Cicéron
DES SUPRÊMES BIENS ET DES SUPRÊMES MAUX.
EXTRAIT DE DALEMBERT.
L'AMOUR DE SOI, PRINCIPE DE TOUT SACRIFICE APPARENT. Si on appelle bien-être ce qui est au delà du besoin absolu, il s'ensuit que sacrifier son bien-être au besoin d'autrui est le grand principe de toutes les vertus sociales, et le remède à toutes les passions. Mais ce sacrifice est-il dans la nature, et en quoi consiste-t-il ? Sans doute, aucune loi naturelle ou politique ne peut nous obliger à aimer les autres plus que nous ; cet héroïsme, si un sentiment absurde peut être appelé ainsi, ne saurait être dans le cœur humain. Mais l'amour éclairé de notre propre bonheur nous montre comme des biens préférables à tous les autres la paix avec nous-mêmes et l'attachement de nos semblables ; et le moyen le plus sûr de nous procurer cette paix et cet attachement est de disputer aux autres le moins possible la jouissance de ces biens de convention, si chers à l'avidité des hommes ; ainsi l’amour éclairé de nous-mêmes est le principe de tous les sacrifices. EXTRAITS DE SAINT-LAMBERT. I LA CONSCIENCE ET L'OPINION.
Puisque la conscience est l'effet du
jugement que nous portons de nos actions, et que l'opinion dicte souvent nos
jugements, il s'en suit que les actions que nous nous reprochons le plus sont
celles que l'opinion condamne, et que nous nous reprochons rarement, celles
qu'elle ne condamne pas. II EXTRAITS DU CATÉCHISME UNIVERSEL DB SAINT-LAMBERT. SUR L'AMOUR DE SOI.
Demande.
"Qu'est-ce que l'homme ? - Réponse. Un être sensible et raisonnable. III DEVOIRS DE L'HOMME ENVERS LUI-MÊME.
Si tu vivais seul dans une île
abandonnée, l'amour-propre t’ordonnerait d'exercer tes membres pour conserver
tes forces et rester en état de te défendre contre les animaux et d'en faire ta
proie. IV DEVOIRS ENVERS LES HOMMES EN GÉNÉRAL.
Êtes-vous jeune ou vieux, riche ou
pauvre, ou faible, ignorant ou éclairé ? Mortel, vous devez à tous les mortels
d'être juste. V DEVOIRS ENVERS LA FAMILLE.
Il y a un lieu sur la terre où les joies
pures sont inconnues, d'où la politesse est exilée et fait place à l'égoïsme, à
la contradiction, aux injures à demi-voilées ; le remords et l'inquiétude,
furies infatigables, y tourmentent les habitants. Ce lieu est la maison de deux
époux qui ne peuvent ni s'estimer ni s'aimer. EXTRAITS DE VOLNEY. I CONFUSION DE LA LOI MORALE ET DES LOIS PHYSIQUES. C'est une loi de la nature que l'eau coule de haut en bas ; qu'elle cherche son niveau ; qu'elle soit plus pesante que l'air ; que tous les corps tendent vers la terre ; que la flamme s'élève vers les cieux ; qu'elle désorganise les végétaux et les animaux ; que l'air soit nécessaire à la vie de certains animaux ; que, dans certaines circonstances, l'eau les suffoque et les tue ; que certains sucs de plantes, certains minéraux attaquent leurs organes, détruisent leur vie, et ainsi d'une foule d'autres faits, Or, parce que tous ces faits et leurs semblables sont immuables, constants, réguliers, il en résulte pour l'homme autant de véritables ordres de s'y conformer avec la clause expresse d'une peine attachée à leur infraction, ou d'un bien-être attaché à leur observation ; de manière que si l'homme prétend voir clair dans les ténèbres, s'il contrarie la marche des saisons, l'action des climats : s'il prétend vivre dans l'eau sans se noyer, toucher la flamme sans se brûler, se priver d'air sans s'étouffer, boire des poisons sans se détruire, il reçoit de chacune de ces infractions aux lois naturelles une punition corporelle et proportionnée à sa faute ; qu'au contraire, s'il observe et pratique chacune de ces lois dans les rapports exacts et réguliers qu'elles ont avec lui, il conserve son existence et la rend aussi heureuse qu'elle peut l'être : et parce que toutes ces lois, considérées relativement à l'espèce humaine, ont pour but unique et commun de la conserver et de la rendre heureuse, on est convenu d'en rassembler l'idée sous un même mot et de les appeler collectivement la loi naturelle, II CONFUSION DU BIEN MORAL ET DU BIEN PHYSIQUE.
D. Qu'entend-on par mal et bien physique,
mal et bien moral ? III LE COURAGE ET L’INTÉRÊT D. Le courage et la force de corps et d'esprit sont-ils des vertus dans la loi naturelle ? R. Oui, et des vertus très importantes ; car elles sont des moyens efficaces et indispensables de pourvoir à notre bien-être (04). IV L'AMOUR PATERNEL ET L'INTÉRÊT.
D. En quoi ta tendresse paternelle
est-elle une vertu pour les parents ? V LA CHARITÉ ET L'INTÉRÊT. D. Comment la charité ou l'amour du prochain est-il un précepte ?
R. Par raison d'égalité et de réciprocité
; car lorsque nous nuisons à autrui, nous lui donnons le droit de nous nuire à
son tour. Ainsi, en attaquant l'existence d'autrui, nous portons atteinte à la
nôtre par l'effet de la réciprocité. Au contraire, en faisant du bien à autrui ;
nous avons lieu et droit d'en attendre l'échange, l'équivalent, et tel est le
caractère de toutes les vertus sociales d'être utiles à l'homme qui les pratique
par le droit de réciprocité qu'ils donnent sur ceux à qui elles ont profité... (01) Saint-Lambert ne peut s'empêcher ailleurs de se contredire lui-même : L'homme vertueux jouit du sentiment de sa supériorité et du témoignage de sa conscience. Caton avait plus d'ennemis dans Rome, que Clodius, cependant il ne régnait pas dans l'âme de Clodius le calme qui régnait dans l'âme de Caton. Celui-ci, dans Utique même, et au moment de se donner la mort, n'aurait pus voulu être à la place de César. " (02) On a remarqué avec raison que Saint-Lambert confond ici la conscience avec l'estomac. (03) Il s'agit des domestiques. (04) La lâcheté serait quelquefois un moyen encore plus efficace de pourvoir à notre bien-être. |