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PRO ARCHIA
Ce discours a été expliqué littéralement,
traduite en français et annoté par M. Lesage, professeur au lycée Charlemagne.
Imprimerie de Ch. Lahure (ancienne maison Crapelet)
rue de Vaugirard, 9, près de l'Odéon.
LES
EXPLIQUÉS D’APRÈS UNE MÉTHODE NOUVELLE
PAR DEUX TRADUCTIONS
FRANÇAISES
L’UNE LITTÉRALE ET JUXTALINÉAIRE PRÉSENTANT LE MOT À MOT FRANÇAIS
EN REGARD DES MOTS LATINS CORRESPONDANTS
L’AUTRE CORRECTE ET PRÉCÉDÉE DU TEXTE LATIN
avec des sommaires et des notes
PAR UNE SOCIÉTÉ DE PROFESSEURS
ET DE LATINISTES
CICÉRON
PLAIDOYER POUR LE POETE ARCHIAS
PARIS
LIBRAIRIE DE L. HACHETTE ET Cie
RUE PIERRE-SARRAZIN, N° 14
(Près de l'École de Médecine)
1854
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AVIS
RELATIF A LA TRADUCTION JUXTALINEAIRE
On a réuni par des traits, dans la traduction juxtalinéaire, les mots français qui traduisent un seul mot latin.
On a imprimé en italiques les mots qu'il était nécessaire d'ajouter pour rendre intelligible la phrase française, et qui n'avaient pas
leur équivalent dans le latin.
Enfin, les mots placés entre parenthèses, dans le français, doivent être considérés comme une seconde explication, plus intelligible
que la version littérale.
ARGUMENT ANALYTIQUE.
I. Exorde insinuant. - L'orateur, qui dans son enfance a été initié aux belles-lettres par Archias, doit faire
tous ses efforts pour le sauver.
II. Parlant pour un poète devant des gens instruits, il s'étendra sur les avantages des lettres. - Proposition et division :
1° Archias est citoyen romain ; 2° il mérite de l'être.
III. Narration. - Archias devient citoyen de plusieurs villes d'Italie. A Rome, il est accueilli par les meilleures familles. Lucullus le fait nommer citoyen d'Héraclée.
IV. Confirmation : première partie. - L'autorité de Lucullus et le témoignage des députés d'Héraclée démontrent qu'Archias est citoyen de cette ville. L'absence des registres ne prouve rien. Domicilié à Rome, il a fait sa déclaration.
V. Archias, citoyen de plusieurs villes, ne peut être privé de son droit, parce qu'il se contente d'appartenir à Héraclée. Absent à l'époque des derniers recensements, il n'a pu y être compris.
VI. Seconde partie. - L'affection de l'orateur pour Archias est causée par le charme de sa société. L'étude des lettres fortifie son coeur contre les orages politiques.
VII. Objection : Les grands hommes célébrés par les lettres n'y ont pas excellé. - Réponse par le raisonnement et par les faits. Brillant éloge des lettres.
VIII. Talent d'Archias. Les poètes doivent font à leur génie ; ils sont eux-mêmes des présents des dieux.
IX. Les Romains rejetteront-ils Archias, qui leur a consacré tous ses talents ?
X. La poésie grecque est plus propre que la poésie latine à répandre au loin la gloire du peuple romain. Sans Homère, Achille serait oublié.
XI. Tous les hommes aiment la gloire, qui est la passion des grandes âmes et le mobile des actions de
l'homme.
XII. Péroraison. - Que les juges conservent à Rome un citoyen dont le talent a célébré la gloire de la patrie.
2-3
M. TULLII CICERONIS
CICÉRON.
PRO
PLAIDOYER
A. L. ARCHIA POETA
POUR
ORATIO
LE POÈTE ARCHIAS.
I. Si quid est in me ingenii, judices, quod sentio quam sit exiguum; aut si qua exercitatio dicendi, in qua me non infitior mediocriter esse versatum ; aut si hujusce rei ratio aliqua, ab optimarum artium studiis ac disciplina profecta, a qua ego nullum confiteor aetatis meae tempus abhorruisse : earum rerum omnium vel in primis hic A. Licinius fructum a me repetere prope suo jure debet. Nam quoad longissime potest mens mea respicere spatium praeteriti temporis, et pueritiae memoriam | I. Judices, si quid ingenii est in me, quod sentio quam sit exiguum ; aut si qua exercitatio dicendi, in qua non infitior, me esse versatum mediocriter ; aut si aliqua ratio hujusce rei, profecta a studiis ac disciplina artium optimarum, a qua ego confiteor abhorruisse nullum tempus meae aetatis : hic A. Licinius vel in primis debet repetere a me jure prope suo fructum omnium earum rerum. Nam repetens inde usque quoad mea mens potest respicere longissime |
I.
Juges, si quelque genre de talent est en moi, lequel je sens combien il est exigu ; ou si quelque exercice de parler est en moi, dans lequel je ne nie pas moi avoir été occupé médiocrement ; ou si quelque habileté est en moi, de cette chose, partie (fruit) de la recherche et de l'étude des arts très-bons, étude de laquelle j'avoue n'avoir en-horreur en aucun temps de ma vie cet A. Licinius même dans les premiers (surtout) doit réclamer de moi avec un droit presque sien le fruit de toutes ces choses. En effet remontant d'ici jusque là où mon esprit peut regarder-en-arrière le plus loin possible |
I. Juges, si je possède quelque talent, et je sens toute l'exiguïté du mien, si j'ai acquis quelque expérience dans l'art de la parole, auquel, je ne le nie pas, je me suis passablement exercé, ou si je dois cette habileté, toute faible qu'elle est, à l'étude des belles-lettres, qui, j'en conviens, n'ont manqué d'attraits pour moi à aucune époque de ma vie, c'est surtout Licinius, ici présent, qui a le droit d'en réclamer de moi le fruit. En effet, aussi loin que mon esprit peut remonter dans le passé, et se rappeler le souvenir le plus éloigné |
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recordari ultimam, inde
usque repetens hunc video mihi principem et ad suscipiendam, et ad ingrediendam rationem horum studiorum exstitisse. Quod si haec vox, hujus hortatu praeceptisque conformata, nonnullis aliquando saluti fuit, a quo id
accepimus, quo ceteris opitulari, et alios servare possemus, huic profecto ipsi, quantum est situm in nobis, et opem, et salutem
ferre debemus. Ac, ne quis a nobis hoc ita dici forte miretur, quod alia quaedam in hoc facultas sit ingenii, neque haec dicendi ratio aut disciplina : ne nos quidem huic uni studio penitus unquam dediti fuimus. Etenim omnes artes quae ad humanitatem pertinent, habent quoddam commune vinculum, et quasi cognatione quadam inter se continentur. II. Sed, ne cui vestrum mirum esse videatur, me in quaestione legitima, et in judicio publico, quum res agatur apud praeto- |
spatium temporis
praeteriti, et recordari memoriam ultimam pueritiae, video hunc exstitisse mihi principem et ad suscipiendam, et ad ingrediendam rationem horum studiorum. Quod si haec vox, conformata hortatu praeceptisque hujus, fuit aliquando saluti nonnullis, debemus ferre profecto et opem, et salutem, quantum est situm in nobis, huic ipsi a quo accepimus id, quo possemus opitulari ceteris, et servare alios. Ac, ne quis miretur forte hoc dici a nobis ita, quod sit in hoc quaedam facultas ingenii alia, neque haec ratio dicendi aut disciplina ne nos quidem unquam fuimus dediti penitus huic uni studio. Etenim omnes artes quae pertinent ad humanitatem, habent quoddam vinculum commune, et continentur inter se quasi quadam cognatione. II. Sed, ne videatur esse mirum cui vestrum, in quaestione legitima, et in judicio publico, |
l'espace du temps passé, et se rappeler le souvenir le plus reculé de mon enfance, je vois celui-ci avoir été pour moi un guide et pour entreprendre, et pour aborder le plan de ces études. Que si cette voix, formée par l'exhortation et par les leçons de celui-ci, a été quelquefois à salut à quelques-uns, nous devons porter assurément et secours, et salut, autant qu'il est situé en nous, à celui même duquel nous avons reçu ce moyen par lequel nous pourrons porter-secours aux autres (aux uns), et sauver les autres. Et , de peur que quelqu'un ne s'étonne par hasard ceci être dit par nous ainsi, parce qu'il est (il y a) dans cet homme une certaine faculté de talent autre que ta mienne, et non cette profession de parler ou cet art de la parole et pas même nous jamais nous n'avons été livrés tout à fait à cette seule étude. Car tous les arts qui ont-rapport à la culture-de-l'esprit, ont un certain lien qui leur est commun, et se tiennent entre eux comme par une certaine parenté. II. Mais pour qu'il ne paraisse être étonnant à aucun de vous, dans une question légitime, et dans un jugement public, |
de mon enfance, je le vois m'introduire, le premier, et me guider dans l'étude des belles-lettres. Si donc cette voie qu'animèrent ses encouragements, que formèrent ses leçons, a jamais sauvé quelques citoyens, à celui de qui je tiens les moyens de secourir et de sauver les autres, je dois assurément,
autant qu'il est en moi, procurer et secours et salut. Et pour qu'on ne s'étonne pas de m'entendre parler en ces termes d'un homme qui suit une profession autre que la mienne, qui s'est livré à un genre différent de l'art oratoire, je dirai que moi-même je ne me suis jamais livré tout entier exclusivement à l'étude de l'éloquence. En effet, tous les arts qui ont pour but la culture de l'esprit sont unis entra eux par un lien commun et par une espèce de parenté étroite. II. Mais, pour qu'il ne paraisse étonnant à aucun de vous, que, dans une question d'état, dans une cause de droit public, plaidée |
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rem populi romani, lectissimum virum, et apud severissimos
judices, tanto conventu hominum ac frequentia, hoc uti genere dicendi, quod non modo a consuetudine judiciorum, verum etiam a forensi
sermone abhorreat, quaeso a vobis, ut in hac causa mihi detis hanc veniam, accommodatam
huic reo, vobis, quemadmodum spero, non molestam ; ut me, pro summo poeta atque eruditissimo
homine dicentem, hoc concursu hominum litteratissimorum, hac vestra humanitate, hoc denique praetore exercente judicium, patiamini de studiis humanitatis ac litterarum paulo loqui liberius, et in ejusmodi persona,
quae, propter otium ac studium, minime in judiciis periculisque tractata est, uti prope novo quodam et inusitato genere dicendi. Quod si mihi a vobis tribui concedique sentiam, perficiam profecto, ut hunc A. Licinium non modo non segregandum, |
quum
res agatur apud praetorem populi romani, virum lectissimum, et apud judices severissimos, tanto conventu ac frequentia hominum, me uti hoc genere dicendi, quod abhorreat non modo a consuetudine judiciorum, verum etiam a sermone forensi, quaeso a vobis, ut in hac causa detis mihi hanc veniam, accommodatam huic reo, non molestam vobis, quemadmodum spero ; ut patiamini me, dicentem pro summo poeta atque homine eruditissimo hoc concursu hominum litteratissimorum, hac humanitate vestra, denique hoc praetore exercente judicium, loqui paulo liberius de studiis humanitatis ac litterarum, et in persona ejusmodi, quae, propter otium ac studium, est tractata minime in judiciis periculisque, uti quodam genere dicendi prope novo et inusitato. Si sentiam quod tribui concedique a vobis mihi, perficiam profecto, ut putetis hunc A. Licinium |
puisque l'affaire se traite devant un préteur du peuple romain, homme trés-choisi, et devant des juges très-sévères, dans une si grande réunion et une si grande multitude d'hommes, moi me servir de ce genre de parler, qui s'éloigne non-seulement de la coutume des jugements, mais même du langage du-barreau, je demande de (à) vous, que dans cette cause vous donniez à moi cette grâce, appropriée à cet accusé, non à-charge à vous, ainsi que je l'espère; c'est que vous souffriez moi, parlant pour un très-grand poëte et pour un homme très-érudit, dans ce concours d'hommes très-lettrés, avec ce goût qui-vous-est-propre, enfin ce préteur exerçant le jugement, parler un peu glus librement des études du goût et des lettres, et pour un personnage de cette sorte qui, à cause de sa tranquillité et de son occupation, n'a été traîné nullement dans les jugements et les dangers, me servir d'un certain genre de parler presque nouveau et inusité. Que si je sens ceci être donné et accordé par vous à moi, je ferai certainement en sorte, que vous pensiez cet A. Licinius |
devant un préteur très-distingué du peuple romain, devant les
juges les plus respectables, en présence d'une assemblée si nombreuse, je
parle un langage étranger non-seulement aux usages des tribunaux, mais au genre judiciaire; je vous prie de m'accorder, dans cette cause, une grâce que vous ne pouvez refuser
