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AVIENUS.

Petits poèmes

Numérisé et mis en page par Thierry Vebr

Avienus, Rufus Festus
  Description de la Terre  ; Les régions maritimes  ; Phénomènes et pronostics d'Aratus, et pièces diverses
trad. par MM. E. Despois et Ed. Saviot,
.... Itinéraire de Cl. Rutilius Numatianus, poème sur son retour à Rome
 trad. nouv par M. E. Despois,....
Poésies diverses sur l'astronomie et la géographie
trad. par M. Edouard Saviot,..
 C. L. F. Panckoucke, 1843 (Bibliothèque latine-française ; seconde série)

I. RUFUS FESTUS AVIENUS,

À FLAVIANUS MYRMECIUS.Si, par cette route où l'Auster conduisit les Carthaginois aux rivages Ausoniens, ton champ a déjà confié au vaisseau libyen des fruits de Carthage, pour les apporter à travers la mer Tyrrhénienne, je t'en prie, abandonne à notre gourmandise une partie de la cargaison. Ainsi puisse tout vaisseau qui t'appartient fendre les mers à pleines voiles en laissant derrière lui un long sillon d'écume, et franchir sans dommage les gorges du Phare Romain ; soit qu'il vienne de la haute Corinthe, que la mer Adriatique menace, alors que le Notus s'élève, soit que la riche Ibérie l'ait chargé de ses richesses, ou que le joyeux nocher ait levé l'ancre d'un port de Libye. Mais peut-être tu demanderas quels sont les fruits que je désire. Je te prie de m'envoyer ceux dont les grains pressés forment un faisceau compact, et qui, semblables à des escadrons campés, présentent leurs rangs sur quatre côtés ; ils sont maintenus entre eux par un tissu serré, qui enferme leurs rubis étincelants sous un réseau léger. De peur de rompre sous leur propre poids, ces grains se sont partagé des cellules, et se divisent en compartiments égaux. Ce qui m'oblige, ami, à te faire cette demande, c'est un dégoût né de longues souffrances, qui remplit ma bouche d'amertume, et corrompt pour moi les plus doux aliments. Peut-être, le suc de ces fruits dissipant ce dégoût, je reviendrai aux mets ordinaires de mon ancienne table. Ne crois pas que je possède un domaine si misérable, que nul arbre de cette espèce ne fleurisse dans mon jardin : l'arbre y vient, il y charge ses bras d'une quantité de fruits, mais dont le suc aigre porte à la bouche une âpre saveur. Pour celui qui s'élève sous le ciel africain, il est soumis à l'influence d'un sol meilleur ; et la douceur du climat remplit ses fruits d'un suc parfait : comme le nectar.

II. SUR LE CHANT DES SIRÈNES

Les Sirènes, filles d'Acheloüs, avaient coutume de faire entendre des chants variés et des accents merveilleux. La Muse conduisait leurs voix, elle leur inspirait tous les accords qui peuvent sortir d'un orchestre harmonieux, et les plaintes de la trompette, du clairon, des cors retentissants, et les soupirs de la flûte aux mille trous, et les chants du léger pipeau, du doux rossignol, et ceux de la lyre, de la cithare, et du cygne mourant. Les matelots qui se laissaient charmer aux suaves modulations de leur voix, elles les plongeaient avec fureur dans les flots Ioniens. Le descendant de Sisyphe, Ulysse, vint, et sa prudence sauva ses compagnons. Il imagina de boucher leurs oreilles avec de la cire, et présenta lui-même ses mains aux chaînes. La flotte franchit les rochers et les rivages inhospitaliers ; pour elles, elles se précipitèrent dans la mer. Ainsi le héros triompha de leurs douces voix et de leurs chants perfides ; ainsi il causa enfin la mort des monstres harmonieux.

III. À SES AMIS, AU SUJET DE SON CHAMP

Vous me demandez ce que je fais pendant mon séjour à la campagne ; je réponds en peu de mots. Au point du jour, je prie les dieux, puis je visite mes serviteurs et mes domaines, et j'assigne à chacun sa tâche pour la journée. Ensuite je lis, j'appelle Phébus, je provoque la Muse. Après quoi je me frotte le corps d'huile, je me livre à un doux exercice, paisiblement, gai de coeur, sans crainte des usuriers. Je dîne, je bois, je chante, je joue, je me baigne, je soupe, je me repose. Et tandis que ma petite lampe consume un peu d'huile, la nuit m'inspire ces vers, fruits des veilles des Muses.

IV. SUR LUI-MÊME, À LA DEESSE NORTIA

Ô Nortia, je te vénère, moi, Festus fils d'Aviénus descendant de Musonius, qui a donné un nom à la fontaine de Caesia ; moi, né à Vulsinie, habitant de Rome, honoré deux fois du proconsulat ; poète fécond, je mène une vie pure, je suis dans la force de l'âge, heureux de mon mariage avec Placidie, fier de mes nombreux enfants, auxquels leur santé semble promettre une longue vie : pour le reste, je me repose sur la volonté des destins.

V. PLACIDUS À SON AUGUSTE PÈRE

Tu vas t'élever aux demeures que tu désires, car Jupiter t'ouvre le ciel, ô Festus, pour que tu y paraisses dans ton éclat. Et déjà tu parais, et le choeur des dieux te tend la main, et déjà l'on t'applaudit de tous les points du ciel.