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PRO ARCHIA

Ce discours a été expliqué littéralement, traduite en français et annoté par M. Lesage, professeur au lycée Charlemagne.

Imprimerie de Ch. Lahure (ancienne maison Crapelet) 
rue de Vaugirard, 9, près de l'Odéon.

LES 
AUTEURS LATINS

EXPLIQUÉS D’APRÈS UNE MÉTHODE NOUVELLE

PAR DEUX TRADUCTIONS FRANÇAISES

L’UNE LITTÉRALE ET JUXTALINÉAIRE PRÉSENTANT LE MOT À MOT FRANÇAIS 
EN REGARD DES MOTS LATINS CORRESPONDANTS 
L’AUTRE CORRECTE ET PRÉCÉDÉE DU TEXTE LATIN

avec des sommaires et des notes

PAR UNE SOCIÉTÉ DE PROFESSEURS

ET DE LATINISTES

CICÉRON

PLAIDOYER POUR LE POETE ARCHIAS


PARIS

LIBRAIRIE DE L. HACHETTE ET Cie

RUE PIERRE-SARRAZIN, N° 14

(Près de l'École de Médecine)

1854

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AVIS

RELATIF A LA TRADUCTION JUXTALINEAIRE

On a réuni par des traits, dans la traduction juxtalinéaire, les mots français qui traduisent un seul mot latin.
On a imprimé en italiques les mots qu'il était nécessaire d'ajouter pour rendre intelligible la phrase française, et qui n'avaient pas leur équivalent dans le latin.
Enfin, les mots placés entre parenthèses, dans le français, doivent être considérés comme une seconde explication, plus intelligible que la version littérale.

ARGUMENT ANALYTIQUE.

I. Exorde insinuant. - L'orateur, qui dans son enfance a été initié aux belles-lettres par Archias, doit faire tous ses efforts pour le sauver.

II. Parlant pour un poète devant des gens instruits, il s'étendra sur les avantages des lettres. - Proposition et division : 1° Archias est citoyen romain ; 2° il mérite de l'être.

III. Narration. - Archias devient citoyen de plusieurs villes d'Italie. A Rome, il est accueilli par les meilleures familles. Lucullus le fait nommer citoyen d'Héraclée.

IV. Confirmation : première partie. - L'autorité de Lucullus et le témoignage des députés d'Héraclée démontrent qu'Archias est citoyen de cette ville. L'absence des registres ne prouve rien. Domicilié à Rome, il a fait sa déclaration.

V. Archias, citoyen de plusieurs villes, ne peut être privé de son droit, parce qu'il se contente d'appartenir à Héraclée. Absent à l'époque des derniers recensements, il n'a pu y être compris.

VI. Seconde partie. - L'affection de l'orateur pour Archias est causée par le charme de sa société. L'étude des lettres fortifie son coeur contre les orages politiques.

VII. Objection : Les grands hommes célébrés par les lettres n'y ont pas excellé. - Réponse par le raisonnement et par les faits. Brillant éloge des lettres.

VIII. Talent d'Archias. Les poètes doivent font à leur génie ; ils sont eux-mêmes des présents des dieux.

IX. Les Romains rejetteront-ils Archias, qui leur a consacré tous ses talents ?

X. La poésie grecque est plus propre que la poésie latine à répandre au loin la gloire du peuple romain. Sans Homère, Achille serait oublié.

XI. Tous les hommes aiment la gloire, qui est la passion des grandes âmes et le mobile des actions de l'homme.

XII. Péroraison. - Que les juges conservent à Rome un citoyen dont le talent a célébré la gloire de la patrie.

 

2-3

M. TULLII CICERONIS                          CICÉRON.
PRO                                                     PLAIDOYER
A. L. ARCHIA POETA                            POUR
ORATIO                                               LE POÈTE ARCHIAS.

I. Si quid est in me ingenii, judices, quod sentio quam sit exiguum; aut si qua exercitatio dicendi, in qua me non infitior mediocriter esse versatum ; aut si hujusce rei ratio aliqua, ab optimarum artium studiis ac disciplina profecta, a qua ego nullum confiteor aetatis meae tempus abhorruisse : earum rerum omnium vel in primis hic A. Licinius fructum a me repetere prope suo jure debet. Nam quoad longissime potest mens mea respicere spatium praeteriti temporis, et pueritiae memoriam I. Judices, si quid 
ingenii 
est in me, 
quod sentio 
quam sit exiguum ; 
aut si qua exercitatio 
dicendi, 
in qua non infitior, 
me esse versatum 
mediocriter ; 
aut si aliqua ratio 
hujusce rei, 
profecta a studiis 
ac disciplina 
artium optimarum, 
a qua 
ego confiteor 
abhorruisse 
nullum tempus 
meae aetatis : 
hic A. Licinius 
vel in primis 
debet repetere a me 
jure prope suo 
fructum 
omnium earum rerum. 
Nam repetens inde 
usque quoad mea mens
potest respicere 
longissime
I. Juges, si quelque genre 
de talent 
est en moi, 
lequel je sens 
combien il est exigu ; 
ou si quelque exercice 
de parler est en moi
dans lequel je ne nie pas 
moi avoir été occupé 
médiocrement ; 
ou si quelque habileté est en moi
de cette chose, 
partie (fruit) de la recherche 
et de l'étude 
des arts très-bons, 
étude de laquelle 
j'avoue 
n'avoir en-horreur 
en aucun temps 
de ma vie 
cet A. Licinius 
même dans les premiers (surtout) 
doit réclamer de moi 
avec un droit presque sien 
le fruit 
de toutes ces choses. 
En effet remontant d'ici 
jusque là où mon esprit 
peut regarder-en-arrière le 
plus loin possible
I. Juges, si je possède quelque talent, et je sens toute l'exiguïté du mien, si j'ai acquis quelque expérience dans l'art de la parole, auquel, je ne le nie pas, je me suis passablement exercé, ou si je dois cette habileté, toute faible qu'elle est, à l'étude des belles-lettres, qui, j'en conviens, n'ont manqué d'attraits pour moi à aucune époque de ma vie, c'est surtout Licinius, ici présent, qui a le droit d'en réclamer de moi le fruit. En effet, aussi loin que mon esprit peut remonter dans le passé, et se rappeler le souvenir le plus éloigné

4 - 5

recordari ultimam, inde usque repetens hunc video mihi principem et ad suscipiendam, et ad ingrediendam rationem horum studiorum exstitisse. Quod si haec vox, hujus hortatu praeceptisque conformata, nonnullis aliquando saluti fuit, a quo id accepimus, quo ceteris opitulari, et alios servare possemus, huic profecto ipsi, quantum est situm in nobis, et opem, et salutem ferre debemus.
Ac, ne quis a nobis hoc ita dici forte miretur, quod alia quaedam in hoc facultas sit ingenii, neque haec dicendi ratio aut disciplina : ne nos quidem huic uni studio penitus unquam dediti fuimus. Etenim omnes artes quae ad humanitatem pertinent, habent quoddam commune vinculum, et quasi cognatione quadam inter se continentur. 
II. Sed, ne cui vestrum mirum esse videatur, me in quaestione legitima, et in judicio publico, quum res agatur apud praeto-
spatium temporis praeteriti, 
et recordari 
memoriam ultimam 
pueritiae, 
video hunc 
exstitisse mihi principem 
et ad suscipiendam, 
et ad ingrediendam 
rationem 
horum studiorum. 
Quod si haec vox, 
conformata hortatu praeceptisque hujus, 
fuit aliquando 
saluti nonnullis, 
debemus ferre profecto 
et opem, et salutem, 
quantum est situm 
in nobis, 
huic ipsi a quo accepimus id,
quo possemus 
opitulari ceteris, 
et servare alios.
Ac, ne quis 
miretur forte 
hoc dici a nobis ita, 
quod sit in hoc 
quaedam facultas ingenii 
alia, 
neque haec ratio dicendi 
aut disciplina 
ne nos quidem unquam 
fuimus dediti penitus 
huic uni studio. 
Etenim omnes artes 
quae pertinent 
ad humanitatem, 
habent quoddam vinculum
commune, 
et continentur inter se 
quasi quadam cognatione.
II. Sed, 
ne videatur esse mirum 
cui vestrum, 
in quaestione legitima, 
et in judicio publico,
l'espace du temps passé, 
et se rappeler 
le souvenir le plus reculé 
de mon enfance, 
je vois celui-ci 
avoir été pour moi un guide 
et pour entreprendre, 
et pour aborder 
le plan 
de ces études. 
Que si cette voix, 
formée par l'exhortation 
et par les leçons de celui-ci, 
a été quelquefois 
à salut à quelques-uns, 
nous devons porter assurément 
et secours, et salut, 
autant qu'il est situé 
en nous, 
à celui même duquel nous avons reçu ce moyen 
par lequel nous pourrons 
porter-secours aux autres (aux uns), 
et sauver les autres.
Et , de peur que quelqu'un 
ne s'étonne par hasard 
ceci être dit par nous ainsi, 
parce qu'il est (il y a) dans cet homme 
une certaine faculté de talent 
autre que ta mienne
et non cette profession de parler 
ou cet art de la parole 
et
pas même nous jamais 
nous n'avons été livrés tout à fait 
à cette seule étude. 
Car tous les arts 
qui ont-rapport 
à la culture-de-l'esprit, 
ont un certain lien 
qui leur est commun, 
et se tiennent entre eux 
comme par une certaine parenté.
II. Mais 
pour qu'il ne paraisse être étonnant 
à aucun de vous, 
dans une question légitime, 
et dans un jugement public,
de mon enfance, je le vois m'introduire, le premier, et me guider dans l'étude des belles-lettres. Si donc cette voie qu'animèrent ses encouragements, que formèrent ses leçons, a jamais sauvé quelques citoyens, à celui de qui je tiens les moyens de secourir et de sauver les autres, je dois assurément, autant qu'il est en moi, procurer et secours et salut.
Et pour qu'on ne s'étonne pas de m'entendre parler en ces termes d'un homme qui suit une profession autre que la mienne, qui s'est livré à un genre différent de l'art oratoire, je dirai que moi-même je ne me suis jamais livré tout entier exclusivement à l'étude de l'éloquence. En effet, tous les arts qui ont pour but la culture de l'esprit sont unis entra eux par un lien commun et par une espèce de parenté étroite.
II. Mais, pour qu'il ne paraisse étonnant à aucun de vous, que, dans une question d'état, dans une cause de droit public, plaidée

6- 7

rem populi romani, lectissimum virum, et apud severissimos judices, tanto conventu hominum ac frequentia, hoc uti genere dicendi, quod non modo a consuetudine judiciorum, verum etiam a forensi sermone abhorreat, quaeso a vobis, ut in hac causa mihi detis hanc veniam, accommodatam huic reo, vobis, quemadmodum spero, non molestam ; ut me, pro summo poeta atque eruditissimo homine dicentem, hoc concursu hominum litteratissimorum, hac vestra humanitate, hoc denique praetore exercente judicium, patiamini de studiis humanitatis ac litterarum paulo loqui liberius, et in ejusmodi persona, quae, propter otium ac studium, minime in judiciis periculisque tractata est, uti prope novo quodam et inusitato genere dicendi.
Quod si mihi a vobis tribui concedique sentiam, perficiam profecto, ut hunc A. Licinium non modo non segregandum,
quum res agatur 
apud praetorem 
populi romani, 
virum lectissimum, 
et apud judices 
severissimos, 
tanto conventu 
ac frequentia hominum, 
me uti 
hoc genere dicendi, 
quod abhorreat 
non modo 
a consuetudine 
judiciorum, 
verum etiam 
a sermone forensi, 
quaeso a vobis, 
ut in hac causa 
detis mihi hanc veniam,
accommodatam huic reo, 
non molestam vobis,
quemadmodum spero ; 
ut patiamini me, 
dicentem 
pro summo poeta 
atque homine eruditissimo 
hoc concursu 
hominum 
litteratissimorum, 
hac humanitate vestra, 
denique hoc praetore 
exercente judicium, 
loqui paulo liberius 
de studiis humanitatis 
ac litterarum, 
et in persona ejusmodi, 
quae, propter otium 
ac studium, 
est tractata minime 
in judiciis periculisque, 
uti quodam genere dicendi
prope novo et inusitato.
Si sentiam quod 
tribui concedique 
a vobis mihi, 
perficiam profecto, 
ut putetis hunc A. Licinium
puisque l'affaire se traite 
devant un préteur 
du peuple romain, 
homme trés-choisi, 
et devant des juges 
très-sévères, 
dans une si grande réunion 
et une si grande multitude d'hommes, 
moi me servir 
de ce genre de parler, 
qui s'éloigne 
non-seulement 
de la coutume 
des jugements, 
mais même 
du langage du-barreau, 
je demande de (à) vous, 
que dans cette cause 
vous donniez à moi cette grâce, 
appropriée à cet accusé, 
non à-charge à vous, 
ainsi que je l'espère; 
c'est que vous souffriez moi, 
parlant 
pour un très-grand poëte 
et pour un homme très-érudit, 
dans ce concours 
d'hommes 
très-lettrés,
avec ce goût qui-vous-est-propre, 
enfin ce préteur 
exerçant le jugement, 
parler un peu glus librement 
des études du goût 
et des lettres, 
et pour un personnage de cette sorte 
qui, à cause de sa tranquillité 
et de son occupation, 
n'a été traîné nullement 
dans les jugements et les dangers, 
me servir d'un certain genre de parler 
presque nouveau et inusité.
Que si je sens ceci 
être donné et accordé 
par vous à moi, 
je ferai certainement en sorte
que vous pensiez cet A. Licinius
devant un préteur très-distingué du peuple romain, devant les juges les plus respectables, en présence d'une assemblée si nombreuse, je parle un langage étranger non-seulement aux usages des tribunaux, mais au genre judiciaire; je vous prie de m'accorder, dans cette cause, une grâce que vous ne pouvez refuser à la qualité de l'accusé, une grâce qui, je l'espère, n'a rien de pénible pour vous; c'est que, parlant pour un grand poëte, pour un homme d'une vaste instruction, dans cette assemblée où siègent tant de savants, devant un préteur et des juges si éclairés; parlant, dis-je, pour un homme qu'une vie tranquille et studieuse a toujours tenu loin de nos périlleux débats, je puisse m'exprimer dans un langage presque nouveau et inusité dans cette enceinte.
Que si j'obtiens de vous cette faveur, je vous ferai voir, j'en ai la confiance, que vous ne devez pas retrancher A. Licinius du nombre

