Chronologie
de trois événements contemporains:
Le recensement de
Quirinius / La naissance de Jésus / La mort d'Hérode
Texte proposé et mis en page par gérard gertoux
Limites de la chronologie
Tous
les historiens savent que, lorsqu'on fait parler des archives, certains témoins
sont plus fiables que d'autres, et que certains événements bien attestés et
bien datés servent de références pour dater tous les autres. On parle alors
de "dates absolues". Ensuite, lorsqu'il y a un désaccord entre différentes
sources indépendantes et fiables, les historiens privilégient généralement
la version qui concorde le mieux avec l'ensemble des sources. Deux événements
importants fournissent des dates pivots référencées dans le calendrier grégorien
actuel (qui est légèrement différent du calendrier julien):
-
La chute de Babylone qui eut lieu le 5 octobre -539.
-
L'investiture de Tibère (-42 à 37) comme empereur par le Sénat le 15
septembre 14.
Chronologie de Jésus d'après Luc 3:1-3
La chronologie de la vie de Jésus
donnée dans les Évangiles paraît bien établie puisque le contexte historique
de l'époque est bien documenté. Cependant l'établissement d'une chronologie
rigoureuse oblige à vérifier dans le détail de très nombreux événements
qui ne sont pas tous connus avec précision. Par exemple, l'évangéliste Luc précise
que Jean le Baptiseur commença à prêcher et qu'il baptisa Jésus (qui apparut
alors comme messie) dans la quinzième année du règne de Tibère César[1].
Cet empereur ayant été investi le 15 septembre 14, sa première année va
strictement du 15 septembre 14 au 15 septembre 15 et sa quinzième année du 15
septembre 28 au 15 septembre 29. En tenant compte de l'usage romain[i],
le règne de Tibère commence par une accession du 19 août 14 au 31 décembre
14, et sa quinzième année court du 1er janvier 29 au 31 décembre
29. Dans les deux cas, le baptême de Jésus, placé six mois après le début
de la prédication de Jean le Baptiseur, est à situer dans l'automne 29. Cette
façon de décompter les années correspond à l'usage de l'époque, ainsi
Tacite met en parallèle la neuvième année de Tibère avec les consulats de C.
Asinius et C. Antistius (Annales IV:1:1),
datés en 23, ce qui implique de dater la quinzième année de Tibère en 29.
Luc précise également que Jésus avait environ 30 ans à son baptême[2]
("environ" est la traduction du mot grec wsei "comme si",
confère Luc 22:44 ou 24:11) et que Jean le Baptiseur était l'aîné de Jésus
de six moisb. On peut en déduire que Jésus avait 30 ans en l'an 29
et qu'il a dû naître vers -2, puisqu'il n'y a pas d'année 0 pour les
historiens. De plus, dans l'Israël antique, l'entrée en fonction au Temple débutait
à l'âge de 30 ansc. Cette dernière indication confirmerait l'âge
de 30 ans, puisque les Évangiles présentent Jésus comme un futur
"grand-prêtre spiritueld". Autre élément remarquable de
concordance, tous les historiens des six premiers siècles ont situé la
naissance de Jésus entre -2 et -1 selon des événements chronologiquement datés.
- Vers 170-180, Irénée par exemple place cette naissance dans la 41e année du règne d'Octave (-63 14) qui commença en -43. Clément d'Alexandrie (150-215?) la situe en l'an 28 du règne d'Auguste [Octave], qui prit ce nom en -27 (Stromates I:21:145). Vers 200, Hippolyte de Rome situe la naissance de Jésus en l'an 752 de la fondation de Rome [fixé en -753] (Commentaire de Daniel IV). Vers 207 Tertullien place cette naissance dans la 41e année du règne d'Auguste et 28 ans après la mort de Cléopâtre [-69 -30] (Adversus Judaeus VIII:11:75). Origène (185-253) place la mort d'Auguste 15 ans après la naissance du Christ. Eusèbe (265-340) place cette naissance dans la 42e année du règne d'Auguste (Histoire ecclésiastique I:5:2) et pour Apollinaire de Laodicée (310?-390) il y a 49 ans entre la naissance de Jésus et la 8e année de Claude (empereur en janvier 41)
-
Les témoignages les plus anciens sont unanimes pour dater la naissance de Jésus
autour de -2 et le début de son ministère autour de 29 de notre ère. Cette
chronologie assez simple à établir est cependant rejetée par la plupart des
historiens. La majorité objecte que Jésus a dû naître avant -4 puisqu'il est
né peu de temps avant la mort d'Hérode le Grand[3]
placée en -4 selon la chronologie usuelle. D'autres vont même jusqu'à
repousser la naissance de Jésus après 6 de notre ère, puisque cela correspond
à la date présumée du recensement effectué par [Publius Sulpicius] Quiriniusb,
qui fut gouverneur de Syrie de 6 à 10 de notre ère.
-
Les écarts ne sont pas très considérables, mais on dispose aujourd'hui d'un
moyen précis de datation: les phénomènes astronomiques auxquels les témoignages
font référence. L'exercice est riche d'enseignement, mais pas sans difficulté.
Chronologie
de Jésus d'après Matthieu 2:19, 20
Les écrits de Flavius Josèphe sont
les seuls qu'on puisse rapprocher des écrits de Luc dans son Évangile.
Malheureusement, comme le savent les historiens, la chronologie de Josèphe
contient de fréquentes erreurs qui laissent planer des incertitudes sur
certaines dates[iii].
Josèphe affirme par exemple (Antiquités
juives XIV:487,488) qu'Hérode prit Jérusalem 27 ans après que Pompée se
fut emparé de cette ville [en -63], ce qui date cet événement en -36. Or il
précise (Antiquités juives XVII:190,191)
qu'Hérode mourut 34 ans après cela, ce qui date sa mort vers -2. Il ajoute
qu'Hérode mourut 37 ans après avoir été intronisé par les Romains [en -40].