à la qualité de l'accusé, une grâce qui, je l'espère, n'a rien de pénible pour vous; c'est que, parlant pour un grand poëte, pour un homme
d'une vaste instruction, dans cette assemblée où siègent tant de savants, devant un préteur et des juges si éclairés; parlant, dis-je, pour un homme qu'une
vie tranquille et studieuse a toujours tenu loin de nos périlleux débats, je
puisse m'exprimer dans un langage presque nouveau et inusité dans cette enceinte. Que si j'obtiens de vous cette faveur, je vous ferai voir, j'en ai la confiance, que vous ne devez pas retrancher A. Licinius du nombre |
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quum
sit civis, a numero civium, verum etiam, si non esset, putetis
adsciscendum fuisse. III. Nam ut primum ex pueris excessit Archias, atque ab iis artibus quibus aetas puerilis ad humanitatem informari solet, se ad scribendi studium contulit : primum Antiochiae (nam ibi natus est, loco nobili, celebri quondam urbe et copiosa, atque eruditissimis hominibus liberalissimisque studiis affluenti), celeriter ei antecellere omnibus ingenii gloria contigit. Post in ceteris Asiae partibus, cunctaque Graecia, sic ejus adventus celebrabantur, ut famam ingenii exspectatio hominis, exspectationem ipsius adventus admiratioque superaret. Erat Italia tunc plena graecarum artium ac disciplinarum; studiaque haec et in Latio vehementius tum colebantur, quam nunc iisdem in oppidis, et hic Romae, propter tranquillitatem reipu
|
non modo non segregandum a numero civium, quum sit civis, verum etiam fuisse adsciscendtnn, si non esset. III. Nam ut Archias excessit primum ex pueris, atque ab iis artibus quibus aetas puerilis solet informari ad humanitatem, se contulit ad studium scribendi, contigit ei primum antecellere celeriter gloria ingenii omnibus Antiochiae (nam natus est ibi, loco nobili, urbe quondam celebri et copiosa, atque affluenti hominibus eruditissimis studiisque liberalissimis). Post adventus ejus celebrabantur, in ceteris partibus Asiae, cunctaque Graecia, sic ut exspectatio hominis superaret famam ingenii adventus ipsius admiratioque exspectationem. Italia erat tunc plena artium ac disciplinarum graecarum ; haecque studia colebantur tum et in Latio vehementius, quam nunc in iisdem oppidis , et hic Romae non neglegebantur, propter tranquillitatem reipublicae. |
non-seulement n'étre pas à-séparer du nombre des citoyens, puisqu'il est citoyen, mais même avoir été à-y-ajouter s'il ne l'était pas. III. Car dès que Archias fut sorti d'abord des enfants (de l'enfance), et de ces exercices par lesquels l'âge des-enfants a-coutume d'être formé à la littérature, il se transporta ( se livra) à l'occupation de composer il arriva à lui d'abord de surpasser promptement par la gloire du talent tous à Antioche (car il naquit là, d'un lieu (d'une famille) illustre, dans cette ville autrefois célèbre et riche, et abondante en hommes très-érudits et en occupations très-libérales). Ensuite les arrivées de lui étaient célébrées; dans les autres parties de l'Asie, et dans toute la Grèce, tellement que l'attente de l'homme surpassait la renommée de son talent, et que l'arrivée de lui-même et l'admiration pour lui surpassait l'attente. L'Italie était alors pleine des arts et des sciences grecques ; et ces études étaient cultivées alors même dans le Latium plus ardemment, que maintenant dans ces mêmes villes , même ici à Rome elles n'étaient pas négligées, à cause de la tranquillité de la république. |
des
citoyens, puisqu'il est citoyen: mais que, s'il ne l'était pas, vous
devriez lui conférer ce titre. III. A peine Archias, sorti de l'enfance, eût-il achevé les exercices destinés à former cet âge aux belles-lettres, qu'il se livra à la composition. Son premier théâtre fut Antioche, où il naquit de parents distingués; cette ville jadis opulente, ce rendez-vous célèbre de l'érudition et des beaux-arts, le vit surpasser tous ses rivaux par la gloire de son génie. Ensuite, dans les autres parties de l'Asie, et dans toute la Grèce, on parlait de son arrivée avec tant d'éloges, que l'attente du personnage surpassait sa réputation de génie, et que l'admiration, à son arrivée, surpassait ce qu'on avait attendu de lui. L'Italie était à cette époque remplie d'hommes qui cultivaient les lettres grecques; elles étaient alors plus en honneur qu'elles ne le sont aujourd'hui dans les mêmes villes; et la tranquillité de la république permettait, à Rome même, de ne pas les négliger. Aussi les |
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blicae, non
neglegebantur. Itaque hunc et Tarentini, et Rhegini, et Neapolitani civitate ceterisque praemiis donarunt ; et omnes qui aliquid de ingeniis poterant judicare,
cognitione atque hospitio dignum existimarunt. Hac tanta celebritate famae quum
esset jam absentibus notus, Romam venit, Mario consule et Catulo. Nactus est primum
consules eos, quorum alter res ad scribendum maximas, alter quum res gestas, tum etiam studium
atque aures adhibere posset. Statim Luculli, quum praetextatus etiam tum Archias esset, eum domum suam receperunt. Sed etiam hoc non solum ingenii ac litterarum,
verum etiam naturae atque virtutis, ut domus quae hujus adolescentiae prima fuerit, eadem esset familiarissima senectuti. Erat temporibus illis jucundus Q. Metello illi Numidico et ejus Pio filio; audiebatur a M. Aemilio ; vivebat cum Q.Catulo, et patre, et filio ; a L. Crasso colebatur ; Lucullos vero et |
Itaque et Tarentini, et Rhegini, et Neapolitani donarunt hunc civitate ceterisque praemiis ; et omnes qui poterant judicare aliquid de ingeniis, existimarunt dignum cognitione atque hospitio. Quum esset notus jam absentibus hac celebritate tantae famae, venit Romam, Mario consule et Catulo. Nactus est primum eos consules, quorum alter posset adhibere res maximas ad scribendum, alter quum res gestas, tum etiam studium atque aures. Quum Archias esset etiam tum praetextatus, statim Luculli receperunt eum suam domum. Sed etiam hoc non solum ingenii ac litterarum, verum etiam naturae; atque virtutis, ut eadem domus, quae fuerit prima adolescentiae hujus, esset familiarissima senectuti. Illis temporibus erat jucundus illi Q. Metello Numidico, et Pio filio ejus ; audiebatur a M. Aemilio; vivebat cum Q. Catulo, et patre, et filio ; colebatur a L. Crasso; |
Aussi et les
Tarentins, et les Rhéginiens, et les Néapolitains gratifièrent celui-ci du droit-de-cité et d'autres priviléges ; et tous ceux qui pouvaient juger quelque chose au sujet de ses talents, le jugèrent digne de leur connaissance et de leur hospitalité. Comme il était connu même des absents par cette célébrité si grande de renommée, il vint à Rome, Marius étant consul et aussi Catulus. Il y rencontra d'abord ces consuls, dont l'autre (l'un) pouvait lui fournir des actions très-grandes pour les écrire, l'autre et des choses faites (des exploits) et même du goût et des oreilles de connaisseur. Quoique Archias fût encore alors vêtu-de-la-prétexte, aussitôt les Lucullus reçurent lui dans leur maison. Mais de plus ceci fut le propre non-seulement de son talent et de son mérite-littéraire, mais encore de son caractère et de sa vertu, que la même maison, qui avait été la première à accueillir l'adolescence de celui-ci, fût très-familière (l'amie) à (de) sa vieillesse. En ces temps-là il était agréable à ce Q. Métellus le Numidique, et à Pius fils de lui ; il était écouté par M. Émilius; il vivait avec Q. Catulus, et le père, et le fils ; il était honoré par L. Crassus |
habitants de Tarente, de Rhége et de Naples lui accordèrent le titre de citoyen et d'autres priviléges ; et tous ceux qui étaient capables d'apprécier le mérite, le jugèrent digne de leur hospitalité et de leur amitié. Avec une réputation si brillante, connu de ceux-là même qui ne le voyaient pas, il vint à Rome sous le consulat de Marius et de Catulus. Il trouva en eux, dès son arrivée, deux hommes dont l'un pouvait lui fournir une ample matière d'exploits à chanter, l'autre, outre ses hauts faits, un goût sûr et une oreille exercée. Aussitôt les Lucullus reçurent Archias dans leur maison, quoiqu'il n'eût pas encore quitté la prétexte. Et ce qui prouve non-seulement son talent et son mérite littéraire, mais la bonté de son caractère et sa vertu, c'est qu'une maison qui, la première, l'accueillit dans sa jeunesse, fut aussi l'asile le plus ordinaire de sa vieillesse. Il était alors chéri du grand Métellus le Numidique, et de son fils Métellus Pius; M. Emilius l'écoutait avec plaisir ; il vivait avec les deux Catulus, père et fils; il était honoré par L. Crassus ; intime- |
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Drusum, et Octavios, et Catonem, et totam Hortensiorum
domum devinctam consuetudine quum teneret, afficiebatur summo honore, quod eum non solum colebant qui aliquid percipere atque audire studebant, verum etiam si qui forte simulabant. Interim satis longe intervallo, quum esset cum L. Lucullo in Siciliam profectus, et quum ex ea provincia cum eodem Lucullo decederet, venit Heracleam. Quae quum esset civitas aequissimo jure ac foedere, adscribi se in eam civitatem voluit; idque, quum ipse per se dignus putaretur, tum auctoritate et gratia Luculli ab Heracleensibus impetravit. Data est civitas Silvani lege et Carbonis : SI QUI FOEDERATIS CIVITATIBUS ADSCRIPTI FUISSENT; SI TUM, QUUM LEX FEREBATUR, IN ITALIA DOMICILIUM HABUISSENT; ET, SI SEXAGINTA DIEBUS APUD PRAETOREM ESSENT PROFESSI. Quum hic domicilium Romae multos |
quum vero teneret Lucullos et Drusum, et Octavios, et Catonem, et totam domum Hortensiorum devinctam consuetudine, afficiebatur summo honore, quod non solum qui studebant percipere atque audire aliquid colebant eum, verum etiam si qui simulabant forte. Interim satis longe intervallo, quum esset profectus cum L. Lucullo in Siciliam, et quum decederet ex ea provincia cum eodem Lucullo, venit Heracleam. Quum quae civitas esset jure ac foedere aequissimo, voluit se adscribi in eam civitatem impetravitque id ab Heracleensibus auctoritate et gratia Luculli, tum quum ipse putaretur dignus per se. Civitas est data lege Silvani et Carbonis SI QUI FUISSENT ADSCRIPTI, CIVITATIBUS FOEDERATIS ; S1 HABUISSENT DOMICILIUM IN ITALIA, TUM QUUM LEX FEREBATUR; ET, SI ESSENT PROFESSI APUD PRAETOREM SEXAGINTA DIEBUS. Quum hic haberet |
mais comme il tenait les Lucullus et Drusus, et les Octaves, et Caton, et toute la maison des Hortensius enchaînée par son amitié, il était comblé d'un très-grand honneur parce que non-seulement ceux qui désiraient apprendre et entendre quelque chose honoraient lui, mais même si quelques-uns (ceux qui) le feignaient par hasard. Cependant après un assez long intervalle, lorsqu'il fut parti avec L. Lucullus pour aller en Sicile, et lorsqu'il sortait de cette province avec le même Lucullus, il vint à Héraclée. Comme cette ville était d'un droit et d'une alliance très-juste, il voulut soi être inscrit dans cette cité; et il obtint cela des Héracléens par le crédit et par la faveur de Lucullus, alors que par lui-même il en était jugé digne par lui-même. Le droit-de-cité lui fut donné par la loi de Silvanus et de Carbon, loi portant : SI QUELQUES-UNS AVAIENT ÉTÉ INSCRITS DANS LES VILLES FÉDÉRÉES ; S'ILS AVAIENT EU leur DOMICILE EN ITALIE, ALORS QUE LA LOI ÉTAIT PORTÉE; ET, S'ILS l'AVAIENT DÉCLARE DEVANT LE PRÉTEUR DANS LES SOIXANTE JOURS. Comme celui-ci avait |
ment lié avec les Lucullus, avec Drusus, avec les Octaves, avec Caton, avec toute la maison des Hortensius, il jouissait de la plus grande considération, recherché non-seulement de ceux qui désiraient l'entendre, mais de ceux qui feignaient ce désir. Assez longtemps après, parti avec Lucullus pour la Sicile, et ayant quitté cette province avec le même Lucullus, il se rendit à Héraclée. Comme cette ville, grâce à notre alliance, jouissait des plus beaux priviléges, il souhaita d'en devenir citoyen. Il obtint facilement cette faveur, soit par son propre mérite, qui l'en faisait juger digne, soit par le crédit et la protection de Lucullus. La loi de Silvanus et de Carbon accorda le droit de citoyen A CEUX QUI SE SERAIENT FAIT INSCRIRE DANS UNE DES VILLES FÉDÉRÉES; POURVU QUE, AU MOMENT DE LA PUBLICATION DE LA LOI, ILS EUSSENT UN DOMICILE EN ITALIE, ET QUE, DANS LES SOIXANTE JOURS, ILS EUSSENT FAIT LEUR, DÉCLARATION DEVANT LE PRÉTEUR. Archias, domicilié à |
