LA DÉFENSE DES PLACES
Oeuvre numérisée par Marc Szwajcer
Mémoires de la Société d'émulation du Doubs 1870-1 (pages 301-325)Par M. Albert de Rochas d’Aiglun
EXTRAITS DU TRAITÉSUR LA DÉFENSE DES PLACESPAR ÆNÉAS(ENÉE LE TACTICIEN)TRADUCTION NOUVELLE PRÉCÉDÉE D’UNE NOTICE
NOTICE SUR ÆNÉASLe Traité sur la défense des places, le plus ancien des ouvrages militaires que nous possédions, est tout ce qui nous reste des œuvres d’Ænéas. Il résulte de divers passages de ce traité, de Polybe et de Suidas, que l’auteur vivait au commencement du règne de Philippe de Macédoine, père d’Alexandre le Grand, et qu’il avait composé, outre l’ouvrage qui nous occupe, plusieurs autres écrits relatifs à l’art militaire et ayant les titres suivants: Des signaux par le feu (Polybe, x) Des stratagèmes (Suidas, p. 38, éd. Bernhardy); Des préparatifs de guerre (Ænéas, VII, VIII, XXI, XL) Des finances (Ænéas, xiv) De la castramétation (Ænéas, xxi). Le traité sur la défense des places, tel qu’il nous est parvenu, n’est même probablement pas l’œuvre originale, mais bien l’abrégé qui, au dire d’Elien (Tactique, i), en fut fait, quelques années après, par Cynéas de Thessalie, général et confident de Pyrrhus, roi d’Epire. On connaît cinq manuscrits de cet ouvrage : 1° le manuscrit du Vatican, qui n’a encore été collationné par aucun éditeur; 2° le manuscrit de Médicis qu’a décrit Bondini Cat. codd., græc. bibl. Laur., ii, pp. 218-238) ; 3°, 4° et 5° les manuscrits 2435, 2443, 2522 de la Bibliothèque nationale de Paris, qui sont des dérivés du manuscrit de Médicis. C’est d’après le manuscrit 2443 que Casaubon l’a publié pour la première fois en 1609 (Paris, in fol.), en l’accompagnant d’une version latine. Depuis, il a été imprimé plusieurs fois à la suite des principales éditions de Polybe. En 1757, le comte de Beausobre, maréchal de camp, en donna une élégante traduction française que l’on peut classer au nombre des belles infidèles. Les Allemands en ont publié diverses éditions; la plus récente est due à MM. Kœchly et Rüstow (Leipzig, 1853, in-8°) elle est accompagnée d’une bonne traduction allemande et de commentaires. EXTRAITS DU TRAITÉSUR LA DÉFENSE DES PLACES
CHAPITRE VIIIDES MOYENS DE RENDRE L’ACCÈS DE VOTRE TERRITOIRE DIFFICILE A L’ENNEMI1. — Quand un corps d’armée puissant et nombreux se dirige vers votre pays, il faut lui en rendre l’accès difficile, et s’arranger de telle façon qu’il ne puisse aisément ni s’y établir, ni s’y procurer des vivres. 2. — Il faut augmenter le nombre des cours d’eau [en ouvrant des canaux], et détruire les gués et les ponts. (cf. Philon IV, 11) 3. — Si le sol est sablonneux ou fait d’un terrain ferme, il faut, pour arrêter la marche de l’ennemi, établir çà et là des pièges, eu tenant compte de la nature des lieux.[1] (cf. Philon III, 28) 4. — S’il y a des ports dans le pays et dans la ville, il faut les munir de clôtures, afin d’empêcher l’ennemi soit d’y entrer, soit d’en sortir s’il y a déjà pénétré.[2] (cf. Philon III, 29) 5. — Quant aux choses qu’on sera forcé de laisser dans la campagne et qui pourraient servir à l’ennemi, telles que les matériaux de construction pour les retranchements, les campements ou autres choses semblables, il faut autant que possible les détruire, ou, si on ne les détruit pas, les cacher. 6. — Pour ne point donner à ce traité des développements considérables, je m’abstiendrai de dire ici comment on doit agir relativement aux aliments, aux boissons, aux fruits des champs, aux eaux dormantes qu’il faut rendre impotables, et enfin aux chemins que l’on doit rendre impraticables pour la cavalerie; nous en avons parlé en détail dans notre traité des Préparatifs de guerre.[3] (cf. Philon, II) (Trad. nouvelle.) CHAPITRE XVIDES SORTIES………………………………………………………………………… Si votre pays est d’un accès facile et que l’ennemi puisse l’envahir de plusieurs côtés, il faut occuper les points stratégiques de la contrée (katalabein thV cwraV topouV), de façon à disputer la route de la ville à l’ennemi. Si ces points vous manquent, il ne vous reste qu’une chose à faire, c’est d’occuper près de la ville des positions qui vous permettent de combattre avec avantage, ou de battre en retraite sans danger quand vous voulez vous retirer dans la ville. (cf. Philon, I, 55) (Trad. nouvelle.) CHAPITRE XXIDE LA PRÉPARATION DES ARMEMENTS ET DES AUTRES CHOSES1. — Nous ne dirons rien ici sur la préparation des armements, ni sur tous les établissements qu’il faut faire en pays ami, ni sur la manière de faire disparaître dans les campagnes ce qui s’y trouve ou de le rendre inutile à l’ennemi; car nous en avons déjà parlé à fond dans notre livre des Préparatifs de guerre. 2. — Nous avons traité aussi, dans notre livre intitulé De la castramétation, de la manière de placer les gardes de nuit, des rondes, des terreurs paniques, des synthèmes (συνθημάτων) et des parasynthèmes (παρασυνθημάτων); nous en parlerons cependant encore un peu.