8 - 9

quum sit civis, a numero civium, verum etiam, si non esset, putetis adsciscendum fuisse.
III. Nam ut primum ex pueris excessit Archias, atque ab iis artibus quibus aetas puerilis ad humanitatem informari solet, se ad scribendi studium contulit : primum Antiochiae (nam ibi natus est, loco nobili, celebri quondam urbe et copiosa, atque eruditissimis hominibus liberalissimisque studiis affluenti), celeriter ei antecellere omnibus ingenii gloria contigit. Post in ceteris Asiae partibus, cunctaque Graecia, sic ejus adventus celebrabantur, ut famam ingenii exspectatio hominis, exspectationem ipsius adventus admiratioque superaret.
Erat Italia tunc plena graecarum artium ac disciplinarum; studiaque haec et in Latio vehementius tum colebantur, quam nunc iisdem in oppidis, et hic Romae, propter tranquillitatem reipu­

 

non modo 
non segregandum 
a numero civium, 
quum sit civis, 
verum etiam 
fuisse adsciscendtnn, 
si non esset. 
III. Nam ut Archias
excessit primum ex pueris,
atque ab iis artibus 
quibus aetas puerilis 
solet informari 
ad humanitatem, 
se contulit 
ad studium scribendi,
contigit ei primum 
antecellere celeriter 
gloria ingenii 
omnibus Antiochiae
(nam natus est ibi, 
loco nobili, 
urbe quondam celebri 
et copiosa, 
atque affluenti 
hominibus eruditissimis
studiisque liberalissimis).
Post adventus ejus
celebrabantur, 
in ceteris partibus Asiae,
cunctaque Graecia, 
sic ut exspectatio hominis
superaret famam ingenii
adventus ipsius 
admiratioque 
exspectationem. 
Italia erat tunc plena 
artium ac disciplinarum
graecarum ; 
haecque studia 
colebantur tum 
et in Latio vehementius, 
quam nunc 
in iisdem oppidis , 
et hic Romae 
non neglegebantur, 
propter tranquillitatem
reipublicae.
non-seulement 
n'étre pas à-séparer 
du nombre des citoyens, 
puisqu'il est citoyen, 
mais même 
avoir été à-y-ajouter 
s'il ne l'était pas.
III. Car dès que Archias 
fut sorti d'abord des enfants (de l'enfance), 
et de ces exercices 
par lesquels l'âge des-enfants 
a-coutume d'être formé 
à la littérature, 
il se transporta ( se livra) 
à l'occupation de composer 
il arriva à lui d'abord 
de surpasser promptement 
par la gloire du talent 
tous à Antioche 
(car il naquit là, 
d'un lieu (d'une famille) illustre, 
dans cette ville autrefois célèbre 
et riche, 
et abondante 
en hommes très-érudits 
et en occupations très-libérales). 
Ensuite les arrivées de lui 
étaient célébrées; 
dans les autres parties de l'Asie, 
et dans toute la Grèce, 
tellement que l'attente de l'homme 
surpassait la renommée de son talent, 
et que l'arrivée de lui-même 
et l'admiration pour lui 
surpassait
l'attente.
L'Italie était alors pleine 
des arts et des sciences
grecques ;
et ces études
étaient cultivées alors
même dans le Latium plus ardemment,
que maintenant
dans ces mêmes villes ,
même ici à Rome
elles n'étaient pas négligées,
à cause de la tranquillité
de la république.
des citoyens, puisqu'il est citoyen: mais que, s'il ne l'était pas, vous devriez lui conférer ce titre.
III. A peine Archias, sorti de l'enfance, eût-il achevé les exercices destinés à former cet âge aux belles-lettres, qu'il se livra à la composition. Son premier théâtre fut Antioche, où il naquit de parents distingués; cette ville jadis opulente, ce rendez-vous célèbre de l'érudition et des beaux-arts, le vit surpasser tous ses rivaux par la gloire de son génie. Ensuite, dans les autres parties de l'Asie, et dans toute la Grèce, on parlait de son arrivée avec tant d'éloges, que l'attente du personnage surpassait sa réputation de génie, et que l'admiration, à son arrivée, surpassait ce qu'on avait attendu de lui.
L'Italie était à cette époque remplie d'hommes qui cultivaient les lettres grecques; elles étaient alors plus en honneur qu'elles ne le sont aujourd'hui dans les mêmes villes; et la tranquillité de la république permettait, à Rome même, de ne pas les négliger. Aussi les

10 - 11

blicae, non neglegebantur. Itaque hunc et Tarentini, et Rhegini, et Neapolitani civitate ceterisque praemiis donarunt ; et omnes qui aliquid de ingeniis poterant judicare, cognitione atque hospitio dignum existimarunt. Hac tanta celebritate famae quum esset jam absentibus notus, Romam venit, Mario consule et Catulo. Nactus est primum consules eos, quorum alter res ad scribendum maximas, alter quum res gestas, tum etiam studium atque aures adhibere posset. Statim Luculli, quum praetextatus etiam tum Archias esset, eum domum suam receperunt. Sed etiam hoc non solum ingenii ac litterarum, verum etiam naturae atque virtutis, ut domus quae hujus adolescentiae prima fuerit, eadem esset familiarissima senectuti.
Erat temporibus illis jucundus Q. Metello illi Numidico et ejus Pio filio; audiebatur a M. Aemilio ; vivebat cum Q.Catulo, et patre, et filio ; a L. Crasso colebatur ; Lucullos vero et
Itaque et Tarentini, 
et Rhegini, et Neapolitani
donarunt hunc civitate
ceterisque praemiis ; 
et omnes qui poterant 
judicare aliquid 
de ingeniis, 
existimarunt dignum 
cognitione 
atque hospitio. 
Quum esset notus 
jam absentibus 
hac celebritate tantae famae,
venit Romam, 
Mario consule et Catulo. 
Nactus est primum 
eos consules, 
quorum alter 
posset adhibere 
res maximas 
ad scribendum, 
alter quum res gestas, 
tum etiam studium 
atque aures. 
Quum Archias esset 
etiam tum praetextatus, 
statim Luculli 
receperunt eum 
suam domum. 
Sed etiam hoc 
non solum ingenii 
ac litterarum, 
verum etiam naturae; 
atque virtutis, 
ut eadem domus, 
quae fuerit prima 
adolescentiae hujus, 
esset familiarissima 
senectuti.
Illis temporibus 
erat jucundus 
illi Q. Metello Numidico, 
et Pio filio ejus ; 
audiebatur a M. Aemilio;
vivebat cum Q. Catulo, 
et patre, et filio ; 
colebatur a L. Crasso;

Aussi et les Tarentins, 
et les Rhéginiens, et les Néapolitains 
gratifièrent celui-ci du droit-de-cité 
et d'autres priviléges ; 
et tous ceux qui pouvaient 
juger quelque chose 
au sujet de ses talents, 
le jugèrent digne 
de leur connaissance 
et de leur hospitalité. 
Comme il était connu 
même des absents 
par cette célébrité si grande de renommée,
il vint à Rome, 
Marius étant consul et aussi Catulus. 
Il y rencontra d'abord 
ces consuls, 
dont l'autre (l'un) 
pouvait lui fournir 
des actions très-grandes 
pour les écrire, 
l'autre et des choses faites (des exploits) 
et même du goût 
et des oreilles de connaisseur
Quoique Archias fût 
encore alors vêtu-de-la-prétexte,
aussitôt les Lucullus 
reçurent lui 
dans leur maison. 
Mais de plus ceci fut le propre 
non-seulement de son talent 
et de son mérite-littéraire, 
mais encore de son caractère 
et de sa vertu, 
que la même maison, 
qui avait été la première 
à accueillir l'adolescence de celui-ci, 
fût très-familière (l'amie) 
à (de) sa vieillesse.
En ces temps-là 
il était agréable 
à ce Q. Métellus le Numidique, 
et à Pius fils de lui ; 
il était écouté par M. Émilius; 
il vivait avec Q. Catulus, 
et le père, et le fils ; 
il était honoré par L. Crassus

habitants de Tarente, de Rhége et de Naples lui accordèrent le titre
de citoyen et d'autres priviléges ; et tous ceux qui étaient capables d'apprécier le mérite, le jugèrent digne de leur hospitalité et de leur amitié. Avec une réputation si brillante, connu de ceux-là même qui ne le voyaient pas, il vint à Rome sous le consulat de Marius et
de Catulus. Il trouva en eux, dès son arrivée, deux hommes dont l'un pouvait lui fournir une ample matière d'exploits à chanter, l'autre, outre ses hauts faits, un goût sûr et une oreille exercée.
Aussitôt les Lucullus reçurent Archias dans leur maison, quoiqu'il n'eût pas encore quitté la prétexte. Et ce qui prouve non-seulement son talent et son mérite littéraire, mais la bonté de son caractère et sa vertu, c'est qu'une maison qui, la première, l'accueillit dans sa jeunesse, fut aussi l'asile le plus ordinaire de sa vieillesse.
Il était alors chéri du grand Métellus le Numidique, et de son fils Métellus Pius; M. Emilius l'écoutait avec plaisir ; il vivait avec les deux Catulus, père et fils; il était honoré par L. Crassus ; intime-

12 - 13

Drusum, et Octavios, et Catonem, et totam Hortensiorum domum devinctam consuetudine quum teneret, afficiebatur summo honore, quod eum non solum colebant qui aliquid percipere atque audire studebant, verum etiam si qui forte simulabant. 
Interim satis longe intervallo, quum esset cum L. Lucullo in Siciliam profectus, et quum ex ea provincia cum eodem Lucullo decederet, venit Heracleam. Quae quum esset civitas aequissimo jure ac foedere, adscribi se in eam civitatem voluit; idque, quum ipse per se dignus putaretur, tum auctoritate et gratia Luculli ab Heracleensibus impetravit. Data est civitas
Silvani lege et Carbonis : SI QUI FOEDERATIS CIVITATIBUS ADSCRIPTI FUISSENT; SI TUM, QUUM LEX FEREBATUR, IN ITALIA DOMICILIUM HABUISSENT; ET, SI SEXAGINTA DIEBUS APUD PRAETOREM ESSENT PROFESSI. Quum hic domicilium Romae multos
quum vero teneret Lucullos 
et Drusum, et Octavios, 
et Catonem, 
et totam domum 
Hortensiorum 
devinctam consuetudine,
afficiebatur summo honore,
quod non solum 
qui studebant percipere 
atque audire aliquid 
colebant eum, 
verum etiam si qui 
simulabant forte.
Interim 
satis longe intervallo, 
quum esset profectus 
cum L. Lucullo 
in Siciliam, 
et quum decederet 
ex ea provincia 
cum eodem Lucullo, 
venit Heracleam. 
Quum quae civitas 
esset jure 
ac foedere aequissimo, 
voluit se adscribi 
in eam civitatem 
impetravitque id 
ab Heracleensibus 
auctoritate 
et gratia Luculli, 
tum quum ipse 
putaretur dignus per se. 
Civitas est data 
lege Silvani et Carbonis 
SI QUI 
FUISSENT ADSCRIPTI,
CIVITATIBUS FOEDERATIS ; 
S1 HABUISSENT 
DOMICILIUM 
IN ITALIA, 
TUM QUUM LEX 
FEREBATUR; 
ET, SI ESSENT PROFESSI 
APUD PRAETOREM 
SEXAGINTA DIEBUS. 
Quum hic haberet

mais comme il tenait les Lucullus 
et Drusus, et les Octaves, 
et Caton, 
et toute la maison 
des Hortensius 
enchaînée par son amitié, 
il était comblé d'un très-grand honneur 
parce que non-seulement 
ceux qui désiraient apprendre 
et entendre quelque chose 
honoraient lui, 
mais même si quelques-uns (ceux qui) 
le feignaient par hasard.
Cependant 
après un assez long intervalle, 
lorsqu'il fut parti 
avec L. Lucullus 
pour aller en Sicile, 
et lorsqu'il sortait 
de cette province 
avec le même Lucullus, 
il vint à Héraclée. 
Comme cette ville 
était d'un droit 
et d'une alliance très-juste, 
il voulut soi être inscrit 
dans cette cité; 
et il obtint cela 
des Héracléens 
par le crédit 
et par la faveur de Lucullus, 
alors que par lui-même 
il en était jugé digne par lui-même. 
Le droit-de-cité lui fut donné 
par la loi de Silvanus et de Carbon, 
loi portant : SI QUELQUES-UNS
AVAIENT ÉTÉ INSCRITS 
DANS LES VILLES FÉDÉRÉES ; 
S'ILS AVAIENT EU 
leur DOMICILE 
EN ITALIE, 
ALORS QUE LA LOI 
ÉTAIT PORTÉE; 
ET, S'ILS l'AVAIENT DÉCLARE 
DEVANT LE PRÉTEUR 
DANS LES SOIXANTE JOURS. 
Comme celui-ci avait
ment lié avec les Lucullus, avec Drusus, avec les Octaves, avec Caton, avec toute la maison des Hortensius, il jouissait de la plus grande considération, recherché non-seulement de ceux qui désiraient l'entendre, mais de ceux qui feignaient ce désir.
Assez longtemps après, parti avec Lucullus pour la Sicile, et ayant quitté cette province avec le même Lucullus, il se rendit à Héraclée. Comme cette ville, grâce à notre alliance, jouissait des plus beaux priviléges, il souhaita d'en devenir citoyen. Il obtint facilement cette faveur, soit par son propre mérite, qui l'en faisait juger digne, soit par le crédit et la protection de Lucullus. La loi de Silvanus et de Carbon accorda le droit de citoyen A CEUX QUI SE SERAIENT FAIT INSCRIRE DANS UNE DES VILLES FÉDÉRÉES; POURVU QUE, AU MOMENT DE LA PUBLICATION DE LA LOI, ILS EUSSENT UN DOMICILE EN ITALIE, ET QUE, DANS LES SOIXANTE JOURS, ILS EUSSENT FAIT
LEUR, DÉCLARATION DEVANT LE PRÉTEUR. Archias, domicilié à

