Macer Floridus

MACER FLORIDUS

DES VERTUS DES PLANTES - DE VIRIBUS HERBARUM

Traduction de M. MOUIS BAUDET

Oeuvre numérisée et mise en pages par Thierry Vebr


 

Macer Floridus

 

De viribus herbarum

 

 

http://www.uni-giessen.de/gloning/at/macer-choulant-1832.pdf

http://books.google.fr/books?id=_FgcW99HMk4C&pg=PA13&dq=Po%C3%A9sies+de+Priscien+:+la+P%C3%A9ri%C3%A9g%C3%A8se,+les+Poids+et+mesures,+%C3%89loge+d%27Anastase#PRA1-PA122,M1

 

 

 


 

 

I. ARTEMISIA.

I. L'armoise.

1              Herbarum quasdam dicturus carmine vires

herbarum matrem, dedit Artemisia nomen

cui graecus sermo, justum puto ponere primo.

Hujus opem fertur prior invenisse Diana,

5              Artemis graece quae dicitur, indeque nomen

herba tenet, quia sic inventrix dicitur ejus.

Praecipue morbis muliebribus ista medetur :

menstrua deducit ejus decoctio sumpta,

hocque facit, matrix si saepe fovetur eadem,

10            vel si cruda mero sociata terendo bibatur,

aut si trita virens super alvum nocte ligetur ;

pellit abortivum potu vel subdita tantum,

duritias solvit stericas pellitque tumores.

Urinam potata det, lapidesque repellit,

15            ictericosque juvat cum vino saepius hausta.

Hanc adipi junctam strumis apponere laudat

Plinius atque jubet cum vino sumere tritam.

Haec, opium nimium si quemquam laeserit haustum,

subvenit eximie, si vino juncta bibatur.

20            Affirmant quidam, quisquis gustaverit illam,

quod nullo valeat nocuo medicamine laedi,

et quod eum morsu non appetat ulla ferarum.

Radix illius collo suspensa rubetis

dicitur et cunctis nocuis obsistere ranis ;

25            succus ad hoc ejus cum vino proderit haustus.

Si musto contrita recens servabitur herba,

vinum praedictis reddit medicabile morbis,

et sapor est et odor vino gratissimus illi,

confortat stomachum, sanat praecordia sumptum,

30            et multis aliis affirmant utile causis.

Au début d'un poème où je me propose de dire les vertus des herbes, celle qu'on appelle communément la mère des plantes, et qui a reçu des Grecs le nom d'armoise, s'offre naturellement la première à mes chants. Elle doit son nom à Diane, que les Grecs appellent Artémis, et qui passe pour en avoir découvert les propriétés. Cette herbe remédie principalement aux maladies des femmes. Une décoction d'armoise, prise en boisson, facilite l'écoulement périodique du sang. On obtient le même effet,soit en bornant son usage à de fréquentes frictions faites à la ·matrice, soit en la broyant crue dans du vin pur et en la buvant ainsi mélangée, soit en l'appliquant toute verte en cataplasme sur le bas-ventre pendant la nuit. Prise en breuvage, ou même simplement placée sous le siège, elle facilite l'accouchement, elle amollit la rigidité des parties, et dissout les tumeurs. Comme boisson, elle est diurétique, et délivre de la gravelle. Infusée dans le vin, elle finit par dissiper la jaunisse. Suivant Pline, l'armoise combinée avec de la graisse donne un emplâtre très efficace contre les scrofules ; il en recommande surtout l'emploi avec du vin. Broyée dans cette liqueur, elle devient une boisson qui neutralise les funestes effets de l'opium. On prétend même qu'elle est un préservatif contre toute sorte de poison et contre la morsure des bétes féroces. Sa racine, suspendue au cou, est un talisman contre les rainettes et contre toutes les grenouilles venimeuses. Mêlé avec du vin, le jus de cette herbe a la même vertu. Broyée toute fraîche avec le moût, elle fait du vin un spécifique contre les diverses affections dont je viens de parler, et lui donne en même temps une saveur et une odeur très agréables. Entre autres vertus, le vin ainsi mixtionné fortifie l'estomac et est un bon cordial.

II. ABROTANUM.

II. L'aurone.

Tertius Abrotano legitur gradus esse caloris,

et desiccandi semen ferventius herba est,

unde juvat nervos et causas pectoris omnes,

illius elixi si sit decoctio sumpta.

35            Sic quoque dysnoicis prodest tussimque repellit,

et prodest lumbis, sic vulvarumque querelis.

Omnibus his crudum cum vino proderit haustum,

urinam purgat sic et praecordia mundat,

sic curat sciasim, sic sumptum menstrua purgat,

40            serpentes nidore fugat, bibitumque venena

illorum extinguit, sedat quoque frigora febris

antea quam veniant si mixto sumitur amne,

aut oleo quo decoquitur si membra perungas.

Lumbricos ventris hanc saepe bibendo necabis.

45            Huic panis micas et mala cidonia jungens

insimul amne coquas, oculorum cocta dolori

apponas vel fervori, curabit utrumque.

Stirpes infixas et spinas abstrahet ipsum

appositum per se vel adeps si jungitur illi.

50            Haec etiam venerem pulvino subdita tantum

incitat, et veneri nocuis potata resistit.

Suivant les médecins, l'aurone a une chaleur du troisième degré. Sa graine est surtout un puissant siccatif, et, après avoir bouilli, donne une décoction qui est très efficace contre les maux de nerfs ou de poitrine. Cette décoction ne remédie pas moins à l'asthme, à la toux, aux douleurs des lombes et aux affections hystériques. Macérée dans le vin, l'aurone, outre qu'elle remédie à toutes ces affections, est de plus diurétique, purgative, emménagogue, et calme la goutte sciatique. Son odeur, quand on la brûle, met en fuite les serpents, et, prise en boisson, elle neutralise l'effet de leur venin. Elle prévient le frisson qui précède la fièvre, si on la prend en décoction dans l'eau, ou si l'on se frotte le corps avec de l'huile où elle a bouilli. En faisant usage de cette plante comme boisson, on détruit les vers qui s'engendrent dans les intestins. Cuite dans l'eau avec de la mie de pain et du coing, et appliquée sur la partie malade, elle guérit la douleur ou l'inflammation des yeux. Unie à la graisse, ou même seule, elle est un topique qui facilite merveilleusement l'extraction des échardes et des épines. Placée sous l'oreiller. elle porte à l'amour, et, prise en boisson, elle neutralise ce qui pourrait y mettre obstacle.

III. ABSINTHIUM.

III. L'absinthe.

In primo calor esse gradu, vis sicca secundo

dicitur absinthii ; stomachum corroborat herba

illius quocunque modo quis sumpserit illam,

65            sed melius pluviae si sit decocta liquore,

et sic sub divo prius infrigidata bibatur.

Sic poterit variis ejus succurrere morbis,

hocque modo pellit lumbricos, mollit et alvum,

ejus et immodicum sedat sic sumpta dolorem,

60            urinam potu producit, menstrua solvit.

Illi si nardum, quam profert Gallia, jungas

et conjuncta teras et mulsa trita resolvas,

praecipue tali purgabis menstrua potu,

hoc quoque praestabunt cum lana subdita molli.

65            Si siler et nardus et acetum jungitur illi

noxia deterges potu fastidia tali.

Gramina si rutae jungas huic salque piperque

cumque mero tundens des haec decoctave potum,

noxius et crudus stomachi purgabitur humor.

70            Iri cunjuncta pectus mire juvat hausta.

Acri cum vino trita se quilibet ungens

non metuat culices, ustaeque fugantur odore.

Ictericis crudam dabis hanc apio sociatam,

curat hepar, sibi si jungatur gallica nardus,

75            splenque sibi juncto potata juvabit aceto.

Sic quoque fungorum depellit sumpta venenum,

obstat letiferae cum vino sumpta cicutae,

sicque venenatis occurrit morsibus hausta,

et daros oculos reddit cum melle peruncta.

80            Hocque modo sugillatis superaddita prodest,

decoctaeque vapor obstrusas liberat aures,

si manant sanie cum melle terens superadde.

Subvenit anginae melli nitroque jugata.

Vulneribus prodest contrita recentibus illa,

85            si superaddatur capitis sic ulcera curat,

pruritusque juvat ejus decoctio fotu.

Nausea non poterit quemquam vexare marina,

antea commixtam vino qui sumpserit illam.

In lini panno si circumcincta geratur

90            Inguinis immodicum fertur cohibere tumorem.

Olfactu somnum capiti vel subdita praestat,

hanc sibi supponi si non praesenserit aeger.

Denigrat crines cinis ejus, si bene mixtus

ceroto fuerit et eo sint saepe peruncti.

95            A tineis tutam reddit qua conditur arcam.

Sub lingua factum curat cum melle tumorem,

livoremque nigrum, qui circa luminis orbem

apparere solet, purgabit idem medicamen.

Auris depellit sonitum cum felle bovino.

100          Duritiam splenis ejus cataplasma resolvit.

Conjuncto sibi melle sterae si subditur herba

desiccabit eam, manareque menstrua coget ;

ex oleo fuerit viridis si cocta, juvabit

non modice stomachum, quot erit hoc unguine fotus.

105          Incaustum vino, quo sit macerata, resolve :

si scribis chartam mus non teret amplius illam.

Plinius attollit magnis hanc laudibus herbam,

Romanosque refert sacris ex more diebus

dum quadrigarum cursu certare solerent,

110          absinthii succum solitos donare bibendum

in capitolina victori sede locato,

credentes pretium prae cunctis reddere dignum

illi, quo firmam posset servare salutem,

quae constat mundi pretio pretiosior omni.

L'absinthe a, dit-on, une chaleur du premier degré ; comme siccatif, elle est du second. De quelque manière qu'on l'emploie elle fortifie l'estomac ; mais il vaut mieux la faire bouillir dans de l'eau pluviale. et en boire après l'avoir laissée refroidir en plein air. Ainsi préparée, elle est très efficace contre les diverses affections de l'estomac : elle chasse les vers, elle relâche le ventre et en apaise les douleurs les plus violentes ; elle est diurétique et emménagogue. Broyée avec du nard des Gaules dans du vin miellé, elle est très utile aux femmes qui en boivent à l'époque de leurs règles. On obtient aussi le même effet en plaçant au-dessous du vagin un flocon de laine imbibé de cette mixtion. Mélée avec de l'osier, du nard et du vinaigre, elle dissipe les dégoûts. On peut encore la broyer et la faire bouillir dans du vin avec de la rue, du sel et du poivre et en composer une boisson qui guérit les crudités d'estomac. Mélée à l'iris, elle est très bonne pour la poitrine. En se frottant d'absinthe broyée dans du vinaigre, on n'a pas à craindre les cousins. Brûlée, elle exhale une odeur qui les met en fuite. Prise toute crue avec de l'ache, elle dissipe la jaunisse. Avec du nard des Gaules, elle est bonne pour le foie. Bue avec du vinaigre, elle guérit des maux de rate, et est un excellent antidote contre les mauvais champignons. Avec du vin, elle neutralise les funestes effets de la ciguë et remédie aux morsures des animaux venimeux. Une onction de miel et d'absinthe éclaircit la vue, et fait disparaître les meurtrissures. Une fumigation de cette herbe dégage le conduit auditif. Broyée avec du miel et appliquée sur les oreilles, elle facilite l'écoulement des humeurs qui les obstruent. Combinée avec du miel et du nitre, elle remédie à l'angine. Un cataplasme d'absinthe apaise encore l'inflammation d'une blessure récente ou des plaies de la tête. La démangeaison cède à quelques gouttes d'une décoction de cette herbe. Quand, avant de s'embarquer, on prend en boisson cette plante macérée dans le vin, on n'a pas à craindre le mal de mer. Mise dans un morceau de toile et appliquée sur les aines, l'absinthe en dissout, dit-on, les tumeurs. Placée sous la tête du malade, et à son insu, elle a la vertu de l'assoupir par son odeur. La cendre d'absinthe incorporée dans du cérat, noircit les cheveux si on les en frotte souvent. Cette herbe, placée dans les armoires, en éloigne les teignes. Avec du miel, elle fait disparaitre l'enflure de la langue et la teinte livide qui flétrit quelquefois le tour des yeux. Combinée avec du fiel de boeuf, elle remédie aux tintements d'oreilles. Appliquée en cataplasme sur la région de la rate, elle en dissipe les obstructions. Mêlée avec du miel et placée sous la matrice, elle la dégorge et facilite l'écoulement du sang. Une décoction d'huile et d'absinthe fraîche employée en fomentation, est très efficace contre les maux d'estomac. L'encre délayée dans du vin où on a macéré de l'absinthe, préserve les manuscrits de la dent des souris. Pline fait un éloge pompeux de la vertu de cette herbe, et raconte que, dans les Féries latines, les Romains offraient une coupe, remplie de jus d'absinthe, à celui qui avait remporté la victoire dans les courses de chars et venait s'asseoir au Capitole, persuadés que le présent le plus digne d'un vainqueur était·la santé, le bien, sans contredit, le plus précieux de tous ceux que puissent désirer les hommes.

IV. URTICA.

IV. L'ortie.

115          Dicimus urticam, quam Graecus acalyphe dicit,

fervida non modice vis illi dicitur esse,

unde nec immerito nomen sumpsisse videtur,

tacta quod exurat digitos urtica tenentis.

Haec solet ictericos cum vino sumpta juvare,

120          illius semen colicis cum melle medetur,

et tussim veterem curat, si saepe bibatur.

Frigus pulmonis pellit ventrisque tumorem.

Omnibus his prodest pulvis cum melle jugatus,

aut succus viridis cum vino saepius haustus.

125          Cum sale de foliis ejus factum cataplasma

ulceribus prodest et sordida vulnera purgat,

et contra morsus valet hoc cataplasma caninos,

et cancros et parotidas luxataque curat,

hocque reformatur caro, quae discessit ab osse,

130          et solet humores hoc desiccare nocentes.

Acri cum vino radix contrita tumorem

compescit splenis, podagrae sic subvenit illa

omnibus et morbis sic subvenit articulorum,

omnibus his prodest superaddita, vel sibi juncto

135          si coquis hanc oleo foveasque hoc unguine membra.

Naribus impositus succus foliumve cruorem

elicit ; innati vis est sibi tanta caloris,

quod si manantem cupias retinere cruorem,

urticae succo frontem line, reprimit illum.

140          Si supponatur cum myrrha menstrua pellit,

si claudit vulvam matrix humore gravata

urticae foliis revocabitur ilia fricata.

Cum vino bibitum venerem semen movet ejus,

et melius tritae si jungas melque piperque

145          et si cum vino praedicto more bibatur.

Pleureticos, pectus, pulmones adjuvat ejus

semen, si sumptum fuerit cum melle jugatum,

cum mulsa bibitum lotium producit abundans.

Herba recens ejus olerum si more coquatur,

150          detur et illius decoctio, molliet alvum.

Ore diu clausus succus si volvitur ejus

uvae non modicum poterit sedare tumorem.

Sudorem movet ex oleo decocta perunctis.

Si quadrupes quaecunque marem perferre recusat,

155          urticae foliis illius vulva fricetur,

sic naturalem calor excitat ille calorem.

Defluvium capitis, si succo seminis hujus

ungas saepe caput, reprimi dicit Galienus.

Illius semen collectum tempore messis

160          Et desiccatum multis erit utile causis.

L'ortie, que les Grecs appellent ἀκαλήϕη doit son nom latin à l'âcreté de sa substance, qui brûle tes doigts de ceux qui ont l'imprudence de toucher à cette herbe. Prise avec du vin, elle est bonne contre la jaunisse. Sa graine, mélangée avec du miel, donne une boisson qui remédie à la colique, et apaise les toux invétérées. Elle sert aussi à réchauffer les poumons et à relâcher le ventre. Cette herbe a la même vertu soit qu'on la pulvérise et qu'on la combine avec du miel, soit qu'on en boive le jus, exprimé tout frais dans du vin. Un cataplasme fait avec ses feuilles et dans lequel entre un peu de sel, n'est pas sans efficacité contre les ulcères, contre les plaies de mauvaive nature, contre la morsure des chiens, contre les chancres et rengorgement des glandes parotides. Employée de la même manière, elle rapproche les chairs qui laissent les os à découvert, et sèche les humeurs nuisibles. Sa racine, broyée dans du vinaigre, et appliquée en cataplasme, dissout les tumeurs de la rate, et remédie à la podagre et à toutes les maladies des articulations. On obtient le même effet au moyen de fomentations faites avec de l'huile où l'on a fait bouillir sa racine. Le jus de l'ortie ou seulement une de ses feuilles mise dans les narines, en fait jaillir le sang. Sa substance est si chaude, qu'il suffit de s'en frotter le front pour arrêter le saignement de nez. Une mixtion de myrrhe et d'ortie, appliquée sur le bas-ventre, facilite l'écoulement desrègles et, quand la matrice trop pesante vient fermer l'entrée du vagin, on la fait remonter en la frottant avec des feuilles d'ortie. Sa graine donne au vin une vertu aphrodisiaque, qui est encore plus puissarite lorsqu'on la broie dans le vin avec du miel et du poivre. Prise avec du miel, elle est très bonne contre les pleurésies et les maladies de poitrine ; avec du vin doux, elle est très diurétique. L'ortie fraîche, que l'on a fait bouillir dans l'eau comme les légumes, donne une décoction qui relâche le ventre. En se gargarisant avec le jus de cette herbe, on guérit les gonflements de la luette les plus considérables. Elle provoque les sueurs lorsqu'on se frotte le corps avec de l'huile où elle a bouilli. Arrive-t-il, parmi les quadrupèdes, que la femelle repousse l'approche du mâle ;, une friction locale, faite avec des feuilles d'ortie, réveille l'ardeur languissante de l'animal. Suivant Galien, une onction, faite sur la tête avec le jus de la graine d'ortie, arrête la chute des cheveux. Cette même graine, recueillie au temps de la moisson, et desséchée, a une infinité de vertus.

V. ALLIUM.

V. L'ail.

Scordeon argive sunt allia dicta latine,

hujus vim medici calidam siccamque periti

in quarto posuere gradu. Mansum vel inunctum

curat, quos serpens vel scorpius intulit, ictus ;

165          sanat et appositum morsus cum melle caninos

et nocui vermes triti pelluntur odore.

In mulsa coctum commixtum cui sit acetum

et bibitum vermes ventriis tineasque repellit ;

ex oleo cum reste sua si decoquis illud

170          morsus pestiferos reddes hoc unguine sanos,

corpus et attritum cura sanabis eadem,

unguine vesicae dolor et tumor hoc reprimuntur.

Ipse refert Ipocras educi posse secundas

fumo combusti si vulva diu foveatur.

175          Pulmonis varias coctum cum lacte querelas

potatumque juvat vel crudum saepe comestum.

Cum centaurea Diocles dare praecipit illud

hydropicis, sic humores desiccat aquosos,

idem nefreticis elixum sumere jussit.

180          Praxagoras illo fuit usus cum coriandro

et vino, causas sic curans ictericorum,

et sic potatum dicit quod molliat alvum.

Cumque faba coctum capitis sedare dolorem

dicitur, attrito si tempora perlinis illo.

185          Anseris huic adipem jungas tepidumque dolenti

infundas auri, praedare subvenit illi.

Elixum tussim juvat et suspiria sedat,

clarificat raucam crudum coctum quoque vocem,

sed magis elixum juvat illam saepe comestum,

190          adjuvat incoctum pulti sumptumque tenesmon.

Porcino jungens adipi si conteris ipsum

non modicos reprimes superaddens saepe tumores.

Hunc ignotarum potus non laedit aquarum

nec diversorum mutatio facta locorum,

195          allia qui mane jejuno sumpserit ore.

L'ail, que les Grecs nomment σκόρδιον, a, suivant les plus savants médecins, une force de chaleur et de siccité du quatrième degré. En la mâchant ou en se frottant avec sa pulpe, on neutralise la piqûre du serpent ou du scorpion. Appliquée sur la plaie avec du miel, elle cicatrise les morsures des chiens. Son odeur, quand elle est broyée, chasse les insectes qu'on appelle teignes. Bouillie avec du vin miellé et du vinaigre, elle donne une boisson qui détruit les différentes sortes de vers qui s'engendrent dans les intestins. Combinée avec de l'huile, où on l'a fait cuire avec son enveloppe, et employée en fomentation, elle est très bonne contre les morsures venimeuses, contre les contusions, contre les douleurs et les tumeurs de la vessie. Suivant Hippocrate, la fumée de l'ail broyé, en pénétrant dans la matrice, précipite l'arrière-faix. Cuite avec du lait, cette plante apaise les douleurs des poumons ; il suffit même de la manger crue. Dioclès conseille d'en donner aux hydropiques avec de la centaurée : la combinaison de ces deux plantes a la vertu de sécher les humeurs aqueuses. Suivant le même médecin, l'ail bouilli est très bon contre les douleurs néfrétiques. Praxagoras s'en servait dans la cure de l'ictère, en le mêlant avec de la coriandre et du vin, et dit que le breuvage qui résulte de ce mélange relâche le ventre. Le mal de tête cède à un cataplasme, composé d'ail et de fèves, qu'on a fait cuire ensemble, et appliqué sur les tempes. Quelques gouttes tièdes de graisse d'oie, imprégnée d'ail et instillées dans l'oreille, sont d'une merveilleuse efficacité pour en calmer les douleurs. Cuit dans l'eau, l'ail est bon contre la toux ou l'asthme. Cuit simplement au feu, il éclaircit la voix, mais il est plus efficace quand il a cuit dans l'eau. Cuit dans la bouillie, il communique à cet aliment une vertu médicamenteuse, qui apaise les ténesmes. Un emplâtre, composé d'ail broyé et de graisse de porc, dissout les tumeurs les plus considérables. L'ail, pris le matin à jeun, est un préservatif contre les funestes influences que peut avoir sur la santé la diversité des eaux et des lieux.

V. PLANTAGO.

VI. Le plantain.

Herbam, quae nostra lingua plantago vocatur,

hanc arnoglossam Graecus vocat, est quia linguae

agninae similis foliis. Plantaginis hujus

sunt geminae species, et major prima vocatur,

200          altera vero minor, quam vulgo lanceolatam

dicunt, quod foliis (ut lancea) surgit acutis.

His infrigdandi desiccandique notatur

tertius esse gradus, majori vim tamen esse

majorem dicunt, nimis humida vulnera siccat,

205          si superaddatur cum melle, et sordida purgat.

Cum sale sicut olus si juncta coquatur aceto,

ventrem restringit nimium sic mansa fluentem ;

si supradictis lens sit concocta juvabit

hic dysentericos melius cibus et ciliacos.

210          Stringit manantem superaddita trita cruorem,

et nigris maculis fertur reparare colorem,

ovi cum lacrymo mire medicatur adustos.

Sola canis morsum curat sedatque tumorem,

et scrophas spargit superaddita cum sale trita,

215          hydropicis ut olus decocta comestaque prodest,

sic juvat asthmaticos, ferturque juvare caducos.

Sordida purgabit bene vulnera quaelibet oris,

ore diu tentus si succus volvitur ejus.

hic introfusus curat syringia succus,

220          et dolor hoc auris sedabitur et sacer ignis.

Fert haemoptoicis hic opem, si saepe hibatur

per se, fortior est si sit conjunctus aceto ;

sicque juvat phthisicos, injectus vero per anum

stringit non modicum fiuxum dysentericorum,

225          pellitur ex oculis tumor hoc fervorque perunctis.

Saepius hanc ipsam si dentibus atteris herbam,

gingivas reprimet tumidas et sanguine plenas,

sicque solet dentis compescere saepe dolorem.

Succus cum lana matrici subditus ejus

230          stringit manantem nimium siccando cruorem.

Cunctis praedictis ejus decoctio causis

prodest et potus cum vino seminis ejus,

vesicae renumque juvat potata dolorem.

Dicunt non nasci scrophas gestantibus ejus

235          radicem collo suspensam, vis sibi tanta est.

Radices ejus tres contere, jungito tritis

vini tres cyathos et aquae fac sit modus idem,

haec nondum tremulo potanda dabis febrienti,

sic pelles febrem, cui dat lux tertia nomen,

240          bis binae quoque quartanis prodesse putantur

cum totidem vini cyathis si dentur et amnis.

Cuncta potest plantago minor praedicta juvare,

quamvis non tantas vires videatur hebere.

Praecipue succus curat plantaginis hujus.

245          Quod juxta nares vel lumina nascitur, ulcus,

si superaddatur cum lanis mollibus illi,

perque novem cataplasma dies istud renovetur.

Ejus si suco tepido venter foveatur

acri depulso sanabitur ille dolore.

250          Lumbricos succus depellere dicitur ejus.

Si porcina vetus axungia jungitur illi,

sedabit duros istud cataplasma tumores,

parotidas vulnusque recens hoc adjuvat unguen.

Ante duas horas quartanae quam tremor aegrum

255          vexet si succum biberit plantaginis hujus,

sentiet eximiam facili medicamine curam.

Ejus potatum depellit sperma secundas.

Si via longa pedum movet, ut fit saepe, dolorem,

acri cum vino superaddita trita juvabit.

260          Cum passo succus bibitur si saepius ejus

vesicae variis fertur succurrere morbis.

In desiccando vis est plantaginis ingens

majoris, queat ut veluti cauteria corpus

appositum siccare, refert ut Plinius auctor.

265          Composuit librum Themison de viribus ejus

in quo praeclaris celebravit laudibus illam.

L'herbe que nous appelons plantain, a, chez les Grecs, le nom de αρνόγλωσσον, parce que sa feuille ressemble à une langue d'agneau. Il y en a deux espèces, l'une dite grand plantain, et l'autre petit plantain. Celle-ci est appelée communément lancéolé, parce que sa feuille se termine en pointe comme une lance. Le plantain possède une force de chaleur et de siccité du troisième degré. La première espèce est la plus efficace pour sécher les plaies qui suppurent le plus, et déterge les ulcères sordides sur lesquels on l'applique avec du miel. Cuite et mangée, comme un légume, avec du sel et du vinaigre, elle arrête le flux du ventre. Si à ces ingrédients on ajoute des lentilles, on aura un aliment très bon contre la dyssenterie et les douleurs d'entrailles. Broyé et appliqué sur une blessure, le plantain en étanche le sang et fait disparaître les meurtrissures. Avec un blanc d'oeuf, il est d'un merveilleux effet contre les brûlures. Seul et sans mélange, il cicatrise les plaies causées par la morsure des chiens. Un cataplasme de plantain broyé avec du sel dissipe les scrofules. Cuite et mangée, comme un légume, cette plante est bonne contre l'hydropisie, l'asthme et l'épilepsie. Le jus du plantain, employé comme gargarisme, n'est pas moins bon contre les ulcères sordides de la bouche. Instillé dans les fistules, il les amène à guérison. Il dissipe aussi les donleurs d'oreilles et l'érésipèle. Quand on en fait usage en boisson, il arrête l'hémoptysie, et il agit plus efficacement encore quand on l'associe au vinaigre ; pris ainsi, il soulage même dans la phthisie. Administré en lavement, il arrête la dyssenterie la plus violente. Les tumeurs et l'inflammation des yeux cèdent à une fomentation de cette herbe. Quand les gencives sont engorgées de sang, il est bon d'en mâcher quelques feuilles. Le mal de dents cède ordinairement au même remède. Un flocon de laine, imbibé de jus de plantain, et placé sons la matrice, arrête les pertes de sang. Sa graine, bouillie dans du vin, donne une boisson qui remédie à toutes les maladies dont nous venons de parler, et particulièrement aux douleurs de la vessie et des reins. La vertu de cette plante est si puissante, que sa racine, suspendue au cou des enfants, les préserve, dit-on, des scrofules. Broyez-en trois racines dans trois tasses de vin et autant d'eau, et faites boire cette préparation à nne personne fébricitante, avant le retour du frisson, vous réussirez à chasser la fièvre tierce. Vous obtiendrez le même effet contre la fièvre quarte au moyen de quatre racines broyées dans quatre tasses de vin et autant d'eau.

Le petit plantain a les mêmes vertus, quoiqu'à un moindre degré de force. Le suc de cette plante est surtout très efficace contre les affections ulcéreuses qui se produisent autour des narines et des yeux. Il faut, pour ce traitement en imbiber un flocon de laine, qu'on applique, en cataplasme, sur la partie malade, et qu'on renouvelle neuf fois dans l'espace de neuf jours. Tiède et employé en fomentation, il apaise les douleurs d'entrailles. Pris en boisson, il délivre des vers qui s'engendrent dans les intestins. Mêlé avec du vieux oing, on en fait un cataplasme qui dissout les tumeurs les plus dures, dissipe le gonflement des glandes parotides, et cicatrise les blessures récentes. Le jus du petit plantin, pris deux heures avant le retour du frisson de la fièvre quarte, est un remède aussi facile qu'efficace. Sa graine donne aussi une décoction précieuse pour les femmes en couches : elle précipite l'arrière·faix. Broyée dans du vinaigre, et appliquée sous la plante des pieds,elle calme la douleur qu'y produit souvent une longue marche. Le jus de cette herbe, mêlé avec du vin de raisins séchés au soleil, donne une boisson qui remèdie, dit-on, aux différentes maladies de la vessie.

Le grand plantain a une force caustique, qui, suivant Pline, produit sur le corps l'effet d'un fer brûlant. Thémison a composé sur cette plante un livre où il énumère, avec un grand éloge, ses différentes vertus.

VII. RUTA.

VII. La rue.

A medicis rutae vis fervida dicitur esse

siccaque, fertur in his gradus illi tertius esse.

Utilis est valde stomacho, si saepe bibatur,

270          expellit partum potu veneremque coercet,

tussim si bibitur compescit, menstrua purgat.

Si coquis hanc in aqua, cui vinum junxeris acre,

compescit talis decoctio tormina ventris,

pulmones juvat et pectus, morboque medetur

275          costarum, quem pleuresim vocat attica lingua,

arteticos sciasimque juvat, febrique medetur

hausta vel in oleo viridem si coxeris illam

et foveas tepido patientes ante tremorem.

Matrici prodest intestinique tumori

280          hoc unguen vel clysterio si funditur intus,

haustaque cum vino prodesse valebit utrique,

lumbricos oleo decocta et pota repellit.

Cum caricis decocta diu vinique liquore

proderit hydropicis, si sint superaddita nocte.

285          Cruda comesta recens oculos caligine curat,

et melius marathri cum succo felleque galli

melleque si succus ex aequo jungitur ejus,

indeque sint oculi patientis saepe peruncti.

Cum roseo miscens oleo nec non et aceto

290          illius succum, capitis curare dolorem

quemvis immodicum poteris, hoc saepe perungens.

Naribus expressus si succus funditur ejus

sistit manantem bene desiccando cruorem.

In corio mali granati si tepefactum

295          Auribus infundas, depelles inde dolorem,

cerussae roseoque oleo miscens et aceto

illius succum mirandum conficis unguen

ad depellendum sacrum quem dicimus ignem,

et scabiem derte, quae dicitur herpeta graece,

300          et graece dictas achoras hoc unguine purgas :

ulcera sunt capitis humore fluentia pingui.

