retour
à l'entrée du site
table des matières de SERENUS SAMMONICUS
SERENUS SAMMONICUS.
Oeuvre numérisée par Marc Szwajcer
NOTICE SUR QUINTUS SERENUS
SAMMONICUS.
Les écrivains de l’antiquité font mention de deux
Sammonicus, le père et le fils, tous deux célèbres par leur savoir
au commencement du iiie
siècle de l’ère chrétienne. Le père fut tué dans un festin par ordre
de Caracalla. Il avait composé un grand nombre d’ouvrages
scientifiques, dédiés à ce prince, et possédait une bibliothèque de
soixante-deux mille volumes. Le fils hérita de cette bibliothèque,
et la légua en mourant à Gordien le Jeune, dont il avait été
précepteur. C’est tout ce que l’Histoire nous apprend de ce dernier;
et l’on ne peut douter que le père ne soit l’auteur du poème de
Medicina, qui nous est parvenu sous le
nom de Quintus Serenus Sammonicus, d’autant que Lampride le cite au
nombre des poètes dont Alexandre Sévère faisait sa lecture
habituelle. Du reste, on ne lit nulle part qu’il ait, a proprement
parler, exercé l’art de guérir, et il paraît probable qu’à l’exemple
de tant d’autres poètes didactiques, il a consacré ses loisirs à
composer un poème sur la médecine sans pratiquer la science qu’il
avait choisie pour objet de ses chants. Macrobe, qui l’a cité dans
ses Saturnales, dit seulement que c’était un homme savant pour son
siècle : vir saecuto suo doctus.
Enfin, pour ne rien omettre de ce qui peut jeter
quelque jour sur la personne de Sammonicus, disons qu’Arnobe invoque
son témoignage et celui de plusieurs autres auteurs (c’est le mot
dont il se sert) à l’appui d’une particularité peu importante. Cette
citation nous explique pourquoi Vossius, qui voyait partout des
historiens, l’a mis dans sa nomenclature.
En résumé, Sammonicus est pour nous un poète-médecin.
Comme écrivain, il ouvre la liste des poètes du
iiie siècle; comme médecin, il nous fait connaître
l’état de l’art médical à la même époque. Son poème est compose de
onze cent dix vers et divisé en soixante-cinq chapitres. La
versification en est assez soignée, quoiqu’elle ne laisse pas de se
ressentir un peu de la décadence des lettres. Sous le rapport de la
science, il est certain qu’il y a plus à profiter pour la curiosité
et l’érudition que pour l’art de guérir. Son livre est semé de
fables et d’idées superstitieuses; mais en cela il partage une
erreur commune à toute l’antiquité. Toutefois il blâme, en général,
l’emploi des moyens cabalistiques. Il se donne comme le médecin des
pauvres; et, selon lui, les remèdes les plus simples sont aussi les
plus sanitaires. Au surplus, le poème de Sammonicus appartient moins
à la science qu’à l’histoire de la science: c’est un de ces ouvrages
qui veulent être jugés au point de vue du temps où ils ont été
composes. En jetant un coup d’œil sur les différents âges de la
médecine, on pourra se faire une idée de ce que devait être cet art
au commencement du troisième siècle.
L’histoire de la médecine, par une singularité
remarquable, a toujours été alliée à celle de la philosophie, et ces
deux sciences ont subi les mêmes destinées. Originaire de l’Egypte,
où les prêtres l’exerçaient comme une science secrète, de passa de
là en Grèce, et y devint la propriété héréditaire des Asclépiades ou
descendants d’Esculape. C’est de cette famille qu’était Hippocrate.
Il fit de la médecine une science d’observation, une science libre,
et, à ce titre, il en fut le véritable fondateur. La doctrine
d’Hippocrate se confondit dans la suite avec la philosophie de
Platon à Alexandrie, où l’on voit s’élever successivement l’école
empirique, l’école méthodique, l’école pneumatique, et enfin l’école
éclectique, que le nom de Gallien a rendue célèbre. Lorsque Galien
passa d’Alexandrie à Rome, Celse avait déjà initié les Romains aux
connaissances des Grecs en médecine. Mais ce ne fut guère, on le
sait, que dans la science du droit que les Romains se sont montrés
véritablement créateurs. Ajoutez à cela que l’alliance étroite de la
médecine avec la philosophie païenne, rivale du christianisme
naissant, la fit tomber dans la théurgie. On n’alla donc pas plus
loin que Galien; on ne fit plus que compiler et apprendre sans
méthode ce qui était écrit; si quelqu’un y ajoutait, ce n’étaient
que des conjectures ou des superstitions.
Le système de Galien, qui se soutint pendant toute la
durée du moyen Age, reçut des Arabes, vers le
xe siècle,
un notable perfectionnement. A la même époque commença l’école de
Salerne, fameuse dans l’histoire moderne de la médecine.
L’établissement de cette école doit son origine aux moines du mont
Cassin. Saint Benoît avait imposé à ses moines l’obligation de
soigner les malades et de les guérir par la prière et l’exorcisme.
Les disciples se conformèrent aux prescriptions du maître; mais,
outre la prière, ils ne laissèrent pas d’avoir recours aux moyens
offerts par la nature. Le mont Cassin devint surtout célèbre dans le
xie siècle
par le séjour qu’y fit Constantin l’Africain, né a Carthage, qui,
après avoir fréquenté pendant près de quarante ans les écoles des
Arabes à Bagdad, fut regardé dans son pays comme un sorcier. Il
s’était d’abord réfugié auprès de Robert Guiscard, premier duc de la
Pouille, qui le nomma son secrétaire; plus tard, il se retira dans
le couvent du mont Cassin, y passa les dernières années de sa vie,
occupé à traduire en latin les ouvrages arabes qu’il avait
recueillis dans ses voyages. Cependant les bénédictins avaient fondé
dans le royaume de Naples divers autres monastères, dont le plus
illustre fut celui de Salerne. Les moines de ce couvent surpassèrent
ceux du mont Cassin, et leurs travaux jetèrent les fondements de la
science moderne. A partir du
xvie siècle, l’histoire de la médecine devint
celle de toutes les autres connaissances humaines, et l’art médical
entra, comme toutes les sciences naturelles, dans la voie du
progrès, guidé par le flambeau de la véritable philosophie.
L. Baudet.
DE MEDECINA PRAECEPTA
|
PRECEPTES MEDICAUX
|
Prooemium
Membrorum series certo deducta tenore
Ut
stet, et assimilis medicinae defluat ordo,
Principio celsa de corporis arce loquamur.
Phoebe, salutiferum quod pangimus
[1]
assere carmen
Inventumque tuum prompto comitare favore.
Tuque, potens artis, [2]
reduces qui tradere vitas
Nosti
atque in caelum manes revocare sepultos,
Qui
colis Aeginam, [3]
qui Pergama quique Epidaurum,
Qui
quondam placidi tectus sub pelle draconis
Tarpeias arces [4]
atque indita templa petisti
Depellens tetros praesenti numine morbos:
Huc
ades et quicquid cupide mihi saepe roganti
Firmasti, nunc tu teneris expone papyris.
[5]
|
Avant-Propos.
Pour suivre un ordre
méthodique dans l’indication des remèdes applicables aux
diverses maladies qui attaquent la santé de l’homme, je
commencerai par ceux qui regardent les affections de la
partie la plus éminente du corps, c’est-à-dire de la tête.