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jam annos haberet, professus est apud praetorem, Q. Metellum, familiarissimum suum. IV. Si nihil aliud, nisi de civitate ac lege, dicimus, nihil dico amplius : causa dicta est. Quid enim horum infirmari, Grati, potest ? Heracleaene esse tum adscriptum negabis ? Adest vir summa auctoritate, et religione, et fide, M. Lucullus, qui se non opinari, sed scire ; non audivisse, sed vidisse ; non interfuisse, sed egisse dicit. Adsunt Heracleenses legati, nobilissimi homines : hujus judicii causa cum mandatis, et cum publico testimonio venerunt; qui hunc adscriptum Heracleensem dicunt. Hic tu tabulas desideras Heracleensium publicas; quas italico bello, incenso tabulario, interisse scimus omnes. Est ridiculum, ad ea quae habemus, nihil dicere : quaerere quae habere non possumus; et de hominum memoria tacere, litte |
domicilium
Romae jam multos annos, professus est apud praetorem, Q. Metellum, suum familiarissimum. IV. Si dicimus nihil aliud, nisi de civitate ac lege, dico nihil amplius : causa est dicta. Quid enim horum, Grati, potest infirmari ? negabisne esse adscriptum tum Heracleae ? Vir summa auctoritate, et religione, et fide, M. Lucullus adest, qui dicit se non opinari, sed scire ; non audivisse, sed vidisse; non interfuisse, sed egisse. Legati Heracleenses, homines nobilissimi, adsunt : venerunt causa hujus judicii cum mandatis, et cum testimonio publico ; qui dicunt hunc adscriptum Heracleensem. Hic tu desideras tabulas publicas Heracleensium ; quas scimus omnes interisse bello italico, tabulario incenso. Est ridiculum nihil dicere ad ea quae habemus : quaerere quae non possumus habere; et tacere de memoria hominum, |
son domicile à Rome déjà depuis plusieurs années, il fit-sa-déclaration devant le préteur, Q. Métellus, son ami-intime. IV. Si nous ne disons rien autre chose, si ce n'est du droit-de-cité et de la loi, je ne dis rien de plus : la cause est plaidée. Lequel en effet de ces faits, Gratius, peut être infirmé? nieras-tu lui avoir été inscrit alors à Héraclée ? Un homme d'une très-grande autorité et d'une grande religion, et d'une grande probité, M. Lucullus est-présent, qui dit soi non pas croire, mais savoir; non avoir entendu dire, mais avoir vu non avoir été-présent, mais avoir agi par lui-même. Les députés d'-Héraclée, hommes très-distingués, sont-ici-présents : ils sont venus par le motif de ce jugement avec des instructions, et avec un témoignage public ; ils disent celui-ci avoir été inscrit citoyen d'-Héraclée. Ici tu demandes les registres publics des Héracléens; lesquels registres nous savons tous avoir péri dans la guerre d'-Italie, le dépôt-des-registres ayant été brûlé. Il est ridicule de ne rien dire à ces preuves que nous avons : il est ridicule d'exiger celles que nous ne pouvons avoir; et de se taire sur le témoignage des hommes, |
Rome depuis plusieurs années, fit sa déclaration chez le préteur Q. Métellus, son ami. IV. S'il n'est ici question que du droit de cité et de la loi, je n'ai plus rien à dire, la cause est plaidée. Lequel de ces faits, Gratius, peut-on infirmer? Diras-tu qu'il n'a point été inscrit à Héraclée? Voici un témoin de l'autorité, de la probité la plus respectable, le vertueux M. Lucullus; il ne dit pas seulement je crois, mais je sais; j'ai entendu dire, mais j'ai vu ; j'étais présent, mais j'ai agi en personne. Voici les députés d'Héraclée, les hommes les plus distingués de la ville ; venus exprès pour cette cause, chargés de témoigner su nom de toute la cité, ils affirment qu'Archias a été reçu citoyen d'Héraclée. Tu nous demandes ici les registres de cette ville, qui, nous le savons tous, ont été brûlés avec les archives pendant la guerre d'Italie. Il est ridicule de ne rien répondre aux preuves que nous avons, et d'en demander que nous ne pouvons avoir; de se taire sur des dépositions orales, et d'exiger des témoignages écrits; |
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rarum memoriam flagitare ; et, quum habeas amplissimi viri religionem , integerrimi municipii jusjurandum fidemque, ea, quae depravari nullo modo possunt, repudiare ; tabulas, quas idem dicis solere corrumpi, desiderare. At domicilium Romae non habuit, is qui, tot annis ante civitatem datam, sedem omnium rerum ac fortunarum suarum Romae collocavit ? At non est professus. Imo vero iis tabulis professus quae solae ex illa professione, collegioque praetorum obtinent publicarum tabularum auctoritatem. V. Nam quum Appii tabulae negligentius asservatae dicerentur, Gabinii, quandiu incolumis fuit, levitas, post damnationem calamitas, omnem tabularum fidem resignasset, Metellus, homo sanctissimus modestissimusque omnium, tanta diligentia fuit, ut ad L. Lentulum praetorem et ad judices ve- |
flagitare memoriam litterarum ; et, quum habeas religionem viri amplissimi, jusjurandum, fidemque municipii integerrimi, repudiare ea, quae possunt depravari nullo modo ; desiderare tabulas, quas idem dicis solere corrumpi. At is non habuit domicilium Romae, qui, tot annis ante civitatem datam, collocavit Romae sedem omnium suarum rerum ac fortunarum? At non est professus. Imo vero professus iis tabulis quae solae ex illa professione, collegioque praetorum, obtinent auctoritatem tabularum publicarum. V. Nam quum tabulae Appii dicerentur asservatae negligentius, levitas Gabinii , quandiu fuit incolumis, calamitas post damnationem, resignasset omnem fidem tabularum, Metellus, homo sanctissimus modestissimusque omnium, fuit tanta diligentia, ut venerit ad praetorem L. Lentulum et ad judices, |
de demander-instamment le témoignage des lettres ; et, quand tu peux avoir la religion (la garantie) d'un personnage d'un-très-grand-poids, le serment et la foi d'un municipe très-intègre, il est ridicule de rejeter ces preuves, qui ne peuvent être falsifiées en aucune manière ; de demander des registres, que toi-même tu dis avoir-coutume d'être altérés. Mais lui (Archias) n'eut pas de domicile à Rome, lui qui, pendant tant d'années avant le droit-de-cité donné, plaça à Rome le siège de toutes ses affaires et de tous ses intérêts? Mais il n'a pas déclaré. Mais bien plus il a fait-sa-déclaration sur ces registres qui seuls d'après cette déclaration, et le collège des préteurs d'alors, obtiennent l'autorité de registres publics. V. Car comme les registres d'Appius étaient dits être conservée plus négligemment qu'il ne fallait, comme la légèreté de Gabinius, tant qu'il fut conservé, et son malheur après sa condamnation, eût enlevé toute la confiance de ses registres, Métellus, l'homme le plus vertueux et le plus modeste de tous, fut d'une si grande exactitude qu'il vint chez le préteur L. Lentulus et chez les juges, |
et, tandis que tu as la garantie d'un personnage du plus grand poids, la foi et le serment d'une
ville irréprochable, de rejeter ces preuves, qui ne peuvent être falsifiées en aucune manière, pour réclamer des registres qui, de ton propre aveu, le sont tous les jours. Mais Archias n'était pas domicilié à Rome , lui qui, tant d'années avant la loi de Silvanus, avait établi à Rome toute sa fortune et toutes ses espérances ? Mais il n'a pas fait sa déclaration. Au contraire, il l'a faite dans les registres qui, de tous les registres des préteurs de cette époque, sont seuls regardés comme authentiques. V. En effet, tandis que ceux d'Appius passaient pour être tenus avec trop de négligence; tandis que la légèreté de Gabinius, tant qu'il fut en place, et son malheur après sa condamnation, avaient enlevé aux siens toute autorité, Métellus, le plus vertueux et le plus scrupuleux de tous les hommes, apporta tant de soin à cette affaire, qu'il vint trouver le préteur L. Lentulus et les juges pour leur dire qu'une |
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nerit, et unius nominis litura se
commotum esse dixerit. His igitur tabulis nullam lituram in nomen A. Licinii videtis. Quae quum ita sint, quid est quod de ejus civitate dubitetis, praesertim quum aliis quoque in civitatibus fuerit adscriptus? Etenim, quum mediocribus multis, et aut nulla, aut humili aliqua arte praeditis gratuito civitatem in Graecia homines impertiebantur, Rheginos credo, aut Locrenses, aut Neapolitanos, aut Tarentinos, quod scenicis artificibus largiri solebant, id huic summa ingenii praedito gloria, noluisse? Quid? quum ceteri, non modo post civitatem datam, sed etiam post legem Papiam a, aliquo modo in eorum municipiorum tabulas irrepserint, hic, qui ne utitur quidem illis, in quibus est scriptus, quod semper se Heracleensem esse voluit, rejicietur? Census nostros requiris scilicet. Est enim obscurum, proximis censoribus, hunc cum clarissimo imperatore, L. Lucullo, |
et dixerit se esse commotum litura unius nominis. Igitur his tabulis videtis nullam lituram in nomen A. Licinii. Quum quae sint ita, quid est quod dubitetis de civitate ejus, praesertim quum fuerit adscriptus in aliis civitatibus quoque? Etenim, quum in Graecia homines impertiebantur civitatem gratuito multis mediocribus, et praeditis aut nulla arte, aut aliqua humili, credo Rheginos, aut Locrenses, aut Neapolitanos, aut Tarentinos noluisse largiri huic praedito summa gloria ingenii, id quod solebant artificibus scenicis. Quid? quum ceteri, non modo post civitatem datam, sed etiam post legem Papiam, irrepserint aliquo modo in tabulas eorum municipiorum, hic rejicietur, qui ne utitur quidem illis, in quibus est scriptus, quod voluit semper se esse Heracleensem ? Scilicet requiris nostros census. Est enim obscurum, proximis censoribus, hunc fuisse apud exercitum |
et
leur dit soi être ému de la rature d'un-seul nom. Ainsi sur ces registres vous ne voyez aucune rature sur le nom d'A. Licinius. Puisque ces choses sont ainsi quelle raison existe pour que vous doutiez de la qualité-de-citoyen de lui, surtout puisqu'il a été inscrit dans d'autres villes aussi? En effet, quand dans la grande Grèce les hommes accordaient le titre-de-citoyen gratuitement à beaucoup d'hommes médiocres, et doués (occupés) ou de nulle profession, ou de quelque profession basse, je crois les habitants de-Rhége, ou ceux de-Locres, ou ceux de-Naples, ou ceux de-Tarente n'avoir pas-voulu accorder à celui-ci doué d'une très-grande gloire de talent, ce qu'ils avaient-coutume d'accorder à des artistes scéniques. Quoi? lorsque les autres, non-seulement après le titre-de-citoyen donné, mais encore après la loi Papia, se sont glissés de quelque manière dans les registres de ces municipes, celui-ci sera rejeté, lui qui ne se sert pas même de ceux, sur lesquels il est inscrit, parce qu'il a voulu toujours lui être citoyen d'-Héraclée ? Sans doute tu demandes nos recensements. Il est en effet obscur, sous les derniers censeurs, celui-ci avoir été à l'armée |
rature qui se trouvait sur un nom lui donnait de l'inquiétude. Or,
dans ces registres, il n'y a point de rature sur le nom de Licinius. Après des faits si positifs, quelle raison de douter de son droit,
surtout quand on le voit inscrit dans plusieurs autres villes? En effet, quand un grand nombre d'hommes d'un mérite médiocre, sans profession ou qui n'en avaient que de peu honorables, obtenaient sans effort dans la grande Grèce le titre de citoyen, puis-je croire que Rhége, Locres, Naples ou Tarente, aient refusé à un poëte d'un talent
si élevé et si brillant une faveur qu'elles accordaient à des comédiens? Quoi
! tandis que les autres, non-seulement après la loi de Silvanus, mais encore après la loi
Papia, se sont glissés, on ne sait comment, dans les registres de ces villes municipales, Archias, qui ne fait pas usage du titre qu'il possède dans quelques-unes, parce qu'il a toujours voulu appartenir exclusivement à Héraclée, sera repoussé et privé de son droit? Mais tu réclames les tables du cens : comme s'il était douteux que, sous les derniers censeurs, Archias était à l'armée avec l'illustre |
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apud exercitum fuisse; superioribus, cum eodem quaestore fuisse in Asia; primis, Julio et
Crasso, nullam populi partem esse censam. Sed, quoniam census non jus
