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SÉQUENCE V : TRAVAUX ET LOISIRS

Texte 15 : UN BOURREAU DE TRAVAIL (3, 5, 9 - 15) (première partie)

Pline évoque l'oeuvre et les occupations de son oncle (et père adoptif) Pline l'Ancien. Chaque matin à l'aube, il se rendait chez l'empereur Vespasien dont il était une sorte de conseiller.

Reversus domum reliquum temporis studiis reddebat. Post cibum saepe aestate si quid otii iacebat in sole, liber legebatur, adnotabat excerpebatque. Nihil enim legit quod non excerperet; dicere etiam solebat nullum esse librum tam malum ut non aliqua parte prodesset. Post solem plerumque frigida lavabatur, deinde gustabat dormiebatque minimum; mox quasi alio die studebat in cenae tempus. super hanc liber legebatur adnotabatur, et quidem cursim.

si quid otii s'il avait du temps libre
in : jusque

adnoto, a, are : remarquer
aestas, tatis
, f. : été
aliquis, a, id
: quelqu'un, quelque chose
alius, a, ud
: autre, un autre
cena, ae,
f. : cène, repas du soir
cibus, i
, m. : le repas
cursim,
adv. : rapidement
deinde,
adv. : ensuite
dico, is, ere, dixi, dictum
: dire
dies, ei,
m. et f. : jour
domus, us,
f. : maison
dormio, is, ire, iui, itum
: dormir, ne rien faire
enim,
inv. : car, en effet
et,
inv. : et
etiam,
inv. : même
excerpo, is, ere, psi, ptum
: prendre des notes
frigidus, a, um
: froid
gusto, as, are
: goûter (prendre un repas)
hic, haec, hoc
: ce, cette
iaceo, es, ere, cui, citurus : être étendu, s'étendre
in,
prép. : (acc. ou abl.) dans, sur, contre
lavo, as, are
: laver
lego, is, ere, legi, lectum
: lire
liber, bri,
m. : livre
malo, mavis, malle, malui
: préférer
malus, a, um
: mauvais. comp. peior, sup. : pessimus (-umus)
minimum,
adv. : très peu
mox,
adv. : bientôt
nihil,
ou nil : rien
non
, neg. : ne...pas
nullus, a, um
: aucun
otium, ii,
n. : loisir, calme
pars, partis,
f. : partie, côté
plerumque,
inv. : la plupart du temps
post,
prép+acc. : après
prosum, es, prodesse
: être utile
quasi,
inv. : presque, comme si
quid
, adv. : pourquoi?
quidem,
inv. : certes
quod,
conj. : parce que
reddo, is, ere, ddidi, dditum
: rendre, rapporter
reliquus, a, um
: restant
revertor, eris, i, reversus sum
: revenir
saepe,
inv. : souvent
si,
conj. : si
sol, solis
, m. : le soleil
soleo, es, ere, ui, itum
: avoir l'habitude de
solus, a, um
: seul
studeo, es, ere, ui
: rechercher, étudier
studium, ii,
n. : intérêt, passion
sum, es, esse, fui
: être
super,
inv. +abl. : au dessus de, au sujet de
tam,
inv. : si, autant
tempus, oris
, n. : le temps, la tempe
ut
, conj. : pour que, que, comme

Texte 15 : UN BOURREAU DE TRAVAIL (3, 5, 9 - 15) (deuxième partie)

Memini quemdam ex amicis, cum lector quaedam perperam pronuntiavisset, revocavisse et repeti coegisse; huic avunculum meum dixisse : "Intellexeras nempe ?" Cum ille adnuisset, "Cur ergo revocabas? Decem amplius versus hac tua interpellatione perdidimus." Tanta erat parsimonia temporis.
In secessu solum balinei tempus studiis eximebatur (cum dico "balinei", de interioribus loquor; nam dum destringitur tergiturque, audiebat aliquid aut dictabat). In itinere, ad latus notarius cum libro et pugillaribus, cuius manus hieme manicis muniebantur, ut ne caeli quidem asperitas ullum studii tempus eriperet; qua ex causa Romae quoque sella vehebatur.

ad, inv. : vers, à, près de
adnuo, is, ere, adnui, adnutum
: acquiescer
aliquis, a, id
: quelqu'un, quelque chose
amicio, is, ire, amicui, amictum
: envelopper
amicus, a, um
: ami de
amicus, i,
m. : ami
amplius,
adv. : plus
amplus, a, um
: grand, important
asperitas, atis,
f. : l'âpreté
audio, is, ire, ivi, itum
: entendre, ouir
aut,
conj. : ou, ou bien
avunculus,
i, m. : le grand-oncle
balineum, i,
n. : bain
caelum, i
, n. : ciel, ici : le temps qu’il fait
causa, ae
, f. : cause
cogo, is, ere, coegi, coactum
: assembler, forcer
cum,
inv. : conj., comme ; prép, avec
cur
, inv. : pourquoi ?
de,
prép. + abl. : au sujet de, du haut de, de
decem,
inv. : dix
destringo, is, ere, strinxi, strictum
: dégainer l'épée, dégager (une hache) du faisceau
dico, is, ere, dixi, dictum
: dire
dicto, as, are
: dicter, prescrire, ordonner
do, das, dare, dedi, datum
: donner
dum,
inv. : tant que
ergo
, inv. : donc
eripio, is, ere, eripui, ereptum
: arracher
et
, inv. : et
ex,
prép. : (+abl) hors de, de
eximo, is, ere, emi, emptum
: tirer de, retirer de
fero, fers, ferre, tuli, latum :
porter, supporter, rapporter
hac,
adv. : par ici
hic, haec, hoc
: ce, cette
hiems, hiemis,
f. : l'hiver
ille, illa, illud
: ce, cette
in,
prép. : (acc. ou abl.) dans, sur, contre
intellego, is, ere, lexi, lectum
: comprendre
interior, oris
: plus en dedans, intérieur
interpellatio, ionis,
f. : l'interruption, l’intervention (en paroles)
iter, itineris,
n. : chemin
latus, a, um
: large
latus, eris
: le flanc, le côté, le corps
lector, oris
, m. : le lecteur
liber, bri
, m. : livre
loquor, eris, i, locutus sum
: parler
manica, ae,
f. : la manche
manus, us,
f. : main
memini, isti, isse
: se souvenir
meus,mea, meum
: mon
munio, is, ire, iui, itum
: fortifier
nam,
inv. : de fait, voyons, car
ne,
inv. : pour que... ne... pas, de peur que, que
nempe
, inv. : n'est-ce-pas?
notarius, ii,
m. : le secrétaire
parsimonia, ae,
f. : l'économie, la parsimonie
perdo, is, ere, didi, ditum
: perdre
perperam,
adv. : de travers, faussement
pronuntio, as, are
: prononcer (un jugement)
pugillares, ium,
f. : les tablettes
qua, adv. : par où?
queor, ris, eri, questus sum
: se plaindre
qui, quae, quod
: qui
quidam, quaedam, quoddam/quiddam
: un certain, quelqu'un, quelque chose
quidem,
inv. : certes
quo
, inv. : où ? (avec changement de lieu)
quoque,
inv. : aussi
repeto, is, ere, repetii, repetitum :
rejoindre
revoco, as, are
: rappeler, faire revenir
Roma, ae,
f. : Rome
secessus, us
, m. : séparation, retraite, l’intimité
sella, ae,
f. : le siège, la chaise
sol, solis,
m. : soleil
soleo, es, ere, ui, itum
: avoir l'habitude de
solor, aris, ari
: réconforter, consoler
solum
, adv. : seulement
solus, a, um
: seul
studium, ii,
n. : intérêt, passion
sum, es, esse, fui
: être
tantus,a,um
: aussi grand
tempus, oris
, n. : le temps, la tempe
tergo, is, ere, tesri, terum
: essuyer
tueor, eris, eri, tuitus sum
: protéger
tuus,a, um
: ton
ullus, a, um
: aucun
ut,
conj. : pour que, que, comme
veho, is, ere, vexi, vectum
: transporter
versor, aris, ari
: se trouver habituellement, demeurer, être
versus, us,
m. : le vers
verto, is, ere, verti, versum
tourner


Réfléchissons ...