Curat et hoc ozinas immissum naribus, haec sunt

quae graviter foetent in naribus ulcera nata,

obstat pota mero vel cruda comesta venenis

305          hoc Metridates rex Ponti saepe probavit,

qui Rutae foliis viginti cum sale pauco

et magnis nucibus binis caricisque duabus

jejunus vesci consurgens mane solebat,

armatusque cibo tali, quascunque veneno

310          quilibet insidias sibi tenderet, haud metuebat.

Mustelaeque docent obsistere posse venenis

mirifice rutam, comedunt quae primitus illam,

cum pugnaturae sunt cum serpentibus atris.

Cum butyro modicoque oleo decocta tumorem

315          matricis subjecta tepens fugat ilia colique

et cunctis intus morbis sic subdita prodest.

Hac etiam testes poteris curare tumentes,

cum foliis lauri bene tritam si superaddes.

Ex hac antidotum non paucis utile causis

320          conficitur, medici dicunt diapiganon illud,

piganon in graeca lingua quia ruta vocatur ;

illius antidoti confectio talis habetur :

pondere junge pari nitrum, piper atque cyminum,

de tribus his, quantum de ruta, ponito tantum,

325          sed prius ex acri vino macerare cyminum

convenit, in ferro post assari calefacto,

omnia deinde simul bene trita ex melle jugabis,

pectoris et lateris, jecoris, renumque dolores

hoc ex antidoto curantur saepe comesto,

330          extenuat bilem, mollit sine tormine ventrem,

confortat stomachum, facit ut bene digerat escam.

Les médecins s'accordent à reconnaître dans la rue une force de chaleur ef de siccité du troisième degré. Cette herbe est très bonne pour l'estomac, si l'on en fait usage en boisson ; de plus, elle facilite l'accouchement, éteint les ardeurs érotiques, apaise la toux et facilite l'écoulement des règles. Bouillie dans de l'eau et du vinaigre, elle donne une décoction qui arrête la dyssenterie, guérit les affections de poitrine et du poumon, remédie à cette maladie sous-costale que les Grecs appellent pleurésie, et aux douleurs de la goutte sciatique. Soit qu'on en use en boisson, soit qu'après l'avoir fait bouillir toute fraîche avec de l'huile, on s'en serve pour fomenter les membres du malade avant le retour du frisson, elle est très efficace contre la fièvre. On l'emploie avec succès contre les affections de la matrice et contre les inflammations d'intestins, soit en fomentation, soit en lavement. Bue avec du vin, elle a la même vertu. Bouillie avec de l'huile, elle donne un breuvage doué de propriétés anthelmintiques. Soumise à une longue cuisson avec des figues sèches et du vin, et appliquée sur le corps pendant la nuit, elle est bonne contre l'hydropisie. Mangée toute crue, elle éclaircit la vue, et est encore plus efficace, employée en fomentation, avec du suc de fenouil, du fiel de coq, et une dose de miel égale à celle de son propre suc. Combiné avec de l'huile de rose et du vinaigre, son suc remédie aux maux de tête les plus violents si l'on s'en frotte le front à plusieurs reprises. Injecté dans les narines, c'est un siccatif qui arrête l'écoulement du sang. Légèrement chauffé dans l'écorce d'une grenade, et injecté dans les oreilles, il en calme les douleurs. Combiné avec de la céruse, de l'huile de rose et du vinaigre, et employé en fomentation, il est d'un effet merveilleux contre la maladie qu'on nomme feu sacré, contre ces affections dartreuses que les Grecs appellent ἕρπης et contre ces ulcères de la tête qu'ils nomment ἀχῶρες. Injecté dans les narines, il remédie à ces excroissances de chair ulcéreuses qu'on appelle polypes, et dont l'odeur est si repoussante. Bue avec du vin pur ou mangée toute crue, la rue est un antidote, dont le roi de Pont Mithridate faisait souvent usage. Il broyait vingt feuilles de rue avec un peu de sel, deux grosses noix et deux figues sèches, et le matin, à jeun, il avalait ce mélange. Armé de ce préservatif, il bravait les embûches des empoisonneurs. On doit la découverte de cet antidote aux belettes, qui, avant d'engager un combat avec les serpents venimeux, ont la précaution de manger de cette herbe. Cuite avec du beurre et un peu d'huile, et appliquée tiède sur la partie malade, elle dissout les tumeurs de la matrice, apaise la colique et remédie à toutes les maladies internes. Broyée avec des feuilles de laurier, elle dissipe le gonflement des testicules. La rue sert à composer un antidote, que les médecins appellent διαπήγανον, parce que cette herbe s'appelle en grec πήγανον, et qui a plusieurs vertus. Voici comment se prépare cet antidote. Vous mêlez parties égales de nitre, de poivre et de cumin, avec une pareille dose de rue, après avoir détrempé le cumin dans du vinaigre et l'avoir fait griller au moyen d'un fer chaud ; puis vous broyez le tout avec du miel. Ainsi préparée, la rue devient un aliment très efficace contre les affections de poitrine, contre les maladies du foie et les douleurs de reins ; elle dissipe la bile, apaise les douleurs d'entrailles et relâche le ventre ·sans causer de coliques, fortifie l'estomac et facilite la digestion.

VIII. APIUM.

VIII. Le persil.

Est apium dictum, quod apex hanc ferre solebat

victoris, veterum fieret dum more triumphus.

Ipse sibi talem prior imposuisse coronam

335          dicitur Alcides, morem tenuere sequentes.

Ast alii dictum credunt, quod apes vehementer

illius soleant avide decerpere flores.

Hanc herbam selinon solet attica dicere lingua,

virtutis calidae siccae quoque dicitur esse,

340          tertius a medicis datus est gradus huic in utroque.

Illius succo si candida mica terendo

panis jungatur, oculi sedare tumorem

dicitur emplastri noctu superaddita more,

sicque ferunt mammis prodesse tumentibus illam.

345          Sedat fervorem stomachi, pellitque tumorem,

et quicquid venti creat includitve nocivi

desiccans poris assumpta repellit apertis.

Provocat urinas haec cruda comesta vel hausta,

sed mage radicum facit hoc decoctio sumpta,

350          Hoc itidem semen operatur fortius haustum.

tota venenatis occurrit morsibus herba,

sed semen potius vel apozima proderit ejus

si bibitur, tussimque modo sedabit eodem.

Ventrem constringit, vomitum potata coercet,

355          lymphae commixtum sibi si jungatur acetum ;

aegris amissum fertur reparare colorem,

cruda a jejunis fuerit si saepe comesta.

Unaquaque die vexantem corpora febrem

cum lympha potata juvat febris ante tremor'em.

360          Hydropicos et splen tumidum juvat ilia, jecurque

si cum feniculi succo contrita bibatur.

Hacque superposita turpis lentigo fugatur.

Illius succus farris cum polline mixtus

atque ovi lacrymo vulnus bene purgat et ulcus,

365          si superaddatur emplastri more frequenter.

Le persil tire son nom latin de apex, parce qu'autrefois il servait à orner la tête des triomphateurs : usage qui remonte à Hercule. Suivant d'autres, le nom d'apium vient de apis, parce que les abeilles aiment beaucoup à butiner la fleur de cette herbe. Les Grecs l'appellent σέλινον. Les médecins lui attribuent une force de chaleur et de siccité du troisième degré. Son suc, mêlé avec de la mie de pain blanc, et appliqué pendant la nuit en cataplasme, dissout les tumeurs des yeux et des mamelles. Convertie en breuvage, cette herbe éteint les chaleurs d'estomac ; elle dissipe les enflures, en séchant les sérosités et en ouvrant les pores. Mangée crue ou prise en boisson, elle possède des propriétés diurétiques que l'on trouve plus actives dans une décoction de sa racine, et plus énergiques encore dans ses semences administrées sous forme de breuvage. De quelque partie de cette herbe qu'on fasse usage, elle est très bonne contre les morsures venimeuses ; mais une décoction faite avec sa graine est surtout efficace. On remédie de la même manière à la toux. Mélangée avec de l'eau et du vinaigre, elle arrête la diarrhée ou les vomissements. Mangée crue à jeun, elle ranime le teint des convalescents. Bue avec de l'eau, avant le retour du frisson, elle remédie à la fièvre quotidienne. Broyée avec du jus de fenouil, elle donne une boisson qui est bonne contre l'hydropisie, contre les obstructions. de la rate et du foie. Appliquée sur la peau, elle dissipe les taches de rousseur. Le jus de persil, mélé avec de la fleur de farine et un blanc d'oeuf, donne un cataplasme, qui souvent renouvelé, cicatrise les blessures et les ulcères.

IX. ALTHAEA.

IX. L'althaea.

Althaeam malvae speciem nullus negat esse,

althaeamque vocant illam, quod crescat in altum.

Hanc ipsam dicunt eviscum, quod quasi visco

illius radix contrita madere videtur,

370          agrestisque solet a multis malva vocari.

In mulsa coctus flos ejus vulnera purgat,

vel si cum vino tritum florem superaddas,

spargere sic scrophas, anumque juvare dolentem

dicitur, hocque modo conquassatis medicatur.

375          Elixata prius radix adipique terendo

addita porcino terebinthinaeque tumores

matricis curat, reliquosque juvare dolores

dicitur illius ; nervos sic ipsa relaxat,

rumpit vel spargit sic apostemata dura.

380          Omnes has causas elixatura juvabit,

si loca morborum foveantur saepe tepenti.

A dysentericis radicum coctio sumpta

cum vino fluxum stringens compescit eorum,

et pellit tardas haec coctio sumpta secundas,

385          et prodest haemoptoicis, lapidesque repellit,

vesicaeque solet variis succurrere causis.

Acri cum vino contritum semen olivo

jungito, deformes maculas hoc unguine pelles.

Cum pusca potata potest obstare venenis,

390          elixata prius cum melleque trita replebit

vulnera quae cava sunt, si sit superaddita saepe ;

sic quoque duricias mollit lenitque rigores ;

decoctis oleo foliis factum cataplasma

quosvis pestiferos morsus combustaque curat.

L'althaea, qui est généralement regardée comme une espèce de mauve, tire son nom de altum, parce qu'elle s'élève beaucoup dans l'air. On l'appelle aussi eviscus, parce que sa racine, quand elle est broyée, a quelque chose de gluant. On donne communément le nom de mauve à l'althaea des champs. La fleur de cette plante, cuite dans du vin miellé, cicatrise les blessures. Cette même fleur, broyée et mise dans le vin. guérit les scrofules, apaise les douleurs de l'anus. et remédie aux contusions. Préalablement bouillie, puis broyée avec de la graisse de porc et de la térébenthine, sa racine est bonne contre les tumeurs et autres affections. de la matrice ; elle relâche les nerfs, et fait percer ou dissout les abcès les plus durs. Pour obtenir cet effet, il faut l'employer tiède et en frotter souvent les parties malades. Cuite dans le vin, elle donne une boisson qui arrête la dyssenterie, précipite l'arrière-faix, arrête les hémoptysies, dissout la pierre, et remédie aux diverses maladies de la vessie. Sa graine, broyée dans du vinaigre et de l'huile, et employée en fomentation, fait disparaître les taches livides de la peau. Mêlée avec de la bouillie, clle devient on contre-poison. Bouillie, puis broyée avec du miel, et appliquée sur les plaies profondes, en ayant soin de renouveler souvent ce topique, elle en active singulièrement la cicatrisation. Sous cette forme, elle jouit aussi de propriétés émollientes et adoucissantes. Un cataplasme de feuilles d'althaea, bouillies avec de l'huile,est un excellent remède contre les morsures venimeuses et les brûlures.

X. ANETHUM.

X. L'aneth.

395          A medicis calidum siccumque refertur anethum,

et dicunt, quod sit gradus huic in utroque secundus.

Lac dat abundanter ejus decoctio sumpta

nutrici, stomachique solet depellere morbos,

tres cyathos ejus tepide si sumpserit aeger ;

400          indicio ructus est qui demonstrat apertum

os stomachi ventumque per hoc exisse nocivum,

atque gravis tali sedatur nausea potu ;

provocat urinas, obstantia quaeque repellens,

matricemque juvat, bene si foveatur eadem.

405          Cum tepida tritum patiens si potet anethum,

intestinorum curat ventrisque dolorem,

hoc etiam potu digestio tarda juvatur

unde minor fieri vis egestiva videtur.

Assidue bibitum visum nocet et genitale

410          claudit iter siccans humorem seminis intus.

Uvaque si nimio turgens humore gravetur,

suspendit pulvis combusti seminis ejus.

Appositus digitis, aut intus clystere fusus,

acrior esse cinis radicum dicitur ejus,

415          rodit crescentes cinis bic in vulnere carnes,

ulcera quae serpunt et sordida vulnera curat,

ulcera praecipue membri curare virilis

dicitur iste cinis infusus saepius illis.

Olfactu reprimit singultum semen anethi

420          assatum et fervens si saepius olfacit aeger.

Dicunt fervores oculorum tollere posse

ejus radices tritas prius appositasque.

Apponas haemorrhoidis si semen anethi

ustum, curat eas et condylomata solvit.

425          Flos oleo si decoquitur, medicabile reddit

illud, praecipue natis de frigore causis

prodest et capitis compescit saepe dolorem,

nervorum laxat tensuras, frigora pellit.

L'aneth a, suivant les médecins, une force de chaleur et de siccité du deuxième degré. Prise en décoction, cette herbe rend le lait des femmes qui nourrissent plus abondant. Trois tasses de ce breuvage, pris tiède, dissipent les affections de l'estomac : ces affections ont pour symptômes des éructations qui sont le signe que l'orifice de l'estomac est ouvert, et que par lui s'échappent les flatuosités, causes de la maladie ; elle apaise aussi les plus fortes nausées et provoque les urines en dissipant tout ce qui leur fait obstacle. Employée en fomentation, elle soulage la matrice. Broyée dans de l'eau tiède, cette herbe donne une boisson qui apaise les douleurs du ventre et des intestins, accroit la force digestive de l'estomac, et s'oppose à ce que la substance nutritive des aliments s'écoule par les intestins. Un long usage de cette boisson nuit à la vue et paralyse la faculté génératrice en desséchant les voies séminales. La graine de l'aneth, réduite en poudre et brûlée, remédie au gonflement et à la chute de la luette, soit qu'on l'applique avec le bout du doigt sur la partie malade, soit qu'on l'injecte au moyen d'une seringue. La cendre de sa racine a des' propriétés plus énergiques : elle ronge les excroissances de chair qui se forment dans les blessures, et remédie aux affections dartreuses, qui rongent la peau. Elle est surtout très bonne contre les ulcères du membre viril, et il est rare que le mal ne cède pas à des injections réitérées. La graine brûlée et fumante de cette herbe a une odeur qui, respirée pendant un certain temps, arrête le hoquet ; sa racine, broyée et appliquée sur la partie malade, calme l'inflammation des yeux. La cendre de sa graine a la même vertu contre les hémorroïdes, et dissout les condylomes de l'anus. Une décoction d'huile et d'aneth est très efficace contre les maladies causées par le froid, et apaise souvent les douleurs de tête. Elle relâche aussi les nerfs et arrête le frisson.

XI. BETONICA.

XI. La bétoine.

Betonicam soliti sunt cestron dicere Graeci.

430          Urinas potata ciet, lapidesque repellit,

fert haemoptoicis cum pusca sumpta juvamen,

hydropicos siccat cum vino melleque sumpta.

De foliis ejus tritis factum cataplasma

non modicum prodest oculis, quos laeserit ictus.

435          Illius succus roseo commixtus olivo

auribus infusus varios fugat inde dolores.

Betonicae pulvis cocto cum melle jugatus

empicos, tussimque juvat, suspiria sedat,

et stomachi varios sumptus juvat ille dolores,

440          si febrit ex calida, cum vino si febris absit.

Cum mulsa bibitus idem pulvis movet alvum.

Cum sale contritis foliis cataplasmate facto

vulnera curabis, fuerint quae facta recenter,

tritaque fracturae capitis haec sola medetur.

445          De foliis ejus elixis fit cataplasma

utile non modicum variis vitiis oculorum ;

restringit lacrymas oculorum mansa vel hausta,

hac etiam caligo solet metuenda repelli,

aequo cum ruta fuerit si pondere juncta

450          et sic cum lympha sumatur trita tepenti,

sic oculis nocuus sanguis per subtiliora

dicitur expelli, sic lumina libera reddi.

Sumpta hac cum tepida purgatur vomica dira,

pectoris et morbi potu curantur eodem,

455          splen juvat illius decoctio sumpta jecurque.

Uncia betonicae socianda quaterna vetusti

cum vini cyathis tribus, his sint addita grana

viginti septem piperis, simul haec bene trita

haustaque purgabunt renes, pellentque dolores.

460          Uncia cum cyathis calidae potata duobus

dicitur immodicum ventris sedare dolorem.

Haec tussim cum melle fugat, ventrem quoque mollit,

unaquaque die febre si vexabitur aeger

uncia jungatur plantaginis una duabus

465          betonicae, sic cum tepida contrita bibantur,

antea quam febris praenuncia frigora fiant.

Uncia Betonicae calidae cyatho resoluta

prodest hydropicis, si sit potata frequenter.

Radicum pulvis cum mulsa tritus et haustus

470          humores (velut elleborum) vomitu cito purgat,

bis binas dragmas praecepit Plinius harum

radicum dare cum passo mulsove bibendas,

praecipue phlegma vomitu purgabitur isto.

Cum mulsa bibitus prodest pulvis foliorum

475          ruptis atque steras potus levat iste cadentes.

Cum vino sumptis obstat potata venenis,

oraecipue semen, quod si desit datur herba.

Uncia betonicae cum vino sumpta tepenti

ictericos curat ; cum mulsa menstrua solvit ;

480          pondere vero fabae pulvis cum melle voratus

post coenam stomachum juvat, ut bene digerat escam.

Si de betonica viridi sit facta corona

circa serpentes, ut Plinius asserit auctor,

audebunt nunquam positam transire coronam,

485 sed morsu proprio pereunt et verbere caudae.

Omnibus antidotis Menemachus eam sociari

praecipit, ut stomacho magis herbis omnibus aptam.

Plinius hanc, inquit, qui secum gesserit herbam,

a nullo poterit nocuo medicamine laedi,

490          et dicunt, quod ea cum vino saepius hausta

plumbeus abscedat color et melior revocetur.

Les Grecs donnent à la bétoine le nom de κέστρον. Prise en breuvage, elle est diurétique et lithontriptique ; avec de la bouillie, elle remédie à l'hémoptysie. Mêlée avec du vin et du miel, elle est bonne contre l'hydropisie. Un cataplasme de feuilles de,bétoine est très efficace contre les contusions des yeux. Le suc de cette herbe, combiné avec de l'huile de rose, et injecté dans les oreilles, en dissipe les douleurs. Réduite en poudre et bouillie avec du miel, elle est bonne contre l'empyème, elle apaise la toux, elle soulage les asthmatiques, et remédie à la plupart des maux d'estomac. S'il y a fièvre, il faut la boire avec de l'eau chaude ; s'il n'y a pas de fièvre, avec du vin. Mêlée avec du vin miellé, cette même poudre relâche le ventre. Un cataplasme de feuilles de bétoine broyées avec un peu de sel, cicatrise les blessures récentes ; en broyant la plante seule, on obtient un remède efficace contre les fractures de la tête. Les feuilles de bétoine bouillies sont avantageusement employées en cataplasme dans les diverses affections des yeux. Mangée ou prise en boisson, elle arrête le larmoiement. Cette herbe a aussi la vertu de prévenir la cécité ; mais, pour obtenir cet heureux effet, il faut la mêler à égale quantité de rue, broyer ensemble ces deux herbes, et en boire le suc, délayé dans de l'eau tiède. Cette dernière préparation dissipe et fait évaporer le sang qui enflamme les yeux et leur rend leur mobilité. Prise avec de l'eau tiède, elle dissout les abcès douloureux du poumon, et remédie aux maux d'estomac. Une décoction de cette plante est bonne pour la rate et le foie. Quatre onces de bétoine et vingt-sept grains de poivre, triturés dans trois cyaethes de vin vieux, dégagent les reins et en dissipent les deuleurs. Une once de la même herbe, broyée dans deux tasses d'eau chaude, apaise les coliques les plus fortes. Avec du miel, elle guérit la toux, et relâche le ventre. Elle est un bon spécifique contre la fièvre quotidienne : dans ce cas, il faut joindre deux onces de bétoine à une once de plantain, et broyer le tout dans de l'eau tiède. Ce mélange donne une boisson, qui, pour être plus efficace, doit être prise avant le retour du frisson. Une once de bétoine, infusée dans un cyathe d'eau chaude, donne aussi une boisson qui, souvent administrée, soulage les hydropiques. La poudre de sa racine, combinée avec de l'hydromel, a la vertu de l'ellébore, et devient un vomitif très actif. Suivant Pline, quatre drachmes de cette racine, combinées avec du vin de raisins cuits au soleil ou du vin miellé, donnent une boisson qui, en provoquant les vomissements, purge l'estomac des flegmes qui le surchargent. La feuille de bétoine, réduite en poudre, et bue avec de l'hydromel, soulage ceux qui souffrent de quelque fracture, et remédie au relâchement de la matrice. Sa graine, ou, à défaut de graine, sa feuille, combinée avec du vin, est un excellent antidote. Une once de bétoine , avec du vin tiède, dissipe la jaunisse ; avec de l'hydromel, elle facilite chez les femmes l'écoulement périodique du sang. Réduite en poudre, et mêlée avec du miel et une livre de fèves, elle est bonne pour l'estomac et pour activer la digestion. Suivant Pline, cette herbe est uu talisman contre les serpents : quand ils se voient entourés de tous côtés de bétoine fraîche, ils n'osent franchir cette barrière, et meurent dans le cercle fatal tracé autour d'eux, en se mordant eux-mêmes et en se frappant de leur queue. Ménémachus conseille de la mêler à tous les remèdes, comme étant, de toutes les herbes, la plus salutaire pour l'estomac. Pline dit qu'en portant avec soi cette plante, on n'a à redouter l'effet d'aucun poison ; prise avec du vin, elle a 'aussi, à ce qu'on assure, la vertu de ranimer et de colorer le teint.

XII. SABINA.

XII. La sabine.

Bratheos est graece sabina vocata latine,

sicca calensque sibi vis est, et tertius illi

est in utroque gradus. Vulnus cum melle vel ulcus

495          Fortiter exsiccat, et sordes purgat eorum ;

sic juvat anthracas, bona quae plebs ulcera dicit.

Menstrua deducit, corruptos extrahit alvo

conceptus, si cum vino sit sumpta frequenter,

vel si trita prius matricis subditur ori.

500          Cerotis admixta cutem facit esse nitentem,

omnibus et morbis prodest de frigore factis.

Illius in vino vel aqua decoctio curat,

quos vertigo nocet, si lotum sit caput inde

herbaque temporibus et fronti cocta ligetur.

505          Duplum sabinae si desunt cinnama poni

in medicamentis jubet Oribasius auctor.

La sabine, que les Grecs appellent βράθυ, a une force de chaleur et de siccité du troisième degré. Avec du miel, elle cicatrise les'blessures ou les plaies vives, assainit la chair, et remédie à l'anthrax que le peuple appelle bénin. Bue avec du vin, ou broyée et appliquée sur l'ouverture de la matrice, elle facilite la menstruation et l'expulsion du foetus mort dans le sein de la mère. Mêlée avec de la cire, elle rend la peau luisante, et guérit toutes les maladies causées par le froid. Une décoction de sabine dans l'eau ou le vin est très bonne contre les vertiges. Il faut, dans ce cas, s'en frotter la tête, et s'appliquer sur les tempes et le front, au moyen d'un bandeau, l'herbe après qu'elle aura bouilli. A défaut de cinnamome, Oribase conseille de se servir de sabine dans les médicaments, et prétend qu'elle a la même vertu, si on remploie à une dose double.

XIII. PORRUM.

XIII. Le poireau.

In multis causis usus medicamine porri

dicitur Ippocras, medicinae maximus auctor,

istius succum solum dedit ille bibendum

510          aegrotis, qui rejiciunt sputantve cruorem,

quos haemoptoicos soliti sunt dicere Graeci ;

cum galla dant hunc alii thurisve farina,

aut geminis dragmis porrorum seminis unam

apponunt myrrhae, vino quoque trita resolvunt,

515          prae cunctis aliis dicunt haec sumpta juvare ;

manantemque potes naris retinere cruorem,

intus si nares ungas medicamine tali.

Contractas vulvas succo curabis eodem,

reddit fecundas mansum persaepe puellas ;

520          ulcera cum melle tritum juvat appositumque.

Humorum capitis si destillatio fiat

pulmones pectusque nocens vocemque canoram,

indeque consurgat tussis praecordia laedens,

cum ptisana succum porri sorbere juvabit ;

525          et per se solum prodest his omnibus ipsum.

Si porri partes in lympha coxeris albas,

sic ut aquam primam mutes, addasque secundam,

utilis ejus aquae duro fit potio ventri,

dicitur haec eadem cum vino stringere ventrem.

530          Cum vino porrum datur his quos laeserit anguis

quodlibet aut animal fundens letale venenum ;

nec minus his prodest, si vulneribus superaddas

sic velut emplastrum porrum cum melle subactum.

Commixtus porri succus lacti muliebri

535          et bibitus tussim fertur sanare vetustam,

et variis vitiis pulmonum subvenit idem.

Auris compescit cum caprae felle dolorem,

praestat idem paritercum mulsa mixtus et auri

infusus tepidus ; fungis si manditur obstat.

540          Ejus jungatur succo pars tertia mellis,

et sic per nares tepidum fundendo vel aures

immensum poteris capitis sedare dolorem.

Cum vino bibat hunc, lumborum quem dolor angit.

Dicunt utilius tali nihil esse dolori.

545          Fracturas solidat cito, duritiasque relaxat

appositum, vulnusque recens cito cum sale claudit.

Si crudum fuerit sumptum levat ebrietatem,

sic venerem stimulat, sic duram mollit et alvum.

Hippocrate, le plus recommandable des auteurs qui ont écrit sur la médecine, employait le poireau comme médicament dans un grand nombre de cas. Il en donnait à boire le suc tout pur dans le vomissement ou le crachement de sang, que les Grecs appellent hémoptysie. D'autres conseillent de le mêler avec de la noix de galle ou avec de la farine d'encens, ou de combiner une drachme de myrrhe avec deux drachmes de graine de poireau, le tout broyé dans du vin, et prétendent qu'ainsi préparée, cette plante donne un breuvage très efficace. Ce médicament, injecté dans les narines, arrête aussi le saignement de nez. Le suc de poireau relâche la matrice, et la plante elle-même rend fécondes les jeunes femmes qui en mangent souvent. Broyée avec du miel et appliquée en cataplasme, elle cicatrise les ulcères. Le suc de poireau, associé à de la tisane d'orge, ou pur, est encore très bon quand, à la suite d'un coryza, les poumons, le thorax et la voix éprouvent de fâcheux effets qui se manifestent par une toux qui déchire la poitrine. Faites bouillir dans l'eau les parties blanches du poireau ; renouvelez ensuite l'eau qui a servi à cette première décoction, et vous obtiendrez une potion laxative. Avec du vin et préparé de la même manière, il produit l'effet contraire. Cette plante, administrée dans du vin, devient un antidote contre la morsure des serpents, et contre le venin de n'importe quel animal. Elle a la même vertu, employée comme emplâtre et appliquée sur la blessure avec du miel. Mêlé avec du lait de femme, le suc de poireau remédie aux toux invétérées et aux différentes affections du poumon. Avec du fiel de chèvre ou de l'hydromel, et injecté tiède dans l'oreille, il en apaise les douleurs. Le poireau est un aliment qui neutralise l'effet des mauvais champignons. Combiné avec un tiers de miel, et injecté tiède dans les narines ou dans les oreilles, le suc du poireau apaise le mal de tête le plus violent. Bu avec du vin, il dissipe les douleurs des lombes, et l'on prétend que rien n'est pIns efficace en pareil cas. Employé en fomentation, il fait reprendre promptement les os fracturés, et remédie aux obstructions. Avec du sel, il hâte la cicatrisation des blessures récentes. Mangé tout cru, il dissipe l'ivresse, excite à l'amour, et relâche le ventre.

XIV. CHAMOMILLA.

XIV. La camomille.

Anthemim magnis commendat laudibus auctor

550          Asclepius, quam chamaemelum nos vel chamomillam

dicimus ; haec multum redolens est et brevis herba,

herbae tam similis, quam justo nomine vulgus

dicit amariscam, quod foeteat et sit amara,

ut collata sibi vix discernatur odore.

555          Auctores dicunt species tres illius esse,

quas solo florum distingui posse colore

tradunt : est cunctis medius flos aureus illis,

sed variis foliis flos circumcingitur ille,

albi vel nigri sunt purpureive coloris.

560          Dicitur anthemis proprie, cujus foliorum

purpureus color est, majorque et fortior haec est ;

at leucanthemum foliis deprehenditur albis,

melinis chrysanthemum ; vis omnibus illis

sicca calensque gradu primo conceditur esse.

565          Provocat urinam cum vino quaelibet hausta,

vesicae frangit lapides et menstrua purgat,

si foveatur aqua matrix qua coeta sit herba,

aut si cum vino potetur saepius illa ;

tormina sic sedat, stomachique inflatio potu

570          pelletur tali ; squamas de vultibus aufert,

si tritam apponas solam mellive jugatam.

Ictericis prodest ejus decoctio sumpta

et mire prodest jecoris potata querelis,

pellere cum vino potata refertur abortum.

575          Hac oleo cocto foveas si febricitantem

frigus depelles, febrem quoque saepe fugabis ;

unguine purgantur hypochondria turgida tali.

Pestiferos morsus serpentum pondere dragmae

cum vino prohibet anthemis sumpta nocere ;

580          Plinius affirmat hanc quadraginta diebus

unaquaque die bis sumptam pondere dragmae

cum geminis cyathis vini subtilis et albi

cum lotio sensim totum purgare lienem.

Aegilopas curat, si quis commasticet illam

585          et sic apponat ; sic ulcera sordida purgat.

Ebullire caput febris fervore gravatum

saepe solet, vel collectis humoribus in se

ulcera producit, vocat exanthimata Graecus,

haec decocta virens oleo Chamomilla repellit.

590          Quod si defuerit viridis maceretur aceto,

et caput inde lavet, nullum magis adjuvat unguen.