O Phébus! c’est pour
le bonheur des humains que j’entreprends ce poème; daigne
soutenir mes chants, accorde ta protection à un art que tu
as inventé. Et toi, digne héritier de l’art paternel, toi
qui peux rappeler les mânes du tombeau et rendre la vie et
la lumière a un corps mortel, dieu d’Egine, de Pergame et d’Epidaure,
qui, jadis, sous la forme d’un serpent inoffensif, vins
fixer ton séjour dans le temple que la reconnaissance des
Romains t’éleva sur la roche Tarpéienne et d’où tu protèges
la vie des hommes contre les tristes fléaux du corps,
inspire-moi, et tous les secrets que, cédant à mes
instances, tu m’as si souvent dévoilés, permets-moi en ce
jour de les confier au léger papyrus. |
I.
Capiti medendo.
Balsama si geminis instillans auribus indas,
Tum
poteris alacrem capitis reparare vigorem.
Vel
quae septenis censentur gramina nodis
[6]
Utiliter nectes, vel corno ex arbore sertum.
Pulegiumve potens una super aure locabis
Aut
illud mixto recoquens clementer aceto
Cauta
nare trahes; seu visco splenia nexo
Induces fronti seu tritae gramina menthae;
Spongia cum tepidis annexa liquoribus imbris
Profuit, aut hedera ex oleo colata vetusto.
Profuit et cocleis frontem tractare minutis.
Si
nocuit cerebro violentia solis aperto,
Saepe
chelidonia ex acido perducta liquore
Sanavit: prosunt et amica papavera somno,
Si
prius in lento madefacta coquantur olivo. |
I. Des remèdes contre
les affections de la tête.
Le mal de tête cède à
plusieurs remèdes il suffit tantôt d’épancher dans les
oreilles quelques gouttes de baume; tantôt de se couronner
la tête avec des feuilles de cornouiller, ou de cette espèce
de plante dont la tige se divise en sept articulations.
Appliqué sur une oreille, le pouliot n’est pas moins
efficace; on peut aussi le faire bouillir avec du vinaigre
sur un feu modéré, et aspirer doucement cette décoction par
les narines. Un cataplasme de gui ou de menthe, appliqué sur
le front, a la même vertu. L’expérience recommande encore
l’application d’une éponge imbibée d’eau de pluie tiède, ou
un cataplasme de lierre bouilli avec de l’huile vieille. Il
est également bon de se frotter le front avec des limaçons
broyés. La chélidoine trempée de vinaigre a souvent guéri
les maux de tête causés par l’ardeur du soleil; le pavot
soporifique, bouilli avec de l’huile, a la même efficacité. |
II.
Hemicranio medendo. [7]
Portio si capitis morbo tentetur acuto,
Allia
diversam, lana contecta, per aurem
[8]
Inducta prosunt, et eodem balsama pacto;
Allia
vel ternis piperis terna addita granis.
[9]
Trita
lines: certam dabit haec tibi cura salutem. |
II.
Contre la migraine.
Enveloppé dans un flocon de laine et introduit dans
l’oreille opposée à celle où est le mal, l’ail ou le
baume est un remède efficace contre cette douleur aiguë qui
affecte une partie de la tête. On obtient aussi le même
effet par des frictions faites avec trois gousses d’ail et
trois grains de poivre broyés ensemble. |
III.
Porrigini depellendae.
Est
insensibilis morbus, sed noxia formae,
[10]
Quum
caput immensa pexum porrigine ningit,
Copia
farris uti frangentibus edita saxis.
[11]
Hanc
poterit malvae radix decocta levare;
Aut
tu foeniculum nitrumque et sulphura viva
Contere; deinde caput permixtis obline cunctis;
Furfuribusve novis durum miscebis acetum,
Ut
varios crines [12]
tali des unguine puros.
Prodest et tarda demptus testudine sanguis,
Et
prodest cedro demissus ab arbore sucus.
Desinet interea glomerari farrea nubes
Cessabitque gravis crebrae porriginis imber. |
III. Contre la crasse
de la tête.
La tête est sujette à
une affection qui n’altère point la santé, mais qui choque
la vue par un air de malpropreté: je veux parler de cette
neige de crasse qui tombe des cheveux quand on les peigne,
et qui ressemble à la farine qui blanchit la pierre sous
laquelle on broie le blé. Une décoction de racine de mauve a
la vertu de la dissiper. On peut encore se frotter les
cheveux avec du fenouil, du nitre et du soufre vif broyés
ensemble. Le vinaigre mêlé avec du son frais a une âcreté
qui fait disparaître ces mouchetures qui les déparent. On
peut se servir aussi du sang de la lente tortue ou du suc
que le cèdre distille. Grace à ce remède, on n’aura plus à
craindre de voir une nuée farineuse s’amonceler sur sa tête,
et se résoudre en une pluie lourde et serrée de crasse. |
IV.
Capillo tingendo.
Quos
pudet aetatis longae, quos sancta senectus
Offendit, cupiunt properos abscondere canos
Et
nigrum crinem fuco simulare doloso,
His
prodest acri contrita cupressus aceto
Vel
frons lentisci vel tristia poma sabuci;
[13]
Lumbrici quoque terrestres miscentur olivo
Et
juvenem praestant redivivo flore capillum.
Praeterea niveum poterit depellere crinem,
Resina ex facili cera viscoque coacta.
Ad
rutilam speciem nigros flavescere crines,
Unguento cineris praedixit Tullius auctor.
[14]
Si
praegnans artus captivi soricis edit,
[15]
Dicuntur foetus nigrantia lumina fingi. |
IV. De la teinture
des cheveux.
Il y a des personnes
qui rougissent et s’affligent de vieillir, et qui, lorsque
leurs cheveux commencent à grisonner, voudraient déguiser
sous un dehors trompeur les signes trop précoces, suivant
eux, de la vénérable vieillesse. Le cyprès, la feuille du
lentisque, la graine amère de l’hièble broyée dans du
vinaigre, donnent une teinture très propre à noircir les
cheveux. En se frottant avec de l’huile où l’on a broyé des
vers de terre, on peut encore rappeler sur son front la
fleur de la jeunesse. La résine pétrie avec de la cire et de
la glu donne un onguent qui dissimule la blancheur des
cheveux. Suivant Pline, la cendre a la vertu de rendre
blonds les cheveux noirs. On dit que, si, pendant sa
grossesse, une femme se décide à manger une souris, son
enfant naît avec des yeux noirs. |
V.
Pthiriasi arcendae.
Noxia
corporibus quaedam de corpore nostro
Progenuit natura volens abrumpere somnos,
Sensibus admonitis vigiles incendere curas.
Sed
quis non paveat Pherecydis fata tragoedi,
[16]
Qui
nimio sudore fluens animalia tetra
Eduxit, turpi miserum quae morte tulerunt.
Sylla
quoque infelix [17]
tali languore peresus
Corruit, et foedo se vidit ab agmine vinci.
Saepius ergo decet mordax haurire sinapi,
Vel
nitro ac sale permixtis, acidoque liquore
Laxatis (ut sint simul allia) tangere corpus,
Aut
lacrimis hederae, aut suco perducere cedri,
Quin
etiam furfur mixto medicatur aceto.