1. Pline l'Ancien consacrait tout son temps à l'étude. Repère tous les instants où il aurait pu cesser d'étudier.

2. Une telle utilisation du temps n'était possible que grâce aux esclaves. Relève tous les passages où Pline le Jeune signale leur présence. Relève ensuite les passages où les esclaves sont présents sans que cela ne soit dit clairement.

3. Comment faut-il comprendre la réflexion de Pline à la suite de l'erreur du lector?

4. Une belle maxime : "nullus est liber tam malus ut non aliqua parte prodesset." Donne ton avis personnel.

Création

Un esclave secrétaire de Pline l'Ancien raconte une journée de travail.

Traduction

[3,5] V. - C. PLINE SALUE SON CHER BÉBIUS MACER.
Je suis très heureux que la lecture des livres de mon oncle vous passionne au point de vouloir les posséder tous et d'en réclamer la liste complète. Je remplirai le rôle de catalogue et même je vous indiquerai l'ordre de leur composition, car cette connaissance ne déplaît pas non plus aux curieux de lettres.
L'art de lancer le javelot à cheval, un livre; il l'a composé avec autant de talent que de soin, lorsqu'il était aux armées comme commandant d'une aile de cavalerie.
La vie de Pomponius Secundus, deux livres; il en était particulièrement aimé; il écrivit cet ouvrage comme pour s'acquitter. d'une dette envers la mémoire de son ami.
Les guerres de Germanie, vingt livres; il y a raconté toutes les guerres que nous avons soutenues contre les Germains. Il les commença pendant son service en Germanie; un songe lui en donna l'idée; pendant son sommeil il vit debout devant lui le fantôme de Drusus Néron, qui, après avoir soumis une grande partie de la Germanie, y mourut; il lui recommandait. de veiller sur sa mémoire et le priait de le sauver d'un injurieux oubli.
L'homme de lettres, trois livres, divisés en six volumes à cause de leur étendue; il y prend l'orateur au berceau et le conduit à sa perfection.
Les difficultés de ta grammaire, huit livres, qu'il écrivit pendant les dernières années du règne de Néron, quand tous les genres d'études un peu libres et un peu sérieuses eurent été rendues périlleuses par la servitude.
La suite d'Aufidius Bassus, trente et un livres.
L'histoire naturelle, trente-sept livres; ouvrage étendu, savant, presque aussi varié que la nature elle-même.
Vous êtes surpris que tant de volumes et tant de recherches minutieuses aient été menés à bonne fin par un homme si occupé; vous serez plus étonné encore, quand vous saurez qu'il a plaidé pendant quelque temps, qu'il est mort à cinquante-six ans, et que, dans la période comprise entre ces deux moments, il a été tiraillé et accaparé, tant par les plus hautes fonctions, que par l'amitié des princes. Mais il avait un esprit vigoureux, une ardeur incroyable, une grande puissance de veille. Il commençait ces veilles aux fêtes de Vulcain, non pour les placer sous d'heureux auspices, mais pour allonger le temps de l'étude, et aussitôt la nuit complète; en hiver dès la septième heure, ou au plus tard dès la huitième, souvent dès la sixième (il est vrai qu'il se livrait à volonté au sommeil, qui venait ou s'interrompait parfois au milieu même de son travail). Avant le jour, il se rendait auprès de l'empereur Vespasien, qui, lui aussi, travaillait la nuit, et de là à ses fonctions officielles. Revenu chez lui, il donnait à l'étude le reste de son temps. Souvent après son repas, qu'il prenait dans la journée toujours léger et simple à la manière des anciens, en été, s'il avait quelque moment de loisir, il s'étendait au soleil, se faisait lire un livre, prenait des notes, en tirait des extraits. Car il n'a jamais lu, sans extraire des citations; il disait qu'aucun livre n'était assez mauvais pour ne pas contenir quelque partie utile. Après sa pause au soleil, il prenait d'ordinaire un bain froid, puis faisait une collation et un petit somme; ensuite, comme s'il commençait une nouvelle journée, il étudiait jusqu'au repas du soir; pendant ce repas, nouvelle lecture, nouvelles notes prises en courant.
Je me souviens qu'un de ses amis, le lecteur ayant mal prononcé quelques mots, le reprit et le fit recommencer, alors mon oncle lui dit : « Mais vous aviez compris? » L'autre dit oui d'un signe de tête : « Pourquoi donc le faire recommencer? Nous avons perdu plus de dix lignes par votre interruption. » Tant il était avare de son temps. Il se levait de table en été encore de jour, en hiver dans le courant de la première heure de nuit, avec la régularité d'une loi imposée. Voilà sa vie au milieu des occupations et du tumulte de la ville; dans la retraite seul le temps du bain était pris aux études; quand je dis du bain, j'entends le temps qu'il passait dans l'eau, car pendant qu'on le frictionnait et l'essuyait, il écoutait une lecture ou dictait. En voyage comme s'il eût été libéré de tout autre soin, il s'adonnait à l'étude seule; à ses côtés, il avait son secrétaire muni d'un livre et de tablettes, et les mains protégées en hiver par des manches tombant sur les mains, pour que la rigueur même de la température ne dérobât pas un instant au travail.
C'est pourquoi même à Rome, il allait en litière. Il me revient qu'un jour, il me blâma de me promener à pied : « Vous auriez pu ne pas perdre ces heures-là, » car c'était du temps perdu, à ses yeux, que celui qu'on ne consacrait pas à l'étude. C'est grâce à cette activité qu'il a pu achever tous ces volumes que je viens de vous citer et qu'il m'a laissé cent soixante cahiers d'extraits écrits sur les deux faces de la feuille d'une écriture très menue, ce qui en accroît le nombre. Il racontait lui-même que, pendant sa procuration d'Espagne, il aurait pu vendre ces cahiers à Larcius Licinius quatre cent mille sesterces et encore alors ils étaient un peu moins abondants. Ne vous semble-t-il pas, quand vous songez à toutes ses lectures, à tous ses écrits, qu'il n'a pas pu participer aux fonctions publiques ni aux devoirs qu'impose l'amitié du souverain? Inversement, quand vous apprenez combien il a dépensé de temps à l'étude, ne trouvez-vous pas qu'il aurait pu écrire et lire davantage? Car quels travaux n'auraient rencontré un obstacle dans ces fonctions, ou n'auraient pu être accomplis par une si constante application? Aussi ne puis-je m'empêcher de rire, quand on m'appelle laborieux, moi qui, comparé à lui, suis la paresse même. Mais suis-je le seul, alors que mon temps est accaparé tantôt par les services publics, tantôt par ceux de l'amitié? Parmi ceux qui consacrent toute leur vie aux lettres, quel est celui qui, mis en parallèle avec mon oncle, ne rougirait, comme s'il s'était livré au sommeil et à la mollesse?
J'ai allongé ma lettre, malgré ma résolution de répondre seulement à votre requête, en vous disant quels livres il avait laissés. J'espère cependant que ces détails ne vous seront pas moins agréables que ses livres eux-mêmes, car ils peuvent vous inciter non seulement à les lire, mais, en vous piquant d'émulation, à produire quelque oeuvre qui les égale. Adieu.