[4] (Trad. nouvelle.) CHAPITRE XXIIDE LA POSE DES GARDES………………………………………………………………………… 8. — Il faut que les escaliers (ai anabaseiV), qui conduisent sur le rempart, ne soient pas ouverts à tout venant, mais fermés à clef de telle façon qu’il ne soit pas permis à un traître, qui aurait l’intention de livrer la ville aux ennemis, de monter à volonté sur le mur pour leur préparer les voies; de plus, les gardes, que tu auras choisis toi-même, seront forcés d’y rester et ne pourront en descendre; [grâce à ces précautions] si quelques hommes parviennent du dehors à escalader la muraille sans être découverts, ils ne pourront pas passer facilement et avec rapidité du rempart dans l’intérieur de la ville, ou bien ils se verront contraints, soit de s’exposer au danger de sauter les uns sur les autres, soit de se découvrir, soit enfin d’être prévenus dans leur dessein. (Trad. nouvelle.) CHAPITRE XXIVDES SYNTHÈMES1. — Quand l’on donne un synthème, il faut, si l’armée est composée de soldats de différentes nations, bien faire attention que ce synthème ne puisse pas être compris de deux manières; car il pourrait en résulter des erreurs dangereuses. (Philon, 17, 21, 22) ………………………………………………………………………… 5. — Iphicrate voulait qu’on ne donnât pas le même synthème aux rondes (τὸνπερίοδον) et aux gardes (τὰ φύλακα), mais qu’on leur en donnât de différents; ainsi, la ronde interrogée d’abord répondra: Jupiter Sauveur; et, si c’est bien le mot, la garde interrogée à son tour devra répondre Neptune, par exemple. Grâce à cette précaution, on est moins facilement trompé par l’ennemi, et le mot a moins de chance de lui être livré ……………………………... 7. — Il faut que l’on exige des synthèmes aussi bien des gardes que des rondes; car il deviendrait complètement inutile de demander le synthème si l’ennemi pouvait l’apprendre en jouant le rôle d’une ronde.[5] (Trad. nouvelle.) CHAPITRE XXVDES PARASYNTHÈMESI. — Il y en a qui se servent de parasynthèmes, à cause des terreurs paniques, et pour reconnaître plus facilement les amis. Cf. Philon, III, 17, 21. 2. — Il faut que ces parasynthèmes remplissent bien leur but et que l’ennemi ne puisse pas facilement les découvrir. En voici des exemples: Dans les nuits obscures, on demandera le synthème, et en même temps on y ajoutera quelques paroles, ou l’on se fera reconnaître par quelque bruit; celui qui est interrogé répondra le synthème, et y ajoutera quelque parole convenue à l’avance, ou se fera reconnaître par quelque bruit. Dans le jour, celui qui demandera le synthème ôtera son chapeau, ou, s’il l’a à la main, il le mettra sur sa tête; il l’approchera de son visage ou l’en éloignera; il plantera sa pique en terre ou il la passera à sa gauche; il la saisira avec la main ou il l’élèvera. Celui qui est interrogé donnera le mot et fera celui de ces gestes qui aura été convenu. (Trad. nouvelle.) CHAPITRE XXVIDES RONDES1. — Dans les circonstances critiques, il faut que deux des escouades (λόχοι) réunies au marché fassent, convenablement armées, une ronde au pied des remparts, en marchant dans deux sens opposés; elles doivent bien prendre garde au parasynthème, afin de se reconnaître. 2. — Ceux qui font les premiers la ronde doivent la faire avant d’avoir soupé; car la ronde qui a lieu immédiatement après le repas, se fait d’ordinaire négligemment et moins en ordre. 3. — II est bon de faire la ronde sans lanternes, à moins que l’hiver ne soit fort rude et les nuits fort obscures. Il faut alors que la lampe ne projette aucune lumière en haut; pour cela, on la couvrira d’une façon quelconque, de manière à n’éclairer que le sol et ce qui se trouve en avant des pieds des soldats. 4. — Dans les villes où il y a des chevaux et où l’on peut marcher à cheval, ce seront des cavaliers qui feront les rondes pendant l’hiver; car, dans les grands froids, les grandes pluies et les nuits longues, la ronde se fait et se répète plus souvent à cheval qu’à pied. 5. — Quelques-uns la font faire en même temps sur les remparts, afin qu’une partie des rondes observe ce qui se passe au dedans pendant que l’autre observe ce qui se passe au dehors. Ceux qui font la ronde sur le rempart pendant les nuits obscures, auront des pierres et en jetteront de temps en temps dehors; mais il y en a qui blâment cet usage par la raison que nous avons indiquée plus haut. 6. — Lorsque les citoyens se défient les uns des autres, il faut que les rondes se fassent en bas des murs, et que les soldats ne montent pas sur le rempart, excepté ceux qui sont de garde ……………………………….. (Trad. nouvelle.) CHAPITRE XXXIDES LETTRES SECRÈTES1. — Pour ce qui regarde les lettres que l’on envoie en secret, il y a différentes manières de les faire parvenir; mais il faut auparavant que ceux qui s’écrivent soient convenus de quelques points. Les exemples suivants sont les plus sûrs à imiter. 