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Anthologie grecque

ÉPIGRAMMES DE TABLE ET COMIQUES.

Édition de Jacobs, t. II, p. 319; de Tauchnitz, t. III, p. 3.)

1. NICARQUE. - Aux fêtes de Mercure, Aphrodisius, qui portait six conges de vin, nous a causé en tombant un grand chagrin. Le vin a perdu le Centaure (001) ; que ne nous a-t-il aussi perdus ? mais cette fois, c'est nous qui avons perdu le vin.

2. CALLICTER.- Théodore, fils d'Eschyle, pourquoi ces braves gens m'assiégent-ils ? Délivre-m'en, taille-les [en pièces] ; tous ont des pierres (002).

3. ANONYME. - J'aurais voulu être riche comme était riche autrefois Crésus, j'ai souhaité de régner sur la grande Asie ; mais lorsque je vois Nicanor le faiseur de bières, et que je songe à quel usage il destine ces étuis funèbres, je jonche la table de fleurs, je l'arrose de vin, et l'Asie entière je la vends pour des parfums et des couronnes.

4. PARMÉNION. - L'époux de Pithané (003) est bien nourri, et ronfle en présence de son voisin. Ce n'était pas chose difficile ; il ne s'agissait pas de ramer, de labourer, mais de ronfler à pleine poitrine, après avoir richement dîné aux frais du galant voisin.

5. CALLICTER. - Le mari qui chez lui trouve du blé sans l'acheter, peut se vanter d'avoir, grâce à sa femme, une corne (004) d'abondance. 

6. CALLICTER. - Le ménage des pauvres est un combat de chiens ; il y a bien vite du bruit, des injures, des coups, des dommages, des actes judiciaires, des condamnations.

7. NICANDRE. - On ne peut pas sans cesse, de tout son coeur et avec plaisir, Charidème, ne caresser que sa femme ; car la nature est avide d'émotions, elle aime la chair d'autrui, et recherche les plaisirs défendus !

8. ANONYME. - (005) Ne prodigue pas des parfums et des couronnes au marbre de ma tombe ; n'éteins pas (006) le feu du bûcher par des libations. C'est une dépense en pure perte. Donne-moi, si tu le veux, tout cela de mon vivant, car, en arrosant ma cendre, tu ne feras que de la boue, et les morts ne boivent plus.

9. LÉONIDAS. - Ne me resservez plus après dîner, lorsque mon estomac est rebelle à mes sollicitations, des mamelles de truie et des tranches de jambon. C'est comme si pour le laboureur il pleuvait après la récolte ; c'est comme le zéphyr pour le navigateur arrivé au port.

10. LUCILLE. - Connais la loi que j'impose à mes convives. Je t'invite à dîner pour aujourd'hui, Aulus, avec des conditions toutes nouvelles : aucun poète ne lira de vers, et tu ne soulèveras pas, tu ne discuteras pas de questions grammaticales.

11. LE MÊME. - Épicrate, je ne te savais pas poète tragique, ni chef d'orchestre, ni d'une profession qui nécessite un choeur. D'ailleurs, je t'avais invité seul, et tu viens escorté d'une troupe de danseurs auxquels tu fais passer par derrière tous les plats. S'il en est ainsi, fais asseoir tes gens sur les lits ; et nous, nous allons prendre leurs places et nous tenir derrière.

12. ALCÉE. Contre Philippe. - Le vin a tué aussi le Centaure (007) ; Épicrate ; il ne t'a pas tué seul avec le jeune et beau Critias (008). En vérité, le borgne (009) est un échanson de mort, un Charon bachique ; et puisses-tu lui envoyer de chez Pluton une coupe de vin du même cru !

13. AMMIEN. - L'aurore succède à l'aurore ; puis tout à coup, sans que nous y pensions arrivera la sombre mort (010). Avec la phthisie pour les uns, la fièvre pour les autres ou l'hydropisie, elle nous conduira tous dans un seul et même gouffre.

14. LE MÊME. - Hier chez un hôte qui m'avait invité, à l'heure de mon sommeil, je me couchai sur un matelas de Gorgone ou de Niobé ; ce n'était point l'ouvrage d'un tapissier, mais d'un scieur de marbre, et l'ouvrier, après l'avoir taillé au ciseau, l'avait conduit de la carrière chez Proclus. Si de ce lit je ne m'étais levé à la hâte, le matelas de Proclus serait devenu pour moi une pierre funéraire (011), un vrai cercueil.

15. LE MÊME. - Lucius (012), si tu as arrêté d'enterrer seulement les sénateurs qui ont un A pour initial, tu as encore un Adelphe ; et si, ce qui est logique, tu veux suivre l'ordre de l'alphabet, je te préviens que je me nomme Zosime.

16. LE MÊME. - Giles et Levreau sont deux bravissimes Thessaliens ; mais, des deux, Giles est le plus crâne.

17. NICARQUE. - Stéphane était pauvre et jardinier (013). Aujourd'hui il est riche, et bientôt il est devenu Philostéphane, ayant ajouté quatre belles lettres à son nom. Incessamment il sera Hippocratippiade, ou à cause de ses débauches Dionysiopéganodore. Mais sur la place du marché, il restera toujours le jardinier Stéphane.

18. LE MÊME. - Sans grossesse et spontanément, Philaenion a donné une fille à Héliodore. Celui-ci s'en afflige, il eût mieux aimé un garçon ; et six jours sont à peine écoulés qu'un garçon vient au monde. Ainsi Bubastis (014) est supprimée. Si en effet chaque femme accouche seule et sans son aide, quel cas fera-t-on de la déesse ?

19. STRATON. - Profite du temps présent pour aimer et boire, Damocrate, car nous ne boirons pas toujours, nous ne jouerons pas toujours avec de beaux garçons. Parons nos têtes de couronnes, arrosons-nous de parfums, avant qu'on ne porte des parfums et des couronnes sur nos tombes. Que de mon vivant mes os s'imbibent du vin le plus pur ; et qu'après ma mort Deucalion (015) les inonde.

20. ANTIPATER. - Loin d'ici, vous qui, pour vos vers, recherchez les mots étranges, surannés, obscurs, poètes hérissés d'épines, et vous aussi, dont les poésies étiques et énervées attestent qu'à la source sacrée vous ne puisez que de l'eau claire !  Aujourd'hui, nous célébrons la fête du mâle Archiloque et du grand Homère. La coupe n'y circule pas pour les buveurs d'eau.

21. STRATON. - Nuper mentulam Agatho roseis Aurorae digitis similem habebat, et nunc eamdem jam roseo Gratiarum cubito similem habet (016).

22. LE MÊME. - Est puer admodum pulcher Draco (017) ; sed draco quum sit, cur in suum ipsius latibulum alium anguem recipit ?

23. ANTIPATER. - Ceux qui lisent dans les astres disent que ma vie sera courte. Eh bien ! soit ; qu'est-ce que cela me fait ; Séleucus ? Une seule route mène aux enfers tous les hommes ; si nous l'achevons plus vite, plus vite nous verrons Minos.  Buvons donc, puisqu'il est vrai que le vin est un cheval pour le voyageur, et qu'autrement il faudrait faire le voyage à pied.

24. LE MÊME. - Hélicon de Béotie, tu as souvent autrefois épanché pour Hésiode l'onde de tes sources poétiques ; et maintenant nous avons un jeune garçon du même nom que toi pour nous verser à boire un vin d'Ausonie, bien autrement exempt de soucis et de peines. Pour moi, je donnerais volontiers mille coupes de l'onde héliconienne pour une seule coupe de cet échanson.

25. APOLLONIDAS. - Tu dors, ami, et cette coupe t'attend, elle t'appelle ; réveille-toi, ne te laisse pas charmer par l'image de la mort ; ô Diodore, livre-toi sans réserve à Bacchus, et bois jusqu'à ce que tes genoux chancellent. Un jour nous ne boirons plus, et ce jour sera bien long. Donc dépêche-toi. La sagesse arrive, nos cheveux nous l'annoncent.

26. ARGENTARIUS. - Me voilà à terre, vaincu par l'ivresse ! qui donc me relèvera ? qui soutiendra ces membres que fait chanceler Bromius ? Ah ! j'ai trouvé en lui un dieu bien injuste.  Comment ! moi je te porte dans mon sein, ô Bacchus, et toi, tout au rebours, tu me laisses tomber.

27. MACÉDONIUS. - Poussière rude et parfumée de Surrentum, terre de Pollentia aussi douce que le miel, salut ! car je vous aime et vous désire. Avec vous (018) les trois Grâces pétrissent pour Bacchus l'argile de ses coupes et de ses amphores, trésor commun des riches et des pauvres. Pour ceux-ci, c'est la vaisselle d'usage ; pour ceux-là, c'est la vaisselle de luxe.

28. ARGENTARIUS. - Mort, tu occuperas cinq pieds de terre. Tu ne jouiras plus des agréments de la vie, tu ne verras plus la clarté du soleil. Donc, Cincius, prends une coupe de vin pur et vide-la joyeusement, en pressant sur ton sein ta charmante compagne. Que si tu es un intrépide disciple de la sagesse, sache que Cléanthe et Zénon sont descendus dans les profondes demeures de Pluton.

29. AUTOMÉDON. - Mitte qui eam arcessat. Omnia enim parata sunt ; sed quando venerit, quid facies ? tecum reputa, Automedon, quam effeta sit tua vis (019), timeque ne te ridendum propines, si navigationem tentas male instructus et sine remigio.

30. PHILODÈME. - Ego qui antea quinquies noviesque, nunc vero, o Venus, semel tantum a prima nocte ad solis ortum .... 0 senectus, senectus, quid mihi in posterum, quum adveneris, si jam nunc adeo marcescimus ?

31. ANTIPATER. - Non, le redoutable coucher des Pléiades, la mer qui déferle en hurlant sur des écueils, le ciel en feu, la foudre qui éclate, m'effrayent moins qu'un homme méchant et que des buveurs d'eau qui n'oublient rien.

32. ONESTE. - O Sicyone, c'est dans tes murs, où il prenait ses ébats avec les Grâces, que Bacchus a trouvé cet enseignement d'une Muse enjouée (020). Il renferme en effet une critique très douce ; dans le rire on sent à peine l'aiguillon. L'ivresse même y donne des leçons de tempérance.

33. PHILIPPE. - Rampant en flexibles anneaux, ô lierre, tu t'es élancé d'un bond furtif, et tu étreins mon cep cher à Bacchus et paré de raisins. Mais tu m'enchaînes bien moins que tu ne te perds. Car qui ceindra de lierre sa tête, s'il n'a pas de vin pour remplir sa coupe ?

34. PHILODÈME. - Les couronnes de violettes blanches (021), les symphonies, les vins de Chios, la myrrhe syrienne, les coûteuses orgies, une courtisane insatiable, je n'en veux pas, je hais tout ce qui égare la raison ; mais couronnez-moi de narcisses, jouez-moi de la flûte, frottez-moi de parfums safranés, arrosez mes lèvres d'un vin de Mitylène, et donnez-moi une jeune fille du lupanar.

35. LE MÊME. - Artémidore nous a donné un chou, Aristarque du salé, Athénagore des petits oignons, Philodème un foie d'oie, Apollophane deux mines de porc, et d'hier il y en avait trois encore. Procure-nous des oeufs, des couronnes, des sandales, des parfums ; et que, à la quatrième heure juste, on serve.

36. PHILIPPE. - Lorsque tu étais jeune et beau, Archestrate, que tes joues avaient le duvet de la vigne, que tu brûlais tous les coeurs, tu ne faisais de notre amitié nul compte ; mais en folâtrant avec d'autres, ta fraîcheur, comme celle d'une rose, s'est évanouie. Une maudite barbe brunit ton menton. Maintenant tu fais des avances, tu attires, tu donnes la paille, ayant donné à d'autres les épis.

37. ANTIPATER. - Voici l'automne, Épiclès ; déjà de la ceinture du Bouvier est sortie la brillante constellation de l'Arcture ; déjà les grappes attendent la faucille, et l'on recouvre son toit pour l'hiver. Mais toi, tu n'as ni la chaude étoffe d'un manteau, ni une bonne chemise par-dessous ; et tu vas mourir de faim en maudissant l'astre [que nous admirons].

38. POLÉMON. Sur une camée. - Cette besace, gracieuse panoplie des pauvres gens, cette couronne de fleurs humides de rosée, et cette tête de mort, auguste citadelle d'une âme, tous ces symboles ici gravés nous disent : "Buvez, mangez, couronnez-vous de fleurs ; voilà ce que nous deviendrons bientôt."

39. MACÉDONIUS. - J'ai bu hier avec une femme dont la vie, dit-on, n'est pas pure : esclaves, brisez les coupes.

40. ANTISTIUS. - Le fils d'Eumène, Cléodème, est encore bien petit ; mais il danse déjà dans les choeurs des petits enfants de son âge. Voici qu'il a ceint la peau du faon tacheté, et qu'il porte sur sa tête blonde le lierre frémissant. O Dieu, fils de Sémélé , fais que Cléodème devienne grand , afin que le petit initié puisse conduire à son tour les choeurs des jeunes gens.

41. PHILODÈME. - Sept années se sont ajoutées à trente, autant de pages déchirées du livre de ma vie. Déjà ma tête se parsème de cheveux blancs, Xantho (022), messagers de l'âge de la sagesse. Mais j'aime encore les chants, les causeries amoureuses, les choeurs et les banquets, et dans mon sein brûle une flamme toujours nouvelle. Allons, Muses, hâtez-vous de clore ce chapitre, régnez en souveraines (023) sur mes passions. 

42. CRINAGORAS. - Bien que ta vie soit sédentaire, que tu n'aies pas navigué sur un vaisseau, que tu n'aies pas voyagé par terre, va à Athènes, afin d'y voir les grandes nuits des fête sacrées de Cérès (024) ; tu en rapporteras pour le reste de tes jours une âme exempte de soucis, et pour le moment de la mort une conscience plus légère [et de douces espérances].

43. ZONAS. - Donnez-moi une jolie coupe de cette terre d'où je suis né, et qui sera ma couche funèbre.

44. PHILODÈME. - Demain, cher Pison, un disciple d'Épicure, chéri des Muses, vous entraînera, dès la neuvième heure, vers une chaumière modeste, où il doit célébrer dans un banquet l'eicade annuelle (025). Vous n'y savourerez, il est vrai, ni les mamelles succulentes de la truie, ni le vin de Chios, doux présent de Bacchus; mais vous y verrez des amis parfaitement sincères ; mais vous y entendrez des sons plus doux que tout ce qu'on nous vante de la terre des Phéaciens. Si vous daignez, Pison, jeter sur nous un regard favorable, votre présence donnera de l'éclat à la fête, et nous tiendra lieu des mets les plus exquis.

45. ONESTE. - Il est très agréable de boire autant qu'on veut ; mais des coupes qui se aident par ordre font également tort au vin et au buveur. Le vin, on finit par le jeter à la dérobée par terre ; et souvent le buveur s'en va boire les eaux amères du Léthé. Arrière les ivrognes ! Pour moi, tant qu'il est doux de boire, voilà la mesure du plaisir.

46. AUTOMÉDON. - Sur le soir, quand nous buvons, nous sommes des hommes ; mais le matin paraît-il, nous nous ruons comme des bêtes les uns contre les autres.

47. ANACRÉON. - Que m'importent les trésors de Gygès, le monarque de Sardes ? L'or ne m'exalte pas, et je n'ambitionne pas un sceptre. Ce que j'aime, c'est d'arroser mes cheveux de parfums ; ce que j'aime, c'est de couronner ma tête de roses. La vie du moment, voilà ce qui m'intéresse. Qui de nous sait s'il vivra demain ?

48. LE MÊME. - Forge-moi ce lingot d'argent, Vulcain ; ne me fais pas une panoplie, mais une coupe, une coupe creuse et profonde ; ciselle sur ses contours, non les astres, ni le char de l'Ourse, ni la farouche Orion, mais des vignes verdoyantes, mais des grappes de raisin pourpré et le bon Bacchus.

49. ÉVÉNUS. - O Bacchus, ta meilleure mesure est celle qui n'est ni trop grande ni trop petite. L'une engendre la tristesse, l'autre la fureur. Mêlé à trois quarts d'eau et tempéré ainsi par les Nymphes, le vin est un délicieux breuvage ; il devient même alors un des puissants philtres de Vénus. Mais, quand ses vapeurs sont trop fortes, il met en fuite les Amours, et plonge dans un sommeil bien voisin de la mort.

50. AUTOMÉDON. - Heureux d'abord celui qui ne doit rien à personne, ensuite celui qui n'est pas marié, en troisième lieu celui qui n'a pas d'enfants. Mais, dans un accès de folie, s'est-on marié, quelle chance fortunée si l'on enterre promptement son épouse, après avoir reçu une grosse dot ! Sais-tu cela, tu es savant ; et laisse Épicure se morfondre à chercher où est le vide et de quelle essence sont les monades.

51. ANONYME. - Jouis de ta jeunesse et de ta beauté ; tout passe et s'altère bien vite. Il suffit d'un seul été pour faire d'un gentil chevreau un bouc velu.

52. ANONYME. - Pris dans les filets de l'amour des garçons, Thrasybule, tu palpites comme un dauphin échoué sur la plage, soupirant après les flots. Non, la faux de Persée ne te suffit pas pour couper les mailles du filet qui te captive. 

53. ANONYME. - La rose ne fleurit qu'un instant ; vient-elle à passer, cherche, tu ne trouveras plus un rosier, mais une ronce.

54. PALLADAS. - Les femmes se raillent de ma vieillesse, en me disant d'aller voir dans le miroir ce qui me reste du jeune âge. Mais que m'importe si j'ai des cheveux blancs ou noirs, arrivé au terme de ma vie ? Avec des parfums et de belles couronnes, avec le vin, je bannis les soucis importuns.

55. LE MÊME. - A. boire ! pour que Bacchus disslpe mes chagrins et réchauffe mon coeur qui se refroidit.

56. ANONYME. - Bois, ami, amuse-toi. Qu'arrivera-t-il demain ? qu'arrivera-t-il plus tard ? Personne ne le sait. Ne t'essouffle pas, ne te fatigue pas. Autant que tu le peux, donne-toi du bien-être, procures-en aux autres, mange de bon appétit, pense en mortel. Il y a bien peu de distance de la vie à la mort (026). La vie tout entière est l'affaire d'un moment. Si tu prends les devants, tout est à toi ; mais si la mort te surprend, tout passe à un autre, et tu n'as rien.

57. AGATHIAS. - Le vieil Énopion s'était rempli la panse de vin parfumé ; il ne posa pas pour cela sa tasse. Mais, toujours altéré, il gourmandait sa main lorsqu'elle ne versait plus rien du broc. Les jeunes gens cèdent au sommeil, ils ne peuvent supputer les coupes qu'il boit encore. Bois, vieillard, jouis de la vie. C'est à tort que le divin Homère a dit (027) que les vieux sont vaincus par les jeunes.