civitatis confirmat, ac tantummodo indicat, eum, qui sit census, ita se jam tum gessisse pro cive:
iis temporibus, quae tu criminaris, ne ipsius quidem judicio eum in civium romanorum jure esse versatum, et testamentum saepe fecit nostris legibus, et adiit hereditates civium romanorum, et in beneficiis ad aerarium delatus est a L. Lucullo praetore et consule. VI. Quaere argumenta, si qua potes : nunquam enim hic neque suo, neque amicorum judicio revincetur. Quaeres a nobis, Grati, cur tantopere hoc homine delectemur. Quia suppeditat nobis, ubi et animus ex hoc forensi strepitu reficiatur, et aures convicio defessae conquiescant. An tu existimas, aut suppetere |
cum L. Lucullo, imperatore clarissimo ; superioribus, fuisse in Asia cum eodem quaestore ; primis, Julio et Crasso, nullam partem populi esse censam. Sed, quoniam census non confirmat jus civitatis, ac indicat tantummodo, eum, qui sit census, gessisse se jam tum ita pro cive: iis temporibus quae tu criminaris, eum ne quidem judicio ipsius esse versatum in jure civium romanorum, et saepe fecit testamentum nostris legibus, et adiit hereditates civium romanorum, et est delatus ad aerarium in beneficiis a L. Lucullo praetore et consule. VI. Quaere argumenta, si potes qua: hic enim, neque suo judicio, neque amicorum, nunquam revincetur. Quaeres a nobis Grati, cur delectemur tantopere hoc homine. Quia suppeditat nobis, et ubi animus reficiatur ex hoc strepitu forensi, et aures defessae convicio conquiescant. An tu existimas, aut quod dicamus quotidie, |
avec L. Lucullus général très-illustre, sous les précédents censeurs, avoir été en Asie avec le même Lucullus questeur; sous les premiers censeurs, Julius et Crassus, nulle partie du peuple n'avoir été recensée. Mais, comme le recensement ne confirme pas le droit de cité, et indique seulement, celui, qui a été recensé, avoir porté soi déjà alors ainsi pour citoyen: en ces temps, où tu accuses, lui non pas même d'après le jugement de lui-même n'avoir pas été dans le droit des citoyens romains, et souvent il a fait son testament d'après nos lois, et il a abordé des héritages de citoyens romains, et il a été déféré au trésor-public pour recevoir des gratifications par L. Lucullus préteur et consul. VI. Cherche des preuves, si tu peux en trouver quelques-unes : celui-ci en effet, ni d'après son jugement, ni d'après celui de ses amis, ne sera jamais réfuté. Tu demanderas de (à) nous, Gratius, pourquoi nous sommes charmés si fort de cet homme. Parce qu'il fournit à nous, et où notre esprit puisse se refaire, de ce bruit du-forum, et où nos oreilles fatiguées par la clameur puissent se reposer. Est-ce que tu penses, ou ce que nous devons dire chaque-jour |
Lucullus, qui la commandait; que, sous les censeurs précédents, il était en Asie avec le même Lucullus, questeur; et que sous Julius et Crassus, les premiers après son adoption, il ne fut fait aucun recensement du peuple. Mais, comme le recensement ne prouve pas le droit de citoyen, et qu'il indique seulement que celui qui y a été compris se comportait alors comme tel; à ces mêmes époques où tu prétends que, de son propre aveu, Archias ne prenait pas la qualité de citoyen romain, il a cependant fait plusieurs fois son testament selon nos lois, il a recueilli des successions de citoyens romains, et Lucullus, préteur et consul, l'a porté sur l'état des gratifications du trésor public. VI. Cherche des preuves, si tu peux; car jamais ni sa propre conduite personnelle, ni celle de ses amis à son égard, ne t'en fourniront contre lui. Tu me demanderas peut-être, Gratius, ce qui me fait trouver tant de charmes dans le commerce d'Archias ? C'est qu'il offre à mon esprit un agréable délassement après le tumulte du barreau, et un repos pour mes oreilles fatiguées des clameurs de nos débats judiciaires. Crois-tu que nous puissions être tous les jours |
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nobis
posse, quod quotidie dicamus, in tanta varietate rerum, nisi animos nostros
doctrina excolamus; aut ferre animos tantam posse contentionem, nisi eos
doctrina eadem relaxemus? Ego vero fateor, me his studiis esse deditum. Ceteros pudeat, si qui ita se litteris abdiderunt, ut nihil possint ex his neque ad
communem afferre fructum, neque in adspectum lucemque proferre. Me autem quid pudeat, qui tot
annos ita vivo, judices, ut ab nullius unquam me tempore aut commodo aut otium meum abstraxerit,
aut voluptas avocarit, aut denique somnus retardarit. Quare quis tandem me reprehendat,
aut quis mihi jure succenseat, si, quantum ceteris ad suas res obeundas, quantum ad festos dies ludorum celebrandos, quantum ad alias voluptates, et ad ipsam requiem animi et corporis conceditur temporum ; quantum alii tribuunt tempestivis conviviis; |
posse suppetere
nobis, in tanta varietate rerum, nisi excolamus doctrina nostros animos; aut animos posse ferre tantam contentionem, nisi relaxemus eos eadem doctrina? Ego vero fateor, me esse deditum his studiis. Pudeat ceteros, si qui se abdiderunt litteris ita, ut possint nihil afferre ex his neque ad fructum communem, neque proferre in adspectum lucemque. Quid autem pudeat me, qui tot annos vivo ita, judices, ut aut meum otium unquam abstraxerit me ab tempore aut commodo nullius, aut voluptas avocarit, aut denique somnus retardarit? Quare quis tandem reprehendat me, aut quis succenseat jure mihi, si egomet sumpsero mihi ad recolenda haec studia tantum temporum, quantum conceditur ceteris ad obeundas suas res, quantum ad celebrandos dies festos ludorum, quantum ad alias voluptates, et ad requiem ipsam animi et corporis ; quantum alii tribuunt |
pouvoir se présenter
à nous, dans une si grande variété de choses, si nous ne cultivions par l'étude nos esprits; ou nos esprits pouvoir supporter une si grande contention, si nous ne relâchions eux par cette même étude? Mais moi j'avoue, moi être adonné à ces études. Que cela fasse-rougir les autres, si quelques-uns se sont enfoncés dans les lettres tellement, qu'ils ne puissent rien apporter de ces belles-lettres ni au fruit commun ni rien produire à la vue et à la lumière. Mais pourquoi cela ferait-il-rougir moi, qui depuis tant d'années vis de telle sorte, juges, que ou mon repos n'a jamais distrait moi du temps ( de la cause) ou (ni) des intérêts de personne, ou que le plaisir n'a détourné, ou enfin que le sommeil n'a jamais retardé? Aussi qui enfin blâmerait moi, ou qui s'irriterait avec raison contre moi, si moi-même j'aurai pris pour moi pour repasser ces études autant de temps, qu'il en est accordé aux autres pour accomplir leurs affaires, qu'il leur en est accordé pour célébrer les jours de-féte des jeux, qu'il leur en est accordé pour les autres plaisirs, et pour le repos même de l'esprit et du corps; que d'autres en donnent |
en état de parler sur tant de sujets différents, si nous ne cultivions notre esprit par l'étude des lettres, ou qu'il pût supporter une si grande contention, si cette même étude ne nous procurait quelque repos? Pour moi, j'avoue que je me livre avec empressement à ces nobles amusements. Que ceux-là en rougissent qui se sont enfoncés dans l'étude des lettres de manière à ne procurer aucun bien à la société, et à ne produire au jour aucun fruit da leurs travaux. Mais moi, pourquoi en rougirais-je, moi qui, depuis tant d'années, lorsqu'il a été question de me rendre utile, ne me suis jamais laissé détourner par mes intérêts, ni distraire par le désir de ma tranquillité, ni arrêter par le sommeil? Qui donc enfin pourrait me blâmer ou se fâcher contre moi, si le temps que les autres consacrent à leurs affaires, aux fêtas et aux jeux, à d'autres plaisirs, et même au repos du corps et de l'esprit, que d'autres accordent aux longs repas, enfin |
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quantum denique aleae, quantum
pilae, tantum mihi egomet ad haec studia recolenda sumpsero? Atque hoc adeo mihi concedendum est magis, quod ex his studiis haec quoque censetur oratio et facultas ; quae, quantacumque in me, nunquam amicorum periculis defuit.
Quae si cui levior videtur, illa quidem certe quae summa sunt, ex quo fonte hauriam, sentio. Nam, nisi multorum praeceptis, multisque litteris mihi ab adolescentia suasissem, nihil esse in vita magnopere expetendum, nisi laudem atque honestatem ; in ea autem persequenda omnes cruciatus corporis, omnia pericula mortis atque exsilii parvi esse ducenda, nunquam me pro salute vestra in tot ac tantas dimicationes atque in hos profligatorum hominum quotidianos impetus objecissem. Sed pleni omnes sunt libri, plenae sapientium voces, plena exemplorum vetustas; quae jacerent in tenebris omnia, nisi litterarum lumen accederet. Quam multas |
tempestivis conviviis ; quantum denique aleae, quantum pilae? Atque hoc est concedendum mihi adeo magis, quod haec oratio quoque et facultas censetur ex his studiis; quae, quantacumque in me, nunquam defuit periculis amicorum. Quae si videtur levior cui, sentio quidem certe ex quo fonte hauriam illa quae sunt summa. Nam, nisi suasissem mihi ab adolescentia praeceptis multorum, multisque litteris, nihil esse in vita magnopere expetendum, nisi laudem atque honestatem ; omnes autem cruciatus corporis, omnia pericula mortis atque exsilii esse ducenda parvi in persequenda ea, nunquam objecissem me pro vestra salute in dimicationes tot ac tantas atque in hos impetus quotidianos hominum profligatorum. Sed omnes libri sunt pleni, voces sapientium plenae, vetustas plena exemplorum ; quae omnia jacerent in tenebris, nisi lumen litterarum accederet. Quam multas imagines virorum fortissimorum |
à de longe repas; qu'ils en donnent enfin aux jeux-de-hasard, qu'ils en donnent à la balle? Et ceci est à-accorder à moi d'autant plus, que ce discours même et ce talent est estimé d'après ces études; talent qui, quel qu'il soit en moi, n'a jamais manqué aux périls de mes amis. Lequel s'il parait plus (trop) léger à quelqu'un je sens du moins certainement de quelle source je puise ces choses qui sont excellentes. Car, si je n'avais persuadé à moi depuis mon adolescence par les leçons de plusieurs, et par beaucoup de lettres (lecture), rien n'être dans la vie extrêmement à-désirer, si ce n'est la gloire et l'honneur; mais tous les tourments du corps, tous les périls de mort et d'exil être à-estimer de peu de valeur pour acquérir eux, jamais je n'eusse exposé moi pour votre salut à des démêlés si nombreux et si grands et à ces attaques de-tous-les-jours d'hommes abattus (corrompus). Mais tous les livres sont pleins, les paroles des sages sont pleines, l'antiquité est pleine d'exemples ; qui tous seraient-ensevelis dans les ténèbres, si la lumière des lettres ne s'y joignait. Que de nombreux portraits d'hommes très-courageux |
aux jeux de hasard et à la paume, je l'emploie à repasser mes études littéraires ? On doit me le pardonner d'autant plus volontiers, que ces travaux rentrent dans les occupations de ma profession ; mes talents, quels qu'ils soient, n'ont jamais fait défaut à mes amis en danger. Si cette étude paraît de peu de valeur aux yeux de certaines personnes, je sais du moins à quelle source je puise l'élévation. En effet, si les leçons des sages, si l'étude approfondie des lettres ne m'avaient persuadé dès ma jeunesse que, dans la vie, rien n'est vraiment désirable que la gloire et l'honneur, et que, pour les acquérir, tous les tourments, tous les périls, l'exil et la mort même doivent être comptés pour peu de chose, jamais, pour le salut de l'État, je ne me serais exposé à tant de démêlés si redoutables, ni aux attaques journalières des plus mauvais citoyens. Mais tous les livres, mais la voix de tous les sages le redisent sans cesse ; mais toute l'antiquité est remplie de grands exemples qui tous, sans la lumière des lettres, seraient ensevelis dans les ténèbres. Combien de tableaux des hommes |
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nobis imagines non solum ad intuendum , verum etiam ad imitandum, fortissimorum virorum expressas, scriptores et graeci et latini reliquerunt
? Quas ego mihi semper in administranda republica proponens, animum et
mentem meam ipsa cogitatione hominum excellentium conformabam.