2. — On avait mis un livre parmi plusieurs vases et autres effets; on avait fait des points sur les caractères de ce livre, qui, étant rassemblés, composaient tout ce qu’on voulait mander : ces points doivent être petits. Or, le livre étant parvenu à celui à qui on l’avait adressé, il copia de suite, d’une ligne à une autre, d’une page à une autre, tous les caractères qui étaient pointés, et en composa la lettre qu’on eût voulu lui écrire, et dont on avait seulement indiqué les caractères. 3. — Si l’on n’a que peu de choses à marquer à quelqu’un par une lettre, on peut aussi se servir de ce moyen qui ressemble fort au premier. En remplissant une lettre fort longue de plusieurs choses communes, on pourra faire la même chose dans cette lettre, en mettant des marques sur les caractères qui signifieront tout ce que vous voudrez que ces marques soient mises cependant de façon qu’on n’ait pas sujet d’y faire attention; par exemple, servez-vous de points ou de petits traits. De cette manière, personne ne prendra de soupçon; et il n’y aura que celui à qui la lettre aura été envoyée qui pourra la déchiffrer. 4. — Autre manière. Qu’on envoie un homme porter de vive voix des nouvelles indifférentes ou une lettre qui ne contienne que des choses fort ordinaires, mais que l’on mette à son insu dans ses souliers la lettre secrète; et, afin que ni la boue ni l’eau ne gâtent ce qui est écrit, il faut écrire sur du plomb blanchi qui ait été battu fort mince, de crainte que les lettres ne soient effacées. Lorsque l’exprès sera arrivé, que celui à qui il est adressé profite de son sommeil pour découdre ses souliers pendant la nuit, qu’il en tire la lettre, y substitue la réponse, raccommode le soulier, et que, le lendemain, il renvoie cet exprès avec une lettre ostensible. De cette manière, personne, pas même l’exprès, ne saura qu’elle est la ruse qu’on emploie; mais il faut avoir soin que ces coutures soient faites de manière que rien n’y paraisse. 5. — On porta des lettres à Éphèse, et on les fit passer de la manière suivante : on envoya quelqu’un ayant une lettre écrite sur de feuilles, et ces feuilles étaient attachées sur un ulcère que cet homme avait à l’os de la jambe.[6] 6. — On pourrait aussi faire passer des lettres en les pendant aux oreilles des femmes dans de petites plaques de plomb que l’on prendrait pour des boucles d’oreilles. 7. — Un traître s’est aussi servi de ce moyen pour faire passer une lettre dans le camp des ennemis. Entre plusieurs cavaliers qu’on avait envoyés ravager le territoire ennemi, on avait caché une lettre sous l’extrémité de la cuirasse de l’un d’eux, et on avait ordonné à ce cavalier que, lorsqu’il approcherait des ennemis, il se laissât tomber de son cheval, comme malgré lui; qu’il tâchât de se faire prendre, et qu’après être parvenu au camp des ennemis il rendît la lettre à qui elle était adressée. 8. — Un autre, ayant envoyé un cavalier, fit mettre une lettre dans la bride du cheval. 9. — Voici un cas d’une espèce tout opposée. On assiégeait une certaine ville; le porteur de la lettre, y étant entré, ne rendit point la lettre aux conjurés à qui elle était adressée, mais la porta au chef de la ville. Celui-ci, ayant jugé du fait, ordonna à cet homme de la porter à ceux à qui elle était adressée, mais de lui en rapporter la réponse, si ce qu’il lui disait était vrai. L’espion fit ce qu’on lui ordonna. Le magistrat ayant donc reçu la réponse des conjurés, les fit venir, et leur montra leur signature, qu’ils furent obligés de reconnaître. Alors, il lut les lettres devant eux, et les convainquit de leur trahison. Il me semble que ce magistrat fut fort ingénieux à découvrir toute la vérité, en ce qu’il n’avait pas voulu recevoir la lettre de l’ennemi et la regarder comme une preuve; car les conjurés auraient pu nier la correspondance et dire que c’était des embûches qu’on leur tendait. Mais, comme il tenait entre ses mains la réponse qu’ils avaient faite à cette lettre, il découvrit tout le complot et convainquit les conjurés. 10. — On transporte encore les lettres de cette manière Faites sécher une vessie de la grandeur nécessaire. Après l’avoir enflée et bien liée à son col, écrivez dessus avec de l’encre à laquelle vous aurez ajouté un peu de gomme. Lorsque les lettres seront sèches, désenflez la vessie et la faites entrer dans une bouteille; après cela, remplissez cette vessie d’huile, elle s’appliquera parfaitement à l’intérieur de la bouteille; coupez ensuite ce qui déborde la bouteille, appliquez-en le col si bien à celui de la bouteille qu’il n’en paraisse tien, et il ne paraîtra y avoir que de l’huile. 11. — Ceci arriva aussi autrefois. Quelqu’un ayant écrit sur une tablette de bois, l’enduisit ensuite de cire et écrivit après cela d’autres choses sur cette cire : cette tablette étant parvenue à celui à qui elle était adressée, il en ôta la cire et ayant lu ce qui était écrit, il renvoya le porteur avec une réponse écrite de même. 12. — On dit aussi que quelqu’un, après avoir écrit sur une tablette de buis avec une encre très parfaite, en desséchait si parfaitement l’écriture qu’il n’en paraissait plus un trait; ensuite il enduisait cette tablette d’un vernis blanc, et lorsqu’elle était parvenue au correspondant, celui-ci la plongeait dans un vase d’eau, et tout ce qui avait été écrit y paraissait clairement.