58. MACÉDONIUS. - Je ne désire pas de l'or, ni des milliers de villes, ni tout ce que renferme Thèbes, au dire d'Homère (028) ; mais je voudrais une belle coupe bien pleine, où je pusse plonger mes lèvres sans la tarir jamais. Je voudrais qu'une bande joyeuse de bons amis bût avec moi, et qu'on envoyât travailler aux vignes les austères buveurs d'eau. Le vin, c'est ma richesse, mon pactole, c'est mon ami à la vie, à la mort. Que m'importent les consuls et leurs faisceaux quand j'ai le verre à la main ? 

59. MACÉDONIUS. - Intrépides buveurs, athlètes du dieu du vin, dressons la table où va s'engager la lutte des coupes ; voyons qui boira le plus de la liqueur icarienne versée à flots en l'honneur de Bacchus. A d'autres les travaux des champs, où l'on ne voit que des boeufs des charrues, des jougs, des socs, des épis, ces épis qui jonchaient les traces de Proserpine ! Que si enfin il faut mettre sous la dent quelque nourriture, les raisins secs de Bromius doivent suffire aux buveurs.

60. PAUL LE SILENTIAIRE. - Buveurs, nous offrirons des libations au joyeux Bacchus, et nous chasserons avec des coupes les soucis homicides. Que l'homme des champs aux rudes labeurs célèbre, en se gorgeant de pain, la mère de la sombre Proserpine ; nous laisserons aux bêtes sauvages, aux oiseaux carnassiers, les chairs palpitantes des taureaux. Quant aux arêtes des poissons qui piquent et déchirent, qu'ils en bravent les dangers, ceux qui préfèrent la nuit de Pluton aux clartés du soleil. Mais, pour nous, que les dons précieux de Bacchus soient à jamais notre nourriture et notre boisson ; nous abandonnons à d'autres l'ambroisie.

61. MACÉDONIUS. - Hier, j'étais malade. Un médecin, personnage peu aimable, s'est approché de mon lit et m'a défendu le nectar des coupes ; il me prescrit de boire de l'eau, l'ignorant qui ne sait pas qu'Homère a dit (029) : Le vin est la force et la santé des mortels.

62. PALLADAS. - Nous ne pouvons échapper au trépas, et nul de nous ne sait s'il vivra demain. Ceci une fois hors de doute, mortels, amusez-vous ; noyez dans le vin la pensée de la mort ; charmez aussi par l'amour les peines de cette vie éphémère, et laissez la destinée disposer du reste.

63. MACÉDONIUS. - O vous qui restez fidèles au culte du bienfaisant Bacchus, noyez la misère dans les joies de l'ivresse. Pour moi, qu'un cratère soit ma coupe. Je prends pour tonneau le pressoir et la cuve, où résident le rire et le bonheur. A peine ai-je vidé la grande coupe de notre dieu que je suis en état de lutter contre les géants de Pallène (030). Je ne crains plus ni la mer en fureur, ni la foudre. Je me sens la force et le courage de l'indomptable Bacchus. 

64. AGATHIAS. Scène de vendange. - Nous foulions un monceau de grappes, dons de Bacchus, sous nos pieds que dirigeait avec l'ensemble d'un choeur un rhythme bachique. Déjà le vin coulait à flots ; et, comme des nacelles, des coupes de bois voguaient sur l'écume de la douce liqueur. Avec ces coupes nous puisions de ce vin nouveau, et nous en buvions sans nul besoin des ondes tiédies de la Naïade. La belle Rhodanthe, penchée sur ce pressoir, éclairait la vendange des rayons de sa beauté. Toutes les têtes, tous les coeurs étaient troublés ; pas un de nous qui ne fût vaincu par Bacchus et par Vénus. Hélas ! l'un venait bien à nous avec largesse et sans réserve, mais l'autre ne nous donnait que de l'espérance et se jouait de nous.

65. PARMÉNION. - Rude est l'alternative entre la faim ou une vieille. D'un côté qu'il est pénible d'avoir faim ! mais de l'autre n'est-il pas plus pénible de coucher avec une vieille ? Phillis affamé optait pour la vieille, mais au lit il souhaitait la faim. Voilà les perplexités d'un garçon qui ne possède rien.

66. ANTIPHILE. - Bien que tu tendes la vieille peau de tes joues ridées, que tu dessines au charbon tes sourcils absents, que tu colores en noir tes cheveux blancs, et que tu suspendes à tes tempes des boucles frisées d'un blond de feu, tout cela ne t'embellira pas (031), fisses-tu plus encore ....

67. MYRINUS. - Cet u (032) qui erre sur tes lèvres [enfantines] vaut quatre cents, et tu as deux fois cet âge, élégante Laïs aussi vieille qu'Hécube, aïeule de Sisyphe et sueur de Deucalion. Mais alors, pour paraître tout à fait un enfant, teins tes cheveux blancs, et appelle tout le monde papa.

68. LUCILLE. - O Nicylle, on dit que tu teins tes cheveux. Quelle calomnie ! Tu as acheté les plus noirs que tu as pu trouver au marché.

69. LE MÊME. - Thémistonoé, qui a l'âge de trois corneilles, en se teignant les cheveux ne se transforme pas en jeune fille, mais en déesse : c'est la vieille Rhée.

70. LÉONIDAS. - Philinus épousa une vieille femme, lorsqu'il était jeune. Devenu vieux il se maria à une fille de douze ans. Les unions qu'il contracta ne furent jamais assorties. Aussi est-il resté sans enfant, autrefois labourant une terre stérile, et maintenant qu'il a une terre vierge et féconde, ne pouvant plus même labourer.

71. NICARQUE. - Niconoé a été jeune et belle je ne le nie pas ; mais c'était à l'époque du déluge de Deucalion Nous ne savons pas si cette date est bien exacte, mais il est certain qu'elle devrait maintenant chercher non un mari, mais un tombeau.

72. BASSUS. - La vieille Cytotaris, qui a tant fait parler d'elle, qui a dépassé l'âge de Nestor et la vie d'un cerf, qui commence pour la seconde fois à supputer ses années de la main gauche (033), vit encore, ayant bon pied bon oeil, comme une jeune mariée, à ce point que je me demande s'il n'est rien arrivé à Pluton.

73. NICARQUE. - C'est une vieille, belle, et pourquoi pas ? quand elle était jeune. Mais alors elle tendait la main ; aujourd'hui elle paye l'amant qui la caresse. Tu la trouveras fort habile. A-t-elle bu, elle est encore de meilleure composition. Or elle boit de trois à quatre setiers, et aussitôt elle met tout sens dessus dessous. C'est elle qui vous baise, qui vous chatouille , qui se trémousse. Si on lui donne quelque chose, elle accepte ; si on ne lui donne rien, elle paye le pauvre garçon qui est sa victime.

74. LE MÊME. - Onésime, de par Jupiter, chasse-moi cette vieille qui entend tout de travers. Elle me donne toute sorte d'ennuis ; si je lui demande de m'apporter du fromage (turous), elle arrive avec du blé (purous). Dernièrement, j'avais mal à la tête , et je voulus avoir de la rue (pêganon), elle m'apporta une poêle (têganon). Lui demandé-je de la laine (pokon) (034), elle va chercher une poutre (dokon). "Donne-moi, lui dis-je, des légumes (lachanon) pour apaiser ma faim." Que m'apporte-t-elle ? un pot de chambre (lasanon). Est-ce du vinaigre (oxos) que je veux, c'est un arc (toxon) qu'on me présente , et l'on me présente du vinaigre si je veux un arc. En un mot ce que je dis, elle ne l'entend jamais. Il est vraiment honteux de se faire crieur public à cause d'une vieille, et d'apprendre ce métier par des exercices en plein air et de nuit. 

75. LUCILLE. - L'Olympius que tu vois en cet état, Sébaste, a eu un nez, un menton, des sourcils, des oreilles, des paupières. Aux exercices du pugilat, il a tout perdu, jusqu'à son patrimoine dont il n'a pu avoir sa part. Car son frère qui avait son portrait l'a produit en justice, et il a été jugé que ce n'était pas lui, n'ayant avec ce portrait aucune ressemblance.

76. LE MÊME. - Avec une telle mine, Olympius, ne t'approche pas d'une fontaine, sur la montagne évite de te voir dans une onde transparente ; car, nouveau Narcisse, en reconnaissant ton image, tu mourras ; seulement, c'est la haine de toi-même qui t'aura tué.

77. LE MÊME. - Après vingt ans, revenu sain et sauf dans sa patrie, Ulysse fut reconnu par son chien Argus ; mais toi, Stratophon, après quatre heures de pugilat, tu es devenu méconnaissable, non seulement pour les chiens, mais pour tes concitoyens eux-mêmes. Que dis-je ? Si tu veux te regarder dans un miroir, tu t'écrieras avec serment : "le ne suis pas Stratophon."

78. LE MÊME. - Apollophane, ta tête est devenue un crible, ou bien elle est comme les marges d'un livre que les mites labourent. On y voit des trous de fourmis obliques et droits, des signes de notation lyrique des modes lydiens et phrygiens. N'en lutte pas avec moins de courage ; car si tu es atteint à la tête, tu n'auras que ce que tu as ; tu ne peux en avoir davantage.

79. LE MÊME. - Cléombrote a déposé le ceste et renoncé au pugilat : il s'est marié. Mais dans son intérieur il a trouvé des isthmiques et des néméennes de coups. Sa vieille femme lutte et frappe comme à Olympie, et il voit son ménage avec plus de crainte qu'autrefois le stade. Si, en effet, il s'arrête et se repose, on le bat, pour qu'il reprenne la tâche de la palestre conjugale ; et quand c'est fait, on le bat encore.

80. LE MÊME. - Les athlètes qui ont lutté avec Apis lui ont élevé ici une statue, parce qu'il ne blessa jamais aucun d'eux au pugilat.

81. LE MÊME. - Dans tous les jeux où la Grèce a des luttes de pugilat, moi Androléos, j'ai vaillamment combattu. J'ai eu à Pise une oreille arrachée ; à Platée, j'ai perdu un oeil à Pytho, on m'a emporté sans connaissance ; mais Damotèle, mon père, avec les habitants de ma ville, me fit réclamer par le héraut pour m'enterrer mort, ou me panser blessé.

82. NICARQUE. - En Arcadie, Charmus joutant à la course avec cinq autres athlètes, ô prodige ! est en réalité arrive le septième ! S'il n'y avait que six coureurs, diras-tu, comment a-t-il pu se trouver le septième ? C'est qu'un de ses amis est descendu dans la lice, en manteau (035), lui criant : "Courage, Charmus." Voilà comment il a atteint le but le septième ; et s'il avait eu cinq autres amis, ii serait alors, ô Zoïle, arrivé le douzième.

83. LUCILLE. - Naguère la grande terre a tremblé. Tout a été secoué, ébranlé. Seul Érasistrate est resté inébranlable (036).

84. LE MÊME. - Aucun athlète n'a été renversé plus vite que moi ; aucun n'a parcouru le stade plus lentement ; mon disque est tombé à moitié chemin du but ; et je n'ai jamais pu, pour sauter, m'enlever de terre ; un manchot eût lancé (037) le javelot avec plus de vigueur. De cinq combats j'ai été proclamé, le premier, cinq fois vaincu.

85. LE MÊME. - Marcus, à la course armée, avait employé la moitié de la nuit à courir, de sorte que les portes du stade avaient été fermées. Tous les officiers publics, en effet, le prirent pour une statue en marbre placée là en l'honneur d'un coureur armé. Mais qu'arriva-t-il ? A la saison nouvelle, on ouvrit le stade, et alors on retrouva Marcus à qui il restait encore un stade à faire.

86. ANONYME. - Dans le stade, Périclès a-t-il couru, ou bien s'est-il assis ? nul n'en sait absolument rien. ô miracle de lenteur ! Le bruit de la barrière abaissée était encore dans les oreilles, qu'un autre était couronné ; mais Périclès n'avait pas fait un pas en avant.

87. LUCILLE. - Une maison haute de trente pieds contenait le grand et gros Timomaque, tant qu'il restait couché à terre mais s'il voulait se lever et se tenir debout, il fallait que ses esclaves se missent dès le matin à pratiquer au toit une ouverture de cinq pieds sur chaque face.

88. LE MÊME. - La petite Érotium était à jouer, lorsqu'un moucheron l'enleva (038). "Que faire, dit-elle, si tu veut, ô puissant Jupiter, me posséder ?"

89. LE MÊME. - Le petit Hermogène, lorsqu'il laisse tomber quelque chose, le ramasse par terre avec une fourche (039).

90. LE MÊME. - Furieux contre son père ô Denys, le petit nain Marcus a dressé une arête, et s'est pendu à cette potence.

91. LE MÊME. - Sur une tige de blé ayant fiché une pointe et s'étant attaché au cou un cheveu, le petit Stratonice s'est pendu. Qu'arriva-t-il ? Il n'est pas tombé à terre entraîné par son poids ; mais au-dessus de sa potence, bien qu'il n'y ait pas de vent, son corps s'enlève et voltige.

92. LE MÊME. - Ayant rendu le dernier soupir, Caïus, qui est si maigre, n'a rien laissé à mettre en terre. Descendu chez Pluton tout entier et tel qu'il était, il voltige le plus léger de tous les fantômes. Quand les gens de sa tribu emportèrent son lit vide, ils écrivirent dessus : "C'est Caïus que nous enterrons."

93. LE MÊME. - Un jour le fluet et petit Marcus, avec sa tête perça un des atomes dÉpicure, et passa à travers.

94. LE MÊME. - Un jour le fluet et petit Marcus voulut emboucher la trompette ; mais entraîné par son petit souffle, la tête la première, tout droit, il s'en alla au fond de l'instrument.

95. LE MÊME. - Par un jour d'été, une souris trouva le petit Marcus endormi; elle le prit par un pied, et l'entraîna dans son petit trou. Mais lui, sans armes, dans le trou étreignit la souris et l'étouffa. "Jupiter, s'écria-t-il, tu as pour fils un second Alcide."

96. NICARQUE. Sur un plat de grives maigres. - Les oiseaux du lac Stymphale ont donné moins de mal aux Arcadiens que ne m'en ont donné, avec leurs os décharnés, ces grives mortes, gibier au rabais (040), vraies harpies. Allez au diable , misérables chauves-souris des prés !

97. AMMIEN. - Bâtissez à Stratonicée, pour lui tout seul (041), une autre ville, ou bien bâtissez une autre ville pour les habitants. 

98. AMMIEN. - Qu'une métropole soit d'abord une ville ; ensuite, qu'on l'appelle métropole. N'appelez pas aujourd'hui de ce nom ce qui n'est pas même une ville.

99. LUCILLE. - La fumée a enlevé le petit Proclus qui soufflait le feu, et il s'en est allé par la fenêtre ; mais avec bien des efforts il a atteint un nuage, et par ce moyen il est redescendu à terre, non sans avoir été mille fois contusionné par des atomes.

100. LE MÊME. - Caïus était tellement léger qu'il ne pouvait enfoncer dans l'eau et plonger qu'en attachant à son pied une pierre ou du plomb.

101. LE MÊME. - Démétrius, en éventant pendant son sommeil la petite et légère Artémidora, l'a lancée hors de la chambre.

102. AMMIEN OU NICARQUE. - Le fluet et petit Diodore étant naguère une épine, a percé lui-même avec son pied l'aiguille dont il se servait.

103. LUCILLE. - Épicure a écrit que le monde entier était un assemblage d'atomes, croyant qu'ils étaient la matière la plus subtile. S'il y eût eu, de son temps, un Diophante, c'est de Diophante qu'il eût composé le monde, attendu qu'il est de beaucoup plus subtil et plus léger que les atomes ; ou bien, dans ses traités, il eût fait d'atomes son univers, mais ces atomes, cher Alcime, il les eût faits de Diophante.

104. LE MÊME. - Ménestrate, à cheval sur une fourmi comme sur un éléphant, est tombé soudainement à la renverse, et est resté étendu sur le dos. Une ruade de la fourmi lui donna le coup de la mort, et en mourant il s'est écrié : "O envie, ainsi sur son char a péri de même Phaéthon."

105. LE MÊME. - On cherchait partout le géant Eumécius ; et lui dormait sous un petit huilier, les bras étendus.

106. LE MÊME. - Un léger coup de vent emporta dans les airs Chérémon, moins lourd qu'un fétu de paille, et il y serait encore le jouet des zéphyrs, si une toile d'araignée ne l'eût arrêté et pris. Là, étendu sur le dos, il fut ballotté cinq jours et cinq nuits, et ce n'est qu'au sixième jour qu'il parvint à descendre le long d'un fil de cette toile.  

107. LE MÊME. - Heurté par une feuille de peuplier que le vent emportait, Chérémon en a été renversé sur le dos. Semblable à Tityus ou à Palicampe, il est tout au long couché par terre, cet homme en filasse de lin.

108. ANONYME. - Conon a deux coudées, sa femme en a quatre. Quand ils sont au lit et que leurs pieds se touchent, examine un peu où va la bouche de Conon.

109. ANONYME. - Il n'y a rien que le petit Démétrius ait à voir en se penchant ; il a beau même se dresser, il gît toujours terre à terre.

110. NICARQUE. - Trois fluets se disputaient naguère la palme de la maigreur et de la ténuité ; ils en appelèrent à des arbitres pour juger le plus mince, le plus grêle. L'un, Hermon, montra une grande adresse : il passa à travers une aiguille de tailleur, ayant le fil en main. Démas, sortant d'un trou, se tint debout sur une toile d'araignée, et l'araignée filant le suspendit à un de ses fils. Quant au troisième, Sosipatre, il s'écria : "A moi la couronne ; car que je sois vaincu si l'on me voit : je ne suis en effet qu'un souffle."

111. LE MÊME. - Le tout petit Diophante, voulant un jour se pendre, prit un fil d'araignée et se pendit.

112. LE MÊME. - Avant de te frotter les yeux avec ce collyre, malheureux Damostrate, dis adieu à la lumière sacrée du jour ; car Dion ne manque pas son coup. Non seulement il a privé de la vue Olympicus (042), mais même la statue qu on lui avait élevée, il l'a privée de ses yeux étincelants (043).

113. LE MÊME. - Hier le médecin Marcus toucha la statue de Jupiter, et bien qu'étant de marbre, bien qu'étant Jupiter, aujourd'hui elle a été emportée (044).

114. LE MÊME. - L'astrologue Diophante annonça au médecin Hermogéne qu'il n'avait plus que neuf mois à vivre ; et celui-ci en riant : "Que parles-tu, lui dit-il d'un délai (045) de neuf mois ? Fais-y bien attention : mes procédés sont plus expéditifs." Il dit, et étendant la main, il ne fit que le toucher. Diophante, qui regardait l'autre comme perdu, expira seul dans des convulsions. 

115. NICARQUE. - Si tu as quelque ennemi, Denys, n'appelle pas sur lui la colère d'Isis, ni d'Harpocrate, ni d'une divinité qui prive de la vue, s'il en est quelqu'une ; mais c'est Simon qu'il faut invoquer, et tu sauras ce que peut un dieu, ce que peut Simon.

