Paulin de Périgueux

PAULIN DE PERIGUEUX

 

LA VIE DE SAINT MARTIN - LIVRE I

livre II

Oeuvre numérisée par Marc Szwajcer

 

 

 

PAULIN DE PERIGUEUX

 

Paulinus Petricordiensis

PAULIN DE PÉRIGUEUX.

LA VIE DE S. MARTIN

ÉVÊQUE DE TOURS,

POÈME EN SIX LIVRES.

 

NOTICE SUR PAULIN DE PÉRIGUEUX

ET SUR SES OUVRAGES.

Sulpice Sévère avait écrit la vie de saint Martin avec une noble simplicité. Les actes et les miracles de ce vigoureux athlète de la foi lui semblaient assez grands, assez éloquents par eux-mêmes, sans que l’historien essayât de les faire valoir en parant son récit d'ornements étrangers. Il les racontait pour être utile aux hommes, et non pour servir sa propre gloire. Il ne se doutait guère que son modeste petit livre deviendrait bientôt un long poème, et fournirait une ample matière à la verve indisciplinée des versificateurs. C'est pourtant ce qui arriva. Un de ses admirateurs s'avisa de délayer en vers sa prose correcte et concise, et de charger son pur et sobre langage des agréments prétentieux et du luxe inutile de la muse descriptive. Ce poète se nommait Paulin ; et son nom lui porta bonheur. On ne tarda pas à le confondre avec le plus célèbre des écrivains qui s'étaient fait connaître sous ce nom au ve siècle,[1] avec Pontius Meropius Paulinus, mort en 431, évêque de Nole : en effet, cent ans s'étaient à peine écoulés depuis la publication de son livre, que déjà Grégoire de Tours et Fortunat l'attribuaient à cet illustre évêque. C'est à cette méprise peut-être que ce poème doit l'avantage, si c'en est un, d'être venu jusqu'à nous. Trompé, comme il l'avoue lui-même, par le témoignage de Grégoire de Tours, et pensant tirer de l'oubli l'œuvre inédite d'un écrivain renommé, François Juret publia le premier, en 1585, d'après un manuscrit de la bibliothèque de P. Pithou, cet ouvrage avec les deux petits poèmes et la lettre qui le suivent, sous le nom de Paulin de Nole. Cette publication attira l'attention des savants qui découvrirent promptement et sans peine l'erreur de Grégoire de Tours et de Juret. Après avoir en effet reproduit dans ses cinq premiers livres tous les récits de Sulpice Sévère, l'auteur consacre un sixième livre à décrire d'autres miracles dont il devait la connaissance à l'un des successeurs de saint Martin, à l'évêque Perpetuus. Or, ce Perpetuus, qu'il remercie de cette communication, et qu'il nomme plusieurs fois, ne fut appelé au siège de Tours qu'en 461, c'est-à-dire trente ans après la mort de Paulin de Nole. Par le rapprochement de ces dates, qui ne pouvaient être contestées, Baronius prouva aisément que ces poésies n'étaient pas l'œuvre de ce dernier écrivain. Bientôt après, à l'aide de nouveaux manuscrits, le P. Sirmond établit que le véritable auteur de cette histoire versifiée de saint Martin était de Périgueux : il est désigné en effet, dans ces manuscrits, sous le nom de Paulinus Petricordius, ce qui le distingue clairement des autres écrivains du même nom et de la même époque. Quelques critiques daignèrent ensuite s'occuper de cet auteur, et l'examen approfondi auquel ils soumirent différentes parties de ses ouvrages, confirma l'opinion, si bien fondée d'ailleurs, de Baronius, el jeta un peu de jour sur la vie du poète.

Il paraît, d'après son propre témoignage, qu'il était Gaulois, et l'on suppose qu'il était fils d'un célèbre rhéteur de Périgueux, nommé Paulin, dont Sidoine Apollinaire rappelle la mémoire avec éloge. On pourrait croire qu'il avait, dans sa jeunesse, sacrifié aux muses profanes ; mais, comme beaucoup d'autres écrivains de cette époque, il se convertit dans un âge plus avancé. Ce fut alors, vers 463, qu'il entreprit de mettre en vers la Vie de saint Martin et les Dialogues de Sulpice Sévère. Pendant qu'il s'occupait de ce travail, Perpetuus, évêque de Tours, qui l'encourageait dans ses efforts, et lui avait peut-être conseillé cette pieuse entreprise, lui envoya, pour compléter son poème, une relation, signée de sa main, des miracles qui s'étaient accomplis sous ses yeux par l'influence toute-puissante encore du nom et des reliques de saint Martin. Sur ces entrefaites, le petit-fils de Paulin et une jeune fille qu'il était sur le point d'épouser tombèrent dangereusement malades. On leur appliqua sur l'estomac le précieux cahier signé de la main de Perpetuus, et ils furent sauvés. Cette guérison miraculeuse ranima la verve de l'aïeul, qui termina son grand poème, et raconta séparément dans une pièce de quatre-vingts vers le prodige opéré en faveur de son petit-fils. Quelques années plus tard, vers 470, Paulin écrivit encore, à la prière de Perpetuus, une inscription de vingt-cinq vers, que-cet évêque fit graver sur les murs d'une église magnifique qu'y élevait à saint Martin. Comme Paulin se plaignait déjà des infirmités de la vieillesse au moment de la guérison de son petit-fils, on suppose qu'il mourut quelque temps après avoir composé cette inscription, c'est-à-dire vers 476 ou 478.