[7] 13. — L’on peut encore écrire ce que l’on veut sur la toile qui sert aux peintres, et, après l’avoir enduite d’un vernis blanc, y peindre un cavalier ou telle autre chose, comme, par exemple, des habillements blancs, un cheval blanc, ou, si vous aimez mieux, de quelque autre couleur, pourvu que ce ne soit pas du noir; il faut ensuite donner ce tableau à quelqu’un pour le porter dans le premier temple qui se trouvera hors de la ville et l’y suspendre comme un don auquel il se croyait obligé par quelque vœu. Lors donc qu’on voudra lire ce qui y a été écrit, il n’y aura qu’à aller au temple, et, reconnaissant le tableau par une certaine marque dont on sera convenu, on l’apportera chez soi et on le trempera dans de l’huile: tout ce qu’on y aura écrit sera lisible. 14. — Voici, enfin, la manière la plus secrète d’envoyer des lettres, mais aussi la plus difficile à exécuter. Percez vingt-quatre trous dans un dé, c’est-à-dire percez quatre de ses faces de six trous chacune; que ces trous marquent les vingt-quatre lettres de l’alphabet grec. Souvenez-vous de quel côté se trouve la première lettre a, et celles qui la suivent immédiatement. Si vous voulez, par exemple, donner l’avis: αἱ δυνάμεις ἀπεστήσαν (les forces ont manqué), faites passer des fils par ces trous. En passant ces fils, commencez par le côté de l’a et passez le fil par le trou qui marque cette lettre; sautez les lettres suivantes jusqu’à ce que vous soyez venu au côté où est l’ι; passez derechef votre fil par le trou de l’ι ; sautez ensuite les lettres suivantes jusqu’à ce que vous soyez revenu au δ et passez-y votre fil. Laissez encore toutes les lettres qui suivent cette dernière jusqu’à ce que vous ayez retrouvé l' υ et passez-y votre fil comme auparavant. Continuez de même pour les autres lettres de toute la phrase. Par ce moyen, au lieu d’écrire, vous passez des fils par toutes les lettres, comme si tout ce que vous aviez écrit n’était qu’un seul mot. Ce que l’on enverra de cette manière sera donc comme un peloton de fil autour du dé; et il faut que celui qui voudra lire ce qu’on lui marque, écrive successivement sur ses tablettes les lettres désignées par ces trous. La sortie de ces fils doit se faire d’un ordre contraire au premier. Il n’y a aucune difficulté à ce que les lettres se trouveront écrites à rebours sur les tablettes, car cela n’empêchera pas qu’on ne connaisse de quoi il s’agit, quoiqu’il y ait plus d’ouvrage à connaître ce qui a été marqué qu’à le marquer. On fera la même chose, avec encore moins d’embarras, si l’on prend un morceau de bois d’un demi-pied ou d’un tiers, et qui ait autant de trous, et qu’ensuite on passe les fils par ces trous. Toutes les fois qu’il faudra passer le fil par le même trou deux fois de suite, comme lorsque la même lettre se répète, tournez le fil une fois autour du bois avant de le passer une seconde fois dans le même trou. On fera encore la même chose de cette manière : polissez une boule de bois, ou bien un petit bâton; percez ensuite autour vingt-quatre trous (dans une sorte de suite), et afin d’éviter que l’on ne soupçonne quelque chose, percez aussi çà et là quelques trous inutiles au milieu de la boule; passez ensuite votre fil comme ci-devant par les trous disposés de suite. Mais quand il y aura une lettre à marquer deux fois de suite; ayez soin de passer le fil dans les trous inutiles du milieu; après quoi vous le passez de nouveau dans le même trou pour marquer une seconde fois votre même lettre. 15. — On s’est servi encore de cette méthode : ayant écrit sur une carte extrêmement mince des lignes composées de lettres extrêmement fines, on cacha cette petite carte sous la robe du porteur, au-dessus de l’épaule, en repliant la robe. Par ce moyen, cette espèce de lettre pourra être transportée et le porteur éviter tout soupçon, soit qu’il ait mis sa robe, soit qu’il la porte à la main. 16. — On peut donc montrer par des exemples qu’il est très difficile de parer à toutes les ruses qu’on peut employer pour faire parvenir des lettres; car les habitants d’Ilium, qui travaillent depuis très longtemps à découvrir ces sortes de ruses et qui y sont extrêmement attentifs, n’ont pas encore pu empêcher que les Locriens, favorisés de quelques citoyens, n’entrent dans leur ville. 17. — Les anciens se sont aussi servis de cette ruse. Timoxène voulant livrer la ville de Potidée à Artabaze, l’un et l’autre étaient convenus d’un lieu dans la ville, et d’un autre lieu dans le camp, d’où, s’ils avaient quelque chose à se faire savoir, ils devaient se tirer des flèches empennées autour desquelles leurs billets seraient ajustés. Mais il arriva que la fraude de Timoxène, qui trahissait Potidée, fut découverte; car la flèche d’Artabaze ayant blessé un homme de Potidée à l’épaule, une foule de gens s’assembla autour du blessé, et quelqu’un ayant ramassé la flèche, on vit ce qui en était et on l’apporta sur-le-champ aux magistrats. 