116. LE MÊME. - Puissant César, la fable nous apprend qu'autrefois Eurysthée envoya le grand Hercule chez le dieu des morts ; maintenant c'est moi qu'y a dépêché le médecin Ménophane. Donc qu'on ne dise plus le médecin Ménophane, mais le médecin Eurysthée.

117. STRATON. - Le médecin Capiton a lavé les yeux de Chrysès avec son élixir. Il voyait une tour à huit stades de distance, à la distance d'un stade il voyait un homme, à douze coudées une caille ; un pou, il l'eût aperçu à deux palmes. Et maintenant il ne voit pas une ville à un stade, à deux plèthres il ne distingue pas les feux d'un phare, il voit à peine un cheval à une palme, et au lieu de la caille qu'il voyait naguère, il ne peut plus voir même une autruche. S'il continue son remède, il n'apercevra plus même un éléphant debout devant lui.

118. NICARQUE OU CALLICTER. - Phédon ne m'a administré ni lavements ni frictions ; mais, ayant la fièvre, je me suis rappelé son nom, et me voilà mort.

119. LE MÊME. - Le médecin a-t-il étouffé la vieille ou lui at-il donné un lavement ? Personne n'en sait rien. Mais la suite a été bien prompte, surnaturelle. Le bruit d'un clystère était encore dans les oreilles qu'on plaçait une couronne sur le cercueil, et que la famille préparait le repas funèbre (046).

120. LE MÊME. - Sodés, ayant promis de redresser le bossu Diodore, plaça trois lourdes pierres carrées sur la bosse de son épine dorsale. Écrasé sous leur poids, Diodore mourut, mais il était devenu plus droit qu'une règle.

121. LE MÊME. - Dans une opération chirurgicale, Agélaüs a massacré Acestoride. "S'il eût vécu, dit-il, le malheureux était condamné à boiter."

122. LE MÊME. - Le médecin Alexis a visité cinq malades ; il leur a prescrit en même temps à tous les cinq un lavement, une médecine, une friction ; et pour tous les cinq il n'y a en qu'une nuit, qu'une ordonnance, qu'un fossoyeur, qu'un enterrement, qu'une tombe, qu'une lamentation.

123. HÉDYLE. - Agis n'a point donné de clystère à Aristagore, et il ne lui a pas tâté le pouls ; mais à peine est-il entré, qu'Aristagore est parti. L'aconit eut-il jamais une telle puissance ? O vous qui fabriquez des bières, couvrez Agis de fleurs et de couronnes.

124. NICARQUE. - Passant, que demandes-tu ? - Je te demande quels sont ceux qui sont ici enterrés sous ces tombes. Ce sont les malades de Zopyre, ceux qu'il a ps de la douce lumière, Damis, Aristote, Démétrius, Arcésilas, Sostrate et la suite jusqu'à Parétonium (047). Ayant pour caducée un bâton et des sandales pour talonnières, nouveau Mercure, il conduit aux enfers tous ceux qu'il soigne.

125. ANONYME. - Le médecin Cratéas et le fossoyeur Damon avaient fait entre eux une convention. Celui-ci envoyait à son ami Cratéas les bandelettes qu'il volait aux morts pour qu'il en fît des bandes et des compresses, et Cratéas lui expédiait en retour tous ceux qu'il soignait pour les enterrer.

126. ANONYME. - Ce n'est point avec une sonde, c'est avec un trident que Charinus a pansé mes yeux, c'est avec une grossière éponge d'encrier qu'il les a lavés. En retirant la sonde, il m'a arraché la paupière, et l'instrument est resté tout entier dans l'oeil. S'il me panse une seconde fois, je ne lui donnerai plus d'ennui avec mes yeux malades;  et comment lui en donnerais-je, n'ayant plus d'yeux ?

127. POLLIANUS. - Il y a même parmi les Muses des Furies ; c'est par elles que tu es poète, par elles que tu écris tant de vers sans grâce, sans goût. Donc, je t'en prie, écris-en davantage encore, car je ne puis te souhaiter une folie plus grande que celle-là.

128. LE MÊME. - Pour ne pas me réjouir, Florus (048), il faudrait que je fusse devenu un de ces dactyles ou de ces spondées que tu agences non sans quelque roideur dans tes vers ; je me réjouis, et j'en prends à témoin le sort qui t'a été si propice, de la part de jambon que tu m'as envoyée comme un fleuron de ta couronne. Courage donc, Florus ! de nouveau sois hardi, entreprenant : tu peux aussi remporter le prix même à la longue course.

129. - CÉRALIUS. - Un poète qui était allé aux jeux isthmiques pour la lutte de poésie, y trouva des concurrents et dit : "J'ai une paristhmie (mal de gorge)." Il va se rendre aux jeux pythiques, et s'il y rencontre encore des rivaux, il ne pourra pas dire : "J'ai une parapythie," [le mot n'existant pas].

130. POLLIANUS. - Je hais les cycliques qui disent à satiété autar (049) epeita (puis ensuite), ces gueux qui s'habillent d'expressions dérobées. Aussi ai-je une estime particulière pour les élégiaques, Parthénius, Callimaque, auxquels il n'y a rien à prendre. Je consentirais à ressembler à l'animal aux longues oreilles (050) s'il m'arrivait d'écrire la verte chélidoine des bords du fleuve. Mais les cycliques se parent des dépouilles d'Homère avec une telle impudence, qu'ils diraient volontiers : Muse, chante la colère (051).

131. LUCILLE. - Ni dans le déluge de Deucalion où la terre disparut sous les eaux, ni dans l'incendie que Phaéthon propagea par tout l'univers, il ne périt autant d'hommes qu'en ont tué Potamon le poète et le chirurgien Hermogène, en sorte que, depuis l'origine des temps, il y a eu quatre grands fléaux, Deucalion, Phaéthon, Hermogène, Potamon.

132. LE MÊME. - Puissant César, je hais ces personnes auxquelles n'a jamais plu un poète jeune, eût-il môme chanté la colère d'Achille. Mais qu'on ait la tête à moitié chauve, les années de Priam, le dos voûté par l'âge, on leur plaira, ne sût-on pas écrire une panse d'A. Que s'il en est ainsi, ô grand Jupiter, la poésie va passer aux vieillards qu'affligent les hernies [et la goutte].

133. LE MÊME. - Eutychide le lyrique est mort. Ombres et mânes, fuyez : Eutychide vous arrive avec ses odes. Il a ordonné par son testament de brûler avec lui ses douze cithares et vingt-cinq corbeilles d'airs notés. Maintenant un nouveau Charon va vous faire sentir sa présence; et désormais où se réfugier, puisque Eutychide est bien aux enfers? 

134. LUCILLE. - Commençons-nous, Héliodore ? faisons-nous des vers à l'envi l'un de l'autre?  Héliodore, acceptes-tu le défi ? Approche, afin que le trépas comme dit Homère (052)... En effet, tu verras quel bavard je suis, tu reconnaîtras que je suis plus Héliodore que toi-même.  

135. LE MÊME. - Ce n'est plus ton fils que tu pleures, c'est moi que tu assommes, moi qui, de par tes vers, suis plus mort que le pauvre enfant. Sur moi donc fais désormais des éloges, des complaintes, sur moi victime de tes vers qui massassinent, qui m'égorgent. Oui, à l'occasion de ton deuil, je suis à la torture, et puissent souffrir autant ceux qui t'ont appris à lire et à écrire !

136. LE MÊME. - Non, jamais on ne forgea pour les surprises et les embuscades une épée aussi meurtrière que les hexamètres avec lesquels, ô Callistrate, tu me fais, sans déclaration préalable, une guerre acharnée et sanglante. Allons, sonne la retraite ; par des suspensions d'armes, Priam lui-même a obtenu des trêves à ses chagrins.

137. LE MÊME. - Après m'avoir servi une tranche de boeuf cru, après m'avoir versé trois coupes de vin plus cru encore, tu m'inondes, Héliodore, de tes épigrammes. Ai-je donc mangé comme un impie de quelque boeuf [du soleil] élevé en Sicile (053). Ah ! s'il en est ainsi, j'aime mieux en un instant perdre la vie au milieu des flots ; ou si la mer est trop loin d'ici, prends-moi pour me jeter dans un puits.

138. LE MÊME. - Que je me rappelle seulement Héliodore et sa grammaire, à l'instant ma langue s'embarrasse et je ne fais plus que des solécismes.

139. LE MÊME. - Le grammairien Ménandre porte la barbe de Zénon. On dit (054) que tu lui as confié l'éducation de ton fils. Aussi, même la nuit, lui enseigne-t-il sans relâche les cas, les conjonctions, les figures, les conjugaisons (055). 

140. POLLIANUS. - A ces disciples d'Aristarque qui se disputent à table sur des vers et sur des mots, qui écrivent et parlent tout de travers, qui n'aiment ni à rire ni à boire, mais qui, de leur lit, ne causent comme des écoliers que de Nestor et de Priam, [à ces cuistres] ne me livre pas, comme dit le poète (056), en proie et en pâture. Aujourd'hui je ne dîne pas du Mênin aeide, thea (Muse, chante la colère).

141. LUCILLE. - On m'a volé un cochon, une génisse, une chèvre, et à ce sujet je t'ai donné une petite somme, Ménéclès. Aucun démêlé ne s'est élevé entre Othryade et moi, et je n'accuse pas du larcin les héros des Thermopyles. C'est contre Eutychide que je plaide, en sorte que je ne sais ce que font ici Xerxès et les Spartiates. Mais ne perds pas de vue mon affaire au nom de la loi, ou je crierai bien haut : "Ménéclès parle d'une façon, et mon cochon d'une autre (057)."

142. LE MÊME. - Bien approvisionné de pollou dei (il s'en faut de beaucoup), de andres dikastai (juges), jusqu'à le répéter trois fois dans chaque période, de lege dê ton nomon (greffier, lis ici la loi), de tauti( (pour tauta), de môn (est-ce que) et de tettarakonta (pour tessarakonta), de atta (pour tina et hatina), de nê Dia et ma Dia (au nom de Jupiter), Créton est un orateur, un attique, et il a une école nombreuse ; à tous ces termes [de la langue oratoire], il ajoutera le gru (rien), le phathi (parle) et le min (lui, elle) [de la langue poétique].

143. LE MÊME. - Pluton ne veut pas recevoir Marcius l'orateur qui vient de mourir. "Ne nous suffit-il pas, lui dit-il, d'avoir ici le chien Cerbère ? Que si tu veux absolument entrer, va déclamer devant Ixion, devant Méliton le poète lyrique, devant Tityus. Car je ne sais pas, pour les punir, de fléau pire que toi, en attendant que Rufus le grammairien vienne ici nous débiter ses solécismes."

144. CÉRÉALIUS. - Se servir de cinq ou sis mots étrangement attiques, ce n'est pas parler à faire envie ni en habile orateur. Tu auras beau dire karkarein (pour gronder), konabein (pour résonner), sidzein (pour siffler), kelarudzein (pour murmurer), tu n'en deviendras pas pour cela tout d'un coup un Homère. Il faut un sens net et clair sous les mots, il faut des phrases moins recherchées, plus ordinaires, pour que l'on comprenne ce que tu dis.

145. ANONYME. - Sextus ne dit mot, mais l'image de Sextus déclame. C'est l'image qui est (058) l'orateur ; mais l'orateur est l'image de l'image.

146. AMMIEN. - Ayant envoyé en présent à l'orateur Flaccus sept solécismes, j'en ai reçu mille en retour. "Pour le moment, dit-il, je t'envoie ceux-ci en petite quantité ; par la suite, je t'en enverrai à foison, à mon arrivée en Chypre (059 )."

147. LE MÊME. - Le voilà tout à coup orateur dans le genre asiatique. Il n'y a là rien d'incroyable : ce prodige s'est manifesté à Thèbes, la ville des prodiges (060).

148. LUCILLE. - Même sans parler, l'orateur Flaccus a fait dernièrement un solécisme ; et de ses lèvres prêtes à s'ouvrir un barbarisme s'est échappé. De sa main, du reste, fait-il un geste, un signe, c'est un solécisme, et moi-même en le voyant, je sens ma langue qui s'embarrasse.

149. ANONYME. - Je te reconnais, Médon l'orateur, c'est bien toi. Quel prodige ! drapé dans ton manteau et prêt à parler, tu restes muet : vit-on jamais rien de plus ressemblant ?

150. AMMIEN. - "Athénagore l'orateur, d'après un songe, offre et consacre à Mercure d'Arcadie un pétase arcadien." Si en songe [et par un miracle du Dieu] Athénagore est devenu orateur, portons notre offrande à Mercure ; si c'est tout éveillé [et par le travail] qu'il est devenu orateur, [comme il n'en est rien], qu'il suffise de dire : "Athénagore a consacré (061)."

151. ANONYME. - Ceci est le portrait de l'orateur ; et l'orateur est le portrait du portait (062). Comment donc ? il ne dit mot : rien de plus ressemblant.

152. AMMIEN. - Si tu veux faire de ton fils un orateur comme tous ceux de notre temps, qu'il n'apprenne pas ses lettres.

153. LUCILLE. - Ménestrate, tu es un cynique, tu marches nu-pieds, tu braves le froid, nul ne le conteste ; mais si tu as l'impudence de me dérober un morceau de pain et de viande moi aussi j'ai un bâton et l'on t'appelle chien : [je te traiterai en conséquence.]

154. LUCILLE. - Maintenant quiconque est pauvre et ignorant ne va plus, pour gagner sa vie, moudre au moulin, ni porter des fardeaux par la ville ; il laisse croître sa barbe, et ayant pris un bâton, il est, dit-il, le chien, la constellation de la vertu. Voici ce qu'enseigne l'habile Hermodote : n'a-t-on pas une obole, qu'on cesse de porter des chemises, et l'on ne mourra plus de faim.

155. LE MÊME. -Ce rude champion de la vertu, ce censeur impitoyable des moeurs publiques et privées, ce sage qui triomphe du froid, du chaud, des éléments, qui ne semble occupé que de sa barbe, eh bien ! on l'a surpris - à quoi faire ? C'est bien honteux à dire : on l'a surpris à faire le rôle de Ganymède (063).

156. AMMIEN. - Tu t'imagines que la barbe donne la sagesse, et c'est pour cela que tu la laisses pousser. Crois-moi, hâte-toi de la couper ; car cette longue barbe est plus agréable à la vermine qu'à Minerve (064).

157. LE MÊME. - Des locutions [platoniciennes], ô gathe (mon cher), môn oun (est-ce que), poi dê kai pothen, ô tan (où donc vas-tu et d'où viens-tu, ami), et thama (fréquemment), et phere dê (çà donc), et komodê (tout à fait), et ithi (allons) le petit manteau, les cheveux incultes, la longue barbe, l'épaule nue, voilà ce qui aujourd'hui caractérise et distingue le philosophe.

158. ANTIPATER. - La besace, le bâton herculéen de Diogène de Sinope, son manteau tout souillé de crasse dont l'ampleur le protégeait contre les rudes frimas, gémissent et murmurent d'être portés sur des épaules qui les déshonorent ; car lui, il était le chien du ciel (065), et toi, tu es celui des tas d'ordures. Laisse donc là, laisse ces insignes qui ne te conviennent pas. Autre est l'oeuvre des lions, autre est celle des boucs barbus.

159. LUCILLE. - Tous les astrologues, d'une voix unanime, avaient prédit à mon père que son frère atteindrait une extrême vieillesse. Hermoclide seul a dit qu'il mourrait avant l'âge, mais il l'a dit lorsque déjà, dans l'atrium, nous pleurions sur son cercueil.

160. Le MÊME. - Tous ceux qui signalent l'ascendant de Saturne et de Mars et en tirent des horoscopes, mériteraient une bastonnade. Peut-être avant peu les verrai-je sachant bien réellement ce que fait le taureau (066), ce que peut le lion.

161. LE MÊME. - Onésime le pugile alla consulter le devin Olympus, pour savoir s'il arriverait à la vieillesse. "Oui, lui dit le devin, si tu renonces au pugilat ; mais si tu continues, Saturne (067) te sera funeste."

162. NICARQUE. - Un voyageur vint demander à Olympus s'il arriverait à Rhodes et comment il- y arriverait sain et sauf. "'abord, lui dit le devin, choisis un vaisseau neuf, et ne te mets pas en mer dans la mauvaise saison, embarque-toi en été. Avec ces précautions, tu arriveras au but de ton voyage, à moins que les pirates ne te capturent dans la traversée."

163. LUCILLE. - Onésime le lutteur, Hylas le pentathle et le coureur Ménéclès allèrent consulter le devin Olympus, pour savoir lequel d'entre eux remporterait la victoire dans les jeun publics. Le devin, après avoir examiné les entrailles des victimes : "Vous êtes vainqueurs, leur dit-il, tous les trois, à moins qu'un rival n'ait les reins plus forts que toi, Onésime ne te renverse sur le sable, Hylas, n'ait des jambes plus agiles que les tiennes, Ménéclès."

164. LE MÊME. - "Le moment fatal est venu pour moi, disait Aulus l'astrologue, en examinant sous quelle constellation il était né, je n'ai plus que quatre heures à vivre." Lorsque la cinquième heure fut arrivée, comme sa vie était un aveu de son ignorance, par respect pour Pétosiris (068) et ses doctrines, il se pendit. Il mourut donc aux branches d'un arbre, mais ce n'était pas l'arbre de la science.

165. LE MÊME. - Ce n'est pas en respirant l'aromatique pouliot que l'avare Criton soulage ses maux d'estomac, c'est en respirant de la monnaie de cuivre.

166. ANONYME. - Tout le monde dit que tu es riche, moi je dis que tu es pauvre. C'est l'usage qu'on fait de l'argent qui prouve la richesse, Apollophane. Si tu t'en sers, il est à toi ; mais du moment que tu le gardes pour des héritiers, il cesse de t'appartenir.

167. POLLIEN. - Ayant de l'argent, comment se fait-il que tu n'aies rien ? je vais te le dire. Tu prêtes à intérêt tout ce que tu as. Ainsi tu n'as rien, pour qu'un autre aie [et jouisse].

168. ANTIPHANE. - Tu comptes et recomptes ton argent ; mais le temps, qui te produit des intérêts, t'amène aussi la vieillesse aux cheveux blancs. Sans avoir bu, sans t'être couronné de fleurs ni arrosé de parfums, sans avoir eu une jolie petite maîtresse, tu mourras, laissant une riche succession et n'emportant de tes trésors qu'une seule obole [l'obole de Charon].

169. NICARQUE. - Hier l'avare Dinarque était décidé à se pendre ; mais il fallait, Glaucus, dépenser six sous, et l'infortuné vit encore. C'est six sous, en effet, que coûtait la corde ; il trouva que c'était trop cher, et il cherche sans doute une autre mort plus économique. N'est-ce pas la marque d'une suprême avarice d'être empêché pour six sous de terminer par la mort tous ses malheurs ?

