Oeuvre numérisée par Marc Szwajcer
PHEDRE
Fables de Phèdre
trad. nouvelle par M. Ernest Panckoucke
C. L. F. Panckoucke, 1834.
PROLOGUE (01). A PARTICULON. J'AVAIS résolu de terminer cet ouvrage, pour laisser à mes successeurs plus de sujets à traiter. Mais depuis, j'ai en moi-même entièrement blâmé ce dessein. Car s'il est des poètes qui désirent s'exercer dans le même genre, comment pourront-ils deviner ce que j'ai omis, et ce que je laisse à transmettre à la postérité: chacun a sa manière de penser, chacun a une couleur de style qui lui est propre. Ce n'est donc point par inconstance, mais avec une certaine raison, que je me remets à l'oeuvre C'est pourquoi, mon cher Particulon, puisque tu aimes ces fables écrites dans le genre d'Ésope, mais qui ne sont point d'Ésope, car il en a laissé fort peu, et j'en donne beaucoup plus, en imitant son ancienne manière dans des sujets nouveaux, je te dédie mon quatrième livre ; tu le liras dans ta retraite de Varia. Si la critique amère veut encore s'y attacher, qu'elle s'y attache , puisqu'elle ne peut l'imiter. C'est une assez grande gloire pour moi, de voir, toi et d'autres personnes de ton mérite, donner à mes ouvrages une place dans vos bibliothèques, et me juger digne de passer à la postérité. Les applaudissements des hommes de lettres sont mes seuls voeux. FABLE I. L'ANE ET LES PRÊTRES DE CYBÈLE. CELUI qui est né malheureux, non seulement traîne une vie misérable, mais
au delà du trépas il est encore poursuivit par sa cruelle destinée. FABLE II. LA BELETTE ET LES RATS. CES fables peuvent te paraître des plaisanteries (03),
car il est vrai que je joue avec mon style léger, lorsque je n'ai rien de mieux
à faire; mais lis ces bagatelles avec attention, et tu verras combien d'utiles
leçons elles renferment. Les choses ne sont pas toujours telles qu'elles
paraissent. Au premier coup d'oeil, bien des gens sont souvent éblouis ; mais
un esprit éclairé soulève le voile et découvre la pensée de l'auteur. Je ne
parle pas sans preuve, et, à l'appui de ce que j'avance, je citerai la fable de
la Belette et des Rats. FABLE III. LE RENARD ET LES RAISINS (06).CERTAIN Renard, mourant de faim, convoitait des raisins qui pendaient d'une
treille élevée. Il sauta de toute ses forces, mais il n'y put atteindre. «
Ils ne sont pas mûrs, et je ne veux pas les cueillir pendant qu'ils sont verts,
» dit-il en s'en allant. FABLE IV. LE CHEVAL ET LE SANGLIER (07).LE Sanglier, en se vautrant, troubla l'eau d'un gué où le Cheval avait
coutume de se désaltérer : de là une querelle. Le fougueux coursier irrité,
implora le secours de l'homme, le reçut sur son dos, puis revint trouver son
ennemi. On dit que le cavalier, après avoir lancé ses traits et tué le
Sanglier, parla ainsi au Cheval : «Je me réjouis de t'avoir accordé le
secours que tu m'as demandé, car j'ai fait une belle conquête, et je sens
combien tu peux m'être utile. » Aussitôt il le força à souffrir un frein.
