé en 12 heures seulement et non en 24. La preuve donnée suppose l'égalité du temps d'ascension punies différents signes du zodiaque. [25] Voir la note sur le paragraphe 37. [26] De voûte. Le mot est devenu technique pour désigner les arcs plus grands qu'une demi-circonférence. [27] Le texte est corrompu; il faut entendre que la lune est plus grande que la .partie de la terre qui se trouve dans l'ombre de la lune. Leptine veut expliquer pourquoi une éclipse de soleil n'est pas également visible de tous les points de la terre. [28] Il faut supposer la proportion harmonique classique. Fondamentale 6, quarte 8, quinte 9, octave 12. Le rapport serait donc de 9 à 9 — 8 ou 1. C'est celui qu'Archimède attribue à Eudoxe. [29] En comparant ce calendrier avec le parapegme de Geminus, on trouve qu'il s'accorde très particulièrement avec les données empruntées à Callippe. En écartant la ligne 12, qui fait double emploi avec 3 et qui paraît se rapporter aux déterminations d'Eudoxe et Démocrite, l'accord est complet pour les lignes 8, 9 et pour la longueur du printemps astronomique (lignes 10-11); il l'est pour l’intervalle entre le coucher d'Orion et le solstice d'hiver en lisant 21 au lieu de 24 (correction facile et nécessaire). Pour la ligne 5 seulement on trouve un désaccord d'un jour (31 dans Geminus d'après Callippe), facilement explicable par une divergence de rédaction. J'ai donc restitué les nombres manquants d'après le parapegme, en supposant que Callippe avait fixé (ligne 4) le coucher de l'Aigle le même jour qu'Eudoxe. [30] Dates de l'année vague égyptienne. Boeckh (Sonnenkreise der Alten, p. 197 suiv.), en admettant que le solstice d'hiver, d'après Eudoxe, tombe sur le 28 décembre julien proleptique, a montré que la correspondance indiquée se rapporte aux années 193-190 avant J.-C. [31] D'après le parapegme de Geminus, les longueurs des saisons pour Callippe, en commençant par l'été, auraient été : 93, 89, 89, 93. Pour Euctémon, on devrait conclure du même document: 92, 89, 92? 93? Pour Eudoxe, il faut admettre qu'il plaçait le solstice d'été un jour plus tard que Callippe. [32] Après le paragraphe 55 se trouvent les deux titres « Cercle céleste », « Oracles de Sarapis » qui paraissent se rapporter à une figure zodiacale de la colonne suivante, sur laquelle ils sont répétés. Une autre main a écrit au-dessus du titre final, entre les deux ligues qui le forment et au-dessous : « Travaillez, ô hommes, pour ne plus travailler. » « Oracles de Sarapis. » « Oracles d'Hermès. » Ce qui indique peut-être l'intention de continuer le manuel par des prédictions génethliaques en rapport avec la figure qui précède.
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