14 - 15

jam annos haberet, professus est apud praetorem, Q. Metellum, familiarissimum suum.
IV. Si nihil aliud, nisi de civitate ac lege, dicimus, nihil dico amplius : causa dicta est. Quid enim horum infirmari, Grati, potest ? Heracleaene esse tum adscriptum negabis ? Adest vir summa auctoritate, et religione, et fide, M. Lucullus, qui se non opinari, sed scire ; non audivisse, sed vidisse ; non interfuisse, sed egisse dicit. Adsunt Heracleenses legati, nobilissimi homines : hujus judicii causa cum mandatis, et cum publico testimonio venerunt; qui hunc adscriptum Heracleensem dicunt.
Hic tu tabulas desideras Heracleensium publicas; quas italico bello, incenso tabulario, interisse scimus omnes. Est ridiculum, ad ea quae habemus, nihil dicere : quaerere quae habere non possumus; et de hominum memoria tacere, litte
domicilium Romae
jam multos annos, 
professus est 
apud praetorem,
Q. Metellum, 
suum familiarissimum. 
IV. Si dicimus 
nihil aliud, 
nisi de civitate ac lege, 
dico nihil amplius :
causa est dicta. 
Quid enim horum, Grati, 
potest infirmari ? 
negabisne 
esse adscriptum 
tum Heracleae ? 
Vir summa auctoritate, 
et religione, 
et fide, 
M. Lucullus adest, 
qui dicit se 
non opinari, sed scire ; 
non audivisse, sed vidisse; 
non interfuisse, 
sed egisse. 
Legati Heracleenses, 
homines nobilissimi, 
adsunt  : 
venerunt 
causa hujus judicii 
cum mandatis, 
et cum testimonio publico ; 
qui dicunt hunc 
adscriptum Heracleensem. 
Hic tu desideras 
tabulas publicas 
Heracleensium ; 
quas scimus omnes 
interisse bello italico, 
tabulario incenso. 
Est ridiculum 
nihil dicere 
ad ea quae habemus :
quaerere 
quae non possumus habere; 
et tacere 
de memoria hominum,

son domicile à Rome 
déjà depuis plusieurs années, 
il fit-sa-déclaration 
devant le préteur, 
Q. Métellus, 
son ami-intime.
IV. Si nous ne disons 
rien autre chose, 
si ce n'est du droit-de-cité et de la loi, 
je ne dis rien de plus  :
la cause est plaidée. 
Lequel en effet de ces faits, Gratius, 
peut être infirmé? 
nieras-tu 
lui avoir été inscrit 
alors à Héraclée ? 
Un homme d'une très-grande autorité 
et d'une grande religion, 
et d'une grande probité, 
M. Lucullus est-présent, 
qui dit soi 
non pas croire, mais savoir; 
non avoir entendu dire, mais avoir vu 
non avoir été-présent, 
mais avoir agi par lui-même
Les députés d'-Héraclée, 
hommes très-distingués, 
sont-ici-présents : 
ils sont venus 
par le motif de ce jugement 
avec des instructions, 
et avec un témoignage public ; 
ils disent celui-ci 
avoir été inscrit citoyen d'-Héraclée.
Ici tu demandes 
les registres publics 
des Héracléens; 
lesquels registres nous savons tous 
avoir péri dans la guerre d'-Italie, 
le dépôt-des-registres ayant été brûlé. 
Il est ridicule 
de ne rien dire 
à ces preuves que nous avons :
il est ridicule d'exiger 
celles que nous ne pouvons avoir; 
et de se taire 
sur le témoignage des hommes,
Rome depuis plusieurs années, fit sa déclaration chez le préteur Q. Métellus, son ami.
IV. S'il n'est ici question que du droit de cité et de la loi, je n'ai plus rien à dire, la cause est plaidée. Lequel de ces faits, Gratius, peut-on infirmer? Diras-tu qu'il n'a point été inscrit à Héraclée? Voici un témoin de l'autorité, de la probité la plus respectable, le vertueux M. Lucullus; il ne dit pas seulement je crois, mais je sais; j'ai entendu dire, mais j'ai vu ; j'étais présent, mais j'ai agi en personne. Voici les députés d'Héraclée, les hommes les plus distingués de la ville ; venus exprès pour cette cause, chargés de témoigner su nom de toute la cité, ils affirment qu'Archias a été reçu citoyen d'Héraclée.
Tu nous demandes ici les registres de cette ville, qui, nous le savons tous, ont été brûlés avec les archives pendant la guerre d'Italie. Il est ridicule de ne rien répondre aux preuves que nous avons, et d'en demander que nous ne pouvons avoir; de se taire sur des dépositions orales, et d'exiger des témoignages écrits;

16- 17

rarum memoriam flagitare ; et, quum habeas amplissimi viri religionem , integerrimi municipii jusjurandum fidemque, ea, quae depravari nullo modo possunt, repudiare ; tabulas, quas idem dicis solere corrumpi, desiderare.
At domicilium Romae non habuit, is qui, tot annis ante civitatem datam, sedem omnium rerum ac fortunarum suarum Romae collocavit ? At non est professus. Imo vero iis tabulis professus quae solae ex illa professione, collegioque praetorum obtinent publicarum tabularum auctoritatem.
V. Nam quum Appii tabulae negligentius asservatae dicerentur, Gabinii, quandiu incolumis fuit, levitas, post damnationem calamitas, omnem tabularum fidem resignasset, Metellus, homo sanctissimus modestissimusque omnium, tanta diligentia fuit, ut ad L. Lentulum praetorem et ad judices ve-
flagitare
memoriam litterarum ;
et, quum habeas
religionem
viri amplissimi,
jusjurandum, fidemque
municipii integerrimi,
repudiare ea,
quae possunt depravari
nullo modo ;
desiderare tabulas,
quas idem dicis
solere corrumpi.
At is non habuit
domicilium Romae,
qui, tot annis
ante civitatem datam,
collocavit Romae
sedem
omnium suarum rerum
ac fortunarum?
At non est professus.
Imo vero professus
iis tabulis
quae solae
ex illa professione,
collegioque praetorum,
obtinent auctoritatem
tabularum publicarum.
V. Nam
quum tabulae Appii
dicerentur asservatae
negligentius,
levitas Gabinii ,
quandiu fuit incolumis,
calamitas
post damnationem,
resignasset omnem fidem
tabularum,
Metellus,
homo sanctissimus
modestissimusque
omnium,
fuit tanta diligentia,
ut venerit
ad praetorem L. Lentulum
et ad judices,
de demander-instamment 
le témoignage des lettres ; 
et, quand tu peux avoir 
la religion (la garantie) 
d'un personnage d'un-très-grand-poids,
le serment et la foi 
d'un municipe très-intègre, 
il est ridicule de rejeter ces preuves
qui ne peuvent être falsifiées 
en aucune manière ; 
de demander des registres, 
que toi-même tu dis 
avoir-coutume d'être altérés.
Mais lui (Archias) n'eut pas 
de domicile à Rome, 
lui qui, pendant tant d'années 
avant le droit-de-cité donné, 
plaça à Rome 
le siège 
de toutes ses affaires 
et de tous ses intérêts? 
Mais il n'a pas déclaré. 
Mais bien plus il a fait-sa-déclaration 
sur ces registres 
qui seuls 
d'après cette déclaration, 
et le collège des préteurs d'alors
obtiennent l'autorité 
de registres publics.
V. Car 
comme les registres d'Appius 
étaient dits être conservée 
plus négligemment qu'il ne fallait
comme la légèreté de Gabinius, 
tant qu'il fut conservé, 
et son malheur 
après sa condamnation, 
eût enlevé toute la confiance 
de ses registres, 
Métellus, 
l'homme le plus vertueux 
et le plus modeste 
de tous, 
fut d'une si grande exactitude 
qu'il vint 
chez le préteur L. Lentulus
et chez les juges,
et, tandis que tu as la garantie d'un personnage du plus grand poids, la foi et le serment d'une ville irréprochable, de rejeter ces preuves, qui ne peuvent être falsifiées en aucune manière, pour réclamer des registres qui, de ton propre aveu, le sont tous les jours. 
Mais Archias n'était pas domicilié à Rome , lui qui, tant d'années avant la loi de Silvanus, avait établi à Rome toute sa fortune et toutes ses espérances ? Mais il n'a pas fait sa déclaration. Au contraire, il l'a faite dans les registres qui, de tous les registres des préteurs de cette époque, sont seuls regardés comme authentiques.
V. En effet, tandis que ceux d'Appius passaient pour être tenus avec trop de négligence; tandis que la légèreté de Gabinius, tant qu'il fut en place, et son malheur après sa condamnation, avaient enlevé aux siens toute autorité, Métellus, le plus vertueux et le plus scrupuleux de tous les hommes, apporta tant de soin à cette affaire, qu'il vint trouver le préteur L. Lentulus et les juges pour leur dire qu'une

18 - 19

nerit, et unius nominis litura se commotum esse dixerit. His igitur tabulis nullam lituram in nomen A. Licinii videtis.
Quae quum ita sint, quid est quod de ejus civitate dubitetis, praesertim quum aliis quoque in civitatibus fuerit adscriptus? Etenim, quum mediocribus multis, et aut nulla, aut humili aliqua arte praeditis gratuito civitatem in Graecia homines impertiebantur, Rheginos credo, aut Locrenses, aut Neapolitanos, aut
Tarentinos, quod scenicis artificibus largiri solebant, id huic summa ingenii praedito gloria, noluisse? Quid? quum ceteri,
non modo post civitatem datam, sed etiam post legem Papiam a, aliquo modo in eorum municipiorum tabulas irrepserint,
hic, qui ne utitur quidem illis, in quibus est scriptus, quod semper se Heracleensem esse voluit, rejicietur?
Census nostros requiris scilicet. Est enim obscurum, proximis censoribus, hunc cum clarissimo imperatore, L. Lucullo,
et dixerit
se esse commotum 
litura unius nominis. 
Igitur his tabulis 
videtis nullam lituram 
in nomen A. Licinii.
Quum quae sint ita, 
quid est 
quod dubitetis 
de civitate ejus, 
praesertim 
quum fuerit adscriptus 
in aliis civitatibus quoque?
Etenim, quum in Graecia
homines impertiebantur civitatem gratuito 
multis mediocribus, 
et praeditis 
aut nulla arte, 
aut aliqua humili, 
credo Rheginos, 
aut Locrenses, 
aut Neapolitanos, 
aut Tarentinos 
noluisse largiri 
huic praedito 
summa gloria ingenii, 
id quod solebant 
artificibus scenicis. 
Quid? quum ceteri, 
non modo 
post civitatem datam, 
sed etiam 
post legem Papiam, 
irrepserint aliquo modo 
in tabulas 
eorum municipiorum, 
hic rejicietur, 
qui ne utitur quidem illis, 
in quibus est scriptus, 
quod voluit semper 
se esse Heracleensem ?
Scilicet 
requiris nostros census. 
Est enim obscurum, 
proximis censoribus, 
hunc fuisse apud exercitum
et leur dit 
soi être ému 
de la rature d'un-seul nom. 
Ainsi sur ces registres 
vous ne voyez aucune rature 
sur le nom d'A. Licinius.
Puisque ces choses sont ainsi 
quelle raison existe 
pour que vous doutiez 
de la qualité-de-citoyen de lui, 
surtout 
puisqu'il a été inscrit 
dans d'autres villes aussi? 
En effet, quand dans la grande Grèce 
les hommes accordaient 
le titre-de-citoyen gratuitement 
à beaucoup d'hommes médiocres, 
et doués (occupés) 
ou de nulle profession, 
ou de quelque profession basse, 
je crois les habitants de-Rhége, 
ou ceux de-Locres, 
ou ceux de-Naples, 
ou ceux de-Tarente 
n'avoir pas-voulu accorder 
à celui-ci doué 
d'une très-grande gloire de talent, 
ce qu'ils avaient-coutume d'accorder 
à des artistes scéniques. 
Quoi? lorsque les autres, 
non-seulement 
après le titre-de-citoyen donné, 
mais encore 
après la loi Papia, 
se sont glissés de quelque manière 
dans les registres 
de ces municipes, 
celui-ci sera rejeté, 
lui qui ne se sert pas même de ceux, 
sur lesquels il est inscrit, 
parce qu'il a voulu toujours 
lui être citoyen d'-Héraclée ?
Sans doute 
tu demandes nos recensements. 
Il est en effet obscur, 
sous les derniers censeurs, 
celui-ci avoir été à l'armée
rature qui se trouvait sur un nom lui donnait de l'inquiétude. Or, dans ces registres, il n'y a point de rature sur le nom de Licinius. Après des faits si positifs, quelle raison de douter de son droit, surtout quand on le voit inscrit dans plusieurs autres villes? En effet, quand un grand nombre d'hommes d'un mérite médiocre, sans profession ou qui n'en avaient que de peu honorables, obtenaient sans effort dans la grande Grèce le titre de citoyen, puis-je croire que Rhége, Locres, Naples ou Tarente, aient refusé à un poëte d'un talent si élevé et si brillant une faveur qu'elles accordaient à des comédiens? Quoi ! tandis que les autres, non-seulement après la loi de Silvanus, mais encore après la loi Papia, se sont glissés, on ne sait comment, dans les registres de ces villes municipales, Archias, qui ne fait pas usage du titre qu'il possède dans quelques-unes, parce qu'il a toujours voulu appartenir exclusivement à Héraclée, sera repoussé et privé de son droit? 
Mais tu réclames les tables du cens : comme s'il était douteux que, sous les derniers censeurs, Archias était à l'armée avec l'illustre