Ces divers ouvrages de Paulin de Périgueux, bien que jugés sévèrement par la plupart des critiques, ont eu plusieurs éditions. La première, publiée, comme je l'ai dit plus haut, par Fr. Juret en 1585, a été reproduite dans les différentes éditions de la Bibliothèque des Pères, qui ont paru successivement, à Paris en 1589, à Cologne en 1618, à Paris en 1624, et enfin à Lyon en 1677. Le P. Philippe Labbe en avait préparé, en 1653, une édition nouvelle revue sur les manuscrits par le P. Sirmond : il mourut quelque temps après, en 1667, et ne put mettre ce projet à exécution. En 1681, Chrétien Daumius publia de nouveau, à Leipzig, les œuvres de Paulin de Périgueux avec les notes de Juret, suivies d'un assez long commentaire inédit de Gasp. Barthius, de plusieurs observations de J.-F. Gronovius, auxquels il ajouta quelques remarques de sa façon. Enfin Pascal Amato comprit toutes les poésies de Paulin dans son grand recueil imprimé à Pesaro en 1766. La plupart de ces éditions ont été faites avec beaucoup de négligence. Les fautes typographiques, les omissions, les lacunes, les erreurs de ponctuation qui les déparent, ajoutent à l'obscurité du texte, qui, malgré les judicieuses corrections et les savants commentaires de Juret, de Barthius et de Gronovius, se ressent encore en bien des endroits de l'état d'imperfection du manuscrit de P. Pithou, d'après lequel Juret l’a publié. Daumius, qui regrette beaucoup que Juret n'ait point donné une seconde édition qu'il avait promise, et que la mort ait empêché Ph. Labbe de publier l'édition revue et corrigée par le P. Sirmond, n'a rien fait pour suppléer à la perte de ces travaux. Il se contente de dire que la bibliothèque Palatine à Heidelberg, et les bibliothèques de Rome et de Paris renferment des manuscrits de Paulin, mais il ne paraît pas avoir tenté de les mettre à profit. Je ne sais si ces divers manuscrits subsistent encore. Je n'en connais qu'un à Paris ; il appartient aujourd'hui à la Bibliothèque nationale ; j'en ai tiré de bonnes leçons ; malheureusement le copiste a interrompu son travail à la fin du second livre de la Vie de saint Martin. Il en existe un autre beaucoup plus complet à la bibliothèque de la Faculté de médecine de Montpellier: je l'ai collationné en entier ; il m'a été d'un grand secours. J'ai pu, grâce à ces ressources nouvelles, purger le texte de Paulin d'une foule d'incorrections grossières et ridicules, et combler même plusieurs lacunes. J'ai tâché de rendre ses vers à peu près lisibles ; mais, à coup sûr, on ne les lira pas. Les vieux écrivains de la latinité chrétienne ont toujours été fort méprisés. Il y a longtemps qu'Alde Manuce se plaignait de n'avoir pu découvrir, dans toute l'Italie du xve siècle, un seul érudit qui connût même un vers de leurs poésies. Louis Vivès les comparait à des eaux troubles et limoneuses. Georges Fabricius lui répondait ingénieusement, en conservant la métaphore, que les eaux thermales les plus salutaires sont souvent les moins pures. Peut-être d'ailleurs, qu'en cherchant bien, on trouverait quelques parcelles d'or dans ces sables sacrés, comme autrefois dans le fumier d'Ennuis. Un savant de nos jours, dont on ne récusera pas l'autorité, M. Jos.-Vict. Le Clerc, a fort bien démontré que ces poètes chrétiens ne sont pas indignes d'attirer les regards des hommes studieux, et qu'on ne les lirait pas sans fruit et sans plaisir, si on daignait s'en donner la peine. Paulin de Périgueux n'est pas toujours, comme Ellies Dupin veut bien le dire, un versificateur dur et pitoyable ; son style, au contraire, abondant et facile, a souvent de l'élégance et de l'éclat. Malheureusement il écrit sans ordre et sans méthode ; il ne sait pas se borner, il s'appesantit sur les moindres circonstances, et n'abandonne jamais un sujet, si riche qu'il soit, sans l'avoir épuisé. Mais ces défauts mêmes sont rachetés par de rares avantages. Sa verve complaisante, qui ne veut rien taire, nous apprend une foule de détails qu'on né trouve point ailleurs et qui intéressent l'histoire ecclésiastique, civile et politique du ve siècle. Son livre renferme des documents précieux sur les usages des Chrétiens à cette époque, sur les mœurs et les actes des Barbares, sur plusieurs faits importants arrivés en ce temps-là dans les Gaules et, pour ainsi dire, sous les yeux de l'auteur. A ce titre, le témoignage de Paulin de Périgueux, comme celui de son homonyme Paulin de Pella, comme celui de Sidoine Apollinaire, a été utilement invoqué par nos historiens modernes, par l'abbé Dubos et par Fauriel entre autres ; il peut l'être encore. Il méritait donc les soins d'un nouvel éditeur ; et, sous ce rapport du moins, je n'aurai pas entièrement perdu mon temps et ma peine.[2]

E.-F. CORPET.

Juillet 1848.

 

 

Paulinus Petricordiensis

DE VITA SANCTI MARTINI.

LIBER PRIMUS.

Sparserat in toto lumen venerabile mundo

Christus Evangelici reserans mysteria regni.

Sed quia non omnes virtutum operatio gentes

Moverat, et fragili dubitarent credere sensu

Quidquid ab aeternis vulgasset nuntius oris,

(Nam verbis comperta movent praesentia rebus.

Suadentur non visa quidem, sed visa probantur.)

Ille ergo in totum cui par miseratio mundum,

Saevit et in nostris miracula plurima terris

Donans extremis Martini insignia Gallis.

Quem procul in nostram misit fecunda salutem

Pannonia, haud humili generatum stirpe, tribunus

Nam genitor, clarus meritorum laude, sed iste

Nobilior patribus tam clarus qui patre Christo

Sprevit sacrilegos, bene degener, in patre ritus.

Vix etenim decimo senior jam moribus anno

Transiit ad sacram constanti pectore legem,

Signavitque crucis sanctam munimine frontem.

Non illi in tenero mens lubrica pectore: tota

Praeceptum servare Dei, vel nosse voluntas.

Conventus vitare hominum, secreta beati

Scire eremi, spretoque Deum cognoscere mundo,

Linquere terrenas sublimi pectore curas.

 

Haec vix bissenis cum moliretur in annis,

Praeclusa est tanti sublimis gloria facti,

Sed meritum munerante Deo qui velle probavit.

Praecipit Augustus delecta ad bella parando

Accingi cunctam veterano germine prolem.

Quid non livor agat? Prodit pater, armaque nato

Ingerit, heu! tanti pietas oblita pericli.

Quin potius si quem recipit mens saxea sensum

Cresce tuis titulis, mage laus est nam tua vinci.

Cerne pio tantum quae gesserit omnia voto.

Si bona sunt, imitare libens. Sin ardua, gaude.

Vincitur Christi miles pro milite saecli,

Sed mens non trahitur, nec cor cum carne ligatur.

Vana tyrocinii sunt nomina, militat olim

Qui captus proprii per plurima praelia regis

Vicit avaritiam, debellavitque superbam

Luxuriam, prostrata jacet jam viribus hujus

Ambitio, et firmam fugit furor, iraque mentem,

Excedensque omnes funesta superbia culpas.

Unum progressus socium sibi vix sinit ire

Non opere astrictum, sed solo nomine servum.

O felix, cui tale jugum tam grata paravit

Conditio, ut de sorte tua contendere tecum

Nobilium possint certantia vota virorum

Si liceat servire tamen, sed tu quoque duram

Cogeris ad legem nascendi lege solutus!

Nam tibi subjecti servit devotio sancti,

Idem habitus, parcae communis copia mensae.

Hic prior obsequiis, ne saltim noscere possit

Praelatum Domino quaevis solertia servum.

 

PAULIN DE PÉRIGUEUX.

VIE DE SAINT MARTIN

*****************

LIVRE PREMIER.

Le Christ avait répandu sur le monde entier une sainte lumière, en révélant les mystères du royaume évangélique. Mais tous les peuples n'avaient pas été témoins de l'accomplissement de ses miracles, et leur frêle intelligence hésitait à croire à toutes ces merveilles dont la nouvelle leur était apportée de régions étrangères. Les faits racontés ne frappent que par le récit, les faits présents frappent par l'évidence : on peut persuader sans le secours des yeux, mais par les yeux seuls on peut convaincre. C'est pourquoi celui dont la miséricorde s'étend également sur tout l'univers, sema aussi dans nos contrées plus d'un miracle, en faisant don du glorieux Martin au pays reculé des Gaules. C'est la féconde et lointaine Pannonie qui l'envoya pour notre salut. Il n'était point issu d'une humble race. Son père était tribun et s'était illustré par d'éclatants services. Mais Martin devint plus noble encore que ses ancêtres, lui qui se couvrit de tant de gloire en se proclamant enfant du Christ, en répudiant, vertueux apostat, les rites sacrilèges de son père. En effet, il touchait à peine à sa dixième année, qu'il avait déjà la sagesse de l'âge mûr, et qu'il prit la ferme résolution de passer sous les lois de l'Eglise, et de sanctifier son front du signe fortifiant de la croix. Son esprit n'avait point la mobilité naturelle à cet âge si tendre : il n'avait qu'une seule volonté, c'était d'observer les commandements de Dieu, ou, du moins, de les apprendre, d'éviter la société des hommes, de s'initier aux secrets bonheurs de la solitude, de mépriser le monde pour connaître Dieu, de délaisser, pour les sublimes pensées, les soucis de la terre.