Unda
maris lendes capiti deducet iniquas,
Et
quicquid crebri defendit silva capilli. |
V. Contre la maladie
pédiculaire.
La nature semble
avoir suscité a l’homme un ennemi dans son propre corps, en
faisant naître de sa chair des insectes dévorants qui
changent le repos des nuits en longues et cruelles
insomnies: témoin la fin tragique de Phérécyde, qui périt
dans des flots de sueur où fourmillait une vermine immonde;
témoin le malheureux Sylla, qui devint la pâture d’une
multitude d’insectes hideux dont il ne put se défendre. Pour
remédier à cette affreuse maladie, il faut recourir à des
substances mordantes et boire souvent des infusions de
sénevé, ou se frotter le corps avec du vinaigre où l’on a
broyé du nitre, du sel et de l’ail. On peut également
employer en fomentation du suc de lierre ou de cèdre, ou
bien du son mélangé avec du vinaigre. L’eau de mer a aussi
la vertu de débarrasser la tête des lentes et de toute autre
vermine qu’engendre et entretient une épaisse chevelure. |
VI.
Prurigini, papulis ac scabiei arcendis.
Illotus sudor, vel inopia nobilis escae
[18]
Saepe
gravi scabie correptos asperat artus.
Ergo
lutum prodest membris adhibere fricatis,
Quod
facit ex asino saccatus corporis humor.
[19]
Nec
pudeat tractare fimum, quem bucula fudit;
Stercoris ex porco cinerem confundito lymphis,
Sic
scavidum corpus, dextra parcente, foveto;
Proderit ex oleo pulvis, quem congerit alte
Dulcibus ex latebris patiens formica laborum.
Convenit hinc tepido lita tradere corpora soli.
Ferventes papulas oleo curato liquenti,
Aut
acido Baccho miscebis farra lupini
Atque
hinc in calido percurres membra lavacro.
Pruritus autem salsos levat humor aceti,
Sive
maris rabidi sudor cochleaeque minutae,
Quarum contactu perimetur acerba libido. |
VI. Contre les
démangeaisons, les papules et la grattelle.
Souvent le sédiment
de la sueur ou le défaut de bonne nourriture fait naître sur
la peau une grattelle maligne. Si vous voulez la faire
disparaître, ne répugnez pas à vous frictionner avec de
l’urine d’âne ou de la bouse de vache. Vous pouvez aussi
vous fomenter légèrement avec du fumier de porc réduit en
cendres et délayé dans l’eau. La poussière que la fourmi
laborieuse amoncelle dans sa retraite chérie est encore,
mêlée avec de l’huile, un bon spécifique. N’oubliez pas de
soumettre ensuite le corps ainsi frictionné à l’action d’un
soleil tempéré. — L’huile a une vertu adoucissante qui
éteint l’inflammation des papules. On peut aussi pétrir de
la farine de lapin avec du vinaigre, et s’en frotter le
corps dans un bain chaud. — Les démangeaisons qui dévorent
la peau cèdent à l’âcreté du vinaigre ou de l’écume de mer;
l’humeur visqueuse qui sort des limaçons broyés produit le
même effet. |
VII.
Phrenesi et capiti purgando.
Ex
vitio cerebri phrenesis furiosa movetur
Amissasque refert frendens amentia vires,
Sive
calens febris jactatos exedit artus,
Sive
meri gustus, seu frigoris efficit aura.
Conveniet calidis pecudum pulmonibus apte
Tempora languentis medica redimire corona.
Illotis etiam lanis suffire memento.
Cerritum saepe horrendi medicantur odores.
Atque
ideo sanos etiam curarier est par.
Purgatur cerebrum mansa radice pyrethri,
Ungitur et sucis, dederit quos parva sabucus,
Expressusque hederae mandatur naribus humor
Aut
mixtum rutae cerebro instillatur acetum
Non
semper praesens dolor est sanabilis:
[20]
ergo
Cura
magis prodest venturis obvia morbis. |
VII. Contre la
frénésie et les embarras de la tête.
La frénésie a pour
cause une altération du cerveau, et se manifeste par des
transports furieux qui donnent au malade des forces
extraordinaires, mais factices et passagères. Soit qu’elle
ait été provoquée par l’ardeur d’une fièvre violente, ou par
les fumées du vin, ou par le souffle pénétrant d’un vent
glacial, on peut y remédier par l’application un poumon
palpitant d’une brebis sur la tête du malade. La chaleur de
la laine non lavée a la même vertu. Les odeurs fortes et
repoussantes sont aussi d’un puissant effet contre la
frénésie: on peut même s’en servir pour conjurer la folie.
La racine de pyrèthre mâchée purifie le cerveau. Le suc
d’hièble employé en fomentation, et le suc de lierre aspiré
par le nez sont également salutaires. Le vinaigre imprégné
de rue a aussi une vertu qui agit favorablement sur le
cerveau. Il n’est pas toujours aisé de guérir le mal quand
une fois il est venu: aussi la prudence veut-elle qu’on se
tienne en garde contre celui qui peut nous assaillir. |
VIII.
De fluore capillorum et maculis capitis tollendis.
Defluit expulsus morbo latitante capillus,
Si
raro lavitur; seu vis epota veneni
Seu
salamandra [21]
potens nullisque obnoxia flammis
Eximium capitis tactu dejecit honorem.
Nonnunquam variant maculae parvisque parumper
Orbibus aspersum ducit nova vulnera tempus:
Vipereae pellis cinerem his addito morbis
Roboreasve pilas ursino jungito sevo
Vel
testudineo mala praemulceto cruore. |
VIII. Contre la chute
des cheveux et les taches de la tête.
Il n’est pas rare de
voir les cheveux, frappes d’une maladie qui se dérobe à nos
recherches, perdre leur sève et tomber. Cette maladie, qui
prive la tête de son plus bel ornement, peut provenir ou de
la malpropreté, ou de l’action funeste d’un breuvage
empoisonné, ou du contact de ce reptile sur lequel les
flammes n’ont pas de prise, et qu’on appelle salamandre.
Quelquefois aussi le front se couvre de petites taches
rondes, qui bientôt se changent en des affections nouvelles.
Contre cette maladie, il faut employer en fomentation de la
cendre de peau de vipère mêlée avec de la graisse d’ours et
du gland; on peut aussi se fomenter la tête ou le front avec
du sang de tortue. |
IX.
Humoribus et perfrictionibus medendis.
Saepe
ita pervadit vis frigoris ac tenet artus,
Ut
vix quaesito medicamine pulsa recedat.
Si
ranam ex oleo decoxeris, abjice carnem,
Membra fove: parili sanat ratione rigorem
Urticae semen, perceptaque frigora vincit.
Et
cervina potest mulcere medulla rigorem.
Decoctum raphani semen cum melle vorabis.
Sive
fel ursinum tepefacta dilue lympha:
Proderit hoc fotu: seu cassis ostrea testis
Usta
dabit cinerem, qui pro sale sumptus in escis
Discutiet gelidum calefacto vertice virus.
Nonnullus liquidum sumit, mulsumque sinapi
Atque
palato agitat pariter retinensque vomensque.
Allia
nonnulli mandunt, oleive liquore
Perfundunt calido cerebrum, nasique latebras.