20 - 21

apud exercitum fuisse; superioribus, cum eodem quaestore fuisse in Asia; primis, Julio et Crasso, nullam populi partem esse censam. Sed, quoniam census non jus civitatis confirmat, ac tantummodo indicat, eum, qui sit census, ita se jam tum gessisse pro cive: iis temporibus, quae tu criminaris, ne ipsius quidem judicio eum in civium romanorum jure esse versatum, et testamentum saepe fecit nostris legibus, et adiit hereditates civium romanorum, et in beneficiis ad aerarium delatus est a L. Lucullo praetore et consule.
VI. Quaere argumenta, si qua potes : nunquam enim hic neque suo, neque amicorum judicio revincetur. Quaeres a nobis, Grati, cur tantopere hoc homine delectemur. Quia suppeditat nobis, ubi et animus ex hoc forensi strepitu reficiatur, et aures convicio defessae conquiescant. An tu existimas, aut suppetere
cum L. Lucullo, 
imperatore clarissimo ;
superioribus, 
fuisse in Asia 
cum eodem quaestore ;
primis, 
Julio et Crasso, 
nullam partem populi 
esse censam. 
Sed, quoniam census 
non confirmat 
jus civitatis, 
ac indicat tantummodo, 
eum, qui sit census, 
gessisse se jam tum 
ita pro cive: 
iis temporibus 
quae tu criminaris, 
eum ne quidem 
judicio ipsius 
esse versatum in jure 
civium romanorum, 
et saepe fecit testamentum
nostris legibus, 
et adiit hereditates 
civium romanorum, 
et est delatus ad aerarium 
in beneficiis 
a L. Lucullo 
praetore et consule.
VI. Quaere argumenta, 
si potes qua: 
hic enim, 
neque suo judicio, 
neque amicorum, 
nunquam revincetur. 
Quaeres a nobis Grati, 
cur delectemur tantopere 
hoc homine. 
Quia suppeditat nobis, 
et ubi animus reficiatur 
ex hoc strepitu forensi, 
et aures defessae convicio
conquiescant. 
An tu existimas, 
aut quod dicamus 
quotidie,
avec L. Lucullus 
général très-illustre, 
sous les précédents censeurs
avoir été en Asie 
avec le même Lucullus questeur; 
sous les premiers censeurs
Julius et Crassus, 
nulle partie du peuple 
n'avoir été recensée. 
Mais, comme le recensement 
ne confirme pas 
le droit de cité, 
et indique seulement, 
celui, qui a été recensé, 
avoir porté soi déjà alors 
ainsi pour citoyen: 
en ces temps, 
où tu accuses, 
lui non pas même 
d'après le jugement de lui-même 
n'avoir pas été dans le droit 
des citoyens romains, 
et souvent il a fait son testament 
d'après nos lois, 
et il a abordé des héritages 
de citoyens romains, 
et il a été déféré au trésor-public 
pour recevoir des gratifications 
par L. Lucullus 
préteur et consul.
VI. Cherche des preuves, 
si tu peux en trouver quelques-unes : 
celui-ci en effet, 
ni d'après son jugement, 
ni d'après celui de ses amis, 
ne sera jamais réfuté. 
Tu demanderas de (à) nous, Gratius, 
pourquoi nous sommes charmés si fort 
de cet homme. 
Parce qu'il fournit à nous, 
et où notre esprit puisse se refaire, 
de ce bruit du-forum, 
et nos oreilles fatiguées par la clameur 
puissent se reposer. 
Est-ce que tu penses, 
ou ce que nous devons dire 
chaque-jour
Lucullus, qui la commandait; que, sous les censeurs précédents, il était en Asie avec le même Lucullus, questeur; et que sous Julius et Crassus, les premiers après son adoption, il ne fut fait aucun recensement du peuple. Mais, comme le recensement ne prouve pas le droit de citoyen, et qu'il indique seulement que celui qui y a été compris se comportait alors comme tel; à ces mêmes époques où tu prétends que, de son propre aveu, Archias ne prenait pas la qualité de citoyen romain, il a cependant fait plusieurs fois son testament selon nos lois, il a recueilli des successions de citoyens romains, et Lucullus, préteur et consul, l'a porté sur l'état des gratifications du trésor public.
VI. Cherche des preuves, si tu peux; car jamais ni sa propre conduite personnelle, ni celle de ses amis à son égard, ne t'en fourniront contre lui. Tu me demanderas peut-être, Gratius, ce qui me fait trouver tant de charmes dans le commerce d'Archias ? C'est qu'il offre à mon esprit un agréable délassement après le tumulte du barreau, et un repos pour mes oreilles fatiguées des clameurs de nos débats judiciaires. Crois-tu que nous puissions être tous les jours

22 - 23

nobis posse, quod quotidie dicamus, in tanta varietate rerum, nisi animos nostros doctrina excolamus; aut ferre animos tantam posse contentionem, nisi eos doctrina eadem relaxemus? Ego vero fateor, me his studiis esse deditum. Ceteros pudeat, si qui ita se litteris abdiderunt, ut nihil possint ex his neque ad communem afferre fructum, neque in adspectum lucemque proferre. Me autem quid pudeat, qui tot annos ita vivo, judices, ut ab nullius unquam me tempore aut commodo aut otium meum abstraxerit, aut voluptas avocarit, aut denique somnus retardarit. Quare quis tandem me reprehendat, aut quis mihi jure succenseat, si, quantum ceteris ad suas res obeundas, quantum ad festos dies ludorum celebrandos, quantum ad alias voluptates, et ad ipsam requiem animi et corporis conceditur temporum ; quantum alii tribuunt tempestivis conviviis;
posse suppetere nobis, 
in tanta varietate rerum, 
nisi excolamus doctrina
nostros animos; 
aut animos posse ferre 
tantam contentionem, 
nisi relaxemus eos 
eadem doctrina? 
Ego vero fateor, 
me esse deditum 
his studiis. 
Pudeat ceteros, 
si qui se abdiderunt 
litteris ita, 
ut possint nihil afferre 
ex his 
neque 
ad fructum communem, 
neque proferre 
in adspectum lucemque. 
Quid autem pudeat me, 
qui tot annos
vivo ita, judices, 
ut aut meum otium 
unquam abstraxerit me 
ab tempore 
aut commodo nullius, 
aut voluptas avocarit, 
aut denique 
somnus retardarit? 
Quare quis tandem
reprehendat me, 
aut quis succenseat 
jure mihi, 
si egomet sumpsero mihi 
ad recolenda haec studia
tantum temporum, 
quantum conceditur ceteris 
ad obeundas suas res,
quantum 
ad celebrandos 
dies festos ludorum, 
quantum 
ad alias voluptates, 
et ad requiem ipsam 
animi et corporis ; 
quantum alii tribuunt
pouvoir se présenter à nous, 
dans une si grande variété de choses, 
si nous ne cultivions par l'étude 
nos esprits; 
ou nos esprits pouvoir supporter 
une si grande contention, 
si nous ne relâchions eux 
par cette même étude? 
Mais moi j'avoue, 
moi être adonné 
à ces études. 
Que cela fasse-rougir les autres, 
si quelques-uns se sont enfoncés 
dans les lettres tellement, 
qu'ils ne puissent rien apporter 
de ces belles-lettres 
ni 
au fruit commun 
ni rien produire 
à la vue et à la lumière. 
Mais pourquoi cela ferait-il-rougir moi, 
qui depuis tant d'années 
vis de telle sorte, juges, 
que ou mon repos 
n'a jamais distrait moi 
du temps ( de la cause) 
ou (ni) des intérêts de personne, 
ou que le plaisir n'a détourné, 
ou enfin 
que le sommeil n'a jamais retardé? 
Aussi qui enfin 
blâmerait moi, 
ou qui s'irriterait 
avec raison contre moi, 
si moi-même j'aurai pris pour moi 
pour repasser ces études 
autant de temps, 
qu'il en est accordé aux autres 
pour accomplir leurs affaires, 
qu'il leur en est accordé 
pour célébrer 
les jours de-féte des jeux, 
qu'il leur en est accordé 
pour les autres plaisirs, 
et pour le repos même 
de l'esprit et du corps; 
que d'autres en donnent
en état de parler sur tant de sujets différents, si nous ne cultivions notre esprit par l'étude des lettres, ou qu'il pût supporter une si grande contention, si cette même étude ne nous procurait quelque repos? Pour moi, j'avoue que je me livre avec empressement à ces nobles amusements. Que ceux-là en rougissent qui se sont enfoncés dans l'étude des lettres de manière à ne procurer aucun bien à la société, et à ne produire au jour aucun fruit da leurs travaux. Mais moi, pourquoi en rougirais-je, moi qui, depuis tant d'années, lorsqu'il a été question de me rendre utile, ne me suis jamais laissé détourner par mes intérêts, ni distraire par le désir de ma tranquillité, ni arrêter par le sommeil? Qui donc enfin pourrait me blâmer ou se fâcher contre moi, si le temps que les autres consacrent à leurs affaires, aux fêtas et aux jeux, à d'autres plaisirs, et même au repos du corps et de l'esprit, que d'autres accordent aux longs repas, enfin

24 - 25

quantum denique aleae, quantum pilae, tantum mihi egomet ad haec studia recolenda sumpsero? Atque hoc adeo mihi concedendum est magis, quod ex his studiis haec quoque censetur oratio et facultas ; quae, quantacumque in me, nunquam amicorum periculis defuit. Quae si cui levior videtur, illa quidem certe quae summa sunt, ex quo fonte hauriam, sentio.
Nam, nisi multorum praeceptis, multisque litteris mihi ab adolescentia suasissem, nihil esse in vita magnopere expetendum, nisi laudem atque honestatem ; in ea autem persequenda omnes cruciatus corporis, omnia pericula mortis atque exsilii parvi esse ducenda, nunquam me pro salute vestra in tot ac tantas dimicationes atque in hos profligatorum hominum quotidianos impetus objecissem. Sed pleni omnes sunt libri, plenae sapientium voces, plena exemplorum vetustas; quae jacerent in tenebris omnia, nisi litterarum lumen accederet. Quam multas
tempestivis conviviis ;
quantum denique aleae,
quantum pilae? 
Atque hoc est concedendum
mihi adeo magis, 
quod haec oratio quoque 
et facultas 
censetur ex his studiis; 
quae, quantacumque in me,
nunquam defuit 
periculis amicorum. 
Quae si videtur 
levior cui, 
sentio quidem certe 
ex quo fonte hauriam 
illa quae sunt summa.
Nam, nisi suasissem mihi 
ab adolescentia 
praeceptis multorum,
multisque litteris, 
nihil esse in vita 
magnopere expetendum, 
nisi laudem 
atque honestatem ; 
omnes autem cruciatus
corporis, 
omnia pericula 
mortis atque exsilii 
esse ducenda parvi 
in persequenda ea, 
nunquam objecissem me 
pro vestra salute 
in dimicationes 
tot ac tantas 
atque in hos impetus
quotidianos 
hominum profligatorum. 
Sed omnes libri sunt pleni,
voces sapientium plenae,
vetustas 
plena exemplorum ; 
quae omnia 
jacerent in tenebris, 
nisi lumen litterarum
accederet. 
Quam multas imagines
virorum fortissimorum
à de longe repas; 
qu'ils en donnent enfin aux jeux-de-hasard, 
qu'ils en donnent à la balle? 
Et ceci est à-accorder 
à moi d'autant plus, 
que ce discours même 
et ce talent 
est estimé d'après ces études; 
talent qui, quel qu'il soit en moi, 
n'a jamais manqué 
aux périls de mes amis. 
Lequel s'il parait 
plus (trop) léger à quelqu'un 
je sens du moins certainement 
de quelle source je puise 
ces choses qui sont excellentes.
Car, si je n'avais persuadé à moi 
depuis mon adolescence 
par les leçons de plusieurs, 
et par beaucoup de lettres (lecture), 
rien n'être dans la vie 
extrêmement à-désirer, 
si ce n'est la gloire 
et l'honneur; 
mais tous les tourments 
du corps, 
tous les périls 
de mort et d'exil 
être à-estimer de peu de valeur 
pour acquérir eux, 
jamais je n'eusse exposé moi 
pour votre salut 
à des démêlés 
si nombreux et si grands 
et à ces attaques 
de-tous-les-jours 
d'hommes abattus (corrompus). 
Mais tous les livres sont pleins, 
les paroles des sages sont pleines, 
l'antiquité 
est pleine d'exemples ; 
qui tous 
seraient-ensevelis dans les ténèbres, 
si la lumière des lettres 
ne s'y joignait. 
Que de nombreux portraits 
d'hommes très-courageux
aux jeux de hasard et à la paume, je l'emploie à repasser mes études littéraires ? On doit me le pardonner d'autant plus volontiers, que ces travaux rentrent dans les occupations de ma profession ; mes talents, quels qu'ils soient, n'ont jamais fait défaut à mes amis en danger. Si cette étude paraît de peu de valeur aux yeux de certaines personnes, je sais du moins à quelle source je puise l'élévation.
En effet, si les leçons des sages, si l'étude approfondie des lettres ne m'avaient persuadé dès ma jeunesse que, dans la vie, rien n'est vraiment désirable que la gloire et l'honneur, et que, pour les acquérir, tous les tourments, tous les périls, l'exil et la mort même doivent être comptés pour peu de chose, jamais, pour le salut de l'État, je ne me serais exposé à tant de démêlés si redoutables, ni aux attaques journalières des plus mauvais citoyens. Mais tous les livres, mais la voix de tous les sages le redisent sans cesse ; mais toute l'antiquité est remplie de grands exemples qui tous, sans la lumière des lettres, seraient ensevelis dans les ténèbres. Combien de tableaux des hommes

26 - 27

nobis imagines non solum ad intuendum , verum etiam ad imitandum, fortissimorum virorum expressas, scriptores et graeci et latini reliquerunt ? Quas ego mihi semper in administranda republica proponens, animum et mentem meam ipsa cogitatione hominum excellentium conformabam.
VII. Quaeret quispiam : quid ? illi ipsi summi viri quorum virtutes litteris proditae sunt, istane doctrina, quam tu laudibus effers, eruditi fuerunt? Difficile est hoc de omnibus confirmare; sed tamen est certum, quid respondeam. Ego multos homines excellenti animo ac virtute fuisse, et sine doctrina, naturae ipsius habitu prope divino, per seipsos et moderatos et graves exstitisse fateor. Etiam illud adjungo, saepius ad laudem atque virtutem naturam sine doctrina, quam sine natura valuisse doctrinam. Atque idem ego contendo, quum ad naturam eximiam atque illustrem accesserit ratio quaedam conformatioque doctrinae, tum illud nescio quid praeclarum ac singulare solere
scriptores
et graeci et latini 
reliquerunt nobis expressas
non solum ad intuendum,
verum etiam 
ad imitandum ? 
Quas proponens mihi 
in administranda 
republica, 
ego conformabam semper
animum et meam mentem
cogitatione ipsa 
hominum excellentium.
VII. Quispiam quaeret
quid ? illi summi viri ipsi
quorum virtutes
sunt proditae litteris,
fueruntne eruditi
ista doctrina,
quam tu effers laudibus ?
Confirmare hoc de omnibus
est difficile ;
sed tamen quid respondeam
est certum.
Ego fateor
multos homines
fuisse animo excellenti
ac virtute,
et sine doctrina,
habitu prope divino
naturae ipsius,
exstitisse per seipsos
moderatos et graves.
Adjungo etiam illud,
naturam sine doctrina
valuisse saepius
ad laudem atque virtutem,
quam doctrinam 
sine natura.
Atque ego idem contendo,
quum quaedam ratio
conformatioque doctrinae
accesserit ad naturam
eximiam atque illustrem,
tum illud nescio quid
praeclarum ac singulare
solere exsistere.
les écrivains 
et grecs et latins 
ont laissés à nous représentés 
non-seulement à contempler, 
mais même 
à imiter ? 
Lesquels proposant à moi 
en administrant 
l'État, 
je leur conformais toujours 
mon coeur et mon esprit 
par la pensée même 
de ces hommes distingués.
VIL Quelqu'un me demandera 
quoi ! ces grands hommes eus-mêmes, 
dont les vertus 
ont été célébrées par les lettres, 
ont-ils été instruits 
par cette science, 
que tu élèves par tes louanges ? 
Affirmer ceci de tous 
est difficile ; 
mais cependant ce que je dois répondre 
est certain. 
J'avoue 
beaucoup d'hommes 
avoir été doués d'une âme élevée 
et d'une vertu élevée
et même sans instruction, 
par la disposition presque divine 
de leur nature même, 
avoir été par eux-mêmes 
et modérés et graves. 
J'ajoute même ceci, 
la nature sans instruction 
avoir valu plus souvent 
pour acquérir la gloire et la vertu, 
que l'instruction 
sans la nature. 
Et moi le même je prétends,
lorsqu'une certaine mesure 
et perfection de science 
s'est jointe à une nature 
distinguée et brillante, 
alors ce je ne-sais quoi 
d'éclatant et de singulier 
avoir-coutume d'exister.
les plus courageux les écrivains grecs et romains nous ont laissés pour être l'objet de notre admiration et de notre imitation ! Je les avais toujours devant les yeux dans l'administration de l'État, et la seule pensée de leur vertu fortifiait mon coeur.
VII. Mais quoi? dira quelqu'un, ces grands hommes dont les lettres nous ont retracé les vertus, possédaient-ils ces connaissances que vous nous vantez ? Il est difficile de l'assurer de tous ; cependant je n'hésiterai pas sur la réponse. J'avoue qu'on a vu des hommes d'une âme excellente et d'une vertu supérieure, sans le secours de l'art; qui, par la seule disposition de leur nature presque divine, ont été par eux-mêmes et justes et sages : j'ajoute même que, sans l'étude, un heureux naturel a plus souvent contribué à la gloire et à la vertu que l'étude sans la nature. Je soutiens de plus que, si à un naturel excellent viennent se joindre l'étude et l'instruction, cette alliance