Il semble que Josèphe ait compté les règnes des rois de Judée selon la méthode
juive des années d'accession (méthode habituelle pour les rois de Judée).
Dans ce cas, l'année d'accession court de Nisan -39 à Nisan -38 et la 37e
année se termine en Nisan -1. Josèphe écrit (Antiquités
juives XVII,148; XIV:158) qu'Hérode avait 15 ans [ce chiffre est
visiblement une erreur que l'on corrige en 25] lorsqu'il fut établi gouverneur
de Galilée [en -47] et qu'il est mort à l'age de 70 ans ce qui donne une date
de -2. La principale difficulté dans la chronologie proposée par Josèphe est
son absence de référence à un calendrier précis et aussi sa façon de
compter les années d'accession. Plusieurs études récentes[iv]
tendent à fixer un règne d'Hérode à Jérusalem sur une période allant de
l'accession en -36 jusqu'à une fin en -1. Ainsi, d'après les données de Josèphe,
la mort d'Hérode peut se situer entre -4 et -1, avec une probabilité forte
pour -1.
Josèphe relate aussi un événement
astronomique précis, puisqu'il indique qu'Hérode mourut peu après une éclipse
de lune et avant une Pâque (Antiquités
juives XVII:167,213). Or il n'y eut que trois éclipses dans cette période:
une éclipse partielle le 13 mars -4, une éclipse totale le 10 janvier -1 et
une éclipse partielle le 29 décembre. Première remarque: il n'y a eu aucune
éclipse en -2, mais celle qui se rapproche le plus de la chronologie précédente
est celle du 10 janvier -1. De plus, cette éclipse fut totale[v],
ce qui impressionna certainement plus les témoins de l'époque qu'une éclipse
partielle qui n'est presque pas visible. Cette date correspond assez bien à la
description de Josèphe puisqu'elle est située avant la Pâque (7 avril). De
plus, la tradition juive (Megillat Taanit
23a)[vi]
précise qu'Hérode est mort le 2 Shebat (26 janvier de l'an -1)[vii],
soit seize jours après l'éclipse totale[viii]
et bien visible qui eut lieu le 10 janvier -1. Cette mort, quelques jours après
cette éclipse a dû marquer les esprits d'autant plus deux mois et demi avant
la Pâque. La date du 2 Shebat (le 30 janvier en -4) permet d'éliminer l'éclipse
partielle du 13 mars -4, car Josèphe précise qu'Hérode est mort peu après
cette éclipse et non avant. Un autre détail donné par Josèphe permet de
confirmer la date du 10 janvier -1, puisqu'il précise qu'un jeûne commémoratif
précéda de peu cette éclipse (Antiquités
juives XVII:166). Or, les Juifs commémoraient chaque année quatre jours de
jeûne[4],
celui du dixième mois célébrait le triste début du siège de Jérusalem par
Nabuchodonosor. Ce jeûne du 10 Tébethb, soit le 5 janvier -1, précéda
effectivement de quelques jours l'éclipse totale du 14/15 Tébeth (un jour de
pleine lune), soit le 9/10 janvier -1. Un autre élément provenant du livre de
Luc, le recensement d'Auguste, confirme la datation en -1.
Selon le texte de Luc, la naissance
de Jésus est à placer lors d'un recensement décrété par Auguste. Dans son
éloge, dont la première version fut affichée publiquement au temple de Mars
Ultor en -2, l'empereur Auguste annonçait le breviarium
totius imperii qu'il devait laisser à sa mort en 14 de notre ère et qui
contenait selon Tacite: «les ressources
publiques, le nombre des citoyens et des alliés sous les armes, celui des
flottes, des royaumes, des provinces, le montant des tributs, les revenus, les dépenses
obligatoires ou les libéralités; tous les détails, Auguste les avait écrits
de sa main en toutes lettres» (Annales
I:11,4). Cet inventaire n'avait pas d'antécédent connu. L'éloge publié
en 14, appelé Res Gestae Divi Augusti
contient des indications corroborant un inventaire en -2. Il mentionne par
exemple trois recensements généraux de citoyens romains (Res
8) qui eurent lieu respectivement en -28, -8 et 14, mais ces trois cens sont
différents des nombreux recensements provinciaux[ix].
Deux éléments du Res Gestae accréditent
un inventaire en -2. Auguste se vante, lors de son treizième consulat (en -2),
d'avoir donné soixante deniers à deux cent mille personnes (Res
15), ce qui sous-entend un inventaire à cette époque (à Rome), il se
vante aussi d'avoir donné six cents millions de sesterces aux soldats d'Italie
et deux cent soixante millions aux soldats des pays provinces sous plusieurs
consulats (Res 16), celui de Lucius
Caninius et Quintus Fabricius corrobore l'inventaire de -2.
Luc
a écrit: «Or, en ces jours-là, un décret
parut de la part de César Auguste pour que toute la terre se fasse enregistrer».
Luc fait donc bien référence à un enregistrement ou inventaire et non à un
édit impérial de recensement. C'est ainsi que Joseph qui résidait à Nazareth
a dû partir se faire enregistrer dans sa ville natale de Bethléem, son lieu de
résidence (en 127 de notre ère une jeune femme Nabatéenne était venue se
faire recenser en Judée avec son tuteur parce qu'elle y possédait une propriété)[x].
L'historien Paulus Orosius (380?-420?) place le recensement d'Auguste en l'an
752 de Rome, soit en -2 (Histoires
VI:22,1), juste avant le départ Caius César en Orient que l'on date autour
de -1 (Histoires VII:3,4).