Quidam lactucae credunt prodesse sapores:
Curandi modus hic et suavis et utilis idem est. |
IX. Contre le coryza
et le refroidissement.
Souvent le froid
pénètre et saisit si fortement les membres, qu’il est très
difficile d’y rappeler la chaleur. Faites bouillir alors
dans de l’huile une grenouille, que vous retirerez quand
elle sera cuite; puis frottez-vous le corps avec l’huile
ainsi préparée. La graine d’ortie peut avantageusement
remplacer la grenouille et guérit infailliblement les
maladies causées par le refroidissement. Des frictions
faites avec de la moelle de cerf peuvent aussi remédier à la
roideur des membres. L’expérience conseille encore de boire
une décoction de miel et de graine de raifort, on d’employer
en fomentation du fiel d’ours délayé dans de l’eau tiède. La
cendre de coquille d’huître, employée en guise de sel dans
les aliments, a la vertu de guérir le coryza en ramenant la
chaleur a la tête. Il y en a qui se gargarisent avec un
mélange de vin miellé et de moutarde, d’autres mâchent de
l’ail, ou se frottent le front et l’intérieur des narines
avec de l’huile tiède. La laitue est aussi regardée comme un
bon spécifique: c’est un remède efficace et agréable en même
temps. |
X.
Elephantiasi propellendae.
Est
elephas morbus [22]
tristi quoque nomine dirus,
Non
solum turpans infandis ora papillis,
Sed
cita praecipitans funesto fata veneno
Huic
erit adversus cedri de cortice sucus
Mustellaeque cinis, vel fusus sanguis ab illa.
Nonnulli dixere serum prodesse bibendo.
Mentastri folium potu apposituque salubre est.
Nec
frustra bulbos et sulfura jungis aceto
Praeterea nitrum debes cum melle jugatum
Spargere lacte bovis, varias sic ungere frontes.
Cerussam, et chartam, quam gens Aegyptia mittit,
[23]
Tunde
simul misceque oleum, quod flore rosarum
Conditum est: line sic faciem, et sic redde salutem. |
X. Contre
l’éléphantiasis.
Il est une maladie
dont le nom même est terrible: c’est l’éléphantiasis. Elle
se manifeste par d’horribles pustules sur le visage, et
emporte en peu de temps le malheureux qui en est atteint.
Cependant on peut en arrêter les funestes ravages en prenant
du sac d’écorce de cèdre, de la cendre de belette ou du sang
chaud de cet animal. Le petit-lait passe encore pour un
breuvage salutaire. La feuille de menthe sauvage, employée
soit en boisson, soit en fomentation, n’est pas sans
efficacité. On peut aussi se servir d’une combinaison de
vinaigre d’oignons et de soufre. Fomentez encore le visage
ulcéré du malade avec du nitre, du miel et du lait de vache
mêlés ensemble. Enfin, broyez de la céruse avec des feuilles
de papyrus, plante qui nous vient d’Egypte, et mêlez-y de
l’huile de rose: cette mixtion, employée de la même manière,
a une vertu dont vous pouvez bien espérer. |
XI.
Cutis et faciei vitiis propellendis.
Invida si maculat faciem lentigo decoram
Nec
prodesse valent naturae dona benignae,
Erucam atque acidum laticem simul illine malis;
Proderit et bulbus mellis dulcedine victus,
Crudave dulcacido miscebis rapa liquori.
Sanguine vel leporis morbus delebitur oris.
Frons
salicis cum flore suo contrita medetur.
Saepiolae cineres ex ossibus omnia tollunt.
Cygneos adipes hilari misceto Lyaeo,
Omne
malum propere maculoso ex ore fugabis.
Horrebit si livor atrox aut nigra cicatrix,
Attrito sapone genas purgare memento,
Rugarum sulcos lentisci mastice tendens.
Si
vero vitium est quod ducit ad impete nomen.
[24]
Hoc
matutina poteris cohibere saliva
Seu
folio platani, quod mansum mane vorabis.
Foeda
fluunt curvi quae purgamenta cameli
Urentur, cineremque dabunt, jungentur aceto
Mascula thura [25]
simul, divinaque cura valebit.
[26]
|
XI. Contre les
infections de la peau et du visage.
Le visage est
quelquefois marqué de taches de rousseur, qui semblent lui
envier les dons de la bienveillante nature, et rendent la
beauté en quelque sorte inutile. On peut y remédier en se
frottant les joues avec du vinaigre où l’on a broyé de la
roquette. L’âcreté de l’oignon tempérée par la douceur du
miel, ou le jus d’une rave crue, mêlé a de l’oxymel, peut
aussi faire disparaître ces taches. Le sang du lièvre a une
vertu semblable. La feuille et la fleur du saule, broyées
ensemble, sont également efficaces. La cendre des os du
poisson qu’on appelle sèche guérit toutes les affections de
la peau et la graisse de cygne, combinée avec la liqueur
réjouissante de Bacchus, rend incontinent au visage sa
fraîcheur première. — S’agit-il de ranimer un teint livide
ou de faire disparaître de noires meurtrissures, il faut se
frotter les joues avec du savon broyé, et remplir de suc de
lentisque les sillons formés par les rides. Si le visage est
ulcéré par des dartres, la salive, au matin, est une
fomentation salutaire. Mangez encore, à jeun, des feuilles
de platane; ou bien brûlez les excréments du chameau au dos
recourbé, et mêlez-en la cendre avec du vinaigre et de
l’encens: cette mixtion appliquée sur la peau est d’une
merveilleuse efficacité. |
XII.
Aurium vitiis succurrendis.
Quum
saevus teneras dolor alte sauciat aures,
Fraxinea in flammis fundit quem talea sucum
Instilles, sive obscenos ex virgine rores,
[27]
Aut
sucum ex folio, dederit quem populus alba:
Saepe
chelidoniae rapidum sociatur acetum
Adjunctoque nitro procedit cura salubris.
Mentastri liquor expressus conducere fertur.
Infectum violis oleum bene consulit auri.
Annosa rubros si legeris arbore vermes,
Ex
oleo tere, sic tepidos infunde dolenti.
Si
vero obstrusa sensus remoretur in aure,
Lumbricos terrae sevumque ex ansere rauco
Excoque: sic veterem poteris depellere morbum.
Felque bovis surdis etiam prodesse loquuntur,
Si
jungas olidae grave quod minxere capellae.
Si
vero incautas animal penetraverit aures,
Proderit admixto pavidi fel muris aceto.
At si
lympha nocens pervaserit, anseris aptus
Immittetur adeps, caeparum non sine suco:
Qui
gravis est oculis, sensum tamen auribus auget.
Vis
et Phoebigenae [28]
divinam discere curam,
Si
qua vel annosis confecta doloribus auris,
Allia
tum septem numero, septemque lupinos
Cretaceam dabis in testam: tum Delphica frondis
Addatur, mixto totum fervescat aceto,
Doctus eris tepidos illinc immittere rores. |
XII. Contre les maux
d’oreilles.