 

Texte 16 : LES SUPPORTERS (9, 6)

Circenses erant, genus spectaculi quo ne levissime quidem teneor. nihil novum, nihil varium, nihil quod non semel spectavisse sufficiat. Quo magis miror tot milia virorum tam pueriliter identidem cupere currentes equos, insistentes curribus homines videre. Si tamen aut velocitate equorum aut hominum arte traherentur, esset ratio non nulla; nunc favent panno, pannum amant, et si in ipso cursu hic color illuc, ille huc transferatur, studium favorque transibit, et repente agitatores illos, equos illos, quos procul noscitant, quorum clamitant nomina, relinquent. Tanta gratia, tanta auctoritas in una vilissima tunica ...

agitator, oris, m. : le cocher
amo, as, are
: aimer, être amoureux
ars, artis,
f. : art
auctoritas, atis,
f. : l'autorité, l'influence
aut,
conj. : ou, ou bien
circenses, ium
, f. les jeux du cirque
clamito, as, are
: crier
color, oris, m.
: la couleur, le teint
cupio, is, ere, ivi, itum
: désirer
curro, is, ere, cucurri, cursum
: courir
currus, us,
m. : le char
cursus, us,
m. : course
equus, i,
m. : cheval
et
, inv. : et
faveo, es, ere, favi, fautum
: favoriser
favor, oris,
f. : faveur
genus, eris,
n. : la race, le genre, l'espèce
gratia, ae,
f. : grâce, reconnaissance
hic, haec, hoc
: ce, cette
hic
, inv. : ici
homo, minis,
m. : homme, humain
huc,
adv. : ici (question quo)
identidem,
inv. : sans cesse, continuellement
ille, illa, illud
: ce, cette
illuc,
adv. : là (question quo)
in,
prép. : (acc. ou abl.) dans, sur, contre
insisto, is, ere, stiti, stitum
: s'arrêter, être assis
ipse,ipsa, ipsum
: même (moi-même, toi-même, etc.)
levissime,
adv. : de manière très légère
magis
, adv. : plus
milia, milium
: mille, des milliers
milium, ii,
n. : mille
miror, aris, ari
: s'étonner
ne,
inv. : pour que... ne... pas, de peur que, que
nihil,
ou nil : rien
nomen, inis,
n. : nom
nomino, as, are
: appeler
non
, neg. : ne...pas
noscito, as, are
: reconnaître
novus, a, um
: nouveau
nullus, a, um
: aucun (non nullus = un)
nunc,
inv. : maintenant
pannus, i,
m. : le morceau d'étoffe
procul
, adv. : loin
pueriliter, adv
. : de manière enfantine
qui, quae, quod
: qui
quidem,
inv. : certes
quo,
inv. : où ? (avec changement de lieu)
quo magis
: d’autant plus
quod,
conj. : parce que
ratio, onis,
f. : raison, raisonnement
relinquo, is, ere, reliqui, relictum
: laisser, abandonner
repente
, inv. : soudain
semel,
inv. : une (seule) fois
si
, conj. : si
spectaculum, i,
n. : le spectacle
specto, as, are
: regarder
studium, ii
, n. : intérêt, passion
sufficio, is, ere, feci, fectum
: suffire
sum, es, esse, fui
: être
tam,
inv. : si, autant
tamen,
adv. : cependant
tantus,a,um
: aussi grand
teneo, es, ere, ui, tentum
: tenir, retenir
tot,
adv. : tant, si nombreux
traho, is, ere, traxi, tractum
: tirer, traîner
transeo, is, ire, ii, itum :
passer, traverser
transfero, fers, ferre, tuli, latum
: porter au delà, transporter
tunica, ae
, f. : tunique
una,
adv. : ensemble
unus, a, um
: un seul, un
varius, a, um
: varié, divers
velocitas, atis
: f. : la rapidité, l'agileté
video, es, ere, vidi, visum
: voir
vilis, e
: de peu de valeur
vir, viri,
m. : homme (par opp. à femme)

Réfléchissons ...

1. Pline n'est pas intéressé par les courses; il s'efforce donc de dévaloriser le plaisir que d'autres en tirent. Fais le relevé de tous les mots dépréciatifs du texte.

2. l. 2 et 3 : Quo magis ... videre. : Quel est le procédé que Pline utilise pour dévaloriser le spectacle ?

3. D'après ce que dit Pline lui-même, le spectacle est-il dépourvu de sens ?

4. Montre comment il utilise le sens du spectacle pour critiquer les amateurs.

Création

Tu es un amateur de courses. Réponds à la lettre de Pline.

[9,6] LETTRE VI. PLINE A CALVISIUS.
J'ai passé tous ces derniers jours à composer, à lire dans la plus grande tranquillité du monde. Vous demandez comment cela se peut au milieu de Rome? C'était le temps des spectacles du cirque, qui ne me touchent pas, même légèrement. Je n'y trouve rien de nouveau, rien de varié, rien qu'il ne suffise d'avoir vu une fois. C'est ce qui redouble l'étonnement où je suis, que tant de milliers d'hommes aient la puérile passion de revoir de temps en temps des chevaux qui courent, et des hommes qui conduisent des chariots. Encore s'ils prenaient plaisir à la vitesse des chevaux ou à l'adresse des hommes, il y aurait quelque raison. Mais on ne s'attache aujourd'hui qu'à la couleur des habits de ceux qui combattent; on ne regarde, on n'aime que cette couleur. Si, dans le milieu de la course ou du combat, on faisait passer d'un côté la même couleur qui est de l'autre, on verrait, dans le moment, leur inclination et leurs voeux suivre cette même couleur, et abandonner les hommes et les chevaux qu'ils connaissaient de loin , qu'ils appelaient par leurs noms; tant une vile casaque fait d'impression, je ne dis pas sur le petit peuple, plus vil encore que ces casaques; je dis même sur de fort honnêtes gens. Quand je songe qu'ils ne se lassent point de revoir, avec tant de goût et d'assiduité, des choses si vaines, si froides, et qui reviennent si souvent, je trouve un plaisir seçret à n'être point sensible à ces bagatelles, et j'emploie volontiers aux belles-lettres un loisir que les autres perdent dans de si frivoles amusements. Adieu.