170. LE MÊME. - L'avare Phidon se lamente, non parce qu'il va mourir, mais parce que son cercueil [et son tombeau] lui ont coûté cinq mines (069). Faites-lui-en cadeau, et comme il y a de la place de reste dans sa sépulture, fourrez-y un de ses nombreux enfants. [Ce sera une économie qui lui fera plaisir.]

171. LUCILLE. - L'avare Hermocrate, mourant s'inscrivit sur son testament pour héritier de tous ses biens. Dans son lit, il calcula ce qu'il aurait à donner au médecin pour honoraires en revenant à la santé, et ce que, malade, il dépensait. Or, il trouva qu'il aurait une drachme de plus à payer après sa guérison. "Mieux vaut mourir," dit-il, et il expira. On l'exposa, n'ayant rien de plus qu'une obole (070) ; mais ses héritiers, avec quelle joie ils se partagèrent ses dépouilles (071) !

172. LE MÊME. - Aulus l'avare a noyé son fils nouveau-né, en supputant les frais que sa vie lui coûterait.

173. PHILIPPE. - Si tu as prêté ton argent à usure, comme tu le prêtes encore, comme tu le prêteras toujours, quand donc sera-t-il à toi ?

174. LUCILLE. - Hier Dion a dérobé. une Vénus  toute d'or, la Vénus sortant de l'onde maternelle ; il a de plus, par un tour de main enlevé un Adonis de bronze et le petit Amour placé auprès. Maintenant les voleurs les plus experts diront : "Nous ne rivalisons plus avec toi d'habileté manuelle ; [tu es plus fort que nous]."

175. LE MÊME. - Eutychide avait volé le dieu même qu'il devait attester par serment. "Non, dit-il, je ne puis jurer par un dieu absent."

176. LE MÊME. - Le Mercure ailé, le messager de l'Olympe, le patron de l'Arcadie, le voleur de boeufs, le surveillant, le protecteur de ce gymnase, disparut, une nuit, volé par Aulus. En l'emportant, celui-ci disait : "Il y a des élèves plus habiles que leur maître."

177. LE MÊME. - Eutychide dérobait un Apollon, le dieu qui dénonce les voleurs. "Ne parle pas tant, lui dit-il, mais compare mon art avec ton art, tes oracles avec mes actes, le devin avec le voleur, Eutychide avec le dieu, et comme tu ne mets pas de frein à ta langue, je vais te vendre ; puis, aux acheteurs, dis de moi tout ce que tu voudras."

178. LE MÊME. - Berger, fais paître ton troupeau plus loin, de peur que Périclès le voleur ne t'emmène avec tes boeufs.

179. LE MÊME. - Si Dion avait les pieds aussi lestes que les mains, ce n'est plus à Mercure qu'on attribuerait des ailes, c'est à Dion.

180. AMMIEN. - Aux ides (072), Polémon ne juge pas ; aux nones, il condamne. Que tu donnes, que tu ne donnes pas, c'est toujours Polémon.

181. LE MÊME. - Nous savions tous, Polémon, que tu t'appelais Antoine (Antônios) ; comment s'est-il fait que tout à coup trois lettres de ton nom ont disparu (073)?

182. DENYS - Vous m'immolez, moi cochon (choiri), non votre propriété (idion) ; et vous m'appelez choiridion (074), sachant bien que je ne vous appartiens pas (idion).

183. LUCILLE. - Héliodore savait qu'il était né sous l'astre funeste de Saturne. Par une nuit il enleva de son temple un Saturne d'or. "Essayons lui dit-il, quel est de nous deux le plus malfaisant, et tu connaîtras quel est de nous deux le vrai Saturne. Qui prépare du mal à autrui s'en prépare à lui-même. Quand tu m'auras procuré un bon prix, présage par ton lever tout ce que tu voudras."

184. LE MÊME. - Dans le jardin des Hespérides du grand Jupiter, Méniscus prit, comme autrefois Hercule, trois pommes d'or. Qu'arriva-t-il ? On l'arrêta, et il devint un grand spectacle pour le peuple : comme autrefois Hercule, il fut brûlé vif.

185. LUCILLE. - Un jour, puissant César, Hégélochus vint dans une ville grecque, et y chanta le Nauplius. Quel châtiment (075) pour cette ville ! Nauplius a toujours été fatal aux Grecs, soit qu'il ait les flots pour complices de ses vengeances, soit qu'il se serve d'un mauvais citharède.

186. NICARQUE. - Le chant du hibou est un message de mort ; mais lorsque Démophile chante, le hibou lui-même meurt.

187. LÉONIDAS. - Simyle a tué tous ses voisins dans une nuit qu'il a passée tout entière à chanter. Origène a pu seul échapper au désastre : c'est que la nature l'avait fait sourd. Ainsi, en échange de l'ouïe, elle lui a donné une vie plus longue.

188. AMMIEN. - Nicétas est un Apollon (076) Musicien, il écorche (apollei) les airs ; médecin, il tue (apollei) ses malades.

189. LUCILLE. - Apollophane le tragédien a vendu pour cinq oboles les attributs de cinq divinités, la massue d'Hercule, les fouets de Tisiphone, le trident de Neptune, l'égide de Minerve, le carquois de Diane. Ces dieux, qui siègent dans le conseil de Jupiter, ont été ainsi dépouillés pour une petite portion de mauvais pain et de mauvais vin.

190. LE MÊME. - Par où le barbier commencera-t-il à couper les cheveux d'Hermogène le chevelu ? il est dans l'embarras, Hermogène étant tout cheveux des pieds à la tête.

191. LE MÊME.  - Mars, Mars, dieu de sang et de meurtre, cesse, ô barbier, de m'écorcher, car je ne suis plus qu'une plaie. Allons, attaque des parties plus charnues , descends jusqu'à mes mollets, taillade-les, je te les abandonne. Voici que ta boutique se remplit de mouches et, si tu continues, tu y verras bientôt des troupes de corbeaux et de vautours.

192. LUCILLE. - L'envieux Diophane, ayant vu prés de lui à une potence plus haute que la sienne un autre pendu, en a séché de jalousie.

193. ANONYME. - L'envie est chose détestable, mais elle a cela de bon, qu'elle dessèche et consume les yeux et le coeur de l'envieux.

194. LUCILLE. - A Pan, qui se plaît dans les rochers, aux Nymphes des montagnes, aux Satyres, aux Hamadryades qui vivent sous l'écorce des chênes, le chasseur Marcus, avec ses chiens et ses épieux si souvent funestes aux sangliers (077), n'ayant rien pris, a consacré ses propres chiens.

195. DIOSCORIDE. - Aristagore avait dansé le Galle ; et moi, par ma pantomime qui m'avait épuisé, j'avais représenté les belliqueux Téménides. Mon rival s'est retiré avec beaucoup d'applaudissements, tandis que mon infortunée Hyrnétho (078) a été jetée à la porte avec accompagnements de sifflets. Allez au diable, exploits des héros ! puisque les ignorants trouvent que l'alouette même chante plus mélodieusement que le cygne.

196. LUCILLE. - Bito, qui a un museau de singe et qui est si laide qu'en la voyant Hécate (079) se pendrait, furieuse d'être vaincue en laideur, ose dire : "Je suis chaste, Lucillius, et je couche seule." Car sans doute elle a honte de dire : "Je suis vierge." Ah ! puisse mon ennemi épouser un tel monstre et en avoir des enfants aussi chastes qu'elle !

197. LE MÊME. - Hiéronyme affectait autrefois un air sévère et morose ; il était par trop drimus. Maintenant il a gardé le dri, mais le mus est devenu los : c'est un bon drille.

198. THÉODORE. - Hermocrate est une partie de son nez ; en disant que le nez est une partie d'Hermocrate, nous prenons le tout pour la partie.

199. LÉONIDAS. - Sosiptolis au nez crochu n'achète pas de poisson ; la mer lui en fournit une belle quantité pour rien. II n'emploie ni gaule ni crin. Au bout de son nez il adapte un hameçon, et il prend tout ce qui nage.

200. LE MÊME.  - La maison de Zénogène était en flammes : et lui, pour descendre par la fenêtre, se consumait en vains efforts, ayant attaché ensemble de longues perches, mais sans atteindre le sol. Enfin il avisa le nez d'Antimaque, s'en servit comme d'une échelle et s'échappa.

201. AMMONIDE. - Si l'on avait montré aux Parthes Antipatra nue, ils auraient fui par delà les colonnes d'Hercule.

202. ANONYME. - Ayant enterré la vieille, très sagement Moschus s'est remarié à une jeune fille. La dot tout entière était restée entre ses mains. L'habileté de Moschus mérite d'être louée : car il a su au mieux concilier les plaisirs de sa couche et les bénéfices d'une succession.

203. ANONYME. - Le nez de Castor est une pioche de terrassier, une trompette s'il ronfle, une serpette pour la vendange, une ancre de vaisseau, un soc de charrue, un hameçon pour la pêche, une fourchette de table, un biseau de charpentier, une serpe de maraîcher, une hachette de maçon, un marteau de porte cochère. Ainsi Castor, qui porte un nez approprié à toute sorte d'usages, a obtenu du sort un instrument utile.

204. PALLADAS. - J'ai vu avec stupeur l'orateur Maurus de ses lèvres énormes, de sa trompe d'éléphant, lancer des sons qui m'ont (presque) tué.

205. LUCILLE. - Eutychide, qui dînait chez Aulus, ne lui a laissé absolument rien, il a tout emporté au moyen de l'esclave qui se tenait derrière lui. Aujourd'hui Eutychide donne chez lui un grand dîner, et Aulus, qui n'y est pas invité, fait chez lui maigre chère.

206. LE MÊME. - Cher Denys , puisses-tu digérer tout ce que tu manges ; mais suivant l'usage et la loi, donne-moi quelque chose à manger. Moi aussi je suis invité. Publius, notre hôte, a dressé la table aussi pour moi, et j'ai aussi une part du festin. Peut-être, à ma maigreur, juges-tu que je suis malade, et c'est pour cela que tu m'observes, de peur que je ne mange quelque chose à ton insu.

207. LE MÊME. - Tu ne te contentes pas de manger comme cinq loups ; tu donnes, ô Camus, à l'esclave qui est derrière toi, tout ce que tu ne manges pas, ce qui n'est pas à toi, ce qui est la part des autres. Il ne te reste plus qu'à venir demain avec la corbeille de ton esclave, et à ramasser la sciure de bois, l'éponge et les balayures. 

208. LE MÊME. - Eutychidas dans le stade ne se presse guère. Mais s'il s'agit d'un dîner, il court, que dis-je ? il vole.

209. AMMIEN. - Tu irais étendant tes domaines jusqu'aux colonnes d'Hercule, qu'il ne te restera qu'une portion de terre égale à celle de tous les hommes. Aussi pauvre qu'Irus, n'ayant rien qu'une obole, tu seras couché dans la terre, qui ne t'appartiendra plus, et tu y deviendras poussière.

210. LUCILLE. - Le soldat Aulus, à la vue d'une cuirasse et d'un laurier, se cache et va serrer sa casaque militaire. Il a peur même de sa propre épée, qu'il porte bien inutilement. S'il vous arrive de dire : "lls viennent," aussitôt il tombe à la renverse. Jamais il n'aborde ni Polémon ni Stratoclide ; il ne fréquente comme ami que Lysimaque (080).

211. LE MÊME. - Le soldat Calpurnius, à la vue du combat près des vaisseaux, peint, comme il arrive souvent, sur une muraille, sans pouls et pâle s'étala par terre en criant. "Braves Troyens, faites-moi prisonnier." Il s'informa s'il n'était pas blessé, et crut à grand'peine qu'il n'était pas mort. Que dis-je ? il paya sa rançon aux héros de la muraille.

212. LUCILLE.- [Je t'avais demandé le portrait de mon fils], et voilà que tu me présentes un tout autre enfant, avec un museau de chien, si bien que je me demande ce qu'est devenu Zopyrion, le fils de mon Hécube. Finalement, pour six drachmes, moi Érasistrate le charcutier, j'ai du prix de mes saucissons un Anubis (081) pour enfant.

213. LÉONIDAS. - Diodore a fait le portrait de Ménodote ; il ressemble parfaitement à tout le monde, Ménodote excepté.

214. LUCILLE. - Auteur de Deucalion et de Phaéthon, tu demandes, ô Ménestrate, la récompense que méritent ces pièces. Nous les jugeons dignes de ce qui leur revient. Phaéthon est vraiment digne du feu, et Deucalion de l'eau.

215. LE MÊME. - Le peintre Eutychus a eu vingt enfants, et il n'y a pas même un de ces enfants qui soit ressemblant.

216. LE MÊME. - Écoutez l'histoire de Cratippe le philopède. Je vais vous raconter un fait à peine croyable ; mais grande est la puissance de Némésis. Le philopéde Cratippe a changé de tactique, il est passé dans un autre camp. Me serais-je jamais attendu à cela ? - Je m'y étais attendu, Cratippe. M'ébahirai-je si, disant à tous que tu es loup (082), tu t'es montré tout d'un coup chevreau ? [Tu l'as toujours été.]

217. LE MÊME. - Pour échapper au soupçon, Apollophane a pris femme, et il a traversé la place du marché en jeune marié. "Demain, disait-il, j'aurai un enfant." Le temps s'est écoulé, et nul enfant n'est venu ; mais le soupçon est revenu.

218. CRATÈS. - Choerile est bien au-dessous d'Antimaque : mais Euphorion le regarde comme supérieur à tous, et son éloge est sans cesse sur ses lèvres. Lui-même il a fait des poèmes dignes de gloses et de commentaires, et il sait à fond l'art de l'emprunt et du plagiat. En effet, il est très-homérique (083).

219. ANTIDATER. - Je ne le crois pas, quoique bien des gens dignes de foi le disent ; mais en attendant, par Jupiter ! si tu m'aimes, Pamphile, ne me baise pas (084).

220. ANONYME. - Fuis la bouche d'Alphée ; il baise le sein d'Aréthuse (085), se plongeant tête baissée dans les parages les plus saumâtres.

221. AMMIEN. - Non quia calamum lingis, tu mihi odio es ; sed quia idem facis vel etiam sine calamo.

222. ANONYME. - In Chilonem fellatorem (086). Chilon et Lichon sunt aequa (ejusdem computationis) vocabula. Sed nihil interest Chilonis. Quippe aequa (quod fax) vel iniqua (quod nefas) osculatur.

223. MÉLÉAGRE. - An rem faciat Phavorinus dubitas ; ne dubita : ille mihi rem facere dixit suo ipsius ore (087).

224. ANTIPATER. - Priapus mentulam Cimonis rigidam conspicatus. "Heu ! dixit, me immortalem mortalis superat !"

225. STRATON. - Uno in lecto stuprum duo perpetiuntur duoque committunt ; tres vero sunt. Si rogas quomodo id fiat, qui medius jacet bis numera, quia simul facit et patitur.

326. AMMIEN. - Que la terre qui te recouvre, misérable Néarque, te soit légère, afin que les chiens puissent te déterrer facilement.

227. LE MÊME. - L'escarbot fera du miel, le moucheron donnera du lait, avant que tu fasses quelque bien, vu ta nature de scorpion. Tu n'en fais pas de toi-même, tu n'en laisses pas faire aux autres. Tu es comme la planète de Saturne, odieuse et fatale (088 ).

228. LE MÊME. - L'un a tué sa mère, l'autre son père, un autre son frère ; Polien a tué les trois, ce qui ne s'était pas vu depuis OEdipe.

229. - LE MÊME. - A la fin, la goutte a trouvé son homme, l'homme qui la méritait bien ; mais il y a cent ans qu'il devrait être goutteux.

230. LE MÊME. - Marcus, ôte les deuc premières syllabes d'omnipotence (089), tu mérites ce qui reste. 

231. AMMIEN. - Avec une lettre de moins, tu es une bête sauvage (akros ours), et un homme en toutes lettres (Makros), mais un homme qui mérite d'être livré à une multitude de ceux que tu écris avec une lettre de moins.

232. CALLIAS D'ARGOS. - Tu as toujours été regardé comme de l'or en barre, Polycrite ; mais aujourd'hui que tu as bu, tu es tout à coup devenu mauvais comme la gale. Tu me sembles fort avoir été toujours mauvais. Le vin est la pierre de touche du caractère : tu n'es pas devenu mauvais aujourd'hui, mais tu t'es montré ce que tu es.

233. LUCILLE. - Entre le praticien Phèdre et le peintre Rufus, il s'établit une lutte à qui ferait la copie la plus prompte et la plus authentique. Or, tandis que Rufus se préparait à broyer ses couleurs, Phèdre (090) avait déjà copié une reconnaissance avec toutes les illusions de la ressemblance.

234. LE MÊME. - Si Cratère a les mains et les pieds entiers et sains, on n'en peut pas dire autant de sa tête, après avoir lu ce qu'il écrit.

235. DÉMODOCUS. - Démodocus l'a dit : "Les habitants de Chios sont de mauvaises gens, non celui-ci, celui-là, mais tous, tous moins Proclês. Que dis-je ? Proclès est bien de Chios."

236. LE MÊME. - Tous les Ciliciens sont de mauvaises gens. Parmi eux Cinyras seul est un brave homme, et encore Cinyras est-il Cilicien.

237. LE MÊME. - Un jour une vipère mordit un Cappadocien ; elle aussi mourut, ayant goûté d'un sang empoisonné.

238. LE MÊME. - Les Cappadociens sont toujours mauvais. Prennent-ils les armes, ils sont plus mauvais. Le commerce, le gain, les rendent très mauvais. Si deux ou trois fois ils parviennent aux honneurs du char proconsulaire, oh ! alors ils deviennent archimauvais. César, je t'en conjure, ne renouvelle pas l'épreuve une quatrième fois, de peur que le monde ne s'abîme dans le cappadocisme.

239. LUCILLE. - Ni la Chimère que tua Bellérophon, ni les taureaux de la fable qui soufflaient du feu, ni Lemnos tout entière, ni les déjections des Harpies, ni les plaies du pied de Philoctète, n'exhalaient une odeur aussi infecte. De l'aveu de tout le monde, ô Télésilla, tu l'emportes sur la Chimère, les taureaux, les ulcères, les Harpies, les Lemniades.

240. LE MÊME. - Non seulement Démostratis sent le bouc, mais ils sentent également le bouc tous ceux qui ont senti Démostratis.

241-242. NICARQUE. - Ta bouche et ton derrière, Théodore, sentent de même, au point qu'il faut être physicien pour faire la différence. Tu aurais dû écrire : "Ici est ma bouche, ici mon derrière." Mais à présent, quand tu parles, je ne puis reconnaître si tu ouvres la bouche ou si tu pètes. La vipère aussi, Théodore, respire par en haut et par en bas.

243. LE MÊME. - Onésime est allé prendre un bain le douze du mois de dystre (091), sous l'archontat d'Antiphile, ayant laissé chez lui un enfant à la mamelle qu'au retour du bain il trouvera père de deux enfants. Il nous écrit qu'il reviendra l'année prochaine. Les baigneurs, en effet ont reçu l'ordre d'ôter pour cette époque le chaudron du feu [et de préparer le bain].