18. — Histiæus voulant faire savoir quelque chose à Aristagoras, et n’ayant pas d’autres moyens pour le faire, puisqu’il était presque impossible que celui qui porterait la lettre échappât aux gardes distribués sur les chemins, fit raser la tête au plus fidèle de ses domestiques, fit imprimer quelques lettres avec un fer chaud sur la tête de ce chauve, et le tint caché jusqu’à ce qu’une partie de ses cheveux fût revenue: ce qui étant arrivé, il l’envoya à Milet, ne lui donnant d’autre ordre, qu’après qu’il serait arrivé à Ephèse, il allât trouver Aristagoras, et lui dit de sa part de faire raser la tête marquée au fer chaud et de l’examiner: les marques du fer désignaient ce qu’il y avait à faire. 19. — On peut aussi se servir de cet expédient. Il faut convenir auparavant de se servir de points au lieu de voyelles; je veux dire en mettre, autant qu’il en faut pour marquer laquelle des voyelles il faut choisir entre toutes. Par exemple: Q’.’.’: D:n:s l: b:.’.’: (Que Denis le beau) v::nn: : H:r:cl:d: (vienne à Héraclide). On peut s’y prendre d’une autre manière, en substituant quelque autre chose à la place des voyelles. Mais il est nécessaire de faire déposer secrètement les billets qu’on envoie dans un endroit connu du correspondant, afin que, dès qu’il sait que l’exprès est venu dans la ville comme pour y acheter ou vendre quelque chose, il sache que des lettres lui sont arrivées et qu’elles sont cachées dans l’endroit marqué. De cette manière, ni celui qui l’apporte, ni personne, ne saura à qui elle est adressée, 20. — Plusieurs Épirotes se servent de chiens de cette manière ils s’en vont avec un chien en laisse; ils lui attachent ensuite un collier dans lequel on a écrit ce qu’on voulait. mander, et le renvoient. Ce chien ne manque pas de retourner à l’endroit d’où on l’a emmené. On dit que les Thessaloniciens ont inventé cet usage. 21. — Au reste, il faut ouvrir ces sortes de lettres à l’instant même qu’on les reçoit. On avait envoyé une lettre à Astyanax, tyran de Lampsaque, qui l’avertissait de la conspiration par laquelle il périt parce qu’il n’avait pas lu cette lettre au premier moment et qu’il s’occupait d’autres affaires, il fut tué la lettre à la main. Cadmée tomba dans les mains des Thébains par la même négligence; et la même chose arriva à Mytilène dans la Lesbie. 22. — Un pilote de Perse, nommé Glus, allant trouver le roi, devant lequel il n’est pas permis d’avoir aucun écrit en main, et ayant à parler au roi de mémoire sur beaucoup de choses importantes, il en écrivit les principaux chefs sur les membranes de ses doigts. 23. — Le garde d’une porte doit donc être très soigneux sur toutes ces sortes de ruses, de crainte qu’il n’entre dans la ville ou des armes ou des lettres. (Traduction du comte de Beausobre) CHAPITRE XXXIIDE CE QU’IL FAUT OPPOSER AUX MACHINES DES ASSIÉGEANTS(Ἀντιμηχανήματα)I. — Contre les attaques des ennemis, voici comment il faut se défendre, soit à l’aide de machines, soit à l’aide de soldats, Cf. Philon, III, 10. 2. — D’abord si l’ennemi attaque à l’aide de tours (πύργων), de mâts (ἱστῶν), ou d’autres procédés analogues, il faut lui opposer des constructions semblables, et les protéger autant que possible par des couvertures formant un rideau continu et convenablement fixé. Il faut aussi se servir de matières combustibles capables de produire beaucoup de fumée et un feu très violent. On pourra encore élever, pour les combattre, soit des tours de bois (πύργους ξυλίνους), soit d’autres éminences faites avec des corbeilles (φορμῶν) remplies de sable, de pierres ou de briques.[8] Des treillis de roseaux mis en long et en travers, serviront à amortir les traits. 3. — Il faut préparer des défenses contre les machines (μηχανήμασιν) destinées à attaquer les murs, telles que le bélier et autres semblables; ce seront, par exemple, des sacs remplis de paille et suspendus le long des murs, des ballots de laine, des outres de cuir de bœuf frais enflées ou remplies de diverses choses, et enfin une foule de matières analogues. Lorsque l’ennemi cherche à percer une porte ou un mur, il faut relever la pointe de sa machine avec un lacet, afin que celle-ci ne puisse y arriver. Il faut aussi préparer une grosse pierre, de celles qui forment à elles seules la charge d’un chariot, afin de briser le trépan (τὸ τρύπανον): on fera tomber cette pierre à l’aide de poutres saillantes auxquelles elle sera suspendue au moyen de pinces; pour être sûr de ne pas manquer le trépan, il faudra se servir d’un fil à plomb, et quand on aura rencontré le trépan, on lâchera la pierre. Mais ce qu’il y a encore de mieux pour résister aux attaques coutre le mur, c’est le moyen que voici : lorsque vous connaîtrez le point où le mur doit être attaqué, vous préparerez à l’intérieur un contre-bélier (ἀντικριόν); vous percerez le mur jusqu’auprès du parement extérieur, de telle manière que les ennemis ne s’en aperçoivent pas; puis, lorsque leur machine aura été approchée, vous la frapperez de l’intérieur avec le contre-bélier; de cette façon, c’est le contre-bélier qui aura l’avantage. Cf. Philon, III, 6, 7, 10. 