La
chronologie précédente basée sur les récits historiques et des témoignages
archéologiques est assez cohérente. Les premiers mois de la vie de Jésus
furent visiblement mouvementés. Bien que tous les éléments ne soient pas
connus avec exactitude, un scénario plausible peut être reconstitué.
Le
premier enregistrement de Quirinius fut décrété lorsque César Auguste fut déclaré
Père de la Patrie le 5 février de l'an -2. Cet inventaire général a dû
concerner les Juifs "de la terre habitée[5]"
dépendant de la province romaine de Syrie[xi].
C'est ainsi que Joseph, qui habitait Nazareth, a dû partir se faire enregistrer
dans sa ville nataleb, conformément à la manière de procéder de
l'administration juive qui recensait "selon la maison des pèresc"
ou selon le lieu patrimoniald. Cet enregistrement du "splendide
royaume" (terme désignant la Palestine) par un "exacteur" avait
d'ailleurs été prophétisé par Daniele. Marie, qui était sa femme
depuis peu et qui craignait sans doute toujours une accusation d'adultèref,
préféra l'accompagner dans son voyageg. En arrivant à Bethléhem,
début octobre -2, elle accouche de Jésus, puis, conformément à la coutume
juiveh, monte au Temple de Jérusalem quarante jours plus tardi,
soit vers la mi-novembre. Puis, vers la fin novembre, les astrologues, sans
doute venus de Babylone, patrie d'origine de l'astrologiej, arrivent
à Jérusalemk guidés par une étoile miraculeuse, d'après les Évangiles.
Quelques jours plus tard, ils arrivent vers l'enfant Jésusl, puis
repartent vers Babylone mais sans passer par Jérusalemm. Fin décembre,
voyant qu'il avait été joué, Hérode décide de faire tuer tous les nouveau-nés
de Bethléem. Cependant les parents de Jésus, avertis du projet, partent en Égypten.
Hérode ignorait l'âge de l'enfant. Il connaissait par contre parfaitement le
moment où l'étoile était apparueo, soit au début du voyage des
astrologues. Ceux-ci étaient probablement venus de Babylone à dos de chameaux,
ce qui a dû leur demander environ quatre mois de trajet d'après Ezra 7:9. Se
fondant sur cette estimation de la durée du trajet et en ajoutant le retard, Hérode
a dû évaluer l'âge de l'enfant avec une marge de sécurité confortable de
deux ans[6],
avant d'ordonner le massacre des enfants, probablement au début de janvier -1,
puis il serait mort peu de temps après, fin janvier -1. La famille de Jésus en
fut immédiatement informée et revint habiter à Nazarethb,
probablement vers mars -1, ce qui leur permit de fêter la Pâquec,
la première de Jésus (qui observa donc parfaitement la Loi!).
Chronologie
de Jésus d'après Luc 2:1, 2
Luc
a écrit: «Or, en ces jours-là, un décret
parut de la part de César Auguste pour que toute la terre se fasse enregistrer
(ce premier enregistrement eut lieu alors que Quirinius était gouverneur de
Syrie)». On sait évidemment que César Auguste a régné de -27 à 14 de
notre ère, mais la vie de Quirinius est par contre moins connue. Josèphe déclare:
«Quirinius, membre du Sénat, qui, par
toutes les magistratures, s'était élevé jusqu'au consulat et qui jouissait
d'une considération peu commune, arriva en Syrie où l'empereur l'avait envoyé
pour rendre la justice dans cette province et faire le recensement des biens. On
lui avait adjoint Coponius, personnage de l'ordre équestre, qui devait
gouverner les Juifs avec pleins pouvoirs.» Josèphe rapporte ensuite que
Quirinius vint en Judée, province à laquelle son autorité s'était étendue,
et ordonna qu'on y prélève un impôt. Cela souleva beaucoup de ressentiment et
provoqua une tentative de révolte, menée par "Judas le Gaulanite"»
(Antiquités juives XVIII:1-4). Josèphe
précise que cette révolte survint la 37e année après la défaite
d'Antoine par César à Actium (Antiquités
juives, XVIII:26). Cela permet de dater cette révolte et ce recensement à
6 de notre ère. Cet enregistrement (de biens et non de personnes) ne correspond
cependant pas à celui effectué lors de la naissance de Jésus, pour au moins
deux raisons. Luc connaît l'enregistrement associé à cette révolte et le
mentionne à part (cf. Actes 5:37). Il précise ensuite que la naissance de Jésus
s'est produite lors du premier
enregistrement, ce qui suppose qu'il y en eut un second (celui mentionné dans
les Actes). Quelques inscriptions éclairent cet épisode de la vie de
Quirinius. Deux inscriptions de la colonie romaine d'Antioche de Pisidie, située
aux frontières de la province d'Asie, attestent la renommée de Quirinius dans
cette région. On peut lire qu'élu duumvir
de la cité, il se fit représenter à cette charge annuelle par C. Carista
Fronto. L'inscription précise que les successeurs de Quirinius, M. Servilius (élu
consul en 3) puis un autre (nom illisible), firent de même.
C.F.SER.FRON[ONI]
CAEIANO
IVLI[ANO]
PRAEF.FABR.PON[TIFICI]
SACERDOTI.PRAEFE[CTO]
P.SVLPICI.QVIRINI.DV[VMVIRI]
Ü
PRAEFECTO.M.SERVILI
HVIC
PRIMO OMNIVM
PVBLICE.D.D.STATVA
POSITIA EST
À
partir d'une compilation exhaustive de l'ensemble des récits historiques, reliés
aux inscriptions régulièrement mises au jour, les historiens essayent
patiemment de reconstituer une succession des événements en les datant le plus
précisément possible. Une difficulté majeure provient de l'aspect souvent
parcellaire des documents qui oblige à combler les lacunes par des déductions,
voire des conjectures (parfois contradictoires). De plus, les homonymes sont
nombreux, et les risques de confusion sont en conséquence. Ce qui complique les
choses est la présence d'informations inexactes, voire contradictoires, chez
les auteurs anciens eux-mêmes[xii].