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exsistere. Ex hoc esse hunc numero quem patres nostri viderunt, divinum hominem, Africanum; ex hoc C. Laelium, L. Furium, moderatissimos homines et continentissimos ; ex hoc fortissimum virum et illis temporibus doctissimum, M. Catonem illum senem : qui profecto, si nihil ad percipiendam colendamque virtutem litteris adjuvarentur, nunquam se ad earum studium contulissent. Quod si non hic tantus fructus ostenderetur, et si ex his studiis delectatio sola peteretur, tamen, ut opinor, hanc animi adversionem humanissimam ac liberalissimam judicaretis. Nam ceterae neque temporum sunt, neque aetatum omnium, neque locorum; haec studia adolescentiam alunt, senectutem oblectant, secundas res ornant, adversis perfugium ac solatium praebent ; delectant domi, non impediunt foris, pernoctant nobiscum, peregrinantur, rusticantur. Quod si ipsi haec neque attingere, neque sensu nostro gustare possemus, tamen ea mirari deberemus, etiam quum in aliis videremus. Esse ex hoc numero
hunc Africanum,
hominem divinum,
quem viderunt
nostri patres;
ex hoc
C. Laelium L. Furium,
homines moderatissimos
et continentissimos ;
ex hoc virum fortissimum
et doctissimum
illis temporibus,
M. Catonem illum senem
qui profecto,
si adjuvarentur nihil
litteris ad percipiendam
colendamque virtutem,
nunquam se contulissent
ad studium earum.
Quod si hic tantus fructus
non ostenderetur,
et si sola delectatio
peteretur ex his studiis ,
tamen, ut opinor,
judicaretis humanissimam,
ac liberalissimam
hanc adversionem animi.
Nam ceterae sunt
neque omnium temporum,
neque aetatum,
neque locorum;
haec studia
alunt adolescentiam,
oblectant senectutem,
ornant res secundas,
praebent adversis
perfugium ac solatium;
delectant domi,
non impediunt foris,
pernoctant, peregrinantur,
rusticantur nobiscum.
Quod si possemus ipsi
neque attingere hic,
neque gustare nostro sensu,
tamen deberemus mirari ea,
etiam quum videremus
in aliis.
Je dis être de ce nombre 
ce Scipion l'Africain, 
homme divin,
lequel ont vu 
nos pères (ancêtres); 
de ce nombre 
C. Lélius, L. Furius, 
hommes très-modérés 
et très-sages; 
de ce nombre un homme très-courageux 
et le plus savant 
de ces temps-là, 
M. Caton ce fameux vieillard 
ces hommes assurément, 
s'ils n'étaient aidés en rien 
par les lettres pour connaître 
et pratiquer la vertu, 
jamais ne se seraient transportés 
à l'étude d'elles. 
Que si ce si grand fruit 
ne se montrait, 
et si le seul plaisir 
était demandé à ces études, 
cependant, comme je pense, 
vous jugeriez être la plus douce 
et la plus libérale des occupations 
cette occupation de l'esprit. 
En effet les autres ne sont 
ni de tous les temps, 
ni de tous les âges, 
ni de tous les lieux ; 
ces études 
nourrissent l'adolescence, 
réjouissent la vieillesse, 
ornent les choses prospères, 
fournissent aux choses contraires 
refuge et consolation; 
récréent à la maison, 
n'embarrassent pas au dehors, 
passent-la-nuit, voyagent, 
vont-à-la-campagne avec-nous. 
Que si nous ne pouvions nous-mêmes 
ni atteindre ces douceurs
ni les goûter par notre sens, 
cependant nous devrions admirer elles, 
même quand nous les verrions 
dans les autres.
produit je ne sais quoi d'éclatant et de singulier. De ce nombre fut, du temps de nos pères, cet homme divin, Scipion l'Africain ; de ce nombre, C. Lélius, L. Furius, ces modèles de modération et de sagesse; de ce nombre, l'homme le plus ferme, le plus savant de son siècle, Caton l'Ancien. Certes, s'ils avaient cru les lettres inutiles pour connaître et pratiquer la vertu, jamais ils ne se fussent appliqués à cette étude. Mais quand on n'aurait pas en vue ce grand avantage, quand on n'y rechercherait que le seul plaisir; vous jugeriez encore, je pense, qu'il n'existe pas de récréation plus honnête ni plus digne d'hommes libres. En effet, les autres délassements ne sont ni de tous les instants, ni de tous les âges, ni de tous les lieux : les lettres nourrissent la jeunesse, charment la vieillesse, font l'ornement de la prospérité, fournissent dans l'adversité un asile et une consolation ; elles nous récréent dans nos foyers, ne nous embarrassent point au dehors ; elles veillent avec nous; elles nous suivent en voyage, à la campagne. Quand nous ne pourrions ni atteindre les charmes, ni goûter par nous-mêmes les douceurs des lettres, nous ne devrions pas moins les admirer dans les autres.

30 -31

VIII. Quis nostrum tam animo agresti ac duro, fuit, ut Roscii morte nuper non commoveretur? Qui quum esset senex mortuus, tamen propter excellentem artem ac venustatem videbatur omnino mori non debuisse. Ergo ille corporis motu tantum amorem sibi conciliarat a nobis omnibus: nos animorum incredibiles motus celeritatemque ingeniorum negligemus ? Quoties ego hunc Archiam vidi, judices (utar enim vestra benignitate, quoniam me in hoc novo genere dicendi tam diligenter attenditis), quoties ego hunc vidi, quum litteram scripsisset nullam, magnum numerum optimorum versuum de his ipsis rebus quae tum agerentur, dicere ex tempore ? quoties revocatum eamdem rem dicere, commutatis verbis atque sententiis? Quae vero accurate cogitateque scripsisset, ea sic vidi probari, ut ad veterum scriptorum laudem pervenirent. Hunc ego non dili VIII. Quis nostrum 
fuit animo tam agresti 
ac duro, 
ut nuper 
non commoveretur 
morte Roscii ? 
Qui quum esset mortuus
senex, 
videbatur tamen 
propter artem excellentem 
ac venustatem, 
non debuisse mori omnino.
Ergo ille 
sibi conciliarat amorem 
a nobis omnibus 
motu corporis tantum :
nos negligemus 
motus incredibiles 
animorum 
celeritatemque 
ingeniorum ? 
Quoties ego vidi 
hunc Archiam, judices 
(utar enim 
vestra benignitate, 
quoniam attenditis me 
tam diligenter 
in hoc novo genere dicendi),
quoties ego vidi hunc, 
quum scripsisset 
nullam litteram, 
dicere ex tempore 
magnum numerum 
optimorum versuum 
de his rebus ipsis 
quae tum agerentur? 
quoties
revocatum 
dicere eamdem rem, 
verbis commutatis 
atque sententiis? 
Vidi vero, 
ea quae scripsisset 
accurate cogitateque, 
probari sic, 
ut pervenirent ad laudem
veterum scriptorum.
VIII. Qui de nous 
fut d'un esprit si sauvage 
et si dur, 
que dernièrement 
il ne fût pas ému 
de la mort de Roscius ? 
Qui comme il était mort 
vieux, 
paraissait cependant 
pour son art excellent 
et sa grâce 
n'avoir pas dû mourir du tout. 
Ainsi donc cet acteur 
s'était concilié l'amour 
de la part de nous tous 
par le mouvement du corps seulement 
nous négligerons 
les mouvements incroyables 
des esprits 
et la célérité 
des génies ? 
Combien de fois ai-je vu 
cet Archias, juges 
(car j'userai (je profiterai) 
de votre bienveillance, 
puisque vous écoutez moi 
si soigneusement 
dans ce nouveau genre de parler), 
combien de fois ai-je vu lui 
quoi qu'il n'eût écrit 
aucune lettre (aucun ouvrage), 
dire dès le moment (sur-le-champ) 
un grand nombre 
d'excellents vers 
sur ces choses mêmes 
qui alors étaient agitées (en question) ? 
combien de fois l'ai-je vu 
invité-de-nouveau 
à dire la même chose, 
la répéter les mots étant changés 
et les pensées aussi
Mais j'ai vu, 
ces vers qu'il avait écrits 
avec-soin et avec-réflexion, 
être approuvés tellement, 
qu'ils parvenaient à la gloire 
des anciens écrivains.
VIII. Qui de nous dernièrement a eu le coeur assez dur, assez cruel pour n'être pas sensible à la mort de Roscius ? Quoiqu'il soit mort vieux, il nous semblait qu'il n'aurait jamais dû mourir, tant il excellait dans son art, tant il y déployait de grâce. Il ne nous avait charmés que par les attitudes de son corps, et nous négligerions la vivacité, l'incroyable activité de l'esprit! Combien de fois ai-je vu Archias (car je profiterai, juges, de l'attention que vous voulez bien accorder à ce nouveau genre de plaidoyer) , combien de fois l'ai-je vu improviser un grand nombre de vers excellents sur les sujets dont nous nous entretenions? Combien de fois, prié de les répéter, l'ai-je vu exprimer les mêmes choses en changeant les mots et les pensées? Quant aux sujets qu'il avait étudiés et écrits avec soin, je les ai vu comblés d'éloges autant que les chefs-d'oeuvre de l'anti

32- 33

gam? non admirer? non omni ratione defendendum putem? Atqui sic a summis hominibus eruditissimisque accepimus, ceterarum rerum studia et doctrina et praeceptis et arte constare : poetam natura ipsa valere, et mentis viribus excitari, et quasi divino quodam spiritu inflari. Quare suo jure noster ille Ennius sanctos appellat poetas, quod quasi deorum aliquo dono atque munere commendati nobis esse videantur.
Sit igitur, judices, sanctum apud vos, humanissimos homines, hoc poetae nomen, quod nulla unquam barbaria violavit. Saxa et solitudines voci respondent ; bestiae saepe immanes canto flectuntur atque consistunt : nos, instituti rebus optimis, non poetarum voce moveamur? Homerum Colophonii civem esse dicunt suum, Chii suum vindicant, Salaminii repetunt, Smyrnaei vero suum esse confirmant: itaque etiam delubrum
Non ego diligam hunc ?
non admirer? 
non putem 
defendendum 
omni ratione ?
Atqui accepimus sic 
ab hominibus summis 
eruditissimisque, 
studia ceterarum rerum 
constare et doctrina 
et praeceptis 
et arte :
poetam valere natura ipsa, 
et excitari 
viribus mentis, 
et inflari quodam spiritu 
quasi divino. 
Quare jure suo 
noster Ennius ille 
appellat poetas sanctos, 
quod videantur 
esse commendati nobis 
quasi aliquo dono 
atque munere deorum.
Judices, 
sit igitur sanctum 
apud vos, 
homines humanissimos, 
hoc nomen poetae, 
quod nulla barbaria 
unquam violavit. 
Saxa et solitudines 
respondent voci ;
saepe bestiae immanes 
flectuntur canto 
atque consistunt 
instituti rebus optimis, 
nos, non moveamur 
voce poetarum ? 
Colophonii 
dicunt Homerum 
esse suum civem, 
Chii 
vindicant suum, 
Salaminii repetunt, 
Smyrnaei vero 
confirmant esse suum ;
Je ne chérirais pas lui ? 
je ne l'admirerais pas ? 
je ne penserais pas 
lui devant être défendu 
par tout moyen ?
Or nous avons appris ainsi 
des hommes les plus grands 
et les plus érudits, 
les études des autres choses 
consister et dans l'instruction 
et dans les préceptes 
et dans la méthode :
le poète valoir par la nature même, 
et s'élever 
par les forces de son intelligence, 
et être inspiré par un certain esprit 
presque divin. 
Aussi avec un droit sien (personnel)
notre Ennius, ce fameux poète
appelle les poètes sacrés, 
parce qu'ils paraissent 
être recommandée à nous 
comme par quelque don 
et quelque présent des dieux. 
Juges, 
qu'il soit donc sacré 
auprès de vous, 
hommes très-instruits, 
ce nom de poète, 
que nulle barbarie 
n'a jamais violé. 
Les rochers et les solitudes 
répondent à leur voix ; 
souvent les bêtes féroces 
sont fléchies par leur chant 
et s'arrêtent 
formés par les choses les meilleures, 
nous, nous ne serions pas émus 
par la voix des poètes ?
Les Colophoniens 
disent Homère 
être leur citoyen, 
les habitants de-Chio 
le revendiquent comme leur, 
les Salaminiens le réclament, 
mais les Smyrnéens 
affirment lui être leur citoyen:


quité. Et je ne chérirais pas, je n'admirerais pas un tel homme ? je ne me croirais pas obligé de le défendre avec tout le zèle dont je suis capable ?
Les hommes les plus instruits nous ont enseigné que les autres talents dépendent de l'étude, des préceptes et de l'art, tandis que le poète ne doit rien qu'à la nature, qu'il s'élève par la force même de son génie, que c'est comme un souffle divin qui l'inspire. Aussi notre grand Ennius a-t-il le droit d'appeler sacrés les poètes, parce qu'ils nous sont pour ainsi dire accordés comme un présent par la faveur des dieux.
Juges, ô vous qui avez tant d'amour pour les arts, qu'il soit donc sacré pour vous, ce nom de poète que jamais ne viola la barbarie elle-même. Les rochers et les solitudes répondent à la voix des poètes ; souvent les bêtes féroces s'arrêtent, fléchies par leurs accents : et nous, formés par les lettres, nous ne serions pas sensibles à la douceur de leurs chants ? Les habitants de Colophon disent qu'Homère était leur concitoyen, ceux de Chio se l'attribuent, ceux de Salamine le réclament, ceux de Smyrne le disputent à tous les autre.