«Insensé que je suis, dit alors le Cheval tout consterné, je cherchais à me
venger d'une offense légère, et j'ai trouvé l'esclavage. » FABLE V. TESTAMENT EXPLIQUÉ PAR ÉSOPE (08). SOUVENT un seul homme a plus de bon sens que toute une multitude : cette
courte histoire le prouvera à la postérité. FABLE VI COMBAT DES RATS ET DES BELETTES (14).DANS un combat fameux, qu'on voit peint sur les murs de maintes tavernes,
l'armée des Rats avait été battue par celle des Belettes : les vaincus
fuyaient en tremblant, et se précipitaient vers leurs étroites demeures, où
ils n'entraient qu'avec peine ; cependant ils échappèrent à la mort. Les
chefs, qui avaient mis sur leurs têtes des panaches, pour que, dans la mêlée,
leurs soldats pussent les reconnaître et les suivre, arrêtés par leurs
aigrettes à l'entrée de leurs trous, furent pris par l'ennemi. Le vainqueur
les immola de ses dents meurtrières, et les engloutit dans le gouffre infernal
de son insatiable estomac. FABLE VII. LE POÈTE. CENSEUR malin, toi qui critiques mes écrits, toi qui dédaignes un genre qui
te paraît frivole, je te demande un peu de patience ; et, pour adoucir ton
humeur sévère, Ésope vient de chausser le cothurne (15). FABLE VIII. LA VIPÈRE ET LA LIME (21). LE méchant qui s'attaque à plus mordant que lui pourra se reconnaître dans
cette fable. FABLE IX. LE RENARD ET LE BOUC (22). Dis qu'un homme adroit se trouve en danger, il cherche à se tirer d'affaire,
aux dépens d'autrui. FABLE X. DES VICES DES HOMMES (23). JUPITER nous a tous chargés d'une besace : il a destiné la poche de
derrière à nos propres défauts, et celle de devant, la plus lourde, aux
défauts d'autrui. FABLE XI. LE VOLEUR PILLANT UN AUTEL (24). UN Voleur alluma sa lampe à l'autel de Jupiter, et pilla le temple à la
lueur de la lumière qu'il y avait dérobée. Comme il emportait son butin
sacrilège, soudain le dieu s'écria du fond du sanctuaire : FABLE XII. LES RICHESSES SONT FUNESTES (25). C'EST avec raison qu'une âme élevée méprise les richesses, car le
coffre-fort éloigne les vraies vertus. FABLE XIII. LE LION ROI (26). RIEN n'est plus utile que de ne point déguiser sa pensée. L'est une maxime
approuvée de tout le monde ; mais la franchise est souvent cause de notre
perte. (La suite magique.) FABLE XIV. LES CHÈVRES ET LES BOUCS (27). A FORCE de prières, les Chèvres obtinrent de Jupiter la permission de
porter de la barbe. Les Boucs, fort mécontents de voir leurs femelles les
égaler dans les marques de leur dignité , s'en plaignirent hautement : FABLE XV. LE PILOTE ET LES MATELOTS (28). UN homme se plaignait du triste état de sa fortune. Ésope, dans l'espoir de
le consoler, inventa cet apologue. FABLE XVI. DÉPUTATION DES CHIENS VERS JUPITER (29). UN jour, les Chiens envoyèrent des ambassadeurs à Jupiter, pour le supplier
de leur accorder une condition plus douce, et de les soustraire aux mauvais
traitements des hommes ; car on ne leur donnait que du pain de son, et, pour
assouvir leur faim, ils étaient obligés de fouiller dans les plus
dégoûtantes ordures. Les ambassadeurs partent donc, vont sans se presser,
flairant chaque tas de fumier, pour y trouver quelque nourriture. Mercure les
appelle, et ils ne répondent pas ; enfin ce dieu les va chercher, et les amène
tout troublés devant Jupiter. Mais dès qu'ils virent l'air sévère et
majestueux du Maître de l'Olympe, ils eurent une telle frayeur, qu'ils
infectèrent toute la cour céleste. Chassés à coups de bâton , ils
cherchaient à sortir, lorsque le grand Jupiter défendit qu'on les renvoyât. FABLE XVII. L'HOMME ET LA COULEUVRE (30). QUI secourt les méchants n'est pas longtemps à s'en repentir. FABLE XVIII. LE RENARD ET LE DRAGON (31). UN Renard se creusait un terrier : il jetait la terre au dehors, et
travaillait avec ardeur à ses galeries souterraines, lorsqu'il rencontra une
caverne profonde, ou un Dragon gardait des trésors cachés. Dès que le Renard
l'aperçut : « Pardonne-moi d'abord , lui dit-il , mon imprudence ; ensuite ,
comme tu dois voir que les trésors ne me conviennent guère, réponds à ma
demande sans te fâcher. Quel fruit retires-tu de cette tâche pénible ? ta
récompense doit être grande, car tu te prives de sommeil, et tu passes ta vie