 

SÉQUENCE VI : RUBRIQUE DES FAITS-DIVERS

Texte 16 : Disparitions mystérieuses (VI, 25, 1-4)

Scribis Robustum, splendidum equitem Romanum, cum Atilio Scauro amico meo Ocriculum usque commune iter peregisse, deinde nusquam comparuisse; petis ut Scaurus veniat nosque, si potest, in aliqua inquisitionis vestigia inducat. Veniet; vereor ne frustra. [Pline évoque alors un événement qui lui paraît du même ordre.] Metilio Crispo ego ordinem impetraveram atque etiam proficiscenti quadraginta milia nummum ad instruendum se donaveram, nec postea aut epistulas eius aut aliquem de exitu nuntium accepi. Interceptusne sit a suis an cum suis dubium : certe non ipse, non quisquam ex servis eius apparuit.

a, prép. : (+abl) à partir de
accipio, is, ere, cepi, ceptum
: recevoir, apprendre
ad
, inv. : vers, à, près de
aliquis, a, id
: quelqu'un, quelque chose
amicus, a, um
: ami de
amicus, i,
m. : ami
an
, inv. : est-ce que ; an... an..., si... ou si
appareo, es, ere, ui, itum
: apparaître
at, inv. : mais

Atilius, i
, m. : Atilius
atque,
inv. : mais, et
aut,
conj. : ou, ou bien
certe,
adv. : certainement, sûrement
certus, a, um
: certain
communis, e
: commun
compareo, es, ere, ui, -
: reparaître
Crispus, i,
m. : Crispus
cum,
inv. : conj., comme ; prép, avec
de,
prép. + abl. : au sujet de, du haut de, de
deinde,
adv. : ensuite
dono, as, are
: alicui aliquod, ou aliquem aliqua re : donner qqch à qqun
dubium, ii
, n. : doute
dubium (est)
: il est douteux, on se demande
dubius, a, um
: douteux, incertain
ego, mei
: je
epistula, ae,
f. : la lettre
eques, itis
, m. : chevalier, cavalier
etiam,
inv. : même
ex,
prép. : (+abl) hors de, de
exitus, us
, m. : la fin, la mort
frustra,
adv. : en vain
impetro, as, are
: obtenir
in,
prép. : (acc. ou abl.) dans, sur, contre
induco, is, ere, duxi, ductum
: introduire
inquisitio, ionis,
f . : l'enquête
instruo, is, ere, instruxi, instructum
: installer (se) : s’équiper
interceptus

ipse,ipsa, ipsum
: même (moi-même, toi-même, etc.)
is, ea, id
: ce, cette
iter, itineris
, n. : chemin
Metilius, ii,
m. : Metilius
meus,mea, meum
: mon
milia, milium
: mille, des milliers
milium, ii
, n. : mille
ne,
inv. : pour que... ne... pas, de peur que, que
nec, neque = et non
, et...ne...pas
non,
neg. : ne...pas
nos,nos
: nous
nummus,i,
m. : la pièce de monnaie, le sesterce (nummum =g. Pl.)
nuntio, as, are
: annoncer
nuntius, ii,
m. : messager
nusquam,
inv. : nulle part
Ocriculum, i,
n. : Ocriculum (ville d'Ombrie)
ordo, inis,
m. : l'ordre, le rang; ici : le commandement d’une centurie
perago, is, ere, egi, actum
: accomplir, achever, mener jusqu'au bout
pergo, is, ere
: poursuivre
peto, is, ere, ivui, itum
: chercher à atteindre, attaquer
possum, potes, posse, potui
: pouvoir
postea,
adv. : ensuite
proficiscor, eris, i, fectus sum
: partir
quadraginta,
nomb. : quarante
quisquam : quelqu’un (non quisquam = personne)

Robustus, i,
m. : Robustus
Romanus, a, um
: Romain
Scaurus, i,
m.: Scaurus
scribo, is, ere, scripsi, scriptum
: écrire
se,
pron. réfl. : se, soi
servio, is, ire, ii ou ivi, itum
: être esclave
servus, i,
m. : esclave
si,
conj. : si
splendidus, a, um
: brillant
sum, es, esse, fui
: être
suus,a, um
: son
usque,
prép. : usque ad, jusqu'à
ut,
conj. : pour que, que, comme
venio, is, ire, veni, ventum
: venir
vereor, eris, eri, veritus sum
: craindre
vestigium, i,
n. : la trace, le vestige

Réfléchissons ...

1. Rassemblons les éléments de l'enquête : que savons-nous de Robustus ?

2. Ce qui lui est arrivé est-il exceptionnel ?

3. Qu'est-il arrivé à Metilius Crispus ? Le texte, sans le dire nettement, contient deux hypothèses. Lesquelles ?

4. Interceptusne sit a suis an cum suis dubium : cette phrase nous découvre un aspect de la vie à l'époque. Lequel ? Peux-tu mettre cela en rapport avec des choses vues précédemment?

Création

Tu es l'enquêteur. Quelles seraient les questions à poser à Atilius Scaurus ?

Joue maintenant au romancier. Imagine les réponses données par Atilius.

TRADUCTION

[6,25] XXV. - Pline à Hispanus.
Vous me mandez que Robustus, illustre chevalier romain, a fait route avec Attilius Scaurus, mon ami, jusqu'à Otricoli, et que, depuis, on ne l'a plus revu. Vous me priez de faire venir Scaurus, pour nous aider, s'il est possible, à retrouver les traces de son compagnon de voyage. Il viendra; mais je crains que ce ne soit inutilement. J'appréhende que Robustes n'ait eu le même sort que Métilius Crispus, mon compatriote. Je lui avais obtenu de l'emploi dans l'armée; je lui avais même donné à son départ quarante mille sesterces pour se monter et s'équiper; et je n'ai reçu depuis ni lettre de lui, ni nouvelles de sa mort. On ne sait s'il a été tué par ses gens, ou avec eux. Ce qui est certain, c'est que ni lui ni aucun d'eux n'a reparu. Plaise au ciel qu'il n'en soit pas ainsi de Robustus! Cependant prions Scaurus de venir : c'est le moins qu'on puisse accorder à vos instances, aux généreuses prières d'un fils, dont l'ardeur à rechercher son père est à la fois si tendre et si généreuse. Puissent les dieux le lui faire retrouver, comme il a retrouvé déjà celui qui l'accompagnait ! Adieu.

 

Texte 17 : LA FIN DU MONDE (6, 20, 12-15) (première partie)

Le 24 août 79, Pline le Jeune est à Misène avec sa mère et son oncle Pline l'Ancien. Le Vésuve entre en éruption et Pline l'Ancien, à la fois par curiosité scientifique et dans l'intention de sauver des vies, prend la mer vers la zone sinistrée. Il ne reviendra pas.
Pendant ce temps, Pline le Jeune reste à Misène. Même s'il n'est pas sur les lieux de la catastrophe, il en ressent les effets. Le tremblement de terre se fait violent : il faut fuir de la maison.