4. — Pour s’opposer aux grands engins (μεγάλα μηχανήματα) sur lesquels on place plusieurs corps de troupe, d’où on lance des traits et d’autres projectiles, où l’on établit des catapultes (καταπέλται), des frondes (σγενδόναι)[9] et des arcs (πυρφόρα τοξεύματα) pour incendier les maisons faites en roseaux, il faudra d’abord que ceux de la ville creusent secrètement des mines sur la route de ces engins, afin que leurs roues, en défonçant le sol, s’enfoncent dans la cavité.[10] Il faudra ensuite élever à l’intérieur un cavalier (ἕρυμα), à l’aide de corbeilles remplies de sable, de pierres et d’autres matériaux convenables, afin de dominer l’engin et de faire taire l’artillerie de l’ennemi. Cf. Philon, I, 2; III, 48. 5. — Il faut tendre en même temps des tapis et des voiles flottants, qui serviront de défense contre les traits ennemis et arrêteront ceux qui arriveraient au-dessus du cavalier: on pourra alors facilement les ramasser, et il n’en tombera point à terre. On agira de même au-dessus du mur, là où les traits pourraient blesser les soldats de service ou les habitants qui circulent dans la ville. Cf. Philon, III, 38. 6. — Si une tortue parvient à percer le mur et à en faire crouler une partie, voici les préparatifs qu’il faut faire pour y remédier. Allumez un grand feu auprès du trou et creusez en arrière un fossé correspondant à la brèche, afin que les ennemis ne puissent entrer; et, si vous ne pouvez vous défendre autrement, hâtez-vous d’élever en arrière un nouveau mur avant que le premier ne soit renversé on seulement percé. Cf. Philon, III, 11. (Trad. nouvelle.) CHAPITRE XXXIIIDE LA MANIÈRE DE METTRE LE FEU AUX MACHINES DES ASSIÉGEANTS1. — Lorsqu’une tortue se sera approchée du mur, il faudra jeter dessus de la poix, de l’étoupe et du soufre, et descendre sur elle, au moyen d’une corde, un fagot incendiaire et enflammé. Toutes ces choses doivent être préparées à l’avance, pour être lancées du liant, du rempart sur les engins que l’attaque fera avancer. Cf. Philon, III, 23. 2. — Voici encore un moyen de les incendier : on prépare un morceau de bois dans le genre d’un pilon, mais beaucoup plus grand; aux extrémités du bois on enfonce de grandes pointes de fer; dans toutes les autres parties, soit en haut, soit en bas, on distribue les matières les plus propres à engendrer l’incendie; l’objet doit alors avoir la forme que l’on attribue à la foudre. Il faut jeter cet objet ainsi préparé sur l’engin que l’on approchera, de façon qu’il s’y fiche et que le feu qu’il y aura mis ne s’éteigne pas facilement. Cf. Philon, III, 1. 3. — S’il y a dans la ville des constructions en bois, ou que quelque partie du rempart soit faite de cette matière, il faut étendre au-dessus des créneaux des cuirs frais et des étoffes de feutre, pour empêcher que l’ennemi n’y mette le feu. Cf. Philon, III, 3. 4. — Si l’ennemi met le feu aux portes, rassemblez beaucoup de bois et faites en arrière un feu aussi violent que possible, jusqu’à ce que vous vous soyez retranché à l’intérieur par un fossé. Vous prendrez pour cela tout ce qui sera à votre disposition, et même, s’il vous manque encore quelque chose, vous le prendrez dans les maisons voisines. (Trad. nouvelle.) CHAPITRE XXXIVDE CE QUI SERT A ÉTEINDRE LE FEU1. — Si les ennemis s’efforcent de vous incendier au moyen de matières incendiaires, il faut vous y opposer à l’aide du vinaigre, car il empêche de brûler facilement. Il serait cependant plus avantageux qu’on eût mouillé à l’avance avec du vinaigre ce qui est exposé à brûler, car le feu ne prend pas aux matières imbibées de ce liquide. Cf. Philon, IV, 26. 2. — Il faut que ceux qui, des lieux élevés, sont chargés d’éteindre l’incendie, aient devant le visage un masque pour les empêcher de souffrir des flammes qui s’élèvent vers eux. (Trad. nouvelle.) CHAPITRE XXXVDES MATIÈRES INCENDIAIRESPour produire un embrasement qu’on ne pourra éteindre d’aucune manière, prenez de la poix, du soufre, de l’étoupe, des grains d’encens et de ces ratissures de bois gommeux avec lesquelles on prépare les torches; faites-en des boules, mettez-y le feu et jetez-les contre ce que vous voulez réduire en cendres. (Trad. nouvelle.) CHAPITRE XXXVIIDE LA MANIÈRE DE RECONNAITRE ET DE REPOUSSER LES MINEURS1. — Voici comment il faut arrêter les mineurs (τοὺς ὑπορύσοντας). Si vous vous apercevez que l’on mine, il faut creuser en dehors un fossé aussi profond que possible, afin que la mine (τὸ ὑπορύγμα) vienne y déboucher et que les mineurs soient découverts. Si cela est possible, il faut aussi construire dans ce fossé un mur de médiocre hauteur, mais très solide et composé de très grosses pierres.