dans les ténèbres. - Je n'ai rien pour cela, répondit le Dragon ; Jupiter a
seulement remis ce dépôt à ma vigilance. - Tu ne peux donc point prendre ta
part de ce trésor, ni en donner à personne. ? - Non, telle est la volonté
suprême. - Je ne veux pas te fâcher, dit le Renard, mais je te dirai avec
franchise que celui qui te ressemble est né avec la malédiction des dieux. » FABLE XIX. PHÈDRE (32). LA critique envieuse a beau dissimuler le jugement qu'elle doit porter sur mon ouvrage, je le connais bien d'avance. Tout ce qui lui paraîtra digne de passer à la postérité, elle l'attribuera à Ésope ; mais, pour tout ce qui lui plaira moins, elle soutiendra fortement que j'en sais l'auteur. Je veux réfuter dès à présent ses calomnies, et lui dire : « Ces fables, qu'elles soient bonnes ou mauvaises, Ésope en est l'inventeur, et moi je les ai perfectionnées. » Mais continuons le plan que nous avons adopté. FABLE XX. NAUFRAGE DE SIMONIDE (33). L'HOMME instruit a toujours avec lui sa fortune. FABLE XXI. LA MONTAGNE QUI ACCOUCHE (34). UNE Montagne en mal d'enfant poussait des cris effroyables. Tout le monde
s'attendait à un grand événement. Elle accoucha d'une souris. FABLE XXII. LA FOURMI ET LA MOUCHE (35). LA Fourmi et la Mouche contestaient assez vivement de leur prix. La Mouche
commença la querelle en disant : « Peux-tu bien comparer ta position à la
mienne ? dans les sacrifices, je goûte la première les entrailles des victimes
; j'établis ma demeure sur les autels, et je parcours ainsi tous les temples
sacrés. Je siège sur le front des rois, et, si je veux même, je cueille un
baiser sur la bouche de la femme la plus chaste : je ne fais rien et je jouis
des plus beaux avantages. Eh bien ! est-il dans ton existence quelque chose de
comparable, misérable campagnarde ? - Sans doute, répondit la Fourmi, il est
glorieux de siéger au banquet des Immortels, mais comme convive, et non comme
parasite importun. Tu habites les autels ; mais, dès que l'on t'y aperçoit, on
te chasse. Tu parles de rois, de baisers surpris aux dames : folle ! tu te
vantes là de choses que, par pudeur, tu devrais cacher. Tu ne fais rien ; mais
aussi, lorsque le besoin se fait sentir, tu n'as rien. Tandis que j'amasse avec
ardeur quelques grains pour mon hiver, je te vois voltiger le long des murs,
cherchant un honteux repas. L'été, tu me fatigues de tes bourdonnements;
pourquoi te tais-tu donc l'hiver ? Lorsque le froid te saisit et te tue, je
rentre saine et sauve dans ma demeure, où je trouve l'abondance. En voilà
assez, je crois, pour rabattre ton orgueil. » FABLE XXIII. SIMONIDE PRÉSERVÉ PAR LES DIEUX (36). J'Ai dit plus haut combien les lettres avaient de prix parmi nous autres
mortels : je vais maintenant parler des honneurs que les dieux eux-mêmes leur
rendent. ÉPILOGUE LE POÈTE A PARTICULON (37). IL me reste encore bien des fables que je pourrais vous raconter, car les sujets s'offrent avec abondance et variété; mais, pour que les traits d'esprit puissent plaire, il faut en être sobre, sans quoi ils blessent le lecteur. Ainsi, Particulon, homme pur et intègre, vous dont je parlerai dans mes écrits tant que la littérature latine sera honorée, louez dans mes ouvrages, sinon le talent, du moins la brièveté : c'est un mérite d'autant plus recommandable , que les poètes, en général , sont longs et ennuyeux. (01) Ce prologue est une des pièces de Phèdre les plus maltraitées par le temps. Nous allons le citer tel qu'il se trouve dans le manuscrit Pithou, et nous y joindrons les annotations des commentateurs. Quum destinassem terminum
operis habere (a), (a) Operi statuere. (SWHABE) (02) FABLE I. - L'ANE ET LES
PRÊTRES DE CYBÈLE. Amnis it insana, nomine Gallus, aqua; Qui bibet inde, furit.
(03)
FABLE II. - LA BELETTE ET LES RATS. (04) ....Et obscuro loco Abjecit negligenter. Plusieurs traducteurs ont mis : « elle se blottit négligemment en un coin obscur. » Ce n'est pas du tout le sens de abjecit. On ne peut point se blottir négligemment. Cette phrase veut dire : « Elle se mit en un coin obscur, » pour faire croire aux rats que c'était un sac de farine qu'on avait jeté là négligemment.