34 - 35

ejus in oppido dedicaverunt : permulti alii praeterea pugnant inter se atque contendunt.
IX. Ergo illi alienum, quia poeta fuit, post mortem etiam expetunt : nos hunc vivum, qui et voluntate et legibus noster est, repudiabimus? Praesertim quum omne olim studium atque omne ingenium contulerit Archias ad populi romani gloriam laudemque celebrandam ? Nam et cimbricas res adolescens attigit, et ipsi illi C. Mario, qui durior ad haec studia videbatur, jucundus fuit. Neque enim quisquam est tam aversus a Musis, qui non mandari versibus aeternum suorum laborum facile praeconium patiatur. Themistoclem illum, summum Athenis virum, dixisse aiunt, quum ex eo quaereretur, quod acroama aut cujus vocem libentissime audiret : « Ejus, a quo sua virtus optime praedicaretur. » Itaque ille Marius item eximie L. Plotium dilexit, cujus ingenio putabat ea quae gesserat posse celebrari.
itaque etiam dedicaverunt 
delubrum ejus in oppido ; 
permulti alii praeterea 
pugnant inter se 
atque contendunt. 
IX. Ergo illi 
expetunt alienum, 
etiam post mortem, 
quia fuit poeta : 
nos repudiabimus 
hunc vivum, 
qui est noster 
et voluntate et legibus ? 
Praesertim quum Archias 
contulerit olim 
omne studium 
atque omne ingenium 
ad celebrandam 
gloriam laudemque 
populi romani ? 
Nam adolescens et attigit 
res cimbricas, 
et fuit jucundus 
illi ipsi C. Mario, 
qui videbatur durior 
ad haec studia. 
Neque enim quisquam est 
tam aversus a Musis, 
qui non patiatur facile 
praeconium aeternum 
suorum laborum 
mandari versibus. 
Aiunt 
illum Themistoclem, 
summum virum Athenis, 
quum quaereretur ex eo 
quod acroama, 
aut vocem cujus 
audiret libentissime, 
dixisse : "Ejus, 
a quo sua virtus 
praedicaretur optime."
Itaque item ille Marius 
dilexit eximie L. Plotium, 
ingenio cujus 
putabat ea quae gesserat 
posse celebrari.

aussi même ils ont dédié 
un temple de lui dans leur ville ;
beaucoup d'autres en outre 
combattent entre eux 
et s'efforcent de l'avoir.
IX. Ainsi ceux-là 
désirent posséder un étranger, 
même après sa mort, 
parce qu'il fut poète :
nous, nous repousserons 
celui-ci vivant, 
qui est notre concitoyen 
et par sa volonté et par nos lois ? 
Surtout quand Archias 
a réuni autrefois 
toute son ardeur 
et tout son talent 
pour célébrer 
la gloire et la louange 
du peuple romain ? 
Car jeune et il a touché 
les affaires des-Cimbres, 
et il a été agréable 
à ce même C. Marius, 
qui paraissait plus ( trop ) dur 
pour ces études. 
Et en effet personne n'est 
si détourné ( ennemi ) des Muses, 
qu'il ne souffre facilement 
l'éloge éternel 
de ses travaux 
être confié aux vers (être chanté). 
Ils disent (on dit) 
ce fameux Thémistocle, 
très-grand homme à Athènes, 
quand on demandait de (à) lui 
quel concert, 
ou la voix de qui 
il entendrait le plus volontiers, 
avoir dit : "La voix de celui 
par qui sa valeur 
serait célébrée le mieux."
Aussi de même ce fameux Marius 
chérit singulièrement L. Plotius, 
par le talent duquel 
il pensait ces actions qu'il avait faites
pouvoir être célébrées.

Aussi lui ont-ils dédié un temple dans leur ville. Plusieurs autres peuples encore se l'arrachent à l'envi.
IX. Ainsi, ils réclament un étranger, même après sa mort, parce qu'il était poète. Celui-ci, qui est vivant, qui veut être notre concitoyen, qui l'est d'après nos lois, le rejetterons-nous, quand il a depuis longtemps consacré tous ses travaux et tous ses talents à la gloire du peuple romain ? Dans sa jeunesse, il a chanté la guerre des Cimbres; et Marius lui-même, qui paraissait peu sensible au mérite des lettres, l'honora de son estime. En effet; il n'y a point d'homme assez ennemi des Muses qui ne voie avec plaisir l'éloge de ses travaux éternisé par la poésie. Thémistocle, cet illustre Athénien, à qui l'on demandait un jour quel concert ou quel chant il entendrait le plus volontiers, répondit, dit-on : "La voix qui célébrerait le mieux mes hauts faits." Aussi le même Marius chérissait-il singulièrement L. Plotius, qu'il croyait capable, par son talent, de chanter ses exploits

36 - 37

Mithridaticum vero bellum, magnum atque difficile, et in multa varietate terra marique versatum, totum ab hoc expressum est: qui libri non modo L. Lucullum, fortissimum et clarissimum virum, verum etiam populi romani nomen illustrant. Populus enim romanus aperuit, Lucullo imperante, Pontum, et regiis quondam opibus et ipsa natura regionis vallatum; populi romani exercitus, eodem duce, non maxima manu innumerabiles Armeniorum copias fudit; populi romani laus est, urbem amicissimam Cyzicenorum ejusdem consilio ex omni 
impetu regio ac totius belli ore ac faucibus ereptam esse, atque servatam ; nostra semper feretur et praedicabitur, L. Lucullo dimicante, cum interfectis ducibus depressa hostium classis, et incredibilis apud Tenedum pugna illa navalis : nostra sunt tropaea, nostra monumenta, nostri triumphi. Quare, quorum ingeniis haec feruntur, ab iis populi romani fama celebratur.
Ab hoc vero 
bellum Mithridaticum, 
magnum atque difficile, 
et versatum terra marique 
in multa varietate, 
est expressum totum : 
qui libri illustrant 
non modo L. Lucullum,
virum fortissimum 
et clarissimum, 
verum etiam 
nomen populi romani. 
Populus enim romanus, 
Lucullo imperante, 
aperuit Pontum, 
vallatum quondam 
et opibus regiis 
et natura ipsa regionis; 
exercitus populi romani 
fudit, eodem duce, 
manu non maxima 
copias innumerabiles 
Armeniorum ;
est laus populi romani, 
urbem Cyzicenorum 
amicissimam 
esse ereptam 
consilio ejusdem 
ex omni impetu regio 
ac ore ac faucibus 
totius belli, 
atque servatam ; 
semper feretur nostra, 
et preedicabitur 
classis hostium depressa 
cum ducibus interfectis, 
L. Lucullo dimicante, 
et illa pugna navalis 
incredibilis 
apud Tenedum :
tropaea sunt nostra, 
monumenta nostra, 
triumphi nostri. 
Quare fama populi romani
celebratur ab iis 
ingeniis quorum 
haec feruntur.

Mais ce fut par lui 
que la guerre de-Mithridate 
guerre grande et difficile, 
et roulée (faite) sur terre et sur mer 
en grande variété d'événements
fut traitée tout-entière :
ces livres illustrent 
non-seulement L. Lucullus, 
homme très-courageux 
et très-illustre, 
mais aussi 
le nom du peuple romain. 
Car le peuple romain, 
Lucullus commandant, 
ouvrit le Pont, 
fortifié jadis 
et par les forces du-roi 
et par la nature même du pays ; 
l'armée du peuple romain 
a mis-en-fuite, sous le même chef, 
avec une troupe non très-grande 
les troupes innombrables 
des Arméniens ; 
c'est une gloire du peuple romain, 
la ville des Cyzicéniens 
très-amie de nous 
avoir été arrachée 
par la prudence du même Lucullus 
de toute la fureur du-roi 
et de la bouche et de la gorge 
de toute la guerre, 
et avoir été sauvée; 
toujours elle sera dite nôtre, 
et sera célébrée 
la flotte des ennemis coulée-bas 
avec leurs généraux tués, 
L. Lucullus combattant, 
et cette bataille navale 
incroyable 
auprès de Ténédos: 
ces trophées sont les nôtres,
ces monuments sont les nôtres. 
ces triomphes sont les nôtres.
 Aussi la renommée du peuple romain 
est célébrée par ceux-là 
par les génies desquels 
ces exploits sont publiés.

La guerre contre Mithridate, guerre importante et difficile qui se fit sur terre et sur mer avec des succès si variés, a été célébrée tout entière par Archias. Ce poème immortalise non seulement la valeur du célèbre Lucullus, mais aussi la gloire du peuple romain. En effet, si le peuple romain qui, sous le commandement de Lucullus, a pénétré dans le Pont, qu'avaient défendu jusque-là et la puissance de son roi et la nature même du pays ; ce sont les armées du peuple romain qui, sous le même général, avec des troupes peu nombreuses, ont mis en déroute les troupes innombrables de l'Arménie; c'est au peuple romain qu'appartient la gloire d'avoir, par la prudence du même Lucullus, sauvé la ville de Cyzique, notre alliée fidèle, de toute la fureur du roi, et de l'avoir préservée des horreurs d'une guerre cruelle ; toujours on redira, toujours on célébrera notre incroyable victoire remportée à Ténédos sous les ordres du même chef, où les ennemis virent leurs généraux tués et leur flotte coulée à fond ce sont nos trophées, nos monuments, nos triomphes. Ainsi, ceux dont le génie les chantent, célèbrent la gloire du peuple romain.

38 - 39

Carus fuit Africano superiori noster Ennius : itaque etiam in sepulcro Scipionum putatur is esse constitutus e marmore. At iis laudibus certe non solum ipsi, qui laudantur, sed etiam populi romani nomen ornatur. In caelum hujus proavus Cato tollitur : magnus honos populi romani rebus adjungitur. Omnes denique illi Maximi, Marcelli, Fulvii, non sine communi omnium nostrum laude decorantur. Ergo illum qui haec fecerat, Rudium hominem, majores nostri in civitatem receperunt : 
nos hunc Heracleensem, multis civitatibus expetitum, in hac autem legibus constitutum, de nostra civitate ejiciemus?
X. Nam si quis minorem gloriae fructum putat ex graecis versibus percipi, quam ex latinis, vehementer errat : propterea quod graeca leguntur in omnibus fere gentibus, latina suis finibus, exiguis sane, continentur. Quare si res eae quas gessimus, orbis terrae regionibus definiuntur , cupere debemus,
Noster Ennius fuit carus 
superiori Africano : 
itaque is putatur etiam 
esse constitutus 
e marmore 
in sepulcro Scipionum. 
At certe non solum 
ipsi, qui laudantur, 
sed etiam 
nomen populi romani 
ornatur iis laudibus. 
Cato proavus hujus 
tollitur in coelum 
magnus honos adjungitur 
rebus populi romani. 
Denique 
omnes illi Maximi, 
Marcelli, Fulvii, 
non decorantur 
sine laude communi 
nostrum omnium. 
Ergo nostri majores 
receperunt in civitatem 
hominem Rudium, 
illum qui fecerat haec 
ejiciemus nos 
de nostra civitate 
hunc Heracleensem, 
expetitum 
multis civitatibus, 
constitutum autem in hac 
legibus?
X. Nam si quis putat 
percipi ex versibus graecis 
fructum gloriae minorem, 
quam ex latinis, 
errat vehementer 
propterea quod 
graeca leguntur 
in fere omnibus gentibus 
latina continentur 
suis finibus, 
exiguis sane. 
Quare si eae res 
quas gessimus, 
definiuntur regionibus 
orbis terrae,

Notre poète Ennius fut cher, 
au premier Scipion l'Africain :
aussi il est pensé même 
avoir été dressé (représenté) 
en marbre 
sur le sépulcre des Scipions. 
Mais certainement non-seulement
ceux-mêmes, qui sont loués 
mais encore 
le nom du peuple romain 
est paré par ces louanges. 
Caton le bisaïeul de celui-ci 
est élevé au ciel 
un grand honneur s'ajoute 
aux exploits du peuple romain. 
Enfin 
tous ces Maximus, 
ces Marcellus, ces Fulvius, 
ne sont pas honorés 
sans une gloire commune 
de (à) nous tous. 
Aussi nos ancêtres 
ont reçu dans leur cité 
un homme de-Rudia,
celui qui avait fait ces éloges 
nous rejetterons-nous 
de notre cité, 
ce citoyen d'-Héraclée, 
recherché 
par plusieurs villes, 
et établi dans celle-ci 
par les lois?
X. Car si quelqu'un pense 
être reçu (recueilli) des vers grecs 
un fruit de gloire moindre, 
que des vers latins, 
il se trompe violemment 
parce que
les ouvragea grecs se lisent 
chez presque tous les peuples,
les ouvrages latins sont renfermés 
dans leurs limites, 
étroites certainement. 
Aussi si ces exploits 
que nous avons faits, 
sont limités par les régions 
du globe de la terre,

Notre poète Ennius fut cher au premier Scipion l'Africain : on pense même que c'est sa figure en marbre qu'on voit sur le tombeau des Scipions. Mais assurément ses vers font autant d'honneur au peuple romain qu'aux héros qu'il a loués. Il élève jusqu'au ciel Caton, le bisaïeul de celui qui m'écoute, et il ajoute par là un grand éclat à la gloire du nom romain. En un mot, l'éloge des Maximus, des Marcellus, des Fulvius, nous le partageons tous avec eux. Voilà pourquoi nos aïeux ont donné le titre de citoyen à un homme de Rudia ; et nous chasserions de notre cité un citoyen d'Héraclée, recherché par plusieurs autres villes, établi dans celle-ci en vertu de nos lois ? 
X. Ce serait une grande erreur que de penser que la poésie grecque est moins propre que la poésie latine à répandre la renommée des grands hommes : en effet, presque tous les peuples lisent les ouvrages des Grecs, tandis que les livres latins sont circonscrits dans les étroites limites de l'Italie. Si donc nos exploits n'ont d'autres bornes