[11] Cf. Philon, III, 5. 2. — Si vous ne pouvez faire cette construction en pierres, il faudra préparer un amas de toute sorte de bois, et lorsque la mine débouchera dans votre fossé, vous y jetterez ces bois et ces broussailles en y mettant le feu; puis vous couvrirez le tout de façon que la fumée se dirige vers l’entrée du souterrain (τὸ διόρυγμα) et incommode ceux qui seront dans la galerie (ἐν τῷ ὀρύγματι). Il en résultera qu’un grand nombre de mineurs périront asphyxiés.[12] 3. — On a également fait entrer par l’ouverture des guêpes et des abeilles qui ont maltraité ceux qui étaient dans la mine.[13] 4. — Il faut aussi, quand vous saurez vers quel point les ennemis dirigent leur mine, creuser de ce côté une contre-mine (ἀνθυπορύσσειν), aller au-devant d’eux et mettre le feu à tout ce qui se trouvera dans leur galerie. 5. — On raconte cette vieille histoire: Amasis, assiégeant les Barcéens, commença à fouiller la terre; les Barcéens furent très inquiets, craignant qu’Amasis ne parvînt jusqu’à eux sans être découvert. Un forgeron, réfléchissant là-dessus, trouva cet expédient: il prit un bouclier d’airain et, le portant le long des murs, il le posa à terre en divers endroits en y appliquant l’oreille; ayant entendu du bruit en un certain point, il jugea que l’ennemi s’avançait de ce côté. Les Barcéens y creusèrent une contre-mine (ἀντορύσσοντες), rencontrèrent les mineurs assiégeants et en tuèrent un grand nombre. C’est ainsi que l’on agit aujourd’hui pour reconnaître l’endroit où les mineurs travaillent.[14] 6. — Voici maintenant le moyen de construire l’abri le plus solide pour ceux qui doivent miner. Il faut lier les timons de deux chariots à deux roues (ἁμαξῶν), de telle sorte que les pointes soient en haut et que le derrière des chars soit fiché en terre; disposez ensuite sur ces deux chariots réunis toute sorte de bois, de roseaux et autres choses propres à faire un blindage, et enduisez le tout de terre glaise (πηλῷ)). Vous pourrez pousser et ramener cette machine où vous voudrez, à cause de ses roues, et vos mineurs seront à couvert.[15] CHAPITRE XXXIXDES RUSES1. — Les assiégés doivent se servir de moyens tels que ceux-ci. 2. — Dans les [chaussées des] portes (ἐν ταῖς πύλαις), et, autant que possible, à l’intérieur [du couloir] de ces portes, on creuse un fossé en laissant un passage à droite et à gauche; puis on fait sortir quelques soldats qui attaquent l’ennemi et l’attirent vers la ville. Les escarmoucheurs rentrent alors dans la place, au moyen de passages ménagés de chaque côté du fossé, entraînant à leur poursuite les ennemis; ceux-ci, n’ayant aucune connaissance du fossé que l’on aura eu soin de dissimuler, y tomberont infailliblement et y périront. Il faut, dans ces cas-là, qu’il y ait à l’intérieur de la ville des troupes rangées en bataille dans les rues de traverse (ἐν ταῖς διόδοις), ainsi qu’en avant des coupures (πρὸς τοῖς ὀρύφμασι) et sur les places qui précèdent les portes (ταῖς τῶν πυλῶν χώραις). Cf. Philon, III, 18. 3. — Si un grand nombre d’ennemis entraient malgré cela dans la place et qu’on voulût les faire prisonniers, il faudrait suspendre en haut, et au milieu du couloir des portes (τοῦ μεσοπύλου), une porte formée de solives aussi épaisses que possible et garnies de fer; lorsqu’on voudra arrêter les assaillants qui se précipitent vers la ville, on laissera retomber la porte verticalement. Par ce moyen, on blessera d’abord un certain nombre d’ennemis, puis on empêchera ceux qui sont pris à l’intérieur de battre en retraite. Dans le même temps, ceux qui sont sur le rempart doivent tirer sur les ennemis qui s’approcheraient des portes.[16] (Trad. nouvelle) CHAPITRE XLDE LA MANIÈRE DE DÉFENDRE UNE VILLE AVEC PEU DE MONDE1. — Si la ville est grande et que les troupes ne soient pas en nombre suffisant pour en défendre toute l’enceinte; si, d’un autre côté, vous ne voulez employer que les forces que vous avez sous la main, il faut, dans tous les endroits de la ville qui sont d’un accès facile, élever des barricades (ὑψηλά) avec toute sorte de matériaux, de façon que si quelques-uns des ennemis venaient à escalader ces barricades par surprise ou de vive force, ils ne pussent en descendre et fussent alors obligés de se retirer faute de pouvoir aller en avant. Le long de ces constructions, vous établirez, de distance en distance, des postes formés de quelques-uns de vos soldats, afin de tuer tous ceux qui chercheront à descendre des barricades.[17] ……………………………….. 2. — Nous avons exposé, dans notre livre des Préparatifs de guerre, ce qui regarde les aliments, le blé et les autres choses dont les assiégés ont besoin, de même que la manière dont on peut corriger les mauvaises eaux et les rendre potables.