(05) Sic
valeas, inquit, ut farina es, quae jaces. On trouve
une ironie toute semblable dans les Captifs de Plaute. Tyndare dit à
Aristophonte : ÉSOPE, fab. 28. PASSAGES IMITÉS PAR LA FONTAINE. I. Involvit se farina, et
obscuro loco 2. . . Mus, escam putans, 3. . . . . . .Venit et
retorridus, ADDENDUM : la fable de LA FONTAINE : LE CHAT ET UN VIEUX RAT http://www.lafontaine.net/fables/3chatrat.php
La Fontaine s’inspire souvent des Anciens.
Mais le maître ne copie pas. A chaque fable, il compose une ouvre nouvelle
basée sur des thèmes développés précédemment. « Le Chat et un vieux Rat
» est typique de cette manière de faire du nouveau avec du vieux », mais,
bien sûr, du totalement nouveau. Cette fois, Le fabuliste est allé chercher
son inspiration à la fois chez Esope (« Le Chat et les Rats »), chez Phèdre
(« La Belette et les Rats ») et chez Rabelais pour ce qui concerne le nom du
chat. Mais il a profondément remanié les uns et les autres. Nous retrouverons
encore deux fois le thème de l’animal qui feint la mort, dans « Le Renard
anglais » (Livre XII, fable 23) ainsi que dans « Le Renard et les Poulets d’Inde
» (XII, 18). Mais dans le cas présent, La Fontaine analyse l’attitude des
possibles proies alors que dans les deux autres fables, il s’attache plus au
comportement des chasseurs. J'ai lu, chez un conteur de fables, (1) Nous avons déjà trouvé ce nom de Rodilard (Rodilardus)
dans la fable II, 2 (« Conseil tenu par les Rats »).
Rappelons seulement qu'il est emprunté à Rabelais (« Quart Livre », XLVII).
Voir la note 2 du « Conseil ». Disons seulement ici que
ce nom signifie « rongeur de lard ». (06) FABLE III. - LE RENARD ET LES RAISINS. ESOPE, fab. 156. PASSAGES IMITÉS PAR LA FONTAINE. 1. Fame coacta Vulpis alta in
vinea 2. Quam tangere ut non potuit,
discedens ait ADDENDUM : la fable de LA FONTAINE : LE RENARD ET LES RAISINS Certain renard gascon, d'autres disent normand, (07) FABLE IV. - LE CHEVAL ET LE SANGLIER. Aristote, au second livre de sa Rhétorique, cite cette fable, et il en attribue l'invention à Stésichore. Le sujet n'est pas tout-à-fait le même que dans la fable latine. Horace et La Fontaine ont suivi le poète grec. ÉSOPE, fab. 313. PASSAGES IMITÉS PAR LA FONTAINE. I. .. .. . Sonipes, iratus
fero, 2. . . . . . Quem dorso
levans, 3. . . . . . Et didici, quam
sis utilis. ADDENDUM : la fable de LA FONTAINE : LE CHEVAL S'ÉTANT VOULU VENGER DU CERFDe tout temps les chevaux ne sont nés pour les
hommes. Gland: Horace et Virgile citent le
gland comme nourriture des premiers hommes (08) FABLE V. - TESTAMENT EXPLIQUÉ PAR ÉSOPE. Phèdre, en donnant à cette histoire le nom de fable, fabula, n'a pu
l'étendre au delà de son acception naturelle. Ce mot, prenant son étymologie
dans le verbe fari, parler, ne veut dire autre chose que le récit d'un
évènement vrai ou faux, peu importe. Quand les Latins veulent particulariser,
ils ont soin en général de s'expliquer par une épithète qui ne laisse point
d'équivoque : (09) Unam formosam, et oculis venantern viros. - Oculis venantem. Plaute avait dit avant Phèdre : Venaturam oculis facere. Une femme allant en conquête., comme dit le bon La Fontaine. (10) Centena matri conferant sestertia. On peut traduire indifféremment cent mille sesterces ou cent grands sesterces, ceux-ci en valant mille petits. Le grand sesterce était du neutre; sestertium, sous-entendu nummus. Phèdre parle ici comme on parlait à Rome: les sesterces n'étaient guère connus à Athènes; cent grands sesterces reviennent à peu pris à 19.453 fr. de notre