Il avait douze ans à peine que déjà ce projet occupait son esprit ; mais la gloire de cette œuvre sublime lui fut refusée : Dieu, pourtant, approuva l'intention, et lui tint compte de ce mérite. L'empereur ordonne qu'on lève des troupes pour la guerre, et qu'on enrôle tous les fils de vétérans. Fatal entraînement de la jalousie ! un père livre son enfant et le contraint à porter les armes. Hélas ! ton amour paternel peut-il méconnaître la grandeur du péril ? Ah ! plutôt, si ton cœur de pierre n'est pas fermé à tout sentiment humain, cède à ton fils, et ajoute ainsi à l'éclat de tes titres, car une telle défaite vaudrait mieux pour ta gloire. Vois seulement quels actes sa pieuse ambition brûlait d'accomplir. S'ils sont louables, imite-les sans balancer, et réjouis-toi s'ils sont difficiles. On enchaîne le soldat du Christ pour en faire un soldat du siècle ; mais on n'entraîne point son âme avec ses membres : sa chair est liée, mais son cœur ne l'est pas. On le croit novice dans l'art de la guerre, on se trompe : depuis longtemps il sait combattre, puisque déjà, engagé dans plusieurs luttes pour le roi qu'il s'est choisi, il a vaincu l'avarice et dompté les superbes vanités du luxe. Déjà la vigueur de son âme a terrassé l'ambition ; son caractère inébranlable a repoussé la fureur, la colère, et l'orgueil, le plus funeste et le plus grand de tous les vices. Il part, et ne permet qu'à regret à un esclave, à un seul, de l'accompagner, et cet esclave n'est point assujetti au travail ; il n'a d'un serviteur que le nom. Heureux esclave, qu'une destinée bienfaisante a placé sous un tel joug ! ton sort ferait envie aux membres de la noblesse, ils te disputeraient avec empressement une condition si belle, s'il leur était permis de servir. Toi, la loi de ta naissance te soumet aux dures lois de la servitude, et tu es libre ! Le saint enfant s'humilie et se dévoue à ton service ; il n'a pas d'autres vêtements que toi ; il partage les provisions de ta pauvre table, il s'acquitte avant toi des plus humbles devoirs, et l'œil le plus clairvoyant ne pourrait distinguer le serviteur, du maître qui lui cède le pas.

 

Hic jam cum paribus quae gratia, quamque modeste

Ipsos subdiderat dilectio vera priores,

Tum sumendorum districtio quanta ciborum

Ne distenta citum vitiarent viscera sensum,

Nec premeret vigilem membrorum sarcina mentem

Ut divisa inopi praeberet copia partem,

Quaeque unum obrueret, melius refoveret utrumque:

Nam sic supplicibus diviserat omnia egenis

Ut sola exesis superessent tegmina membris;

Cum subito horrentis glaciali frigore brumae

Nudus in occursum properat, vix verba frementi

Dimidians praefracta sono, sed causa loquelam

Expedit et linguae partes proclamat aerumna.

Praetereunt cuncti fastiditamque querelam

Despexit misero locupletum insania risu.

Substitit incertus confuso pectore sanctus

Quid faceret, nam votum aderat, substantia deerat,

Suspendit saltim cunctantis vel mora factum.

Sola superfuerat corpus tectura beatum

Ut semper duplicata chlamys, quae frigus et imbrem

Ventorum et rabiem geminato arceret amictu.

Nam sic truncatam compensat pendula partem

Si quod defuerit capiti crevisse calore

Sentiat, adjecto tepefactum vellere corpus.

Verum haec districti felix sententia voti

Amovet, et tanquam cordis dispendia damnet,

Quod sic malluerit trepidae cautela fidei

Adjectam membris duplicato tegmine partem

Concessisse uni quam divisisse duobus,

Nec mora tardat opus, sed transit dextera votum,

Expedit et factum quidquid mens vidit agendum

Stringitur invictus sine crimine vulneris ensis.

Et mediam resecat miseratio prodiga partem

Pejorem sibi credo legens; tum membra trementis

Obtegit, et tradens aliquem de veste teporem.

Jam levior habitu recipit de frigore partem.

O felix virtute tua miracula vincens

Omnia, et excedens Domini praecepta jubentis!

Ille etenim modico contentos nos jubet esse,

Ne servare duas vestes, tu dividis unam.

Aspiciunt omnes alii deformia rident

Tegmina, nec cernunt mage verum in corde decorem

Ast alii secum compuncto corde queruntur

Justitiam potuisse inopis decernere egenti,

Divite quod censu substantia larga negasset.

Nec mora quin tanto reddatur palma triumpho.

Nam vix defessus stratos rejecerat artus

Admittens tenuem vigili sed corde soporem,

Nec sopor illud erat, quia mens attenta vigebat.

Cum subito ante oculos larga mercede benignus

Astitit, inque suo vestitus paupere Christus

Aptavit propriis felicia tegmina membris.

O vere pretiosa chlamys! quid tale vel ostro

Vel ducto in filum pensis rutilantibus auro

Insignes meruere habitus? quid serica tactu

Laevia, vel docte expressis viventia signis.

Ille hominum terraeque Deus, pontique, polique

Omnia qui tribuit, sine quo nihil, ipsaque cujus

Quae dedimus, vel qui dedimus, donumque datorque

Hac ope ditatur, numeret si lucra salutis.

Nec tamen hinc saltim stabilem jactantia mentem

Concutit, aut vanum persensit corde tumorem.

O virtus vicina Deo nil ducere laudi

Cum laudanda geras, nec nostro ascribere facto

Quae facimus sanctoque minus laudarier actu.

Jam certe securus erat de judice tanto.

Sed non erigitur, vel per consortia Christi

Augent visa fidem, sancto renovata lavacro

Membra nitent, sumuntque parem cum corde decorem

Atque novum pariunt fontis mysteria corpus.

Et tamen hoc senio morum, carnisque refulgent

Quatuor a lustris geminos minus egerat annos,

Credo equidem quod tota prius praecordia sanctus

Spiritus irrigui ditarit flumine doni.

Ut quondam sanctus felicia munera Petrus

Praemissa a Domino jam tali in milite vidit.

Quisnam, quaeso, bonus sic consummare valebit

Ut coepit teneris felix Martinus in annis?

Et tamen ista gerens se nec coepisse putabat

Quod vix dum geminis paulum tardaverat annis,

Jam meritis monachus, sed solo nomine miles

Rumpere calcati jam vana vocabula mundi

Spondentes spectant consortia sancta tribuni

Ut parvam justamque moram mox Judice Christo

Pensaret geminata salus per vota duorum.