VII. Quaeret quispiam : quid ? illi ipsi summi viri quorum virtutes litteris proditae sunt, istane doctrina, quam tu laudibus effers, eruditi fuerunt? Difficile est hoc de omnibus confirmare; sed tamen est certum, quid respondeam. Ego multos homines excellenti animo ac virtute fuisse, et sine doctrina, naturae ipsius habitu prope divino, per seipsos et moderatos et graves exstitisse fateor. Etiam illud adjungo, saepius ad laudem atque virtutem naturam sine doctrina, quam sine natura valuisse doctrinam. Atque idem ego contendo, quum ad naturam eximiam atque illustrem accesserit ratio quaedam conformatioque doctrinae, tum illud nescio quid praeclarum ac singulare solere |
scriptores et graeci et latini reliquerunt nobis expressas non solum ad intuendum, verum etiam ad imitandum ? Quas proponens mihi in administranda republica, ego conformabam semper animum et meam mentem cogitatione ipsa hominum excellentium. VII. Quispiam quaeret quid ? illi summi viri ipsi quorum virtutes sunt proditae litteris, fueruntne eruditi ista doctrina, quam tu effers laudibus ? Confirmare hoc de omnibus est difficile ; sed tamen quid respondeam est certum. Ego fateor multos homines fuisse animo excellenti ac virtute, et sine doctrina, habitu prope divino naturae ipsius, exstitisse per seipsos moderatos et graves. Adjungo etiam illud, naturam sine doctrina valuisse saepius ad laudem atque virtutem, quam doctrinam sine natura. Atque ego idem contendo, quum quaedam ratio conformatioque doctrinae accesserit ad naturam eximiam atque illustrem, tum illud nescio quid praeclarum ac singulare solere exsistere. |
les écrivains et grecs et latins ont laissés à nous représentés non-seulement à contempler, mais même à imiter ? Lesquels proposant à moi en administrant l'État, je leur conformais toujours mon coeur et mon esprit par la pensée même de ces hommes distingués. VIL Quelqu'un me demandera quoi ! ces grands hommes eus-mêmes, dont les vertus ont été célébrées par les lettres, ont-ils été instruits par cette science, que tu élèves par tes louanges ? Affirmer ceci de tous est difficile ; mais cependant ce que je dois répondre est certain. J'avoue beaucoup d'hommes avoir été doués d'une âme élevée et d'une vertu élevée, et même sans instruction, par la disposition presque divine de leur nature même, avoir été par eux-mêmes et modérés et graves. J'ajoute même ceci, la nature sans instruction avoir valu plus souvent pour acquérir la gloire et la vertu, que l'instruction sans la nature. Et moi le même je prétends, lorsqu'une certaine mesure et perfection de science s'est jointe à une nature distinguée et brillante, alors ce je ne-sais quoi d'éclatant et de singulier avoir-coutume d'exister. |
les plus courageux les écrivains grecs et romains nous ont laissés pour être l'objet de notre admiration et de notre imitation ! Je les avais toujours devant les yeux dans l'administration de l'État, et la seule pensée de leur vertu fortifiait mon
coeur. VII. Mais quoi? dira quelqu'un, ces grands hommes dont les lettres nous ont retracé les vertus, possédaient-ils ces connaissances que vous nous vantez ? Il est difficile de l'assurer de tous ; cependant je n'hésiterai pas sur la réponse. J'avoue qu'on a vu des hommes d'une âme excellente et d'une vertu supérieure, sans le secours de l'art; qui, par la seule disposition de leur nature presque divine, ont été par eux-mêmes et justes et sages : j'ajoute même que, sans l'étude, un heureux naturel a plus souvent contribué à la gloire et à la vertu que l'étude sans la nature. Je soutiens de plus que, si à un naturel excellent viennent se joindre l'étude et l'instruction, cette alliance |
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exsistere. Ex hoc esse hunc numero quem patres nostri viderunt, divinum hominem, Africanum; ex hoc C. Laelium, L. Furium, moderatissimos homines et continentissimos ; ex hoc fortissimum virum et illis temporibus doctissimum, M. Catonem illum senem : qui profecto, si nihil ad percipiendam colendamque virtutem litteris adjuvarentur, nunquam se ad earum studium contulissent. Quod si non hic tantus fructus ostenderetur, et si ex his studiis delectatio sola peteretur, tamen, ut opinor, hanc animi adversionem humanissimam ac liberalissimam judicaretis. Nam ceterae neque temporum sunt, neque aetatum omnium, neque locorum; haec studia adolescentiam alunt, senectutem oblectant, secundas res ornant, adversis perfugium ac solatium praebent ; delectant domi, non impediunt foris, pernoctant nobiscum, peregrinantur, rusticantur. Quod si ipsi haec neque attingere, neque sensu nostro gustare possemus, tamen ea mirari deberemus, etiam quum in aliis videremus. | Esse ex hoc numero hunc Africanum, hominem divinum, quem viderunt nostri patres; ex hoc C. Laelium L. Furium, homines moderatissimos et continentissimos ; ex hoc virum fortissimum et doctissimum illis temporibus, M. Catonem illum senem qui profecto, si adjuvarentur nihil litteris ad percipiendam colendamque virtutem, nunquam se contulissent ad studium earum. Quod si hic tantus fructus non ostenderetur, et si sola delectatio peteretur ex his studiis , tamen, ut opinor, judicaretis humanissimam, ac liberalissimam hanc adversionem animi. Nam ceterae sunt neque omnium temporum, neque aetatum, neque locorum; haec studia alunt adolescentiam, oblectant senectutem, ornant res secundas, praebent adversis perfugium ac solatium; delectant domi, non impediunt foris, pernoctant, peregrinantur, rusticantur nobiscum. Quod si possemus ipsi neque attingere hic, neque gustare nostro sensu, tamen deberemus mirari ea, etiam quum videremus in aliis. |
Je dis
être de ce nombre ce Scipion l'Africain, homme divin, lequel ont vu nos pères (ancêtres); de ce nombre C. Lélius, L. Furius, hommes très-modérés et très-sages; de ce nombre un homme très-courageux et le plus savant de ces temps-là, M. Caton ce fameux vieillard ces hommes assurément, s'ils n'étaient aidés en rien par les lettres pour connaître et pratiquer la vertu, jamais ne se seraient transportés à l'étude d'elles. Que si ce si grand fruit ne se montrait, et si le seul plaisir était demandé à ces études, cependant, comme je pense, vous jugeriez être la plus douce et la plus libérale des occupations cette occupation de l'esprit. En effet les autres ne sont ni de tous les temps, ni de tous les âges, ni de tous les lieux ; ces études nourrissent l'adolescence, réjouissent la vieillesse, ornent les choses prospères, fournissent aux choses contraires refuge et consolation; récréent à la maison, n'embarrassent pas au dehors, passent-la-nuit, voyagent, vont-à-la-campagne avec-nous. Que si nous ne pouvions nous-mêmes ni atteindre ces douceurs, ni les goûter par notre sens, cependant nous devrions admirer elles, même quand nous les verrions dans les autres. |
produit je ne sais quoi d'éclatant et de singulier. De ce nombre fut, du temps de nos pères, cet homme divin, Scipion l'Africain ; de ce nombre, C. Lélius, L. Furius, ces modèles de modération et de sagesse; de ce nombre, l'homme le plus ferme, le plus savant de son siècle, Caton l'Ancien. Certes, s'ils avaient cru les lettres inutiles pour connaître et pratiquer la vertu, jamais ils ne se fussent appliqués à cette étude. Mais quand on n'aurait pas en vue ce grand avantage, quand on n'y rechercherait que le seul plaisir; vous jugeriez encore, je pense, qu'il n'existe pas de récréation plus honnête ni plus digne d'hommes libres. En effet, les autres délassements ne sont ni de tous les instants, ni de tous les âges, ni de tous les lieux : les lettres nourrissent la jeunesse, charment la vieillesse, font l'ornement de la prospérité, fournissent dans l'adversité un asile et une consolation ; elles nous récréent dans nos foyers, ne nous embarrassent point au dehors ; elles veillent avec nous; elles nous suivent en voyage, à la campagne. Quand nous ne pourrions ni atteindre les charmes, ni goûter par nous-mêmes les douceurs des lettres, nous ne devrions pas moins les admirer dans les autres. |
30 -31
VIII. Quis nostrum tam animo agresti ac duro, fuit, ut Roscii morte nuper non commoveretur? Qui quum esset senex mortuus, tamen propter excellentem artem ac venustatem videbatur omnino mori non debuisse. Ergo ille corporis motu tantum amorem sibi conciliarat a nobis omnibus: nos animorum incredibiles motus celeritatemque ingeniorum negligemus ? Quoties ego hunc Archiam vidi, judices (utar enim vestra benignitate, quoniam me in hoc novo genere dicendi tam diligenter attenditis), quoties ego hunc vidi, quum litteram scripsisset nullam, magnum numerum optimorum versuum de his ipsis rebus quae tum agerentur, dicere ex tempore ? quoties revocatum eamdem rem dicere, commutatis verbis atque sententiis? Quae vero accurate cogitateque scripsisset, ea sic vidi probari, ut ad veterum scriptorum laudem pervenirent. Hunc ego non dili | VIII. Quis nostrum fuit animo tam agresti ac duro, ut nuper non commoveretur morte Roscii ? Qui quum esset mortuus senex, videbatur tamen propter artem excellentem ac venustatem, non debuisse mori omnino. Ergo ille sibi conciliarat amorem a nobis omnibus motu corporis tantum : nos negligemus motus incredibiles animorum celeritatemque ingeniorum ? Quoties ego vidi hunc Archiam, judices (utar enim vestra benignitate, quoniam attenditis me tam diligenter in hoc novo genere dicendi), quoties ego vidi hunc, quum scripsisset nullam litteram, dicere ex tempore magnum numerum optimorum versuum de his rebus ipsis quae tum agerentur? quoties revocatum dicere eamdem rem, verbis commutatis atque sententiis? Vidi vero, ea quae scripsisset accurate cogitateque, probari sic, ut pervenirent ad laudem veterum scriptorum. |
VIII. Qui de nous fut d'un esprit si sauvage et si dur, que dernièrement il ne fût pas ému de la mort de Roscius ? Qui comme il était mort vieux, paraissait cependant pour son art excellent et sa grâce n'avoir pas dû mourir du tout. Ainsi donc cet acteur s'était concilié l'amour de la part de nous tous par le mouvement du corps seulement nous négligerons les mouvements incroyables des esprits et la célérité des génies ? Combien de fois ai-je vu cet Archias, juges (car j'userai (je profiterai) de votre bienveillance, puisque vous écoutez moi si soigneusement dans ce nouveau genre de parler), combien de fois ai-je vu lui quoi qu'il n'eût écrit aucune lettre (aucun ouvrage), dire dès le moment (sur-le-champ) un grand nombre d'excellents vers sur ces choses mêmes qui alors étaient agitées (en question) ? combien de fois l'ai-je vu invité-de-nouveau à dire la même chose, la répéter les mots étant changés et les pensées aussi? Mais j'ai vu, ces vers qu'il avait écrits avec-soin et avec-réflexion, être approuvés tellement, qu'ils parvenaient à la gloire des anciens écrivains. |
VIII. Qui de nous dernièrement a eu le coeur assez dur, assez
cruel pour n'être pas sensible à la mort de Roscius ? Quoiqu'il soit mort vieux, il nous semblait qu'il n'aurait jamais dû mourir, tant il excellait dans son art, tant il y déployait de grâce. Il ne nous avait charmés que par les attitudes de son corps, et nous négligerions la vivacité, l'incroyable activité de l'esprit! Combien de fois ai-je vu Archias (car je profiterai, juges, de l'attention que vous voulez bien accorder à ce nouveau genre de plaidoyer) , combien de fois
l'ai-je vu improviser un grand nombre de vers excellents sur les sujets dont nous nous entretenions? Combien de fois, prié de les répéter, l'ai-je vu exprimer les mêmes choses en changeant les mots et les pensées? Quant aux sujets qu'il avait étudiés et écrits avec soin, je les ai vu comblés d'éloges autant que les chefs-d'oeuvre de l'anti |
32- 33
gam? non admirer? non omni ratione defendendum putem? Atqui sic a summis hominibus eruditissimisque accepimus, ceterarum rerum studia et
doctrina et praeceptis et arte constare : poetam natura ipsa valere, et mentis viribus excitari, et quasi divino quodam spiritu
inflari. Quare suo jure noster ille Ennius sanctos appellat poetas, quod quasi deorum aliquo dono atque munere commendati nobis esse videantur. Sit igitur, judices, sanctum apud vos, humanissimos homines, hoc poetae nomen, quod nulla unquam barbaria violavit. Saxa et solitudines voci respondent ; bestiae saepe immanes canto flectuntur atque consistunt : nos, instituti rebus optimis, non poetarum voce moveamur? Homerum Colophonii civem esse dicunt suum, Chii suum vindicant, Salaminii repetunt, Smyrnaei vero suum esse confirmant: itaque etiam delubrum |
Non ego diligam
hunc ? non admirer? non putem defendendum omni ratione ? Atqui accepimus sic ab hominibus summis eruditissimisque, studia ceterarum rerum constare et doctrina et praeceptis et arte : poetam valere natura ipsa, et excitari viribus mentis, et inflari quodam spiritu quasi divino. Quare jure suo noster Ennius ille appellat poetas sanctos, quod videantur esse commendati nobis quasi aliquo dono atque munere deorum. Judices, sit igitur sanctum apud vos, homines humanissimos, hoc nomen poetae, quod nulla barbaria unquam violavit. Saxa et solitudines respondent voci ; saepe bestiae immanes flectuntur canto atque consistunt instituti rebus optimis, nos, non moveamur voce poetarum ? Colophonii dicunt Homerum esse suum civem, Chii vindicant suum, Salaminii repetunt, Smyrnaei vero confirmant esse suum ; |
Je ne chérirais pas lui ? je ne l'admirerais pas ? je ne penserais pas lui devant être défendu par tout moyen ? Or nous avons appris ainsi des hommes les plus grands et les plus érudits, les études des autres choses consister et dans l'instruction et dans les préceptes et dans la méthode : le poète valoir par la nature même, et s'élever par les forces de son intelligence, et être inspiré par un certain esprit presque divin. Aussi avec un droit sien (personnel) notre Ennius, ce fameux poète, appelle les poètes sacrés, parce qu'ils paraissent être recommandée à nous comme par quelque don et quelque présent des dieux. Juges, qu'il soit donc sacré auprès de vous, hommes très-instruits, ce nom de poète, que nulle barbarie n'a jamais violé. Les rochers et les solitudes répondent à leur voix ; souvent les bêtes féroces sont fléchies par leur chant et s'arrêtent formés par les choses les meilleures, nous, nous ne serions pas émus par la voix des poètes ? Les Colophoniens disent Homère être leur citoyen, les habitants de-Chio le revendiquent comme leur, les Salaminiens le réclament, mais les Smyrnéens affirment lui être leur citoyen: |