monnaie.. (11) Lavationem argenteam. Plusieurs traducteurs voient: là une baignoire d'argent ; Gardin-Dumesnil lui-mème dit que lavatio se prend pour la baignoire, et il cite ce passage de Phèdre et cette phrase de Cicéron, faciam ut lavatio parata sit, laquelle n'est pas fort concluante. La forme du mot semble même contredire cette explication : lavatio ne me présente que ces deux sens, ou l'action de se laver, ou la collection des ustensiles qui servent aux bains - Vasa quae ad lavationem pertinent exponebantur, dit. Cicéron. (BEUZELIN.) (12) Eunuchos, glabros. - « Rectissime Gudius eunuchos a glabris distinxit. Glabri, i. e. quibus nulli in ore aut aliis corporis partibus pili erant, maxime in deliciis erant luxuriosi. Seneca, de Brev. Vitae, c. XII. « Quanta celeritate, signo dato, glabri ad ministeria discurrunt? » (LEMAIRE, Classiques latins.) (13) Patrici plenam antiquis Apothecam cadis. - Apotheca, du verbe ŽpotÛyhmi, déposer, mettre de côté, était un lieu de réserve. Le cadus, vase qui contenait environ quarante-deux pintes de Paris, valait deux amphores. Les Romains ne connaissaient pas les futailles, qui sont d'invention gauloise. (BEUZELIN. )
LA FONTAINE, , liv. II, fab. 20.
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Testament expliqué par Ésope.
Si ce qu'on dit d'Esope est vrai, C'était l'oracle de la Grèce : Lui seul avait plus de sagesse Que tout l'Aréopage. En voici pour essai Une histoire des plus gentilles Et qui pourra plaire au lecteur.
Un certain homme avait trois filles,
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L’Aréopage
était ce tribunal de l’ancienne Athènes qui siégeait sur la colline
consacrée au dieu de la guerre Arès (correspondant au Mars des Romains).
Il était composé de sages qui avaient pour mission de surveiller les
magistrats, de juger les meurtriers et de donner leur interprétation des
lois. Par extension, le terme désignait la colline sur laquelle le
tribunal rendait ses jugements. Le terme désigne maintenant une assemblée de personnes éminentes et particulièrement choisies pour leur compétence. Pour essai: Pour vérification. Les lois municipales: Qui concerne la ville où se passe l’histoire. Sa contingente part : Ce qui leur échoit. Terme juridique vieilli (comme nous en trouverons dans toute la fable). L'affaire est consultée : L’affaire est soumise à la consultation des avocats. Jettent leur bonnet : Abandonnent l’affaire, renoncent à comprendre. Treuve : Ancienne orthographe pour « trouve » utilisée indifféremment avec trouve » à l’époque du fabuliste. A volonté : La volonté de la mère. Sur la simple volonté de la mère. Les maisons de bouteille : Selon le dictionnaire de l’Académie, il s’agit de « petites maisons de campagne où l’on est visité souvent de ses amis » et où l’on vide sans doute quelques bouteilles. Malvoisie : Au départ, il s’agit d’un vin grec, doux et liquoreux. On désigne aussi par ce nom divers vin liquoreux du pourtour méditerranéen. Esclave de bouche : Officier de bouche, c'est-à-dire qui s’occupe de la table et des aliments. Le ménage : L’intendance. L'Attique : Péninsule de Grèce où se situe Athènes. Testateur : Celui qui a fait le testament. Partant : Donc. La biberonne: Celle qui biberonne, qui boit. Terme burlesque et parfaitement choisi. Le Phrygien : Il s’agit bien sûr d’Esope, originaire de la Phrygie, région occidentale de l’Asie Mineure (voir aussi « La vie d’Esope le Phrygien » de La Fontaine). Comme il se pouvait faire : En voyant comment il pouvait se faire.