 

Qu'il savait bien déjà vivre en paix avec ses égaux, et mériter l'affection de ses supérieurs, qui s'abaissaient modestement jusqu'à lui ! Avec quelle sobriété sévère il prenait ses repas ! Il ne voulait pas, en chargeant ses entrailles, éteindre la vivacité de son intelligence, ni écraser du poids de ses membres la vigilante activité de son âme : il pouvait, de cette manière, offrir à un malheureux la moitié de ses aliments ; et ce qui eût été un funeste fardeau pour un seul, devenait ainsi, pour deux, au soutien salutaire. Il avait déjà distribué tous ses biens aux pauvres qui l'imploraient, et il ne lui restait plus que le manteau dont il couvrait ses membres amaigris. Un jour, au milieu des rigueurs de l'hiver, par un froid glacial, se présente soudain à sa rencontre un mendiant nu : sa voix grelottante articule à peine quelques mots entrecoupés ; mais sa douleur a une expression facile à comprendre, et sa misère parle à défaut de sa langue. Nul ne s'arrête ; les riches passent, et leur folle arrogance accueille d'un rire sinistre sa plainte méprisée. Le saint demeure, l'esprit troublé, ne sachant que faire : car il avait bien le désir, mais il n'avait pas les moyens de le secourir. Il hésite, ou du moins, il tarde quelque temps avant d'agir. Il portait encore, et c'était le seul bien qui lui restât, une chlamyde repliée en deux, comme c'est l'usage, et dont la double épaisseur défendait son corps vénérable contre le froid, la pluie et la fureur des vents. Car ce vêtement, qui descend de l'épaule sans remonter plus haut, rachète ce défaut en faisant profiter le reste du corps de la partie dont il prive la tête : un second pli, retombant sur les autres membres, leur communique un surcroît de chaleur. Mais, dans le désir qui l'agite, le saint renonce, par une heureuse inspiration, à cet avantage, qu'il ne conserverait qu'aux dépens de son cœur ; il condamne cette précaution d'une foi peureuse, qui a mieux aimé doter un seul homme de cette double enveloppe, que de la partager entre deux. Il ne balance plus et se met à l'œuvre : sa main seconde son désir et s'empresse d'exécuter l'acte que l'esprit veut accomplir. Il tire son glaive, qui n'a jamais été vaincu ni souillé de carnage, et, dans sa pitié prodigue, coupe son manteau par le milieu, choisit pour lui-même, on peut le croire, la plus mauvaise moitié, couvre de l'autre les membres tremblants du pauvre, lui donne avec ce vêtement quelque chaleur, et prend sa part, sous son accoutrement plus léger, des atteintes du froid. O bienheureux Martin, ta vertu surpasse toutes les merveilles et va même plus loin que les préceptes et les commandements du Seigneur ! car le Seigneur nous ordonne seulement d'être contents de peu et de ne point garder deux vêtements : tu n'en as qu'un, et tu le partages ! Témoins de cette action, les uns se moquent en riant de son manteau difforme, et ne voient pas ce qui est vraiment beau, la beauté de son âme ; d'autres, le cœur contrit, gémissent en songeant que l'équitable charité d'un homme pauvre a pu dispenser à un autre pauvre ce que leur opulence, malgré ses riches et abondantes ressources, lui avait refusé. Ce triomphe de Martin sur lui-même obtint bientôt la palme qu'il méritait. Il venait de jeter sur sa couche ses membres fatigués, et s'abandonnait à un léger sommeil : ou plutôt ce n'était pas un sommeil, car son esprit n'était point endormi et son âme veillait attentive. Tout à coup à ses yeux se présente celui dont la bonté prodigue les récompenses, le Christ lui-même qui a couvert ses propres membres de l'heureux vêtement donné à son pauvre. O chlamyde vraiment précieuse ! un tel honneur a-t-il été jamais accordé à ces parures magnifiques qui resplendissent de l'éclat de la pourpre et de l'or filé, à ces tissus de soie si doux au toucher, où revivent, brodées avec art, de fidèles images ? Non : le Dieu des hommes et de la terre, de la mer et du ciel, qui nous dispense toutes choses et sans lequel nous ne possédons rien, auquel appartiennent tout ensemble, et ce qu'on donne et, même celui qui donne, le don et le donateur, ce Dieu ne s'enrichit que du bienfait aux pauvres, s'il peut compter une âme de plus ainsi gagnée au salut. Cependant Martin ne laisse point l'orgueil ébranler la fermeté de son âme : il ne ressent point en son cœur les élans de la vanité. O vertu sublime et qui nous rapproche du Très-Haut ! ne point rechercher la louange après avoir accompli de si louables œuvres, ne point revendiquer comme notre ouvrage l'ouvrage de nos mains, et rapporter à Dieu la gloire de toutes nos actions ! Déjà certes il n'a plus rien à redouter de ce juge suprême ; et pourtant il ne se grandit point, malgré son commerce avec le Christ. Cette vision double sa foi : renouvelés par une immersion sainte, ses membres s'épurent et prennent une beauté pareille à la beauté de son âme ; son corps renaît, régénéré par Peau mystérieuse du baptême. Et cet enfant, en qui brille ainsi la sagesse de l'esprit et de la chair, n'a pas encore vu les deux dernières années de ses quatre premiers lustres. Je croirais sans peine que l'Esprit saint avait d'abord versé dans le cœur de Martin les trésors et les flots de sa grâce : c'est ainsi que, dans un autre soldat déjà, saint Pierre autrefois reconnut les dons heureux que le Seigneur y avait répandus d'avance. Quel homme, je le demande, si vertueux qu'il soit, pourrait se flatter de finir aussi heureusement que Martin a commencé dans on âge aussi tendre ? Et pourtant, après un tel début, il ne pensait pas avoir commencé encore, parce qu'il ne quitta les armes que deux ans plus tard. Déjà moine par ses mérites, il demeura soldat, mais de nom seulement. Son tribun lui avait promis de rompre avec le siècle, de fouler aux pieds les vanités de monde ; il attendait ce pieux compagnon : faible et légitime retard, que devait racheter bientôt, au jugement du Christ, le double salut de deux âmes ferventes.

Interea fractis irrupto limite claustris

Gallica rura ferus populari coeperat hostis.

Obvius ire parat princeps, cunctosque maniplos

Imperio, hortatu, prece, largitione vocatos

In bellum cogit, nam quos formido retentat

Munera sollicitant et vincunt dona timorem.

Sed mens plena Deo metuit nihil, omnia temnit,

Terrorem irridet, terrena et munera calcat.

Ergo ubi praegressi donum sumpsere priore

Ordine transcurso sanctus de more citatur.

Respuit instantis praesentia munera regis,

Talibus et dictis it contra dicta tyranni:

Trade alii, princeps, terrena haec munera nummos,

Me majora manent majoris praemia regis,

Haec merces belli est, sumant pugnare volentes.

His igitur dictis saevas flammatur in iras

Princeps, ignavum causatur tempore belli,

Immemorem laudis causas finxisse timoris.

Illi autem nulla instantis formido pericli est

Nec metuunt facilem constantia pectora mortem.

Denique quod verba expediunt, et facta probabunt.