quité. Et je ne chérirais pas, je n'admirerais pas un tel homme ? je ne me croirais pas obligé de le défendre avec tout le zèle dont je suis capable ? Les hommes les plus instruits nous ont enseigné que les autres talents dépendent de l'étude, des préceptes et de l'art, tandis que le poète ne doit rien qu'à la nature, qu'il s'élève par la force même de son génie, que c'est comme un souffle divin qui l'inspire. Aussi notre grand Ennius a-t-il le droit d'appeler sacrés les poètes, parce qu'ils nous sont pour ainsi dire accordés comme un présent par la faveur des dieux. Juges, ô vous qui avez tant d'amour pour les arts, qu'il soit donc sacré pour vous, ce nom de poète que jamais ne viola la barbarie elle-même. Les rochers et les solitudes répondent à la voix des poètes ; souvent les bêtes féroces s'arrêtent, fléchies par leurs accents : et nous, formés par les lettres, nous ne serions pas sensibles à la douceur de leurs chants ? Les habitants de Colophon disent qu'Homère était leur concitoyen, ceux de Chio se l'attribuent, ceux de Salamine le réclament, ceux de Smyrne le disputent à tous les autre. |
34 - 35
ejus in oppido dedicaverunt : permulti alii praeterea pugnant inter se atque contendunt. IX. Ergo illi alienum, quia poeta fuit, post mortem etiam expetunt : nos hunc vivum, qui et voluntate et legibus noster est, repudiabimus? Praesertim quum omne olim studium atque omne ingenium contulerit Archias ad populi romani gloriam laudemque celebrandam ? Nam et cimbricas res adolescens attigit, et ipsi illi C. Mario, qui durior ad haec studia videbatur, jucundus fuit. Neque enim quisquam est tam aversus a Musis, qui non mandari versibus aeternum suorum laborum facile praeconium patiatur. Themistoclem illum, summum Athenis virum, dixisse aiunt, quum ex eo quaereretur, quod acroama aut cujus vocem libentissime audiret : « Ejus, a quo sua virtus optime praedicaretur. » Itaque ille Marius item eximie L. Plotium dilexit, cujus ingenio putabat ea quae gesserat posse celebrari. |
itaque etiam dedicaverunt delubrum ejus in oppido ; permulti alii praeterea pugnant inter se atque contendunt. IX. Ergo illi expetunt alienum, etiam post mortem, quia fuit poeta : nos repudiabimus hunc vivum, qui est noster et voluntate et legibus ? Praesertim quum Archias contulerit olim omne studium atque omne ingenium ad celebrandam gloriam laudemque populi romani ? Nam adolescens et attigit res cimbricas, et fuit jucundus illi ipsi C. Mario, qui videbatur durior ad haec studia. Neque enim quisquam est tam aversus a Musis, qui non patiatur facile praeconium aeternum suorum laborum mandari versibus. Aiunt illum Themistoclem, summum virum Athenis, quum quaereretur ex eo quod acroama, aut vocem cujus audiret libentissime, dixisse : "Ejus, a quo sua virtus praedicaretur optime." Itaque item ille Marius dilexit eximie L. Plotium, ingenio cujus putabat ea quae gesserat posse celebrari. |
aussi même ils ont dédié un temple de lui dans leur ville ; beaucoup d'autres en outre combattent entre eux et s'efforcent de l'avoir. IX. Ainsi ceux-là désirent posséder un étranger, même après sa mort, parce qu'il fut poète : nous, nous repousserons celui-ci vivant, qui est notre concitoyen et par sa volonté et par nos lois ? Surtout quand Archias a réuni autrefois toute son ardeur et tout son talent pour célébrer la gloire et la louange du peuple romain ? Car jeune et il a touché les affaires des-Cimbres, et il a été agréable à ce même C. Marius, qui paraissait plus ( trop ) dur pour ces études. Et en effet personne n'est si détourné ( ennemi ) des Muses, qu'il ne souffre facilement l'éloge éternel de ses travaux être confié aux vers (être chanté). Ils disent (on dit) ce fameux Thémistocle, très-grand homme à Athènes, quand on demandait de (à) lui quel concert, ou la voix de qui il entendrait le plus volontiers, avoir dit : "La voix de celui par qui sa valeur serait célébrée le mieux." Aussi de même ce fameux Marius chérit singulièrement L. Plotius, par le talent duquel il pensait ces actions qu'il avait faites pouvoir être célébrées. |
Aussi lui ont-ils dédié un temple dans leur ville. Plusieurs autres peuples encore se l'arrachent à l'envi. IX. Ainsi, ils réclament un étranger, même après sa mort, parce qu'il était poète. Celui-ci, qui est vivant, qui veut être notre concitoyen, qui l'est d'après nos lois, le rejetterons-nous, quand il a depuis longtemps consacré tous ses travaux et tous ses talents à la gloire du peuple romain ? Dans sa jeunesse, il a chanté la guerre des Cimbres; et Marius lui-même, qui paraissait peu sensible au mérite des lettres, l'honora de son estime. En effet; il n'y a point d'homme assez ennemi des Muses qui ne voie avec plaisir l'éloge de ses travaux éternisé par la poésie. Thémistocle, cet illustre Athénien, à qui l'on demandait un jour quel concert ou quel chant il entendrait le plus volontiers, répondit, dit-on : "La voix qui célébrerait le mieux mes hauts faits." Aussi le même Marius chérissait-il singulièrement L. Plotius, qu'il croyait capable, par son talent, de chanter ses exploits |
36 - 37
Mithridaticum vero bellum, magnum atque
difficile, et in multa varietate terra marique versatum, totum ab hoc expressum est: qui libri non modo L. Lucullum, fortissimum et clarissimum virum, verum etiam populi romani nomen illustrant. Populus enim
romanus aperuit, Lucullo imperante, Pontum, et regiis quondam opibus et ipsa
natura regionis vallatum; populi romani exercitus, eodem duce, non maxima manu
innumerabiles Armeniorum copias fudit; populi romani laus est, urbem amicissimam Cyzicenorum ejusdem consilio ex omni impetu regio ac totius belli ore ac faucibus ereptam esse, atque servatam ; nostra semper feretur et praedicabitur, L. Lucullo dimicante, cum interfectis ducibus depressa hostium classis, et incredibilis apud Tenedum pugna illa navalis : nostra sunt tropaea, nostra monumenta, nostri triumphi. Quare, quorum ingeniis haec feruntur, ab iis populi romani fama celebratur. |
Ab hoc
vero bellum Mithridaticum, magnum atque difficile, et versatum terra marique in multa varietate, est expressum totum : qui libri illustrant non modo L. Lucullum, virum fortissimum et clarissimum, verum etiam nomen populi romani. Populus enim romanus, Lucullo imperante, aperuit Pontum, vallatum quondam et opibus regiis et natura ipsa regionis; exercitus populi romani fudit, eodem duce, manu non maxima copias innumerabiles Armeniorum ; est laus populi romani, urbem Cyzicenorum amicissimam esse ereptam consilio ejusdem ex omni impetu regio ac ore ac faucibus totius belli, atque servatam ; semper feretur nostra, et preedicabitur classis hostium depressa cum ducibus interfectis, L. Lucullo dimicante, et illa pugna navalis incredibilis apud Tenedum : tropaea sunt nostra, monumenta nostra, triumphi nostri. Quare fama populi romani celebratur ab iis ingeniis quorum haec feruntur. |
Mais
ce fut par lui que la guerre de-Mithridate guerre grande et difficile, et roulée (faite) sur terre et sur mer en grande variété d'événements, fut traitée tout-entière : ces livres illustrent non-seulement L. Lucullus, homme très-courageux et très-illustre, mais aussi le nom du peuple romain. Car le peuple romain, Lucullus commandant, ouvrit le Pont, fortifié jadis et par les forces du-roi et par la nature même du pays ; l'armée du peuple romain a mis-en-fuite, sous le même chef, avec une troupe non très-grande les troupes innombrables des Arméniens ; c'est une gloire du peuple romain, la ville des Cyzicéniens très-amie de nous avoir été arrachée par la prudence du même Lucullus de toute la fureur du-roi et de la bouche et de la gorge de toute la guerre, et avoir été sauvée; toujours elle sera dite nôtre, et sera célébrée la flotte des ennemis coulée-bas avec leurs généraux tués, L. Lucullus combattant, et cette bataille navale incroyable auprès de Ténédos: ces trophées sont les nôtres, ces monuments sont les nôtres. ces triomphes sont les nôtres. Aussi la renommée du peuple romain est célébrée par ceux-là par les génies desquels ces exploits sont publiés. |
La guerre contre Mithridate, guerre importante et difficile qui se fit sur terre et sur mer avec des succès si variés, a été célébrée tout entière par Archias. Ce poème immortalise non seulement la valeur du célèbre Lucullus, mais aussi la gloire du peuple romain. En effet, si le peuple romain qui, sous le commandement de Lucullus, a pénétré dans le Pont, qu'avaient défendu jusque-là et la puissance de son roi et la nature même du pays ; ce sont les armées du peuple romain qui, sous le même général, avec des troupes peu nombreuses, ont mis en déroute les troupes innombrables de l'Arménie; c'est au peuple romain qu'appartient la gloire d'avoir, par la prudence du même Lucullus, sauvé la ville de Cyzique, notre alliée fidèle, de toute la fureur du roi, et de l'avoir préservée des horreurs d'une guerre cruelle ; toujours on redira, toujours on célébrera notre incroyable victoire remportée à Ténédos sous les ordres du même chef, où les ennemis virent leurs généraux tués et leur flotte coulée à fond ce sont nos trophées, nos monuments, nos triomphes. Ainsi, ceux dont le génie les chantent, célèbrent la gloire du peuple romain. |
38 - 39
Carus fuit Africano superiori noster Ennius : itaque etiam in sepulcro Scipionum putatur is esse constitutus e marmore. At
iis laudibus certe non solum ipsi, qui laudantur, sed etiam populi romani nomen ornatur. In caelum hujus proavus
Cato tollitur : magnus honos populi romani rebus adjungitur. Omnes denique illi Maximi, Marcelli,
Fulvii, non sine communi omnium nostrum laude decorantur. Ergo illum qui haec fecerat, Rudium
hominem, majores nostri in civitatem receperunt : nos hunc Heracleensem, multis civitatibus expetitum, in hac autem legibus constitutum, de nostra civitate ejiciemus? X. Nam si quis minorem gloriae fructum putat ex graecis versibus percipi, quam ex latinis, vehementer errat : propterea quod graeca leguntur in omnibus fere gentibus, latina suis finibus, exiguis sane, continentur. Quare si res eae quas gessimus, orbis terrae regionibus definiuntur , cupere debemus, |
Noster
Ennius fuit carus superiori Africano : itaque is putatur etiam esse constitutus e marmore in sepulcro Scipionum. At certe non solum ipsi, qui laudantur, sed etiam nomen populi romani ornatur iis laudibus. Cato proavus hujus tollitur in coelum magnus honos adjungitur rebus populi romani. Denique omnes illi Maximi, Marcelli, Fulvii, non decorantur sine laude communi nostrum omnium. Ergo nostri majores receperunt in civitatem hominem Rudium, illum qui fecerat haec ejiciemus nos de nostra civitate hunc Heracleensem, expetitum multis civitatibus, constitutum autem in hac legibus? X. Nam si quis putat percipi ex versibus graecis fructum gloriae minorem, quam ex latinis, errat vehementer propterea quod graeca leguntur in fere omnibus gentibus latina continentur suis finibus, exiguis sane. Quare si eae res quas gessimus, definiuntur regionibus orbis terrae, |
Notre poète Ennius fut cher, au premier Scipion l'Africain : aussi il est pensé même avoir été dressé (représenté) en marbre sur le sépulcre des Scipions. Mais certainement non-seulement ceux-mêmes, qui sont loués mais encore le nom du peuple romain est paré par ces louanges. Caton le bisaïeul de celui-ci est élevé au ciel un grand honneur s'ajoute aux exploits du peuple romain. Enfin tous ces Maximus, ces Marcellus, ces Fulvius, ne sont pas honorés sans une gloire commune de (à) nous tous. Aussi nos ancêtres ont reçu dans leur cité un homme de-Rudia, celui qui avait fait ces éloges nous rejetterons-nous de notre cité, ce citoyen d'-Héraclée, recherché par plusieurs villes, et établi dans celle-ci par les lois? X. Car si quelqu'un pense être reçu (recueilli) des vers grecs un fruit de gloire moindre, que des vers latins, il se trompe violemment parce que les ouvragea grecs se lisent chez presque tous les peuples, les ouvrages latins sont renfermés dans leurs limites, étroites certainement. Aussi si ces exploits que nous avons faits, sont limités par les régions du globe de la terre, |
Notre poète Ennius fut cher au premier Scipion l'Africain : on pense même que c'est sa figure en marbre qu'on voit sur le tombeau
des Scipions. Mais assurément ses vers font autant d'honneur au peuple romain qu'aux héros qu'il a loués. Il élève jusqu'au ciel Caton, le bisaïeul de celui qui m'écoute, et il ajoute par là un grand éclat à la gloire du nom romain. En un mot, l'éloge des Maximus, des Marcellus, des Fulvius, nous le partageons tous avec eux. Voilà pourquoi nos aïeux ont donné le titre de citoyen à un homme de Rudia ; et nous chasserions de notre cité un citoyen d'Héraclée, recherché par plusieurs autres villes, établi dans celle-ci
en vertu de nos lois ? X. Ce serait une grande erreur que de penser que la poésie grecque est moins propre que la poésie latine à répandre la renommée des grands hommes : en effet, presque tous les peuples lisent les ouvrages des Grecs, tandis que les livres latins sont circonscrits dans les étroites limites de l'Italie. Si donc nos exploits n'ont d'autres bornes |
40 - 41
quo manuum nostrarum
tela pervenerint, eodem gloriam famamque penetrare : quod quum ipsis populis, de quorum
rebus scribitur, haec ampla sunt, tum iis certe qui de vita gloriae causa dimicant, hoc maximum et periculorum incitamentum est et laborum. Quam multos scriptores rerum suarum magnus
ille Alexander secum habuisse dicitur ! Atque is tamen, quum in Sigeo ad Achillis tumulum adstitisset :
"O fortunate, inquit, adolescens, qui tuae virtutis Homerum praeconem inveneris!