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(14) FABLE VI. - COMBAT DES RATS ET DES BELETTES. ÉSOPE, fab. 154, alias, 242. PASSAGES IMITÉS PAR LA FONTAINE. I. Quum victi
Mures Mustelarum exercitu, 2. Duces eorum,
qui capitibus cornua 3. Quumcumque
populum tristis eventus premit, ADDENDUM : la fable de LA FONTAINE : Le Combat des Rats et des Belettes
La nation des belettes, (15) FABLE
VII. - LE POÈTE. (16) Utinam nec unquam Pelii nemoris jugo. Le Pélion, montagne de la Grèce dans la Thessalie, vers la partie orientale de la Magnésie. (17) Fabricasset Argus opere Palladio ratem. Argus, fils de Phryxus, inspiré par Minerve, construisit le vaisseau sur lequel s'embarquèrent les Grecs, appelés depuis Argonautes, qui, sous la conduite de Jason, firent la conquête de la toison d'or. (18)
Namque et superbi luget Aeetae
domus, Et regna Peliae scelere Medeae jacent. Aeétes ou Eétes, roi de
Colchide, père de Médée et d'Absyrthe. Un oracle ayant prédit à ce prince
que sa vie était attachée à la conservation de la toison d'or, il fit
entourer de murailles le temple de Mars, où elle avait été déposée, et il y
mit une forte garde composée de soldats Tauriens. (19) Hic caede patris Peliadum infecit manus. Médée ayant eu le secret de rajeunir le père de Jason, les filles de Pélias, étonnées de ce prodige, la prièrent de vouloir user du même secret pour leur père. Médée, pour venger Jason de l'usurpation de Pélias, y cousentit ; et, pour mieux les persuader, elle prit un vieux bélier, le coupa en morceaux, le mit dans une chaudière, le laissa bouillir pendant quelque temps, et en retira un jeune agneau. Les Péliades n'hésitèrent plus ; elles se saisirent de leur père, et , après l'avoir égorgé, le jetèrent dans la même chaudière. Le corps de Pélias y resta si longtemps, qu'il fut entièrement consumé, et ces malheureuses filles ne purent même lui donner la sépulture. (OVIDE, Met., liv. VII, ch. I ; PAUSANIAS, page 219, 300, 320.) (20) Aegaea Minos classe perdomuit freta, Justoque vindicavit exemplo impetum. Androgée, fils de Minos II, roi de Crète, se rendit à Athènes pour assister à la célébration des Panathénées. II combattit dans ces jeux avec tant d'adresse, qu'il remporta tous les prix. La jeunesse de Mégare et d'Athènes, blessée de tels succès, résolue de le faire périr. Androgée, en se rendant à Thèbes, fut assassiné à Aenée, ville située sur les confins de l'Attique. Minos, pour venger le meurtre de son fils, s'embarqua aussitôt vint assiéger Mégare et Athènes, prit ces villes, et imposa aux vaincus les plus dures conditions. (DIODORE DE SICILE, pages 183 ; PAUSANIAS, page 29, 50, 403.) (21)
FABLE VIII. -- LA VIPÈRE ET LA
LIME. ÉSOPE, fab. 81, alias 184. PASSAGES IMITÉS PAR LA FONTAINE. 1. In officinam
fabri venit Vipera : 2. Illa contra
contumax. 3. Quid me,
inquit, stulta, dente captas laedere? ADDENDUM : la fable de LA FONTAINE : Le Serpent et la Lime On conte qu'un serpent, voisin d'un horloger (22) FABLE IX. - LE RENARD ET LE. BOUC. ÈSOPE, fab. 4. La Fontaine a suivi Ésope et a traité cette fable sous un point de vue tout différent. Le Renard et le Bouc descendent tous deux dans le puits pour se désaltérer; mais le Renard a d'avance médité le tour qu'il veut jouer à son compagnon ; car il lui dit en s'en allant : « Si tu avais autant de jugement que de barbe au menton, tu ne serais pas descendu dans ce puits sans être assuré des moyens de remonter. » Capitaine Renard allait de compagnie (23) FABLE X. - DES VICES DES HOMMES. Plusieurs auteurs font allusion à cet apologue : Aliena vicia in oculis habemus, a tergo nostra sunt. ( SENEC. , de Ira, , lib. II, 28. ) ÉSOPE, fab. 337. PASSAGE IMITÉ PAR LA FONTAINE, 1. Peras