Primus ego abjectis praecedens agmina telis,

Non arma arripiens hominis, sed signa salutis,

Tegmine nec fidens clypei, sed nomine Christi,

Atque crucem fronti auxilium pro casside ponens,

Intrepido cunctis occurram corde periclis.

Adnuit, utque fidem dicti documenta probarent

Asservare pium custodia dira jubetur.

Et jam prima novo spargebat lampade terras

Orta dies, venit ad regem legatio supplex

Subdita submittens ditioni colla jubentis.

Quidnam hic, quaeso, viris, quid gestum cernimus armis?

Quid ferrata acies valuit, quid terror et ensis?

Quis pilis cecidit cuneus, quae turma sagittis?

Unus homo, et sola aeterni fiducia regis

Innumeras vicit sine caedis vulnere gentes.

Hic, Martine, tuus Christo vincente triumphus,

Ne saltim sancti violaret sanguine vultum,

Neve piam afficerent morientum funera mentem.

 

Ergo alacer merito successuque acrior ipse

Hostibus oppressis festinat vincere mundum:

Doctorem fidei per tot documenta probatum,

Expetit Hilarium ne quod jactantia vulnus

Inferat, ut proprie extollat sententia cordis

Discipulum jam doctor agit, majorque probatur,

Dum cupit esse minor, nam laudem temnere laus est.

Sic et praecipuae jam dignus honore cathedrae,

Abnuit ut saltim diaconi clarescat honore

Velle locum, sancto quem dudum excesserat actu,

Inferiora cibi deposcens munia sumpsit,

Exorcista gradu, sed jam virtute sacerdos.

 

Exin ne pietas saltim terrena notaret

Quem tam praecipue pietas divina regebat,

Auctores generis festino visere voto

Optat, et aversas melius convertere mentes.

Namque patrem et matrem praeceps ac devius error

Sacrilegos ritus, et saxa vel aera colentes

Praevalida nimium viventes morte premebat.

Ergo iter aggresso pietas comes ibat, et omnes

A Domino missus praestaverat angelus oras

Mollis ut ascensus demerso colle facessat,

Nec traherent pronos, praerupta et concava lapsus.

Ac dum nubiferas propere transcenderet Alpes,

Saevorum insidiis exceptus forte latronum

Instantes gladios manibus post terga revinctis

Risit, et immoto tempsit discrimina vultu,

Quin etiam ut tanti recolam mysteria facti,

Custodem fertur monitis servasse salutis,

Verior hic custos animi, quam corporis ille.

Alter enim nec membra suae ditionis habebat,

Alter et adversus vinxit penetralia mentis.

Sed tamen ambo viam scite docuere sequendam.

Aggeris hic monstravit iter didicitque salutis.

 

Cependant, brisant les barrières, un ennemi barbare avait envahi les frontières de l'empire et commençait à ravager les campagnes des Gaules. L'empereur se prépare à marcher à sa rencontre : il rassemble ses bataillons, et met tout en œuvre pour les entraîner à la guerre : la force, la persuasion, la prière, les largesses même ; car ceux qui sont retenus par la crainte se laissent tenter par l'appât des richesses, et l'or vient à bout de la peur. Mais une âme pleine du Seigneur ne craint rien, méprise tout, se rit de la terreur et foule aux pieds les trésors des nommes. Les supérieurs de Martin s'avancèrent les premiers et reçurent les dons qui leur étaient offerts. Quand il fut appelé à son tour suivant l'usage, le saint repoussa les présents que le roi le pressait d'accepter, et il opposa ce langage aux sollicitations impériales : « Prince, donne à d'autres cet argent, ces trésors de la terre ; j'attends d'un roi plus grand de plus grandes récompenses. Ton or est le prix de la guerre ; le prenne qui veut se battre. » Ces mots allument la redoutable colère du prince ; il accuse Martin de reculer lâchement devant la guerre, de n'avoir aucun souci de la gloire et de chercher des prétextes à sa frayeur. « Non, je ne tremble point à l'approche du danger, répond Martin, et mon cœur est assez fort pour ne point redouter une mort facile. Ecoute, ce que ma bouche va dire, ma volonté l'accomplira. J'irai le premier, seul et sans armes, en tête de nos bataillons ; je ne prendrai point le glaive du soldat, mais le signe du salut ; je ne placerai point ma confiance à l'abri d'un bouclier, mais dans le nom de Jésus-Christ ; au lieu d'un casque, je poserai sur mon front la croix tutélaire, et je marcherai ainsi, calme et sans effroi, au-devant de tous les périls. » Le prince accepte, et pour être sûr que les actes du saint répondront à ses paroles, il le livre à ses gardes et leur commande une surveillance sévère. Le lendemain, quand les premiers rayons du jour versèrent leurs nouvelles clartés sur la terre, une députation suppliante vint trouver l'empereur : l'ennemi s'était rendu, et courbait sous le joug une tête soumise. Voyons-nous là, je le demande, l'influence des guerriers et des armes ? Où s'est montrée la puissance des troupes bardées de fer, et la terreur de l'épée ? Quels bataillons sont tombés sous les javelots, quels escadrons sous les flèches ? Un seul homme, par la seule force de sa confiance au roi éternel, a vaincu, sans meurtre ni carnage, des hordes sans nombre. Le Christ a combattu pour toi, Martin, et t'a fait ce triomphe, afin que le sang ne souillât point ton saint visage, et que la vue des mourants n'affligeât point ton âme compatissante.

Encouragé par ce succès et redoublant d'ardeur, il marche à la conquête du monde, à la ruine de ses ennemis. Il se rend d'abord auprès d'Hilaire, ce docteur de la foi, qui avait passé par tant d'épreuves. Il redoute les atteintes de l'orgueil et les élans de son amour-propre. Déjà docteur, il se fait disciple, et se montre d'autant plus grand qu'il veut rester plus petit : car la gloire vient souvent du mépris de la gloire. Déjà digne des honneurs d'un siège souverain, et prié de souffrir qu'on l'élevât du moins aux honneurs du diaconat, il refusa d'accepter un rang au-dessus duquel le plaçaient depuis longtemps ses saintes œuvres : il demanda de plus humbles fonctions, et prit le grade d'exorciste, bien qu'il eût déjà les vertus d'un évêque.

Bientôt, et pour ne point manquer aux devoirs de l'amour terrestre, lui surtout si fidèle aux préceptes de l'amour divin, il voulut revoir les auteurs de ses jours, et satisfaire sans retard à ce désir, afin de ramener dans le droit chemin leurs âmes égarées. Car son père et sa mère, entraînés dans les fausses voies de l'erreur, honoraient d'un culte sacrilège et la pierre et l'airain, et vivaient ensevelis depuis trop longtemps dans les ténèbres de la mort. Il part, la religion raccompagne : partout d'avance un ange envoyé de Dieu lui avait frayé la route, aplanissant les collines pour lui ménager une montée facile et préserver ses pas de toute chute rapide au fond des ravins et des précipices. Comme il gravissait à la hâte les Alpes chargées de nuages, il tomba un jour dans une embuscade de brigands redoutables. Les épées se lèvent sur sa tête ; mais, bien qu'on lui ait attaché les mains derrière le dos, il se rit des menaces, et d'un œil impassible il brave le danger. On dit même, et je dois signaler ce trait merveilleux d'une si belle aventure, on dit qu'il parvint à convertir son gardien par ses enseignements salutaires : devenu ainsi plus vraiment gardien de l'âme que l'autre ne l'était du corps, car le brigand n'était même pas maître du corps de son prisonnier ; Martin, au contraire, tenait enchaîné par la foi le cœur de son ennemi. Cependant ils apprirent utilement l'un de l'autre la voie qu'ils devaient suivre : le brigand montra au saint le chemin de la fuite, le saint lui enseigna le chemin du salut.