Pour apaiser ces
douleurs cruelles qui affectent l’organe si sensible de
l’ouïe, il est bon d’épancher dans l’oreille soit du suc que
distille un rameau de frêne exposé a l’action du feu, soit
de l’urine d’une jeune fille encore vierge, soit enfin du
suc de la feuille du peuplier blanc. Le vinaigre mordant
mêlé avec de la chélidoine et du nitre n’est pas moins
salutaire. Le jus de la menthe sauvage passe aussi pour un
bon spécifique. L’huile imprégnée de violette est un calmant
qu’il ne faut pas oublier. Si vous pouvez vous procurer de
ces vers rouges qu’on trouve sur les vieux arbres, broyez-en
quelques-uns dans de l’huile tiède; puis, introduisez-les
dans l’oreille malade. -— Le sens de l’ouïe devient
quelquefois dur et obtus. Pour remédier à cette surdité, que
le temps ne fait qu’accroître, on peut employer des vers de
terre cuits dans la graisse de l’oie au chant rauque. Le
fiel de bœuf, mêlé avec de l’urine de chèvre, est un remède,
dit-on, non moins salutaire. — Un animal s’est-il
furtivement glissé dans l’oreille, le fiel du rat peureux,
mêlé avec du vinaigre, dissipera la douleur. S’y est-il
introduit un liquide nuisible, on se trouvera bien d’enduire
le conduit auditif de graisse d’oie, mêlée au suc d’oignon
car ce bulbe, si nuisible à la vue, donne à l’ouïe plus de
finesse. — L’art divin d’Esculape enseigne encore un remède
fort efficace contre les douleurs chroniques de l’oreille.
Prenez sept gousses d’ail et autant de lupins, que vous
mettrez dans un vase de terre cuite avec des feuilles de
laurier; puis, faites bouillir le tout dans du vinaigre, et
versez dans l’oreille quelques gouttes de cette décoction. |
XIII.
Oculorum dolori mitigando.
Summa
boni est alacres homini contingere visus,
Quos
quasi custodes defensoresque pericli
Prospiciens summa natura locavit in arce:
Sic
tamen ut nullos paterentur desuper ictus,
Atque
supercilio pavidi tegerentur opaco.
Sed
dolor immeritum lumen [29]
si forte lacessit,
Lana
madens oleo noctu connectitur apte,
Viventisve nepae [30]
lumen gestatur amicum.
Ex
folio caulis cineres, confractaque thura
Et
laticem Bacchi foetae cum lacte capellae
Desuper induces, atque una nocte probabis.
Hyblaei mellis sucus cum felle caprino
Subveniunt oculis dira caligine pressis.
Vettonicae mansus siccabit lumina succus.
Si
tenebras oculis obducit pigra senectus,
Expressae marathro guttae cum melle liquenti
Detergere malum poterunt, vel vulturis atri
Fella,
chelidonio fuerint queis gramine mixta,
Haec
etiam annosis poterunt succurrere morbis.
Fel
quoque de gallo mollitum simplice lympha
Exacuet puros, dempta caligine, visus:
Sive
columbarum fimus admiscetur aceto,
Seu
fel perdicis parili cum pondere mellis.
Vina
chelidoniae simili ratione jugantur
Efficiuntque suo praeclaros unguine visus,
Aspera quin etiam mulcent et rupta reducunt.
Si
genus est morbi, miserum quod lumen adurit,
Hic
calor infuso mitescit lacte canino.
Anguibus ereptos adipes aerugine misce,
Hi
poterunt ruptas oculorum jungere partes.
Si
vero horrendum ducent glaucomata plumbum,
Spiritus alterius prodest, qui grana cumini
[31]
Pallentis mandens visus exalat in ipsos.
Si
tumor insolitus typho se tollat inani,
Turgentes oculos vili circumline coeno. |
XIII. Contre les maux
d’yeux.
Le don le plus
précieux que la nature puisse faire à l’homme est une bonne
vue. Les yeux ont été placés, comme sentinelles du corps,
dans un lieu éminent, pour voir de haut et au loin, à l’
abri de toute surprise, sous la sauvegarde d’un épais
sourcil. Si cependant cet organe sacré vient à recevoir
quelque atteinte, appliquez-y pendant la nuit un flocon de
laine imbibé d’huile, ou les yeux arrachés à une écrevisse
vivante. Vous pouvez encore vous servir de cendre de
feuilles de chou et d’encens broyé dans du vin et du lait
d’une chèvre qui vient de mettre bas. Le miel d’Hybla, mêlé
avec du fiel de chèvre, dissipe les tristes ténèbres des
yeux. La bétoine mâchée donne un suc qui en sèche les
humeurs. L’obscurcissement causé par le grand âge cède à des
fomentations faites avec du suc de fenouil mêlé de miel pur,
ou avec du fiel de vautour noir, dans lequel on a broyé de
la graine de chélidoine. Ce remède sera aussi efficace dans
les affections chroniques des yeux. Le fiel de coq délayé
dans de l’eau pure a de même la vertu de donner à la vue
plus de puissance après l’avoir débarrassée des brouillards.
On peut encore employer un mélange de fiente de la colombe
et de vinaigre, ou le fiel de la perdrix combiné avec une
égale dose de miel. Le vin imprégné de suc de chélidoine, et
employé en fomentation, n’est pas moins efficace; il calme
même les douleurs et cicatrise les plaies de cet organe. —
Le lait de chienne, injecté dans les yeux affectés
d’inflammation, calme la cuisson causée par la chaleur qui
les brûle. La graisse de serpent mêlée avec de la rouille de
cuivre a la vertu de cicatriser les blessures de l’œil. Si
l’organe de la vue est atteint de cette maladie où l’humeur
cristalline de l’œil devient livide et plombée, rien n’est
plus efficace que l’haleine d’une personne qui a mâché de
cette plante qui rend pâle et qu’on nomme cumin. S’il s’agit
de remédier à quelque tumeur, un peu de vile boue appliquée
sur l’œil malade la fera disparaître. |
XIV.
Dentium vitio et oris foetori medendo.
Haud
facile est acrem dentis tolerare dolorem,
Quo
magis est aequum medicam pernoscere curam.
Cum
Baccho violas incoxeris, ore teneto.
Mansus item prodest sucis oleaster acerbis:
Hinc
oscedo fugit, linguae quoque vulnera cedunt.
Cum
vino piper et nitro tepidum inde dolenti.
Saepe
chelidoniae suco vel lacte capellae
Sanescunt dentes, aut tauri felle juvantur.
Aut
acidi latices clauso volvuntur in ore.
Manditur apta rubus gingivis et bona labris.
Lentiscus myrtusque emendant oris odorem.
Quod
vero assumpsit nomen de dente fricando,
Cervino ex cornu cinis est, aut ungula porcae
Torrida, vel cinis ex ovis, sed non sine vino,
Muricis aut tosti, vel bulbi extincta favilla.
Ambitiosa putas, sunt ista salubria cunctis.
[32]
Exesos autem dentes si forte quereris,
Ure
fimum muris, patulis et hiatibus adde;
Vel
cinerem dentis cervini extinguere aceto
Convenit atque cavis immittere partibus apte.
Prodest et pulvis lumbrici corpore tosto.
Ora
ambusta cibo sanabis lacte canino.
Saepe
etiam gelida gingivas collue lympha,
Dentibus ut firmum possis servare vigorem.
Si
vero infandum proserpit ad intima vulnus,
Permisceto salem parili cum pondere turis:
Hinc
tractato locum, miram experiere medelam.