244. ANONYME. - Tu as acheté un chaudron de cuivre plus difficile à chauffer que l'aquilon de Thrace. Ne te fatigue pas à tant souffler : en vain tu excites la flamme. C'est un vase d'airain que tu as acheté pour rafraîchir le vin en été (092).

245. LUCILLE. - Les bordages laissent entrer tous les flots, Diophante, et par les écoutilles se précipite l'Océan. On voit des troupes de dauphins et de belles Néréides nager dans le vaisseau. Si nous résistons, peut-être quelque navire manoeuvrera au milieu de nous, car il n'y a plus d'eau dans la mer (093).

246. LE MÊME. - Dans quelles carrières, ô Denys, as-tu taillé mes bordages ? avec quelle pierre as-tu construit ma carène ? Car, si je ne me trompe, elle est de plomb, elle n'est ni de chêne ni de pin. Bientôt ma quille pétrifiée s'attachera au rivage. Peut-être serai-je moi-même changé tout à coup en pierre ; puis, ô pire destin ! Méliton écrira sur moi, comme sur Niobé, une pièce détestable.

247. LE MÊME. - Nous naviguons en pleine mer, ô Denys  ; le vaisseau s'est de toute part rempli d'eau, il renferme dans ses flancs la mer Adriatique, la mer de Tyrrhène et d'Istrie, la mer Égée. Ce n'est plus un vaisseau, c'est la source de l'Océan dans un bassin de bois. Arme-toi, César ; Denys ne se contente plus d'être un simple armateur, il exerce l'empire des mers.

248. BIANOR. - La mer n'a point englouti le navire, et comment l'aurait-elle fait ? il ne naviguait pas. Ce n'est pas non plus le Notus ; il a péri avant de connaître le Notus et la mer. Déjà on l'avait chevillé jusqu'au niveau des bancs de rameurs, déjà on l'avait enduit d'une couche onctueuse de poix. La poix s'est enflammée, et par l'incendie a montré que ce qui était un préservatif sur mer était à terre un danger.

249. LUCILLE. - Ménophane a acheté un champ, et la faim l'a obligé d'aller se pendre à un chêne du voisinage : On n'a pas pu l'enterrer dans son champ, même debout, et il a fallu qu'un de ses voisins lui donnât la sépulture à frais communs. Si Épicure eût connu le champ de Ménophane, il eût dit que tout est plein de champs et non d'atomes.

250. ANONYME. - Le peintre a fort bien représenté le gras [Pachymère], mais peste soit de lui si, au lieu d'un mangeur à qui rien ne suffit, nous en avons deux !

251. NICARQUE. - Un sourd avait un procès avec un sourd, et tous les deux plaidaient devant un juge encore plus sourd. L'un soutenait que le loyer était dû pour cinq mois, l'autre disait qu'il avait tourné la meule toute la nuit. Le juge, les regardant en face, leur dit : "Pourquoi vous disputez-vous ? C'est votre mère à tous deux, tous deux nourrissez-la."

252. LE MÊME. - Si tu me baises, c'est que tu me hais, et si tu me hais, tu me baises. Que si tu ne me hais pas, cher ami, ne me baise pas (094).

253. LUCILLE. - Dans quel chêne ton père t'a-t-il taillé, Ariston ? de quelle latomie t'a-t-il tiré ? car certes tu es né d'un vieux chêne ou d'un bloc de marbre, danseur merveilleux, type vivant de Niobé. C'est à ce point que, dans mon étonnement, je dis que toi aussi tu as eu quelque démêlé avec Latone : tu ne serais pas si naturellement de pierre.  

254. LE MÊME.  - Toutes tes danses sont conformes à l'histoire ; dans une seule tu as manqué un point important, et je m'en afflige. En dansant la Niobé tu es resté immobile comme un marbre ; par contre, dans le rôle de Capanée tu es tombé comme une masse. Mais en jouant Canacé (095) quel oubli ! tu avais une épée à la main, et tu es sorti vivant de la scène. Voilà qui est contraire à l'histoire.

255. PALLADAS. - Memphis le camus a dansé une Daphné et une Niobé, la Daphné comme s'il était de bois, la Niobé comme s'il était de marbre.

256. LUCILLE. - On dit que tu restes au bain longtemps, Héliodora, vieille coquette de cent ans qui n'es pas encore tombée en poussière ; mais je sais pourquoi tu demeures ainsi dans ta baignoire : tu espères, comme Pélias, rajeunir par la cuisson.

257. LE MÊME. - Diophante ayant vu en songe le médecin Hermogène, ne s'est plus relevé, et pourtant il portait une amulette.

258. LUCILLE. - Aulus le pugile, ayant composé un crâne de ses os recueillis un à un, en fait hommage au dieu de Pise. Qu'il revienne vivant de Némée, puissant Jupiter, et il t'offrira sans doute aussi les vertèbres qui lui restent encore.

259. LE MÊME. - Érasistrate, tu as un cheval thessalien ; mais tous les breuvages de la Thessalie ne sauraient le mettre au galop. C'est un vrai cheval de bois auquel tous les Troyens et tous les Grecs, en le traînant, n'auraient pu faire franchir les portes Scées. Consacrons-le à quelque divinité, si tu veux m'en croire, et avec l'orge qu'il te mange fais de la tisane à tes enfants.

260. ANONYME. - As-tu depuis longtemps ce titre de sénateur (to bouleuein) ? Je ne reconnais pas ce B ; c'est qu'en effet il y avait un D (to douleuein) et que tu étais esclave.

261. ANONYME. - Le fils de Patricius passe pour un garçon bien sage, lui qui éloigne tous les amants ; [mais ce sont eux qui s'éloignent], à cause de ses goûts infâmes.

262. ANONYME. - Par une nuit étoilée, des jeunes gens de Pharie font descendre de son ciel Séléné (096), fendue par le milieu comme la lune (097) son homonyme.

263. PALLADAS. - Ménandre est apparu en songe au comédien Paul, et lui a dit : "Je ne t'ai jamais fait de mal, et tu m'estropies !"

264. LUCILLE. - L'avare Hermon, ayant fait en rêve quelque dépense, s'est pris de chagrin et s'est pendu.

265. LE MÊME. - Recrute-t-on une armée pour combattre des escarbots, des cousins ou des mouches, la cavalerie des puces ou des grenouilles, tremble, Caïus crains qu'on ne t'enrôle comme étant un soldat digne de tels ennemis ; mais si on lève une armée d'élite, des gens de coeur, reste tranquille, sois sans inquiétude. Les Romains ne font pas la guerre aux grues et n'arment pas les Pygmées.

266. LE MÊME. - Démosthénis a un miroir qui la trompe ; si en effet elle s'y voyait telle qu'elle est, elle ne voudrait pas du tout se regarder.

267. LE MÊME. - Tu n'as pas besoin de mesure pour vérifier les travaux, et tu sais t'en passer. N'as-tu pas, en, effet, un nez de trois coudées, mesure exacte et infaillible ?

268. ANONYME. - Proclus ne peut se moucher avec ses doigts ; il a, en effet, le nez plus long que son bras. II ne dit pas même "Jupiter, sois-moi propice," quand il éternue. Car il n'entend pas son nez : il est beaucoup trop loin de son oreille.

269. ANONYME. Sur une statue d'Hercule devenue une statue de saint Luce. - Moi, le fils de Jupiter, Hercule Callinice, on me force d'être Luce ; non, je ne le suis pas.

270. ANONYME. Sur la statue de l'empereur Anastase dans l'Euripe, à Byzance. - L'airain étant un métal trop honorable, trop précieux pour toi, détestable empereur, c'est une statue de fer qu'on t'a élevée, en souvenir des meurtres, de la misère, de la famine et des colères qu'ont produits ton avarice et ta cupidité.

271. ANONYME. Même sujet. - Près de la statue de Scylla on a placé une affreuse Charybde ; ce farouche et cruel Anastase.  Tremble, toi aussi, Scylla, car il pourra bien te dévorer toi-même, en faisant de la menue monnaie avec ta statue de cuivre.

272. ANONYME. Contre les Cinèdes. -Ils ont renié les hommes et ne sont pas devenus femmes. Ils ne sont pas hommes, car ils subissent les épreuves des femmes ; ils ne sont pas femmes, car ils ont reçu le sexe des hommes. Ils sont des hommes pour les femmes, et pour les hommes ils sont des femmes.

273. ANONYME. - Tu as l'esprit boiteux comme la jambe, et le dehors chez toi est le véritable emblème du dedans (098).

274. LUCILLE. - Donne-moi, fils de Cyllène, quelques détails sur la descente de l'âme de Lollien au séjour de Proserpine. Ce serait merveille qu'elle eût gardé le silence. Sans doute qu'elle a voulu t'enseigner quelque chose. Quelle mauvaise rencontre à faire même chez les morts !

275. APOLLONIUS. - Callimaque, le rebut, le jouet, la bûche, [du Musée], est digne d'un châtiment (aitios), lui Callimaque (099), l'auteur des Aitia (100).

276. LUCILLE. - Jeté en prison, un jour, Marcus l'indolent n'a pas voulu se donner la peine d'en sortir et s'est avoué coupable de meurtre.

277. LE MÊME. - Une nuit, Marcus l'indolent, ayant rêvé qu'il se livrait aux exercices [du champ de Mars], ne s'est plus rendormi, de peur qu'il eût encore à se livrer à ces exercices.

278. LE MÊME. Sur un grammairien cornard. - Au dehors tu expliques les malheurs de Pâris et de Ménélas, tandis qu'au dedans beaucoup de Pâris courtisent ton Hélène.

279. LE MÊME. - Comment les grammairiens auraient-ils jamais le coeur sain et bon, eux qui commencent toujours par la colère, le ressentiment, la vengeance (101) ?

280. PALLADAS. - Mieux vaut passer par les mains du préteur qui punit de mort les pirates, que par celles du chirurgien Gennadius. Le premier détruit pieusement les brigands qu'il déteste ; le second, après avoir reçu votre argent, vous envoie dans l'autre monde.

281. PALLADAS. - Quand le médecin Magnus descendit aux enfers, Pluton alarmé s'écria : "Il vient pour ressusciter même les morts."

282. LE MÊME. - Je ne plains plus ceux qui ont quitté la douce lumière de ce monde, mais je plains ceux qui vivent toujours dans l'attente de la mort.

283. LE MÊME. Sur le préfet Démonique. - Bien des gens disent de toi bien des choses ; cependant ils ne peuvent exprimer la violence de tes rapines. Mais ce qui nous étonne le plus, comme étrange, incroyable, c'est qu' en volant tu aies des larmes toujours abondantes. C'est ainsi que, gouverneur de Chalcis, tu as pillé, saccagé notre ville, pleurant tout en volant (102), mais pleurant avec profit.

284. LE MÊME. - De la terre des Lotophages il nous est venu pour chef (103) un nouveau Lycaon (104) qui de Chalcis veut faire une nouvelle Antioche (105).

285. LE MÊME. - Une autre passion étrange de Démonique nous a bien étonné : comme une femme, il pleurait en volant, ému de pitié pour ceux qu'il dépouillait ; il volait pieusement, saintement, n'ayant d'ailleurs rien de sain ni de pur, pas même sur sa personne toute crasseuse.

286. LE MÊME. - Rien de pire qu'une femme, fût-elle belle ; rien de pire qu'un esclave, fût-il beau. Tu les désires cependant, ces fléaux nécessaires. Mais crois-tu un esclave dévoué à son maître, cet esclave te paraîtra beau, même s'il est estropié (106).

287. LE MÊME. - L'homme qui a eu le malheur d'épouser une femme laide, le soir quand il a allumé sa lampe, ne voit que des ténèbres (107).

288. LE MÊME. - Un barbier, un cordonnier en vinrent aux prises, et bientôt l'alène triompha du rasoir.

289. LE MÊME. - O comme la mort est rapide ! Un usurier qui supputait ses bénéfices est mort tout à coup et si vite que ses doigts étaient encore pliés pour ses calculs d'intérêts.

290. LE MÊME. - Un usurier dont les doigts étaient occupés à des comptes d'intérêts, avant de les finir, a reçu son compte : la mort l'a enlevé. Les comptes qu'aimait tant ce compteur ne sont point annulés ; il compte maintenant parmi les morts.

291. LE MÊME. - Quel avantage le public a-t-il retiré de tes vers ? Tu reçois de l'argent en échange de tes calomnies, et tu vends tes iambes comme un marchand vend du vinaigre.

292. LE MÊME. Sur un philosophe devenu magistrat. - Au char aérien qui t'emportait dans les cieux, tu as préféré le char d'argent des édiles. Quelle décadence ! naguère tu valais mieux ; maintenant ta condition est de beaucoup moins bonne. Remonte ici dans ton humble sphère ; car aujourd'hui, en t'élevant, tu es bien descendu.

293. LE MÊME. - Olympius, qui m'avait promis un cheval, m'a amené une queue à laquelle pend une rosse défaillante.

294. LUCILLE. - Tu as la bourse d'un richard et l'âme d'un gueux, ô toi qui es riche pour tes héritiers et pauvre pour toi-même.

295. LE MÊME. Au sujet d'un envoi de mauvais vin. -Si vous avez encore dans votre palais quelque Bacchus de ce genre, ôtez-lui son lierre et couronnez-le de laitue (108).

296. TIMON. Sur Cléanthe. - Quel est ce bélier (109) qui parcourt les rangs ? C'est le lourd citoyen d'Assos, diseur de vaines paroles, mortier sans pilon.

297. ANONYME. Sur une femme ,qui aimait le vin. - Comment, ô mère, aimes-tu le vin plus que moi, bon fils ? Donne-moi à boire de ce vin ; car jusqu'à présent tu ne m'as donné que du lait. - O mon fils, mon lait jusqu'à présent a calmé ta soif ; maintenant bois de l'eau, et que ta soif s'apaise.

298. ANONYME. Même sujet (110) - Vois comme, ayant soif, l'enfant tend sa main vers sa mère ; et sa mère, ainsi que toute femme que domine la passion du vin, buvant à même la bouteille, lui dit en le regardant de côté : "Que te donnerai-je du cette liqueur ? il en reste à peine, ô mon fils ; car le vase ne contient que trente setiers ...."
O mère, que dominent les durs sentiments d'une marâtre, laisse-moi recueillir ces douces larmes de la vigne ....
0 mère dont le coeur est sans pitié, mère dénaturée, si tu aimes ton fils, laisse-lui boire quelques gouttes.

299. PALLADAS. - Tu m'injuries ; qu'y a-t-il là qui m'étonne ou m'afflige ? Je te supporte : car ton insolence sera ton châtiment.

300. LE MÊME. - Tu parles beaucoup, ô homme, et bientôt tu seras mis en terre. Tais-toi, et pendant que tu vis encore, médite ta fin dernière.

301. LE MÊME. - Le soleil est pour nous le dieu de la lumière ; mais si, lui aussi, insultait en brillant, je me soucierais peu de son éclat.

302. LE MÊME. - Ce n'est pas moi que vous méprisez, c'est ma pauvreté. Si Jupiter lui-même venait comme un pauvre sur la terre, le mépris ne l'épargnerait pas.

303. LE MÊME. - Si je suis pauvre, qu'y puis-je ? Pourquoi me haïssez-vous, moi qui ne vous fais aucun mal ? Ma pauvreté est la faute de la Fortune, non celle de ma conduite.

304. LE MÊME. - Tous les hommes sont lâches, vantards et sujets à bien d'autres défauts ; mais celui qui a de la raison ne se laisse pas pénétrer, et cache au dedans ses défauts avec adresse. Pour toi, tu laisses la porte de ton âme toute grande ouverte, et tu ne caches à personne ni ta pusillanimité ni ton insolence.

305. LE MÊME. - Fils ignorant de l'impudence et de la sottise, dis-nous, ne sachant rien, d'où te vient tant d'orgueil?  Parle-t-on de grammaire, tu es platonicien ; s'agit-il de Platon et de sa doctrine, de nouveau te voilà grammairien ; tu passes de la grammaire à la philosophie, mais tu ne connais ni la grammaire ni le platonisme.

306. LE MÊME. - Si tu vas toujours d'Alexandrie à Antioche et de Syrie en Italie, tu ne feras jamais un riche mariage ; et cependant c'est dans cet espoir que tu voltiges ainsi de ville en ville (111). 

307. LE MÊME. - Tu as pour fils un Amour, pour femme une Vénus. Il est tout simple, forgeron, que tu aies le pied boiteux.

308. LUCILLIUS. - Une épine perça le pied du fluet Cléonice, et lui-même avec son pied perça l'épine (112).

309. LE MÊME. - Thrasymaque, des filous t'ont dépouillé de toute ta fortune, et te voilà devenu tout à coup pauvre et misérable, toi qui économisais, prêtais, supputais les intérêts des intérêts, buvant de l'eau, souvent ne mangeant rien pour avoir davantage. Mais si tu compares ce que tu mangeais autrefois avec ce que tu mangeras à l'avenir, tu verras que tu n'as rien perdu de ce que tu croyais avoir.

310. LE MÊME. - Tu as acheté des cheveux, du fard, du miel, de la cire, des dents ; pour le même prix tu aurais pu acheter un visage.

311. LE MÊME. - Panténète est d'une telle paresse qu'ayant la fièvre, il demandait à tous les dieux de le laisser toujours au lit, et maintenant, malgré lui, le voilà levé; mais en lui-même il accuse les dieux d'avoir été sourds à ses prières.

312. LE MÊME. - Passant, Marcus le poète a construit ce tombeau qui ne renferme encore aucun mort, et ayant composé ce vers unique, il l'a fait graver ici : "Pleurez Maxime d'Éphèse âgé de douze ans." Je n'ai jamais connu de Maxime ; mais pour montrer le talent du poète j'invite tout le monde à pleurer.

313. LE MÊME. - Invité à un grand repas, j'y mourais de faim en face de magnifiques plats d'argent presque vides. Dans la mauvaise humeur que me donna une diète aussi splendide, je m'écriai : "Oh ! que j'aimerais l'abondance dans des écuelles de terre !"

314. LE MÊME. Sur le même sujet. - Je cherchais d'où pouvait venir ce nom de plats, et c'est à ta table que j'en ai trouvé l'étymologie. Tu m'as, en effet, servi de grands plats, mais qui m'ont laissé une grande faim (113), des plats qui étaient les emblèmes de la famine et de la disette.

315. LE MÊME. - Antiochus vit un jour le coussin (114) de Lysimaque, et Lysimaque ne revit plus son coussin. 

316 ANONYME. - Un jour l'athlète filon se présenta seul pour la lutte aux jeux sacrés. Le président des jeux l'appela aussitôt pour le couronner ; mais en s'avançant, il fit un faux pas et roula par terre. L'assemblée de s'écrier qu'il ne fallait pas donner la couronne à un athlète qui, même sans adversaire, tombait aussi ; mais s'étant relevé, Milon, au milieu de la foule, repartit d'une voix éclatante : "Je n'ai pas fait trois chutes (115), mais une seule ; donc, pour les deux autres, que quelqu'un se présente et me terrasse."