" Et vere. Nam, nisi Ilias ille exstitisset, idem tumulus, qui corpus ejus contexerat, nomen etiam obruisset. Quid? Noster, hic Magnus, qui cum virtute fortunam adaequavit, nonne Theophanem Mitylenaeum, scriptorem rerum suarum, in concione militum civitate donavit? Et nostri illi fortes viri, sed rustici ac milites, dulcedine quadam gloriae commoti, |
debemus
cupere, gloriam famamque penetrare eodem, quo tela nostrarum manuum pervenerint: quod quum haec sunt ampla populis ipsis, de rebus quorum scribitur, tum hoc incitamentum et periculorum et laborum est maximum certe iis qui dimicant de vita causa gloriae. Quam multos scriptores suarum rerum ille magnus Alexander dicitur habuisse secum ! Atque tamen, quum adstitisset ad tumulum Achillis in Sigeo, is inquit "O fortunate adolescens, qui inveneris Homerum praeconem tuae virtutis !" Et vere. Nam idem tumulus, qui contexerat corpus ejus, obruisset etiam nomen, nisi ille Ilias exstitisset. Quid ? Hic Magnus, noster, qui adaequavit fortunam cum virtute, nonne donavit civitate in concione militum, Theophanem Mitylenaeum, scriptorem suarum rerum ? Et nostri illi viri fortes, sed rustici ac milites, commoti quadam dulcedine gloriae, quasi participes |
nous devons désirer, notre gloire et notre renommée pénétrer là-même, où les traits de nos mains sont parvenus (ont pénétré): parce que quand ces avantages sont considérables pour les peuples eux-mêmes, sur les actions desquels on écrit, alors cet encouragement au milieu et des dangers et des travaux est très-grand certainement à ceux qui combattent pour la vie par le motif de la gloire. Combien d'écrivains de ses exploits ce grand Alexandre est dit avoir eu avec-lui ! Et cependant, lorsqu'il se fut arrêté au tombeau d'Achille sur le promontoire Sigée, ce héros dit: "O fortuné jeune-homme, qui as trouvé un Homère pour héraut de ta valeur!" Et il parlait vraiment. Car le même tombeau, qui avait couvert le corps de lui, eût enseveli aussi son nom, si cette célèbre Iliade n'eût pas existé. Quoi ! Ce Pompée surnommé le Grand, notre concitoyen, qui égala le bonheur avec le courage, ne gratifia-t-il pas du droit-de-cité dans l'assemblée de ses soldats, Théophane de-Mitylène, écrivain de ses exploits? Et nos concitoyens, ces hommes courageux, mais rustiques et soldats, fortement-ébranlés par une certaine douceur de gloire, comme participant |
que celles du monde, nous devons désirer que notre gloire et notre renommée aillent aussi loin que nos armes. Ce voeu, digne des peuples dont les lettres célèbrent les exploits, peut encore offrir aux guerriers qui exposent leur vie en vue de la gloire, le plus puissant encouragement au milieu des dangers et des combats. Combien d'écrivains Alexandre le Grand n'avait-il pas auprès
de sa personne ! Cependant, quand il s'arrêta au tombeau d'Achille, sur le promontoire de Sigée : "Que tu es heureux! s'écria-t-il, jeune héros, d'avoir trouvé un Homère pour chanter ta valeur !" Il disait vrai ; car, sans l'Iliade, le même tombeau aurait enseveli ses cendres et sa renommée. Et que dirai-je de notre grand Pompée, dont le mérite égale la fortune ? Théophane de Mitylène, qui écrivait ses exploits, n'a-t-il pas reçu de lui, en présence de son armée, le titre de citoyen ? Et nos braves soldats, malgré toi rudesse, comme touchés de |
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quasi participes ejusdem
laudis, magno illud clamore approbaverunt. Itaque, credo, si civis romanus Archias legibus non esset, ut ab aliquo imperatore civitate donaretur, perficere non potuit ! Sulla, quum Hispanos et Gallos donaret, credo, hunc petentem repudiasset! Quem nos in concione vidimus, quum ei libellum malus poeta de populo subjecisset, quod epigramma in eum fecisset tantummodo alternis versibus longiusculis, statim ex iis rebus, quas tunc vendebat, jubere ei praemium tribui sub ea conditione, ne quid postea scriberet.» Qui sedulitatem mali poetae duxerit aliquo tamen praemio dignam, hujus ingenium et virtutem in scribendo et copiam non expetisset? Quid? a Q. Metello Pio, familiarissimo suo, qui civitate multos donavit, neque per se, neque per Lucullos impetravisset? qui praesertim usque eo de suis rebus scribi cuperet, |
ejusdem laudis, approbaverunt illud magno clamore. Itaque, credo, si Archias non esset civis romanus legibus non potuit perficere, ut donaretur civitate ab aliquo imperatore ! Sulla, credo, repudiasset hunc petentem, quum donaret Hispanos et Gallos ! Nos vidimus quem in concione, quum malus poeta de populo subjecisset ei libellum, quod fecisset epigramma in eum tantummodo versibus alternis longiusculis, jubere statim praemium tribui ei ex iis rebus, quas vendebat tunc, sub ea conditione, "ne scriberet quid postea." Qui duxerit sedulitatem mali poetae dignam tamen aliquo praemio non expetisset ingenium hujus et virtutem et copiam in scribendo ? Quid? impetravisset neque per se, neque per Lucullos, a Q. Metello Pio, suo familiarissimo, qui donavit multos civitate ? qui praesertim cuperet scribi de suis rebus usque eo ut tamen dederet suas aures |
de la même gloire, approuvèrent cela avec une grande acclamation. Ainsi, je le crois, si Archias n'était pas citoyen romain par les lois, n'a-t-il pu faire en sorte, qu'il fût gratifié du droit-de-cité par quelque général! Sylla, je le crois, eut repoussé celui-ci la demandant, lorsqu'il en gratifiait des Espagnols et des Gaulois ! Nous avons vu celui-ci dans une assemblée, lorsqu'un mauvais poète sorti du peuple eût présenté à lui un placet, parce qu'il avait fait une épigramme pour lui seulement en vers alternés un-peu-plus-longs (distiques), ordonner aussitôt une récompense être donnée à lui de ces objets qu'il vendait alors, sous cette condition, "qu'il n'écrirait rien par la suite." Celui qui jugea l'empressement d'un mauvais poète digne cependant de quelque récompense, n'aurait-il pas recherché le talent de celui-ci et sa force et son abondance en écrivant (de style) ? Quoi ? il ne l'eût obtenu ni par lui-même, ni par les Lucullus, de Q. Métellus Pius, son ami-intime, qui gratifia plusieurs du titre-de-citoyen ? lui qui surtout désirait être écrit (qu'on écrivit) sur ses exploits jusqu'à ce point que cependant il livrait ses oreilles |
cette gloire qu'ils semblaient partager avec leur général, ne l'ont-ils pas
approuvé par leurs bruyantes acclamations ? Sans doute, si Archias n'était pas citoyen par nos lois, il n'aurait pu obtenir ce titre de quelqu'un de nos généraux! Sylla, sans doute, le lui eût refusé, Sylla qui l'accordait aux Espagnols et aux Gaulois ! Nous l'avons vu, en pleine assemblée, récompenser un mauvais poète du peuple qui lui présentait un placet, pour avoir composé quelques distiques en son honneur, en lui faisant donner à l'instant une portion des objets qu'il vendait alors, "à la condition qu'il n'écrirait plus." Celui qui jugea à propos de récompenser la bonne volonté d'un méchant poète n'aurait-il pas fait la plus grand cas du génie, de la force et de la fécondité d'Archias ? Archias n'aurait-il pu encore obtenir le titre de citoyen, ou par lui-même, ou par les Lucullus, ou par Métellus Pius, son ami intime, qui l'a accordé à beaucoup d'autres, qui désirait si ardemment qu'on écrivit ses ex- |
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ut etiam
Cordubae natis poetis, pingue quiddam sonantibus atque peregrinum, tamen aures suas dederet. XI. Neque enim est hoc dissimulandum, quod obscurari non potest, sed prae nobis ferendum : trahimur omnes laudis studio, et optimus quisque maxime gloria ducitur. Ipsi illi philosophi etiam illis libellis quos de contemnenda gloria scribunt, nomen suum inscribunt : in eo ipso, in quo praedicationem nobilitatemque despiciunt, praedicari de se ac nominari volunt. Decimus quidem Brutus, summus ille vir et imperator, Attii, amicissimi sui, carminibus templorum ac monumentorum aditus exornavit suorum. Jam vero ille qui cum Aetolis, Ennio comite, bellavit, Fulvius, non dubitavit Martis manubias Musis consecrare. Quare, in qua urbe imperatores prope armati poetarum nomen et Musarum delubra coluerunt, in ea non debent togati judices a Musarum honore et a poetarum salute abhorrere. |
etiam
poetis natis Cordubae, sonantibus quiddam pingue atque peregrinum. XI. Neque enim hoc quod non potest obscurari est dissimulandum, sed ferendum prae nobis : omnes trahimur studio laudis, et quisque optimus ducitur maxime gloria. Illi philosophi ipsi etiam illis libellis quos scribunt de gloria contemnenda, inscribunt suum nomen : volunt praedicari de se ac nominari in eo ipso, in quo despiciunt praedicationem nobilitatemque. Decimus quidem Brutus, ille summus vir et imperator, exornavit aditus templorum ac suorum monumentorum carminibus Attii, sui amicissimi. Jam vero ille Fulvius qui bellavit cum Aetolis, Ennio comite, non dubitavit consecrare Musis manubias Martis. Quare, in ea urbe in qua imperatores prope armati coluerunt nomen poetarum et delubra Musarum, judices togati non debent abhorrere ab honore Musarum et a salute poetarum. |
même
aux poètes nés à Cordoue, faisant-retentir quelque chose de gras et d'étranger. XI. Et en effet ce qui ne peut être obscurci n'est pas devant être dissimulé, mais devant être porté devant nous : tous nous sommes entraînés par l'amour de la louange, et chacun le meilleur est conduit le plus par la gloire. Ces philosophes eux-mêmes même dans ces livres qu'ils écrivent sur la gloire à-mépriser, y inscrivent leur nom : ils veulent qu'il soit parlé d'eux et être nommés en cet ouvrage même dans lequel ils méprisent l'éloge et la célébrité. Certainement Décimus Brutus, ce grand homme et ce grand général, orna les entrées des temples et de ses monuments des vers d'Attius, son ami-intime. Mais déjà ce Fulvius qui a combattu avec (contre) les Étoliens, Ennius étant son compagnon, n'hésita pas à consacrer aux Muses les dépouilles de Mars. C'est pourquoi, dans cette ville dans laquelle des généraux presque encore armés ont honoré le nom des poëtes et les temples des Muses, des juges revêtus-de-la-toge ne doivent pas s'éloigner de l'honneur des Muses et du salut des poètes. |
ploits qu'il prêtait avec plaisir l'oreille à des poètes natifs de
Cordoue, malgré la pesanteur de leurs vers barbares? XI. En effet, pourquoi dissimuler ce qui ne peut se cacher, ce qu'on doit avouer hardiment? Tous, nous sommes entraînés par l'amour de la gloire, et cet attrait est d'autant plus puissant que l'âme a plus de noblesse. Les philosophes mêmes mettent leur nom aux livres qu'ils composent sur le mépris de la gloire : tout en prouvant qu'il faut mépriser la louange et la célébrité, ils s'efforcent de se faire louer et connaître. Décimus Brutus, grand citoyen et grand général, a fait graver au frontispice des monuments et des temples qu'il a élevés des inscriptions d'Attius, son ami intime. Fulvius, qui se fit accompagner d'Ennius dans la guerre contre les Étoliens, ne balança pas à consacrer aux Muses les dépouilles de Mars. Aussi, dans une ville où des généraux, pour ainsi dire encore revêtus de leurs armes, ont honoré le nom des poètes et les temples des Muses, des juges, au sein de la paix, ne doivent pas être indifférents pour la gloire des Muses et pour le salut des poètes. |
46 - 47
Atque, ut id libentius faciatis, jam me vobis, judices, indicabo, et de
meo quodam amore gloriae, nimis acri fortasse, verumtamen honesto, vobis confitebor. Nam, quas res nos in consulatu nostro vobiscum simul pro
salute hujus urbis atque imperii et pro vita civium proque universa republica gessimus, attigit hic versibus atque inchoavit : quibus auditis, quod mihi magna res et jucunda visa est,
hunc ad perficiendum hortatus sum. Nullam enim virtus aliam mercedem laborum periculorumque desiderat, praeter
hanc laudis et gloriae : qua quidem detracta, judices, quid est, quod in hoc tam exiguo vitae curriculo et tam brevi tantis nos in laboribus exerceamus
? Certe, si nihil animus praesentiret in posterum, et si, quibus regionibus vitae spatium circumscriptum est, eisdem omnes cogitationes terminaret suas, nec tantis se laboribus frangeret, neque tot curis vigiliisque angeretur, neque toties de vita ipsa |
Atque, judices, ut id faciatis lubentius, indicabo me vobis jam, et confitebor vobis de quodam amore gloriae meo, nimis acri fortasse, verumtamen honesto. Nam hic attigit versibus atque inchoavit res quas nos gessimus in nostro consulatu simul vobiscum pro salute hujus urbis atque imperii, et pro vita civium proque universa republica : quibus auditis, hortatus sum hunc ad perficiendum quod res visa est mihi magna et jucunda. Virtus enim desiderat nullam aliam mercedem laborum periculorumque praeter hanc laudis et gloriae qua quidem detracta, judices, quid est, quod exerceamus nos in tantis laboribus in hoc curriculo vitae tam exiguo et tam brevi ? Certe, si animus praesentiret nihil in posterum, et si terminaret omnes suas cogitationes eisdem regionibus quibus spatium vitae est circumscriptum ; nec se frangeret tantis laboribus, neque angeretur tot curis vigiliisque, neque dimicaret toties de vita ipsa. |