imposait Jupiter nobis duas : (24) FABLE XI. - LE VOLEUR PILLANT UN AUTEL. I. Lucernam Fur accendit ex ara Jovis. Le culte du feu suivit de près celui qu'on rendit au Soleil, et toutes les nations se sont accordées à l'adorer comme le plus noble des éléments et comme une vive image de l'astre du jour. Les Chaldéens le regardaient comme la déité suprême : mais ce fut en Perse que son culte fut établi presque exclusivement. Cette superstition passa en Grèce. Un l'eu sacré brûlait dans les temples d'Apollon à Athènes et à Delphes dans celui de Cérès à Mantinée, de Minerve, de Jupiter Ammon etc. Les Romains, à l'imitation des Grecs, adoptèrent ce culte, et Numa fonda un collège de vestales, dont les fonctions consistaient à entretenir le feu sacré. Cette religion subsiste encore parmi les Guèbres ou Parsis, ainsi que chez plusieurs peuples de l'Amérique, entre autres chez les Virginiens. (NOEL, Dict. de la Fable, t. I, p. 600.) (25) FABLE XII. - LES RICHESSES SONT FUNESTES. 1. Opes invisae merito sunt forti viro , Quia dives arca
veram laudem intercipit. Voilà une sentence qui rappelle ces vers d'Horace
; ÉSOPE, fab. 191. (26) FABLE XIII. - LE LION ROI.Il ne nous reste qu'un fragment de cette fable. Quelques commentateurs ont pensé que, se trouvant immédiatement placée après une pièce qui devait être fort licencieuse, à en juger par le peu de vers qui en restent, elle en avait partagé le sort, et été déchirée, par un sévère lecteur. Mais pourquoi avoir épargné le morceau qui suit immédiatement cette fable, et que nous retrouvons dans presque toute les éditions de Phèdre ? Il nous semble qu'il est bien plus naturel d'émettre que c'est le temps qui a, comme dans d'autres endroits, altéré le manuscrit. Nous dirons qu'il est à regretter pour notre auteur que le temps ne nous ait pas aussi dérobé les deux autres fragments que nous n'avons pas reproduits dans notre édition. 1. Romulus reproduit entièrement cette fable du Lion régnant, et c'est d'après cet auteur que l'abbé Brotier a composé un supplément à cet apologue, qui a été adopté par presque tous les traducteurs. ÉSOPE, fab. 145. ADDENDUM : la fable de LA FONTAINE : La Cour du Lion Sa Majesté lionne un jour voulut connaître (27) FABLE XIV. - LES CHÈVRES ET LES BOUCS. 1. Barbam Capellae quurn impetrassent ab Jove... La chèvre, chez les Grecs, était consacrée à Jupiter en mémoire de la nymphe Amalthée. (28) FABLE XV. - LE PILOTE ET LES MATELOTS. 1. Factus periclo tum Gubernator sophus. Traduire cette phrase comme LaIlemant : « Le pilote que le danger avait rendu philosophe, » ce n'est pas rendre en français la pensée de Phèdre. (29) FABLE XVI. - DÉPUTATION DIS CHIENS VERS JUPITER.Que veut dire cette fable ? Phèdre a-t-il voulu nous donner l'origine du culum olfacere, usage qui, selon notre poète, n'appartiendrait qu'aux chiens, tandis que cette coutume est générale chez la plupart des quadrupèdes ? Celte fable est une débauche d'esprit qui a échappé à Phèdre, et que notre bon La Fontaine s'est bien gardé d'imiter. (30) . FABLE XVII. - L'HOMME ET LA COULEUVRE.ÉSOPE , fab. 269. PASSAGE IMITÉ PAR LA FONTAINE. I. Gelu
rigentem quidam Colubram sustulit, ADDENDUM : la fable de LA FONTAINE : Le Villageois et le Serpent Esope conte qu'un manant, (31) FABLE XVIII. - LE RENARD ET LE DRAGON. I. Pervenit ad Draconis speluncam intimam. Le manuscrit Pithou porte ultimam. C'est Schwabe qui a cru devoir faire ce changement. Intimam est la leçon adoptée par M. Lemaire. (32) FABLE XIX. - PHEDRE.1. Sive hoc ineptum, sive laudandum est opus. Cette réponse de Phèdre n'est pas victorieuse, car la critique tombera nécessairement sur le fond ou sur la forme des fables qu'il a empruntées d'Ésope. Dans le premier cas, il partagera le tort de l'inventeur pour n'avoir pas mieux choisi, et, dans le second, il aura tort tout seul. (BEUZELIN.) (33) FABLE XX. - NAUFRAGE DE SIMONIDE. 1. Simonides, qui scripsit egregium melos... Simonide,
l'un des meilleurs poètes de l'antiquité, naquit à Céos, île de la mer
Égée, environ 550 ans avant J.-C. Quintilien et Valère-Maxime lui attribuent
l'invention de la mémoire locale. Dans un de ses poëmes, il se glorifie
d'avoir récité des vers et disputé le prix de poésie à l'âge de
quatre-vingts ans. ( VALÈRE-MAXIME, liv. VIII, c. VII, 13. ) (34) FABLE XXI. - LA MONTAGNE QUI ACCOUCHE. Cette petite fable, même du temps de Phèdre, n'était pas
nouvelle, et depuis elle a encore été rapportée par bien des auteurs. ROMULUS, liv. II, fab. 5.