Tum mater orare, hortari, iubere quoquo modo fugerem; posse enim iuvenem, se et annis et corpore gravem bene morituram, si mihi causa mortis non fuisset. Ego contra salvum me nisi una non futurum; dein manum eius amplexus addere gradum cogo. paret aegre incusatque se quod me moretur.
Iam cinis, adhuc tamen rarus. respicio; densa caligo tergis imminebat, quae nos torrentis modo infusa terrae sequebatur. "Deflectamus", inquam, "dum videmus, ne in via strati comitantium turba in tenebris obteramur." Vix consideramus, et nox non qualis inlunis aut nubila, sed qualis in locis clausis lumine exstincto.

orare, hortari, iubere inf. de narration
[dicebat me] posse ...
Ego [dicebam]

addo, is, ere, didi, ditum : ajouter
adhuc, inv. : jusqu'ici, encore maintenant
aegre, adv. : avec peine
amplecti, or, eris, exus sum : prendre
annus, i, m. : année
aut, conj. : ou, ou bien
bene, adv. : bien
caligo, inis, f. : le nuage
causa, ae, f. : cause
cinis, eris, m. : cendre
claudo, is, ere, clausi, clausum : fermer
cogo, is, ere, coegi, coactum : assembler, forcer
comitor, aris, ari : accompagner
considero, as, are : examiner,
contra, adv : au contraire ; prép+acc : contre
corpus, oris, n. : corps
deflecto, is, ere, flexi, flexum
: tourner
dein, inv. = deinde : ensuite
densus, a, um : épais, dense
do, das, dare, dedi, datum : donner
dum, inv. : tant que
ego, mei : je
enim, inv. : car, en effet
et, inv. : et
exstingo, is, tinxi, tinctum : éteindre
fugio, is, ere, fugi : s'enfuir, fuir
gradus, us, m. : pas, degré
gravuis, e : sérieux, triste, lourd, terrible
hortor, aris, ari : exhorter, engager à
iam, inv. : déjà, à l'instant
immineo, es, ere, -, - : menacer, être imminent
in, prép. : (acc. ou abl.) dans, sur, contre
incuso, as, are : accuser, reprocher, blâmer
infundo, is, ere, fudi, fusum : répandre
inlunis, e : sans lune
inquam, v. : dis-je
is, ea, id : ce, cette
iubeo, es, ere, iussi, iussum : ordonner
iuvuenis, is, m. : jeune homme
locus, i, m. : lieu
lumen, inis, n. : la lumière, la lampe
maneo, es, ere, mansi, mansum : rester
manes, ium, f. : les mânes, les âmes des morts
manus, us, f. : main
mater, tris, f. : mère
modo, adv. : 1. à l'instant, tout dernièrement 2. seulement
modus, i, m. : manière
morituram : de mori
moror, aris, ari : s'attarder
mors, mortis, f. : mort
ne, inv. : pour que... ne... pas, de peur que, que
nisi, inv. : si... ne... pas ; excepté
non, neg. : ne...pas
nos, nos : nous
nox, noctis, f. : nuit
nubilum, i, n. : (employé au pluriel nubila, orum) les nuages
obtero, is, ere, trivi, tritum : écraser
oro, as, are : prier
pareo, es, ere, ui, itum : obéir
paro, as, are : préparer
possum, potes, posse, potui : pouvoir
qualis, e : tel que
qui, quae, quod : qui
quod, conj. : parce que
quoquo, inv. : quoquo modo = comment
rarus, a, um : rare
respicio, is, ere, spexi, spectum : regarder en arrière, tourner son regard vers
salvuus, a, um : en bonne santé
se, pron. réfl. : se, soi
sed, conj. : mais
sequor, eris, i, secutus sum : suivre
si, conj. : si
sterno, is, ere, stravui, stratum : étendre par terre
sum, es, esse, fui : être
tamen, adv. : cependant
tenebra, ae, f. : voir tenebrae, arum, f. : les ténèbres, l'obscurité
tergum, i, n. : dos
terra, ae, f. : terre
torrens, entis, f. : le torrent
tum, adv. : alors
turba, ae, f. : désordre, émoi, foule
turbo, as, are : troubler
una, adv. : ensemble
unus, a, um : un seul, un
via, ae, f. : route, chemin, voyage
video, es, ere, vidi, visum : voir
vix, inv. : à peine

 

Texte 17 : LA FIN DU MONDE (6, 20, 12-15) (seconde partie)

Audires ululatus feminarum, infantum quiritatus, clamores virorum; alii parentes, alii liberos, alii coniuges vocibus requirebant, vocibus noscitabant; hi suum casum, illi suorum miserabantur; erant qui metu mortis mortem precarentur; multi ad deos manus tollere, plures nusquam iam deos ullos aeternamque illam et novissimam noctem mundo interpretabantur. Nec defuerunt qui fictis mentitisque terroribus vera pericula augerent.

audires tu aurais pu entendre

ad, inv. : vers, à, près de
aeternus, a, um : éternel
alius, a, ud : autre, un autre
audio, is, ire, ivi, itum : entendre, ouir
augeo, es, ere, auxi, auctum : augmenter, accroître
cado, is, ere, cecidi, casum : tomber
casus, us, m. : hasard
clamor, oris, m. : clameur, cri
coniux, iugis, f. : l'épouse
desum, es, esse, defui : manquer
deus, i, m. : dieu
et, inv. : et
femina, ae, f. : femme
fingo, is, ere, finxi, fictum : façonner, feindre
hic, haec, hoc : ce, cette
iam, inv. : déjà, à l'instant
ille, illa, illud : ce, cette
infans, antis, m. : bébé
interpretor, aris, ari : expliquer, interpréter
liberi, orum, m. : les enfants
manus, us, f. : main
mentior, iris, iri, titus sum : mentir
metus, us, m. : peur, crainte
miseror, aris, ari : compatir
mors, mortis, f. : mort
multus, a, um : en grand nombre (surtout au pl. : nombreux)
mundus, a, um : propre
mundus, i, m. : le monde
nec, neque = et non , et...ne...pas
noscito, as, are : reconnaître
novissimus, a, um : tout récent
novus, a, um : nouveau
nox, noctis, f. : nuit
nusquam, inv. : nulle part
parens, entis, m. : parent
pareo, es, ere, ui, itum : obéir
periculum, i, n. : danger
plures, plura : plus de, plus nombreux
plus, pluris : plus (au pluriel plures,a : un grand nombre)
precor, aris, ari : prier, supplier
qui, quae, quod : qui
quiritatus, us, m. : la plainte
requiro, is, ere, quisivi, quisitum : rechercher, demander, regretter l'abscence de
sum, es, esse, fui : être
suus,a, um : son
terror, oris, m. : la peur, la terreur
tollo, is, tollere, sustuli, sublatum : enlever, voler
ullus, a, um : aucun
ululatus, us, m. : le hurlement
vereor, eris, eri, veritus sum : craindre
verus, a, um : vrai
vir, viri, m. : homme (par opp. à femme)
vox, vocis, f. : voix, parole, mot

 

Réfléchissons ...

1. Quelles sont les motivations qui dictent les comportements de Pline et de sa mère au début du texte ?

2. Que se passe-t-il quand ils sont sortis de la maison ?

a) du point de vue des phénomènes naturels;

b) du point de vue des réactions de la population.

3. Pline et les autres adoptent-ils la bonne conduite à suivre en de telles circonstances?

4. Quand Pline voit la situation s'aggraver, que propose-t-il ? A-t-il raison ?

5. A partir de audires ..., le texte ne peut plus évoquer que les sons. Fais-en le relevé le plus complet et le plus précis possible.