 

Ergo iter inceptum peragit, patriaeque propinquat

Hesperia ingressus transcursis Alpibus arva.

Hic rursum jugis sanctis conatibus hostis

Humanam speciem mentito corpore fingens

Obvius adverso sese obtulit, ausus ab ipso

Quaerere quo tendat, quidve haec properatio poscat.

Ille sub haec, mihi sola via est dux Christus in illo

Effectus voti est a quo donata voluntas.

Ast ille infrendens cunctis conatibus ibat

Obvius, offensus tali molimine daemon

Cui sanctus, Dominus defendit non nocet hostis.

Adjutore Deo virtus adversa timeri

Nulla potest, metuens Dominum contemno periclum

Ne timeam timor ille facit. Qui talia postquam

Effatus pulsa ex oculis evanuit umbra.

 

Ast ille ut Domino duce contigit ora parentum,

Cumque patrem durata usu suadente teneret

Perditio ingestae renuentem verba salutis,

Dum saltim matrem Christo donante recepit.

O tanto partu felix, enixaque natum

Per quem nata Deo est, unaque et mater et infans

Facta, puerperio genitrix generanda beato.

Ante utero peperit per quem nunc orta lavacro est.

Attamen exemplo plures cessere salubri

Mirantes recte tantorum insignia morum.

 

Ac tum forte malus funesti dogmatis error

Sparserat in populos incauto corde sequaces

Virus ab insano quod fuderat Arrius ore.

Praecipue tamen infectum lues ista tenebat

Illyricum, toto penitus grassata veneno.

Hic stabili virtute potens tum tendere contra

Audet, et opposito fluctus dum pectore frangit,

Saepe sacerdotes, populum dum saepe coercet:

Cunctorum insidiis oppressus, verbera passus,

Pulsus ad extremum terrena habitacula liquit:

Attamen ore fidem tenuit, vel corde salutem.

 

Ergo ut cedendum ratus est ne forte morantem

Obrueret sanctum subversi insania mundi,

Gallica rura petit, rursum et vestigia retro

Observata legit non immemor ille fidei.

Sed cum funestus toto saeviret in orbe

Error, et extremos premerent haec crimina Gallos

Cumque ipsum murum fidei, validamque columnam

Hilarium insani trusisset factio mundi,

Paulum constructa statuit requiescere cella,

Hic ubi gaudentem nemoris, vel palmitis umbris

Italiam pingit pulcherrima Mediolanus.

 

Martin poursuit sa route, il approchait de sa patrie : après avoir franchi les Alpes, il avait pénétré dans les plaines de l'Italie, quand l’éternel ennemi de ses saintes entreprises, déguisé de nouveau sous l'apparence trompeuse d'une forme humaine, se présenta à sa rencontre et osa lui demander le but de son voyage et la cause de cet empressement. « Je vais, lui répondit Martin, où le Christ me conduit : ce voyage, il m'a donné la volonté de l’entreprendre, il me donnera la force de l'accomplir. » Et il voulut avancer ; mais le démon, frémissant de rage, s'opposait à sa marche et s’irritait de tant d'efforts et de résistance. Le saint lui dit : « Le Seigneur me protège, l'ennemi ne peut me nuire. Dieu est mon aide, nulle puissance contraire ne saurait m'effrayer. Craignant le Seigneur, je méprise les périls ; car cette crainte-là m'enlève toute crainte. » Il avait à peine prononcé ces mots, que l’ombre, évanouie, disparut de ses yeux.

Enfin, sous la conduite du Seigneur, Martin put revoir ses parents. Son père, endurci par l'habitude, persévéra dans le mal et refusa d'entendre les paroles du salut ; mais du moins, par la grâce du Christ, il retira sa mère de l'erreur. Heureuse femme, d'avoir mis au monde un tel rejeton ! Ce fils qu'elle a fait naître la fait renaître à Dieu ; de cet enfant qu'elle a conçu, elle est la mère et l'enfant tout ensemble ; engendré par elle, il la régénère ; et celui à qui ses fécondes entrailles ont autrefois donné le jour, lui donne aujourd'hui la vie par le baptême. Cet exemple salutaire entraîna la conversion de plusieurs gentils, justement émerveillés de la remarquable sagesse de Martin.

Cependant une doctrine pernicieuse s'était répandue parmi les peuples qui suivaient sans défiance ses funestes maximes. Ce venin, vomi de la bouche impure d'Arius, s'était propagé surtout dans l’Illyrie, livrée alors tout entière à ses ravages, aux progrès dévorants de la contagion. Ferme et inébranlable dans sa conviction, Martin ose lutter contre le mal, il oppose sa forte poitrine à la violence du torrent ; il attaque les évêques, il attaque le peuple ; mais, seul contre tous, il succombe bientôt par surprise, il est battu de verges et réduit enfin à quitter ce pays et ses habitants ; cependant la foi demeure sur ses lèvres, comme le salut dans son cœur.

Il comprit donc qu'il devait céder la place ; tout retard pouvait exposer sa sainte vie aux emportements de cette foule pervertie. Il reprend le chemin qu'il avait parcouru et retourne vers la Gaule : il n'a point oublié qu'un ami l'y rappelle. Mais la funeste hérésie exerçait ses fureurs sur le monde entier, et le joug de l'erreur pesait sur les peuples les plus reculés, sur les Gaulois eux-mêmes. Hilaire enfin, le rempart, le solide pilier de la foi, Hilaire s'était retiré devant les violences d'une faction insensée. A cette nouvelle, Martin s'arrêta, et résolut de prendre un peu de repos dans une cellule qu'il construisit aux lieux où, du sein verdoyant des pampres et des forêts, la riante Italie voit s'élever Milan, sa plus belle parure.

 

Hinc quoque pulsus abit, terras et moenia linquit

Et pelagum fluctusque petens, quia foedior unda

Hospitio magis et populi, vulgique procella,

Quam ponti metuenda fuit: comitatur eumdem

Presbyter ejusdem meriti similisque pericli.

Insula in hospitium legitur procul hospite ab omni;

Herba cibo satis est: cujus radicibus usi

Tam sterili victu duplicant jejunia sancti.

Dumque indiscrete tenuem rimantur in escam

Quidquid inexpertae promebant viscera terrae,

Ellebori gramen subito sensere venenum

Mortiferum totis virus diffundere membris.

Pergitur ad Dominum tota virtute precandi.

Sed praegressa preces pietas, nil artibus actum,

Sed praesens medicina fuit spes sola salutis.

Cernamus toto qui vitam quaerere censu

Effusa in medicos prece mercede solemus,

Ut crescant nostris vivendi tempora nummis,

Quidnam hic electis egerunt pocula succis

Lectaque in antiquis quondam medicamina libris;

Hic certe celerem sine sumptu aut arte salutem

Cor meruit, verbumque dedit, miremur ovantes.