On obtient, non sans mal, la liste suivante des consuls romains[xiii]
qui furent nommés légats impériaux de Syrie de -12 à 21.
Nom
du légat
Marcus Tullius Cicero Marcus Titius Caius Sentius Saturninus Publius Quintilius Varus ?? Caius (Julius )Caesar Lucius Volusius Saturninus Publius Sulpicius Quirinius Marcus Servilius Quintus Caecilius Metellus Cnaeus Calpurnius Piso Cnaeus Sentius Saturninus |
Période
de légation [-12 -10] [-10 -8] [ -8 -6] [ -6 -4] [ -4 -1] [ -1 4] [ 4 6] [ 6 10] [ 10 12]? [ 12 17] [ 17 19] [ 19 21] |
Le seul document qui fournisse
directement une information sur la période allant de -4 à 1 est l'Évangile de
Luc. La question se pose alors: Les documents parcellaires retrouvés
concordent-ils avec ces données, ou peut-on identifier un autre légat possible
couvrant cette période? Une enquête fascinante peut commencer.
Ici ont été déposé Q[uintus]
Aemilius Secundus f[ils] de Q[uintus], de la tribu Pal[atina] (mon) f[ils] et
Aemilia Chia (mon) affranchie. Ce m[onument] est exclu de l'h[éritage]».
D'après ce texte, le chevalier Q.
Aemilius Secundus accomplit son service en Syrie où il reçut de Quirinius
"les distinctions honorifiques" (honoratus
decoratus); formulation insolite qui ne concerne que les récompenses (vexilla,
hastae, purae, coronae) remises publiquement par le général lors d'une
assemblée présidée (contio) par un
magistrat à l'issue des combats. Secundus rapportait ses distinctions
honorifiques à Quirinius, légat de César
en Syrie, qui avait obtenu lui-même les insignes du triomphe suite à la
campagne de ses armées contre les Homonades du Taurus (aux confins de la
Cilicie, une région rattachée administrativement à la Syrie). Les
"distinctions honorifiques" sont associées aux "insignes du
triomphe" de Quirinius. De plus, les précisions de Tacite amènent à déduire
que le légat Quirinius avait combattu les Homonades en tant que gouverneur
de Syrie; ce haut poste de commandement était en effet le seul à réunir
toutes les conditions requises. Tacite précise d'ailleurs concernant Quirinius:
«Son ardeur au combat, et sa vitalité
dans l'exercice des charges lui avaient obtenu le consulat sous le divin Auguste
[en -12] puis ayant enlevé en Cilicie les forteresses des Homonades, il avait
reçu les ornements du triomphe et il avait été donné comme recteur de Caius
César [de 2 jusqu'à sa mort en 4] dans le gouvernement d'Arménie. Il n'en
avait pas moins honoré Tibère, en résidant à Rhodes» (Annales
III:48). De l'ensemble de ces informations on peut déduire que: 1)
Quirinius en sa qualité de consul était appelé à exercer une charge de son
rang, et la Syrie était la seule province impériale dans cette région de rang
consulaire; 2) comme il avait reçu les insignes du triomphe (ornamenta),
qu'un simple légat en mission extraordinaire ni son délégué ne pouvait
obtenir, il se devait d'y être gouverneur en titre; 3) pour réduire les
Homonades par la faim, il lui avait fallu s'appuyer sur une armée suffisante,
et la Syrie était seule dans la région à disposer de légions en nombre
suffisant (trois); 4) le Taurus, où il les fit intervenir, était aux confins
de la Cilicie, une province turbulente plusieurs fois réprimée au cours du siècle
par les légionnaires de Syrie; (les informations de Tacite diffèrent un peu de
celles de Strabon, car les frontières de la Cilicie et de la Pamphylie ont
sensiblement varié dans le temps[xv].
Il est aussi possible que Quirinius soit seulement intervenu dans cette région
d'Isaurie en tant que commandant militaire d'Auguste, comme ce fut le cas de
Vespasien avec le légat de Syrie Mucianus); 5) ceux-ci, parce que citoyens
romains, étaient en mesure de rapporter à leur général les insignes du
triomphe avec les actions de grâces que de simples soldats de corps auxiliaires
n'auraient guère pu solliciter sous Auguste.
Ces
cinq éléments impliquent de faire coïncider la guerre contre les Homonades
avec le gouvernement de Quirinius en Syrie et la carrière militaire de
Secundus. Quirinius possédait donc à cette époque l'imperium
à la fois militaire (général en chef), civil (fonctionnaire civil) et
judiciaire (grand juge). Entre les campagnes militaires du Taurus et un peu plus
tard contre les Ituréens du Liban, et sur l'ordre de Quirinius, Secundus avait
mené un recensement dans la ville d'Apamée sur l'Oronte, une ville libre et fédérée.
Le chiffre impressionnant de 117000 personnes (sauf les esclaves) implique que
Quirinius avait l'autorité nécessaire à l'enregistrement de citoyens d'une
ville libre comme Apamée et, disposant du pouvoir militaire, avait pu donner
mission à ses soldats pour remplir cette tâche.