Esculape fait un grand éloge de l'anthémis, que nous appelons camomille. C'est une herbe très odorante et petite, qui ressemble tellement à une autre herbe, qui, à cause de son amertume et de sa puanteur, est appelée vulgairement amurisca (matricaire ?), que leur odeur suffit à peine pour les faire distinguer. Les savants en reconnaissent trois espèces, qui ne diffèrent entre elles que par la couleur de la fleur. Dans ces trois espèces, le milieu de la fleur est doré, et le reste est de couleur blanche, ou noire, ou rouge. On appelle proprement anthémis celle dont la couleur est rouge : c'est la plus grande et la plus forte. Celle qu'on appelle leucanthème est de couleur blanche, et la troisième, nommée chrysanthème, est de couleur jaune. Ces trois espèces ont une force de chaleur et de siccité du premier degré. Mêlée avec du vin, la camomille, sans distinction d'espèce, donne une boisson qui est diurétique, lithontriptique et emménagogue : elle jouit de cette dernière propriété, soit que les femmes se fomentent la matrice avec de l'eau où on l'a fait cuire, soit en prenant pour boisson du vin où elle aura macéré. La même boisson arrête la dyssenterie et apaise les coliques d'estomac. Broyée seule ou avec du miel, et appliquée en topique, elle guérit les dartres squammeuses du visage. Une décoction de camomille est bonne contre la jaunisse, et d'un merveilleux effet contre les douleurs du foie. Bue avec du vin, elle passe pour faciliter l'expulsion du foetus mort dans la matrice. Elle chasse le frisson et souvent même la fièvre : pour obtenir cet effet, il faut la faire bouillir avec de l'huile, et frotter de cette décoction le corps du malade. La même fomentation dissipe l'enflure des hypocondres. Une drachme de camomille, macérée dans du vin, donne une boisson qui neutralise l'effet de la piqûre des serpents. Suivant Pline, cette herbe, prise en breuvage pendant quarante jours, et deux fois chaque jour, à la dose d'une drachme, dans deux cyathes de vin blanc spiritueux et mêlé d'urine, purge entièrement la rate. Appliquée sur la partie malade, après avoir été mâchée, elle guérit l'aegilops et nettoie les ulcères sordides. L'ardeur de la fièvre fait quelquefois bouillonner la tête, ou se manifeste au dehors par des pustules, que les Grecs appellent exanthèmes : une décoction d'huile et de camomille verte remédie à ces accidents. Si la camomille n'est pas verte, il faut alors la faire bouillir avec du vinaigre, et en frotter la tête du malade : il n'y a pas de fomentation plus efficace.

XV. NEPETA.

XV. La menthe sauvage.

Herbam, quam nepetam vulgari more vocamus,

hanc medici graeco calamenti nomine dicunt,

sicca calensque sibi vis est et tertius illi

595          est in utroque gradus. Cum mulsa sicca tepenti

sumpta solet totum sudore resolvere corpus ;

ex oleo, quo sit decocta, perunge fricando

illum, venturae metuit qui frigora febris,

non frigus tantum sed febrem saepe repellit ;

600          illi, qui sciasim patitur, coxae superadde

contritam viridem, fertur comburere pellem

et sic humores siccando fugare dolores ;

appositu potuque suo cito menstrua purgat.

Est leprae species elephantiasisque vocatur,

605          quae cunctis morbis major sic esse videtur,

ut maior cunctis elephas animalibus extat,

Hune in principio morbum potus calamenti

cum vino curat humores extenuando ;

serpentum morsus superaddita trita nocere

610          non sinit, et pellit cum vino sumpta venena.

Potus et injectus lumbricos enecat ejus

succus et in membris vermes necat omnibus ipse,

si mel jungatur huic cum sale plus operatur.

Si bibit hanc praegnans aut tritam subdit, abortit.

615          Purgat et ictericos, cum vino curat anhelos,

asthmaticos medici quos graeco nomine dicunt,

et jecoris morbos cum vino mitigat hausta,

hocque modo veterem lateris juvat illa dolorem,

atque cicatrices nigras superaddita trita

620          haec naturali reddit purgando colori ;

vino decoctae facit hoc melius cataplasma.

Compescit stomachi cum vino sumpta dolorem.

Fumus de domibus serpentes effugat ejus,

tollere singultum cum vina dicitur hausta

625          hocque modo venerem prohibet potata frequenter.

L'herbe qu'on appelle vulgairement menthe sauvage, et que les médecins nomment, avec les Grecs, calament, a une force de chaleur et de siccité du troisième degré. Une décoction de calament sec dans de l'hydromel, prise tiède, est un excellent sudorifique. Bouillie avec de l'huile, et employée en fomentation, elle chasse le frisson de la fièvre, et souvent la fièvre elle-même. Cette herbe est bonne contre la sciatique : broyée toute verte, et appliquée sur le haut de la cuisse, elle brûle la peau, et, en séchant les humeurs, elle dissipe, dit-on, le mal. Employée, soit en fomentation, soit,en boisson, elle facilite l'écoulement périodique du sang chez les femmes. Il y a une espèce de lèpre, qu'on appelle éléphantiasis, parce qu'elle surpasse autant les autres maladies en gravité que l'éléphant surpasse les autres animaux en grosseur ; or  le calament, pris dans du vin au début de cette maladie, la dissipe, en atténuant l'âcreté des humeurs. Broyée et appliquée en cataplasme, elle neutralise la morsure des serpents, et, bue avec du vin, elle arrête les funestes effets du poison. Bu ou pris en lavement, le suc de calament tue les ascarides lombricoïdes qui s'engendrent dans les intestins, ainsi que les vers qui se trouvent dans toute autre partie du corps. En y mêlant du miel et du sel, cette herbe est encore plus efficace. Employée en boisson ou en fomentation, après avoir été broyée, elle détermine l'avortement. Elle dissipe la jaunisse ; avec du vin, elle est bonne contre l'essoufflement, que les médecins, en raison de son nom grec, appellent asthme ; elle guérit les maladies du foie, et remédie aux douleurs anciennes du côté. Broyée et appliquée sur les meurtrissures, elle dissipe leur noire empreinte et rend à la peau sa couleur naturelle. Bouillie avec du vin, elle fournit un topique plus efficace encore. Prise dans du vin, elle remédie aux maux d'estomac. La fumée de cette herbe chasse les serpents des maisons. Bue avec du vin, elle arrête le hoquet, et éteint les ardeurs érotiques.

XVI. PULEGIUM.

XVI. Le pouliot.

Fervida pulegii vis siccaque dicitur esse.

Tertius a medicis datus est gradus huic in utroque.

Saepius nanc herbam si praegnans sumit, abortit ;

menstrua deducit cum viuo sumpta tepenti,

630          hocque modo tardas haec extrahit herba secundas.

(Hoc nomen, quod non notum reor esse quibusdam,

exponam tali quid nomine significetur :

ut nondum oatus testa circumdatur ovi

pullus, sic infans matris vestitur in alvo

635          quadam pellicula matris de semine facta,

quam nascens rumpit, quasi testam pullulus ovi,

istas pelliculas medici dixere secundas,

quod mox expositos naturae jure sequantur ;

hae si plus justo vitio cogente morantur

640          aut mors subsequitur, dolor aut qui vix toleratur ;

istas pulegium praedicto more repellit.)

Cum sale contritam melli si junxeris illam

unguine contractis potes hoc succurrere membris.

Illius pulvis sumptus cum melle vel haustus

645          pectoris humores viscosos extenuare.

Et per sputa potest illos educere mire.

Nausea vel morsus stomachi curabitur illa

cum pusca sumpta vel aceto quod sit aquosum ;

cum vino nigram choleram potata repellit,

650          sicque venenatis serpentum morsibus obstat.

Si per vim febris nimiove fluore cruoris

aut aliquo casu subito defecerit aeger,

quod solet a doctis medicis malefactio dici,

pulegium valido tritum jungatur aceto,

655          naribus aegroti sic apponatur, odore

solo confestim dicunt relevare incentem.

Gingivas sicci pulvis confirmat et usti.

Appositam viridem dicunt sedare podagram,

et quosvis alios solet emendare tumores,

660          si superaddatur tepidae pemixta polentae ;

addita cerotis papulas de corpore tollit.

Spleneticis multum superaddita cum sale prodest ;

elixatura si quisquam saepe tepenti

illius abluitur, pruritus nou patietur,

665          et sic matricis poteris curare tumorem ;

tussim compescit cum vino sumpta tepenti,

et sic urinam compellit reddere largam,

et magis ex vino si sit decoctio facta

aut oleo mixto contritam si superaddas.

670          Si radix acri contrita jugatur aceto,

sedabit quosvis superaddita saepe tumores ;

obstat serpentum cum vino sumpta venenis

et sic assumptam venerem stimulare fatentur.

Sic quoque pulmonis prodest jecorisque querelis

675          et sic nutrici sumptum lac praebet abundans.

Herba vireos curat morsus cum melle caninos,

si superaddatur et vino mixta bibatur.

Le pouliot a, suivant les médecins, une force de chaleur et de siccité du troisième degré. L'usage immodéré de cette plante dans la grossesse détermine l'avortement. Bue avec du vin tiède, elle facilite l'écoulement périodique du sang chez les femmes, et précipite l'arrière-faix. (Voici l'explication de ce dernier mot, dont la signification n'est pas, je crois, entendue de tout le monde : de même que le poulet est, avant sa naissance, enveloppé d'une coquille, de même l'enfant, dans le sein maternel, est enveloppé d'une pellicule, formée du sang de la mère, et qu'il brise en venant au monde. Cette pellicule est appelée arrière-faix, parce qu'elle ne sort de la matrice qu'après l'enfant. Si cette enveloppe est retenue trop longtemps par un obstacle quelconque, elle cause la mort ou des douleurs intolérables. Or, le pouliot, employé comme je viens de dire, a la vertu d'en débarrasser la mère.) Broyée avec du miel et du sel, et employée en fomentation, elle relâche les membres contractés. La poudre de pouliot, prise avec du miel ou en breuvage, dissipe les humeurs visqueuses de la poitrine, et peut leur donner issue par l'expectoration. Ingérée avec de la bouillie, du vinaigre et de l'eau, elle dissipe la nausée et les douleurs aiguës de l'estomac. Bue avec du vin, elle chasse la bile noire, et neutralise l'effet de la morsure venimeuse des serpents. Si, dans un violent accès de fièvre, ou à la suite d'une hémorragie, ou par l'effet de quelque autre accident un malade vient à tomber en défaillance, ou, comme disent les médecins, en lipothimie, en appliquant à ses narines de fort vinaigre dans lequel on a broyé du pouliot, on ranimera à l'instant ses sens anéantis. La poudre du pouliot sec ou brûlé fortifie les gencives. La plante broyée toute fraîche et mêlée avec de la polente tiède, puis appliquée sur la partie malade, apaise les douleurs de la goutte, et dissout toutes sortes de tumeurs. Incorporée avec de la cire, elle fait disparaître les papules. Appliquée comme topique avec du sel, elle est très bonne contre les maux de rate. Bouillie et employée en fomentation, elle calme les démangeaisons, et dissipe l'enflure de la matrice. Prise avec du vin tiède, elle apaise la toux et active la sécrétion de l'urine. Elle est encore plus efficace si, après l'avoir fait bouillir dans le vin, ou l'avoir pilée avec de l'huile, on l'applique en topique. Un cataplasme composé de racine de pouliot et de vinaigre, dissout la plupart des tumeurs. Prise avec du vin, cette racine est un préservatifcontre le venin des serpents ; on lui reconnaît aussi des propriétés aphrodisiaques. Employée de la même manière, elle est encore très bonne contre les affections du poumon et du foie, et rend le lait des femmes plus abondant. La tige, appliquée fraîche avec du miel sur les morsures des chiens, et prise en boisson dans du vin, est un remède des plus efficaces.

XVII. FENICULUM.

XVII. Le fenouil.

Feniculum medici calidum siccumque secundo

dicunt esse gradu, marathrum Graecus vocat illud.

680          Cum vino cunctis obstat haec herba venenis,

hac mansa serpens oculos caligine purgat,

indeque compertum est humanis posse mederi

illam luminibus, atque experiendo probatum ;

radicum succus oculis cum melle perunctis

685          pulsa reddit eos omni caligine claros ;

expressus marathri viridi de semine succus

soleque siccatus magnum medicamen habetur

ad quoscunque voles oculorum pellere morbos.

Auribus infusus vermes succus necat ejus,

690          renibus in ptisana radix decocta medetur,

cum vino fugat hydropicos potata tumores,

sicque venenatis obstabit morsibus illa,

sic quoque pulmonis obstat jecorisque querelis,

et sic nutrici sumpta fit copia lactis.

695          Cum vino vel aqua radicum coctio sumpta

nefreticis et vesicae morbis medicatur,

urinas purgat et menstrua sumpta resolvit,

vel si trita super pecten haec herba ligetur ;

nausea cum vino sumpta sedabitur illa,

700          fervorem stomachi cum lympha mitigat hausta.

Radix illius vino decocta dolores

fomento curat, patitur quos virga virilis,

hoc quoque, si jungas oleum, facit, hocque perungas.

Ictu vel factos subito quoscunque tumores

705          appositum tantum juncto sedabit aceto.

Semen cum vino bibitum veneris movet actus,

hocque modo lateris diros sedare dolores

dicunt aut herbae si sit decoctio sumpta.

Tradunt auctores ejus juvenescere gustu

710          serpentes et ob hoc senibus prodesse putatur.

Le fenouil, que les Grecs appellent μάραθρον, a, suivant les médecins, une force de chaleur el de siccité du second degré. Avec du vin, cette herbe devient un antidote contre toutes sortes de poisons. Les serpents mangent du fenouil pour s'éclaircir la vue, ce qui a fait penser que son usage pouvait être utile aux yeux de l'homme, et c'est ce que l'expérience a confirmé. Le jus de la racine du fenouil, mêlé avec du miel, et employé comme fomentation, éclaircit en effet la vue ; et le suc de sa graine verte, séché au soleil, est un spécifique excellent contre toutes les maladies des yeux. Le suc de la plante, injecté dans l'oreille, tue les vers. Sa racine cuite dans de la tisane d'orge remédie aux douleurs des reins. Prise dans du vin, ene dissipe l'enflure de l'hydropisie, elle neutralise l'effet des morsures venimeuses, elle remédie aux affections du poumon et du foie, et rend le lait des femmes plus abondant. Une décoction de racines de fenouil dans du vin ou de l'eau, donne un breuvage qui remédie aux maladies des reins et de la vessie ; elle est diurétique ; elle facilite l'écoulement périodique du sang chez les femmes, et même, pour obtenir cet effet, il suffit de l'appliquer broyée sur l'os pubis. Prise avec du vin, elle apaise la nausée ; avec de l'eau, les inflammations d'estomac. Une décoction de racine de fenouil dans du vin, employée en fomentation, dissipe les affections du membre viril.·Elle.produit le même effet si on s'en frotte après l'avoir unie à de l'huile. Mêlée avec du vinaigre, et appliquée sur la partie malade, cette plante dissipe à l'instant l'enflure causée par toutes sortes de contusions. Sa graine, dans du vin, donne un breuvage aphrodisiaque. Une décoction semblable de sa graine ou de ses feuilles apaise les violentes douleurs du côté. On prétend que cette herbe a la vertu de rajeunir les serpents, et qu'elle est, par la même raison, salutaire aux vieillards.

XVIII. ACIDULA.

XVIII. L'acidule.

Dicimus acidulam, quam Graeeus dicit aizon ;

sic dici credunt, sapor illi quod sit aceti.

Crescit arenosis in pratis et secus amnes,

hanc avide quidam comedunt in tempore veris

715          expertumque ferunt, sibi quod fastidia tollat ;

virtus est illi siccans et frigida valde

tertius a medicis datus est gradus huic in utroque.

Hac fugit apposita sacer ignis et herpeta mordax,

et tumor ex oculis tritae cataplasmate cedit.

720          Ulcera, quae serpunt, cohibet combustaque curat

et multum calidae dicunt prodesse podagrae,

si fuerit foliis illius operta virentis

aut cataplasmetur mixta contrita polenta.

Ejus cum roseo succus permixtus olivo

725          dicitur antiquo capitis prodesse dolori,

qui dolor est lingua dictus cephalargia graeca.

Omne genus fluxus ventris restringere mire

cum vino potata solet vel mansa frequenter,

hocque modo nimium manantia menstrua sistit,

730          vel si matrici tritam viridem superaddas ;

sic quoque lumbricos pellit potata rotundos,

taliter et cunctis prodest potata venenis.

Exhilarat visus succus illius inunctos

cum vino variis obstat potata venenis.

735          Affirmant istam qui secum gesserit herbam,

quod non appetat hunc letali scorpius ictu.

Auribus expressus si succus funditur ejus

adjuvat auditum mire pellitque dolorem.

Altera vero minor species est istius herbae,

740          quam sempervivam dicunt, quoniam viret omni

tempore, barba Jovis vulgari more vocatur ;

esse refert similem praedictae Plinius istam,

nec minus hanc cunctis praedictis posse juvare ;

mane solent adeo palpebrae glutine quodam

745          flegmatis astringi, valeant ut vix aperiri,

has mire succus herbae deglutinat hujus,

illi si taetae fuerint digitove perunctae.

L'acidule, que les Grecs appellent ἀειζώον, doit son nom à son goût acide. Elle croit dans les prairies sablonneuses et le long des rivières. Certaines personnes en mangent avidement dans la saison du printemps, car, suivant eux, elle dissipe les dégoûts. Elle est extrêmement froide et siccative, et les médecins la rangent, sous ce double rapport, au troisième degré. Un cataplasme de cette herbe dissipe le feu sacré, les dartres corrosives et le gonflement des yeux. La feuille de l'acidule, tandis qu'elle est verte et broyée, appliquée sur la partie malade, brûle et cicatrise les ulcères rongeurs et remédie aux ardeurs de la goutte. On obtient le même effet en la mêlant, pilée, avec de la polente. Le suc de cette herbe, mêlé avec de l'huile de rose, dissipe le mal de tête rebelle, que les Grecs appellent céphalalgie. Elle est d'une merveilleuse efficacité contre toutes sortes de flux de ventre, et pour cela il faut en boire avec du vin ou en manger souvent. Prise de la même manière, ou broyée toute fraîche et appliquée sur la matrice, elle arrête le flux immodéré du sang chez les femmes. Prise en boisson, elle détruit les ascarides lombricoïdes qui s'engendrent dans les intestins, et neutralise l'effet de tous les poisons. Le jus de cette herbe est un collyre qui réjouit la vue, Il suffit, dit-on, de porter sur soi de l'acidule pour se préserver de la piqûre mortelle du scorpion. Injecté dans l'oreille, le jus de cette herbe éclaircit l'ouïe et dissipe admirablement les douleurs de cet organe.

Il y a une petite espèce de cette herbe appelée immortelle, parce qu'elle est toujours verte, et connue vulgairement sous le nom de joubarbe. Pline dit qu'elle est semblable à la grande espèce et qu'elle a les mêmes vertos. Certaines personnes ont quelquefois, le matin, les paupières couvertes d'une chassie qui les empêche presque de les ouvrir ; en les baignant dans le suc de cette herbe, ou en les enduisant avec le doigt, elles se débarrasseront avec une merveilleuse facilité de cette humeur gluante.

XIX. PORTULACA.

XIX. Le pourpier.

Andrachne graece quae portulaca latine

dicitur, haec vulgi pes pulli more vocatur.

750          Humida vis ejus et frigida dicitur esse,

tertius humoris, frigoris vero secundus

huic gradus est. Febrem, quam causon Graecia dicit,

inde juvat, stomacho viridis superaddita trita,

praestat idem succus, si sumitur ; herbaque mansa

755          aut ut olus accepta, solet lenire calorem.

Mansa vel hausta potest nimium restringere fluxum

sanguinis et ventris nimium cohibere fluorem.

Esse vetat dentes illis contrita stupentes,

et tumidis oculis prodest superaddita trita,

760          fervorem solis aestate comesta nocere

non sinit et ventrem cum vino et cum sale mollit,

vesicaeque solet sedare comesta dolores.

Acidulae similes huic pene per omnia vires

effectosque pares testatur Plinius esse.

Le pourpier, que les Grecs appellent ἀνδράχνη est connu vulgairement sous le nom de patte de poulet. Cette herbe est d'une nature humide et froide : elle occupe le troisième degré d'humidité, et le second degré de froideur. Aussi est-elle bonne contre la fièvre, que les Grecs appellent καῦσος, soit qu'on l'applique fraîche et broyée sur l'estomac, soit qu'on en convertisse le suc en boisson. Mangée comme un légume, elle éteint la chaleur intérieure. Soit qu'on la mange ou qu'on en boive le suc, elle arrête les flux de sang et la diarrhée. Broyée, elle dissipe rengourdissement des dents et le gonflement des yeux. Elle préserve des ardeurs du soleil ceux qui en mangent en été, et, avec du sel et du vin, elle relâche le ventre et apaise les douleurs de la vessie. Suivant Pline, elle a à peu près les mêmes vertus et produit les mêmes effets que l'acidule.

XX. LACTUCA.

XX. La laitue.

765          Frigida lactucae vis constat et humida valde,

unde potest nimios haec mansa levare calores,

et praestabit idem superaddas si bene tritam ;

utilis est stomacho, somnum dat, mollit et alvum,

omnibus his melius prodest decocta comesta,

770          et stomacho potius non lota comesta medetur.

Lactucae semen compescit somnia vana,

cum vino bibitum f1uxum quoque reprimit alvi,

lac dat abundanter nutrici sumpta frequenter.

Ut quidam dicunt oculis caligo creatur

775          his, quibus assiduo fuerit cibus ejus in usu.

La laitue est froide et extrêmement humide. Employée comme aliment ou en cataplasme, elle dissipe toutes sortes d'inflammations. Elle est stomachique, hypnotique, laxative, et jouit à un plus haut degré de ces propriétés quand on la mange cuite. Elle est aussi plus efficace contre les affections de l'estomac, quand on la mange sans l'avoir préalablement lavée. La graine de laitue préserve des vains troubles des songes. Bue avec du vin, elle arrête le flux du ventre, et rend le lait des femmes plus abondant. Quelques auteurs prétendent qu'elle obscurcit la vue des personnes qui en mangent trop souvent.

XXI. ROSA.

XXI. La rose.

Dici flos florum nobis rosa jure videtur,

quod specie cunctos praecedat odoreque flores.

Non tamen haec specie tantum nec odore juvare

nos valet, at variis nos adjuvat ilia medelis,

780          ejus sicca gradu vis est et frigida primo.

Compescit sacrum, si trita apponitur, ignem,

sic quoque, si stomachus calet aut praecordia, sedat ;

fluxum matricis cum vino stringit et alvi,

illius succum collyria plurima quaerunt,

785          et siccae pulvis morbis bene subvenit oris,

infrictus per se tantum cum melleve mixtus.

Omnes fervores superaddita trita coercet

ipsa recens, vel si mulsae commixta bibatur.

Ex hac conficitur oleum, roseumque vocatur,

790          diversis morbis et multis utile causis :

si bibitur ventrem mollit stomachique calorem

extinguit nimium ; bene si foveatur eodem

et dolor et fervor capitis curabitur illo ;

permiscendo sibi si forte jugatur acetum

795          expurgat sordens. vulnus repletque profundum

et combusturis praeclare convenit ignis ;

ore diu tentum dentis sedare dolorem

dicitur et duras palpebras reddere molles ;

aufert suppositum pruritus interiorum

800          et stericis variis solet hoc succurrere causis.

Hoc oleum quoniam variatur conficiendo,

dicam Palladius quid scripserit inde peritus :

quod rubeum fuerit foliorum sumito floris

uncia sic purgatorum jungatur olivi

805          in libra, vitreo sic claudens omnia vase,

sub Phoebo tantum septem suspende diebus,

inde medelarum vanos servetur ad usus.

C'est à juste titre que la rose est regardée comme la reine des fleurs, car elle n'a point d'égale en beauté et en odeur. Elle n'a pas seulement le don de plaire, elle a aussi plusieurs propriétés médicales. Elle a une force de froideur et de siccité du premier degré. Broyée et appliquée en cataplasme, elle apaise le feu sacré ; elle éteint·également les inflammations de l'estomac ou des entrailles. Avec du vin, elle arrête les hémorragies utérines et la dyssenterie. Le suc de cette fleur entre dans la composition de la plupart des collyres. Desséchée et réduite en poudre, elle est très bonne contre les affections de la bouche, soit qu'on l'emploie seule en friction, soit qu'on la mêle avec du miel. Broyée toute fraîche, elle apaise toutes sortes d'inflammations. Mêlée avec de l'hydromel, elle donne une boisson qui a la même vertu. On en tire une huile, appelée huile de rose, qui a une infinité de vertus. Prise en boisson, elle relâche le ventre et éteint les inflammations de l'estomac ; employée en fomentation, elle dissipe les douleurs et les chaleurs de la tête ; mêlée avec de fort vinaigre, elle déterge les ulcères sordides, en hâte la cicatrisation, et est surtout efficace contre les brûlures. Gardée longtemps dans la bouche, elle dissipe, dit-on, le mal de dent et attendrit les paupières. Appliquée sur la partie malade, elle apaise les démangeaisons intérieures, et remédie aux différentes affections hystériques. Comme il existe plusieurs manières d'opérer pour obtenir cette huile, je vais indiquer la formule du savant Palladius : prenez une once de feuilles de roses rouges, que vous mettrez, après les avoir nettoyées, dans une livre d'huile d'olive ; après avoir enfermé le tout dans un flacon de verre, que vous laissez pendant sept jours seulement exposé au soleil, vous conserverez ce mélange pour les différents usages qu'on peut en faire en médecine.

XXII. LILIUM.

XXII. Le lis.

Aurosas ut credo rosas argentea debent

lilia jure sequi, quae nec specie nec odore

810          cedere creduntur roseo collata decori,

nec minus in multis hominum sunt apta medelis.

Ejus radicis bulbus, quae lilia profert,

sub prunis tectos juncto quoque tritos olivo

prodest usturis mire superadditus ignis,

815          et melius roseum sibi si jungatur olivum ;

duras matrices mollit, si subditur, idem.

Elixis ejus foliis cataplasmate facto

mollescunt nervi, combustaque membra juvantur,

sicque superpositis morsus curabitur anguis,

820          aut si cum vino bulbus potabitur ille,

sic quoque fungorum vetat ille venena nocere.

Hunc vino coctum tritumque pedum superadde

clavis, nec solvas nisi cum lux tertia transit ;

pingui porcino decoctus idem vel olivo

825          reddere posse pilos membris narratur adustis.

Cum vino potum nocuum purgare cruorem

per ventrem dicunt et sic prodesse lieni,

sicque juvat vulvas, sic idem menstrua purgat,

vel si cum vino veteri coctum superaddas.

830          Praecisis nervis tritus cum melle medetur

expressus succus foliorum, mixtus aceto

et melli coquitur sic, mellis sint et aceti

ut geminae partes, praedicti quinque liquoris ;

ad desiccandas nihil est magis utile plagas,

835          inque cicatricem ducit licet inveteratas

elixus bulbus et cerotis bene mixtus ;

rugas distentat vultus, maculas fugat omnes,

lichenas purgat, faciem quoque furfure mundat.

Exprimitur succus de tritis floribus ejus,

840          qui mollit vulvas cum lana subditus illis ;

illitus asseritur sudorem posse movere ;

turgida maturat, pus concoquit et cito purgat.

Après la rose, dont la couleur le dispute à celle de l'or, vient naturellement le lis argenté, qui semble ne le céder en rien à sa rivale, ni pour l'odeur ni pour la beauté, et qui, comme la rose, a un grand nombre de propriétés médicales. L'oignon de lis, cuit sous la cendre et broyé dans de l'huile d'olive, donne un topique qui est très bon contre les brûlures. Mêlé avec de l'huile de rose, il est encore plus efficace. Appliqué sur la matrice, il est un excellent émollient. Un cataplasme de feuilles de lis bouillies relâche les nerfs, cicatrise les brûlures et neutralise l'effet de la piqûre des serpents. L'oignon de cette fleur, pris en boisson dans du vin, est un antidote puissant dans l'empoisonnement produit par les champignons vénéneux. Cuit et broyé dans du vin, en l'appliquant sur les cors et l'y laissant pendant trois jours, il guérit ces espèces de durillons Cuit dans de la graisse de porc ou de l'huile, il fait renaître le poil sur les parties du corps qui ont été brûlées. Pris en boisson dans du vin, il purge le corps du mauvais sang et soulage la rate ; il remédie aux affections de la vulve, il facilite l'écoulement périodique du sang chez les femmes, et produit le même effet lorsqu'on l'applique en cataplasme, après l'avoir fait cuire dans du vin vieux. Le suc des feuilles de lis, mêlé avec du miel, remédie aux nerfs coupés. On peut aussi le faire bouillir avec du vinaigre et du miel, en observant que la dose de ces deux ingrédients soit de deux parties, et celle du suc ci·dessus nommé, de cinq. Rien ne convient mieux que cette préparation pour dessécher les plaies. L'oignon de lis, bouilli et broyé avec de la cire, outre qu'il fait cicratriser les plaies les plus invétérées, efface les rides du visage, en fait disparaître toutes les taches, ainsi que les dartres vives ou farineuses qui y ont leur siège. Le suc de la fleur broyée, appliqué sous la matrice au moyen d'un flocon de laine, amollit cet organe. Employé en fomentation, il est sudorifique, il dissipe les enflures, fait aboutir les abcès et les guérit promptement.

XXIII. SATUREIA.

XXIII. La sarriette.

Thymbra solet graece dici,satureia latine,

illi sicca minus vis est, sed fervida valde.

845          Provocat urinam cum vino et menstrua sumpta,

pellit abortivum, muliebria viscera purgat.

Illius pulvis cum cocto melle subactus

et mansus (vel cum vino si sumitur idem)

pectoris humorem pellit per sputa tenacem.

850          Cum vino tepido compescit tormina ventris

si large bibitur, verum jam saepe probavi.

Est quidam morbus letargus nomine dictus,

oppositum medici quem dicunt esse frenesi,

quod vetat haec somnum, somno gravat hic nimis aegrum,

855          hoc tam letali somno depressus aceto

thymbram commiscens foveat caput inde frequenter,

sic vitium pigri poterit depellere morbi.

Hanc herbam caveat mulier contingere praegnans,

Nam non mansa modo sed partum subdita pellit.

860          Nausea sedatur hac, si bene trita sumatur

cum modico vino, vel si sumatur in ovo ;

hocque modo mire venerem solet ilia movere,

si largo potu viridis vel sicca bibatur ;

quod si cum vino mel jungitur et piper illi,

865          non modicum veneris succendere dicitur ignem.

Hinc est a Satyris merito satureia vocata,

quod sint in venerem nimis haec animalia prona.

Si desit thymus pro thymo ponere thymbram

praecipiunt medici, quia vis est aequa duabus.