Vox silet, et causa astruitur clamore tacentum,

Sentitur medicus, nec cernitur, omnia causis

Membra puris totam admittunt ad viscera curam.

 

Interea injusto tandem remeare refertur

Sanctus ab exsilio per regis jussa sacerdos,

Cum quo praeclarae fuerant consortia vitae

Dum Pictavorum doctor floreret in oris,

Indomitis tradens populis praecepta salutis.

Et quamquam propere sanctum rapuisset ovantem

Velox affectu pietas, tamen ille morarum

Impatiens celsae jam liquerat ardua Romae

Moenia, Pictonicas citius revehendus ad oras.

Ergo legens praegressa pio vestigia cursu

Promeruit votum cordis finemque laboris.

Construit hic cellam fessis solatia membris.

Nam mens plena Deo coelesti in sede manebat.

 

Hic modo si veterum recolamus carmina vatum

Cum subito attonitos quaterent miracula sensus

Clamaret miserum vecors insania Phoebum

Nec sineret falsas saltim requiescere Musas.

Delfica mentito quaterentur Apolline templa

Cunctaque surdarum raperetur turba sororum,

Excita vi totum complerent monstra furorem.

Nos quibus a Christo sensus vel verba petuntur,

Christicola inspires paulum, Martine, precamur.

Tu qui defunctis potuisti reddere vitam,

Auxilio Domini vultus mihi redde salutem.

Primus ego indultae referam miracula vitae,

Primus fatentis disrumpam claustra sepulcri:

Justa precor toto defunctus corde patronum,

Ut tantae laudis titulos mens viva loquatur.

Ergo licet fandi vires sublimia vincant

Gesta, nec orandi moduli se laudibus aequent

Aggrediar. Tu quisque legens tam vilia temnis

Carmina, dum verba irrides, mirabere facta.

 

Chassé aussi de cette retraite, il part, il abandonne la terre et les cités, et se confie à la mer et aux flots : car l'onde lui offre un plus sûr asile, et il a plus à craindre des hommes et des orages populaires que des tempêtes de l'Océan. Dans son exil, il a pour compagnon un prêtre, que les mêmes vertus exposent aux mêmes périls. Ils choisissent pour leur séjour une île éloignée de toute habitation humaine. Là, ils vivent d'herbes et de racines ; ces maigres aliments leur suffisent : c'est un jeûne de plus pour ces pieux solitaires. Mais, comme ils recueillaient sans distinction, pour leur pauvre nourriture, toutes les plantes qui poussaient sur cette terre inconnue, ils mangèrent de l'ellébore, et sentirent bientôt circuler dans tous leurs membres les poisons meurtriers de cette herbe vénéneuse. Ils s'adressent au Seigneur de toute la force de leurs prières, mais leur foi pieuse s'était élevée vers lui avant leurs prières : ce n'est point la science qui les a sauvés ; leur seul espoir était en Dieu, ce fut leur guérison. Ne l'oublions pas, nous qui achetons la vie au prix de tous nos trésors, qui prodiguons aux médecins d'énormes salaires pour prolonger avec cet or la durée de notre existence. Ont-ils eu recours à ces breuvages composés de sucs choisis avec art, à ces remèdes recueillis autrefois dans les anciens livres ? Non, leur prompte guérison n'est due ni à la richesse, ni à la science : leur cœur l'a méritée, le Verbe la leur accorde ; admirons, et louons Dieu ! Leur voix est muette, mais leur silence parle et gagne leur cause. Ils sentent la main qui les guérit, sans la voir : les voies fermées se rouvrent, et la santé revient pleine et entière dans tous leurs membres.

Cependant Martin apprend qu'un ordre du roi rappelle enfin de son injuste exil le saint évêque, compagnon de son illustre vie aux jours heureux où, docteur au pays des Pictaves, il enseignait à ces peuples indomptés les préceptes du salut. Ravi de joie, il se met en route avec empressement ; son ardente et pieuse affection double sa vitesse : mais Hilaire, impatient, n'avait pu l'attendre ; il avait déjà quitté les remparts élevés de la superbe Rome, pour se rendre au plus tôt sous les murs de Poitiers. Animé d'un saint zèle, Martin vole sur ses traces et trouve enfin l'objet de ses désirs et le terme de ses fatigues. Il construisit près de cette ville un monastère, seulement pour donner du repos et du soulagement à ses membres ; car son âme, pleine de Dieu, habitait les célestes demeures.

Parcourons les vers des anciens poètes : aussitôt qu'un prodige frappe leurs sens étonnés, pour le décrire, ils invoquent dans leur fougueuse ivresse leur misérable Phébus, et ne laissent pas reposer un instant leurs Muses fabuleuses. Ils éveillent, dans son temple de Delphes, leur Apollon menteur, ils traînent avec eux la troupe entière des sourdes Sœurs, et ces monstres évoqués les remplissent d'un violent délire. Nous, qui recevons du Christ nos pensées et notre langage, daigne, ô Martin, adorateur du Christ, nous inspirer un peu. Toi, dont la puissance a rendu la vie aux cadavres, à l'aide du Seigneur, ton appui, rends-moi le salut de mon âme. Je serai le premier exemple d'un tel miracle, d'une vie par toi rachetée de ses fautes ; je briserai le premier les barrières du sépulcre fétide. Puisse le saint patron entendre ma juste prière : morte aujourd'hui par le péché, que mon âme revive et glorifie l'auteur d'un si grand bienfait ! Maintenant, bien que mon langage ne puisse atteindre à la hauteur de ses actes sublimes, et mon humble voix célébrer dignement ses louanges, je commence. Toi qui me lis et méprises mes pauvres vers, tu peux rire du poète, mais tu seras forcé d'admirer le héros.

 

Quidam tam clarae cernens miracula vitae

Elegit tanto semet sociare magistro

Mystica quem nondum fontis renovaverat unda.

Huic febris totas penitus depasta medullas

Extorsit tenuem consumpto corpore vitam.

Ac tum forte absens doctor, sed sedula fratrum

Relligio exanimum plangebat moesta cadaver,

Moerens supplicio fratris, non funere carnis.

Adveniens sanctus fletu rigat ubere vultum,

Defuncti tristem casum miseratus, et omnem

Implevit clamore locum, mox teste remoto

Irrupit moestam tam tristi funere cellam.

Tum super exanimum sese projecit amicum;

Cunctis frigentes membris complectitur artus,

Aspirans tenuem super ora rigentia flatum.

Attamen ad Dominum penitus spes tota refertur,

Assueta oratur pietas, miseratio nota

Poscitur, et meritum fidei credendo meretur.

Vidit adesse Deum puri fiducia cordis,

Effectumque piis senserunt viscera fibris,

Nec mora, vix geminis votum suspenditur horis,

Paulatim incussis motantur lintea membris,

Arentesque artus venarum humore rigantur

Afflatuque animae pectus glaciale tepescit.

Obducti infuso reserantes lumine visus

Felices quibus inducti subliminis ortu

Contigit in primo Martinum cernere morbo.

Erigitur totum subito molimine corpus,

Et cutis exaesis dudum jam lurida membris,

Purpureum recipit succo meliore ruborem.