Et, juges, pour que vous le fassiez plus volontiers, je ferai-connaître moi à vous de suite et je ferai-l'aveu à vous d'un certain amour de la gloire mien (qui m'appartient), trop vif peut-être, mais cependant honorable. Car celui-ci a touché en vers et a entrepris de raconter les actions que nous avons faites dans notre consulat ensemble avec-vous pour le salut de cette ville et de cet empire, et pour la vie des citoyens et pour toute la république ces vers entendus, j'ai exhorté celui-ci à les achever, parce que le sujet a paru à moi grand et agréable. Car la vertu ne désire aucune autre récompense de ses travaux et de ses dangers, excepté (que) celle de la louange et de la gloire laquelle certes étant ôtée, juges, quel motif existe, que nous exercions nous dansde si grands travaux en cette carrière de la vie si exiguë et si courte? Certes, si notre âme ne pressentait rien pour le temps à-venir, et si elle bornait toutes ses pensées par les mêmes limites par lesquelles l'espace de la vie est circonscrit; et elle ne se briserait pas par tant de fatigues, et ne se tourmenterait pas par tant de soucis et de veilles , et ne combattrait pas tant de fois pour la vie même |
Et, pour que vous vous y portiez avec plus de plaisir, ô juges, je vais vous ouvrir mon coeur, et vous avouer ma passion pour la gloire, trop vive sans doute, mais après tout bien légitime. Ce que, pendant mon consulat, j'ai fait avec votre concours pour le salut de cette ville et de cet empire, pour la vie des citoyens et pour l'intérêt de tout l'État, Licinius a entrepris de l'écrire en vers : les morceaux que j'en ai entendus m'ont paru si importants et si excellents que je l'ai engagé à finir l'ouvrage; car la vertu ne désire d'autre récompense de ses travaux et de ses dangers que des éloges et de la gloire. Sans la gloire, juges, quel motif aurions-nous de nous exposer, dans le cours d'une vie si courte et si rapide, à tant de fatigues
? Assurément, si notre âme n'avait aucun pressentiment de l'avenir, si le même terme qui borne le cours de nos années bornait aussi celui de nos pensées, l'homme ne voudrait jamais se livrer à tant de travaux, se tourmenter par tant de soins et de veilles, ni exposer |
48 - 49
dimicaret. Nunc insidet quaedam in optimo
quoque virtus, quae noctes et dies animum gloria stimulis concitat, atque admonet, non
cum vitae tempore esse dimittendam commemorationem nominis nostri, sed cura omni posteritate
adaequandam. An vero tam parvi animi videamur esse omnes qui in republica, atque in his vitae periculis laboribusque versamur, ut, quum usque ad extremum spatium nullum tranquillum atque otiosum spiritum duxerimus, nobiscum simul moritura omnia arbitremur? An, quum statuas et imagines, non animorum simulacra, sed corporum, studiose multi summi homines reliquerint, consiliorum relinquere ac virtutum nostrarum effigiem non multo malle debemus, summis ingeniis expressam et politam? Ego vero omnia quae gerebam, jam tum in gerendo spargere me ac disseminare arbitrabar in orbis terrae memoriam sempiternam. Haec vero sive a meo sensu post mortem abfutura |
Nunc quaedam virtus insidet in quoque optimo quae concitat animum stimulis gloriae noctes et dies, atque admonet commemorationem nostri nominis, non esse dimittendam cum tempore vitae, sed adaequandam cum omni posteritate. Omnes vero qui versamur in republica, atque in his periculis laboribusque vitae, an videamur esse animi tam parvi, ut arbitremur omnia moritura simul nobiscum, quum duxerimus nullum spiritum tranquillum atque otiosum usque ad extremum spatium ? Quum multi summi homines reliquerint studiose statuas et imagines, simulacra non animorum, sed corporum, an non debemus malle multo relinquere effigiem consiliorum ac nostrarum virtutum, expressam et politam summis ingeniis? Ego vero arbitrabar, jam tum in gerendo, me spargere ac disseminare in memoriam sempiternam orbis terrae omnia quae gerebam. Sive vero haec est abfutura a meo sensu post mortem, |
Maintenant une certaine vertu repose dans chacun le meilleur, vertu qui excita l'âme par les aiguillons de la gloire les nuits et les jours, et l'avertit le souvenir de notre nom, ne pas être à-abandonner avec le temps de la vie, mais à-égaler avec toute la postérité. Mais nous tous qui nous agitons dans les affaires de l'Etat, et dans ces dangers et ces travaux de la vie, paraitrions-nous être d'une âme si petite, que nous pensions toutes choses devoir mourir ensemble avec nous, quand nous n'aurons tiré aucun souffle tranquille et paisible jusqu'au dernier espace ? Quand plusieurs grands hommes ont laissé avec-soin des statues et des images, portraits non de leurs âmes, mais de leurs corps, ne devons-nous pas préférer beaucoup de laisser une image de nos pensées et de nos vertus, faite et polie par les plus grands génies ? Mais moi je pensais, déjà alors en les faisant, moi répandre et semer-çà-et-là dans le souvenir éternel du globe de la terre toutes les choses que je faisais. Mais soit que ce souvenir doive être absent de mon sentiment après ma mort, |
tant de fois sa vie même. Mais dans tous les grands coeurs réside
un sentiment généreux qui, jour et nuit, les excite par l'aiguillon de la gloire, et qui nous avertit de ne point laisser périr avec notre vie le souvenir de notre nom, mais de le faire vivre jusque dans la postérité la plus reculée. Nous tous qui, au sein des affaires publiques, passons notre vie entourés de dangers et de pénibles travaux, aurions-nous assez peu d'élévation d'esprit pour croire qu'après avoir vécu sans pouvoir respirer un seul instant en repos, tout dût périr avec nous ? Quoi quand tant de grands hommes se sont empressés pour laisser après eux des statues et des portraits, faibles images de leurs corps et non de leurs âmes, ne devons-nous pas, avec beaucoup plus de raison, désirer de laisser de nos pensées et de nos vertus le tableau tracé par le pinceau habile des plus grands génies ! Pour moi, dans tout ce que j'ai entrepris pour le bien de l'État, je pensais, en le faisant, confier une semence immortelle de gloire au souvenir éternel de l'univers. Qu'après ma mort, je sois insensible à cette renommée, ou |
50 - 51
est, sive, ut sapientissimi homines putaverunt, ad aliquam mei partem pertinebit, nunc quidem certe cogitatione quadam speque delector. XII. Quare conservate, judices, hominem pudore eo, quem amicorum videtis comprobari tum dignitate, tum etiam vetustate; ingenio autem tanto, quantum id convenit existimari, quod summorum hominum ingeniis expetitum esse videatis; causa vero ejusmodi, quae beneficio legis, auctoritate municipii, testimonio Luculli, tabulis Metelli comprobetur. Quae quum ita sint, petimus a vobis, judices, si qua non modo humana, verum etiam divina in tantis negotiis commendatio debet esse, ut eum, qui vos, qui vestros imperatores, qui populi romani res gestas semper ornavit; qui etiam his recentibus nostris vestrisque domesticis periculis aeternum se testimonium laudum daturum esse profitetur; quique est eo numero qui semper apud omnes sancti sunt habiti atque dicti, sic in vestram accipiatis fidem, |
sive pertinebit ad aliquam partem mei, ut homines sapientissimi putaverunt, nunc quidem certe delector quadam cogitatione speque. XII. Quare conservate, judices, hominem eo pudore, quem videtis comprobari tum dignitate amicorum, tum etiam vetustate ; ingenio autem tanto, quantum convenit id existimari, quod videatis esse expetitum ingeniis summorum hominum ; causa vero ejusmodi, quae comprobetur beneficio legis, auctoritate municipii, testimonio Luculli, tabulis Metelli. Quae quum sint ita, petimus a vobis, judices, si qua commendatio non modo humana, verum etiam divina debet esse in tantis negotiis, ut accipiatis in vestram fidem eum, qui semper ornavit vos, qui vestros imperatores, qui res gestas populi romani; qui etiam profitetur se esse daturum testimonium aeternum laudum his periculis domesticis recentibus nostris vestrisque ; quique est eo numero qui semper sunt habiti atque dicti sancti |
soit qu'il atteigne à quelque partie de moi, comme des hommes très-sages l'ont pensé, mais maintenant certes je suis réjoui par une certains pensée et espérance. XII. C'est pourquoi conservez, juges, un homme d'une telle pudeur (vertu), que vous voyez être approuvé soit par le mérite de ses amis, soit par leur ancienneté ; et d'un génie aussi grand, qu'il convient ce génie être estimé pour que vous voyez lui avoir été recherché par les génies des plus grands hommes ; mais d'une cause de telle sorte, qu'elle soit prouvée par le bienfait de la loi, par l'autorité d'un municipe, par le témoignage de Lucullus, par les registres de Métellus. Puisque ces choses sont ainsi, nous demandons à vous, juges, si quelque recommandation non-seulement humaine, mais même divine doit exister dans de si grandes affaires, que vous receviez en votre protection ce poète, qui toujours a orné (loué) vous, qui a loué vos généraux, qui a loué les exploits du peuple romain qui de plus déclare soi être devant donner un témoignage éternel de louanges à ces dangers domestiques récents (courus récemment) nôtres et vôtres (par nous et par vous); et qui est de ce nombre d'hommes qui toujours ont été tenus et appelés sacrés |
que, suivant l'opinion des hommes les plus sages, quelque partie de moi-même éprouve encore ce sentiment, cette pensée et cet espoir me font dès aujourd'hui goûter un véritable plaisir. XII. Conservez-nous donc, juges, conservez-nous un homme dont les vertus lui ont, depuis si longtemps, gagné des amis si distingués; un poète doué de tout le talent nécessaire pour être recherché par des hommes d'un talent supérieur, un. citoyen dont la cause repose sur le bienfait de la loi, sur l'autorité d'une ville municipale, sur le témoignage de Lucullus, sur les registres de Métellus. Aussi, juges, si, dans une affaire d'une telle importance, il faut après avoir invoqué le témoignage des hommes, implorer encore la recommandation des dieux, je vous prie de faire en sorte qu'un homme qui a toujours employé ses talents à louer, vous, vos généraux et les victoires du peuple romain, qui bientôt immortalisera le souvenir des périls domestiques que, récemment encore, j'ai partagés avec vous, qu'un homme du nombre de ceux que tous les peuples ont toujours regardés comme sacrés, soit de votre part l'objet d'une protection |
52 - 53
ut humanitate vestra levatus
potius, quam acerbitate violatus esse videatur. Quae de causa pro mea consuetudine breviter simpliciterque dixi, judices, ea confido probata esse omnibus : quae non fori neque judiciali consuetudine et de hominis ingenio et communiter de ipsius studio locutus sum, ea, judices, a vobis spero esse in bonam partem accepta; ab eo qui judicium exercet, certo scio. |
apud omnes, sic ut videatur esse potius levatus vestra humanitate, quam violatus acerbitate. Judices, confido ea quae dixi de causa breviter simpliciterque pro mea consuetudine, esse probata omnibus : spero ea quae locutus sum non consuetudine fori neque judiciali et de ingenio hominis et communiter de studio ipsius, esse accepta a vobis, judices, in bonam partem ; scio certo, ab eo qui exercet judicium. |
chez
tous les hommes, de sorte qu'il paraisse être plutôt soulagé par votre bonté, que violenté par votre dureté. Juges, j'ai-confiance ces choses que j'ai dites sur la cause brièvement et simplement selon ma coutume, avoir été approuvées par tous : j'espère celles que j'ai dites non selon l'usage du barreau ni des-tribunaux et sur le talent de l'homme (d'Archias) et généralement touchant l'occupation de lui-même, avoir été prises par vous, juges, en bonne part ; je sais certainement qu'elles le seront, par celui qui exerce la jugement. |
éclairée, et qu'il ait plutôt
à se louer de votre bonté qu'à se plaindre de votre rigueur excessive. J'ai la confiance, juges, que les simples et courtes preuves que, selon ma coutume, j'ai tirées du fond même de la cause, ont été accueillies favorablement par vous tous. Quant à ce que, m'éloignant du langage et des habitudes du barreau, j'ai dit du génie d'Archias et de la poésie en général, j'espère que vous l'avez pris en bonne part : je suis sûr du moins que le magistrat qui préside à ces débats ne me refusera pas sa bienveillance. |