Aut
tu sume pilam, quae caudis haeret ovinis,
Haec
siccata dabit molles et fracta farinas;
Hujus
et attractu tetrum mulcebitur ulcus. |
XIV. Contre les
affections des dents et la mauvaise haleine.
Il y a peu de maux
plus insupportables que le mal de dents, et, s’il est un
remède intéressant à connaître, c’est celui qui peut y
mettre un terme. Gargarisez-vous donc avec une décoction de
violettes dans le vin. Le suc acerbe de l’olivier sauvage
est aussi un bon remède: il arrête les bâillements et
cicatrise les plaies de la langue. On peut encore mettre sur
la partie douloureuse du vin assaisonné de nitre et de
poivre à la saveur brûlante. Le suc de chélidoine, le lait
de chèvre, le fiel de taureau, sont également d’excellents
spécifiques contre les maux de dents, aussi bien que les
gargarismes de vinaigre. La ronce mâchée est bonne pour les
gencives et pour les lèvres. Le lentisque et le myrte
purifient l’haleine. La poudre connue sons le nom de poudre
dentifrice, et ainsi appelée parce qu’elle sert à frotter
les dents, se fait avec de la cendre de come de cerf, ou des
pieds de truie brûlés, ou de la cendre de coquilles d’œufs
délayée dans un peu de vin. On la fait encore avec du murex
calciné ou de l’oignon brûlé. On croit qu’on ne peut se
guérir qu’à prix d’argent; mais les remèdes les plus
simples, comme ceux que j’indique, sont en même temps les
plus efficaces contre toutes sortes d’affections. — Si l’on
vent arrêter la carie, il faut introduire dans le creux de
la dent gâtée de la cendre de fiente de rat. On peut se
servir encore de la cendre de dent de cerf refroidie dans du
vinaigre, ou de la poudre qui résulte de la combustion des
vers de terre. Le lait de chienne a in vertu de cicatriser
les brûlures de la bouche causées par des aliments trop
chauds. — Ayez-soin de vous laver souvent les gencives avec
de l’eau froide: c’est le moyen de conserver vos dents en
bon état. — Si la dent est atteinte jusque dans sa racine,
traitez la partie malade avec du sel mêlé à une égale
quantité d’encens, et vous éprouverez à l’instant un
soulagement merveilleux. Prenez encore un de ces globules
fangeux qui se forment à la queue des brebis; desséchée et
réduite en poudre, cette matière apaisera, par son contact,
l’inflammation de la plaie. |
XV.
Uvae faucibus collo et collo medendis.
Aegrescunt tenerae fauces, cum frigoris atri
Vis
subiit, vel cum ventis agitabilis aer
Vertitur, atque ipsas flatus gravis inficit auras,
Vel
rabidus clamor facto cum forte sonore
Plenum radit iter; sic est Hortensius
[33]
olim
Absumptus: causis etenim confectus agendis
Obticuit, cum vox domino vivente periret
Et
nondum exstincti moreretur lingua diserti.
Ergo
autem studio quaeres inhibere dolorem.
Simplicibus lymphis confunditur aerium mel,
[34]
Additur excussus nivea similagine furfur,
Decocta haec clauso simul exercentur in ore.
Praeterea fauces extrinsecus unguere prodest
Ursino et tauri sevo, cerisque liquatis,
Omnia
quae geminis aequabis lancibus ante.
Disce
etiam miram ex vili medicamine curam.
Attiaco melli jungas agreste papaver,
Decoctumque simul mandes, mansumque vorabis.
Crinitae porri radices quinque coquantur,
Hinc
aqua non fervens volvatur fauce sonora,
Nec
tamen in stomachum descendat gutta patentem.
Si
vero afflictam languor dejecerit uvam,
Tunc
horas aliquot pronus recubare memento:
Aut
illam pulvis tosti relevabit anethi,
Aut
cinis ex cochlea, vel torrida brassica flammis.
Verum
angina mixtum sale poscit acetum,
Quod
refert clauso versatum agitare palato. |
XV. Contre les
affections de la luette, du gosier et du cou.
Les parois délicates
du gosier peuvent être altérées, ou par le froid, ou par le
grand vent, ou par quelque vapeur pestilentielle. La voix
peut aussi, par des efforts immodérés, occasionner des
lésions dans la partie si délicate du larynx. C’est ce qui
est arrivé à Hortensius: à force de
plaider, il fut réduit au silence; sa voix s’éteignit, et
l’orateur mourut avant l’homme. Vous qui cherchez, qui
demandez un remède, apprenez ce que l’art enseigne en pareil
cas. Faites bouillir un peu de miel ce présent de l’air, et
de son de froment; puis gargarisez-vous avec cette
décoction. En outre, oignez-vous extérieurement le gosier
avec de la graisse d’ours et de taureau et de la cire
liquéfiée, le tout mêlé ensemble à doses égales. Voici
encore un remède fort simple, mais d’une merveilleuse
efficacité. Faites bouillir du miel de l’Attique avec des
pavots sauvages; puis, avalez cette mixtion après l’avoir
bien mâchée. Faites cuire encore cinq racines chevelues de
poireau, et gargarisez-vous avec de l’eau attiédie dans
laquelle aura bouilli le poireau, en prenant garde toutefois
d’en laisser pénétrer la moindre goutte dans l’estomac. — Si
vous voulez remédier à la chute de la luette, tenez-vous
couché sur le ventre pendant quelques heures. La cendre
d’aneth, ou de coquilles de limaçon, ou de chou, sera un
remède non moins efficace. L’inflammation du gosier, qu’on
appelle angine, cède à un gargarisme de vinaigre dans lequel
on a fait dissoudre du sel. |
XVI.
De rigore cervicis.
At si
cervices, durataque colla rigebunt
(Mira
loquar), geminus mulcebitur unguine poples,
Hinc
longum per iter nervos medicina sequetur
[35].
Anseris aut pingui torpentia colla fovebis.
Illinitur valido multum lens cocta in aceto,
Aut
caprae fimus et bulbi, aut cervina medulla
Hoc
etiam immotos flectes medicamine hervos.
Quos
autem vocitant tolles [36],
attingere dextra
Debebis, qua grillus erit pressante peremptus
[37] |
XVI. Contre le
torticolis.
Pour remédier au
torticolis, il faut (le remède paraîtra étrange) se frotter
les jarrets avec de la graisse. L’effet salutaire de cette
friction remontera jusqu’au siège du mal. On peut aussi se
frotter la partie malade avec de la graisse d’oie. La
raideur du cou cède également à une fomentation faite avec
des lentilles bien cuites dans du fort vinaigre, ou avec du
fumier de chèvre et des oignons, ou encore avec de la mode
de cerf. Ce dernier remède sera également bon pour rendre
aux muscles paralysés leur ancienne souplesse. Il sera bon
enfin de toucher les amygdales avec les doigts mêmes dont on
vient d’écraser un grillon. |
XVII.
Tussi et choleribus medendis.
Noxia
si cholerum penitus saevire venena
Perspicies, cocta lactucae fronde levabis,
Proderit et caules assumere saepe madentes.
Interdum fauces tussi quatiuntur atroci,
Allia
tum sumes decocta, et melle peruncta,
Semina vel raphani permixto dulcia mella.
Aut
si fraxinea semen de fronde revellis,
Interiora vora vetitus contingere dente.