La sarriette, que les Grecs appellent θύμβρα, est peu siccative, mais possède une grande force de chaleur. Prise avec du vin, elle est diurétique, emménagogue, facilite l'expulsion du foetus mort dans la matrice, et précipite l'arrière-faix. Réduite en poudre et cuite avec du miel, elle devient un aliment qui provoque l'expectoration des flegmes. Elle a la même vertu, administrée en boisson dans du vin. Pris en grande quantité avec du vin tiède, elle apaise les coliques, comme je l'ai souvent éprouvé. Il y a une maladie appelée léthargie, et que les médecins regardent comme le contraire de la frénésie, en ce que celle-ci tient le malade dans une perpétuelle insomnie, tandis que l'autre le plonge dans un sommeil profond. La sarriette, mêlée avec du vinaigre, est un excellent spécifique contre un si funeste engourdissement : il suffit d'en frotter à plusieurs reprises la tête de celui qui en est affecté. Les femmes enceintes doivent se garder de toucher cette herbe, dont non-seulement l'ingestion, mais le contact, peut les faire avorter. Broyée et mêlée avec un peu de vin, elle apaise la nausée. Elle produit le même effet, prise dans un oeuf. Fraiche ou sèche, et convertie en breuvage, elle est mise au nombre des aphrodisiaques : mêlée avec du vin, du miel et du poivre, elle enflamme les sens d'ardeurs immodérées. C'est ce qui lui a fait donner le nom latin de satureia, parce que les satyres sont très luxurieux. A défaut de thym, les médecins conseillent l'usage de la sarriette, parce que ces deux plantes ont la même force.

XXIV. SALVIA.

XXIV. La sauge.

870          Salvia, cui nomen elelisphacus est apud Argos,

cum mulsa jecoris prodest potata querelis,

pellit abortivum, lotiumque et menstrua purgat,

trita venenatos curat superaddita morsus,

crudis vulneribus (quae multo sanguine manant)

875          apponas tritam, dicunt retinere cruorem.

Cum vino succus tepidus si sumitur ejus,

compescit veterem tussim laterisque dolorem.

Pruritus vulvae curat virgaeque virilis,

si foveas vino fuerit quo salvia cocta.

880          Illius succo crines nigrescere dicunt,

si sint hoc uncti crebro sub sole calenti.

La sauge, que les Grecs appellent ἐλέλισϕακος, est très bonne contre les affections du foie, lorsqu'on la boit avec de l'hydromel ; elle facilite l'expulsion du foetus mort dans la matrice, active la sécrétion de l'urine et l'écoulement périodique du sang chez les femmes. Brûlée et appliquée sur la plaie, elle neutralise l'effet des morsures venimeuses, et cicatrise les blessures saignantes. Un mélange tiède de suc de sauge et de vin apaise les toux invétérées et les douleurs de côté. Cette herbe, cuite dans du vin et employée en fomentation, apaise les démangeaisons des parties sexuelles. Le jus de la sauge a, dit-on, la vertu de noircir les cheveux quand on les en imprègne fréquemment à l'ardeur du soleil.

XXV. LIGUSTICUM.

XXV. La livèche.

A Ligurum patria sumpsere ligustica nomen,

copia quod major ibi nascitur illius herbae ;

tertius huic gradus est sicci calidique vigoris.

885          Major radicis vis est et seminis ejus

et par est illis vis in medicamine quovis.

Inflato stomacho cum vino sumpta medetur

et tali potu vis digestiva juvatur,

omnibus et morbis sic prodest interiorum,

890          urinas sic sumpta movet et menstrua purgat.

tota venenatis medicatur morsibus herba,

si bibitur bene trita prius vinoque soluta,

et pars contritae ponatur desuper herbae.

Non modicum colicis prodest haec mansa vel hausta,

895          vel si radicis elixatura bibatur,

nec solum colicis decoctio proderit ista,

sed supradictis medicabitur omnibus hausta.

Digestibilibus semen bene jungitur ejus

omnibus antidotis, quod inest sibi peptica virtus.

900          Hanc oculis Strabus potuque et odore nocivam

asserit, antidotis ejus tantummodo semen

misceri jussit, haec utrum dixerit a se

aut a doctorum libris non est mihi notum ;

hoc scio, quod veteres non parvis laudibus istam

905          attollunt herbam, nec me legisse recordor

ullum, qui Strabi sermonibus astipuletur.

La livèche croit abondamment dans la Ligurie, et tire son nom latin (ligusticum) de celui de cette contrée. Elle a une force de chaleur et de siccité du troisième degré. Sa vertu réside surtout dans sa racine et dans sa graine, qu'on peut employer indifféremment et avec un égal succès contre toutes sortes d'affections. Prise avec du vin, elle apaise les coliques d'estomac, facilite la digestion, combat avantageusement toutes les maladies intérieures, et est, de plus, diurétique et emménagogue. Toute la plante, broyée dans du vin et administrée en boisson, est efficace contre les morsures venimeuses, si on applique en même temps sur la plaie un cataplasme formé d'une partie de la plante pilée. Prise comme aliment ou en boisson, elle apaise infailliblement les coliques. Une décoction de sa racine est non seulement avantageuse contre la colique, mais encore dans tous les cas dont nous avons parlé. Sa graine facilite la digestion de tous les médicaments avec lesquels on l'unit. Strabus prétend qu'elle est nuisible aux yeux, soit qu'on en boive le suc, soit qu'on en respire l'odeur : aussi conseille-t-il de n'employer que sa graine dans les remèdes dont elle doit faire partie. Je ne saurais dire s'il parle d'après son opinion personnelle ou d'après celle d'auteurs que recommandent leurs écrits : ce que je sais, c'est que les anciens font un grand éloge de cette herbe, et je ne me souviens pas d'avoir rien lu qui puisse donner de l'autorité à l'assertion de Strabus.

XXVI. OSTRUTIUM.

XXVI. L'ostrutium.

Struthion, ostrutium quod vulgi more vocatur,

vim calidam siccamque tenet. Radix fugat ejus

cum vino morbos jecoris, si trita bibatur,

910          ictericos sic sumpta juvat, splenisque tumorem

durum, quem Graeci sclirosim dixere, repellit.

Hocque modo lapides vesicae frangere dicunt,

menstrua sic lotiumque movet tussique medetur,

sic orthopnoicis prodest, si saepe bibatur.

915          Subdita matrici depellere fertur abortum,

et sic tarda nimis educere menstrua tradunt ;

acri cum vino si jungitur atque polenta

illius succus, lepras emundat inunctas.

Hoc etiam succo, juncto eum polline quod dant

920          hordea, curatur (ut dicunt) pustula quaevis,

si superaddideris emplastri more dolori.

Illius succus cum melle terendo jugatus

humores capitis purget si nare trahatur ;

sternutamentum per se pulvis movet ejus,

925          naribus injectus veratro non segnius albo.

Ictericis succus mire medicabitur ejus,

hunc si nare trahant lacti mixtum muliebri.

Le struthium, appelé communément ostrutium, est d'une nature à la fois chaude et sèche. Sa racine, broyée dans du vin, donne une boisson qui guérit les maladies du foie, dissipe la jaunisse, et dissout l'obstruction de la rate, que les Grecs appellent σκλήρωσις. Elle est lithontriptique, emménagogue, diurétique ; elle calme la toux, et bue en abondance, elle guérit de l'orthopnée. Placée sous la matrice, elle facilite, dit-on, l'expulsion du foetus mort et le retour des règles tardives. Mélé avec du vinaigre et de la polente, le suc de cette herbe donne une sorte de cérat précieux pour combattre les maladies de la peau. Avec de la farine d'orge, il guérit toutes sortes de pustules. Incorporé avec du miel, et aspiré par les narines. il dissipe les humeurs de la tête. Réduit en poudre, le struthium, aussi irritant que l'ellébore blanc, fait éternuer ceux qui en respirent l'odeur. Mêlé avec du lait de femme, et aspiré par le nez, son suc dissipe la jaunisse.

XXVII. CEREFOLIUM.

XXVII. Le cerfeuil.

Est cerefolio vis acris et ignea valde.

Appositum cancris tritum cum melle medetur ;

930          cum vino bibitum lateris sedare dolorem

saepe solet, tritam si nectis desuper herbam.

cum mulsa bibitum pituitae noxia solvit,

ex oleo coctum frigus depellit inunctum,

si tritum mixto violento solvis aceto

935          lumbricos tali potu tineasque repellis,

cum vino ciet urinas et menstrua purgat.

Virgine cum cera vetus huic axungia mixta

non modo parotidas verum quoscunque tumores

curat vel reprimit, si saepius hoc superaddas.

940          Intinctum valido si manducetur aceto

saepe solet vomitum ventremque tenere solutum ;

si trito tegitur pecten succusque bibatur

urinae clausos reserat quoscunque meatus ;

illius elixatura vertigo fugatur,

945          si caput hac tepida patientis saepe lavetur

herbaque temporibus et fronti cocta ligetur.

Le cerfeuil est d'une nature âcre et brûlante. Broyé avec du miel et appliqué sur la partie malade, il remédie aux affections cancéreuses. Pris en boisson dans du vin, il apaise les douleurs du côté, si on l'applique en même temps, après l'avoir broyé, sur la partie malade. Administré dans de l'hydromel, il délivre de la pituite. Cuit dans l'huile et employé en fomentation, il chasse le frisson. Broyé dans du vinaigre très fort, il donne une potion qui détruit les ascarides lombricoïdes et autres vers intestinaux. Avec du vin, il est diurétique et emménagogue. Combiné avec de la cire vierge et du vieux oing, et appliqué en cataplasme à plusieurs reprises, il remédie aux engorgements des parotides et à toutes sortes de tumeurs. Mangé avec du vinaigre très fort, il produit souvent en même temps l'effet d'un vomitif et d'un purgatif. En buvant le suc du cerfeuil, et en appliquant la plante pilée sur le bas-ventre, on fait cesser les obstructions des voies urinaires. Le cerfeuil bouilli peut aussi dissiper le vertige. Pour obtenir cet effet, il faut en frotter souvent la tête du malade, et en faire un cataplasme qu'on applique sur le front et sur les tempes.

XXVIII. ATRIPLEX.

XXVIII. L'arroche.

Infrigidare gradu primo, humectare secundo

attriplicem dicunt. Ejus mollit cibus alvum,

duricias solvit varias clavisque medetur,

950          emplastrum crudae vel coctae si superaddas ;

hocque superpositum scabros cito detrahit ungues,

ignibus et sacris dicunt sic posse mederi.

Attriplicem tritam cum nitro, melle et aceto,

dicunt appositam calidam sedare podagram.

955          Ictericum dicit Galienus tollere morbum

illius semen cum vino saepius haustum.

Suivant les médecins, l'arroche est froide au premier degré et humide au second. Prise comme aliment, elle est laxative ; cuite ou crue et appliquée en emplâtre, elle dissout toutes sortes d'endurcissements, guérit les cors, fait promptement tomber les ongles raboteux ; on ajoute même à ces propriétés celle de guérir le feu sacré. Un cataplasme composé d'arroche, de nitre, de miel et de vinaigre ; calme les ardeurs de la goutte. Galien dit que la graine de cette herbe, mêlée avec du vin, donne une boisson qui dissipe la jaunisse.

XXIX. CORIANDRUM.

XXIX. La coriandre.

Frigida vis herbae coriandri dicitur esse,

austeraeque simul quiddam virtutis habere

hanc Galienus ait, per quam depellere ventre

960          lumbricos tineasque solet, si trita bibatur

cum vino vel si mixto sumatur aceto.

Uva cum passa coriandrum melque jugatum

sedabunt varios superaddita trita tumores,

praecipue testes tumidos juvat hoc medicamen.

965          Illius semen ventrem stipare solutum

fertur, aquae junctum fuerit si saepius haustum.

Argenti spumam cerussae contere mixtam

his tritis succum coriandri junge et acetum,

quattuor his roseum miscendo jugabis olivum,

970          ista terendo simul pretiosum conficis unguen,

quo sacros ignes pellas calidosque tumores ;

si tibi difficilis confectio tanta videtur,

succus cum solo prodest commixtus aceto ;

aut si frumenti panis mundissima mica

975          jungitur huic succo sedat quemcunque calorem.

Huic succo si juncta fabae sit sola farina

et superaddatur scrophis medicabitur illis

et cedet fervens emplastro pustula tali.

A multis scriptum legitur : febris ante tremorem

980          si tria grana voret coriandri seminis aeger,

evadet febrem cui dat lux tertia nomen ;

praestat idem lectum coriandrum mane priusquam

sol surgat cervicali si subditur aegri.

Xenocrates scripsit totidem cessare diebus

985          menstrua quot mulier coriandri grana vorabit.

Assiduum quidam condemnant illius usum,

nempe putant mortem quemvisve parare dolorem.

La coriandre est une herbe froide qui, suivant Galien, a aussi une certaine âpreté, qui tue les ascarides lombricoïdes et autres vers intestinaux, lorsque, après l'avoir broyée, on la boit avec du vin ou du vinaigre. Cette herbe, pilée avec des raisins cuits au soleil et du miel, donne un cataplasme qui dissipe toutes sortes de tumeurs, et particulièrement le gonflement des testicules. Sa graine, mise dans l'eau et souvent prise en breuvage, arrête le flux de ventre. Broyez de la litharge avec de la céruse ; ajoutez-y du jus de coriandre et du vinaigre avec de l'huile de rose, et vous obtiendrez un précieux onguent qui a la vertu de guérir le feu sacré et les inflammations les plus vives. A défaut de ce remède, dont la composition peut paraître peu facile, on se bornera à mêler le suc de la coriandre avec du vinaigre. La mie de pain très blanc, associée au suc de coriandre, donnera aussi un merveilleux topique contre toutes sortes d'inflammations. Ce même suc, mêlé seulement avec de la farine de fève, et appliqué en cataplasme, guérit les scrofules et éteint l'inflammation des pustules. Suivant plusieurs auteurs, trois grains de coriandre, pris avant le retour du frisson, ont la vertu de chasser la fièvre tierce. Cette herbe, cueillie avant le lever du soleil et placée sous l'oreiller d'un fébricitant, produit le même effet. Xénocrate a écrit que les règles des femmes tardent à venir autant de jours qu'elles ont mangé de grains de coriandre. Quelques médecins condamnent l'usage trop fréquent de cette herbe ; ils prétendent qu'elle peut causer la mort, ou du moins une infinité de maladies graves.

XXX. NASTURTIUM.

XXX. Le nasitort.

Dicunt ferventes quod habent nasturtia vires

et siccas ; hac re venerem ceu ruta coercent,

990          siccando semen, fuerint si sumpta frequenter.

Fermento commixta recens haec herba terendo

anthracas curat (bona quae plebs ulcera dicit)

si superaddatur ; curaque furunculus ista

emittit saniem cum qua dolor ille recedit.

995          Illius succus crines retinere fluentes

illitus asseritur, dentisque levare dolorem

de qua parte dolens dens est infusus in aurem.

Fortius est herba semen : depellit abortum

haustum cum vino, ventrisque animalia pellit

1000        et sic serpentis dicunt obstare venenis ;

solus odor positi carbonibus effugat illas.

Splen reprimit, mixto si saepe bibatur aceto,

herbam vel semen cum polline junge et aceto,

haec contrita simul sciasis superadde dolori,

1005        utile non modicum confirmant hoc medicamen.

Lichenas succus purgat cum melle perunctus ;

si prurigo caput aut ulcera turpia foedant,

anseris admiscens adipi nasturtia trita

saepius unge caput, vitium pelletur utrumque.

1010        Si coquis hanc herbam caprae cum laete recenti

illius aut semen, dolor angat pectora quisquis,

assumpto tepido potu sedabitur isto.

Semen cum tepida contritum pondere dragmae

et bibitum, dicunt quod duram molliat alvum ;

1015        tussim compescit semen cum melle voratum.

Le nasitort passe pour être à la fois chaud et sec ; aussi sa graine desséchée a-t-elle la vertu d'apaiser, comme la rue, les ardeurs érotiques. Elle produit cet effet chez ceux qui en prennent souvent. Broyée toute fraîche et mêlée avec du levain, cette herbe donne un cataplasme qui guérit l'anthrax que le peuple appelle bénin ; elle fait aboutir les furoncles, dont elle dissipe la douleur par l'établissement de la suppuration. On prétend qu'en se frottant la tête avec le suc du nasitort, on arrête la chute des cheveux. On apaise aussi le mal de dents en injectant ce suc dans l'oreille, du côté de la joue où l'on souffre. Sa graine a des propriétés plus énergiques encore. Prise en boisson dans du vin, elle facilite l'expulsion du foetus mort dans la matrice, et fait périr les vers intestinaux. On lui accorde aussi la vertu de neutraliser l'effet de la morsure des serpents. L'odeur de cette graine placée sur les charbons ardents, suffit pour les mettre en fuite. Prise plusieurs fois en potion dans du vinaigre, elle remédie aux douleurs de rate. Le nasitort ou sa graine, mêlé avec du vinaigre ou de la fleur de farine, la feuille ou la graine du nasitort donne un cataplasme qui est très efficace contre les douleurs de la sciatique. Son jus, combiné avec du miel, et employé comme onguent, dissipe les maladies de la peau. Le nasitort, broyé avec de la graisse d'oie, si l'on s'en frotte souvent la tête, en apaise les démangeaisons ou cicatrise les humeurs qui y ont leur siège. Sa feuille ou sa graine, cuite dans du lait frais de chèvre, donne un breuvage qui, pris tiède, calme les douleurs de la poitrine. En broyant une drachme de sa graine dans de l'eau tiède, on obtient une boisson qui relâche le ventre. La même graine prise avec du miel apaise la toux.

XXXI. ERUCA.

XXXI. La roquette.

Erucam calidam dicunt mediocriter esse,

siccam non adeo. Cibus ejus digerit escas

et valet urinas haec mansa vel husta movere.

Manditur utiliter pueris, tussimque repellit,

1020        emundare cutem maculis cum melle iugatam

tradunt et mundos lentigine reddere vultus.

Elixata prius radix valideque subacta

ossibus et fractis superaddita detrahit illa.

Cum vino tritum si semen sumitur ejus

1025        quosvis pestiferos ictus curare refertur.

Haec nigras maculas purgat cum felle bovino

illita. Mira loquar, cum vino largius haustam

indurare ferunt hanc contra verbera sensum.

Si condituris coquus hanc admisceat herbam

1030        aut semen, gratum dicunt praestare saporem,

euzomonque solent hac causa dicere Graeci

erucam, succus quod gustu sit bonus ejus.

Non modice mansam venerem stimulare vel haustam

confirmant pariter medici pluresque poetae.

1035        Est cum lactucis haec herba comesta salubris,

namque calor dat temperiem cum frigore mixtus.

La roquette est d'une nature médiocrement chaude, mais plus chaude que sèche. Prise en boisson ou comme aliment, elle est digestive et diurétique. C'est un aliment salutaire pour les enfants. Elle chasse la toux. Associée au miel, elle fait disparaître les taches de la peau et dissipe les éphélides du visage. Cuite et réduite en pâte, elle donne un cataplasme qui est très efficace contre les fractures. Sa graine, broyée dans du vin et administrée en hoisson, guérit, dit-on, les blessures les plus dangereuses. Mêlée avec du fiel de boeuf, et employée en friction, cette herbe a la vertu de dissiper les taches noires. On dit -chose merveilleuse !- que, prise à haute dose dans du vin, elle rend le corps insensible aux coups. La feuille ou la graine de roquette, employée comme assaisonnement, donne aux mets un goût fort agréable. C'est en raison de son excellente saveur que les Grecs ont donné à cette plante le nom de εὔζωμον. Les médecins et plusieurs poètes prétendent que, prise en grande quantité, soit en boisson, soit comme aliment, elle porte à l'amour. Mangée avec de la laitue, elle est salutaire, à cause de l'heureuse combinaison qui résulte du mélange du chaud et du froid.

XXXII. PAPAVER.

XXXII. Le pavot.

Dicunt vim gelidam siccamque papaveris esse,

tres illi tribuuut species : flos unius albus,

alterius roseus, rubeus pallensque minoris

1040        Flos est, hanc vulgo dicunt agreste papaver.

Cunctis nobilior est cui flos nascitur albus ;

ex hujus teneris opium faciunt capitellis,

incisa leviter summa cute, lacque quod inde

defluit, excipiunt cochleis, siccumque reservant,

1045        antidotis multis aptum variisque medelis.

Sunt, qui contundunt cum lacte suo capitella,

de quibus expressum siccant in sole liquorem ;

post primum succus vires habet iste secundas.

De specie vero, roseos quam gignere flores

1050        Dixi, conficiunt oleum de semine tuoso

non modicum gustu jocundum somniferumque.

Tertia, cui flos est rubeus semenque nigellum,

praestat, si bibitur, reliquarum more soporem.

Elixatura tepida cujuslibet harum

1055        aeger si foveat faciem, vel si bibat illam,

optatum capiet, nisi sit mors proxima, somnum.

Sperma nigri bibitum cum vino stringere ventrem

dicitur, hocque modo fluxus inhihet muliebres ;

somnum dat bibitum, tussim compescit iniquam.

1060        Pondere denarii debent haec semina sumi,

nam plus letargum vel mortem saepius infert.

De foliis ejus tritis factum cataplasma

eximie fauces dicunt curare tumentes,

quosque vocant sacros extinguere dicitur ignes ;

1065        frigore vel cantu, potuve, cibove, vel aestu

aspera si fuerit vocalis reddita vena,

apposito tali fiet medicamine lenis.

Candida meconii species (sic nempe vocari

Graecorum lingua dicunt quodcunque papaver)

1070        longe nobilior est utiliorque duabus ;

tunc cum lacte fluunt capitella papaveris hujus

lecta coquantur aqua, cui sit pars tertia mellis

addita, cuncta coquas, donec decoctio spissa

sit quasi mel, varios sic conservetur ad usus :

1075        sumpta facit somnum, tussim fugat, abstinet alvum,

vocalis venae bene rheumatismata siccat.

EJus de teneris opium factum capitellis,

sicut jam docui, roseo miscebis olivo,

unge caput mixtis, sedabitur his dolor omnis

1080        et solet hoc unguen somni praestare quietem.

Praedictis admisce croci redolentia fila,

auris curabis haec infundendo dolorem ;

hoc quoque femineo cum lacte crocoque subacto

ungendo calidam poteris sedare podagram ;

1085        ano suppositum solet hoc adducere somnum,

istud idem solo praestare putatur odore.

Le pavot est d'une nature à la fois froide et sèche : on en distingue trois espèces. La fleur de la première est blanche ; celle de la seconde est rose ; la troisième espèce, plus petite que les deux autres, et appelée vulgairement pavot agreste, produit une fleur d'un rouge pâle. Celle dont la fleur est blanche est la plus connue. C'est de la tête encore tendre de cette espèce de pavot, qu'on tire l'opium. Une légère incision en fait écouler une sorte de lait qu'on recueille dans des coquilles de limaçons, et qui, desséché, devient un produit qui entre dans plusieurs antidotes et dans une infinité de remèdes. On broie aussi les têtes avec leur lait et, cela fait, on en exprime le jus, qu'on fait sécher au soleil ; mais cette liqueur est moins efficace que celle obtenue par le premier procédé.

Quant à l'espèce dont la fleur est rose, on extrait de sa graine broyée une huile assez abondante, dont le goût est très agréable, et qui est somnifère.

Celle dont la fleur est rouge et la graine noire donne une boisson somnifère, comme les deux autres.

Une décoction tiède de l'une quelconque de ces espèces, employée en fomentation sur le visage, ou comme boisson, procure le sommeil au malade ; mais il ne faudrait pas administrer ce remède s'il y avait danger de mort. La graine noire, dans du vin, donne une boisson qui arrête la diarrhée et la ménorragie, et apaise les toux rebelles. Il faut avoir soin que la quantité de la graine de pavot à prendre n'excède pas le poids d'un denier ; car au delà elle cause la léthargie et plus souvent la mort. Un cataplasme de feuilles broyées de cette plante est très efficace contre les tumeurs du gosier, et contre cette maladie qu'on appelle feu sacré. Lorsque la voix se trouve altérée soit par le froid, par le chant, par la boisson, par les aliments, ou par la chaleur, cette sorte de cataplasme a aussi la vertu de lui rendre sa pureté.

Le méconium à fleurs blanches (μηκώνιον est le nom que les Grecs donnent indistinctement à toutes les espèces de pavots) est beaucoup plus renommé et plus efficace que les deux autres. Un certain nombre de têtes de pavots, cuites, lorsqu'elles sont encore laiteuses, dans de l'eau édulcorée avec un tiers de son poids de miel, jusqu'à ce que cette décoction se trouve réduite à l'épaisseur du miel, donnent un médicament qui a une infinité de vertus. Il est somnifère ; il apaise la toux, arrête la diarrhée et dissipe les catarrhes des voies aériennes. L'opium extrait des jeunes têtes de pavots, comme je l'ai dit plus haut, mêlé à l'huile de rose et employé en liniment, apaise les douleurs de tête et procure le sommeil. En ajoutant à ce mélange les filaments parfumés du safran, on obtient un médicament qui, employé en injections, est très bon contre les douleurs d'oreilles. Combiné avec du lait de femme et du safran broyé, el employé en frictions, l'opium calme les ardeurs de la goutte ; appliqué à l'anus, il procure le sommeil. L'odeur seule de l'opium passe pour être soporifique.

XXXIII. CEPA.

XXXIII. L'oignon.

De cepis medici non consentire videntur :

namque Dioscorides inflare caputque gravare

atque sitim cepas dicit succendere mansas,

1090        fellitis non esse bonas inquit Galienus,

flegmaticis vero multum putat esse salubres ;

non modicum sanas Asclepius asserit illas

praesertim stomacho, pulchrumque creare colorem

affirmat, quoties aliquis conspexerit illas ;

1095        et dicit : quisquis jejunia solverit illis

unaquaque die, quod vivet hic absque dolore.

Affirmant omnes mansas inferre soporem,

et dicunt illas mollire salubriter alvum ;

appositas perhibent morsus curare caninos,

1100        si tritae cum melle prius fuerint vel aceto ;

apponunt alii cum vino melleque coctas,

transactisque tribus solvunt cataplasma diebus.

Sal, rutam cepasque Dioscorides jubet anguis

morsibus apponi, sic asserit ille juvari.

1105        Femineo lacti commixtus succus earum

pellit saepe graves infusus ab aure dolores ;

hic succus commixtus aquae bibitusque juvabit

illos, quos subitus facit obmutescere morbus.

Naribus attractos harum tantummodo succus

1110        humores nocuos capitis deponere cogit ;

mansae vel potae tardantia menstrua purgant.

Triturasque pedum, soleae quas vel caligarum

duriciae faciunt, succo sanabis eodem,

cum gallinarum pingui si saepe perungas.

1115        Mane sibi dentes qui succo perfricat isto,

dicunt hunc dentis nunquam sentire dolorem ;

ulcera compescunt oris cum pane comestae,

intingens oleo coctas qui sumpserit illas,

sedat quos intus dat dysenteria morsus.

1120        Contritis cepis loca denudata capillis

saepe fricans capitis poteris reparare decorem ;

oris foetori prosunt, fastidia tollunt,

hasque jubent haemorrhoidis superaddere tritas.

Illarum succus caligine lumina purgat

1126        admixtus melli, maculas quoque junctus aceto

emundare solet, si sint hoc saepe fricatae.

Les médecins ne s'accordent pas sur les vertus de l'oignon. Suivant Dioscoride, il enfle et alourdit la tête, ou excite la soif chez ceux qui en mangent. Galien prétend qu'il est nuisible aux bilieux, mais qu'il est très salutaire aux flegmatiques. Esculape dit qu'il est sain, surtout pour l'estomac, et même que la vue seule de cette plante anime le teint de ceux qui la regardent. "Quiconque, dit-il, mange de l'oignon à jeun tous les jours, ne sera jamais malade tant qu'il vivra." Tous les médecins s'accordent à dire que l'oignon est un aliment somnifère, et qu'il relâche salutairement le ventre. Broyé avec du miel ou dans du vinaigre, il donne, dit-on, un cataplasme qui cicatrise les morsures des chiens. Suivant d'autres, pour obtenir le même effet, il faut le faire cuire avec du vin et du miel, et laisser le cataplasme sur la plaie pendant trois jours. Dioscoride recommande comme très efficace contre les morsures des serpents un cataplasme composé d'oignon, de rue et de sel. Mêlé avec du lait de femme et injecté dans l'oreille, le jus d'oignon en dissipe ordinairement les douleurs les plus violentes. Mêlé avec de l'eau et pris en boisson, ce suc remédie aux extinctions subites de la voix. Aspiré par les narines, il en fait écouler les mauvaises humeurs. Pris en boisson ou comme aliment, l'oignon est un puissant emménagogue. Le jus d'oignon, mêlé avec de la graisse de poule, et employé à plusieurs reprises comme onguent, cicatrise les écorchures que les sandales ou les bottines causent quelquefois aux pieds. On prétend que celui qui s'en frotte les dents le matin, n'est jamais exposé à l'odontalgie. Mangé avec du pain, l'oignon cicatrise les ulcères de la bouche. Trempé et cuit dans l'huile, il apaise les douleurs que la dyssenterie cause dans les entrailles. En se frottant souvent la tête avec de l'oignon broyé, on peut faire renaitre les cheveux aux endroits qui en sont dépouillés. Il ôte la mauvaise haleine, et dissipe les dégoûts. Les médecins recommandent les topiques d'oignon pilé contre les hémorroïdes. Le jus d'oignon, uni au miel, éclaircit la vue, et, mêlé avec du vinaigre et souvent employé en friction, fait disparaître les taches de la peau.

XXXIV. BUGLOSSA.

XXXIV. La buglose.

Lingua bovis graeco sermone buglossa vocatur,

haec choleram rubeam nimio fervore perustam

purgat, cum vino fuerit si sumpta frequenter ;

1130        cardiacum, cholerae quem fecit copia nigrae,

consimili potata modo curare valebit ;

humores nocuos pulmonis detrahit hausta.

Mixtus aquae tepidae si succus sumitur ejus,

illi, qui patitur sciasim, mire medicatur.

1135        Vim memorem cerebri dicunt servare periti

vinum potatum., quo sit macerata buglossa

laetos convivas decoctio dicitur ejus

reddere, si fuerit inter convivia sparsa.

La buglose (nom grec qui signifie langue de boeuf) est une herbe qui, souvent prise avec du vin, chasse la bile rouge et recuite, et remédie aussi aux faiblesses d'estomac causées par la surabondance de la bile noire. Elle dissipe encore les humeurs nuisibles du poumon. Le jus de cette herbe, pris dans de l'eau tiède, est d'une merveilleuse efficacité contre la sciatique. Broyée dans du vin, la buglose a, suivant un grand nombre de personnes qui en ont fait l'épreuve, la vertu de conserver la mémoire. On dit qu'une décoction de cette herbe, répandue  à table, anime la joie des convives.

XXXV. SINAPI.

XXXV. Le sénevé.

Inter eas, quas Pythagoras laudaverat herbas,

1140        asseritur primam laudem tribuisse sinapi ;

quartus ei gradus est in vi sicca calidaque.

Extrahit humores viscosos extenuatque,

comburitque cutem, vis est sibi tanta caloris,

major vis ejus in semine dicitur esse.