Le texte de Luc 2:2 met lui aussi en parallèle le gouvernement de Quirinius en Syrie et un enregistrement de personnes: «Cet enregistrement premier se produisit, étant gouverneur de la Syrie: Quirinius». Le participe "étant gouverneur" désigne le gouverneur en titre, muni de l'imperium complet. De plus, le mot "premier" précise que cette opération précéda celle qui est rapportée en Actes 5:37. Cet enregistrement (apografh), comme le recensement (census) d'Apamée, visait à connaître le nombre de citoyens, et il n'est pas à confondre avec celui mis en œuvre en Judée par Quirinius lorsqu'il vint assurer la liquidation des biens d'Archélaüs après sa disgrâce. Flavius Josèphe, précisant que cet enregistrement fut suivi d'une "évaluation" (apotimhsiV) des biens, cette opération en deux temps n'avait ni la même nature, ni le même objectif, ni la même portée géographique que la précédente. Premièrement, elle fut conduite selon les principes romains de la capitation et non selon les coutumes hébraïques. Ensuite elle couvrait la seule Judée, et non la Galilée. Flavius Josèphe précise que Quirinius venait d'être envoyé en Syrie comme «Juge du peuple et censeur des biens», ou, selon la formule romaine, Legatus Augusti propraetore ad census accipiendos (Antiquités juives, XVIII:1). Il venait traiter d'affaires financières et de juridiction civile; et n'avait pas besoin de l'imperium, ni de commandement militaire. N'ayant pas autorité sur l'armée, Quirinius n'avait pas compétence pour donner missions, affectations ou grades militaires. Pour toutes ces raisons, les enregistrements de Quirinius (mentionnés par Flavius Josèphe) et du chevalier Secundus ne peuvent être les mêmes. Le fait que Quirinius fut gouverneur de Syrie à deux reprises est confirmé par l'inscription de Tibur (Titulus Tiburtinius)[xvi]. Les légations multiples, bien que rares, sont attestées[xvii] comme celles de Q. Varius Geminus (2 fois) ou de Q. Caerellius (3 fois).
R
E G EM.QVA R EDAC TA.INPOTESTATEM.IMP.CAESARIS
AUGVSTI.POPVLIQUEROMANISENATVS.DIS.IMMORTALIBUS
SVPPLICATIONESBINAS.OBRES PROSPERE.AB.EO.GESTAS.ET
IPS I .O R N A M E N T A . T
R I V M
P H . A L I A .D ECR
EV IT
PRO.C O NSVL.ASIAM.PR O VIN CIA M.
OPTINUIT.LEGATUS.PR.PR.
DIVI.AVGVSTI. ITERVM.SYRI AM. ET.PH OENICEM.OPTINUIT
du
Roi, celle-ci ayant été soumise à la puissance [de l'empereur César]
Auguste
et du peuple romain, le Sénat [décréta pour les (dieux) immortels]
une
double action de grâces en raison des heureux [exploits accomplis]
de
même par les ornements du triomphe [une nouvelle fois décernés]
en
tant que proconsul de la province d'Asie il obtint [en tant que légat pr. du]
divin
Auguste, à nouveau la Syrie et la Phénicie [il obtint]
Bien que le nom de Quirinius
n'apparaisse pas dans cette inscription, il est le seul personnage à
correspondre à toutes les indications données. La première ligne fait
allusion à un royaume ramené sous l'autorité impériale. Or Strabon (-65+20)
donne du détail concernant la soumission des Homonades par Quirinius. Il précise
que ceux-ci avaient tué leur roi Amyntas (Géographie
XII:6:5), montrant par là que Quirinius avait donc vengé ce roi (regem).
La troisième ligne évoque une double journée d'action de grâces liée aux
ornements du triomphe (quatrième ligne) et, selon Tacite (55-120), Quirinius
les avaient effectivement reçus pour sa victoire contre les Homonades (la
double journée commémore d'abord la victoire dans le Taurus, puis celle contre
les Ituréens du Liban). La cinquième ligne cite un proconsul d'Asie, ce que
suggère Tacite qui écrit qu'à Rhodes Quirinius put honorer Tibère (Annales
III:48). Le titre "divin Auguste" permet de conclure à une rédaction
postérieure à 14, puisque la divinisation d'Auguste fut effective seulement
après sa mort. Cela implique que le personnage mentionné était encore vivant
au moment de l'inscription (Quirinius est mort en 21) et que les deux légations
en Syrie eurent lieu avant 14 (Quirinius gouverna la Syrie une première fois de
-4 à-1 puis une autre fois de 6 à 10). Enfin, selon l'épigraphie, le mot iterum
("à nouveau") modifie un verbe (manquant) et accompagne le
renouvellement d'une mandature (par exemple: duumvir
iterum à Pompei).
Malgré la bonne concordance de
cette inscription avec la vie de Quirinius, quelques historiens ont cherché à
identifier le personnage de l'inscription à un autre légat. Le nom de Lucius
Calpurninius Piso Frugi (consul en -15) est quelquefois proposé. Cette démonstration
s'appuie sur un empilement de suppositions et de conjectures. L'inscription de
Hiérapolis Castabala est citée pour prouver une première légation[xviii],
mais cette inscription ne mentionne ni la Syrie (mais la Cilicie), ni le nom
complet du soi disant gouverneur, puisqu'on lit seulement le nom de L. Capurnius
Piso. Il est donc plus probable, d'après l'orthographe, qu'il s'agisse de L.