[38]
Ovum
melle teres domitum ferventibus undis
Marrubiumve potens, haec faucibus optima sumes,
Frenabisque gravem facili medicamine tussim. |
XVII. Contre les
glaires et la toux.
La feuille de laitue
cuite a une vertu purgative à laquelle doivent recourir les
personnes qui sont tourmentées par les glaires. Elles se
trouveront bien aussi de manger souvent du chou bouilli. —
Si vous êtes atteint d’une toux violente, prenez une
décoction d’ail et de miel. Tâchez encore de vous procurer
des baies de frêne, que vous avalerez sans les mâcher.
Pétrissez un œuf dur, ou du marrube, que ses propriétés
médicales ont rendu célèbre, avec du miel, et vous
obtiendrez un médicament très bon pour le gosier, et la toux
la plus grave cédera a ce remède facile. |
XVIII.
Digestioni et stomacho medendo.
Qui
stomachum regem totius corporis esse
Contendunt, vera niti ratione videntur.
Hujus
enim validus firmat tenor omnia membra:
At
contra ejusdem franguntur cuncta dolore.
Quin
etiam (nisi cura juvat) vitiare cerebrum
Fertur, et integros illinc avertere sensus.
Lactucae semen nigrae quod lignea pila
Triverit, admixto jejunus sumito melle,
Sed
cochlear trinum gustu tibi sufficit uno.
Aut
tritum semen raphani mulsumque juvabit;
Sive
duae partes absinthi, et tertia rutae
Decoctis potantur aquis, siliquaeque madentes,
[39]
Semina vel marathri foetae cum lacte capellae;
Pulegium quoque decoctum curabit amice.
Et
potu et fotu stomacho conducit acetum.
Seu
cochleas undis calefactas ac prope victas
Suppositis torre prunis, vinoque garoque
Perfusas cape; sed prodest magis esse marinas.
At
male digestis si crapula saeviet escis,
Ex
pipere, et calida florem de rore marino
Ebibe:
seu salibus piper adde [40]
et tenue cuminum, [41]
Quae
coctis junges epulis et rapta vorabis.
[42]
Aut
cubitum pergens sucum cape tristis aceti.
Ventriculis mergi raptus sal tostus et ustus
Tosto
pane super, piperis quoque pulvere multo
Miscetur, capies divinum munus in istis.
Proderit hoc stomacho, victas et concoquet escas,
Grana
peregrini piperis [43]
diffindito quinque,
Nicolao molli [44]
quae mane inserta capesses. |
XVIII. Contre les
digestions difficiles, et autres affections de l’estomac.
C’est avec raison
qu’on a dit que l’estomac est le roi de tout le corps. A son
état de santé semble, en effet, se rattacher celui de tous
les membres; s’il est malade, au contraire, tout languit
avec lui. Sa défaillance, si l’on n’y remédie, se communique
même au cerveau et aux facultés intellectuelles. Broyez dans
un mortier de bois de la graine de laitue noire, mêlez-y du
miel, et prenez cette mixtion à jeun, mais sans excéder
trois cuillerées. La graine de raifort broyé dans du vin
miellé est aussi un bon spécifique. Faites encore bouillir
dans l’eau deux parties d’absinthe avec une de rue, et vous
obtiendrez une décoction très salutaire. Le fenugrec on la
graine de fenouil bouillie dans le lait d’une chèvre qui
vient de mettre bas est également efficace. Une décoction de
pouliot n’est pas moins bonne. Le vinaigre, soit en boisson,
soit en fomentation, est favorable à l’estomac. Faites aussi
bouillir dans l’eau, jusqu’à cuisson presque parfaite, des
limaçons, que vous placerez ensuite sur des charbons
ardents; puis avalez-en la cendre, imbibée de vin et de
saumure de garus. Les limaçons de mer sont les plus
efficaces. — Si l’estomac souffre d’une indigestion, il faut
boire de l’écume de mer mêlée avec de l’eau chaude et du
poivre. Vous pouvez encore combiner l’écume de mer avec du
poivre et du cumin, puis avaler le tout, après l’avoir versé
dans quelque aliment cuit. Il n’est pas inutile, non plus,
avant de se mettre au lit, de boire un peu de fort vinaigre.
Si vous pouvez vous procurer du sel que contient le ventre
du plongeon, faites-le brûler sur du pain rôti, mêlez-y une
forte quantité de poivre pulvérisé, et vous obtiendrez un
remède d’une efficacité merveilleuse. Un autre moyen de
faciliter la digestion, c’est de manger, le matin, une datte
où l’on a introduit cinq grains de poivre fendus. |
XIX.
Felli et pthisi arcendis.
Lutea
si crescunt, et cunctis noxia fella,
Allia
parva novem, piperis tot permole grana,
Quae
cyatho diluta gari mandesque bibesque:
Haec
iterum septena capis, post denique quina.
Praeterea caules, frondet si parva sabucus
[45]
Decoctos sale permisces, ac jungis olivo:
Tum
capis, ac tali auxilio fella horrida purgas.
Prosunt et pelagi latices, quos pondere justo
Dulcibus associas lymphis, mellique liquenti.
Et
niveus prodest ex ubere sucus asellae,
Si
tepido vinum infundas, ac mella piperque.
At
vomitum radix narcissi pota movebit.
[46]
Si
vero pthisis annoso sedet improba morbo,
Intritas vino cochleas hausisse juvabit.
Proderit et veteris sevi pila sumpta suilli,
Carne
asinae sevoque caprae medicina salubris. |
XIX. Contre la bile
et la phtisie.
Pour chasser la bile
noire, ce poison intérieur qui altère la santé chez tous les
hommes, broyez neuf petites gousses d’ail et autant de
grains de poivre, que vous délayerez ensuite dans une tasse
de saumure de garus; puis avalez le tout, après l’avoir
mâché. Prenez encore deux doses de ce médicament, en
réduisant à sept, puis à cinq, le nombre des gousses d’ail
et des grains de poivre. Une décoction de tiges d’hièble,
d’huile et de sel, est encore un excellent spécifique contre
la bile. Le miel délayé dans de l’eau de mer mêlée avec
partie égale d’eau douce n’est pas moins efficace. Vous vous
trouverez bien encore de l’emploi du lait de chèvre, mêlé,
tiède encore, avec du vin, du miel et du poivre. La racine
de narcisse provoque les vomissements. — Si l’on veut
remédier à une phtisie invétérée, on fera bien de boire du
vin où l’on aura broyé des limaçons, ou d’avaler une boule
de vieille graisse de porc. La chair d’ânesse et la graisse
des chèvres sont aussi très efficaces. |
XX.
Mammis sanandis, vel stringendis.
Ubera
fecundo valde lactentia suco
Saepe
sibi noxae nimium manando fuerunt:
Faece
igitur valida duri reprimentur aceti.
Post
partum tumidas injuste assurgere mammas
Interdum aspicies: harum mala commemoratur
Murinus fimus ex pluvio sedare liquore.
Sin
autem clausas penitus dolor angit acerbus,
Lumbricis terrae turgentes unge corymbos.
Si
castigatas studium est praestare mamillas,
Ex
hedera sertis ambas redimire memento,
Protinus et raptas fumis mandare coronas:
[47]
Anseris aut sevum pariter cum lacte tepenti
Aut
ovum illinito, tulerit quod garrula perdix.