1145        Sensus exacuit cibus ejus, commovet alvum,

confringit lapides, urinam et menstrua purgat.

Si tritum jungas tepidae versesque palato

ad solem capitis purgabit flegma nocivum.

Sternutamentis hoc admiscere salubre est,

1150        illo nam capitis strictura resolvitur omnis.

Mansum confortat stomachum, suspiria sedat ;

morsus serpentum, tritum si mergis aceto

et superapponis, tali medicamine curas ;

mansum pestiferos vetat intima laedere fungos.

1155        Vi nimium fervente cutem comburere dixi,

sed tamen haec multis est utilis ustio causis :

hac oculis nocuus capitis siccabitur humor,

et qui destillans pulmonum concava laedit,

et stomachi morbosque creat, tussimque phthisimque ;

1160        hac per vesicas coxae dolor inveteratus

elicitur, sciasim quod graeco nomine dicunt ;

hacque tumor splenis durus jecorisque fugatur

et multum causis haec subvenit inveteratis.

Utile tot causis quoniam cataplasma sinapis

1165        saepius a medicis variatur conficiendo,

dicam qualiter hoc fieri jubeat Menemachus :

in mortariolo tritum bene pone sinapis

semen, jungatur huic panis candida mica,

sic ut tertia sit panis pars juncta sinapi,

1170        his ficus siccas et mel jungas et acetum,

aetatis quantum vel morbi causa requirit,

nam quo plus ficus siccae vel mellis habebit,

ille sinapismus tanto solet acrior esse,

debilior , quo plus panis mittes et aceti.

1175        Ne tibi sit vilis, moneo, confectio talis,

effectum cujus in multis saepe probavi ;

non tamen hanc jubeo cunctis apponere morbis,

sed raro, magnis et causis inveteratis.

Plinius in musto cum semine praecipit hujus

1180        radices mergi, sic, postquam sumpserit harum

omnem vim, vinum multum putat esse salubre

faucibus et stomacho potatum, luminibusque,

pluribus et capitis dicit prodesse querelis.

Infuso faciunt oleum de semine quidam,

1185        utile lumborum vitiis, stupidis quoque nervis.

Exprimitur succus tenero de caule sinapis,

quem siccum mandens dentis tormenta fugabis.

Vocales venas semen lenire sinapis.

Mansum confirmant : adipi tundendo vetusto

1190        commixtum scrophas disperget, si superaddas ;

illius fumus multum prodesse caducis

dicitur atque sterae causas siccando juvare.

Cum ficu tritum capiti superaddere raso

his qui letargum patiuntur, magna medela est,

1195        vel si saepe pedes ungendo fricabis eorum.

Semen contritum melli conjunge vel uncto

istud alopeciis juvat unguen saepe fricando ;

acri cum vino lepras emundat inunctum.

Hoc quodque curatur manso periodica febris,

1200        antea quam diri veniat commotio morbi.

Entre les herbes dont Pythagore a fait l'éloge, le sénevé a le premier rang. Cette herbe a une force de chaleur et de siccité de quatrième degré. Elle chasse et dissipe les humeurs visqueuses. Elle est d'une nature si chaude, qu'elle brûle la peau. Sa force est surtout dans sa graine. Ingérée, elle aiguillonne les sens, relâche le ventre, brise la pierre, active la sécrétion de l'urine et facilite l'écoulement des règles. Broyée dans de l'eau tiède et employée en gargarisme au soleil, elle débarrasse du coryza. On l'emploie avec succès comme sternutatoire, car elle a la vertu de délivrer la tête de tout embarras. Pris comme aliment, le sénevé fortifie l'estomac et guérit l'asthme. Broyé, mis dans du vinaigre et appliqué sur la plaie, il neutralise l'effet de la morsure des serpents. Il est un contre-poison contre les mauvais champignons. Quoique cette herbe soit, comme je l'ai dit, extrêmement caustique et qu'elle brûle la peau, elle ne laisse pas d'avoir, par cela même, une infinité de vertus : elle dessèche les humeurs de la tête qui se jettent sur les yeux, et purge les poumons des mucosités qui les obstruent. Elle remédie aux affections de l'estomac, à la toux et à la phthisie. Elle guérit, par les vésicules qu'elle détermine sur la peau, les douleurs rebelles de la cuisse, que les Grecs appellent sciatiques. Elle dissipe les obstructions de la rate et du foie, et remédie, en général, à toutes les affections chroniques. Comme le sénevé s'emploie en cataplasme dans une infinité de cas, et que les médecins varient dans la confection de ce remède, je vais faire connaître la manière dont Ménémachus veut qu'on le prépare. Mettez dans un mortier de la graine de sénevé avec de la mie de pain dont la proportion soit d'un tiers ; joignez-y des figues sèches, du miel et du vinaigre, dont la dose soit en rapport avec l'âge du malade ou la nature du mal : car plus les figues et le miel abondent, plus le sinapisme est violent ; et si, au contraire, c'est le pain et le vinaigre qui dominent, il est moins mordant. Je vous conseille de ne point mépriser ce remède, car j'en ai souvent éprouvé l'efficacité. Je ne prétends pas, toutefois, qu'il soit un spécifique universel ; on ne doit, au contraire, y recourir que rarement, et seulement dans les maladies graves et invétérées. Pline recommande de détremper la racine et la semence de sénevé dans du vin miellé. Suivant cet auteur, le vin, après s'être emparé de leur principe salutaire, devient une boisson très efficace contre les maux de gorge et d'estomac, contre les affections des yeux et la plupart de celles qui affligent la tête. On tire aussi de sa graine une huile qui est bonne contre les douleurs des reins et l'engourdissement des nerfs. La tige tendre du sénevé donne un jus qui, sans aucun ingrédient, et employé comme gargarisme, apaise les maux de dents. On prétend que la graine de cette herbe a la vertu d'adoucir la voix de ceux qui en mangent. Mêlée avec du vieux oing et employée comme onguent, elle dissipe les scrofules. La fumée qu'exhale cette graine lorsqu'on la brûle soulage, dit-on, les épileptiques, et remédie, par sa siccité, aux affections hystériques. Broyé avec des figues et appliqué sur la tête rasée du malade, ou employée souvent en friction sur les pieds, le sénevé dissipe la léthargie. Triturée avec du miel ou du saindoux, il donne un onguent qui, souvent employé, remédie à l'alopécie ; mêlé avec du vinaigre et employé en lotions, il fait disparaître les dartres. Il chasse aussi la fièvre périodique, lorsqu'on a soin d'en manger avant le retour du frisson.

XXXVI. CAULIS.

XXXVI. Le chou.

Caulis romana, Graecorum brassica lingua

dicitur ; hic quamvis passim nascatur in hortis,

est tamen illius ad multa salutifer usus :

annis sexcentis usos medicamine caulis

1205        Romanos Cato testatur, medicina priusquam

a medicis Romae descripta fuisset in usu,

tunc hortus escas ilIis dabat et medicinas.

Vulnera non tantum curare recentia caulem

ipsemet affirmat, sed quamvis inveterata,

1210        et cancros etiam ; loca sed prius amne lavari

praceipit, aut vino tepido, sic denique crudum

unaquaque die bis tritum apponere caulem.

Hordea quam dederint cauli miscere farinam

idem praecepit, rutam quoque cum coriandro

1215        et sale permodico, sic omnia mixta terendo

apponi dirae docuit cataplasma podagrae,

hoc etiam morbis medicabitur articulorum,

hoc quoque syringas ait et luxata juvare,

atque superpositum varios sedare tumores.

1220        Illius urinam, fuerit qui caulibus usus,

causis nervorum calefactam censuit aptam ;

hac ex urina pueri si saepe laventur,

asserit illorum multum conferre saluti.

Haec caulis de laude Cato. Scripsisse libellum

1225        Chrisippum dicunt hujus de viribus herbae.

Omnes confirmant caligine lumina tergi,

ejus, qui viridi vescetur caule frequenter.

Auget lac mammis cibus ejus, menstrua purgat,

atque juvat stomachum sumptas ut concoquat escas ;

1230        si multum coquitur, restringere dicitur alvum,

at semicrudus solet illam solvere sumptus.

Assumptus crudus, sic ut tingatur aceto,

splen reprimit tumidum ; semen depellit abortum.

Uncto cum veteri coctos bene contere caules,

1235        his oleum roseum quantum res postulat addas,

ardores nimios juvat haec confectio febris,

si superaddatur stomacho membrove calenti.

Acri non scissum si jungis alumen aceto

et caules, sic ut corpus redigantur in unum,

1240        cuncta terendo diu potes his compescere lepras,

et plures alias maculas his saepe perungens,

his etiam crines poteris retinere fluentes.

Dicitur et testes istud curare tumentes

et varios morbos, genitalia quos patiuntur,

1245        et melius si praedictis faba cocta jugatur.

Cum fenugraeco si tundas hunc et aceto,

et super arteticos apponas ista dolores,

multum subvenies illis, vitiisque podagrae

non modicum poterit istud cataplasma mederi.

1250        Uncto cum veteri caulis cineres bene triti

prosunt ad veteres lateris coxaeque dolores,

sit licet haec vilis, tamen est medicina salubris.

Si caulis semen mixto potatur aceto

pellere saepe solet animalia noxia ventris.

1255        Fit cinis ex siccis caulis radicibus ustis,

subditus hic uvam relevat siccando jacentem.

Dentibus attriti succum glutire virentis

affirmant raucae multum succurrere voci ;

naribus infusus succus purgat caput ejus.

1260        Qui prius est caules vix sentiet ebrietatem.

Evulsam caulis radicem, postea terram

quae non attigerit, collo Melicius inquit

suspensam cunctos uvae depellere morbos.

La plante à laquelle nous avons donné le nom de chou, s'appelle chez les Grecs brassica. Quoique ce soit une plante vulgaire de nos jardins, le chou ne laisse pas d'avoir un grand nombre de vertus salutaires. Suivant Caton, les Romains l'employèrent comme médicament pendant six cents ans. Ce ne fut que très tard que,la médecine a été chez eux réduite en art, et jusque-là ils se bornaient à demander aux légumes de leurs jardins des secours contre les maladies du corps. Caton prétend que le chou cru, broyé et employé en cataplasme, a la vertu de cicatriser les .blessures, même invétérées, ainsi que les affections cancéreuses. Il recommande de laver d'abord la plaie avec de l'eau ou du vin tiède, avant d'y appliquer le topique, qui doit être renouvelé deux fois par jour. Broyé avec de la farine d'orge, de la rue, de la coriandre et un peu de sel, le chou donne un cataplasme très efficace contre les douleurs aiguës de la podagre, contre l'arthritis, les fistules, les luxations et toutes sortes de tumeurs. L'urine de ceux qui ont mangé du chou, contient une chaleur convenable à la guérison des maux de nerfs. Il est bon de frotter souvent les enfants de cette urine, dans l'intérêt de leur santé. Telles sont les propriétés que Caton attribue au chou. On dit que Chrysippe a écrit un livre sur les vertus de cette plante. Tous les auteurs s'accordent, à dire que le chou, mangé dans sa verdeur, contribue à éclaircir la vue. Il rend le lait des femmes plus abondant, et facilite chez elles l'écoulement périodique du sang ; il est stomachique et aide à la digestion. Bien cuit, il resserre, dit-on, le ventre ; à moitié cuit, il le relâche. Mangé cru et arrosé de vinaigre, il dissipe les obstructions de la rate. Sa graine facilite l'expulsion du foetus mort dans la matrice. Broyé et cuit avec du vieux oing, additionné d'une quantité d'huile de rose, le chou a la vertu d'apaiser les ardeurs immodérées de la fièvre. Il faut alors l'appliquer en cataplasme sur l'estomac ou sur la partie la plus brûlante du corps. Broyé et combiné avec de l'alun de roche et du vinaigre, on obtient une pâte qui fait disparaître les dartres et autres affections de la peau. Le même remède empêche la chute des cheveux, dissipe l'enflure des testicules et remédie aux diverses maladies qui attaquent les parties génitales. Il est plus efficace dans ce dernier cas, si aux ingrédients ci-dessus on ajoute des fèves cuites. Un cataplasme de chou, de fenugrec et de vinaigre est très efficace contre les douleurs des articulations et contre la goutte. La cendre du chou, bien triturée avec du vieux oing, n'est pas moins bonne contre les douleurs du côté ou la sciatique. Ce remède, quoique d'une nature fort commune, ne laisse pas d'avoir son efficacité. La graine de chou, mêlée avec-du vinaigre, donne une boisson qui détruit les vers qui s'engendrent dans les intestins. Sa racine sèche et brûlée produit une cendre qui, appliquée sur la luette, a, par sa siccité, la vertu de la relever. Les médecins conseillent de mâcher des feuilles vertes de chou et d'en avaler le jus, comme un moyen très propre à dissiper l'enrouement. Injecté dans les narines, le jus de cette plante purge la tête. L'ivresse a peu de prise sur ceux qui ont la précaution de. manger du chou avant boire. Suivant Melicius, une racine de chou suspendue au cou guérit toutes les affections de la luette ; mais il faut prendre garde que cette racine ne touche la terre après avoir été arrachée.

XXXVII. PASTINACA.

XXXVII. Le panais.

Est pastinacae virtus in semine tantum

1265        et radice sua ; mulsa si decoquis ejus

radices, multum decoctio proderit ejus,

si potanda datur, splenis jecorisque querelis,

lumborumque levat eadem potata dolorem.

Hanc si lacte coquas, decoctio sumpta juvabit

1270        asthmaticos quamvis veteres ventresque fluentes.

Radix illius collo suspensa tumores,

ut quidam dicunt, compescit testiculorum ;

qui pastinacam fert aut qui mandidit illam,

dicitur a nullo serpentum posse noceri.

1275        Accendit venerem si large sumitur illa.

Si circumscalpis dentes radicibus ejus,

dicunt ingenti persaepe dolore levari,

ex vino pastinacae si sperma bibatur,

compescit diros, quos scorpius intulit, ictus.

1280        Sic quoque feminei ventris curare tumorem

dicunt, quo mulier quasi praegnans esse videtur.

Appositum cancris tritum cum melle medetur.

Quod pastum tribuat est pastinaca vocata,

namque cibum nullae radices dant meliorem.

La vertu du panais réside seulement dans sa graine et dans sa racine. Bouillie dans du vin miellé, sa racine donne une décoction très efficace contre les affections de la rate et du foie, et contre les douleurs des lombes. Bouillie dans du lait, elle donne une boisson très bonne contre l'asthme invétéré et la dyssenterie. Sa racine, suspendue au cou, apaise, dit-on, les douleurs des testicules. Soit qu'on en mange, soit qu'on en porte sur soi, le panais est un talisman contre les serpents. Il porte à l'amour ceux qui en mangent abondamment. En se frottant les gencives avec sa racine, on parvient très souvent à se guérir du mal de dents le plus violent. La graine de panais, bue avec du vin, neutralise l'effet funeste de la piqûre du scorpion, et dissipe chez les femmes cette enflure du ventre qui ressemble à la grossesse. Broyée avec du miel et employée comme topique, elle guérit les affections cancéreuses. Le nom de pastinaca dérive de pastus (pâture), parce que nulle autre racine ne donne un aliment qui lui soit comparable.

XXXVIII. ORIGANUM.

XXXVIII. L'origan.

1285        Origani vires calidae siccaeque leguntur,

tertius huic in utroque gradus conceditur esse.

Illius in vino curat decoctio sumpta

quosvis pestiferos morsus, si saepe bibatur ;

cum mulsa sumptum prodest aconita bibenti,

1290        sic multis aliis dicunt obstare venenis.

Conquassata juvat mansum vel saepius haustum,

hydropicos reprimit bibitum siccatque tumores.

Cum mulsa bibitum choleram deponere nigram

dicunt, oxifali fuerit si pondere sumptum.

1295        menstrua reducet bibitum vel si superaddas

tritum, vel cocta mulier si se fovet herba.

Illius pulvis tussim cum melle repellit ;

pruritus, achoras maculasque cutis fugat omnes,

in quo decoquitur si saepius amne laventur ;

1300        in lavacro juvat ictericos haec coctio sumpta ;

succus praedictae viridis si sumitur herbae,

uvas et fauces curat siccando tumentes ;

oris vulneribus medicabitur ore retentus ;

naribus infusus irino mixtus olivo

1305        invisum capiti coget manare cruorem ;

auribus infusus sedat cum lacte dolorem ;

hic succus mixtus cepis et rhô syriaco

ponitur ad solem tunc quando Sirius ardet,

sicque quaterdenis fervebit in aere diebus,

1310        si supponatur lecto confectio talis,

effugat (ut dicunt) animalia cuncta nociva.

His quibus ex aliquo vitio digestio tarda

evenit, ex vino prodest si sumitur albo ;

cum calida morsus stomachi lenire probatum est.

1315        Illius succos oleo mixtos et aceto

succida lana bibat, et sic superaddita membris

luxatis et contusis multum juvat ilia.

Provocat urinam, lumbricos projicit haustum,

dente diu tritum solet inde fugare dolorem.

1320        Omnia potatus succus juvat interiora ;

ejus cum succo si carica trita bibatur,

sudorem poris producere fertur apertis,

appositus coxis succus cum polline farris

harum saepe gravem pellit reprimitve dolorem.

On s'accorde à reconnaître à l'origan une force de chaleur et de siccité du troisième degré. Une décoction de cette plante dans du vin donne un breuvage dont l'usage neutralise l'effet de toutes les morsures venimeuses. Prise avec de l'hydromel, cette plante est un antidote très efficace contre les ingestions d'aconit et d'un grand nombre d'autres poisons. Mangé ou pris en boisson, l'origan remédie aux fractures. Sous cette dernière forme, il dissipe l'hydropisie et sèche les tumeurs. Bu avec de l'hydromel, à la dose d'un oxifale, il chasse la bile noire. Administré soit en boisson, soit en topique, soit en fomentation, après avoir été broyé ou cuit, il rappelle l'écoulement périodique du sang chez les femmes. Sa poudre, mêlée avec du miel, apaise la toux. L'eau dans laquelle cette plante a bouilli devient une fomentation qui éteint les démangeaisons, et fait disparaître les achores et toutes les taches de la peau. Un bain pris dans cette même eau dissipe la jaunisse. Le jus de cette herbe, broyée toute fraîche, a, par sa siccité, la vertu de guérir les enflures de la luette et du gosier. Comme gargarisme, il remédie aux plaies de la bouche. Injecté dans les narines avec de l'huile d'iris, il purge la tête du mauvais sang qui la surcharge. Injecté dans l'oreille avec du lait, il en apaise les douleurs. En mêlant ce jus avec de l'oignon et du sumac de Syrie, puis en faisant chauffer ce mélange au soleil, au temps de la canicule, pendant quarante jours, dans un vase d'airain, on obtient une préparation qui, placée sous le lit, en chasse, dit-on, toutes les bêtes nuisibles. Les personnes dont la digestion est devenue laborieuse pour une cause quelconque, se trouveront bien d'en boire avec du vin blanc. Avec de l'eau chaude, il apaise les coliques d'estomac. Un flocon de laine en suint imbibé de jus d'origan, d'huile et de vinaigre, et appliqué sur la partie malade, est très efficace contre les luxations et les contusions. Pris en boisson, l'origan est diurétique et anthelminthique. Mâché pendant un certain temps, il apaise le mal de dents. Le jus de cette plante est une boisson qui remédie à toutes les affections intérieures. Mêlé avec des figues sèches broyées, il est sudorifique. Combiné avec de la fleur de farine et employé comme cataplasme, il dissipe souvent ou apaise les redoutables douleurs de la sciatique.

XXXIX. SERPILLUM.

XXXIX. Le serpolet.

1325        Serpillum veteres dixerunt, quod quasi serpat

terrae vicinum ; huic fervida siccaque vis est.

Acri cum vino coctum contundis ulivo,

cui rosa dat nomen, hoc unguine perline frontem

aegroti, capitis solet hoc sedare dolorem.

1330        Nidor combusti serpentes effugat omnes

et quodvis animal infundens ore venenum ;

hoc ideo miscere cibis messoribus est mos,

ut si forte sopor fessos depresserit illos,

vermibus a nocuis tuti requieseere possint ;

1335        pestiferos morsus bibitum juvat appositumque.

Provocat urinas, compescit tormina ventris,

splen juvat, admixto si saepe bibatur aceto ;

si mel praedictis jungatur, sputa eruenta

jactantes mire potus solet ille juvare ;

1340        Haustum cum vino jecoris sedare dolorem

dicitur, hicque solet producere menstrua potus.

Les anciens ont donné au serpolet le nom de serpillum, parce qu'il rampe en quelque sorte sur la terre. Il est d'une nature à la fois chaude et sèche. Broyé et bouilli avec du vinaigre et de l'huile de rose, il donne un liniment qui apaise les douleurs de tête. L'odeur du serpolet brûlé met en fuite les serpents et toutes bêtes venimeuses. Les moissonneurs ont soin d'en mêler à leurs aliments, afin de pouvoir s'endormir sans crainte des insectes nuisibles. Pris soit en boisson, ou appliqué sur la partie lésée, il neutralise l'effet des morsures venimeuses. Macéré dans le vinaigre, il donne une potion qui, lorsqu'on en fait usage, active la sécrétion de l'urine, apaise les coliques et les douleurs de la rate. En ajoutant du miel à ces ingrédients, on obtient un breuvage très salutaire dans l'hémoptysie. Bu avec du vin, le serpolet apaise les douleurs du foie, et facilite l'écoulement périodique du sang chez les femmes.

XL. VIOLAE.

XL. La violette.

Nec roseus superare decor, nec lilia possunt

fragrantes violas specie, nec vi, nec odore.

Dicitur humida vis illis et frigida primo

1345        esse gradu ; species tres esse leguntur earum.

Noscere quas tantum diverso flore valemus :

nam sunt purpurei flores albique nigrique,

cunctis pene pares sunt in medicamine vires.

Inflammata juvant loca, tritas si superaddas ;

1350        crapula discutitur bibitis, capitisque gravedo

olfactu solo vel si caput inde coronas ;

anginis potae medicantur aqua resolutae.

Purpuream violam dicunt curare caducos

praecipue pueros, si mixto sumitur amne.

1355        Radices violae cum mirrha tunde crocoque,

hoc inflammatis oculis apponito nocte ;

contritis foliis violae cum melle perungens

ulcera sanabis capitis ; si jungis acetum

et cataplasma facis cedet collectio quaevis.

1360        Illius curat elixatura tumorem

matricis, tepida si saepe fovebitur illa ;

ani fissuras, quas appellant ragadias,

addita cerotis medicatur saepe perunctas ;

pustula si fuerit, melli superadde jugatam,

1365        illius semen cum vino menstrua purgat,

tritae commixto radices ejus aceto

splen siccant bibitae vel spleni si superaddas ;

hocque modo calidam dicunt sedare podagram.

A stomacho choleram rubeam potata repellit

1370        herba virens violae vel flos siccusve recensve,

morbos de cholera rubea vel sanguine factos,

mollibus in costis aut in pulmonibus ipsis,

sedat si mixto potabitur amne recenti ;

infantum tussim sic et suspiria sedat.

1375        Ex violis oleum sicut de flore rosarum

conficiunt, multis quod dicunt utile causis,

auribus infusum sonitum fugat atque dolorem,

et capiti prodest, quocunque dolore laboret,

leniter infrigidans corpusque sopore resolvens,

1380        lumbricos necat infusum bibitumve vel unctum,

et capitis furfur oleo depellitur isto.

Os capitis ictu fuerit si forte plicatum

in tantum, ut linguae patiens amiserit usum,

fac prius hanc violam cum vino sumere tritam,

1385        postea, si fuerit capitis pars dextera laesa,

contritam plantae pedis hanc adnecte sinistri,

atque e converso facias si laeva plicata est :

os resilit, linguaeque die redit usus eadem,

ut Justus tradit medicus, qui talia scripsit.

1390        Altera vis violae fertur mirabilis esse :

albae si violae radix teneatur in ore

et transglutitus sit succus saepius ejus,

vulneris immodicum tradunt mox sistere fluxum,

hanc liquiritiae tradit vim Plinius esse.

La violette ne le cède en rien à la rose ou au lis, ni pour la beauté, ni pour l'odeur, ni pour les propriétés. Elle est humide et froide au premier degré. On en distingue trois espèces, dont chacune se reconnaît à la couleur de sa fleur, qui est blanche ou noire ; mais ces trois espèces ont toutes à peu près les mêmes vertus médicales. Broyées et appliquées en cataplasme, elles apaisent les inflammations. Elles donnent une boisson qui dissipe l'ivresse. L'odeur seule de la violette suffit pour dissiper la pesanteur de tête. On obtient le même effet en se couronnant le front de cette fleur. Une infusion de violette remédie à l'angine. La violette pourpre, macérée dans l'eau, donne un breuvage qui passe pour avoir la vertu de soulager principalement les enfants épileptiques. La racine de violette, broyée avec de la myrrhe et du safran, et appliquée pendant la nuit sur les yeux, en dissipe l'inflammation. Broyées avec du miel et employées comme onguent, ses feuilles cicatrisent les ulcères de la tête. En ajoutant du vinaigre, on obtient une mixtion qui, employée comme cataplasme, guérit toutes les collections purulentes. Une décoction de violette employée souvent en fomentation, dissout les tumeurs de la matrice. Un onguent composé de cire et de violettes, souvent appliqué sur la partie affectée, remédie aux crevasses de l'anus qu'on appelle rhagades. S'il y a pustule, il faut ajouter du miel. La graine de violette macérée dans le vin facilite l'écoulement périodique du sang chez les femmes. Broyée dans du vinaigre, et administrée en potion ou en topique, la racine dissout les engorgements de la rate et les ardeurs de la goutte. L'herbe verte ou la fleur sèche ou fraîche de la violette donne une boisson qui purge l'estomac de la bile rouge, et dissipe les affections causées par cette bile ou par le sang épanché sous les fausses côtes ou dans les poumons. La même boisson apaise la toux ou l'asthme chez les enfants. On fait avec la violette, comme avec la rose, une huile qui a une infinité de vertus. Injectée dans l'oreille, elle en dissipe le tintement et la douleur ; en contribuant à refroidir un peu la tête, elle remédie aux affections diverses auxquelles elle est sujette ; elle ranime le corps languissant ; elle fait périr les ascarides lombricoïdes, soit qu'on l'emploie en lavement, en boisson ou en fomentation ; elle fait tomber aussi la crasse farineuse de la tête. Si la tête a été atteinte d'un coup qui, en contractant la bouche, fasse perdre l'usage de la langue, on boira d'abord du vin où l'on aura broyé de la violette ; puis, si c'est le côté droit de la tête qui a été lésé, on appliquera sur la plante du pied gauche un cataplasme de cette fleur broyée ; si la contusion existe du côté gauche, on placera le cataplasme sous le pied droit. Au moyen de cette médication, la bouche revient à son état naturel, et la langue reprend, le jour même, ses fonctions habituelles. Voilà ce qu'enseigne le médecin Justus dans ses écrits. On attribue encore à la violette un autre effet merveilleux : en avalant une certaine quantité de jus de racines de violette blanche, préalablement mâchées, on arrêtera promptement les hémorragies résultant d'une blessure reçue. Pline attribue cette vertu à la réglisse.

XLI. ARISTOLOCHIA.

XLI. L'aristoloche.

1395        Aristolochiae species tres dicimus esse,

longa prior, radix est cujus longa, vocatur.

Dicta rotunda sequens, quod sit radice rotunda,

tertia clematis graeco sermone vocatur,

viribus haec pene par dicitur esse rotundae.

1400        Omnes vim calidam siccamque leguntur habere,

in primo vis sicca gradu fervensque secundo.

Pestiferos morsus cum vino sumpta rotunda

curat et assumptis prodest sic hausta venenis,

hocque modo tardas educit sumpta secundas,

1405        cum pipere et mirrha putredine mundat ab omni

post partum potata steras, vel subdita tantum,

asthmaticis prodest et frigora sumpta repellit ;

pleureticos curat mixto si sumitur amne.

Quodlibet infixum superaddita trita repellit,

1410        vulnera cum mellis purgatque repletque liquore ;

quod si praedictis irim conjungis at inde

ungas gingivas, dentes putredine purgat.

Splenis duriciam solvit laterisque dolorem,

si mixta potatur aqua ; febresque malignas

1415        hoc potata modo fertur compescere mire.

Sic etiam spasmis super omnia subvenit hausta

et sedat diram sic saepius hausta podagram,

et morbum curare solet sic sumpta caducum,

et ventris nimium sic mitigat illa dolorem,

1420        et sic fit sumpta levior paralyticus illa.

Daemonium fumus depellere dicitur ejus,

infantes fumo tradunt hoc exhilarari.

Fistula curatur hujus radicibus herbae,

si bene purgatis ejus loca concava farcis ;

1425        singultus sumpta sedari dicitur illa.

Omnia longa potest quae dixi posse rotundam,

longa tamen vires habet illa debiliores,

unde quidem si defuerit quandoque rotunda

par pondus longae ponatur dimidiumque ;

1430        fomento longae prodest decoctio mire

matricum morbis humores extenuando

pingues, et purgat eadem si sumitur illas.

Plinius hanc formare mares cum carne bovina

appositam vulvae postquam conceperit inquit.

1435        Trita necat pisces, admixta calce, rotunda,

hanc ideo quidam terrae dixere venenum.

On distingue trois espèces d'aristoloches : l'une appelée longue, parce que sa racine est longue ; l'autre ronde, parce que sa racine est ronde ; la troisième, appelée clématite, de son nom grec κληματίς, possède à peu près les mêmes vertus que la seconde. Toutes les trois ont une siccité du premier degré, et une chaleur du second. Prise avec du vin, l'aristoloche ronde remédie aux morsures venimeuses, neutralise l'effet des poisons, et précipite l'arrière-faix. Prise avec du poivre et de la myrrhe, elle préserve, après l'accouchement, de toute putréfaction intérieure ; il suffit même, pour obtenir cet effet, de l'appliquer sous la matrice. Elle est également bonne contre l'asthme et les rhumes. Avec de l'eau, elle remédie à la pleurésie. Broyée et employée en topique, elle fait sortir les corps pointus qui auraient pu s'introduire dans l'épaisseur des tissus. Avec du miel, elle purifie et cicatrise les blessures. En ajoutant de l'iris, et en se frottant les gencives avec cette mixtion, on préserve les dents de la carie. Bue avec de l'eau, l'aristoloche dissipe les obstructions de la rate, les douleurs de côté, et est d'une merveilleuse efficacité contre les fièvres malignes ; elle dissipe aussi, mieux que tout autre remède, les spasmes, et les douleurs aiguës et la goutte, quand on en fait un long usage ; elle est de plus, souvent efficace contre l'épilepsie, calme les douleurs violentes des entrailles et ranime les membres des paralytiques. Sa fumée, dit-on, met en fuite le malin esprit, et égaye les enfants. Sa racine, pilée et introduite dans la plaie, a la vertu de cicatriser les fistules ; mais il faut avoir soin de la bien laver avant de s'en servir. Administrée à l'intérieur, elle arrête, dit-on, le hoquet. L'aristoloche longue a toutes les vertus de la ronde, mais à un moindre degré. C'est pourquoi, à défaut de cette dernière, il faudra employer la longue dans la proportion d'une demie en sus. Une décoction d'aristoloche longue, employée en fomentation ou en boisson, dissipe, d'une manière merveilleuse, les affections de la matrice, en débilitant les humeurs. Pline prétend que cette plante, combinée avec de la chair de boeuf, et appliquée sur la matrice après la conception, fait naître des enfants mâles. Broyée et mêlée avec de la chaux, l'aristoloche ronde tue les poissons : ce qui l'a fait appeler par quelques personnes poison de la terre.