Calpurnius Piso (Augur) consul en -1, plutôt que L. Calpurnius Piso Pontifex
habituellement cité sous le nom de L. Calpurnius Piso Frugi pour le distinguer
de son homonyme. Même la troisième possibilité avec Cnaeus Calpurnius Piso
(consul en -7) n'est pas complètement exclue. La démonstration d'une deuxième
légation repose sur l'inscription de Tibur, or cette dernière ne mentionne
aucun nom, de plus, les quelques informations qu'elle contient permettent d'éliminer
sans appel le choix de L. Calpurnius Piso Pontifex. En effet, aucun document
historique ou archéologique ne mentionne une quelconque légation en Syrie,
deuxièmement, bien que celui-ci ait reçu les ornements du triomphe pour avoir
réprimé deux fois l'insurrection en Thrace, il ne bénéficia cependant que
d'une seule journée d'action de grâce et non de deux comme le mentionne
explicitement l'inscription[xix].
Il est certes frustrant de ne
pouvoir élucider toutes les incertitudes. Mais: il faut relativiser le problème.
Ainsi, l'identification précise du meurtrier du président J.F. Kennedy fut
incertaine, alors que cet événement récent fut très médiatique (plusieurs
millions de témoins) et les moyens d'investigation énormes. On ne va tout de même
pas jusqu'à nier l'événement!
Plusieurs éléments plaident
donc en faveur de la version du récit donné par Luc, contre celle de Josèphe.
On sait qu'il y a de nombreuses erreurs et imprécisions dans les récits de Josèphe,
ce qui n'est pas le cas des récits de Luc qui reste d'une précision
remarquable chaque fois qu'il donne des indications chronologiques. Josèphe est
né en 37; Luc, lui, accompagnait Paul lors de son deuxième voyage missionnaire
en 49 selon le livre des Actes 21:7-8. Il devait donc être au moins âgé de 20
à 30 ans pour effectuer cette mission, à une époque où Josèphe n'avait que
12 ans. Luc est donc plus proche des éléments relatés que Josèphe. Le
renseignement donné par Luc est précis et facilement vérifiable dès
l'origine, alors que les chrétiens étaient au centre de polémiques. Ce
renseignement, s'il avait été erroné, aurait alors été un argument facile
à utiliser par des adversaires (comme Celse). Justin, un Palestinien du 2e
siècle, démontra d'ailleurs à l'aide d'archives romaines (aujourd'hui
disparues) l'exactitude des données chronologiques de Luc concernant la légation
de Quirinius. Une question se pose alors, puisque les écrits de Josèphe sont
la principale source utilisée pour critiquer les Évangiles: Quel est le degré
de fiabilité des récits de Josèphe au plan historique, notamment en matière
de chronologie?
Chronologie
d'après les témoignages de Josèphe
Les témoignages de Josèphe, très
abondants pour la période évangélique, sont souvent uniques et donc très précieux.
Cependant, lorsque les chronologies sont contradictoires, les historiens ont
tendance à privilégier en général les écrits de Josèphe. Il est possible
que ce choix soit biaisé par un préjugé envers les écrits bibliques. Vu la
masse d'informations que Josèphe a collectée, il a forcément dû les
harmoniser en les "compilant" comme le font les historiens modernes.
Par exemple, les Romains utilisant un comput différent pour les années de règne,
Josèphe a sans doute privilégié la façon juive de compter les années de règne
à partir du premier Nisan pour les rois de Juda (Rosh
Hashana 1:1), mais pas toujours[xx].
En analysant dans le détail les
informations données par Josèphe, on aboutit à la conclusion surprenante et
paradoxale que Josèphe fournit en fait une double chronologie[xxi]:
l'une directe, provenant des chiffres donnés par le texte, et l'autre indirecte
obtenue par la datation des événements mentionnés. Hérode le Grand, par
exemple, est mort en -4 d'après la chronologie directe. Josèphe précise par
ailleurs qu'Hérode est mort juste avant une éclipse de lune. La seule éclipse
totale sur cette période fut celle du 10 janvier -1. La chronologie indirecte
donne donc la date de -1. Cette double chronologie se répète avec plusieurs
autres membres de la famille des Hérodes.
Par exemple, Josèphe indique qu'Hérode
Philippe mourut dans la 20e année [du règne] de Tibère (14-27) après
avoir régné 37 ans (Antiquités juives
XVIII:106). La chronologie directe des années de son règne s'obtient
simplement, soit -4 à 34 (chronologie retenue). Les autres détails donnés
conduisent pourtant à une datation différente. Josèphe précise qu'Hérode
Philippe mourut après les événements de Parthes, que Dion Cassius (Histoire
romaine LIX:17:5;27:2,3) place sous Caligula (37-41) et aussi après les négociations
avec le gouverneur Vitellius[xxii]
qui exerça en Syrie de 35 à 39 selon les renseignements provenant de Tacite (Annales
VI:32). D'après la chronologie indirecte, la mort d'Hérode Philippe se
situerait donc vers 37, plutôt que 34, soit 3 ans plus tard. Autre exemple, Josèphe
indique (Antiquités juives XIX:350)
qu'Hérode Agrippa I mourut à 54 ans après avoir régné 7 ans, dont 4 ans
passés sous Caligula (37-41) et 3 sous Claude (41-54). La chronologie directe
est facile à obtenir pour les années de règne, soit de 37 à 44 (chronologie
retenue). Les choses se compliquent si l'on tient compte des renseignements
annexes fournis par Josèphe, puisqu'il donne aussi deux détails que l'on peut
dater et qui se trouvent, en l'occurrence, confirmés par les Évangiles. Hérode
Agrippa I est mort après une famine en Judée, lors de l'inauguration de la
ville de Césarée. Le récit des Actes confirme: «Agabus,
s'étant levé, annonça par l'Esprit qu'il y aurait sur toute la terre une
grande famine; elle eut lieu, en effet, sous Claude [41-54] (...) Vers ce
temps-là, le roi Hérode (...) au jour fixé, (...) revêtu d'habits royaux
(..) un ange du Seigneur le frappa (..) et il expira»[7].