6. Ne pourrais-tu pas résumer en un mot le dernier paragraphe ?

Création

Après l'événement, la mère de Pline raconte cette terrible journée comme elle l'a vécue. Veille bien à faire apparaître une vision différente de celle de Pline. Immanquablement, la mère portera un jugement sur l'attitude de son fils.

ÉRUPTION DU VÉSUVE ET MORT DE PLINE L'ANCIEN (à Tacite).

Vous me priez de vous parler de la fin de mon oncle pour être en mesure de la raconter plus fidèlement à la postérité. Je vous en suis reconnaissant car je sais que cette mort, ainsi répandue en tous lieux par vos écrits, connaîtra une inaltérable renommée.
Il a bien pu périr dans la dévastation des terres les plus florissantes, il a bien pu disparaître, avec les populations, avec les villes, dans un cataclysme mémorable bien propre à perpétuer son souvenir, il a bien pu nous laisser des ouvrages nombreux et mémorables : pourtant, par l'immortalité promise à vos écrits, la sienne n'en sera que plus durable. A mes yeux, bien heureux sont ceux qui ont reçu des dieux le privilège d'accomplir des actions dignes d' être écrites, bien heureux sont ceux qui ont le don d' écrire des ouvrages dignes d'être lus, mais bien plus heureux encore ceux qui peuvent faire l'un et l'autre. Or, c'est parmi ceux-ci que mon oncle figurera, grâce à ses propres ouvrages et aux vôtres. C'est pourquoi j'accepte avec empressement, et même je sollicite, la mission que vous me confiez.
Il était alors à Misène et commandait personnellement la flotte. Le 24 août (79), environ la septième heure, il apprend par ma mère qu'apparaît un nuage d'une grandeur et d'une apparence extraordinaires. Il avait pris son bain de soleil, son bain froid ; il avait légèrement déjeuné, puis sur son lit de repos il travaillait. Alors il réclame ses sandales, gagne un lieu élevé d'où il serait en mesure de mieux examiner ce prodige. Une nuée - de si loin on ne pouvait dire de quel mont elle venait, on ne sut qu' ensuite qu' elle sortait du Vésuve -, une nuée donc apparaissait, qui par son aspect et sa forme rappelait un arbre et plus précisément un pin. En effet, dressée tel un tronc svelte, elle semblait étendre ses rameaux ; sans doute, c'est ce que je crois, avait-elle été d'abord projetée en l'air dès son origine par la colonne d'air, puis celle-ci étant retombée, sans soutien ou sous son propre poids, elle devenait évanescente, s'élargissant, très blanche ici, ailleurs poussiéreuse et souillée par la terre et la cendre qu'elle avait
soulevées.
Tout cela parut à mon oncle, grave et digne d'être observé de près, comme il convient à un homme érudit. Il fait préparer un bateau liburnien; il m'offre de l'accompagner, si je désire aller avec lui ; et moi, de lui répondre que je préfère poursuivre mon travail, il se trouvait justement que lui-même m'en avait donné la matière. Il sortait de chez lui ; on lui apporte un billet de Rectina, épouse de Cascus, affolée par l'imminence du danger; sa villa était en contre-bas et elle ne pouvait s'échapper qu’en bateau; elle suppliait qu'on la sauvât d'un péril si pressant. Mon oncle modifie alors son projet et il poursuit par héroïsme ce qu'il avait commencé par curiosité de savant. Il fait mettre en mer des quadrirèmes et y prend place lui-même, désireux de secourir, outre Rectina, un grand nombre de gens que les agréments du rivage avaient attirés en ce lieu. Il se hâte vers le lieu que chacun fuit et met tout droit le cap vers le sinistre ; et il était alors si éloigné de craindre qu'il prenait en note ou dictait lui-même les moindres phases et les moindres aspects de cette dévastation, dans l'instant même où il les discernait.
A ce moment la cendre tombait sur les bateaux, plus épaisse et plus chaude à mesure qu'ils approchaient, et il tombait de la pierre ponce et des cailloux noircis, brûlés et pulvérisés par le feu, tandis qu'un bas-fond et des rochers effondrés obstruaient le rivage. Il hésita un instant, incertain s'il reviendrait en arrière ; puis, à son pilote qui lui conseillait ainsi, il dit enfin : "La fortune sourit aux courageux : vogue vers la demeure de Pomponianus." Celui-ci était alors à Stabies, à l'opposé du golfe car le rivage se repliant sur lui-même forme une insensible courbe dans laquelle pénètre la mer. Là, à la vue du péril, encore éloigné mais visible et de plus en plus proche et menaçant, Pomponianus avait fait charger des paquets sur ses bateaux, bien décidé à s'éloigner si le vent contraire s'apaisait. Mon oncle, à qui ce même vent avait donc été très favorable, l'aborde, embrasse son ami tout tremblant, le réconforte, l'encourage et pour apaiser ses craintes en affichant sa sérénité, il se fait porter au bain ; puis il en sort, prend place à table, soupe avec gaieté ou du moins, et cela n'est pas moins grand, simule la gaieté.
En cet instant, au sommet du Vésuve brillaient en nombre de points de larges langues et de hautes colonnes de feu que l'obscurité de la nuit rendait plus rougeoyantes et plus vives encore. Des foyers restés allumés chez les paysans dans leur précipitation à fuir et des villas abandonnées brûlaient dans la solitude : c'est ce que mon oncle disait et répétait, dans le désir d'apaiser les angoisses. Alors il prit du repos et dormit du sommeil le plus complet : en effet, ceux-là mêmes qui allaient et venaient sur son seuil distinguaient sa respiration rendue plus profonde et sonore par sa corpulence. Pourtant, la cour qui donnait sur son appartement n'était déjà qu'un amas de cendres et de pierres ponces qui s' élevaient si haut qu'il ne pouvait demeurer plus longtemps dans sa chambre sans crainte de n'en plus pouvoir sortir. On l'éveille, il retrouve Pomponianus et tous ceux qui avaient veillé toute la nuit. Tous se consultent : faut-il demeurer à l'abri ou errer en un lieu découvert. Par des tremblements de terre répétés et amples les maisons étaient secouées ; elles semblaient arrachées de leurs fondements et oscillaient de droite et de gauche. En terrain découvert au contraire, pleuvaient des fragments de pierres ponces, légers et poreux certes, mais qui semblaient redoutables. C'est pourtant à cette solution qu'on se rallia, tout bien considéré: chez mon oncle, ce fut par raison, chez les autres, par comparaison des périls. On se pose sur la tête des oreillers retenus par des linges : ce fut leur protection contre tous ces projectiles.
Or, c' était le jour, mais tout alentour une nuit, plus épaisse qu'aucune autre, régnait, pourtant atténuée par un grand nombre de feux et de diverses lumières. On décida de se rendre au rivage pour voir sur place s'il était devenu possible d'embarquer. Là, on étendit un linge; mon oncle s'y coucha. Il réclama à satiété de l'eau fraîche et la but ; mais à l'approche des flammes et à l'odeur du soufre qui les annonce, ses compagnons prennent la fuite non sans l'éveiller. Il veut se lever avec l'aide de deux esclaves : aussitôt il retombe. Selon moi, l'air épaissi par la cendre obstrua sa respiration et son larynx, naturellement délicat, resserré et souvent oppressé. Le jour suivant, le troisième depuis celui qu'il avait vu se lever pour la dernière fois, on trouva son corps intact, parfaitement conservé et couvert des habits qu'il avait revêtus en partant; il ressemblait, plus qu'à un mort, à un homme endormi.
Pendant ce temps, à Misène, ma mère et moi... Mais cela n'a plus rien à voir avec l'histoire et vous n'avez sollicité de moi rien d'autre que le récit de sa mort. Je m'arrêterai donc, n'ajoutant que ceci: je vous ai rapporté les événements et leur enchaînement, dont je fus le témoin, et ceux qui me furent relatés dans l'instant, alors que les souvenirs sont encore tout frais. Il vous appartient d'y puiser librement. Car une lettre n'est nullement une histoire; écrire à un ami n'est pas écrire pour le grand public. Adieu.