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quo manuum nostrarum tela pervenerint, eodem gloriam famamque penetrare : quod quum ipsis populis, de quorum rebus scribitur, haec ampla sunt, tum iis certe qui de vita gloriae causa dimicant, hoc maximum et periculorum incitamentum est et laborum. Quam multos scriptores rerum suarum magnus ille Alexander secum habuisse dicitur ! Atque is tamen, quum in Sigeo ad Achillis tumulum adstitisset : "O fortunate, inquit, adolescens, qui tuae virtutis Homerum praeconem inveneris! " Et vere. Nam, nisi Ilias ille exstitisset, idem tumulus, qui corpus ejus contexerat, nomen etiam obruisset. Quid? Noster, hic Magnus, qui cum virtute fortunam adaequavit, nonne Theophanem Mitylenaeum, scriptorem rerum suarum, in concione militum civitate donavit? Et nostri illi fortes viri, sed rustici ac milites, dulcedine quadam gloriae commoti,
debemus cupere, 
gloriam famamque
penetrare eodem, 
quo tela 
nostrarum manuum 
pervenerint: 
quod quum haec 
sunt ampla 
populis ipsis, 
de rebus quorum scribitur, 
tum hoc incitamentum 
et periculorum 
et laborum 
est maximum certe 
iis qui dimicant de vita 
causa gloriae. 
Quam multos scriptores 
suarum rerum 
ille magnus Alexander 
dicitur habuisse secum ! 
Atque tamen, 
quum adstitisset 
ad tumulum Achillis 
in Sigeo, 
is inquit 
"O fortunate adolescens, 
qui inveneris Homerum 
praeconem tuae virtutis !"
Et vere. 
Nam idem tumulus, 
qui contexerat corpus ejus, 
obruisset etiam nomen, 
nisi ille Ilias exstitisset. 
Quid ? Hic Magnus, 
noster, 
qui adaequavit 
fortunam cum virtute, 
nonne donavit civitate 
in concione militum, 
Theophanem Mitylenaeum, 
scriptorem suarum rerum ? 
Et nostri 
illi viri fortes, 
sed rustici ac milites, 
commoti 
quadam dulcedine gloriae,
quasi participes
nous devons désirer, 
notre gloire et notre renommée 
pénétrer là-même, 
où les traits 
de nos mains 
sont parvenus (ont pénétré): 
parce que quand ces avantages 
sont considérables 
pour les peuples eux-mêmes, 
sur les actions desquels on écrit, 
alors cet encouragement 
au milieu et des dangers 
et des travaux 
est très-grand certainement 
à ceux qui combattent pour la vie 
par le motif de la gloire. 
Combien d'écrivains 
de ses exploits 
ce grand Alexandre 
est dit avoir eu avec-lui ! 
Et cependant, 
lorsqu'il se fut arrêté 
au tombeau d'Achille 
sur le promontoire Sigée, 
ce héros dit: 
"O fortuné jeune-homme, 
qui as trouvé un Homère 
pour héraut de ta valeur!"
Et il parlait vraiment. 
Car le même tombeau, 
qui avait couvert le corps de lui, 
eût enseveli aussi son nom, 
si cette célèbre Iliade n'eût pas existé. 
Quoi ! Ce Pompée surnommé le Grand,
notre concitoyen
qui égala 
le bonheur avec le courage, 
ne gratifia-t-il pas du droit-de-cité 
dans l'assemblée de ses soldats,
Théophane de-Mitylène, 
écrivain de ses exploits? 
Et nos concitoyens
ces hommes courageux, 
mais rustiques et soldats,
fortement-ébranlés 
par une certaine douceur de gloire, 
comme participant


que celles du monde, nous devons désirer que notre gloire et notre renommée aillent aussi loin que nos armes. Ce voeu, digne des peuples dont les lettres célèbrent les exploits, peut encore offrir aux guerriers qui exposent leur vie en vue de la gloire, le plus puissant encouragement au milieu des dangers et des combats. Combien d'écrivains Alexandre le Grand n'avait-il pas auprès de sa personne !
Cependant, quand il s'arrêta au tombeau d'Achille, sur le promontoire de Sigée : "Que tu es heureux! s'écria-t-il, jeune héros, d'avoir trouvé un Homère pour chanter ta valeur !" Il disait vrai ; car, sans l'Iliade, le même tombeau aurait enseveli ses cendres et sa renommée. Et que dirai-je de notre grand Pompée, dont le mérite égale la fortune ? Théophane de Mitylène, qui écrivait ses exploits, n'a-t-il pas reçu de lui, en présence de son armée, le titre de citoyen ? Et nos braves soldats, malgré toi rudesse, comme touchés de

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quasi participes ejusdem laudis, magno illud clamore approbaverunt.
Itaque, credo, si civis romanus Archias legibus non esset, ut ab aliquo imperatore civitate donaretur, perficere non potuit ! Sulla, quum Hispanos et Gallos donaret, credo, hunc petentem repudiasset! Quem nos in concione vidimus, quum ei libellum malus poeta de populo subjecisset, quod epigramma in eum fecisset tantummodo alternis versibus longiusculis, statim ex iis rebus, quas tunc vendebat, jubere ei praemium tribui sub ea conditione, ne quid postea scriberet.» Qui sedulitatem mali poetae duxerit aliquo tamen praemio dignam, hujus ingenium et virtutem in scribendo et copiam non expetisset? Quid? a Q. Metello Pio, familiarissimo suo, qui civitate multos donavit, neque per se, neque per Lucullos impetravisset? qui praesertim usque eo de suis rebus scribi cuperet,
ejusdem laudis, 
approbaverunt illud 
magno clamore. 
Itaque, credo, 
si Archias non esset 
civis romanus legibus 
non potuit perficere, 
ut donaretur civitate 
ab aliquo imperatore !
Sulla, credo, repudiasset 
hunc petentem, 
quum donaret 
Hispanos et Gallos ! 
Nos vidimus quem 
in concione, 
quum malus poeta 
de populo 
subjecisset ei libellum, 
quod fecisset 
epigramma in eum 
tantummodo versibus 
alternis longiusculis, 
jubere statim 
praemium tribui ei 
ex iis rebus, 
quas vendebat tunc, 
sub ea conditione, 
"ne scriberet quid postea."
Qui duxerit sedulitatem 
mali poetae 
dignam tamen 
aliquo praemio 
non expetisset 
ingenium hujus 
et virtutem et copiam 
in scribendo ? 
Quid? impetravisset 
neque per se, 
neque per Lucullos, 
a Q. Metello Pio, 
suo familiarissimo, 
qui donavit multos 
civitate ? 
qui praesertim cuperet 
scribi de suis rebus 
usque eo ut tamen 
dederet suas aures
de la même gloire, 
approuvèrent cela 
avec une grande acclamation. 
Ainsi, je le crois, 
si Archias n'était pas 
citoyen romain par les lois, 
n'a-t-il pu faire en sorte
qu'il fût gratifié du droit-de-cité
par quelque général! 
Sylla, je le crois, eut repoussé 
celui-ci la demandant, 
lorsqu'il en gratifiait 
des Espagnols et des Gaulois ! 
Nous avons vu celui-ci 
dans une assemblée, 
lorsqu'un mauvais poète 
sorti du peuple 
eût présenté à lui un placet, 
parce qu'il avait fait 
une épigramme pour lui 
seulement en vers alternés un-peu-plus-longs (distiques), 
ordonner aussitôt 
une récompense être donnée à lui 
de ces objets 
qu'il vendait alors, 
sous cette condition,
"qu'il n'écrirait rien par la suite."
Celui qui jugea l'empressement 
d'un mauvais poète 
digne cependant 
de quelque récompense, 
n'aurait-il pas recherché 
le talent de celui-ci 
et sa force et son abondance 
en écrivant (de style) ? 
Quoi ? il ne l'eût obtenu 
ni par lui-même, 
ni par les Lucullus, 
de Q. Métellus Pius, 
son ami-intime, 
qui gratifia plusieurs 
du titre-de-citoyen ?
lui qui surtout désirait 
être écrit (qu'on écrivit)  sur ses exploits
jusqu'à ce point que cependant 
il livrait ses oreilles
cette gloire qu'ils semblaient partager avec leur général, ne l'ont-ils pas approuvé par leurs bruyantes acclamations ?
Sans doute, si Archias n'était pas citoyen par nos lois, il n'aurait pu obtenir ce titre de quelqu'un de nos généraux! Sylla, sans doute, le lui eût refusé, Sylla qui l'accordait aux Espagnols et aux Gaulois ! Nous l'avons vu, en pleine assemblée, récompenser un mauvais poète du peuple qui lui présentait un placet, pour avoir composé quelques distiques en son honneur, en lui faisant donner à l'instant une portion des objets qu'il vendait alors, "à la condition qu'il n'écrirait plus." Celui qui jugea à propos de récompenser la bonne volonté d'un méchant poète n'aurait-il pas fait la plus grand cas du génie, de la force et de la fécondité d'Archias ? Archias n'aurait-il pu encore obtenir le titre de citoyen, ou par lui-même, ou par les Lucullus, ou par Métellus Pius, son ami intime, qui l'a accordé à beaucoup d'autres, qui désirait si ardemment qu'on écrivit ses ex-

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ut etiam Cordubae natis poetis, pingue quiddam sonantibus atque peregrinum, tamen aures suas dederet. 
XI. Neque enim est hoc dissimulandum, quod obscurari non potest, sed prae nobis ferendum : trahimur omnes laudis studio, et optimus quisque maxime gloria ducitur. Ipsi illi philosophi etiam illis libellis quos de contemnenda gloria scribunt, nomen suum inscribunt : in eo ipso, in quo praedicationem nobilitatemque despiciunt, praedicari de se ac nominari volunt. Decimus quidem Brutus, summus ille vir et imperator, Attii, amicissimi sui, carminibus templorum ac monumentorum aditus exornavit suorum. Jam vero ille qui cum Aetolis, Ennio comite, bellavit, Fulvius, non dubitavit Martis manubias Musis consecrare. Quare, in qua urbe imperatores prope armati poetarum nomen et Musarum delubra coluerunt, in ea non debent togati judices a Musarum honore et a poetarum salute abhorrere.
etiam poetis 
natis Cordubae, 
sonantibus quiddam 
pingue atque peregrinum.
XI. Neque enim 
hoc quod non potest 
obscurari 
est dissimulandum, 
sed ferendum prae nobis :
omnes trahimur 
studio laudis, 
et quisque optimus 
ducitur maxime gloria. 
Illi philosophi ipsi 
etiam illis libellis 
quos scribunt 
de gloria contemnenda, 
inscribunt suum nomen  :
volunt praedicari de se 
ac nominari in eo ipso, 
in quo despiciunt 
praedicationem 
nobilitatemque. 
Decimus quidem Brutus, 
ille summus vir 
et imperator, 
exornavit aditus 
templorum 
ac suorum monumentorum 
carminibus Attii, 
sui amicissimi. 
Jam vero ille Fulvius 
qui bellavit 
cum Aetolis, 
Ennio comite, 
non dubitavit 
consecrare Musis 
manubias Martis. 
Quare, in ea urbe 
in qua imperatores 
prope armati 
coluerunt nomen poetarum 
et delubra Musarum, 
judices togati 
non debent abhorrere 
ab honore Musarum 
et a salute poetarum.

même aux poètes 
nés à Cordoue, 
faisant-retentir quelque chose 
de gras et d'étranger.
XI. Et en effet 
ce qui ne peut 
être obscurci 
n'est pas devant être dissimulé, 
mais devant être porté devant nous :
tous nous sommes entraînés 
par l'amour de la louange, 
et chacun le meilleur 
est conduit le plus par la gloire. 
Ces philosophes eux-mêmes 
même dans ces livres 
qu'ils écrivent 
sur la gloire à-mépriser, 
y inscrivent leur nom :
ils veulent qu'il soit parlé d'eux 
et être nommés en cet ouvrage même
dans lequel ils méprisent 
l'éloge 
et la célébrité. 
Certainement Décimus Brutus, 
ce grand homme 
et ce grand général, 
orna les entrées 
des temples 
et de ses monuments 
des vers d'Attius, 
son ami-intime. 
Mais déjà ce Fulvius 
qui a combattu 
avec (contre) les Étoliens, 
Ennius étant son compagnon, 
n'hésita pas 
à consacrer aux Muses 
les dépouilles de Mars. 
C'est pourquoi, dans cette ville 
dans laquelle des généraux 
presque encore armés 
ont honoré le nom des poëtes 
et les temples des Muses, 
des juges revêtus-de-la-toge 
ne doivent pas s'éloigner 
de l'honneur des Muses 
et du salut des poètes.
ploits qu'il prêtait avec plaisir l'oreille à des poètes natifs de Cordoue, malgré la pesanteur de leurs vers barbares?
XI. En effet, pourquoi dissimuler ce qui ne peut se cacher, ce qu'on doit avouer hardiment? Tous, nous sommes entraînés par l'amour de la gloire, et cet attrait est d'autant plus puissant que l'âme a plus de noblesse. Les philosophes mêmes mettent leur nom aux livres qu'ils composent sur le mépris de la gloire : tout en prouvant qu'il faut mépriser la louange et la célébrité, ils s'efforcent de se faire louer et connaître. Décimus Brutus, grand citoyen et grand général, a fait graver au frontispice des monuments et des temples qu'il a élevés des inscriptions d'Attius, son ami intime. Fulvius, qui se fit accompagner d'Ennius dans la guerre contre les Étoliens, ne balança pas à consacrer aux Muses les dépouilles de Mars. Aussi, dans une ville où des généraux, pour ainsi dire encore revêtus de leurs armes, ont honoré le nom des poètes et les temples des Muses, des juges, au sein de la paix, ne doivent pas être indifférents pour la gloire des Muses et pour le salut des poètes.