Flavius Josèphe mentionne (Antiquités
juives XX:100,101) qu'une famine eut lieu en Judée sous l'administration du
procurateur Tiberius Alexander (46-48), successeur de Cuspius Fadus (44-46) et
il indique que la mort d'Hérode se produisit lors de la commémoration de la
ville de Césarée qui avait lieu tous les 5 ans (Guerre
des Juifs I:21:8). La ville fondée en -20 fut inaugurée[xxiii]
12 ans plus tard en -8 (Antiquités
juives XV:341; XVI:136). Eusèbe précise que le jour de cette commémoration
était le 5 mars (Les martyrs de
Palestine 11:30). Les dates de commémoration des années 40 furent le 5
mars 42 et le 5 mars 47. La chronologie indirecte donne donc 47 pour la mort d'Hérode,
date décalée de 3 ans par rapport à la chronologie directe. La numismatique[xxiv]
aurait pu éclaircir le débat; elle le complique plutôt puisque les pièces
datées sous Hérode Agrippa I vont de l'an 1 à l'an 8. D'où un règne de 8
ans et non de 7 comme l'indique Josèphe. Les portraits des Césars sur ces pièces
ne permettent aucune datation, car la pièce datée de l'an 5 porte l'effigie de
Caligula (37-41), celles de l'an 7 et 8, l'effigie de Claude (41-54) accompagnée
du nom de Tibère (14-27).
Se pourrait-il que Josèphe, en
voulant harmoniser tous ses documents, les ait tant soit peu "remaniés"?
Plusieurs anomalies permettent de le penser. Tout d'abord, bien que très
prolixe en détails, Josèphe passe directement de la légation de Varus [-6-4]
à celle de Quirinius [6-10] (soit un trou s'étendant de -4 à 6) et ignore les
autres gouverneurs durant cette période (ainsi Volusius Saturninus [4-6] a
pourtant été attesté par la numismatique), laissant l'impression d'un
raccordement arrangé entre les périodes d'exercice de ces deux gouverneurs. Le
seul événement commenté avec beaucoup de détails est la gestion de
l'instabilité provoquée par la mort d'Hérode le Grand. Josèphe et Tacite (Histoire
V:9) précisent que Varus, le légat de Syrie, mata une rébellion, puis négocia
à Rome avec Caius César la répartition de la royauté entre les fils d'Hérode.
Ce récit pose problème, comme l'ont noté plusieurs historiens. La légation
de Varus semble pouvoir être située de -6 à -4, puisque trois médailles émises
par Varus sont datées respectivement des années 25, 26 et 27 de la victoire
d'Actium qui eut lieu en -31.
Si Hérode est mort en -1 à la fin
du mandat de Quirinius, il est surprenant de voir réapparaître Varus à ce
moment-là. Plus surprenant encore, à la mort d'Hérode, Archélaüs va trouver
Sabinus, le procurateur impérial de Syrie, ce qui aboutit à l'entrée en scène
de Varus, selon les termes mêmes de Josèphe (Antiquités
juives XVII:221). Les actions de Sabinus indiquent qu'il y avait un autre
gouverneur de Syrie à cette époque, ce qu'on déduit de la description par Josèphe
du rapport conflictuel entre Varus partisan d'Archélaüs et Sabinus partisan
d'Antipas. Si Sabinus avait été procurateur de César lui-même, Varus
n'aurait pu contester ses choix. De même, si Sabinus avait été procurateur du
gouverneur Varus, il n'aurait pu s'opposer à son supérieur hiérarchique. Or
Sabinus a une grande marge d'autonomie. Il fait acte d'autorité à Jérusalem,
au risque même de provoquer des troubles (Antiquités
juives XVII:252), ce qu'il n'aurait pu faire si Varus avait conservé entière
la puissance du légat. Sabinus devait donc être le procurateur d'un autre
gouverneur de Syrie en titre, mais non présent à ce moment-là ou inopérant.
L'année -1 fut riche en événements.
Selon Suétone (Tibère
12:2), Caius César le petit-fils d'Auguste quitta Rome pour l'Orient à
l'expiration des pouvoirs de Tibère[xxv]
(en juillet -1) qui, selon Velleius (Histoire
II:99:4), était le seul représentant légal de l'Etat romain en Orient.
Caius fut légat de Syrie de -1 à 4, mais étant donné son jeune âge[xxvi]
Auguste préposa Marcus Lollius (consul en -21) de -1 jusqu'à sa disgrâce en
2, comme recteur de Caius (Quirinius remplira ensuite cette fonction de 2 à 4).
La présence de Varus à la mort d'Hérode s'explique. Lorsqu'il avait été
gouverneur, il avait arbitré entre les fils d'Hérode au sujet de la succession
et avait fait valider le troisième testament d'Hérode devant César (Antiquités
juives XVII:89) testament dans lequel celui-ci léguait une partie de son
royaume à Antipas, Archélaüs et Philippe (Antiquités
juives XVII:188). Vu l'importance de l'enjeu il est probable que les fils
d'Hérode, et notamment Archélaüs qui héritait du titre royal, aient d'abord
fait appel à Varus plutôt qu'à Quirinius pour officialiser leurs droits à la
royauté devant Auguste et Caius César (Antiquités
juives XVII:244-246). Le testament (de -4/-2?) évinçant Antipater[xxvii]
a pu servir à fixer la date du début des années de règne des fils d'Hérode[xxviii]
(sans qu'il y ait eu de corégence), cette question fut longuement débattue (Antiquités
juives XVII:202-247). D'ailleurs, la remarque d'Antipater devant Varus
indique qu'il s'estimait roi à partir de l'enregistrement devant César (Guerre
des Juifs I:625-631). On observe d'ailleurs que, parmi les pièces de
monnaies émises par ces rois, aucune ne porte l'an 1 ou l'an 2 de leurs règnes.