311. PALLADAS. - On m'a donné un âne boiteux, d'une lenteur obstinée et telle que les bagages qu'il porte sont comme dans une station, vrai fils de la paresse, fatigué, fatigant, qui dort et rêve, mais en tête et le premier quand on fait volte-face.

318. PHILODÉME. - Anticrate connaît les sphères célestes beaucoup mieux qu'Aratus, mais il ignore sous quelle constellation il est né. Il dit, en effet, qu'il hésite entre le bélier, les gémeaux et les poissons. Or il se trouve clairement qu'il est né soue l'influence de ces trois constellations, et la preuve c'est qu'il est lascif et stupide, flasque et mou (116), et friand de marée.

319. AUTOMÉDON. - Apporte dix mesures de charbon, et tu seras citoyen ; si tu ajoutes un cochon tu seras Triptolème en personne. Il faut de plus donner à l'avocat Héraclide, pour ses honoraires, des lentilles, des choux ou des coquilles. Fais tout cela, et proclame-toi Érechthée, Cécrops ou Codrus, à ton choix. Personne ne s'en formalisera (117).

320. ARGENTARIUS. - Philostrate aimait Antigone, mais le malheureux était de beaucoup plus pauvre qu'Irus. Il trouva cependant par le froid un soulagement à sa passion : ayant plié ses genoux (118), il posa sur eux sa tête, et s'endormit avec Antigone.

321. PHILIPPE. - Grammairiens qu'enfanta l'enfer railleur, qui broyez les livres comme des Cyclopes ou les rongez comme des vers, meute de Zénodote, satellites de Callimaque, qui, après vous être servis de lui comme d'une autorité, ne l'épargnez pas et le déchirez, vous qui courez après les parties du discours, qui raffolez du sphin et du min, qui recherchez si Polyphème avait des chiens, passez toute votre vie à criailler contre les autres, et qu'il ne vous reste plus de venin à jeter sur mes ouvrages.

322. ANTIPHANE. - Minutieuse engeance des grammairiens, vous qui plutôt que de cueillir les fleurs dévorez les racines, qui, comme des mites imbéciles, grimpez après les épines, qui dépréciez les grandes oeuvres et vous extasiez sur Èrinne, chiens maigres et hargneux de Callimaque, détestables aboyeurs, vous qui soulevez des nuages de poussière dans les écoles de l'enfance, vils insectes acharnés après les beaux vers, allez au diable.

323. PALLADAS. - Entre kolax et korax (le flatteur et le corbeau), il n'y a que la différence d'une lettre. Ainsi le corbeau et le flatteur parasite, c'est tout un. Donc, ami, garde-toi de la bête, sachant que les flatteurs sont les corbeaux des vivants.

324. AUTOMÉDON. - Accepte. Apollon, le repas que je t'offre. - Bien volontiers, si on me le permet. - Et qui pourrait t'en empêcher, fils de Latone ? - Personne, hormis Arrius. Il a en, effet la main plus rapace que la serre d'un milan. C'est le néocore (119) de cet autel qu'il laisse sans victime, car s'il y accomplit quelque sacrifice, il s'empare de tout et s'en va. Que d'actions de grâces je dois à l'ambroisie de Jupiter ! Je serais mort depuis longtemps comme l'un de vous, si un dieu pouvait mourir de faim. 

325. LE MÊME. - Hier j'ai soupé d'un pied de bouc et de tiges de choux semblables à de l'étoupe, jaunies par dix jours de garde. Dieu me préserve de dire le nom de mon hôte ! car il est d'humeur vindicative, et ma crainte est grande qu'il ne m'invite de nouveau.

326. LE MÊME. - La barbe, des cuisses velues et les années changeront tes attraits et tes goûts. Connichus, tu en es là. Ne te le disais-je pas ? Ne sois pas trop sévère, ne sois pas trop facile. La beauté a aussi sa Némésis. Te voilà à l'étable [comme un bouc], toi naguère si superbe. Maintenant nous savons ce que tu désires ; mais il fallait autrefois te montrer raisonnable. 

327. ANTIPATER. - Fi, fi de Lycaenis aux flancs décharnés, ses fesses plus maigres que celles d'un cerf. C'est la honte de Vénus ! Un chevrier ivre ne voudrait pas, dit-on coucher avec elle. Fi, fi (120) ! Voilà comme sont les femmes des Sidoniens.

328. NICARQUE. - (121) Quondam ego, Hermogenes et Cleobulus, ad Veneris lusus una communiter utebamur Aristodice. Sortitus eram illius canum (122) mare habitare ; nempe unus habebat unum quid, non omnibus omnia erant. In Hermogenem cesserat dominium sedis tenebrosae, male olentis, ubi desaeviunt venti. Cleobulus, novus Jupiter, in caelum (123) ejusdem ascenderat, vibrans telum igneum. Terra autem communis erat omnium, in qua, extenso stragulo, sic vetula nobis erat tripartita.

329. LE MÊME. - Demonax, ne semper infera spectes, et a lingua temperato : erinaceus spinas habet. Deest hic aliquid, ubi commode recensebantur melioris vitae, additque poeta : Et tu nobis suaviter vivis, in ulnis Phoenices obdormis, et ceu Bacchum alterum mêros vel muchos te nutrit et delectat.

330. LE MÊME. - Invité pour hier à dîner, je n'ai pu arriver qu'aujourd'hui, Démétrius. Ne m'en veux pas, tu as un si haut escalier ! Pour le monter j'ai mis bien du temps, et je n'en serais pas venu à bout, si je ne m'étais accroché à la queue d'un âne. Tu touches aux astres. Lorsque Jupiter eut enlevé Ganymède, c'est ici sans doute qu'il le déposa. Mais comment d'ici pourras-tu descendre aux enfers ? Tu as eu une bonne idée, tu as trouvé le moyen d'être immortel.

331. LE MÊME. - Philon avait une barque : le Sauveur ; mais dans cette barque Jupiter lui-même n'aurait pu se sauver, car elle n'avait de sauveur que le nom, et ceux qui la montaient ou naviguaient sans quitter la côte ou naviguaient chez Pluton.

332. LE MÊME. - Ce n'est pas pour traverser la mer, c'est pour travailler à la pompe qu'Eicandre nous a sans doute pris à bord de son navire à vingt rames. Déjà une quantité d'eau, qui n'est pas petite, remplit l'intérieur, ou plutôt Neptune lui-même paraît s'être embarqué pour passer à la rive opposée. Navire, c'est pour la première fois qu'on a vu un navire hydropique ; mais je crains bien que tu ne voies un navire à vingt rames (eikosoros) transformé en cercueil (soros) (124).

333. CALLICTER. - Avec des drogues, Rhodon enlève la lèpre et les écrouelles ; mais, tout le reste, il l'enlève même sans drogues.

334. ANONYME. Sur un médecin. - Quelqu'un ayant entendu dire que Damagoras et la peste avaient la même valeur numérale, examina les caractères de l'un et de l'autre, et les pesa comme dans une balance. Damagoras l'emporta de beaucoup ; son poids fit abaisser le plateau, et la peste se trouva plus légère.

335. ANONYME. - Infortuné Cynégire, et pendant ta vie et après ta mort, tu as été mis en morceaux à coups de haches et à coups de langues. Jadis ta main vaillante est tombée sur un champ de bataille, et maintenant dans une école on te retranche encore un pied (125).

336. ANONYME. - Chargé des dépouilles de l'Asie, Carin (126) mit à la voile un jour l'hiver, après le coucher des Chevreaux. Ces dépouilles n'échappèrent point aux regards d'Adrastée ; mais Carin poursuivit sa route, s'inquiétant peu d'être aperçu d'elle, et se moquant insolemment des divinités de la mer.

337. ANONYME. - Te voilà sénateur (bouleutês), Agathinus ! dis-moi combien tu as acheté ce B ? car auparavant il y avait un D (douleutês, esclave).

338. ANONYME. -  (127) Homère t'a appris à dire enopê pour la voix ; mais qui t'a appris à avoir la langue en opêi

339. ANONYME. - Tuum caput tuosque nates agitas, hinc ut in ditione dei, illinc ut in ditione viri.

340. PALLADAS. - J'ai juré mille fois de ne plus faire d'épigrammes : elles m'ont valu la haine d'une quantité de sots. Mais quand je vois la figure du Paphlagonien Pantagathe, malgré moi ma manie me reprend avec une nouvelle verve.

341. LE MÊME. - La louange est une excellente chose ; elle est un principe d'amitié, comme la critique est une cause de haine (128). Et cependant critiquer et médire ; c'est bon comme du miel attique.

342. ANONYME. - Tu me montres le goître (129) d'un goitreux qu'on ne voit pas ; ne me montre pas le goitre, c'est l'homme que je veux (130) voir.

343. ANONYME. - Silvanus a deux favoris, le vin et le sommeil ; il n'aime plus les Muses, il n'aime plus ses amis. L'un, quand il se lève, le charme et l'enivre ; l'autre, quand il se couche, le captive et le fait ronfler.

344. ANONYME. Sur Métrodote, de la faction des bleus. - Métrodote, le constant ennemi de la faction des verts, a cette table verte en souvenir de sa haine.

345. ANONYME. Fragment. - Divine cigogne, modèle des mères, à l'aspect du cygne, mais au rude duvet, de çà et de là agitant une tête qui ressemble à celle des grues, tu étends au dessus de ton aire, comme un long manteau, tes ailes ....

346. AUTOMÉDON. - Jusqu'à quand , ô Polycarpe, parasite d'une caisse épuisée, te serviras-tu impunément des fonds d'autrui ? Je ne te vois plus aussi souvent sur la place publique ; mais déjà tu t'esquives, tu cherches où tu pourras porter tes pas. A chacun tu dis : "Apportez votre compte demain ; venez et vous serez payé." Mais tu as beau jurer, on ne te croit plus. De Cyzique (131) le vent te portera chez les Samothraces (132). C'est là que doit s'écouler le reste de ta vie.

347. PHILIPPE. - Loin de moi, vous dont l'oeil s'égare sans cesse dans les profondeurs du ciel ; vous aussi, disciples d'Aristarque, qui vous attachez comme des mites aux questions épineuses( !Et qu'ai-je besoin de rechercher quelle route parcourt le soleil, de qui était fils Protée et ce qu'était Pygmalion ? Je ne désire connaître que ce qui est facile et clair ; mais que les Callimaques renforcés se consument dans des recherches ténébreuses.

348. ANTIPHANE. - O la plus farouche des bêtes, homme, tu es un objet et de haine universelle ; tu portes partout le ravage, mais partout aussi la mort te menace. Si tu te sauves à terre, voici le loup ; si tu montes sur la cime d'un arbre, crains l'aspic qui se tient sur les branches. Traverses-tu même le Nil, il nourrit dans ses gouffres le crocodile, ministre de la justice divine contre les impies.

349. PALLADAS. - D'où te vient, dis-nous, la prétention du mesurer le ciel et la terre, toi dont un peu de terre a formé le petit corps ? Connais-toi d'abord, mesure-toi, et ensuite tu mesureras la terre immense. Mais si tu ne peux calculer les petites parcelle de boue de ton corps, comment peux-tu calculer et connaître le monde qui est sans limite ?

350. AGATHIAS. Sur un avocat sans conscience. - Insensé, comment as-tu pu oublier la balance de la justice ? Ne sais-tu pas que ses sentences ne peuvent manquer d'atteindre les coupables ? Tu te fies à ton éloquence insidieuse, à cet art de pallier les faits, de colorer les paroles. Il est possible que tu fasses quelque illusion (133), soit ; mais tous les jeux de ta vaine imagination ne sauraient changer les arrêts de Thémis.

351. PALLADAS. - Hier j'ai loué ma boutique à un marchand de tisane, et aujourd'hui j'y trouve un athlète terrible. Comme je lui demandais poétiquement : "Qui es-tu ? d'où es-tu venu dans notre maison (134)  ? " il leva sur moi ses bras de lutteur. Je m'esquivai aussitôt, craignant cet homme farouche qui ne distribuait plus de la tisane, mais des coups de poing (135). "Par Pollux le lutteur, lui dis-je, par Castor, par Jupiter suppliant, je t'en conjure, ami, trêve à cette grêle de horions, car il m'est impossible de faire ainsi du pugilat aux calendes de chaque mois (136)."

352. AGATHIAS. - A l'habile joueur de cithare, au musicien Androtion, quelqu'un adressa cette question de musique instrumentale : "Lorsque, avec le plectrum, on fait vibrer à droite la plus basse corde, à gauche la plus élevée se met d'elle-même à vibrer, donnant un léger son aigu ; elle éprouve le contre-coup des vibrations de la corde frappée. Je m'étonne que la nature ait placé tant de sympathies dans des cordes inanimées, tendues sur une lyre." Androtion jura qu'Aristoxène, qui est si célèbre comme musicien, n'a pas connu ce phénomène. "En voici, dit-il l'explication : toutes les cordes sont fabriquées avec les intestins desséchés d'une brebis. Par là, elles sont soeurs, et comme étant de la même famille, elles parlent un langage commun. Elles sont toutes, en effet, germaines. Étant issues du même sein, à chacune d'elles est échue en héritage une communauté de sons. Et, en effet, lorsque l'oeil droit est malade, n'arrive-t-il pas souvent qu'il communique à l'oeil gauche son propre mal ?"

353. PALLADAS. - La fille d'Hermolycus s'est unie à un singe de la grande espèce, et a mis au monde une quantité d'Hermosinges. Si Jupiter, sous la forme d'un cygne, a eu de Léda Hélène, Castor et Pollux, c'est un corbeau assurément qui a couché avec Hermione ; car la malheureuse n'a donné le jour qu'à un affreux troupeau d'Hermomonstres.

354. AGATHIAS. - A Nicostrate, subtil interprète d'une philosophie transcendante, nouvel Aristote, autre Platon, on fit un jour ces questions sur l'âme : "Faut-il croire l'âme mortelle ou immortelle?  Est-elle incorporelle ou a-t-elle un corps ? Doit-on la classer parmi les objets sensibles ou insensibles, ou bien est-elle à la fois esprit et matière ?" Aussitôt il se mit à feuilleter dans Aristote le Livre des météores et le Traité sur l'âme, consulta le sublime Platon dans le Phédon, en médita la sagesse et la vérité ; puis, s'enveloppant de son manteau et caressant le bout de sa barbe, il fit entendre cet oracle : "Si l'essence de l'âme est absolument immortelle ou mortelle, matérielle ou immatérielle, je ne le sais pas bien ; mais lorsque vous aurez passé l'Achéron, vous connaîtrez alors la vérité aussi bien que Platon la connaît. Ou, si vous l'aimez mieux, imitez le jeune Cléombrote d'Ambracie, et précipitez-vous du haut d'un toit, et alors vous vous connaîtrez vous-même , étant séparé de votre corps, et n'ayant plus que ce qui fait l'objet de vos questions."

355. PALLADAS. - Je sais tout, dis-tu ; mais en toutes choses tu es imparfait ; tu as goûté à tout, mais tu ne t'es rien approprié.

356. ANONYME. - Le véridique Homère a menti à ton égard, quand il a dit que l'esprit des jeunes gens est vain et léger (137). 

357. PALLADAS. - Un père et un fils ont fait entre eux une gageure : le gagnant sera celui qui, par plus de dépense, aura mangé tout son avoir. Ils ont ainsi dévoré tous leurs profits de grammairiens, et il ne leur reste plus qu'à se manger l'un l'autre.

358. ANONYME. - Rufinianus, c'est le Rufus de deux syllabes : en même temps que croissaient ses iniquités, il a allongé son nom, mais il n'échappe pas à Dicé (138) de deux syllabes, et en effet il sera appelé de nouveau en deux syllabes Rufus le fourbe, le coquin, comme devant (139).

359. ANONYME. - O toi dont le pouvoir est au-dessus de tout, sauve-moi de toute inimitié. Tu veux bien écouter un malheureux, et moi j'ai résolu de parler. Cette volonté produit une double grâce, elle donne au discours une double beauté : à celui qui parle, elle prête comme un ornement de plus ; elle ajoute à la dignité de celui qui écoute. Tu es un flambeau d'éloquence et d'équité, jugeant d'après les lois, éblouissant par la parole (140) ....
J'ai vu un chat bourré d'or, une sangsue cruelle, un phallus doré (141).

360. ANONYME. - J'ai connu Princeps, un chat rapace, une sangsue du Trésor, un infâme libertin (142) enrichi par ses vols. Maintenant le voilà préteur en Égypte sous le nom de Hermanubis (143), justifiant son nom par son impudence, par ses aboiements, par ses acolytes, deux Mercures voleurs de bas étage, échappés de la potence, vrais démons du Tartare, desséchés et difformes (144).

361. AUTOMÉDON. - De vieilles mules traînent mon char, en tout semblables aux Prières d'Homère (145), boiteuses, ridées, louches, victimes dignes du boiteux Vulcain, ombres de bêtes n'ayant que la peau, qui jamais n'ont goûté, même en songe, ni l'orge de l'été ni l'herbe du printemps. Ainsi, pour moi, puissiez-vous vivre l'âge de la corneille ou du cerf, vous nourrissant de l'air à bon marché !

362. CALLIMAQUE. - Heureux l'Argien (146) Oreste, de ce que, fou de tant de manières, il n'eut pas du moins la folie d'exiger la perfection dans l'amitié et de la vouloir à toute épreuve (147) ! Il n'a point exigé du Phocéen Pylade une autre preuve d'attachement que celle qu'il lui donna, et il ne lui a pas demandé le sujet d'une autre tragédie.  Peut- être en le faisant eût-il perdu son compagnon, son ami ; c'est ainsi que moi je n'ai plus les nombreux Pylades que j'avais autrefois.

363. DIOSCORIDE. - Il n'est plus , pour les habitants d'Alexandrie, de véritables honneurs, puisque le fils de Ptolémée, Moschus, vient d'être couronné parmi les jeunes garçons dans la course du flambeau. - Le fils de Ptolémée ? Moschus ? pauvre ville ! On a donc oublié les turpitudes de sa mère et ses prostitutions ; on a donc oublié les bouges, théâtres de ses débauches. Courage courtisanes déhontées !  mettez au jour des enfants, multipliez-en le nombre; la couronne décernée à Moschus vous
en fait un devoir. 

364. BIANOR. - Ce pauvre homme, ce mercenaire qui ne possède rien, il n'a que son âme, voyez-vous, et encore elle ne lui appartient pas.

365. AGATHIAS. - Le paysan Calligène, après avoir ensemencé sa terre, vint dans la maison de l'astrologue Aristophane et lui demanda : "Ferai-je une bonne moisson ? recueillerai-le des épis en grande abondance ?" Celui-ci, ayant pris des jetons, les disposa sur sa table, puis il supputa sur ses doigts et dit à Calligène : "Si ton champ est suffisamment arrosé par la pluie, s'il ne produit pas des touffes de mauvaises herbes, si la gelée ne brise pas tes sillons, si la grêle ne déchire pas la pointe des gerbes naissantes, si le gibier ne dévaste pas tes guérets, enfin si la récolte n'éprouve aucun autre dommage soit de l'air, soit de la terre, je te le prédis , la moisson sera bonne, et tu couperas des épis magnifiques. Seulement, crains les sauterelles."  