(VI,16)

L'ÉRUPTION DU VÉSUVE, PLINE ET SA MÈRE (à Tacite).

Vous me dites que la lettre par laquelle je vous ai conté, selon votre désir, la mort de mon oncle, vous a donné le désir de savoir quelles craintes et même quels dangers j'ai vécus à Misène où j'étais resté, j'en étais là en effet de mon récit quand je fus interrompu. " Bien que mon âme frémisse à ce seul souvenir, je commencerai..."
Mon oncle parti, je donnai tout mon temps au travail, j'étais d'ailleurs resté pour cela ; ensuite, ce fut le bain, le souper, un sommeil agité et bien court. Durant plusieurs jours, on avait ressenti des signes avant-coureurs d'un tremblement de terre, mais sans en être effrayés car c'est chose courante en Campanie. Mais cette nuit-là, la secousse fut si violente que tout semblait non pas trembler, mais se retourner. Ma mère accourt dans ma chambre, je me levais justement dans l'intention de l'éveiller si elle dormait. Nous nous assîmes dans la cour de la maison qui ne séparait les bâtiments de la mer que par un étroit espace. Je ne sais si je dois parler de courage ou d'imprudence, car j'avais alors dix-huit ans ; je me fis apporter un exemplaire de Tite-Live et, comme si je m'étais trouvé au calme, je lus et même je notai des citations, comme j'avais commencé de le faire. Arrive un ami de mon oncle, tout juste de retour d'Espagne et désireux de le rencontrer. En nous voyant assis, ma mère et moi, et découvrant ma lecture, il lui reproche, à elle, sa passivité, et à moi, ma tranquillité; je n'en demeure d' ailleurs pas moins attentif à ma lecture.
C' était déjà la première heure et la lumière était encore incertaine et comme affaiblie; déjà les murs étaient ébranlés de fortes secousses, et dans ce lieu, découvert certes mais fort étroit, le danger d'être écrasés se faisait pressant et inévitable. C'est alors qu'il nous sembla bon de quitter la ville; la foule nous suit, consternée, et, dans un réflexe qui dans la peur semble de la sagesse, elle prend notre parti de préférence au sien propre et ainsi notre troupe s'accroît, nous presse et précipite notre fuite. Loin des habitations, nous faisons halte et là, bien des surprises, bien des angoisses nous guettent. Les voitures que nous avions fait emmener avec nous, sur ce terrain pourtant parfaitement uni et plat, avançaient tout en désordre et, même calées avec des pierres, ne pouvaient être arrêtées. On voyait d'autre part la mer retirée et comme tenue à l'écart du rivage par les secousses de la terre. Le rivage était devenu plus spacieux en effet et toutes sortes d'animaux marins étaient échoués sur le sable sec. Derrière nous, une nuée sombre et effrayante, zébrée par les sinuosités des vapeurs incandescentes qui serpentaient, s'ouvrait comme pour libérer d'énormes traînées de flammes; cela ressemblait à des éclairs mais bien plus grands.
C'est alors que cet ami d'Espagne dont j'ai parlé, nous dit d'un ton plus impatient et plus vif. "Si votre frère vit, si votre oncle vit, il vous veut sains et saufs ; s'il a péri, il a voulu que vous lui surviviez. Pourquoi tarder davantage à prendre la fuite ?" Nous nous déclarâmes incapables de songer à notre propre salut sans rien savoir de son sort. Sans plus tarder, il nous quitte brusquement et prend en toute hâte sa course pour fuir le danger. Peu après, la nuée envahit la terre, couvre l' étendue de la mer, dérobant Caprée à nos regards et jusqu'à la pointe qui s'avance à Misène. Alors ma mère me prie, m'exhorte, m'ordonne de fuir par n'importe quel moyen ; c' était encore possible pour un jeune homme, mais alourdie par l'âge et 1'embonpoint, elle voyait sa propre mort comme un soulagement si elle ne causait pas la mienne. Je me montre bien décidé à ne fuir qu'avec elle : je saisis son bras et hâte son pas. Elle peine et se reproche de me retarder. A l'instant, la cendre tombe, mais peu abondante; une fumée épaisse et noire avance sur nous, tel un torrent qui aurait roulé sur le sol, à notre poursuite. "Quittons ce chemin, dis-je à ma mère, pendant qu'on y voit encore, de peur de tomber et d'être écrasés par ceux qui marchent derrière nous dans les ténèbres." Nous étions à peine assis que la nuit s'étendit, non pas telle qu'une nuit sans lune et lourde de nuages, mais bien l'obscurité d'une chambre toute close, sans la moindre lumière. Les femmes gémissaient, les bébés vagissaient, les hommes criaient, les uns appelant un père, une mère, les autres, leurs enfants, d'autres leur épouse, chacun s' efforçant de se reconnaître par la voix. Certains pleuraient sur leurs propres malheurs, d'autres sur celui d'autrui, et d'autres encore, dans l'angoisse de la mort, appelaient la mort. Beaucoup levaient les mains au ciel, mais plus nombreux étaient ceux qui affirmaient que les dieux n'étaient plus, et que c'était la dernière, l'éternelle nuit. Il s'en trouva aussi pour ajouter encore aux dangers réels des terreurs imaginaires et chimériques. Tel racontait qu'à Misène d'où il venait, un édifice s'était écroulé et qu'un autre brûlait; ce n'étaient qu'inventions mais on les croyait. Alors il parut une faible lueur, mais elle semblait bien annoncer non pas le jour mais l'approche du feu. Par bonheur, celui-ci s'arrêta à quelque distance et ce furent de nouveau les ténèbres, la cendre, plus épaisse et plus abondante; on devait se lever par moments et se secouer pour éviter d'en être recouverts ou de se trouver écrasés par son poids. Je me vanterais bien ne n'avoir exhalé ni gémissement ni parole de faiblesse en de tels dangers, si je n'avais puisé une sûre consolation à ma perte, en songeant que je disparaissais avec le monde et le monde avec moi, humble mortel.
Pourtant la traînée sombre dont j'ai parlé, se dissipa, s'éclaircit peu à peu, telle une fumée ou un brouillard; le jour reparut, et même le soleil, mais dans la coloration jaunâtre propre aux éclipses. A nos yeux troublés encore, tout se présentait bouleversé, et recouvert d'une cendre abondante comme de neige. De retour à Misène, nous reprîmes des forces tant bien que mal.