Notes bibliographiques
[1] Lc 3:1-3, 21
[2] Lc 3:21-23; b Lc 1:36; c Nb 4:35; d Heb 6:20
[3] Mt 2:19,20; b Lc 2:1,2;
[4] Za 8:19; b 2R 25:1
[5] Ac 24:5; b Lc 2:3,4; c Nb 1:2,18; d Lv 25:10; e Dn 11:20; f Mt 1:19; g Lc 2:5; h Lv 12:1-8; i Lc 2:22; j Dn 1:20; 2:27; k Mt 2:1-2; l Mt 2:8; m Mt 2:12; n Mt 2:13-15; o Mt 2:7-9;
[6] Mt 2:16; b Mt 2:19-23; c Lc 2:39-41;
[7] Ac 11:28-12:23;
[i]
J.
Finegan - Handbook of Biblical Chronology
Massachussetts 1999 Ed. Hendrickson pp. 340,341
[ii] S. Chabert d'Hyères - Jésus, du gouvernement de Quirinius au principat de Tibère
in: Dossiers d'archéologie N°279 déc.02-janv.03 p. 80
[iii] A. Loth - Jésus-Christ dans l'histoire
Paris 2003 Ed. François-Xavier de Guibert pp. 57-82
[iv]
J.
Finegan - Handbook of Biblical Chronology
Massachussetts 1999 Ed. Hendrickson pp. 299-301
[v] M. Kudlek E. Mickler Solar and Lunar Eclipses of the Ancient Near East from 3000 BC to 0
Allemagne 1971 Ed. Neukirchen-Vluyn Vol. I p. 156
[vi] W.E. Filmer - The Journal of Theological Studies, Vol. XVII
Oxford 1966 Ed. H. Chadwick, H. Sparks p. 284
H. Lichtenstein - Die fastenrolle eine untersuchung zur jüdisch-hellenistishen geschichte
in: Hebrew Union College Annual Cincinnati 1931-32 pp. 271,272
[vii]
J.
Finegan - Handbook of Biblical Chronology
Massachussetts 1999 Ed. Hendrickson p. 295
O. Edwards - The Time of Christ
Edinburgh 1986 Ed. Floris Books p. 59
[viii] Ernest L. Martin - The Birth of Christ Recalculated
Pasadena 1980 Foundation for Biblical Research. 2d ed. pp. 283-298
[ix] C. Nicolet - L'inventaire du monde
Paris 1988 Éd. Fayard pp. 133-157
[x] K. Rosen - Jahrbuch für Antike and Christentum 38
Bonn 1995 pp. 5-15
[xi] M. Sartre - D'Alexandrie à Zénobie. Histoire du Levant antique
Paris 2001 Éd. Fayard p. 472
[xii] C. Saulnier - Histoire d'Israël
Paris 1985 Éd. cerf pp. 235,236
[xiii] E. Schürer - The History of the Jewish people in the age of Jesus Christ
Edinburg 1987 Ed. T & T Clark Ltd pp.256-260
[xiv] S. Chabert d'Hyères -L'année de la Nativité
in: Dossiers d'archéologie N°249 déc.99-janv.00 pp. 92-98
S. Chabert d'Hyères - Quirinius et les deux enregistrements de Judée
in: Dossiers d'archéologie N°279 déc.02-janv.03 pp. 102-107
[xv] M. Sartre - D'Alexandrie à Zénobie. Histoire du Levant antique
Paris 2001 Éd. Fayard pp. 436,437,470,471,478
[xvi] G. Firpo - Il problema cronologico della nascita di Gesù
Brescia 1983 Ed. Paideia pp. 238-243
[xvii] C. Eilers - C. Sentius Saturninius, Piso Pontifex, and the Titulus Tiburninus: a Reply
in: Zeitschrift für Papyrologie und Epigraphik 110 (1996) p. 215
[xviii] E. Dabrowa - The Governors of Roman Syria from Augustus to Septimius Severus
Bonn 1998 Ed. Rudolf Habelt GMBH pp. 24-26
[xix] C. Eilers - C. Sentius Saturninius, Piso Pontifex, and the Titulus Tiburninus: a Reply
in: Zeitschrift für Papyrologie und Epigraphik 110 (1996) pp. 207-226
[xx] O. Edwards - Herodian Chronology
in: Palestine Exploration Quarterly 114 (1982) pp. 29-42
[xxi] Kenneth F. Doig - The New Testament Chronology
Lewiston NY 1992, Ed. Edwin Mellen Press
[xxii] C. Saulnier - Histoire d'Israël
Paris 1985 Éd. cerf pp. 510-512
[xxiii] M. Sartre - D'Alexandrie à Zénobie. Histoire du Levant antique
Paris 2001 Éd. Fayard p. 728
[xxiv] J. Maltiel-Gerstenfeld - 260 Yeard of Ancient Jewish Coins
Tel Aviv 1982 Ed. Kol Printing Service Ltd pp. 125-153
[xxv] F. Hurlet - Les collègues du prince sous Auguste et Tibère
1997 École française de Rome pp. 110,111
[xxvi] E. Dabrowa - The Governors of Roman Syria from Augustus to Septimius Severus
Bonn 1998 Ed. Rudolf Habelt GMBH p. 203
[xxvii] C. Saulnier - Histoire d'Israël
Paris 1985 Éd. cerf pp. 222-227
[xxviii] W.E. Filmer - The Journal of Theological Studies, Vol. XVII
Oxford 1966 Ed. H. Chadwick, H. Sparks pp. 283-298