1. Mons
parturibat, gemitus immanes ciens; ADDENDUM : la fable de LA FONTAINE : La Montagne qui accouche Une montagne en mal d'enfant (35) FABLE XXII. - LA FOURMI ET LA MOUCHE. Dans le manuscrit Pithou , on trouvait en tête de cette fable
ce vers, que Rigaltius, avec raison, a transporté à la fable 17, liv. III : ROMULUS, liv. II, fab. 18. PASSAGES IMITÉS PAR LA FONTAINE. I. Formica et
Musca contendebant acriter, 2. Ubi
immolatur, exta praegusto deum, 3. In capite
regis sedeo, quum visum est mihi, 4. Est gloriosus sane convictus deum, ADDENDUM : la fable de LA FONTAINE : La Mouche et la Fourmi La mouche et la fourmi contestaient de leur prix. (36) FABLE XXIII. - SIMONIDE PRÉSERVÉ. PAR LES DIEUX. 1. Simonides idem fille, de quo retuli, Victori laudem
cuidam pyctae ut scriberet, Certo conduxit pretio. Les auteurs, dit
Quintilien, ne s'accordent pas sur le nom du héros chanté par Simonide ; les
uns disent que c'était Glaucon Carystius on Léocrate; les autres, ou
Agatharque ou Scopas : il en est de même pour le lieu oie était située la
maison. Quoi qu'il en soit, il paraît constant qu'un noble Thessalien, nommé
Scopas, périt dans ce festin. Mais tout ce récit sur les Tyndarides paraît
bien un conte ; car Simonide n'en fait mention dans aucun de ses ouvrages, et
certes il n'aurait pas gardé le silence sur un événement si glorieux pour
lui. (QUINTILIEN, liv. XI, p. 211.) 2. Atque interposuit gemina Ledae sidera. Léda, fille de Thestios et femme de Tyndare. Jupiter, ayant trouvé cette princesse sur les bords de l'Eurotas, fit changer Vénus en aigle, et, prenant la figure d'un cygne, poursuivi par cet aigle, il alla se jeter dans les bras de Léda, laquelle, au bout de neuf mois, accoucha de deux oeufs : de l'un, sortirent Pollux et Hélène, et de l'autre, Castor et Clytemnestre. Les deux premiers furent regardés comme les enfants de Jupiter, et les deux autres comme ceux de Tyndare. (Dict. de la Fable et Mét. 6.) 3. Ad coenam rnihi promitte ... C'était l'expression d'usage chez les anciens. Pline, dans sa lettre à Septicius Clarus, s'écrie: "Heus, tu promittis ad caenam, nec venis! » (Liv. I, lett. 15.) LA FONTAINE, liv. I, fab. 14. PASSAGES IMITÉS PAR LA FONTAINE. I . Victori
laudem cuidam pyctae ut scriberet, 2. Exigua quum
frenaret materia impetum, 3. Atque
interposuit gemina Ledae sidera, 4. Opus
approbavit; sed mercedis tertiam 5. Verum, ut ne irate dimissum te sentiam, ADDENDUM : la fable de LA FONTAINE : Simonide préservé par les Dieux On ne peut trop louer trois sortes de personnes : (37) ÉPILOGUE. - LE POÈTE A PARTICULON.i. Nous avons suivi l'édition Lemaire dans le classement de
cet épilogue et du prologue du livre V.
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