 

Texte 18 : ROME SOUS EAU ! (8, 17)

Hic assiduae tempestates et crebra diluvia. Tiberis alveum excessit et demissioribus ripis alte superfunditur. Anio, delicatissimum fluminum, magna ex parte nemora quibus inumbratur fregit et rapuit; subruit montes et decidentium mole pluribus locis clausus, dum amissum iter quaerit, impulit domos ac se super ruinas eiecit atque extulit. Viderunt [ei] quos excelsioribus terris illa tempestas deprehendit, alibi divitum apparatus et gravem supellectilem, alibi instrumenta ruris, ibi boves, aratra, rectores, hic armenta, atque inter haec arborum truncos aut villarum trabes atque tecta varie lateque fluitantia.

ac, atque, conj. : et, et aussi
alibi,
adv. : dans un autre en droit
alo, is, ere, alui, altum
: nourrir
alte,
inv. : en haut, de haut
altus, a, um
: haut, profond
alvueus, i,
m. : le ventre, le lit d'un fleuve
amitto, is, ere, misi, missum
: laisser échapper, perdre
Anio, enis,
m. : l'Anio (affluent du Tibre)
apparatus, us, m. : le matériel, la préparation, les préparatifs
aratrum, i
, n. : la charrue
arbor, oris,
f. : arbre
armentum,
i, n. : le troupeau de gros bétail
assiduus, a, um
: assidu, continuel
at, inv
. : mais
atque,
inv. : mais, et
aut,
conj. : ou, ou bien
bos, bovis,
m. : bœuf
claudo, is, ere, clausi, clausum
: fermer
creber, bra, brum
: fréquent. pl. nombreux
decido, is, ere, decidi, decisum
: tomber
delicatus, a, um
: charmant
demissus, a, um
: bas
deprehendo, is, ere, hendi, hensum
: surprendre
diluvium, ii,
n. : la pluie abondante
dives, itis
, m. : le riche (adj. riche)
do, das, dare, dedi, datum
: donner
domus, us
: la maison
dum,
inv. : tant que
effero, fers, ferre, extuli, elatum
: porter dehors, mener jusqu'au bout
eiicio, is, ere, eieci, eiectum
: jeter dehors, expulser
et,
inv. : et
ex,
prép. : (+abl) hors de, de
excedo, is, ere, cessi, cessum
: sortir, dépasser
excelsus, a, um
: élevé
fero, fers, ferre, tuli, latum
: porter, supporter, rapporter
fluito, as, are :
flotter, surnager
flumen, inis,
n. : cours d'eau, fleuve, rivière
frango, is, ere, fregi, fractum
: briser
gravis, e
: sérieux, triste, lourd, terrible
hic, haec, hoc
: ce, cette
hic,
inv. : ici
ibi,
adv. : là
ille, illa, illud
: ce, cette
impello, is, ere, puli, pulsum
: pousser à, exciter à
instrumentum, i,
n. : l'instrument, l'outil
inter,
prép : (acc) parmi, entre
inumbro, as,
are : ombrager, donner de l'ombre
is, ea, id
: ce, cette
iter, itineris
, n. : chemin
late
, adv. : au loin
lateo, es, ere, latui
: se chacher
latus, a, um
: large
locus, i,
m. : lieu
magnus, a, um
: grand
moles, is,
f. : la masse, la digue, le môle
mons, montis,
m. : montagne
nemus, oris
, n. : la forêt, le bois sacré
pars, partis
, f. : partie, côté
plures, plura
: plus de, plus nombreux
plus, pluris
: plus (au pluriel plures,a : un grand nombre)
quaero, is, ere, sivi, situm
: chercher, demander
qui, quae, quod
: qui
rapio, is, rapui, raptum
: prendre, saisir
rector, oris,
m. : celui qui conduit
ripa, ae,
f. : rive
ruina, ae,
f. : l'écroulement, la ruine, le désastre
rus, ruris,
n : la campagne
se,
pron. réfl. : se, soi
subruo, is, ere, rui, rutum
: saper
supellectilis, is,
f. : le mobilier
super,
inv. +abl. : au dessus de, au sujet de
superfundo, is, ere, fusi, fusum
: au passif : déborder
tectum, i,
n. : le toit, la maison
tempestas, atis,
f. : le temps (beau ou mauvais)
terra, ae
, f. : terre
Tiberis, is,
m. : le Tibre
trabs, trabis,
f. : la poutre
truncus, a, um
: mutilé
truncus, i,
m. : le tronc
varie,
adv. : d'une manière variée
varius, a, um
: varié, divers
video, es, ere, vidi, visum
: voir
villa, ae,
f. : la maison de campagne

Réfléchissons ...

1. Le récit que fait Pline de la catastrophe est basé sur des contrastes (entre la situation normale et la situation exceptionnelle). Relève-les.

2. Y a-t-il eu des victimes ? Justifie ta réponse.

Création

Journaliste à ROME-MATIN, tu rends compte de l'événement. N'oublie pas que la collecte de renseignements sûrs est problématique.

TRADUCTION.

[8,17] XVII - Pline à Macrinus.
Avez-vous aussi dans le climat que vous habitez une températerre rude et cruelle? On ne voit à Rome qu'orages et qu'inondations. Le Tibre est sorti de son lit et s'est répandu sur ses rives basses. Quoique le canal que la sage prévoyance de l'empereur a fait faire en ait reçu une partie, il remplit les vallées, il couvre les campagnes ; partout où il trouve des plaines, elles disparaissent sous ses eaux. De là il resulte que, rencontrant les rivières qu'il a coutume de recevoir, de confondre et d'entraîner avec ses ondes, il les force à retourner en arrière, et couvre ainsi de flots étrangers les terres qu'il n'inonde pas de ses propres flots.
L'Anio, la plus douce des rivières, et qui semble comme invité et retenu par les belles villas bâties sur ses bords, a déraciné et emporté les arbres qui le couvraient de leur ombrage. Il a renversé des montagnes, et, se trouvant arrêté par leur chute en plusieurs endroits, il a cherché le passage qu'il s'était fermé, il a abattu des maisons, et s'est élevé sur leurs ruines. Ceux qui habitent les lieux élevés, à l'abri de l'inondation, ont vu flotter, ici de riches débris et des meubles précieux, là des ustensiles de campagne; d'un côté, des boeufs, des charrues, des bouviers ; de l'autre, des troupeaux abandonnés à eux-mêmes ; et, au milieu de tout cela, des troncs d'arbres, des poutres et des toits. Les lieux même où la rivière n'a pu monter ont eu leur part de ce désastre. Une pluie continuelle et des tourbillons échappés des nues ont fait autant de ravages que le fleuve. Les clôtures qui entouraient de magnifiques villas ont été ruinées et les monuments funèbres renversés. Un grand nombre de personnes ont été noyées, estropiées, écrasées, et le deuil général accroît encore la douleur de ces pertes. Je crains que, là où vous êtes, vous n'ayez essuyé quelque malheur semblable, et je mesure ma crainte à la grandeur du danger. S'il n'en est rien, rassurez-moi au plus vite, je vous en supplie; s'il en est autrement, mandez-le-moi toujours. Car il y a peu de différence entre redouter un malheur et le souffrir : seulement le mal a ses bornes, la crainte n'en a point. On ne s'afflige qu'à proportion de ce qui est arrivé; mais on craint tout ce qui peut arriver. Adieu.