366. MACÉDONIUS. - Un avare qui maniait des monceaux d'or en songe , eût volontiers dormi de l'éternel sommeil pour conserver son opulence ; mais lorsqu'il vit à son réveil qu'il était pauvre comme avant, il se rendormit, espérant retrouver les nocturnes trésors de son rêve.

367. JULIEN. - Tu ressembles exactement à une autruche ; assurément Circé t'a fait boire de sa ciguë et t'a changé en oiseau.

368. LE MÊME. - C'est une moisson épaisse qui obscurcit ton visage. Aussi est-ce avec la faux, non avec des ciseaux, qu'il faut la couper.

369. LE MÊME. - Par prudence demeure à la ville, de peur que tu ne sois attaqué à coups de bec par quelque grue avide du sang des Pygmées.

370. MACÉDONIUS. - Le miroir ne parle pas ; mais moi, je te reprocherai ta beauté d'emprunt (148) tout enduite de fard. Pindare lui-même, sur sa douce lyre, te blâme quand (149)il vante l'excellence de l'eau, ariston men hudôr (150), l'implacable ennemi du fard.

371. PALLADAS. - Si tu n'as à me servir qu'un ragoût de citrouille, ne m'invite pas à titre d'expert pour admirer tes plats faméliques. Nous ne mangeons pas de cette vaisselle plate que tu exposes, trompant notre faim avec des écuelles vides. Invite des jeûneurs à cet économique étalage, et alors sois admiré pour la beauté de ton argenterie, où il n'y a rien à manger.

372. AGATHIAS. - Ton corps n'étant qu'une ombre et ressemblant à un souffle invisible, ne te hasarde pas à t'approcher de moi, de peur que, dans une aspiration, je ne t'entraine dans mon nez, vu que tu es beaucoup moins pesant que l'air dont nous vivons. Tu ne crains pas la mort, [c'est tout simple] ; car alors ayant changé de néant, tu seras également fantôme, ce que tu es.

373. PALLADAS. Sur un poète joueur. - Calliope est la déesse de tous les poètes ; mais ta Calliope, à toi, s'appelle Tabliope (151).

374. MACÉDONIUS. - Ne cesse pas avec le fard de combler les rides de tes joues amaigries, ô Laodice (152), que dédaignent à leur tour d'anciens adorateurs. N'ouvre plus tes lèvres ; car par quel artifice réparer les brèches de tes dents ? Tout le charme que tu avais s'est évanoui. La beauté ne coule pas d'une source intarissable. Comme la rose tu fleurissais au printemps, et maintenant tu t'es flétrie, desséchée au souffle brûlant de la vieillesse.

375. MACÉDONIUS. - J'avais éternué près d'un tombeau, et j'aurais bien voulu apprendre, comme je m'y attendais, le trépas de ma femme ; mais les vents emportèrent mon éternuement : il n'advint à ma femme rien de ce qui est ici-bas un malheur, ni maladie, ni mort.

376. AGATHIAS. - Un pauvre homme alla trouver le rhéteur Diodore, et le consulta sur ce point de droit : Une esclave qui m'appartenait s'est enfuie autrefois. Quelqu'un l'ayant trouvée et sachant qu'elle avait un maître, l'a unie à un de ses esclaves ; elle a eu des enfants. A qui est-il plus juste que ces enfants appartiennent comme esclaves ? "Diodore se mit à réfléchir, feuilleta bien des livres, et dit d'un air grave, en fronçant le sourcil : "Il faut nécessairement que les enfants au sujet desquels tu me consultes, aient pour maître ou toi-même ou celui qui a pris ton esclave. Cherche un juge intelligent, (153), et tu auras bien vite la meilleure décision, s'il prononce avec équité."

377. PALLADAS. - Invité à un banquet où nous n'avions à manger qu'un pauvre petit oiseau, j'y devins presque la proie d'autres oiseaux voraces. Titye aux enfers n'est dévoré que par deux vautours ; mais moi, quatre vautours voulaient me manger tout vivant (154).

378. LE MÊME. - Je ne puis supporter ma femme et la grammaire, la grammaire qui ne m'enrichit pas, ma femme qui me persécute. Cette double calamité , c'est la mort, c'est l'enfer. Enfin je viens à grand' peine de me débarrasser de la grammaire ; mais je ne puis me débarrasser de ma femme Andromaque : mon contrat de mariage et la loi romaine s'y opposent.

379. AGATHIAS. - Quiconque a vu tes dents qui broient tout n'ose plus approcher de ta demeure ; car si tu as toujours une faim d'Erysichthon, certainement tu finiras par dévorer même l'ami que tu as invité. Pour moi, je ne serai pas ton hôte, ne voulant pas avoir ton estomac pour prison. Que si jamais je vais chez toi, ce sera un acte de courage plus grand que celui d'Ulysse allant au-devant des gueules de Scylla. Oui, je serai plus que lui digne de l'épithète de polutlas (155), si je t'échappe, à toi qui n'es pas moins à craindre que le cyclope Polyphème.

380. MACEDONIUS. - L'auguste vierge, Dicé (156), la protectrice des États , ne repousse pas l'or, quand il est offert par des mains honnêtes. Les balances mêmes de Jupiter sont en or, ces balances dans lesquelles il pèse les destinées des mortels, "et alors le père des dieux lève en l'air ses balances d'or (157)".  J'espère que tu n'as pas oublié les beaux vers d Homère.

381. PALLADAS. - Toute femme n'est que fiel et colère, et n'a que deux bonnes heures dans toute sa vie, l'heure de ses noces et celle de sa mort (158).

382. AGATHIAS. - Alcimène était tourmenté par la fièvre ; sa voix était rauque et enrouée ; son poumon était comme déchiré par des épées, et un asthme gênait sa respiration. Arrive alors Callignote de Cos, médecin sentencieux, tout rempli de la science d'Esculape, habile à tirer des symptômes un pronostic, et ne prédisant rien de plus que ce qui doit arriver. Il examine comment Alcimène est couché, discute sur son visage, lui tâte doctoralement le pouls, et consulte le traité sur les jours de crise que, nouvel Hippocrate, il rumine en lui-même. Alors d'un air important et boursouflé il prononce son pronostic sur Alcimène : "Si ta gorge cesse d'être bruyante, si tes poumons ne souffrent plus, si la fièvre ne gêne plus ta respiration, tu ne mourras pas encore de pleurésie : car tout cela nous présage une guérison prochaine. Prends courage ; toutefois fais venir un notaire, dispose sagement de tes biens, cesse de mener désormais une vie inquiète ; et moi, ton médecin, pour prix de cette bonne ordonnance, mets-moi pour un tiers sur ton testament."

383. PALLADAS. - Pour les ânes aussi la fortune est bonne ou mauvaise, et l'astre de Saturne préside aussi à leur naissance. Les temps difficiles sont arrivés pour ce baudet, et voilà que du service d'un fermier des douanes il passe chez un grammairien. Du courage et de la résignation, pauvre animal ! car chez les grammairiens, on raccourcit les mots, kri pour krithê (orge), et aussi les rations.

384. PALLADAS. - Si ce sont des moines, pourquoi y en at-il tant ? et s'il y en a tant, comment sont-ils des solitaires ? O multitude de solitaires qui fait de la solitude un mensonge !

385. LE MÊME. - Tu as un amour factice ; tu aimes par crainte et par nécessité. Comment veux-tu qu'on se fie à un tel amour ? Il n'y en a pas de moins sûr.

386. LE MÊME. - Hier, quelqu'un ayant vu par la ville la Victoire avec un front soucieux : "Déesse Victoire lui dit-il, que t'est-il arrivé ? "Et elle, en pleurant, se plaignait d'un jugement inique (159) : "Es-tu donc le seul qui l'ignore ? On m'a donnée à Patricius." Certes ce n'est pas sans raison que la Victoire était toute en larmes, elle que Patricius avait prise, ayant tendu sa voile en pilote habile au souffle populaire.

387. LE MÊME. - Chacun fait un repas par jour ; mais quand Salaminus nous traite, revenus chez nous, nous faisons un second dîner.

388. LUCILLE. - Tant que tu seras garçon, Numénius, la vie te paraîtra de tous les biens le bien suprême ; puis, lorsque l'épouse aura franchi le seuil de ta maison, au rebours et tout de suite la vie te semblera de tous les maux le pire. Mais les enfants ! tu les aimeras (160) Numénius, si tu as des écus ; le pauvre n'aime pas même ses enfants.

389. LE MÊME. - Si tu devais vivre aussi longtemps que le cerf et la corneille, je t'excuserais d'amasser tant de richesses ; mais si tu es un de ces mortels que la vieillesse atteint si vite, ne te laisse pas aller à l'insatiable passion de l'or. Autrement, tu consumeras ta vie dans d'intolérables chagrins, et d'autres jouiront de tes biens sans s'être donné la moindre peine.

390. LE MÊME. - Si tu m'aimes, aime-moi réellement et ne me cause pas de peine, faisant de l'amitié une occasion d'offense et de dommage. Oui, je l'affirme, pour tout le monde une haine avouée est de beaucoup préférable à une amitié trompeuse. On dit que pour les vaisseaux aussi errant sur les mers les écueils à découvert sont bien moins funestes que les roches cachées sous les flots.

391. LE MÊME. - Asclépiade l'avare vit une souris dans sa maison. "Ma chère, dit-il, que fais-tu là chez moi ? - Ami, répondit la souris, ne crains rien ; nous ne cherchons pas chez toi de la nourriture, mais un trou."

392. LE MÊME. - Assis sur le dos d'une fourmi ailée, Adraste le rhéteur s'écria en termes pompeux : "Envole-toi, Pégase, tu portes Bellérophon, le plus grand des héros." Pauvre ombre à peine vivante ! 

393. LE MÊME. - Il n'y a pas de poids plus lourd qu'une fille. S'il te semble, Euctémon, que ce soit un poids léger, écoute-moi. Tu as une bosse (161), moi une fille, eh bien ! prends ma fille unique, et donne-moi cent bosses en échange.

394. ANONYME. - Le poète par excellence est assurément celui qui donne à dîner à son auditoire. Mais s'il fait une lecture et qu'il renvoie à jeun ceux qui l'ont écouté, puisse sa propre manie se tourner contre lui-même [et lui faire oublier le manger et le boire] !

395. NICARQUE. - Le pet qui ne trouve pas d'issue, tue souvent ; souvent aussi il sauve, en lançant sa mélodie saccadée.  Donc si le pet sauve et tue, le pet a une puissance égale aux rois.

396. LUCILLE. - Souvent tu m'as envoyé du vin, et jusqu'ici je t'en ai remercié en disant que ton nectar faisait mes délices ; mais à présent, si tu m'aimes, ne m'en envoie plus. Qu'en ferais-je ? je n'ai plus de laitues (162).

397. LE MÊME. - Artémidore, qui compte les écus par millions et qui ne dépense rien, vit comme les mulets ; souvent ils portent sur leur dos des sacoches pleines d'or, et ils ne mangent que de l'herbe.

398. NICIAS. - En se teignant la tête, un ci-devant jeune homme perdit tous ses cheveux, et son front, de garni qu'il était, devint pelé comme un oeuf. Tout le bénéfice de la teinture fut qu'il n'eut plus à teindre ni cheveux blancs ni cheveux noirs.

399. APOLLINAIRE. - Un grammairien qui était monté sur un âne fut jeté à bas de sa monture, et de sa mémoire, dit la légende, il laissa choir la grammaire. Par la suite il vécut de la vie commune, comme un ignorant, ne sachant plus rien de ce qu'il avait enseigné. Mais à Glycon, il est arrivé tout le contraire. Lui, en effet, qui ne savait pas un mot de grammaire, que dis-je ? qui ne parlait pas même la langue du peuple, qui monte aujourd'hui des ânes de Libye et qui souvent en tombe, il est devenu tout à coup un grammairien.

400. LUCIEN. - Sois-moi propice, vivifiante grammaire, sois-moi propice, toi qui as trouvé un remède contre la faim dans le "Muse, chante la colère (163)." On devrait bien te bâtir un temple magnifique, et tes autels ne devraient jamais manquer d'offrandes et d'encens. Car tout est plein de toi (164), et les places publiques et la mer et ses ports, ô grammaire qui nous abrites et nous nourris tous.

401. LE MÊME. - Un médecin m'avait envoyé son fils pour qu'il apprit chez moi les belles-lettres. Dès qu'il sut "Muse, chante la colère" et "causa mille maux," et le troisième vers qui vient après "précipita chez Pluton beaucoup d'âmes vaillantes, " il cessa d'envoyer son fils à mes leçons. Le père m'ayant rencontré : "Je te rends grâce, cher maître, me dit-il, mais mon fils peut apprendre tout cela avec moi ; en effet, je précipite bien des âmes chez Pluton, et pour cette besogne, je n'ai nullement besoin d'un grammairien."

402. LE MÊME. - Que jamais les dieux, Érasistrate, ne me fassent vivre de la vie de luxe et de bombance où tu te cousumes. Tu regorges de mets, fléaux des entrailles et pires que la faim même, de mets dont je souhaiterais que mes ennemis se nourrissent. Pour moi, j'aimerais mieux souffrir encore de la faim, et plus même qu'autrefois, plutôt que de m'asseoir à tes somptueux banquets.

403. LE MÊME. Sur la goutte. - Déesse qui détestes les pauvres, qui. seule triomphes de la richesse et la domptes, que tu connais à fond l'art de bien vivre ! tu te plais en effet à marcher à l'aide d'appuis étrangers, tu aimes à t'envelopper (165) délicatement les jambes, à respirer des parfums, tu es passionnée pour les couronnes et les vins d'Ausonie, toutes choses qui ne se trouvent jamais chez les pauvres. Aussi tu fuis leurs demeures mesquines et sans le sou, et ton plus grand plaisir est de venir aux pieds des riches.

404. LE MÊME. - Diophante, pour passer une rivière, n'a jamais besoin d'un bateau. Sa hernie lui en fait l'office. Il met sur sa hernie tous ses bagages, même son âne, et flotte la voile au veut. Que devient le privilège des Tritons de nager sur les ondes, si même un hernieux en peut faire autant ?

405. LE MÊME. - Nicon au long nez flaire parfaitement le vin, mais il est lent à dire de quel cru il arrive. Trois jours d'été ne lui suffiraient pas, vu la longueur de son nez qui n'a pas moins de deus cents coudées. O la belle trompe! quand il traverse un fleuve, il y prend souvent des poissons.

406. NICARQUE. - Je vois le nez de Ménippe, et lui-même ne doit plus être loin. Ii arrivera, attendons seulement ; car j'estime qu'il ne doit pas être à cinq stades de distance. Mais vois comme son nez avance. Si nous étions sur une colline élevée, nous apercevrions Ménippe en personne.

407. LE MÊME. - Le petit Ménestrate se chauffait au soleil par un jour de printemps, lorsqu'une fourmi qui était sortie l'entraîna vers son trou. Une mouche survint qui l'enleva, comme l'aigle enleva Ganymède au séjour immortel de Jupiter. Mais il tomba des pattes de la mouche, et dans sa chute il n'arriva pas même jusqu'à terre ; il resta suspendu par les cils à une toile d'araignée.

408. LUCILLE. - Tu teins tes cheveux, soit ; mais tu ne teindras jamais la vieillesse ; tu n'effaceras pas même les rides de tes joues. Donc ne les enduis pas de céruse, au point de remplacer ton visage par un masque. C'est peine perdue. Es-tu folle ? jamais la céruse ni le fard ne feront d'Hécube une Hélène.

409. GÉTULICUS. - Ayant appliqué quatre fois ses lèvres aux lèvres de l'amphore, Silénis en a exprimé le vin jusqu'à la lie. Puissant Bacchus, elle ne t'a point profané avec de l'eau ; mais tel que tu étais venu de la vigne, tel elle t'a bu sans mélange et pur, ayant une soif toujours brûlante, jusqu'à ce qu'elle descendit au rivage des morts.

410. LUCILLE. - Ce cynique à longue barbe, qui mendie un bâton à la main, nous a montré dans un festin son édifiante philosophie. D'abord il s'abstint des lupins et des raves, disant qu'il ne fallait pas que l'homme vertueux fût l'esclave de la gourmandise. Mais lorsqu'on eut servi sous ses yeux une vulve (166) de truie, blanche comme neige, ferme et rebondie, sa frugalité fut comme escamotée : il en demanda contre toute attente, en mangea bel et bien, et nous assura que la vulve de truie ne faisait aucun tort à la tempérance et à la vertu.

411. ANONYME. Sur une salle de bain trop chauffée. - Il ne faut point appeler ceci un bain, mais bien plutôt un bûcher. C'est le bûcher qu'autrefois Achille dressa pour Patrocle ; c'est la couronne de Médée, cette couronne qu'une furie tressa (167) pour la jeune Glaucé à cause du fils d'Aeson. Épargne-moi, baigneur, de par Jupiter; car je suis un poète chantant les exploits des hommes et des dieux. Que si tu as résolu de brûler vifs beaucoup de mortels, allume un bûcher de bois, bourreau, non un bûcher de pierres.

412. ANTIOCHUS. - Il est difficile de peindre l'âme, il l'est beaucoup moins de représenter le corps ; mais à ton égard, c'est tout le contraire. La nature, en effet, mettant en dehors la difformité de ton âme, l'a rendue visible ; mais le désordre de tes traits, la laideur de ton corps, comment pourrait-on les peindre, quand on ne veut pas même les voir ?

413. AMMIEN. - Comme s'il eût sacrifié un jardin, non une victime, Apelle a servi un festin à ses amis qu'il a pris sans doute pour des moutons. Car le menu se composait de raves, de chicorée, de laitue, de poireaux, d'oignons, de basilic, de menthe, de rue d'asperges. Pour moi, craignant qu'il ne me servît aussi du foin, je me suis esquivé après avoir mangé des lentilles à demi cuites.

414. HÉDYLE. - De Bacchus Lysimélès et de Vénus Lysimélès est née une fille, la goutte Lyrimélès (168).

415. ANTIPATER OU NICARQUE. - Mentoride, qui a si évidemment transporté ton dernière là où se trouvait auparavant ta bouche ?  Tu lâches des vents. en effet, tu ne respires pas, et c'est entre tes fesses que tu parles. Je n'en reviens pis d'étonnement : comment ce qui était en bas est-il en haut ?

416. ANONYME. - Les richesses abondent même chez les filles publiques. Je m'en inquiète peu. Qu'il me haïsse, cet or misérable, qui aime les coquins et les coquines.

417. ANONYME. Au sujet d'une vieille femme qui persécutait un jeune homme. - Va secouer un autre chêne, laisse-moi, Ménesthium. Je n'ai jamais eu de goût pour les pommes vieilles et ridées ; mais j'ai toujours aimé les fruits de ma saison, mûrissant avec moi. Pourquoi donc veux-tu à toute force me faire voir une corneille blanche ?