[1] Dans les terrains sablonneux, les meilleurs pièges sont les chaussetrappes, que l’on cache sous de petits monticules qui ont l’air d’être dus à l’action du vent. Les chaussetrappes ne valent, au contraire, pas grand chose sur les terrains solides, parce que l’on ne peut guère les dissimuler autrement que sous des feuilles; mais on emploie alors avec succès les trous de loup. [2] Les Syracusains renfermèrent ainsi dans leur propre port la flotte athénienne qui était venue les assiéger; ils obstruèrent l’entrée de ce port, qui avait 8 stades d’ouverture (près de 1.500 mètres), en y mettant à l’ancre des trirèmes, des vaisseaux de charge et des barques. (Thucyd., vii, 59.) [3] Ænéas avait déjà fait mention de ce livre sur les préparatifs de guerre (ἐν τῇ παρασκευστικῇ βίβλῳ) dans le chapitre précédent (ch. vii), à propos de la manière dont ou doit donner les signaux de feux. — Voyez encore Ænéas, xxi, 1; xl, 5. [4] Voir Ænéas, xxiv et xxv. [5] Supposons que deux rondes A et B se rencontrent; la ronde A crie: Qui vive? la ronde B se fait reconnaître en donnant le mot d’ordre: puis la ronde A se fait reconnaître à son tour en donnant le mot de ralliement. S’il n’y avait eu qu’un mot, la troupe B l’eût livré sans qu’il lui eût été possible de constater que la troupe A n’était pas un parti ennemi qui l’attendait au passage pour le lui demander. [6] A Metz, un paysan vint proposer au commandant supérieur de faire passer des dépêches à travers les lignes prussiennes en les roulant dans un étui d’argent qu’il devait introduire dans le séton de son âne. Nos premiers journaux arrivèrent de l’extérieur dans les bottes d’un sapeur, conducteur du 1er régiment du génie, échappé de Sedan. — A Mézières les journaux arrivèrent dans le collier du cheval d’un convoyeur. [7] On prétend que les lettres écrites avec du jus de tithymale, ou une dissolution d’alun, deviennent apparentes quand on les trempe dans de l’eau. [8] «Timothée assiégeait Torone; ceux de la ville élevaient des cavaliers fort haut par le moyen de poches de cuir et de corbeilles pleines de sable. Timothée prépara de grandes machines où il y avait des mats avec des pointes de fer et des faux. Par le moyen des pointes, on déchira les poches de cuir, et nec les faux on rompit les corbeilles, et le sable s’écoula. Les Toroniens, voyant cela, se rendirent. » (Polyen, liv. III, ch. x, 15.) [9] Il s’agit ici non des frondes, mais des machines monancônes appelées plus tard onagres. [10] C’est ce qui arriva, d’après Végèce (iv, 20), au siège de Rhodes par Démétrius Poliorcète. Vitruve (livre x) raconte la chose autrement. Il dit que les assiégés avaient percé leur mur du côté de la machine et que, par cette ouverture, ils avaient fait passer un canal au moyen duquel ils répandirent toute une nuit de l’eau, de la boue et des excréments sur le chemin que devait suivre l’hélépole. Le lendemain, quand la machine se mit en mouvement, avant même qu’elle fut arrivée au pied du mur, elle enfonça si profondément dans cette terre délayée, qu’il fut impossible de l’approcher davantage et de la ramener en arrière. [11] Ce mur était un rempart à l’abri duquel les assiégés attendaient le débouché des assiégeants. — Cf. Siège de Marseille par les Romains (Vitr., X; Végèce, IV, 5.) [12] Cf. Siège d’Ambracie (Polyen, xxii; Tite-Live, xxxiii, 4-7; Polyen, vi). [13] Cf. Siège de Themiscyre par Lucullus (Appien. De bello Mithrid.) [14] ) Hérodote (iv, 200) raconte le même fait presque dans les mêmes termes. L’aspiV avait la forme d’une assiette à soupe, d’une circonférence capable, de couvrir un homme du cou au mollet. Cette forme et le métal dont il était composé lui donnaient une grande sonorité. Les anciens se servaient d’ustensiles tout à fait analogues, sauf les dimensions, dans les bains publics, pour avertir les clients que leur eau était prête. (Voir le Dictionnaire des antiquités romaines et grecques d’A. Rich, aux mots clypeus, aes thermarium.) L’architecte Tryphon employa des vases d’airain pour reconnaître les mineurs au siège d’Apollonie par Philippe III de Macédoine, en 214 av. J.-C. (Vitruve, x.) En 1450, les habitants de Croye, assiégés par Mahomet II, perfectionnèrent ce procédé en tendant une peau sur le vase d’airain et en plaçant des balles sur la peau. Aujourd’hui, nous employons un tambour avec des pois secs ou des billes qui ressautent à la moindre trépidation du sol. [15] Cette machine n’était point destinée à remplacer la tortue des mineurs (ὁρυκτρὶς χελώνη) que l’on appliquait contre le mur pour le saper; elle eût été trop faible : elle devait servir seulement à protéger l’ouverture du puits d’attaque, quand on ne pouvait dérober celle-ci aux vues de l’assiégé par suite d’un pli de terrain. [16] On voit que la herse était connue du temps d’Ænéas, et par suite du temps de Philon qui a négligé d’en parler. Végèce (iv. 4) la décrit sous le nom de cataracta (καταρράσσω, tomber brusquement), mais il la place dans un petit ouvrage (propugnaculum) en avant de la porte, tandis que Ænéas la suppose dans le couloir même, comme cela s’est pratiqué au moyen âge. On voit distinctement les coulisses où elle jouait dans la porte d’Herculanum à Pompéi, et dans des portes anciennes à Rome et à Tivoli. Son emploi est mentionné par Tite-Live (xxvii, 28) et Appien (Bell. civ., iv, 78). [17] Ce passage est un curieux témoignage de l’importance que les anciens accordaient à la contrescarpe comme obstacle.
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