XLII. MARRUBIUM.

XLII. Le marrube.

Marrubium nostri, dixerunt prassion Argi ;

hanc herbam medici calidam siccamque secundo

tradunt esse gradu ; decoctio totius berbae

1440        seminis aut ejus phthisicos mire juvat hausta,

pectoris haec varios compescit potio morbos,

et melius prodest, illi si jungitur iris ;

asthmaticos sic sumpta juvat tussimque repellit.

Accelerat partus eadem pellitque secundas ;

1445        si mel marrubio jungatur, vulnera purgat,

hocque modo curat, quae rodunt ulcera carnem ;

dicitur hoc bibitum lateris sedare dolorem.

Omnibus his succus siccatus proderit ejus ;

Illius succus cum vino melleve mixtus

1450        prodest luminibus caligine debilitatis ;

sic juvat ictericos injectus naribus idem,

auriculaeque gravem dicunt curare dolorem,

hunc mixtum roseo si fundas intus olivo.

Usum marrubii dicunt non esse salubrem

1455        his, qui vesicae morbo renumque laborant.

Le marrube, que les Grecs appellent πράσιον, est une plante à laquelle les médecins attribuent une force de chaleur et de siccité du second degré. Une décoction faite avec cette plante entière, ou seulement avec sa graine, est très bonne contre la phthisie et les diverses affections de la poitrine ; elle est encore plus efficace, si l'on y joint de l'iris. Cette mixtion dissipe aussi l'asthme et calme la toux. Elle facilite l'accouchement et précipite l'arrière-faix. Combiné avec du miel, le marrube déterge les blessures, et cicatrise les ulcères rongeurs. Pris en boisson, il apaise les douleurs de côté. Le jus desséché de cette plante est efficacement employé dans tous les cas que nous venons d'énumérer. Mêlé avec du vin et du miel, ce jus éclaircit la vue ; injecté dans les narines, il dissipe la jaunisse. Il remédie aussi aux douleurs d'oreille les plus violentes ; mais il faut pour cela le mélanger avec de l'huile de rose. Cependant le marrube est nuisible, dit-on, à ceux qui souffrent de la vessie ou des reins.

XLIII. IRIS.

XLIII. L'iris.

Iri dat florum nomen color ipse suorum :

coelestis similes sunt nempe coloribus iris.

Illyricam dicunt illam, quia plurima nasci

fertur in Illyria. Vis ejus sicca calensque

1460        dicitur atque gradum dant huic in utroque secundum.

Major vis hujus est in radicibus herbae,

has desiccandas, per frusta rotunda secatas,

sic ut se partes non tangant insere filo,

inque loco sicco fac suspendantur in umbra,

1465        vix aliter totum poteris servare per annum.

Cum vino sedant tussim, praebentque soporem,

si latitans intus sanies praecordia laedit,

pellitur illarum cum vino pulvere sumpto ;

cum mulsa bibitus choleram depellit iniquam,

1470        tormina commixto bibitus sedabit aceto,

hocque modo sumptis dicunt prodesse venenis,

spleneticis et contractis et frigore laesis

cum vino bibitus pulvis medicabitur ejus,

hocque modo sumptus tardantia menstrua purgat.

1475        Duricias stericas radicum coctio mollit,

si subtus tepida foveantur saepius illa ;

haec cum clysterio si sit subjecta per anum,

non modicum sciasis dicunt prodesse dolori ;

de radicibus his mixto collyria melle

1480        fiunt, quae vulvae pellunt subjecta secundas,

inque locis haec fixa cavis syringia curant.

Commixtus melli desiccat vulnera pulvis,

carneque nuda replet, si sit superadditus, ossa.

Pulveris ellebori pars tertia jungitur albi

1485        iris radicum tenui cum pulvere duplo,

pulvis uterque simul commixto melle ligatur,

hoc superappositum purgat lentigine vultum,

et papulas ejus istud cataplasma repellit.

L'iris doit son nom à la couleur de sa fleur, qui rappelle celles de l'arc-en-ciel. On lui donne l'épithète d'illyrique, parce qu'elle abonde, dit-on, en Illyrie. On lui attribue une force de chaleur et de siccité du second degré. Sa vertu réside surtout dans sa racine. Il faut, pour la dessécher, la couper en petits morceaux ronds, qu'on enfile en laissant entre eux un intervalle ; et la suspendre à l'ombre dans un lieu sec : faute de cette précaution, on a de la peine à la conserver pendant une année entière. Cette racine, macérée dans du vin, a la vertu d'apaiser la toux et de procurer le sommeil. Réduite en poudre et prise dans du vin, elle dissipe les humeurs cachées dans le diaphragme. Bue avec de l'hydromel, elle chasse la bile ; avec du vinaigre, elle apaise les coliques et neutralise l'effet des poisons. Bue avec du vin, la poudre d'iris remédie aux maux de rate, à la contracture, et aux maladies causées par le froid ; elle facilite aussi l'écoulement périodique du sang chez les femmes. Une décoction de racine d'iris, employée en fomentation, amollit la matrice. Prise en lavement, elle est très efficace contre les douleurs de la sciatique. Cette même racine combinée avec du miel, donne un médicament qui, introduit dans le vagin, fait sortir l'arrière-faix, et cicatrise les fistules où on le fait pénétrer. Réduite en poudre et mêlée avec du miel, cette racine donne un emplâtre qui dessèche les blessures et fait renaître la chair sur les os dénudés. En incorporant avec du miel un mélange composé d'une partie de poudre d'ellébore blanc et deux parties de poudre de racine d'iris, on obtient une sorte d'onguent qui fait disparaître du visage les taches de rousseur et les papules qui le déparent.

XLIV. ENULA.

XLIV. L'aunée.

Enula, quam Graecus elnam vocat eleniumque

1490        dicitur a medicis, est forma cognita cunctis.

Humida vis ejus et fervida dicitur esse,

humor habere gradum primum, fervorque secundum

dicitur. Illius decoctio menstrua purgat

si bibitur, movet urinam, depellit abortum,

1495        dicitur haec eadem stipatum solvere ventrem.

Radix trita fugat sciasim superaddita coxae ;

ex ejus foliis cum vini nectare coctis

mire nefreticis renes involvere prodest.

Ejus radicum pulvis cum melle voratus

1500        tussim compescit, orthopnoicisque medetur ;

cum succo rutae succus si sumitur ejus,

affirmant ruptis quod prosit potio talis.

L'aunée, que l'on appelle communément elna, et que les médecins nomment helenium, est une herbe dont tout le monde connaît la forme. On lui attribue une humidité du premier degré, et une chaleur du second. Une décoction de cette herbe, prise en boisson, facilite l'écoulernent périodique du sang chez les femmes, active la sécrétion de l'urine, provoque l'expulsion du foetus mort dans la matrice, et passe pour relâcher le ventre. Broyée et appliquée sur la partie douloureuse, sa racine dissipe la sciatique. Un cataplasme de feuilles d'aunée cuites dans du vin, appliqué sur les reins, est très efficace contre la néphralgie. Réduite en poudre et incorporée avec du miel, sa racine devient un aliment qui apaise la toux et remédie à l'orthopnée. Le jus de cette herbe, mêlé à celui de la rue, est un breuvage efficace, dit-on, dans les cas de fractures.

XLV. YSOPUM.

XLV. L'hysope.

Est ysopum siccum calidum quoque, tertius illi

est in utroque gradus. Ejus decoctio facta

1505        sic ut cocta simul sint mel, ficus quoque sicca,

prodest non modicum patientibus hausta catarrhum,

subvenit et voci raucae versata palato,

et prodest cunctis pulmonum sumpta querelis ;

lumbricos ventris eadem potata repellit.

1510        In pectus capitis si destillatio fiat,

quod persaepe solet tussim phthisimque creare,

prodest haec eadem decoctio sumpta frequenter ;

omnibus his prodest pulvis cum melle jugatus.

Contrito viridi si jungitur oxymel illi,

1515        sicque datur bibitum, stipatum molliet alvum,

cum vento nocuo viscosum flegma repellens ;

cardama si jungas his, solves fortius alvum.

Potio si viridis vel sicci saepe bibatur,

vultibus eximium fertur praestare colorem ;

1520        cum nitro et ficu sicca si conteris ipsum,

et superapponis spleni cataplasma tumenti

hydropicisve, solet siccando repellere morbum ;

cum vino bibitum praecordia tensa relaxat,

et quicunque nocet tumor interiora recedet.

1525        In quo decoquitur si dens foveatur aceto,

fertur ab immodico cito saepe dolore levari.

Accensi fumo sonitos compescitur auris.

Elixum appositum livores limpidat omnes,

sic juvat ictericos injectum naribus idem.

1530        Auriculae dicunt gravem curare dolorem,

hoc mixtum roseo si fundis intus olivo.

L'hysope a une force de siccité et de chaleur du troisième degré. En faisant bouillir ensemble de l'hysope, du miel et des figues sèches, on obtient une boisson d'une utilité incontestée dans les catarrhes les plus violents et dans toutes les affections du poumon ; elle débarrasse, en outre, les intestins des ascarides lombricoïdes. Employée en gapgarisme, cette décoction dissipe l'enrouement. Prise souvent en breuvage, elle est également efficace contre·les humeurs qui descendent de la tête dans la poitrine, et qui produisent souvent la toux ou la phthisie. L'hysope réduite en poudre et incorporée avec du miel a les mêmes vertus. Broyée toute verte dans de l'oxymel, elle donne un breuvage qui relâche le ventre et chasse les vents et les humeurs visqueuses. Joignez-y du cardamome, et vous obtiendrez une mixtion encore plus efficace contre la constipation. Verte ou sèche, l'hysope donne une boisson dont l'usage prolongé ranime et embellit le teint. Broyée avec du nitre et des figues sèches, et .appliquée sur la rate, elle en dissout les tumeurs, et remédie ordinairement à l'hydropisie en desséchant les humeurs. Bue avec du vin, elle relâche l'épigastre et dissout toutes les tumeurs qui peuvent se former dans l'intérieur du corps. Le mal de dents cède incontinent à une fomentation de vinaigre où l'on a fait bouillir. de l'hysope. La fumée de cette herbe brûlée dissipe les tintements d'oreilles. Bouillie et appliquée en cataplasme, elle fait disparaître les taches livides du corps : injectée dans les narines, elle dissipe la jaunisse. Mêlée avec de l'huile de rose, et injectée dans les oreilles, elle en apaise les douleurs les plus aiguës.

XLVI. ASARUM.

XLVI. L'asaret.

Est asarum graece dictum, vulgago latine.

Haec calidae et siccae virtutis dicitur esse,

tertius est illi gradus, ut dicunt, in utroque.

1535        Provocat urinam, potataque menstrua purgat,

hocque modo jecoris medicatur sumpta dolori,

hydropicosque juvat, sciasim fugat hausta frequenter,

et vulvae morbis decoctio subvenit ejus.

Dicitur ictericum potata repellere morbum,

1540        elleborique modo vomitu praecordia purgat,

sed non est hujus purgatio tam violenta,

nec metuenda quidem, si fiat taliter illa :

aetatem et vires ejus circumspice primum,

quem purgare voles, et tempus quale sit anni,

1545        et si sit regio fervens vel frigida valde,

aut si temperiem mediam tenet inter utrumque ;

nam senibus puerisque parum donare licebit,

aetatis mediae plus his juvenesque requirunt,

pinguibus et validis plus dandum quam macilentis

1550        debilibusque viris, magis in gelida regione

dandum quam calida, duris quocunque labore

plus illis tribues, quos reddunt otia molles.

Haec circumspiciens et caetera talia tractans

non solum tutus dabis hanc, sed quaslibet herbas

1555        quae purgant vomitu stomachum, ventremve resolvunt.

Sed quia de cunctis dixi communiter herbis,

quo sit danda modo proprie vulgago docebo :

de foliis ejus triginta recentia tollens,

adde meri tantum quo possint cuncta recondi,

1560        tota nocte mero facias macerentur in illo,

mane terens vino, quo sunt macerata, resolve ;

tunc olus excoctum cum pingui carne recenti

porcina prius aegroto da sufficienter,

et sumat vini quantum vult fortis et albi,

1565        sic asari succum colatum trade bibendum.

Fortibus et magnis est hic numerus foliorum

sufficiens, reliquis (ut diximus) est minuendus,

juxta quod vires, aetas et tempora poscunt.

La plante que les Grecs appellent ἄσαρον, et les Latins vulgago, a, dit-on, une force de chaleur et de siccité du troisième degré. Prise en boisson, elle provoque les urines, facilite l'écoulement périodique du sang chez les femmes, et remédie aux affections du foie ; elle soulage les hydropiques et dissipe les douleurs de la sciatique. Une décoction d'asaret est aussi très bonne contre les maladies hystériques. Prise en breuvage, cette plante dissipe la jaunisse et, comme l'ellébore, elle purge l'épigastre par des vomissements ; mais, pour prévenir la violence et le danger de cette sorte de purgation, voici comment il faut préparer oette plante : considérez, d'abord l'âge et la force du malade, et l'époque de l'année ; observez si le climat est très froid ou très chaud, ou s'il est tempéré ; car cette herbe convient mieux aux hommes de moyen âge et à la jeunesse, qu'aux vieillards et aux enfants ; aux hommes gras et forts, qu'à ceux qui sont maigres et débiles ; l'administration en est plus avantageuse dans un climat froid que dans un climat chaud ; enfin les corps endurcis par le travail s'en trouvent mieux que ceux qui sont amollis par l'oisiveté. En se conformant à ces prescriptions et en ayant égard aux autres circonstances du même genre, on peut en toute sûreté se servir de l'asaret et de toutes autres espèces de plantes comme vomitifs ou laxatifs. Mais pour sortir des généralités, je me bornerai ici à indiquer comment on doit administrer l'asaret : prenez trente feuilles fraîches de cette herbe, versez dessus une·quantité de vin suffisante pour les recouvrir de ce liquide, et laissez-les-y macérer pendant une nuit entière ; puis, le lendemain matin, broyez-les dans le vin où elles ont macéré. Cela fait, donnez d'abord à manger au malade, en quantité suffisante, des légumes cuits avec du porc frais ; puis donnez-lui à boire, à sa discrétion, du fort vin blanc ; et, après avoir ainsi préparé les voies, faites-lui boire le jus filtré de l'asaret. Le nombre de feuilles que je viens d'indiquer doit être prescrit à des sujets grands et forts ; pour les autres, on déterminera la quantité en raison de la force, de l'âge et de la saison.

XLVII. MENTHA.

XLVII. La menthe.

Vim calidam siccamque gradu fert mentha secundo.

1510        IIlius potu vis digestiva juvatur,

confortat stomachum, vomitum quoque detinet hausta,

lumbricosque modo depellere fertur eodem.

Diversis morbis occurrit testiculorum,

si foveantur aqua, qua menthae cocta sit herba ;

1515        concretum solvit lac mammis addita trita,

instillata fugat auris cum melle dolorem,

asperitas linguae fugit illa saepe fricatae,

haustaque cum sapa partum solet accelerare,

trita canis morsum superaddita cum sale curat.

1580        Haec haemoptoicis mixto succurrit aceto ;

matrici succus si subditur illius, ante

quam fiat coitus, mulier non concipit inde.

Caseolos succus putrescere non sinit ejus

admixtus vel si viridis superadditur herba.

La menthe a une force de chaleur et de siccité du second degré. Prise en boisson, elle est digestive ; elle fortifie l'estomac, et arrête les vomissements ; elle fait périr les ascarides lombricoïdes. Elle remédie aux diverses affections des testicules, et, pour obtenir cet effet, il faut les fomenter avec de l'eau où l'on a fait bouillir cette herbe. Broyée et appliquée sur les mamelles, elle rend au lait sa liquidité. Injectée dans les oreilles avec du miel, elle en apaise les douleurs. Employée en friction, elle fait disparaître les aspérités de la langue. Bue avec du vin cuit jusqu'à réduction des deux tiers, elle facilite d'ordinaire l'accouchement. Broyée avec du sel, et appliquée en cataplasme, elle cicatrise les morsures des chiens. Avec du vinaigre, elle remédie à l'hémoptysie. La femme qui s'introduit du jus de cette herbe dans le vagin, avant que de se livrer aux plaisirs de l'amour, ne peut concevoir. Ce jus, mêlé au fromage, l'empêche de se corrompre ; on obtient le même effet en plaçant dessus cette herbe toute verte.

XLVIII. CYPERUS.

XLVIII. Le souchet.

1585        Vim Cypero medici calidam siccamque secundo

dicunt esse gradu. Potu depellitur ejus

calculus, urinae purgat laxatque meatus.

Dicit Apollodorus, quod pellere possit abortum,

si mulier foveatur aqua, qua coxerit illum ;

1590        asserit hic idem consumere posse lienem

illius fumus, si saepius ore trahatur ;

si se sanus homo fumo subfumiget illo,

dicit eum fieri firmum magis et leviorem.

Subvenit alarum vitiis admixtus olivo

1595        succus, sic vitium fugat intertriginis unctum,

humores nimios desiccat saepius haustum.

Illius solus pulvis cum melle jugatus

ulcera mirifice vel vulnera putrida purgat,

praecipue pulvis hic ulceribus valet oris.

1600        Si bibitur stomachum confortat debilitatum,

hydropicis multum succurrit saepius haustum,

atque per urinas humores purgat aquosos.

Contrito validum cypero si jungis acetum

ulcera, quae serpunt, cohibes medicamine tali.

Le souchet a, dit-on, une force de chaleur et de siccité du deuxième degré. Pris en boisson, il dissout la pierre, purifie et relâche les voies urinaires. Suivant Apollodore, en fomentant les parties sexuelles de la femme avec l'eau où a bouilli cette plante, on facilite l'expulsion du foetus mort dans son sein. Suivant le même auteur, en aspirant à plusieurs reprises la fumée du souchet brûlé, on remédie aux douleurs de la rate ; et celui qui, même en santé, se soumet à l'action de cette fumée, acquiert encore plus de force et de légereté. Le jus de cette herbe, mêlé avec de l'huile d'olive, et employé comme liniment, remédie aux douleurs des aisselles et guérit l'intertrigo ; pris souvent en boisson, il dessèche les humeurs surabondantes. Réduit en poudre et incorporé avec du miel, le souchet cicatrise merveilleusement les ulcères et les plaies gangrenées ; il est surtout efficace contre les ulcères de la bouche. Pris en boisson, il fortifie l'estomac affaibli, et soulage beaucoup les hydropiques qui en font souvent usage, en donnant cours aux humeurs aqueuses par les voies urinaires. Broyé et associé à de fort vinaigre, c'est un remède précieux contre les ulcères rongeurs.

XLIX. PAEONIA.

XLIX. La pivoine.

1605        Paeoniam medici calidam siccamque fatentur,

hancque tenere gradum dicunt in utroque secundum.

Splen, jecur et renes cum mulsa sumpta juvabit,

si jungatur ei violenter amygdala trita,

menstrua sic purgat et fluxum detinet alvi.

1610        Illius in vino decoctio saepius hausta

vesicae duros sedat sic sumpta dolores,

et scotosim sic illa juvat stomachique dolorem,

nefreticos eadem multum juvat, ictericosque.

Calculus infantum potu depellitur ejus ;

1615        pressuras, inferre solent quae somnia nocte,

paeoniae semen, bibitur si saepius, arcet.

Illius radix pueris suspensa caducis

non modicum prodest, Galienus ut asserit auctor ;

quendam se puerum narrat vidisse caducum,

1620        aetas cujus erat annorum circiter octo,

paeoniae puer hic radicem ferre solebat

appensam collo ; quadam vice decidit illa,

moxque puer cecidit, solito qua more ligata

protinus evasit ; Galienus vera probare

1625        rem plene cupiens radicem denuo dempsit

de collo pueri, cecidit, viguitque resumpta ;

cognita vis herbae fuit hujus sic manifeste.

Ipse Dioscorides cunctis ait esse caducis

aptam, si bibitur vel si suspenditur illa.

1630        Seminis illius ter quinque rubentia grana

cum vino fluxum matricis sumpta coercent ;

nigra solent varios matricum pellere morbos,

si totidem dantur cum vino nocte bibenda.

Hujus sunt geminae species, mas dicitur una,

1635        altera, quae minor est, species est femina dicta :

radix majoris est palmis longa duabus

grossaque ceu digitus ; radix divisa minoris

dicitur in plures radices, haec bene purgat

post partum potata steras vino sociata,

1640        in cunctis reliquis similis vis dicitur illis.

La pivoine, au dire des médecins, a une force de chaleur et de siccité du deuxième degré. Bue avec de l'hydromel, elle remédie aux affections de la rate, du foie et des reins. Avec des amandes bien broyées, elle facilite l'écoulement périodique du sang chez les femmes, et arrête la diarrhée. Uné décoction de pivoine dans du vin, prise souvent en breuvage, apaise les douleurs aiguës de-la vessie, dissipe le vertige, calme les maux d'estomac et les affections néphrétiques, et chasse la jaunisse ; elle dissout le calcul chez les enfants. La graine de cette plante, prise souvent en boisson, prévient le cauchemar. Sa racine, suspendue au cou des enfants épileptiques, est, suivant Galien, un remède très efficace. Il raconte qu'il fut un jour témoin du phénomène suivant : un enfant épileptique, de huit ans environ, portait ordinairement au cou une racine de pivoine ; la racine s'étant détachée par hasard, l'enfant, presque en même temps, fut pris d'attaques qui cessèrent dès que la pivoine eût été de nouveau attachée à son cou. Galien, voulant s'assurer du fait, détacha une seconde fois la racine du cou de l'enfant ; alors les mêmes phénomènes se rénouvelèrent. C'est ainsi qu'il reconnut avec certitude la vertu de cette plante. Suivant Dioscoride, prise en boisson ou suspendue au cou du malade, la pivoine remédie à l'épilepsie sans distinction d'âge. Prenez quinze grains de pivoine ; au moment où sa graine commence à rougir, et mêlez-les avec du vin, vous obtiendrez une boisson qui arrête l'hémorragie utérine. La même quantité de grains noirs remédie à toutes les affections de la matrice.

On distingue deux espèces de pivoine ; l'une qu'on appelle mâle, et l'autre, qui est plus petite, femelle. La racine de la pivoine mâle a la longueur de deux palmes et la grosseur du doigt ; celle de la pivoine femelle se divise, dit-on, en plusieurs jets, et donne, combinée avec du vin, une boisson qui purge la matrice après l'accouchement. Pour tous les autres cas, les deux espèces ont les mêmes vertus.

L. BARROCUS.

L. La mélisse.

Herbam, quam Graeci dixerunt mellisophyllon,

barrocum nostri dicunt vulgariter ; ilia

prae cunctis apibus gratissima dicitur herbis.

Nec gaudere magis ullius flore videntur ;

1645        contritis foliis apium si vasa perungas,

non fugient, meliusque facis, si lac sibi jungas,

unguine cultores retinent examina tali ;

auxilium praesens apium fert ictibus ilia,

ictus detrita tegitur si protinus herba,

1650        hocque modo, quos vespa nocet vel aranea, curat.

Trita solet veteres compescere cum sale strumas,

hocque modo vitiis dicunt succurrere sedis,

femina purgatur decocto cum sale succo,

tali discutitur inflatio noxia potu ;

1655        ejus si viridis decoctio saepe bibatur,

antiquos dysentericos juvat et ciliacos,

asthmaticis eadem prodest orthopnoicisque,

ulcera depurgat, morbos levat articulorum.

Herba canis morsus superaddita cum sale curat

1660        ejus fomento ; decoctio menstrua purgat,

ore retenta solet dentis sedare dolorem,

lumina purgari caligine Plinius inquit,

ejus si succo fuerint cum melle peruncta.

La mélisse, que les Grecs appellent, μελισσόϕυλλον est vulgairement nommée barrocus par les Latins. Elle est singulièrement aimée des abeilles, qui se plaisent surtout à butiner sur ses fleurs. Si vous avez soin de frotter les ruches avec cette herbe broyée, les abeilles ne s'enfuiront pas, surtout si vous y joignez du lait : c'est le moyen qu'emploient les cultivateurs pour retenir les essaims. Cette herbe, broyée et appliquée en topique, a la vertu de guérir incontinent les piqûres d'abeilles, de guêpes ou d'araignées. Broyée avec du sel, elle est souvent efficace contre les scrofules invétérées, et remédie, dit-on, aux maladies de l'anus. Le jus de mélisse, bouilli avec du sel, purge les femmes et dissipe les enflures de mauvaise nature. Une décoction de la plante verte, prise en boisson, arrête les dysseriteries invétérées et calme les douleurs de ventre ; elle remédie également à l'asthme et à l'orthopnée, cicatrise les ulcères et dissipe les douleurs des articulations. Appliquée en cataplasme avec du sel, elle guérit la morsure des chiens. Une décoction de mélisse facilite l'écoulement périodique du sang chez les femmes ; et, employée comme gargarisme, elle apaise le mal de dents. Suivant Pline, des frictions faites avec le jus de cette herbe, mêlé avec du miel, éclaircissent la vue.

LI. SENECION.

LI. Le seneçon.

Erigeron Graeci, nos senecion vocitamus,

1665        quod canis similis videatur flore capillis ;

nascitur in muris et in hortis et tegulatis.

Illius herbae vis frigida dicitur esse,

in medicinali radix non ponitur usu.

Flores cum foliis tundens infundito vini

1670        permodicum dulcis, et sic tepefacta tumori

haec simul apponas ani vel testiculorum ;

addito thus istis, nervos et vulnera quaevis

curabis facile posito cataplasmate tali.

Haec eadem triti facient ejus capitelli.

1675        Potari prohibent, quia suffocare bibentem

quidam confirmant, at contra Plinius auctor

ictericis quosdam poturo donasse salubrem

cum vino dicit, talique modo medicari

morbis vesicae, plures ait ille probasse,

1680        et cordis vitiis illam jecorisque dedisse,

torminibus quoque cum passo, juvisseque potu

hoc varios morbos, praecordia quos patiuntur ;

et viridis facit hoc si tincta voretur aceto,

trita solet duras haec cum sale spargere strumas ;

1685        hanc circumscriptam si quis fodiat sine ferro

et tangat dentem vicibus tribus inde dolentem,

unaquaque spuens vice, postque reponat eodem,

quo fuit orta, loco, sic rursum vivat ut herba,

Plinius ut dicit, non amplius ille dolebit.

Le seneçon, appelé par les Grecs ἠριγέρων, doit son nom à la ressemblance des poils de sa fleur avec ceux du chien. Il croit sur les murs, dans les jardins et sur les toits. Il passe pour être d'une nature froide, et sa racine n'est point en usage dans la médecine. La fleur et la feuille de celte plante, broyées dans une petite quantité de vin doux, et appliquées chaudes, dissipent le gonflement de l'anus et des testicules. En y ajoutant de l'encens, on obtient un cataplasme qui remédie aux maux de nerfs et cicatrise en peu de temps toutes sortes de blessures. L'extrémité des tiges du seneçon, broyées, ont les mêmes vertus. Quelques médecins défendent d'en faire usage en boisson, parce que quelques auteurs affirment qu'elle peut suffoquer ceux qui en boivent. Pline, au contraire, prétend que le vin dans lequel on a broyé du seneçon a été efficacement administré contre la jaunisse et contre les maladies de la vessie, et que plusieurs personnes en ont éprouvé les heureux effets. Suivant le même auteur, cette même potion a encore été prescrite avec succès contre les affections du coeur et du foie. Il dit aussi que, pris dans du vin de raisins cuits au soleil. le seneçon apaise la colique et remédie aux diverses maladies des entrailles ; qu'arrosé de vinaigre et mangé tout vert, il produit les mêmes effets ; que, broyé avec du sel, il a la vertu de dissiper les scrofules Si vous souffrez du mal de dent, déracinez cette herbe en écartant la terre, et sans employer le fer, mordez-la trois fois légèrement avec la dent malade, en crachant chaque fois après l'avoir mordue ; puis replantez-la au même endroit, et tout cela avec les précautions nécessaires pour qu'elle puisse reprendre vie ; à partir de ce moment, s'il faut s'en rapporter à Pline, vous n'éprouverez plus de douleur.

LII. CHELIDONIA.

LII. La chélidoine.

1690        Esse chelidoniae species geminae referuntur

a medicis ; species est major prima vocata,

altera vero minor ; oculis medicator utraque,

coecatis pullis hac lumina mater hirundo,

Plinius ut scribit, quamvis sint eruta, reddit ;

1695        hanc nasci dicit avibus venientibus illis

et desiccari, solito dum more recedunt,

indeque nomen habet chelidonia, namque chelidon

dicitur haec volucris Graecorum more vocari.

Florentis succus cum melle coquatur in aere

1700        igne levi, spumam donec projecerit omnem

et quasi crassitiem mellis decoctio sumat ;

utilius nullum dicunt oculis medicamen,

quos caligo nocet, si sint hoc saepe peruncti.

Conteritur juncto sibi radix ejus anetho

1705        et sic ictericis cum vino sumitur albo ;

dentis, ut affirmant, prohibet contrita dolorem.

De foliis ejus contusis si cataplasma

cum vino fiat, maculas abstergere dicunt.

Les médecins distinguent.deux espèces de chélidoine, la grande et la petite. Elles sont toutes deux bonnes pour les yeux. Suivant Pline, l'hirondelle s'en sert pour rendre la vue à ses petits, même lorsqu'on leur a crevé les yeux. Il dit que cette herbe naît au retour de cet oiseau, et se dessèche au moment de son départ ; que c'est pour cela qu'on l'a nommée chélidoine, de χελιδών, qui en grec signifie hirondelle. Cueillez cette herbe au moment de la floraison, et faites-la bouillir avec du sel, à petit feu, dans un vase d'airain, jusqu'à ce qu'elle ait jeté toute son écume, et que la décoction ait presque pris la consistance du miel ; vous obtiendrez· un collyre dont l'usage sera d'une utilité incomparable pour dissiper les brouillards qui offusquent la vue. Broyée avec de l'aneth, et administrée dans du vin blanc, sa racine est très efficace conlie la jaunisse. On prétend qu'en mâchant cette racine, on se préserve du mal de dents. Un cataplasme de feuilles de chélidoine broyées dans du vin, fait disparaître les taches du corps.