418. L'EMPEREUR TRAJAN. - Quand ta face est tournée au soleil et que tu ouvres la bouche, la pointe de ton nez montre aux passants l'heure aussi bien qu'un cadran solaire.

419. PHILON. - Les cheveux blancs, avec la sagesse, sont une marque d'honneur ; mais, sans la sagesse, ils sont bien plutôt la honte de la vieillesse.

420. ANONYME. - Les cheveux blancs, si tu gardes le silence, sont sagesse ; mais si tu babilles, ils ne sont pas sagesse, non plus que les cheveux de la jeunesse ; ils sont des cheveux.

421. APOLLINAIRE. - (169) Si tu dis du mal de moi, moi absent, tu ne me blesses en rien ; mais si tu dis du bien de moi, moi présent, sache que tu me fais beaucoup souffrir.

422. ANTIOCHUS. Sur un homme de lettres ignorant, après une lecture ou une déclamation. - Si Bésas avait eu un peu d'esprit, il se serait pendu; mais grâce à sa bêtise, il vit, il est riche, même après sa parade.

423. HELLADIUS. -Teinturier, dont les couleurs teignent et changent tout, tu as teint même ta pauvreté : tu lui as tout à coup donné le vernis de la richesse. 

424. PISON. - II ne faut pas même cueillir des fleurs dans la Galatie, du sein de laquelle sont nées les Furies, fléaux des mortels (170).

425. ANONYME. - Je veux que tu saches bien, Placianus, que route vieille riche n'est qu'un riche cercueil.

426. ANONYME. Sur le magistrat Optera, grand buveur. - Tu as une lettre de trop, celle qui est en tête de ton nom. Ote-la, tu auras tout simplement le nom qui te convient (171).

427. LUCILLE. - Un exorciste à la bouche puante a chassé bien des démons, non par ses saintes paroles, mais par son haleine, tant elle est forte !

428. LE MÊME. - Pourquoi perds-tu ton temps à débarbouiller un nègre ? Épargne ta peine : tu ne saurais éclairer avec le soleil les ténèbres de la nuit.

429. LE MÊME. - Tous les convives étaient ivres. Acindynus seul ne l'était pas, et, à cause de cela, c'est lui qui seul semblait ivre.

430. LE MÊME. - Si tu penses qu'une longue barbe puisse te donner la science de la philosophie, rien n'empêche qu'un bouc bien barbu ne devienne un ingénieux raton.

431. LE MÊME. - Si tu es prompt à manger et lent à courir, mange avec tes pieds et cours avec tes dents.

432. LE MÊME. - Un niais, mordu par des milliers de puces, éteignit sa lampe en disant : "Vous ne me verrez plus."

433. LE MÊME. - O peintre, tu ne saisis que les traits, tu ne peux attraper la parole : elle résiste à tes pinceaux.

434. LE MÊME. - Si tu vois une tête chauve, une poitrine et des épaules nues, ne demande pas qui c'est : tu reconnais à sa calvitie [un cynique], un niais.

435. LE MÊME. - Il m'est bien permis de m'étonner comment Bytus a pu devenir un orateur, lui qui ne parle pas même comme tout le monde, et qui raisonne beaucoup plus mal.

436. LE MÊME. - On trouverait plus vite des corbeaux blancs, des tortues ailées, qu'un bon orateur cappadocien.

437. ARATUS. - Je plains Diotime, qui, assis sur un rocher, enseigne l'alphabet aux enfants des Gargaréens (172). 

438. MÉNANDRE. - Aie confiance dans un Corinthien, mais n'en fais pas ton ami.

439. DIPHIUS. - Argos, c'est un cheval (173), mais les habitants sont des loups.

440. PITTACUS. - Fuis tous les Mégariens : ils sont désagréables.

441. PHILISCUS. - Le Pirée est une noix grande et vide.

442. ANONYME. - Trois fois (174) je suis parvenu au pouvoir, autant de fois le peuple d'Érechthée m'a chassé, puis ramené, moi Pisistrate, grand dans le conseil. C'est moi qui ai réuni les poésies d'Homère qu'on chantait auparavant çà et là par épisodes ; car il était un des nôtres ce poète excellent, il était notre concitoyen, puisque nous autres Athéniens nous avons colonisé Smyrne.

(001) Allusion à un passage d'Homére, Odyssée, XXI, 295. 

(002) Echousi lithous signifie qu'ils sont lithiôntes, et rappelle cette partie du serment des Asclépiades : "Je ne taillerai jamais les calculeux ; mais je les adresserai à ceux qui s'occupent spécialement de cette opération." Théodore était un de ces opérateurs. Dans diakôluseis, il faut, pour le sens, voir les racines dia et kôlon, bas-ventre. 

(003) Au lieu de pithanên, lisez Pithannê, ou traduisez pithanên par admodum commodam.

(004) Ingénieuse manière de dire qu'il est cherasphoros.

(005) Voy. Plus bas l'épigramme 19. 

(006) Au lieu de phlexêis lisez brexêis.

(007) Parodie d'un vers de l'Odyssée, XXI, 295. 

(008) Critias, le tragédien, et le POete comique Épicrate furent empoisonnée par Philippe dans un festin.

(009) Une flèche portant cette inscription, Aster à l'oeil droit de Philippe, rendit borgne ce roi de Macédoine, au siège de Méthone ou d'Olynthe.

(010) Ho porphureos, d'après Homère, Iliade, V, 63 et XV, 334.

(011) Remarquez le jeu de mots tên tulên stêlên. 

(012) Ce Lucius était un délateur aux ordres de l'empereur Valens, qui tua son propre frère (adelphon) ; il y a la un souvenir des poursuites exercées par Valens contre les sénateurs dont le nom commençait par Théod

(013) En lisant kêepus au lieu de kai pais. 

(014) Déesse égyptienne, fille d'Osiris et d'Isis, identifiée par les Grecs avec Diane et présidant à la naissance des enfants.

(015)  Ainsi disait Louis XV : "Après moi le déluge !" Voy. plus haut l'épigramme 8.

(016) Voy, ci-après l'épigramme 242 de la Muse de Straton.

(017) In Drakônos, i, e, serpentis nomine et in duplici trôglês intellectu luditur.

(018) Au lieu de astai gar lisez este gar

(019) Lisez hautê gar lachanou  sipalôterê, haec enim tenera beta languidior.

(020) Le drame satyrique.

(021)    En lisant leukoious au lieu de leukoinous.

(022)  Au lieu de Xanthippê lisez Xanthou, tês

(023) Ce qui rappelle ces vers charmants qui terminent la Métromanie de Piron : 
Vous à qui désormais je consacre mes jours, 
Muses, tenez-moi lieu de fortune et d'amours.

(024) A Éleusis. 

(025) Eikada, le 20 du mois Gamélion, jour de la naissance d'Epicure ; de là les Épicuriens étaient appelés Epeikadistai.

(026) C'est le comedamus et bibamus ; cras enim moriendum, d'Isaïe, XII, 13, traduit en si beaux vers par Racine :
De nos jours passagers le nombre est incertain. 
Il est sage aujourd'hui de jouir de la vie.
Qui sait si nous serons demain?

(027) Iliade, VIII, 103. 

(028Iliade, IX, 264.

(029) Iliade, VI, 261. 

(030) C'est de Canastra dans la presqu'île de Pallène, en Macédoine, que les géants tentèrent d'escalader le ciel.

(031) Au lieu de tauta, geloia lisez taut'agalei se

(032) û, interjection d'étonnement.

(033) On comptait delà 100 de la main gauche, de 100 à 1000 de la main droite, de nouveau (deuteron) de 1000 à 2000 de la main gauche. 

(034) Au lieu de ên opon lisez ên pokon.

(035) En himatiô, on courait nu dans la lice. 

(036) Au lieu de stadiê lisez stadion.

(037) Lisez êkontix'an amainon.

(038) Comme l'aigle enleva Ganymède. 

(039) Pour l'atteindre, étant plus petit que la chose tombée. 

(040) Drakmês, vingt sous la douzaine.

(041) Ob ingentem hominis amplitudinem.

(042) Olumpikos est ici peut-étre pour olumpionikês, un vainqueur aux jeun olympiques. 

(043) En les volant. Au lieu de diautou lisez diaugê, comme étant formés de pierres précieuses. 

(044) Ainsi que les autres clients, ses malades. 

(045) Lisez ti de ton chronon ennea mênôn, phêsi, legeis.

(046) Voy. plus haut l'épigramme 86.

(047) Ville sur la limite occidentale de l'Égypte.

(048) Brunck : "Florus ob acceptam in agone poetico coronam celebrato convivio, Polliano, qui invitatus non adfuernt, frustum suillae carvis miserat."

(049) Autar est seize fois dans le premier chant de l'Iliade. 

(050) Thêr ouatoeis est de Callimaque, et l'autre citation est de Parthénius. 

(051)C'est le début de l'Iliade, Mênin aeide, thea

(052) Iliade, VI, 143. 

(053) Boun, parodie de vers de l'Odyssée, XII, 345.

(054) Au lieu de phês su au lisez phêsi se. Quant au vers qui suit, lisez-le ainsi : Tas nuktas d'autas meletôn ou pauetai houtos

(055) "Turpissima quaeque innuunt haec vocabula artis grammaticae ad rem veneream translata."

(056)  Iliade, I, 4. -

(057) "De origine et sensu huius paroemiae non constat." Jacobs. Voy. l''épigramme de Martial, VI, 19.

(058) Au lieu de ên eikôn lisez hê g'eikôn

(059). Là est la ville de Soles, (Soloi), d'où est venu solécisme.

(060) Teras, comme un nouveau sphinx.

(061) Sans ajouter orateur, car il ne l'est pas. - 

(062)En lisant eikonos eikôn au lieu de rhêtoros eikôn.

(063) Voy. Martial, IX, 28.

(064) Phtheirô et phrenôn, jeu de mots remplacé par Minerve et vermine qui en est l'anagramme. 

(065) Diogenis epist. : Kaloumai gar ho kuôn ho ouranios, ouch ho gês.

(066) Le taureau, le lion, signes du zodiaque, sont ici des animaux du cirque auxquels on jetait des victime humaines.

(067) Ou le temps ; c'est-à-dire à la longue tu périras.

(068) Pétorosis, philosophe égyptien. Voy. Juvénal, VI, 581 ; Pline, VII, 50.

(069)  Une mine valait 100 drachmes attiques ou 90 fr. de notre monnaie. 

(070) L'obole pour Charon.

(071) En ajoutant ce vers: Chrêmata klêronomoi hêrpasan aspasiôs.

(072) Lisez eidois. Jeu de mot sur eidois qui se décompose en ei dois, döis, (dôis), si tu donnes.

(073) II est resté ônios, qui veut dire vénal. 

(074) C'est un cochon qui parle à des voleurs. Sal abest.

(075) Au lieu de apelue lisez apamune pour apêmune, puniebat ut alter Nauplius.

(076) Apollôn ek tou apollein, le dieu qui tua Python, Tityus, Marsyas, les Cyclopes.

(077) Après logchais ajoutez tais prin, et le vers sera complet. 

(078) Fille de l'Héraclide Téménus.

(079) Hécate avait une tête de chien, et quelquefois trois têtes ; de là les épithètes kunokephalos et triformis.

(080) Polémon, de polemos, guerre; Stratoclide, de stratos, armée, et kleos, gloire ; Lysimaque, de luô et machê, qui fait cesser le combat.

(081) Anubis était représenté avec une tète de chien, latrator Anubis ; et comme il était fils d'Isis, Isikoiôn, isicium forme avec Anubis un jeu de mot et le trait de l'épigramme.

(082) Lupi vocantur philopaides, et haedi sont pathikoi, qui multo turpiores habebantur.

(083) II ressemble beaucoup à Homère qu'il pille. Totum hoc carmes obscaenum est et aenigmaticum, rem foedam verbis a re grammatica petitis tecte significans (Jacobs). Voy. le Menagiana, t. II, p. 14, où tout est expliqué. 

(084) Jeu de mots : phileis, Pamphile, philei.

(085) Alpheios, homo spurcus, dont le nom amène celui d'Aréthuse. Kolpous, pelagos, hic obscaenae sunt voces. 

(086) Lusus quidam grammaticus, sed leonis quam grammatici dignior.

(087) Jungere licet eip'idiôi stomati et binein idiôi stomati

(088) Ainsi dans Horace, Od,, II, 17, 23 : "Jovis impio tutela Saturno refulgens."

(089) Dans le texte il y a Mastaurôn, ville de Lycie, patrie de Marcus. Si l'on retranche les deux premières lettres, il reste straurôn, croix, gibet des esclaves.

(090) Ce Phèdre était un faussaire habile.

(091) Dustros, mois macédonien qui répond au mois de mars.

(092) L'épigramme de Martial, 11, 78, offre un trait à peu prés semblable, mais plus joli. 

(093) Hyperbole déraisonnable.

(094) Philein signifiant aimer, baiser, il y a un jeu de mots avec misein, haïr, qui disparaît dans la traduction.

(095) Son père, Éole, ayant découvert le commerce incestueux qu'elle entretenait avec son frère Macarée, la contraignit à se donner la mort.

(096) Courtisane d'Alexandrie.

(097) La lune, à son premier quartier, semble fendue en deux, dichotomos.

(098) Lisez ektos echei, au lieu de exô pherei

(099)  Lisez Kallimachos et non Kallimachou

(100)  Les Aitia étaient un poème sur les origines et causes des coutumes, des fables ; il servait d'exercice aux grammairiens. 

(101) Début de l'Iliade, texte élémentaire de l'enseignement grammatical des anciens.

(102) Lisez kleptôn kai klaiôn.

(103) C'est ce même Démonique.

(104) Lukaôn, de lukos, loup, à cause de sa rapacité, ou dans le sens de kinaidos. 

(105) Les moeurs y étaient infantes. 

(106) Ultimi versus non cohaerent cum praecendentibus. Jacobs.

(107) Parodie du bleponta skoton de Sophocle, OEdipe roi, 427.

(108) Dans les îles de l'archipel on fait encore du vinaigre avec la thridace ou laitue. 

(109) Ktilos, parodie d'un vers de l'Iliade, III, 196. 

(110) Putida est inepti versificatoris variatio. Jacobs.

(111) Insulsum carmen, Jacobs.

(112) Plane inepta hyperbole. Jacobs. 

(113) Peinês, pinakas ont une identïté de son qui fait un calembour. 

(114) Tulê, triclinii cubital.

(115) Pour être vainqueur à la lutte, il fallait renverser trois fois son adversaire, d'où triadzô, vaincre, triaktêr, vainqueur.

(116) Quia didumoi, praeter geminos astrum, etiam testiculos significant. 

(117) Jam antiquis temporibus, Demosthenis aevo Athenienses, propter facilitatem quam in jure civitatis vendendo ostendebant, notabantur. Jacobs. 

(118) C' est-a-dire antia gonata echôn, ce qui fait un jeu de mots aussi puéril qu'intraduisible.

(119) Neôkoros, aedituus, desservant.

(120) Goi, goi, interjection phénicienne. 

(121) Hic describitur triporneia per Homeri parodiam, Iliad., XV, 190. 

(122) Ut pote vetula, graus.

(123) Ouranos, regio superior, unde palatum, os.

(124) Voy. Ch. de La Rochelle, Mélanges, I, 143. 

(125) Un grammairien avait fait quelque faute de quantité dans Kunegeiros

(126) C'est peut-être l'empereur romain qui régna de 283 à 284. 

(127) Lusus grammaticus in foedum hominem.

(128) "Obsequium amicos, veritas odium paris." Térence, Andr. I, 1, 41.

(129) Kêlê, forte hic pro brogchokêlê adeo magna ut virum ipsum celet.

(130) En lisant ethelô au lien de dunamai

(131) Parodie d'un vers de, l'Odyssée , IX, 39. 

(132) L'île de Samothrace était l'asile des banqueroutiers.

(133) Au lieu de elpidzein lisez empaidzein. 

(134) C'est un vers d'Homère.

(135) Lisez ton pistên ptuktên

(136) On payait certaines locations le premier du mois.

(137Iliade, III, 108.

(138) C'est la déesse de la justice. 

(139) Huschke, avec raison, qualifie ces vers d'inepti, et d'illepidi ceux qui suivent.

(140) Per amaram ironiam hominis praeparatur accusatio, quam ultimi versus continent. Jacobs.

(141) Peut-être aussi ces derniers vers sont-ils le début de l'épigramme qui suit. 

(142) Au lieu de ôimên lisez ômên, crudelem, et au lieu de cholon lisez kolon, i. e. prôkton

(143) Lisez Hermanubis egeneto. Cet Cet Hermanubis justifiait son nom, Anubis étant représenté avec une tête de chien, latrator Anubis, Virg., et Hermès ou Mercure passant pour fraudis furumque magister

(144) II y a là deux vers qui n'offrent pas de sens. Quomodo huc pertineant ignoro. Jacobs.

(145) Iliade, IX, 501.

(146) En lisant hôrgeios pour ho Argeios

(147) En lisant leukaretainomanôn de aivomanês, significans eos qui virtutem omnibus numeris absolutam volunt. Jacobs.

(148) Au lieu de se palin lisez s'epêlun.

(149) Ajoutez aichos à Pindaros.

(150) Ainsi commence la première Olympique : l'eau est l'élément par excellence.

(151) De Tabla, table à jeu, tabula.

(152) Le jeu de mots Laodikê laois endika  est à remarquer, mais ne se peut traduire. 

(153) Corrigez emmeneonta en ennoon onta

(154) C'étaient des convives affamés.

(155)  Epithète homérique d'Ulysse, intrépide

(156) La justice personnifiée. 

(157) Iliade, VIII, 69. 

(158) Le latin reproduit bien le jeu de mots : quum jacet in thalamo, quum jacet in tumulo.

(159) Dans les jeux du cirque.

(160) Au lieu de exeis lissez sterxeis

(161) Kêlê, tumeur, hernie, goître. 

(162) Pour en faire du vinaigre. Voy. l'épigramme ci-dessus, 295.

(163) Le texte d'Homère servait d'exercices aux grammairiens.

(164) C'est une parodie du début des Phénomènes du poète Aratus.

(165) En lisant pilophophein.  Pedes pilois involucre mollium est. Jacobs.

(166) Bolba. du latin valves.

(167)  Au lieu de ton geitona, lisez ton g'eiren

(168) Lusimelês, de luô et melê, qui affaiblit, qui énerve, qui casse bras et jambes.

(169) De oratore soloecisante et imperito. Jacobs.

(170) Allusion au miel insanum, extrait des fleurs de cette contrée.

(171) Pianos, de piein, boire. 

(172) La ville de Gargara était dans la Troade, sur un sommet de l'Ida.

(173) Hippos, â cause de l'hippotrophia, l'élevage des chevaux, noble goût des Argiens. 

(174) Hérodote dit de même, I, 64 : "Pour la troisième fois Pisistrate se rendit maître d'Athènes."