Vox facilis, ingressus stabilis, manus apta, vigens cor

Totus homo ex variis conflato corpore causis

Unam suscepit diverso in munere vitam

Eliciunt magnam mox gaudia maxima vocem.

Laudes lingua sonat gratantis nuntia mentis.

Affectum cordis clamor pronuntiat oris.

Irrupit mox turba fores, cellamque replevit

Et sanctas cecinit concors symphonia laudes,

Ille autem ut penitus vitam post facta novaret,

Confestim aeterna nituit renovatus ab unda

Et multos felix senium protraxit in annos

Tam clari testis non parvo tempore facti.

Saepe etenim multis idem narrare solebat

Judicis aeterni semet tremuisse tribunal

Vilibus addictum turbis, mersumque tenebris

Angelicis donec prolata oratio verbis

Offerret votum Domino, vitamque referret.

Hic primus nostris Martinum prodidit oris,

Hoc aditu ad reliquas pervenit gloria laudes.

 

Nec multum sane post haec miracula tempus

Fluxerat, ac tulerat clarum nova gloria factum.

Nam dum contiguum Lupicini praeterit agrum

Non humilis parvique hominis, sed pene per orbem

Insignis virtute viri, quo clarior inde

Gloria per tantum testem firmata pateret.

Indoctam illiciens tot per miracula plebem,

Audito clamore procul, miserabile, flentum,

Substitit; inquirit causam discitque vicissim,

Excivitque pium miseratio justa dolorem.

Unus enim laqueo fauces stringente minister

Ruperat, extortae demens confinia vitae.

Accurrit propere complexus triste cadaver,

Elisos oculos et siccas sanguine fauces,

Lumina torva nimis vultumque in morte minacem:

Ad Dominum rursus fletus, suspiria sursum,

Et gemitus clamor, cordis, vox magna tacentis,

Una fides meriti nec dispar gratia doni

Excipitur gratante choro, stipante caterva,

Ostentans cunctis Domini miracula Christi

Atque hostis spolium credentis gloria plebis.

 

Un homme, témoin des merveilles de cette illustre vie, s'était attaché au saint docteur, et s'instruisait à ses leçons. Il n'était point encore régénéré par l'eau mystique du baptême. Une fièvre dévorante, rongeant son faible corps jusqu'au fond des entrailles, en avait épuisé les forces et arraché la vie. Le maître était alors absent : les frères, dans un religieux recueillement, pleuraient tristement sur ce cadavre inanimé, plus affligés du supplice de son âme que de l'anéantissement de sa chair. Le saint arrive : il plaint le sort cruel du pauvre trépassé ; de larges pleurs inondent son visage ; tout le monastère retentit des cris de sa douleur. Puis, seul et sans témoins, il pénètre dans la triste cellule où reposent ces restes malheureux. Alors il se jette sur cet ami qui n'est plus, il couvre et embrasse de tous ses membres les membres froids du cadavre, exhalant un léger souffle sur ces lèvres roidies par la mort. Cependant il rapporte au Seigneur toute son espérance : il implore cette bonté divine qui ne lui fit jamais faute, cette infinie miséricorde qu'il connaît si bien ; et sa croyante ferveur obtient le prix de sa foi. La pure confiance de son âme reconnut la présence de Dieu, et les pieuses fibres de ses entrailles en ressentirent les effets. Deux heures s'étaient à peine écoulées, que son vœu s'accomplit. Peu à peu le cadavre ranimé s'agite sous le linceul ; le sang, ruisselant dans les veines, arrose les membres desséchés ; la poitrine glacée se réchauffe et respire ; les yeux fermés se rouvrent à la lumière : ô bonheur ! aux nouvelles clartés du jour qui leur est rendu, leurs premiers regards rencontrent Martin en renaissant au monde ! Par un soudain effort, le corps entier se redresse : la peau qui s'étendait livide sur ses membres décharnés, nourrie d'une sève meilleure, reprend sa fraîcheur vermeille. La langue se délie, le pied est sûr, la main se meut sans peine, le cœur palpite. Chacun de ces divers organes, dont l'assemblage compose l'homme entier, recouvre à la fois la vie et la fonction qui lui est propre. Martin pousse un grand cri dans sa vive allégresse ; sa langue, interprète de son cœur, exprime à Dieu des actions de grâce ; les accents de sa bouche révèlent les transports de son âme. Les portes s'ouvrent, la foule se précipite, emplit la cellule, et un concert unanime célèbre les louanges dû Seigneur. Le catéchumène voulut aussitôt renouveler cette seconde vie qu'il retrouvait après la mort ; il se purifia dans Tonde sainte qui le régénéra pour l'éternité. Durant plusieurs années encore, il prolongea son heureuse vieillesse, et rendit longtemps témoignage d'une si éclatante merveille. Il raconta souvent et à plusieurs personnes, qu'il avait paru avec terreur devant le tribunal du juge éternel, qu'il avait été relégué avec une vile multitude et plongé dans les ténèbres ; mais qu'enfin la voix des anges avait rapporté au Seigneur la prière et le vœu de Martin, et l'avait rendu à la vie. C'est lui qui le premier révéla Martin à nos contrées, et ouvrit la carrière à cette gloire qui prit ensuite un si brillant essor.

Peu de temps s'était écoulé depuis ce miracle, quand Martin s'illustra par un nouveau prodige. Il passait un jour dans un champ voisin de la maison de Lupicinus. Ce n'était point un homme de basse et pauvre condition ; c'était un personnage que ses qualités avaient rendu célèbre, pour ainsi dire, dans tout l'univers. Dieu n'avait choisi un si noble témoin que pour affermir et faire briller davantage la gloire de Martin, et attirer à lui, par l'attrait de tous ces miracles, l'esprit ignorant du vulgaire. Le saint entend au loin des pleurs et des cris lamentables. Il s'arrête, demande et apprend la cause de ces douleurs. Un si juste sujet de larmes éveille sa pitié charitable. Un serviteur de la maison, serrant un nœud fatal autour de son gosier, avait lui-même, en son délire, rompu les barrières qui l'enfermaient dans la vie. Martin s'empresse d'accourir : il embrasse ce triste cadavre, ces yeux sortis de leurs orbites, cette gorge où le sang est tari, ces regards louches, et ce visage menaçant encore dans la mort même. Il élève de nouveau vers le Seigneur ses pleurs, ses soupirs, ses gémissements, qui sont le cri de son cœur, la grande voix de son silence. Il avait, la même confiance en ses mérites, il en obtint le même prix. Il est accueilli en sortant par les acclamations de la foule qui l'entoure et le félicite ; il montre à tous les yeux le miracle du Seigneur Jésus-Christ, et les dépouilles de son ennemi, qui font la joie des fidèles.

[1] Parmi les écrivains de ce nom qui ont vécu au ve siècle, outre Paulin, évêque de Nole, on cite Paulin, évêque de Béziers ; Paulin, rhéteur à Périgueux ; Benoît Paulin, de Bordeaux ; Paulin de Pella, surnommé le Pénitent, auteur d'un poème intitulé Eucharisticon, compris dans l'Appendice du tome Ier de notre édition d'Ausone. Les Bénédictins ont consacré une notice à chacun de ces écrivains dans le tome ii de leur Histoire littéraire de la France.

[2] Actuellement on considère que la valeur poétique de Paulin de Périgueux est faible.