LIII. CENTAUREA.

LIII. La centaurée.

Sunt centaureae species, maiorque minorque,

1710        ut suprascriptis dixi de pluribus herbis,

sed quia perpaucis species est cognita major,

hanc praetermittens vires narrabo minoris,

quam notam cunctis credo vulgaribus ipsis.

Desiccativae virtutis dicitur esse,

1715        non modicum plagas conglutinat inde recentes,

inque cicatricem veteres superaddita ducit ;

illi, qui sciasim patitur, decoctio mire

prodest, illius si sit subiecta per anum,

sanguine detracto sedat mox illa dolorem,

1720        fomento nervis eadem medicabitur aegris.

Illius succus deducit menstrua sumptus,

pellit abortivum ; medicamina cuncta maligna

cum vino sumptum dicunt purgare per alvum ;

melle sibi juncto caligine lumina purgat.

1725        Illius exprimitur autumni tempore succus,

quem desiccatum ferventi sole reponunt,

ad rerum curam, quas diximus ante, salubrem.

Il y a, ainsi que je l'ai déjà dit de beaucoup d'autres herbes, deux espèces de centaurée, la grande et la petite. Comme la grande est peu connue, je ne parlerai que des propriétés de la petite, qui est, je crois, connue de tout le monde. Cette plante est un siccatif puissant employée en cataplasme, elle cicatrise, promptement les plaies récentes, et dispose les anciennes à la guérison. Une décoction de centaurée est très efficace contre la sciatique ; appliquée sur l'anus, elle en étanche le sang et en apaise les douleurs ; employée'en fomentation, elle remédie aux maux des nerfs. Administré en boisson, le jus de cette herbe facilite l'écoulement périodique du sang chez les femmes, et l'expulsion du foetus mort dans la matrice. Pris avec du vin, il purge le corps par des évacuations. Mêlé avec du miel, il donne un collyre qui éclaircit la vue. Il remédie à toutes les affections dont je viens de parler, lorsqu'on a soin de l'exprimer de la plante au temps de l'automne, et de le faire sécher aux rayons d'un soleil ardent.

LIV. COLUBRINA.

LIV. La serpentaire.

Herba, dragonteam Graecorum quam vocat usus,

haec eadem vulgi lingua colubrina vocatur,

1730        quod colubro similis maculoso cortice surgit,

ex quibus antiquis expertum credimus esse,

quod queat a simili colubrina venena fugare.

Quisquis se trita radice perunxerit ejus,

tutus ab incursu serpentum dicitur esse ;

1735        morsibus illarum cum vino sumpta medetur.

Si jungas oleum cum succo seminis ejus

auribus infundens poteris sedare dolorem ;

hoc succo lanam madidam si naribus addas,

compesces morbum, qui polypus est vocitatus ;

1740        sic etiam cancris magnum solet esse juvamen.

Succo radicis ejus caligo fugatur

et varii morbi, quos lumina perpetiuntur,

ex ipso puro si sint lita melleve mixto ;

et prodest oculis radix si manditur assa ;

1745        cum pusca granis ter denis seminis haustis

lumina munda ferunt pulsa caligine reddi.

Si marcescentis illius floris odorem

nare trahat praegnans, deponere fertur abortum.

Vel si sit radix matrici subdita trita.

1150        Pulvis radicis ejus cum melle jugatus

tussim compescit sumptus, sedatque catarrhum

et confert haemoptoicis ; hoc saepe juvamen

pectoris humores exhaurit non redituros ;

omnibus his prodest radix si sumitur assa,

1755        istud idem faciet ejus decoctio sumpta.

ejus cum vino radix venerem movet hausta.

Provocat urinas, fagedaenica vulnera purgat,

si sit ei tritae cum melle bryonia juncta ;

vulneris haec mundat sordes, syringia curat,

1760        sola sibi juncto maculas depellit aceto.

Esse pedum vitium dicunt, cui pernio nomen

est a pernicie membri patientis id ipsum,

plebs dicit mulam, solet hoc de frigore nasci,

amne dragonteae radices decoque tali,

1765        pernio deletur, si saepius amne fovetur.

L'herbe que les Grecs appellent δρακόντεια, et qui est communément nommée serpentaire, doit ce nom aux taches de son écorce, qui a quelque ressemblance avec celles de la peau du serpent. Je crois plutôt que les anciens lui ont donné ce nom parce qu'elle neutralise le venin des serpents par la vertu des semblables. On prétend qu'en se frottant avec la racine broyée de cette herbe, on n'a rien à redouter de l'attaque des serpents. Prise dans du vin, elle remédie à leurs morsures. Mêlé avec de l'huile et injecté dans l'oreille, le jus de sa graine en apaise les douleurs. Un flocon de laine, imbibé de ce jus, et introduit dans les narines, fait dispaître les excroissances qu'on appelle polypes. Il est également efficace contre les affections cancéreuses. Pur ou mêlé avec du miel, le suc de la racine de serpentaire a la vertu d'éclaircir la vue et de remédier aux différentes affections des yeux. On obtient le même effet en mangeant sa racine rôtie. Trente grains de sa semence dans de la piquette donnent une boisson qui purifie les yeux. L'odeur de sa fleur fanée, aspirée par les narines, facilite l'expulsion du foetus mort dans le sein de la mère. Broyée et appliquée sous la matrice, sa racine produit le même effet. Prise réduite en poudre et incorporée avec du miel, cette racine apaise la toux, guérit les catarrhes et arrête l'hémoptysie ; elle débarrasse parfois pour toujours la poitrine des humeurs qui s'y étaient portées. Soit rôtie, soit bouillie, la racine de serpentaire est utile pour toutes les affections que je viens d'énumérer. Bue avec du vin, elle est aphrodisiaque. Broyée avec de la bryone et du miel, elle est diurétique, elle déterge les plaies de mauvaise nature et guérit les fistules. Avec du vinaigre seulement, elle fait disparaître les taches du corps. Il y a une maladie des pieds, qu'on appelle pernio (engelure au talon) de pernicies (perte, destruction), en raison du dommage qu'en éprouve le membre qui en est affecté, et que le vulgaire appelle mule. Cette maladie, qui est ordinairement produite par le froid, cède à une fomentation d'eau où l'on a fait bouillir de la racine de serpentaire.

LV. GAISDO.

LV. La guède.

Isatis a Graecis est vulgo gaisdo vocata,

non modicum quaestum praebens tinctoribus herba.

De foliis ejus tritis factum cataplasma,

vulnera (magna licet) conglutinat atque cruorem

1770        illorum sistit, reprimit quoscunque tumores,

si cum melle teris hanc, sordida vulnera purgat ;

emundat maculas et sacro subvenit igni,

ovi si jungens albumen eam superaddas.

La guède, que les Grecs appellent ἴσατις, est une herbe très précieuse pour les teinturiers. Un cataplasme fait de ses feuilles broyées arrête le sang des blessures, les cicatrise, quelque dangereuses qu'elles soient, et dissout toutes sortes de tumeurs. Broyée avec du miel,elle déterge les ulcères sordides. Combinée avec un blanc d'oeuf et employée comme topique, elle dissipe les taches du corps et remédie au mal qu'on appelle feu sacré.

LVI. ELLEBORUS ALBUS.

LVI. L'ellébore blanc.

Elleborum geminas species testantur habere,

1775        album, quod sursum purgat, nigrumque deorsum ;

vim siccam calidamque tenent et tertius illis

est in utroque gradus, nigro violentius album

dicitur, unde prius dicam de viribus ejus.

Suppositum quocunque modo depellit abortum,

1780        naribus attractus sternutamenta movebit

illius pulvis capitis pellentia morbos ;

miscetur confecturis, quae lumina purgant,

et multum prodesse ferunt vitiis oculorum,

pultibus admixtus mures pulvis necat ejus

1785        et cum lacte datus est muscis perniciosus.

Dicunt per vomitum varios educere sumptum

humores, veteresque ferunt sic pellere morbos,

purgatur tali vomitu vertigo vetusta,

insanis, melancholicis valet atque caducis,

1790        saepeque curatur sumpto lymphaticus isto.

Hydropicis in principio mire medicatur,

Emundat lepram, tetanum fugat atque podagram,

confirmat tremulos, redeuntia tormina curat,

diversis vitiis stomachi sciasiquet~medetur

1795        et tussi veteri, febribus super omnia prodest

quartanis, annis jam pluribus inveteratis.

Ingenti cura sumpturum Plinius ipsum

admonet, ut septem se praeparet ante diebus,

humectisque cibis corpus bene temperet omne,

1800        nec sero coenet, qui debet sumere mane,

et quando sumet, jubet explorare serenam

et calidam claramque diem, ventisque carentem ;

observare quidem curam si spreverit istam,

passurum nimios affirmat eum cruciatus,

1805        elleborumque jubet in pultibus antea coctum

aut in lente dari, sic dicit non nociturum ;

hocque dari prohibet senibus puerisque tenellis,

mollibus et timidis ,animique viris muliebris,

et macris nimium dicit non accipiendum :

1810        in succo ptisanae vel mulsa paneve coctum

sumere praecipiunt alii, sic utile dicunt.

Philo composito fertur scripsisse libello,

qualiter elleborum sit nobis accipiendum,

inque suis Ipocras aphorismis istius herbae

1815        solius meminit, quam noverat utiliorem.

Plures scripserunt hujus de viribus herbae,

et quo sit sumenda modo docuere quibusque ;

non tamen inveni, perplura volumina volvens,

ullum, qui certum pondus donare juberet

1820        illius ; dixisse satis se, credo, putabant,

cum juxta vires, aetates, tempora dandum

jussissent, mihi vere satis non esse videtur

tutum, rem ,subitum quae confert saepe periclum,

commendare dari cuiquam sine pondere certo.

1825        Plinius ut scribit, Themison donare solebat

ellebori dragmas geminas, tribuisse sequentes

bis binas etiam confirmat non tamen ipse,

pondere quo jubeat sumi, statuisse videtur ;

cum tamen ellebori nigri jubeat dare dragmam,

quatuor aut scripulos, mihi significare videtur,

albi dimidium pondus tantummodo dandum,

quo longe nigro violentiusesse fatetur.

On distingue deux espèces d'ellébore : le blanc, qui purge par en haut ; le noir, qui purge par en bas. Ils ont tous deux une force de chaleur et de siccité du troisième degré. L'ellébore blanc est plus énergique que le noir : aussi parlerai-je d'abord du premier. De quelque manière qu'on l'applique, il facilite l'expulsion du foetus mort dans le sein de la mère. Réduit en poudre et aspiré par les narines, il provoque des éternuments qui dissipent les maux de tête. Mêlé aux préparations ophthalmiques, il est très efficace, dit-on, contre les maladies des yeux. Réduit en poudre et mélé avec de la bouillie, il tue les rats ; avec du lait, il fait mourir les mouches. Pris en boisson, il passe pour un vomitif qui purge l'estomac des humeurs diverses qui le travaillent, et qui remédie à toutes sortes d'affections invétérées, telles que le vertige, la folie, la mélancolie, l'épilepsie, la frénésie. Il est d'une merveilleuse efficacité dans les débuts de l'hydropisie ; il fait disparaître la lèpre, il dissipe le tétanos et la goutte, il arrête les tremblements, il remédie aux coliques et aux différentes affections de l'estomac, il apaise les douleurs de la sciatique ; il calme la toux invétérée. et surtout la fièvre quarte datant de plusieurs années. Pline recommande de se préparer soigneusement pendant sept jours avant de faire usage de cette herbe ; il veut qu'on tempère le corps par des aliments humides, qu'on ne soupe pas trop tard la veille quand on doit la prendre le lendemain matin, et qu'on choisisse un jour serein, chaud, clair et sans vent. Si l'on ne prend ces précautions, on s'expose, dit-il, à des douleurs cruelles. Suivant le même auteur, l'ellébore, pour n'être pas nuisible, doit être cuit auparavant avec de la bouillie ou des lentilles. Il en interdit l'usage aux vieillards et aux enfants, aux personnes faibles et timides, et aux hommes d'un caractère efféminé. Il recommande de n'en donner qu'avec beaucoup de réserve à ceux qui sont maigres. D'autres prétendent qu'il faut le prendre cuit dans de la tisane, dans de l'hydromel ou dans du pain : qu'ainsi mélangé, il est plus efficace. On dit que Philon a composé un petit ouvrage sur la manière de prendre cette herbe. Hippocrate, dans ses Aphorismes, se borne à en faire mention comme d'une plante très utile. Plusieurs auteurs ont traité de ses vertus, et enseigné la manière dont il faut s'en servir, selon la nature des malades. J'ai feuilleté un grand nombre d'ouvrages mais je n'ai trouvé dans aucun qu'il faille s'assujettir à une dose déterminée : les auteurs ont cru suffisant, sans doute, de se baser sur les forces et l'âge du malade, ainsi que sur le temps où l'on peut s'en servir ; cependant il me paraît un peu inconsidéré de conseiller, sans indiquer la dose, l'emploi d'un médicament qui se manifeste souvent par des effets subits et dangereux. Suivant Pline, Thémison en donnait d'abord deux drachmes, puis quatre ; cependant il ne me paraît pas avoir déterminé lui·même la dose à laquelle on doit le prescrire. En conseillant de donner une drachme ou quatre scrupules d'ellébore noir, il me semble avoir donné à entendre qu'il ne faut pas excéder une demi-livre d'ellébore blanc, parce qu'il est, de son aveu, beaucoup plus énergique que le noir.

LVII. ELLEBORUS NIGER.

LVII. L'ellébore noir.

Elleborum nigrum non est adeo violentum,

nec formidandum quantum quod diximus album ;

1835        hoc quoque praecipiunt veteres in lente coquendum,

aut in juscellis ; sit insanis medicari

assumptum dicunt et sic prodesse podagrae.

Hydropicis mota febre dicitur auxiliari,

miram sentit opem sumpto paralyticus illo,

1840        et varios bibitum morbos levat articulorum,

educit choleras varias et flegma per alvum,

elixaturae potu caligo fugatur ;

duricias suppuratas factum cataplasma

concoquit et purgat ; vacuat syringia callo

1845        infixus modicus radicis surculus ejus,

postque dies geminos sit surculus ille remotus.

Hordea, quam dederint, contrito junge farinam,

hydropicus tumor appositis siccabitur istis ;

menstrua suppositum purgat, depellit abortum,

1850        auditum reddit, si surdis auribus illud

imponas et post biduum triduumve repellas.

Appositum tollit maculas ejus cataplasma,

emundat lepras, scabies quascunque repellit.

Ore diu tentum, quo coxeris illud, acetum

1855        dentis non modicum dicunt sedare dolorem.

Ellebori nigri praecepit Plinius unam

donari dragmam, leviter sic promovet alvum,

plusquam bis binos obolos vetat accipiendum.

L'ellébore noir n'est ni aussi énergique ni aussi dangereux que le blanc. Les anciens conseillent de le faire cuire dans des lentilles ou dans une petite quantité de bouillon. Pris ainsi, selon eux, il remédie à la folie et calme les douleurs de la goutte. Administré en breuvage, il passe pour dissiper l'hydropisie en provoquant la fièvre ; il soulage merveilleusement les paralytiques, apaise toutes les douleurs des articulations, et fait évacuer la bile et toutes sortes d'humeurs. Une décoction d'ellébore noir, prise en boisson, dissipe l'obscurcissement des yeux. Sous forme de cataplasme. il mûrit et guérit les abcès. Un petit morceau de sa racine appliqué et laissé pendant deux jours sur les callosités d'une fistule, arrête la suppuration. Broyé avec de la farine d'orge et employé comme cataplasme, il dissipe l'enflure de l'hydropisie ; appliqué sur les parties sexuelles des femmes, il facilite l'écoulement des règles et détermine l'expulsion du foetus mort dans la matrice. Introduit et conservé pendant deux ou trois jours dans les oreilles, il rend l'ouïe aux sourds. Appliqué en cataplasme, il fait disparaître les taches. du corps, il dissipe la lèpre et toutes les affections psoriques. Bouilli avec du vinaigre et employé comme collutoire, il apaise les douleurs de dents les plus violentes. Pline conseille de l'administrer à la dose d'une drachme : pris dans cette mesure, il relâche le ventre. Suivant cet auteur, il ne faut pas excéder quatre oboles.

LVIII. VERBENA.

LVIII. La verveine.

Verbenam ierobotanum peristereonque

1860        appellant Graeci ; species haec fertur habere

binas, effectus est idem pene duabus.

Cum vino juvat ictericos, si saepe bibatur ;

pestiferos morsus curat superaddita trita

cum vino (renovanda quidem per quatuor ista

1865        est medicina dies) ; oris bene vulnera purgat

illius succus tepidus si volvitur ore,

hoc quoque facta recens herbae decoctio praestat,

hac etiam quaevis putredo repellitur oris,

si tepefacta diu volvatur fauce sonora.

1870        Glutinat herba recens vulnus superaddita trita,

occurrit cunctis cum vino sumpta venenis.

Quae furit alternis febris accedendo diebus

pellitur hac, tribus assumptis radicibus ejus

cum totidem foliis potetur aqua resoluta

1875        ista prius,·patiens quam frigus sentiat ullum ;

hocque modo febribus quartanis illa medetur,

bis binis foliis cum tot radicibus haustis.

Illius in vino si sit decoctio facta,

convivas hilares inter convivia sparsa

1880        reddere narratur, ut jam praescripta buglossa.

Hanc herbam gestando manu si quaeris ab aegro :

dic, frater, quid agis ? Bene si responderit aeger,

vivet, si vero male, spes est nulla salutis.

Ex hac compositam quidam jussere coronam

1885        apponi capiti causa quacunque dolenti,

sic dicunt illam celerem conferre medelam.

Plinius affirmat, hanc omnibus esse salutem

visceribus, latetris morbis, jecorisque querelis,

pectoris et vitiis , et praecipue medicari

1890        pulmonum causis hanc asserit ille pthisique.

Parotidas reprimit adipi commixta vetusto.

Herbam cui nomen foliis de mille dedere

betonicamque pari verbenae pondere junge,

haec mixta potentur aqua, nullum medicamen

1895        utilius credunt illis, quos calculus angit.

Non modicum laudare Magos hanc asserit herbam

Plinius, hanc cunctis dicunt obsistere morbis,

et quod quisque petet hac impetrare perunctum ;

sic et amicitias captari posse potentum

1900        et pelli febres et plurima talia fungunt,

quae, quamvis natura potens concedere posset,

vana tamen nobis et anilia jure videntur.

La verveine, que les Grecs appellent ἱεροβοτάνη et περιστερεών, se divise en deux espèces, qui ont toutes deux à peu près les mêmes vertus. Prise souvent avec du vin, elle dissipe la jaunisse. Broyée avec du vin et appliquée en cataplasme, elle neutralise l'effet des morsures venimeuses : il faut avoir soin, toutefois, de renouveler le cataplasme pendant quatre jours. Le jus tiède de la verveine, employé comme collutoire, cicatrise les plaies de la bouche. On obtient le même effet avec une décoction de cette herbe fraîche. En se gargarisant fortement avec cette décoction tiède, on arrête la gangrène de la bouche. Broyée toute fraîche et appliquée en cataplasme, la verveine cicatrise les blessures ; prise avec du vin, elle est un antidote contre tous les poisons. Prenez trois racines de verveine avec autant de feuilles, puis faites-les cuire dans de l'eau, et vous obtiendrez un breuvage qui, pris avant le retour du frisson, chasse la fièvre intermittente. Quatre feuilles avec autant de racines, administrées de la même manière, ont la même vertu contre la fièvre quarte. Une décoction de cette herbe et de vin, répandue à table, anime la gaîté des convives, comme je l'ai dit de la buglosse. Si, tenant de la verveine à la main, vous dites à un malade : "Frère, comment vous portez-vous?" et qu'il vous réponde : "Bien", il vivra ; s'il vous répond : "Mal", il n'y a aucun espoir de guérison. Quelques médecins conseillent de tresser une couronne de verveine et d'en ceindre la tête des personnes atteintes d'une maladie quelconque : le mal, disent-ils, disparaîtra aussitôt. Suivant Pline, cette plante est très efficace contre les douleurs d'entrailles, contre les affections du côté, du foie, de la poitrine, et surtout celles du poumon, et contre la phthisie. Mêlée avec du vieux oing, elle dissout les engorgements des glandes parotides. Joignez à la verveine une égale quantité de l'herbe qui tire son nom de ses mille feuilles et de bétoine, puis faites détremper le tout dans l'eau, et vous obtiendrez une boisson qui est, dit-on, d'une efficacité merveilleuse contre la pierre. Pline prétend que les mages font un grand éloge de cette herbe : suivant eux, elle remédie à toutes sortes de maladies, et celui qui s'en frotte obtient tout ce qu'il veut. Ils disent aussi que, grâce à sa vertu miraculeuse, on se concilie la faveur des grands, et qu'on se délivre de la fièvre et d'une infinité d'autres maux semblables. Quelque libérale que puisse être la nature dans ses dons,ce que les mages disent de la vertu de cette herbe me semble devoir être rangé parmi les contes de vieilles femmes.

LIX. CHAMAEDRYS.

LIX. La germandrée.

Chamaedryos graece, quae gamandrea latine

dicitur ; hanc herbam calidam siccamque fatentur,

1905        tertius est in utroque gradus. Depelit abortum

si mixta potetur aqua, tussique medetur,

conquassata juvat ; si mixta bibatur aceto,

splen siccat ; purgat cum vino menstrua sumpta ;

hydropicis in principio sic sumpta medetur,

1910        sic quoque pestiferis occurit morsibus illa.

Cunctis praedictis prodest superaddita trita ;

sordens purgabit vulnus, licet inveteratum,

si cum melle teras et tritam desuper addas.

Chamaedryos oculi succo cum melle peruncti

1915        dicuntur clari dempta caligine reddi ;

si tritam misces oleo corpusque perungas,

pellet frigorem, revocabit et ipsa calorem.

La germandrée, que les Grecs appellent χαμαιδρῦς, et les latins gamandrea, a une force de chaleur et de siccité du troisième degré. Bue avec de l'eau, elle détermine l'expulsion du foetus mort dans le sein de la mère, calme la toux et remédie aux fractures ; bue avec du vinaigre, elle sèche la rate ; avec du vin, elle facilite l'écoulement périodique du sang chez les femmes, guérit l'hydropisie commençante, et neutralise l'effet de la piqûre des bêtes venimeuses. Employée en cataplasme, elle est également efficace dans les différents cas dont je viens de parler. Broyée avec du miel et appliquée sur la partie malade, elle cicatrise les ulcères sordides, même invétérés. Le jus de cette herbe, incorporé avec du miel et employé en fomentation, éclaircit la vue. Broyée et mêlée avec de l'huile, elle remédie au refroidissement du corps lorsqu'on s'en frotte, et rappelle la chaleur naturelle.

LX. MAURELLA.

LX. La morelle.

Herbam quae Graeci strignum dixere,Latini

maurellam, dicunt vis ejus frigida valde est.

1920        Dicitur auriculae mire sedare dolorem

illius succusn si sensim funditur intus ;

egilopis strigni dicunt cataplasma mederi,

istud idem dicunt capitis prodesse dolori ;

una cum strigno, si sal panisque terantur,

1925        parotidas reprimit cataplasmatis addita more ;

strigni prurigo depellitur·illita succo ;

succus suppositus fluxum stringit muliebrem.

Contritis ejus foliis conjuge polentam,

his superappositis sacer ignis et herpeta mordax

1930        dicitur expelli ; si vero junxeris istis

argenti spumam, cerussam, oleumque rosatum,

fortius et melius praedictum fit medicamen.

La morelle, que les Grecs appellent στρύχνον, et les Latins morella, est d'une nature très froide. Injecté goutte à goutte dans l'oreille, le jus de cette herbe en apaise à l'instant les douleurs. Employée en cataplasme, la morelle remédie à l'aegilops et aux douleurs de tête. Broyée avec du sel et du pain, et appliquée sur la partie malade, elle dissout l'engorgement des glandes parotides. Des frictions faites avec le jus de cette herbe calment les démangeaisons. On peut s'en servir aussi, en l'appliquant sur les parties sexuelles des femmes pour arrêter la ménorragie. Les feuilles de morelle, broyées et combinées avec de la bouillie de farine d'orge, donnent un cataplasme qui dissipe le feu sacré et les dartres rongeantes. En ajoutant de la litharge, de la céruse et de l'huile rosat, on rend ce cataplasme encore plus efficace.

LXI. JUSQUIAMUS.

LXI. La jusquiame.

Jusquiamum Graeci quam nostri caniculatam

dicunt, huic herbae virtus est frigida valde.

1935        Tres habet haec species , semen profert prior album,

altera subrufum, producit tertia nigrum ;

nobilior reliquis est semen quae gerit album,

pro quo si desit mos est apponere rufum,

nigrum vero frequens medicorum respuit usus.

1940        Jusquiami foliis contritis adde polentam,

haec adhibendo potes quosvis curare tumores,

sic mire calidam potes infrigidare podagram,

auribus infusus vermes succus necat ejus,

illarumque .solet varios lenire dolores.

1945        Ore diu tepidum si contineatur·acetum,

quo sint decoctae radices illius herbae,

dicitur immodicum dentis placare dolorem.

Expressus succus contriti seminis ejus

viscosum calidumque potest compescere rheuma,

1950        si fuerint oculi patientis saepe peruncti.

Seminis illius obolus cum semine mixtus

miconis pariter cum mulsa sumitur illis

utiliter, fluxum matricis quae patiuntur,

et dicunt haemoptoicis sic posse mederi,

1955        vel quocunque modo sanguis jactetur ob ore,

dicitur hic potus medicari saepius haustus.

Cum vino tritum semen cataplasmaque factum

mammas et testes dicunt curare tumentes ;

emplastris multis apponitur antidotisque.

1960        Infert sicut olus haec herba comesta maniam,

praestat idem succus in quovis vulnere fusus.

La jusquiame, que les Grecs appellent ὑοσχύαμος, et les Latins caniculata, est une herbe d'une nature très froide. On en compte trois espèces, qui se distinguent par la couleur de leur graine, blanche, roussâtre ou noire. Celle dont la graine est blanche est la plus estimée. A défaut de celle-ci, ou se sert ordinairement de l'espèce dont la graine est roussâtre. Quant à la troisième, on n'en fait guère usage en médecine. Les feuilles de la jusquiame, broyées et combinées avec de la bouillie d'orge, donnent un cataplasme qui dissout les tumeurs de toute nature, et qui a la vertu incomparable d'apaiser les ardeurs, de la goutte. Injecté dans les oreilles, le jus de cette herbe tue les vers qui s'engendrent dans cet organe, et calme les différentes douleurs auxquelles il est sujet. Un gargarisme de vinaigre tiède, où l'on a fait bouillir des racines de jusquiame, est un remède très efficace contre les douleurs de dents les plus violentes. Le jus de la graine de cette herbe, employé en fomentation, apaise l'inflammation des yeux et sèche les humeurs visqueuses qui en découlent. En administrant à la dose d'une obole cette graine mêlée avec une égale quantité de graine de pavot et d'hydromel, on arrête la ménorragie chez les femmes, et on guérit, dit-on, ceux qui sont atteints d'hémoptysie. Ce mélange, souvent pris en breuvage, arrête les vomissements de sang, quelle que soit la cause dont ils proviennent. Broyée dans du vin et employée en cataplasme, la même graine dissipe le gonflement des mamelles et des testicules. Elle entre dans la composition d'un grand nombre d'emplâtres et de médicaments. Cette herbe, mangée comme un légume, cause la manie, et son jus, distillé sur une blessure quelconque, produit le même effet.

LXII. MALVA.

LXII. La mauve.

Dixerunt malvam veteres quod molliat alvum,

esse cacostomacham Sextus Niger asserit illam

atque Dioscorides, tamen interioribus ambo

1965        sumptam sicut olus multum prodesse fatentur,

et sic vesicae dicunt illam medicari,

sicque venenosis occurrere potibus illam.

Hi quoque confirmant, malvae foliis salicisque

ex aequo tritis citius meliusque cruentum

1970        sanari vulnus, emplastris quam pretiosis.

Addunt auctores ipsi, quod malva potenter

conquassata juvet adipi commixta vetusto,

unius caulis radix admota dolori

dentis sedat eum ; venerem stimulare refertur

1975        haec eadem, femori si lino adnexa geratur.

In lana nigra tectam si gesserit illam

femina, mammarum dicunt occurrere morbis ;

scripsit abortivam Thebana Olympias illam,

si resolutus adeps miscebitur anseris illi

1980        et sic subdatur, veluti pessaria, vulvae.

Contritis foliis illius cum sale pauco

egilopas pelles, succoque medeberis ejus

puncturis apium ; cui si conjungis olivum,

corpus et inde linas, apium te nulla nocebit.

1985        Decoctam lotio capiti superaddito malvam,

sic turpes achoras pelles furfurque nocivum ;

decoctis ejus foliis si jungis olivum,

extingues ignem sacrum cataplasmate tali.

Et combusturis illo bene subvenis ignis.

1990        Duricias stericas ejus decoctio mollit ;

intestinorum causis matricis et ani

haec eadem mire prodest, si subditur illis.

La mauve a été appelée malva par les anciens, en raison de ses propriétés laxatives. Sextus Niger et Dioscoride prétendent qu'elle est mauvaise pour l'estomac ; cependant, suivant les mêmes médecins, préparée et mangée comme un légume, elle ne laisse pas d'être très efficace contre les affections internes : elle remédie aux affections de la vessie, et neutralise l'effet des substances vénéneuses. Ils pensent que rien n'est plus propre à cicatriser sur-le-champ une blessure vive, qu'un cataplasme de feuilles de mauve et de saule, broyées ensemble à poids égaux. Les mêmes auteurs ajoutent que, mêlée avec du vieux oing, cette herbe est très bonne pour la guérison des fractures. Appliquée sur la partie malade, une seule racine de mauve suffit pour apaiser les douleurs de dents ; attachée à la cuisse avec un fil, elle excite à l'amour. Ils prétendent encore que les femmes qui portent sur elles une racine de cette herbe, enveloppée de laine noire, se préservent des maladies du sein. Suivant la Thébaine Olympias, cette racine, broyée dans de la graisse d'oie, et appliquée en pessaire sous la matrice, provoque l'avortement. Des feuilles de mauve pilées avec un peu de sel donnent un cataplasme qui remédie à l'aegilops. Le jus de cette herbe est également bon contre la piqûre des abeilles. En y mêlant de l'huile et en se frottant le corps avec cette mixtion, on peut braver l'aiguillon de ces mouches. Une décoction de mauve et d'urine, employée en lotion, fait disparaître la teigne hideuse et la crasse, ce fléau de la tête. La feuille de cette herbe, bouillie avec de l'huile et appliquée en cataplasme, apaise le feu sacré. Préparée de la même manière, elle remédie aux brûlures. Une décoction de la mène herbe, employée comme topique, est également efficace contre les obstructions hystériques et les affections internes de la matrice et de l'anus.