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Atque, ut id libentius faciatis, jam me vobis, judices, indicabo, et de meo quodam amore gloriae, nimis acri fortasse, verumtamen honesto, vobis confitebor. Nam, quas res nos in consulatu nostro vobiscum simul pro salute hujus urbis atque imperii et pro vita civium proque universa republica gessimus, attigit hic versibus atque inchoavit : quibus auditis, quod mihi magna res et jucunda visa est, hunc ad perficiendum hortatus sum. Nullam enim virtus aliam mercedem laborum periculorumque desiderat, praeter hanc laudis et gloriae : qua quidem detracta, judices, quid est, quod in hoc tam exiguo vitae curriculo et tam brevi tantis nos in laboribus exerceamus ?
Certe, si nihil animus praesentiret in posterum, et si, quibus regionibus vitae spatium circumscriptum est, eisdem omnes cogitationes terminaret suas, nec tantis se laboribus frangeret, neque tot curis vigiliisque angeretur, neque toties de vita ipsa
Atque, judices,
ut id faciatis lubentius,
indicabo me vobis jam, 
et confitebor vobis 
de quodam amore gloriae 
meo, 
nimis acri fortasse, 
verumtamen honesto. 
Nam hic attigit versibus 
atque inchoavit res 
quas nos gessimus 
in nostro consulatu
simul vobiscum 
pro salute hujus urbis
atque imperii, 
et pro vita civium
proque universa republica :
quibus auditis, 
hortatus sum hunc
ad perficiendum
quod res visa est mihi 
magna et jucunda. 
Virtus enim desiderat 
nullam aliam mercedem 
laborum periculorumque
praeter hanc
laudis et gloriae 
qua quidem detracta, 
judices, quid est,
quod exerceamus nos 
in tantis laboribus 
in hoc curriculo vitae
tam exiguo et tam brevi ?
Certe, si animus 
praesentiret nihil 
in posterum, 
et si terminaret 
omnes suas cogitationes
eisdem regionibus
quibus spatium vitae
est circumscriptum ; 
nec se frangeret 
tantis laboribus, 
neque angeretur 
tot curis vigiliisque, 
neque dimicaret toties 
de vita ipsa.
Et, juges,
pour que vous le fassiez plus volontiers,
je ferai-connaître moi à vous de suite
et je ferai-l'aveu à vous
d'un certain amour de la gloire
mien (qui m'appartient),
trop vif peut-être,
mais cependant honorable.
Car celui-ci a touché en vers
et a entrepris de raconter les actions
que nous avons faites
dans notre consulat
ensemble avec-vous
pour le salut de cette ville
et de cet empire,
et pour la vie des citoyens
et pour toute la république
ces vers entendus,
j'ai exhorté celui-ci
à les achever,
parce que le sujet a paru à moi
grand et agréable.
Car la vertu ne désire
aucune autre récompense
de ses travaux et de ses dangers,
excepté (que) celle
de la louange et de la gloire
laquelle certes étant ôtée,
juges, quel motif existe,
que nous exercions nous
dansde si grands travaux
en cette carrière de la vie
si exiguë et si courte?
Certes, si notre âme 
ne pressentait rien 
pour le temps à-venir, 
et si elle bornait 
toutes ses pensées 
par les mêmes limites 
par lesquelles l'espace de la vie 
est circonscrit; 
et elle ne se briserait pas 
par tant de fatigues, 
et ne se tourmenterait 
pas par tant de soucis et de veilles , 
et ne combattrait pas tant de fois 
pour la vie même
Et, pour que vous vous y portiez avec plus de plaisir, ô juges, je vais vous ouvrir mon coeur, et vous avouer ma passion pour la gloire, trop vive sans doute, mais après tout bien légitime. Ce que, pendant mon consulat, j'ai fait avec votre concours pour le salut de cette ville et de cet empire, pour la vie des citoyens et pour l'intérêt de tout l'État, Licinius a entrepris de l'écrire en vers : les morceaux que j'en ai entendus m'ont paru si importants et si excellents que je l'ai engagé à finir l'ouvrage; car la vertu ne désire d'autre récompense de ses travaux et de ses dangers que des éloges et de la gloire. Sans la gloire, juges, quel motif aurions-nous de nous exposer, dans le cours d'une vie si courte et si rapide, à tant de fatigues ?
Assurément, si notre âme n'avait aucun pressentiment de l'avenir, si le même terme qui borne le cours de nos années bornait aussi celui de nos pensées, l'homme ne voudrait jamais se livrer à tant de travaux, se tourmenter par tant de soins et de veilles, ni exposer

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dimicaret. Nunc insidet quaedam in optimo quoque virtus, quae noctes et dies animum gloria stimulis concitat, atque admonet, non cum vitae tempore esse dimittendam commemorationem nominis nostri, sed cura omni posteritate adaequandam.
An vero tam parvi animi videamur esse omnes qui in republica, atque in his vitae periculis laboribusque versamur, ut, quum usque ad extremum spatium nullum tranquillum atque otiosum spiritum duxerimus, nobiscum simul moritura omnia arbitremur? An, quum statuas et imagines, non animorum simulacra, sed corporum, studiose multi summi homines reliquerint, consiliorum relinquere ac virtutum nostrarum effigiem non multo malle debemus, summis ingeniis expressam et politam? Ego vero omnia quae gerebam, jam tum in gerendo spargere me ac disseminare arbitrabar in orbis terrae memoriam sempiternam. Haec vero sive a meo sensu post mortem abfutura
Nunc quaedam virtus 
insidet in quoque optimo 
quae concitat animum 
stimulis gloriae 
noctes et dies, 
atque admonet 
commemorationem 
nostri nominis, 
non esse dimittendam 
cum tempore vitae, 
sed adaequandam 
cum omni posteritate.
Omnes vero qui 
versamur in republica, 
atque in his periculis 
laboribusque vitae, 
an videamur esse 
animi tam parvi, 
ut arbitremur omnia 
moritura simul nobiscum, 
quum duxerimus 
nullum spiritum 
tranquillum atque otiosum 
usque ad extremum 
spatium ? 
Quum multi 
summi homines 
reliquerint studiose 
statuas et imagines, 
simulacra non animorum, 
sed corporum, 
an non debemus 
malle multo 
relinquere effigiem 
consiliorum 
ac nostrarum virtutum, 
expressam et politam 
summis ingeniis? 
Ego vero arbitrabar, 
jam tum in gerendo, 
me spargere ac disseminare 
in memoriam sempiternam 
orbis terrae 
omnia quae gerebam. 
Sive vero haec 
est abfutura a meo sensu 
post mortem,
Maintenant une certaine vertu 
repose dans chacun le meilleur, 
vertu qui excita l'âme 
par les aiguillons de la gloire 
les nuits et les jours, 
et l'avertit 
le souvenir 
de notre nom, 
ne pas être à-abandonner 
avec le temps de la vie, 
mais à-égaler 
avec toute la postérité.
Mais nous tous qui 
nous agitons dans les affaires de l'Etat, 
et dans ces dangers 
et ces travaux de la vie, 
paraitrions-nous être 
d'une âme si petite, 
que nous pensions toutes choses 
devoir mourir ensemble avec nous, 
quand nous n'aurons tiré 
aucun souffle 
tranquille et paisible 
jusqu'au dernier 
espace ? 
Quand plusieurs 
grands hommes 
ont laissé avec-soin 
des statues et des images, 
portraits non de leurs âmes, 
mais de leurs corps, 
ne devons-nous pas 
préférer beaucoup 
de laisser une image 
de nos pensées 
et de nos vertus, 
faite et polie 
par les plus grands génies ? 
Mais moi je pensais, 
déjà alors en les faisant, 
moi répandre et semer-çà-et-là 
dans le souvenir éternel 
du globe de la terre 
toutes les choses que je faisais. 
Mais soit que ce souvenir 
doive être absent de mon sentiment 
après ma mort,
tant de fois sa vie même. Mais dans tous les grands coeurs réside un sentiment généreux qui, jour et nuit, les excite par l'aiguillon de la gloire, et qui nous avertit de ne point laisser périr avec notre
vie le souvenir de notre nom, mais de le faire vivre jusque dans la postérité la plus reculée.
Nous tous qui, au sein des affaires publiques, passons notre vie entourés de dangers et de pénibles travaux, aurions-nous assez peu d'élévation d'esprit pour croire qu'après avoir vécu sans pouvoir respirer un seul instant en repos, tout dût périr avec nous ? Quoi
quand tant de grands hommes se sont empressés pour laisser après eux des statues et des portraits, faibles images de leurs corps et non de leurs âmes, ne devons-nous pas, avec beaucoup plus de raison, désirer de laisser de nos pensées et de nos vertus le tableau tracé par le pinceau habile des plus grands génies ! Pour moi, dans tout ce que j'ai entrepris pour le bien de l'État, je pensais, en le faisant, confier une semence immortelle de gloire au souvenir éternel de
l'univers. Qu'après ma mort, je sois insensible à cette renommée, ou

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est, sive, ut sapientissimi homines putaverunt, ad aliquam mei partem pertinebit, nunc quidem certe cogitatione quadam speque delector.
XII. Quare conservate, judices, hominem pudore eo, quem amicorum videtis comprobari tum dignitate, tum etiam vetustate; ingenio autem tanto, quantum id convenit existimari, quod summorum hominum ingeniis expetitum esse videatis; causa vero ejusmodi, quae beneficio legis, auctoritate municipii, testimonio Luculli, tabulis Metelli comprobetur. Quae quum ita sint, petimus a vobis, judices, si qua non modo humana, verum etiam divina in tantis negotiis commendatio debet esse, ut eum, qui vos, qui vestros imperatores, qui populi romani res gestas semper ornavit; qui etiam his recentibus nostris vestrisque domesticis periculis aeternum se testimonium laudum daturum esse profitetur; quique est eo numero qui semper apud omnes sancti sunt habiti atque dicti, sic in vestram accipiatis fidem,
sive pertinebit 
ad aliquam partem mei, 
ut homines sapientissimi 
putaverunt, 
nunc quidem certe delector
quadam cogitatione speque. 
XII. Quare conservate, 
judices, 
hominem eo pudore, 
quem videtis comprobari 
tum dignitate amicorum, 
tum etiam vetustate ; 
ingenio autem tanto, 
quantum convenit 
id existimari, 
quod videatis 
esse expetitum ingeniis 
summorum hominum ; 
causa vero ejusmodi, 
quae comprobetur 
beneficio legis, 
auctoritate municipii, 
testimonio Luculli, 
tabulis Metelli. 
Quae quum sint ita, 
petimus a vobis, judices, 
si qua commendatio 
non modo humana, 
verum etiam divina
debet esse 
in tantis negotiis, 
ut accipiatis 
in vestram fidem eum, 
qui semper ornavit vos, 
qui vestros imperatores, 
qui res gestas 
populi romani; 
qui etiam profitetur 
se esse daturum 
testimonium aeternum 
laudum 
his periculis domesticis 
recentibus 
nostris vestrisque ; 
quique est eo numero 
qui semper sunt habiti 
atque dicti sancti
soit qu'il atteigne
à quelque partie de moi, 
comme des hommes très-sages 
l'ont pensé, 
mais maintenant certes je suis réjoui 
par une certains pensée et espérance. 
XII. C'est pourquoi conservez, 
juges, 
un homme d'une telle pudeur (vertu), 
que vous voyez être approuvé 
soit par le mérite de ses amis, 
soit par leur ancienneté ; 
et d'un génie aussi grand, 
qu'il convient 
ce génie être estimé 
pour que vous voyez 
lui avoir été recherché par les génies 
des plus grands hommes ; 
mais d'une cause de telle sorte, 
qu'elle soit prouvée 
par le bienfait de la loi, 
par l'autorité d'un municipe, 
par le témoignage de Lucullus, 
par les registres de Métellus. 
Puisque ces choses sont ainsi, 
nous demandons à vous, juges, 
si quelque recommandation 
non-seulement humaine, 
mais même divine 
doit exister 
dans de si grandes affaires, 
que vous receviez 
en votre protection ce poète
qui toujours a orné (loué) vous, 
qui a loué vos généraux, 
qui a loué les exploits 
du peuple romain 
qui de plus déclare 
soi être devant donner 
un témoignage éternel 
de louanges 
à ces dangers domestiques 
récents (courus récemment) 
nôtres et vôtres (par nous et par vous); 
et qui est de ce nombre d'hommes 
qui toujours ont été tenus 
et appelés sacrés
que, suivant l'opinion des hommes les plus sages, quelque partie de moi-même éprouve encore ce sentiment, cette pensée et cet espoir me font dès aujourd'hui goûter un véritable plaisir.
XII. Conservez-nous donc, juges, conservez-nous un homme dont les vertus lui ont, depuis si longtemps, gagné des amis si distingués; un poète doué de tout le talent nécessaire pour être recherché par des hommes d'un talent supérieur, un. citoyen dont la cause repose sur le bienfait de la loi, sur l'autorité d'une ville municipale, sur le témoignage de Lucullus, sur les registres de Métellus.
Aussi, juges, si, dans une affaire d'une telle importance, il faut après avoir invoqué le témoignage des hommes, implorer encore la recommandation des dieux, je vous prie de faire en sorte qu'un homme qui a toujours employé ses talents à louer, vous, vos généraux et les victoires du peuple romain, qui bientôt immortalisera le souvenir des périls domestiques que, récemment encore, j'ai partagés avec vous, qu'un homme du nombre de ceux que tous les peuples ont toujours regardés comme sacrés, soit de votre part l'objet d'une protection

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ut humanitate vestra levatus potius, quam acerbitate violatus esse videatur.
Quae de causa pro mea consuetudine breviter simpliciterque dixi, judices, ea confido probata esse omnibus : quae non fori neque judiciali consuetudine et de hominis ingenio et communiter de ipsius studio locutus sum, ea, judices, a vobis spero esse in bonam partem accepta; ab eo qui judicium exercet, certo scio.
apud omnes, 
sic ut videatur 
esse potius levatus 
vestra humanitate, 
quam violatus acerbitate. 
Judices, confido 
ea quae dixi 
de causa 
breviter simpliciterque 
pro mea consuetudine, 
esse probata omnibus  :
spero ea quae locutus sum 
non consuetudine fori 
neque judiciali 
et de ingenio hominis 
et communiter 
de studio ipsius, 
esse accepta 
a vobis, judices, 
in bonam partem ; 
scio certo, 
ab eo qui exercet judicium.
chez tous les hommes
de sorte qu'il paraisse 
être plutôt soulagé 
par votre bonté, 
que violenté par votre dureté.
Juges, j'ai-confiance 
ces choses que j'ai dites 
sur la cause 
brièvement et simplement 
selon ma coutume, 
avoir été approuvées par tous :
j'espère celles que j'ai dites 
non selon l'usage du barreau 
ni des-tribunaux 
et sur le talent de l'homme (d'Archias) 
et généralement 
touchant l'occupation de lui-même, 
avoir été prises 
par vous, juges, 
en bonne part ; 
je sais certainement qu'elles le seront
par celui qui exerce la jugement.
éclairée, et qu'il ait plutôt à se louer de votre bonté qu'à se plaindre de votre rigueur excessive.
J'ai la confiance, juges, que les simples et courtes preuves que, selon ma coutume, j'ai tirées du fond même de la cause, ont été accueillies favorablement par vous tous. Quant à ce que, m'éloignant du langage et des habitudes du barreau, j'ai dit du génie d'Archias et de la poésie en général, j'espère que vous l'avez pris en bonne part : je suis sûr du moins que le magistrat qui préside à ces débats ne me refusera pas sa bienveillance.