LXIII. PARATELLA.

LXIII. Le parelle.

Herba solet lapathi volgo paratella vocari,

illius species dicuntur quatuor esse,

1995        par tamem est ferme vis omnibus in medicina,

omnibus est illis fervens austeraque virtus,

unde quidem stomachum confortat sumpta, soletque

in stomacho clausum per ructus pellere ventum,

sumptaque sicut olus fertur restringere ventrem.

2000        Pruritus mordax scabiesque cutis laceratrix

illius tepido cedunt apozimate fota ;

in vino coctae radices et bene tritae

appositae scrophas compescunt parotidasque.

Ejus saepe tepens si coctio gargarizetur

2005        uvas sedabit tumidas dentisque dolorem.

Haec dysentericos potu juvat et ciliacos,

pellitur hac tepida dolor auris si foveatur.

Decoctas valido radices ejus aceto

et tritas spleni superaddito saepe tumenti,

2010        quamvis non modicum reprimet siccando tumorem.

Cum vino vel aqua radicum coctio facta

menstrua restringit potu, lapidesque repellit ;

haec eadem juvat ictericos, suspensaque collo

illius radix scrophas nasci prohibebit.

Le lapathum est appelé communément parelle. On en distingue quatre espèces, qui toutes ont à peu près les mêmes vertus médicales. Elles sont toutes aussi d'une nature chaude et âpre et, par conséquent stomachiques. Prise comme aliment, cette herbe fortifie l'estomac et fait rendre les vents qu'il renferme ; elle resserre aussi, dit-on, le ventre. Une décoction tiède de lapathum, employée en fomentation, apaise les douleurs prurigineuses et fait disparaître les dartres qui rongent la peau. Soigneusement broyées et cuites dans du vin, ses racines dissolvent les écrouelles et les tumeurs des glandes parotides. Une décoction de cette herbe, employée tiède en gargarisme, dissipe le gonflement de la luette et le mal de dents. Prise en boisson, .elle arrête la dyssenterie et apaise les coliques. Injectée tiède dans l'oreille, elle en calme les douleurs. Ses racines cuites dans du fort vinaigre, et appliquées en cataplasme sur la partie malade, dissipent, en les séchant, les gonflements de la rate, quelle que soit leur intensité. Une décoction de racines dans du vin ou de l'eau, prise en boisson, arrête la ménorragie et dissout la gravelle. Cette décoction est également bonne contre la jaunisse. La racine de lapathum, suspendue au cou, préserve des écrouelles.

LXIV. LOLIUM.

LXIV. L'ivraie.

2015        Frumentis nocuam lolium Graecus vocat herbam,

quam nostri dicunt vulgari more nigellam.

Cancros emundat, pascentia vulnera curat,

cum raphano modicoque salis superaddita trita ;

zernas et lepras cura compescis eadem.

2020        Sulphure cum vivo purgamentisque columbae

admisce lolium, semen quod lilia praebent

his jungas, haec cocta mero superaddito scrophis,

sic scrophas spargit, sic apostemata rumpit ;

duriciasque alias emolliet hoc cataplasma.

2025        Mulsa decoctum commixto thure crocoque

apponas coxae, sciasis quam vexat iniqua.

Parturiens mulier si se subfumiget illa,

asseritur citius ventris deponere pondus.

L'ivraie, que les Grecs nomment λόλιον, est une herbe qui nuit beaucoup au blé, et qu'on appelle vulgairement nigella. Elle a la vertu de dissiper les humeurs cancéreuses et de cicatriser les ulcères rongeurs. Pour obtenir cet effet, il faut la broyer avec du raifort et un peu de sel, et l'appliquer sur la partie malade. Employée de la même manière, elle fait disparaître les dartres et la lèpre. Combinée avec du soufre vif, de la fiente de colombe et de la graine de lis, et cuite dans du vin, elle donne un cataplasme qui dissipe les écrouelles, fait percer les abcès et dissout toutes sortes d'obstructions. Cuite dans de l'hydromel avec de l'encens et du safran, et appliquée sur la cuisse, elle apaise les douleurs de la goutte sciatique. Employée en fumigation, elle facilite, dit-on, l'accouchement.

LXV. CICUTA.

LXV. La ciguë.

Frigida letiferae vis est natura cicutae,

2030        unde necat gelidi potantes more veneni ;

qui perit hac herba cutis ejus fit maculosa,

unde genus mortis valet haec per signa probari ;

publica poena reis haec esse solebat Athenis,

hac sumpta magnus Socrates fuit exanimatus ;

2035        qualiter hoc fiat non aestimo dicere nostrum,

cum nil quod noceat, sed quod juvat est referendum.

Hac sumpta si quis morti sit proximus herba

forte merum tepidum bibat evadetque periclum.

Sed quamvis potu solet haec assumpta nocere,

2040        magnifice tamen appositu solet illa juvare ;

aestivas mire juvat epiphoras oculorum,

si frons contritis foliis sit operta virentis,

vel si sint ejus circumlita lumina succo ;

hac quoque pellentur sacer ignis et herpeta cura.

2045        Tradit Anaxilaus, si succo saepius ejus

virgo linat mammas, sibi cum turgescere primum

incipient, modicas semper stantesque manere ;

lac contrita virens mammis superaddita siccat ;

extinguit venerem, fluxum quoque seminis omnem

2050        si pecten trita cataplasmes saepius illa.

Argenti spumae commiscens hanc adipique

apponas calidae cataplasma salubre podagrae

et per se tali multum prodesse probavi ;

singula cur memorem, nocuum quemcunque calorem

2055        apposita trita poteris curare cicuta.

La ciguë est une herbe froide et vénéneuse, dont le jus donne la mort à ceux qui en boivent. Comme elle a pour effet de laisser des taches sur le cadavre, ces taches sont des signes auxquels on peut reconnaître si une personne a été victime de ce genre de mort. Chez les Athéniens, les criminels condamnés à la peine capitale buvaient la ciguë, et le grand Socrate a illustré ce genre de mort. Je ne rechercherai pas quelle est la nature de cette herbe considérée comme poison, mon dessein étant de faire connaître les vertus salutaires des plantes, et non ce qu'elles ont de nuisible. S'il arrive qu'une personne soit en danger de mort pour avoir bu de la ciguë, on peut en neutraliser l'effet en lui faisant prendre du vin tiède riche en principes généreux. Mais, quoique cette herbe, convertie en breuvage, ait de funestes effets, elle est cependant très salutaire lorsqu'on l'emploie comme topique. Ainsi la feuille de ciguë, broyée toute verte et appliquée sur le front, est un remède très efficace contre l'épiphora. On obtient le même effet en fomentant les paupières avec le jus. Employée de la même manière, elle dissipe le feu sacré et les dartres. Suivant Anaxilaüs, la jeune fille qui a soin, dans l'adolescence, de·se frotter les mamelles avec le jus de ciguë, conservera toujours son sein ferme et bien proportionné. Broyée et appliquée sur les mamelles, cette herbe tarit le lait des femmes. Des cataplasmes de ciguë broyée, souvent renouvelés sur l'os pubis,·éteignent les ardeurs érotiques et arrêtent les écoulements spermatiques. Mêlée avec de la litharge et de la graisse, et appliquée chaude sur le corps, elle calme admirablement les douleurs de la goutte, ainsi que j'en ai fait l'expérience. Enfin, pour ne pas entrer dans de minutieux détails, la ciguë broyée est un remède efficace contre toutes sortes d'inflammations.

LXVI. PIPER.

LXVI. Le poivre.

Carmine jam dictis aliquot vulgaribus herbis

nunc species illas, quas cunctis jam prope notas

usus vendendi fecit, tentabo referre,

atque prius piperis (quod notius ipsa coquina

2060        quam medicina facit) vires puto discutiendas.

Virtutis siccae piper asseritur calidaeque,

tertius esse gradus conceditur huic in utroque.

Tres sunt huic species : album, longumque nigrumque,

sed quia sunt geminae medicis tantummodo notae,

2065        de specie nigra dicam quaedam mihi nota.

Crudum vel coctum sumptum, vel melle jugatum,

vim digestivam stomachi jecorisque juvabit.

Morsus pestiferos curat, fastidia tollit,

occurrit variis thoracis saepe querelis,

2070        quodque movere solet frigus periodica febris

compescit, febris si sumitur ante tremorem.

Cum lauri baccis vel cum foliis bene tritis,

cumque mero tepido potatum tormina sedat,

et scrophas reprimit admixtum cum pice dura

2075        et superappositum ; recte quoque jungitur illis,

quae purgare solent oculos caligine dira.

Admixtum nitro maculas cataplasmate delet,

usti stercoris humani cum pulvere tritum

ana junge piper et sic superaddito cancris,

2080        experti nihil utilius hoc pulvere dicunt.

Nemo potest omnes piperis describere vires,

namque piper ferme medicamina cuncta requirunt,

antidotisque solet pretiosis pluribus addi,

hinc puto tam paucas laudes de simplice dictas

2085        quod sit in innumeris hoc dignum laude medelis.

Après avoir enseigné dans mes vers les vertus des herbes vulgaires qui croissent dans nos jardins, il me reste à parler des herbes exotiques que le commerce a fait connaître à presque tout le monde. Je commencerai par énumérer les vertus du poivre, plus connu comme condiment que par ses propriétés médicales.

Le poivre a une force de chaleur et de siccité du troisième degré. On en distingue trois espèces : le poivre blanc, le poivre long et le poivre noir. Les deux premières espèces étant connues seulement des médecins, je ne m'occuperai que du poivre noir, et me bornerai à dire ce que je sais de cette troisième espèce.

Pris cru ou cuit, ou incorporé avec du miel, le poivre noir est digestif et efficace dans les affections du foie. Il neutralise l'effet des morsures venimeuses, il dissipe les dégoûts, il remédie aux différentes affections du thorax, et prévient le retour des fièvres périodiques lorsqu'on a soin d'en prendre avant le frisson. Combiné avec des baies ou des feuilles de laurier broyées, et détrempé dans du vin tiède, il donne une boisson qui apaise la colique. Mêlé avec de la poix dure et appliqué en cataplasme, il dissout les écrouelles. C'est un des ingrédients les plus efficaces des remèdes qu'on emploie ordinairement contre l'obscurcissement de la vue. Mêlé avec du nitre, il fait disparaître les taches de la peau. Broyé, à quantité égale, avec de la cendre d'excréments humains, rien n'est, dit-on, plus efficace contre les affections cancéreuses. Il serait impossible d'énumérer toutes les vertus du poivre ; il entre dans la plupart des médicaments et dans un grand nombre d'antidotes renommés. Ceci me donne à penser que, peut-être, on fait peu l'éloge du poivre, précisément parce que ses vertus sont innombrables.

LXVII. PYRETHRUM.

LXVII. Le pyrèthre.

Est pyrethrum calidum siccumque, quartus in istis

est gradus ; excruciat dentes si frigidus humor

masticet hoc patiens, teneatque diutius ore,

et juvat admixto si gargarizetur aceto ;

2090        hocque modo tumidam reprimit de flegmate linguam,

sic uvam relevat humoris pondere pressam,

et multis aliis vitiis sic subvenit oris.

non modicum prodest sumptum cum melle caducis,

sicque levare solet morbum qui membra resolvit ;

2095        suspensum collo pueris prodesse caducis

creditur et solo succurrere fertur odore.

Ex oleo quo decoquitur si corpus inungas

ante febris motum, minuet tolletque rigorem,

renum saepe gravem fugat unguen tale dolorem,

2100        Miram sentit opem paralyticus inde perunctus,

non leviter manibus fuerit si saepe fricatus ;

unguine si totum corpus mulcebitur isto,

largus per poros sudor procedet apertos ;

membrorum solet hoc quemvis curare stuporem,

2105        et corpus servare potest a frigore tutum,

et medicamento solvetur tetanus isto.

Tantundem prodest, si tritum solvis olivo

sicque fricando locum quem vis medicare perungas.

Le pyrèthre a une force de chaleur et de siccité du quatrième degré. Le mal de dents produit par le contact de l'eau froide se calme en mâchant cette plante et la gardant longtemps dans la bouche, ou en l'employant, macérée dans du vinaigre, sous forme de collutoire. Par le même moyen, on dissipe l'enflure de la langue, on relève la luette surchargée par le poids de l'humeur qui y afflue, et on guérit une infinité d'autres maladies de la bouche. Prise avec du miel, cette herbe est très bonne contre l'épilepsie et les attaques de nerfs. Suspendue au cou des enfants épileptiques, elle conjure, à ce qu'on croit, par son odeur seule, les attaques de cette terrible maladie. Une décoction de pyrèthre dans l'huile, employée en fomentation avant le retour du frisson, diminue ou apaise les ardeurs de la fièvre. Les maux de reins cèdent également à la vertu de ce remède. Cette décoction est surtout très efficace contre la paralysie, et le malade sur qui on en aura fait usage par des frictions énergiques et réitérées, éprouvera un sensible soulagement. En s'en frottant légèrement tout le corps, elle dilate les pores et active la transpiration ; elle ranime les membres engourdis, préserve le corps de tout refroidissement, et remédie aux contractions nerveuses. Broyé et détrempé dans de l'huile, le pyrèthre a les mêmes vertus, et l'on peut l'employer en frictions sur toutes les parties du corps.

LXVIII. GINGIBER.

LXVIII. Le gingembre.

Gingiber atque piper aequales in medicina

2110        dicunt, hac causa taceo de viribus ejus.

Comme les médecins reconnaissent au gingembre des propriétés médicales analogues à celles du poivre, je m'abstiendrai d'en parler ici.

LXIX. CYMINUM.

LXIX. Le cumin.

Esse putant medici calidum siccumque cyminum

tertius est illi gradus in virtutibus istis.

Assumptum quocunque modo depellere tradunt

viscera vexantem ventum stomachumque gravantem ;

2115        et digestivum stomachi jecorisque calorem

excitat, et veneris credunt inhibere furorem,

et fluxum ventris in aceto stringere coctum.

Hoc orthopnoicis miram praestare medelam

experti dicunt cum pusca saepius haustum,

2120        atque venenosis cum vino morsibus ipsum

praebet opem, tritumque fabae cum polline juncto

melle tepente solet testes curare tumentes

appositum ; sistit cum pusca menstrua sumptum,

dicunt pallentem dare mansum saepe colorem.

Le cumin a une force de chaleur et de siccité du troisième degré. Sous que:lque forme qu'on le prenne, il chasse les vents qui torturent les entrailles et entravent les fonctions de l'estomac ; il ranime la chaleur digestive de l'estomac et du foie, et apaise, dit-on, les ardeurs érotiques. Bouilli dans du vinaigre, il arrête le flux de ventre. Mangé avec de la bouillie, il devient un spécifique très efficace contre l'orthopnée. Pris avec du vin, il neutralise l'effet des morsures,venimeuses. Broyé avec de la farine de fève et du miel tiède, et appliqué en cataplasme, il dissipe le gonflement des testicules. Pris avec de la bouillie, il arrête l'écoulement du sang chez les femmes. Il rend pâles, dit-on, les personnes qui en mangent souvent.

LXX. GALANGA.

LXX. Le galanga.

2125        Flegmonem stomachi sumptum galanga resolvit,

et si flegmaticus fuerit corroborat illum,

inclusum ventum sumptum fugat interiorum,

vim digestivam juvat hoc colicisque medetur,

oris non modicum mansum commendat odorem,

2130        augmentat sumptum veneris renumque calorem.

Le galanga dissout les flegmons de l'estomac, fortifie les personnes flegmatiques, est un bon carminatif, ranime la faculté digestive et apaise la colique. Il contribue surtout à purifier l'haleine, ranime la chaleur des reins et porte à l'amour.

LXXI. ZEDOAR.

LXI. Le zédoaire.

Adprime sumptis zedoar obstare venenis

affirmant, et reptilium morsus levat haustum.

Sumptum confortat stomachum ructusque salubres

commovet, et crebro fastidia reprimit usu ;

2135        antiquum stomachi dicunt curare dolorem,

illud si patiens jejuno masticet ore,

et sic infectam sensim voret ore salivam.

Lumbricos ventris depellere dicitur haustum ;

allia quem faciunt foetorem pellit ab ore

2140        et nimium bibiti vini depellit odorem.

Le zédoaire, pris en breuvage. passe pour être un excellent contre-poison, et avoir la vertu de neutraliser l'effet de la morsure des reptiles. Il fortifie l'estomac, le débarrasse des vents qui l'incommodent, et, par un usage prolongé, dissipe les dégoûts. Il remédie aux affections chroniques de l'estomac ; et, pour obtenir cet effet, il faut en mâcher à jeun et en avaler le jus avec la salive. Il détruit les vers qui s'engendrent dans les intestins, et dissipe l'odeur désagréable que l'ail ou le vin pris avec excès communiquent à l'haleine.

LXXII. GARIOFILUS.

LXXII. Le caryophylle.

Gariofilum dicunt calidum siccumque secundo

esse gradu ; jecur et stomachum corroborat haustum,

et ferme cunctis valet interioribus ipsum.

Accendit venerem si dragmae pondere tritum

2145        potatum fuerit cum vaccae lacte recenti ;

vim memorem cerebri confortat saepius haustum.

Le caryophylle a une force de chaleur et de siccité du second degré. Pris en boisson, il fortifie le foie et l'estomac, et remédie à presque toutes les affections internes. Une drachme de caryophylle broyée dans du lait frais de vache donne une boisson qui porte à l'amour et fortifie la mémoire.

LXXIII. CINNAMA.

LXXIII Le cinnamome.

Cinnama tres species dicuntur habere, sed harum

est pretiosa magis, quae plus subtilis habetur

et quae plus mordet mixta dulcedine linguam.

2150        Humores stomachi siccat, corroborat ipsum,

et facit acceptas ut digerat ocius escas ;

sumptum curat hepar lotiumque et menstrua purgat,

humida tussis eo sedabitur atque catarrhus.

Hydropisis speciem, cui praebent tympana nomen,

2155        sumptum non modicum reprimit renumque dolorem ;

reptilium morsus curat ; si jungitur illis,

quae curant uculos, humores siccat aquosos ;

si bene contritum forti miscetur aceto

liberat appositum tetra lentigine vultum,

2160        sicque juvat morbum qui ducit ab impete nomen.

Grossa magis species fluxus haemorrhoidarum

stringit, aqua gelida bene si contrita bibatur,

tempore quo nondum patiens jejunia solvit.

De specie geminas haec quaerit potio dragmas.

On distingue trois espèces de cinnamomes ; mais on regarde comme le plus précieux celui qui est le plus léger et dont la saveur est à la fois mordante et douce. Il sèche les humeurs de l'estomac, le fortifie et aide à la digestion. Il soulage le foie, est diurétique, emménagogue. Il est également efficace contre la toux et les affections catarrheuses, et remédie particulièrement à cette espèce d'hydropisie qu'on appelle lympanite. c'est encore un excellent spécifique contre les maux de reins les plus graves. Il neutralise l'effet de la morsure des reptiles. Associé aux remèdes ophthalmiques, il sèche les humeurs aqueuses. Broyé dans de fort vinaigre, et appliqué sur le visage, il fait disparaître les taches de rousseur. il dissipe aussi cette affection cutanée qui tire son nom du mot impes (impétuosité, c'est-à-dire de la rapidité avec laquelle elle se développe).

La grosse espèce de cinnamome a la vertu d'arrêter le flux hémorroïdal ; et, pour obtenir cet effet, il faut la broyer dans de l'eau froide et l'administrer sous forme de boisson, que le malade devra prendre à jeun. La dose de cette espèce de cinnamome doit être alors de deux drachmes.

LXXIV. COSTUS.

LXXIV. Le costus.

2165        Costi sunt geminae species : gravis una rubensque

est et amara nimis, haec indica dicitur esse ;

altera vero levis, nec amara, colore subalba,

hanc Arabes mittunt, prior utilior medicinae.

Urinas purgant et eis obstantia pellunt,

2170        splen curant et hepar, laterisque fugare dolorem

dicunt, cum vino tepido si sumpserit aeger.

Menstrua purgabunt, si se subfumiget illis

femina, sic etiam vulvae sedare dolorem

dicunt, aut ex his sibi si pessaria subdat ;

2175        lumbricos pellunt, purgant lentigine vultum,

si tritis cum melle linas, veneremque movere

dicuntur, si sint cum mulsa sumpta tepenti.

Ex oleo costum quo coxeris illine quemvis

ante febris typum, reddes a frigore tutum ;

2180        subvenit hoc sciasi membrisque tumentibus unguen,

antiquum vulnus cito curat pulvis eorum.

On distingue deux espèces de costus : l'une lourde et rouge, qui est très amère et qui croît dans l'Inde ; l'autre, légère, sans amertume, blanchâtre, qui croit dans l'Arabie. La première est la plus efficace en médecine.

Pris en boisson avec du vin tiède, le costus est diurétique, remédie anx affections de la rate et du foie,et apaise les douleurs de côté. Employé en fumigation, il facilite l'écoulement périodique du sang chez les femmes et calme les douleurs de la vulve. On obtient le même effet en l'appliquant en pessaire. Broyé avec du miel et employé en fomentation, il chasse les vers ascarides lombricoïdes, et fait disparaître les taches de rousseur du visage. Pris avec de l'hydromel, il porte à l'amour. Des frictions faites avant le retour du frisson avec une décoction de costus dans l'huile, délivrent de la fièvre. On remédie de la même manière à la gontte sciatique et à l'enflure des membres. La poudre du costus cicatrise à 'instant les plaies invétérées.

LXXV. SPICA.

LXXV. Le spica-nard.

Esse gradu primo calidam siccamque periti

testantur spicam, quae dicitur indica nardus.

Confortat potata jecur, stomachique dolorem

2185        mitigat, et renes illius apozima purgat,

vesicam juvat, urinas et menstrua pellit,

ictericis prodest, nocuis humoribus obstat,

quos caput ad pectus transmittit saepe per uvam ;

puncturas aufert et morsus interiorum,

2190        in stomacho clausum solet hausta repellere ventum ;

matricis nimium restringit subdita fluxum.

Cum gelida si detur aqua, sedare tremorem

dicitur haec cordis, et nausea sistitur inde.

Excitat haec venerem cum sapae sumpta liquore,

2195        duricias stericas elixatura resolvit

ejus fomento per partes inferiores.

Lumina si tepida foveantur saepius illa,

affirmant aeri prurigine libera reddi,

palpebraeque pili bene confortantur eadem.

2200        Est nardi species, quae Celtica spica vocatur,

Celtarum tantum quod nascitur in regione ;

omnia quae nardus valet indica, dicitur ista

posse, licet vires videatur habere minores.

Suivant les médecins, le spica-nard, autrement appelé nard indien, a une force de chaleur et de siccité du premier degré. Pris en boisson, il fortifie le foie,et apaise les douleurs d'estomac. L'apozème de spica-nard purge les reins, soulage la vessie, active la sécrétion de l'urine, facilite l'écoulement périodique du sang chez les femmes, dissipe la jaunisse, et chasse ces humeurs nuisibles qui descendent quelquefois de la tête dans la poitrine par la luette, cicatrise les blessures et les plaies intérieures, et débarrasse l'estomac des vents qui l'incommodent. Placée sous la matrice, cette plante a encore la vertu d'arrêter la ménorragie. Prise dans de l'eau froide, elle apaise les palpitations de coeur et la nausée ; dans du vin cuit, elle est aphrodisiaque.Bouillie et employée en fomentation,elle amollit les obstructions de la matrice. Employée tiède de la même manière, elle calme, assure-t-on, la démangeaison des yeux et fortifie les cils.

Il y a une autre espèce de nard qu'on appelle nard celtique, parce qu'il naît dans le pays des Celtes, qui a les mêmes propriétés que le nard indien, mais moins énergiques.

LXXVI. THUS.

LXXVI. L'encens.

Thus calidum siccumque gradu dixere secundo.

2205        Lumina clarificat, lacrymo si solvitur ovi

contritum vel femineo cum lacte tepenti.

Acri cum vino tritum pice lacteque mixtis

vulnera praecipue curare recentia dicunt ;

pingui porcino mixtum medicabitur ustis,

2210        admixtum melli panaritia decutit unguis.

Thus bene contritum vinoque tepente solutum

affirmant auri multum prodesse dolenti,

tritum cum creta cimolea sicque rosato

permixtum mammas dicunt curare tumentes.

2215        Nil credunt haemoptoicis magis auxiliari,

admixto vino si sumatur vel aceto ;

thus cum lacte terens muliebri si superaddas

ulceribus, fieri quae saepe videntur in ano

aut alio quocunque loco, medicabitur illis.

2220        Huic aloë jungens lacrymumque albuminis ovi,

sic ut sit spissum, sectae superaddito venae,

aut his vulneribus nimio quae sanguine manant,

nec solvas nisi cum credas divisa coisse ;

si sit opus medicamen idem superadde priori,

2225        donec firmari valeat solidata cicatrix,

affirmant melius nil sistere posse cruorem.

Vim memorem cerebri proprio confortat odore,

origano junctum si quis commasticet ipsum,

humores nocuos capitis per sputa repellit,

2230        allevat ista gravem capitis purgatio linguam.

Anseris aut anatis mixta pinguedine thuri

fit cataplasma valens membris, quae laeserit ignis.

L'encens a une force de chaleur et de siccité du second degré. Broyé dans un blanc d'oeuf ou dans du lait tiède de femme, il éclaircit la vue. Broyé et combiné avec du vinaigre, de la poix et du lait, il a surtout la vertu de cicatriser les blessures récentes. Mêlé avec de la graisse de porc, il remédie aux brûlures ; avec du miel, il dissout les panaris. Broyé et détrempé dans du vin tiède, il apaise, assure-t-on, les douleurs d'oreilles. Broyé et mêlé avec de la craie du mont Cimole et du vin rosat, il dissipe le gonflement des· mamelles. Pris avec du vin ou du vinaigre, c'est le remède le plus efficace qu'on connaisse contre l'hémoptysie. Broyé avec du lait de femme et appliqué comme topique, il remédie aux ulcères qui se forment dans l'anus ou dans tout autre partie du corps. Un topique composé d'encens, d'aloès et de blanc d'oeuf, et appliqué sur la veine ouverte ou sur une blessure saignante, arrête l'hémorragie. Il faut avoir soin, dans ce cas, de ne vas lever l'appareil avant qu'on ne soit sûr que la plaie est fermée ; et même, au besoin, il faut appliquer un second emplâtre sur le premier, jusqu'à ce que la cicatrice soit assez bien formée pour se solidifier par elle-même. Il n'y a pas, dit-on, de meilleur remède pour étancher le sang. L'odeur de l'encens a la vertu de fortifier la mémoire. Mâché avec de l'origan, il provoque l'expectoration et par là purge la tête des mauvaises humeurs qui la surchargent, en même temps qu'il déterge la langue. Mêlé avec de la graisse d'oie ou de canard, il donne un cataplasme qui remédie aux brûlures.

LXXVII. ALOË.

LXXVII. L'aloès.

Sunt aloë species geminae, quae subrubet estque

intus sicut hepar cum frangitur, haec epatite

2235        dicitur et magnas habet in medicamine vires,

utilior piceo quae fracta colore videtur.

Flegmate mundificat stomachum, caput articulosque,

leniter humorem nocuum purgando per alvum ;

ictericos purgat, jecoris juvat interiora.

2240        Vulnus quodque recens putredine purgat ab omni

illius injectus pulvis siccandoque sanat ;

praecipue veretri dicunt et testiculorum

ulcera curari vel vulnera pulvere tali.

Si solvatur aqua, juvat apostema labrorum

2245        et naris superappositum, nec non oculorum

livoremque fugat, sic circa lumina factum ;

acri cum vino miscens oleoque rosato

unge dolens caput et frontem, mireque juvabit,

unguine pruritus sedabitur hoc oculorum.

2250        Cum vino bene contritum cataplasmaque factum

confortat retinetque pilos quoscunque cadentes ;

linguae, gingivis, vitiis quoque subvenit oris,

si fricentur eo cum vino melleque trito.

Hoc sumptum per se ventrem non solvit acute,

2255        esse tamen stomacho putat Oribasius aptum,

cum laedant illum solventia caetera ventrem :

illius geminas cum mulsa sumere dragmas

idem praecepit, choleram sic flegmaque purgat,

unaquaque die post coenam sumere dixit

2260        utile tres ejus pilulas binasve virentis

cum succo caulis formatas, ut faba grossas

aut cicer, humores nocuos cum stercore purgat,

non corrumpendo stomachum neque vim faciendo

purgatus pilulis fuerit qui saepius istis,

2265        vix unquam capitis vexabitur ille dolore,

et nihil est oculis, mihi crede, salubrius istis ;

si vero duram vis solvere largius alvum

partibus est geminis pars admiscenda terendo

una diagridii, sic apta solutio fiet.

Il y a deux espèces d'aloès, dont l'une, qui est rougeâtre à l'extérieur, et qui a intérieurement la couleur du foie, est appelée hépatique. Elle a des propriétés médicales très développées : aussi est-elle plus utile que l'autre dont la cassure offre la couleur de la poix. Elle purifie l'estomac, la tête et les articulations, en expulsant les humeurs nuisibles par des évacuations qui ne fatiguent pas le corps. Elle dissipe la jaunisse et remédie aux affections du foie. Réduite en poudre et injectée dans les plaies, elle les déterge et les cicatrise. Employée de la même manière, elle guérit les ulcères et les blessures du membre viril et des testicules. Détrempée dans l'eau et appliquée en cataplasme, elle dissout les tumeurs des lèvres et des narines, et dissipe la teinte livide qui flétrit le tour des yeux. Mêlée avec du vinaigre et de l'huile rosat, et employée en fomentation, elle calme d'une manière merveilleuse le mal de tête et apaise les démangeaisons des yeux. Un cataplasme composé d'aloès bien broyé avec du vin, fortifie les cheveux et les empêche de tomber. Triture avec du vin et du miel, et employé en collutoire, l'aloès guérit les affections de la langue, des gencives, et toutes les maladies de la bouche. Pris en boisson, il relâche doucement le ventre. Suivant Oribasius, il est stomachique, quoique, en général, tout ce qui relâche le ventre soit contraire à l'estomac. Suivant le même auteur, deux drachmes d'aloès, mêlées avec de l'hydromel, chassent la bile et les flegmes ; deux ou trois pilules composées d'aloès et de jus de chou vert, de la grosseur d'une fève ou d'un pois chiche, provoquent des évacuations qui débarrassent le corps des humeurs nuisibles. En prenant souvent ce purgatif, de manière, toutefois, à ne pas en faire abus et à ne pas surexciter l'estomac, on ne sera presque pas sujet au mal de tête. Rien n'est plus salutaire pour les yeux, comme j'en ai fait moi-même l'expérience. S'il s'agit, de remédier à une forte constipation, en broyant ensemble de l'aloès et de la scammonée, dans la proportion de deux parties du premier et d'une de la seconde, on obtiendra le soulagement désiré.