Praeterea pluvio decocta papavera rore
Haerescant, multis post dissolvenda diebus.
Vis
et Phoebigenae caelestia sumere dona,
Ubera
cum tetris laniata doloribus horrent?
Navis
ramentum [48]
et quae nomine prassion herba est
Et
quae vulgari sermone insana vocatur,
Graecos hyoscyamon [49]
propria scito dicere lingua
Nec
non et calami radix, lapathique legumen
Mixta
dabunt miras, experto crede, medelas. |
XX. Contre les
affections et l’affaissement des mamelles.
Souvent la
surabondance du lait donne aux mamelles un développement
pernicieux ; mais le sédiment du vinaigre a une force
astringente qui réprime cette exubérance. Après
l’accouchement, les mamelles se gonflent quelquefois d’une
manière extraordinaire: l’eau de pluie où l’on a délayé de
la fiente de rat, passe, en pareil cas, pour un bon
spécifique. S’il s’agit de remédier à ces douleurs aiguës
que cause intérieurement l’obstruction des mamelles, il faut
frotter les mamelons avec des vers de terre. Les femmes qui
tiennent à avoir le sein bien proportionné devront
s’entourer les mamelles de guirlandes de lierre, qu’elles
jetteront ensuite au feu sitôt qu’elles les auront retirées,
ou se frotter soit avec de la graisse d’oie mêlée à du lait
tiède, soit avec un œuf de perdrix, cet oiseau au bruyant
caquetage. Elles peuvent s’appliquer sur le sein des pavots
cuits dans de l’eau de pluie, qu’elles y laisseront pendant
plusieurs jours, jusqu’à ce qu’ils soient en quelque sorte
fondus. — Voulez-vous suivre les conseils divins du fils
d’Apollon et employer les remèdes qu’il enseigne contre les
douleurs aigues du sein? prenez de la raclure de navire, des
feuilles de prasium, et de cette plante vulgairement connue
sous le nom d’herbe folle, mais que les Grecs nomment
hyoscyamon, de la racine de roseau, et de l’oseille mêlez le
tout ensemble, et vous aurez un spécifique dont l’usage m’a
prouvé l’efficacité. |
XXI.
Rejectioni cibi aut sanguinis restringendae.
Si
stomachus nondum concoctas expuit escas
Et
magis atque magis vitium removendo valescit,
Allia
caedemus, tetrumque trahemus odorem.
Sin
etiam rutilus fertur de pectore sanguis,
Sorbitio menthae, raphanus vel cocta juvabit.
Saepe
lapis teritur (specularem nomine dicunt)
[50]
Et
mixtis hauritur aquis, sistitque cruorem.
Uritur interdum raptus de subere cortex,
Et
cinis ex calido prodest epota Lyaeo,
Ovorum cinis, aut cochlearum, aut denique melis;
Aut
mansus salicum fructus prodesse putatur,
Aut
platani pilulas acri infundemus aceto:
Nullus erit sanguis, quem non cibus iste moretur.
|
XXI. Contre les
vomissements où l’on rend, soit les aliments, soit le sang.
Si l’estomac ne peut
supporter les aliments, et, qu’à force de vomir il devienne
de plus en plus incapable de digérer, il faut couper une
gousse d’ail et en aspirer l’odeur acre et pénétrante. Si
c’est le sang qu’on vomit, on devra boire de la menthe ou
manger du raifort cuit. On parvient encore à arrêter
l’hémorragie en buvant de l’eau dans laquelle on a mis du
talc préalablement broyé. L’expérience a découvert la même
vertu dans la cendre d’écorce de chêne délayée dans du vin
tiède, ainsi que dans les œufs, les limaçons, ou enfin le
blaireau brûlé. On prétend aussi qu’il est bon de manger des
baies de saule, ou de boire du vinaigre où l’on a infusé des
baies de platane; il n’est pas d’hémorragie qui ne cède à la
vertu de ces remèdes. |
XXII.
Jecoris et lateris vitiis medendis.
Si
mollis jecoris fibras dolor hauriet acer,
Protinus ex mulsa potanda elelisphagus herba est:
Sumitur aut semen, quod fraxinus alta profudit,
Vulturiive jecur, vel jus perdicis apricae.
[51]
Praeterea simili drachma pix dura, piperque
Franguntur; sic in mollito pulvere juncta
Egelidis miscentur aquis, recreantque bibentem.
Absinthi quoque decocti potabitur humor.
Si
latus immeritum morbo temptatur acuto,
Accensum tinges lapidem stridentibus undis,
Hinc
bibis: aut aceris radicem tundis, et una
Cum
vino capis: hoc praesens medicamen habetur.
Quid
referam multis composta Philonia rebus?
[52]
Quid
loquar antidotus variis? quis ista requirat?
At
nos pauperibus praecepta feramus amica.
Nec
non et jecoris quaeretur fibra lupini
Jungenturque simul costum, foliumque piperque,
[53]
Quae
Diluta mero dantur potanda Lyaeo.
Est
et vis morbi, quod telum commemoratur,
[54]
Cum
subito dolor insanus furit incitus ictu:
Persicon huic potum e nuce traditur interiore;
Quae
mihi cura satis casu monstrante probata est.
|
XXII. Contre les
affections du foie et du côté.
Pour remédier aux
douleurs de foie, douleurs d’autant plus aiguës qu’elles ont
pour siège une partie du corps tendre et délicate, il faut
boire du vin miellé où l’on a infusé de la sauge. On peut
aussi faire usage des baies de frêne, de foie de vautour, et
du jus de la perdrix, amie du soleil. En broyant une drachme
de poix dure avec égale quantité de poivre, dont vous
délayerez ensuite la poudre dans de l’eau froide, vous
obtiendrez encore une boisson très efficace. Une décoction
d’absinthe n’est pas moins salutaire. — Si le côté est le
siège d’une douleur que rien ne semble avoir provoquée,
l’expérience conseille de boire de l’eau où l’on a plongé et
fait refroidir une pierre rougie au feu, ou du vin dans
lequel on a broyé de la racine d’érable. Je ne parlerai pas
de ces médicaments recherchés, et qui se composent d’une
infinité d’ingrédients, comme celui qu’on appelle
philonia: qui pourrait y
recourir ? mes conseils s’adressent aux pauvres dont
j’ambitionne l’amitié. Je conseillerai donc simplement de
faire cuire du foie de loup avec du costus, du folium et du
poivre, et de boire ensuite ce mélange délayé dans du vin
pur. — Le côté est aussi sujet à une affection soudaine et
très violente qu’on appelle trait: l’amande du noyau de
pêche donne une boisson qui est très bonne contre cette
maladie, comme l’expérience me l’a démontré. |
XXIII. Spleni curando.
Quando lien tumido circumligat ilia vinclo,
Et
plena splenis demonstrant membra rigore,
Mollibus ex hederae tornantur pocula lignis,
[55]
Hinc
trahet assuetos aeger quoscumque liquores:
Aut
viridis coctorum holerum potabitur unda.
Proderit exsucto fluvialis hirudo cruore,
Sive
myrica potens, seu ros cum pane marinus;
Aut
hederae sucus potu apposituque juvabit.
Nec
non intactam ferro quam videris alnum,
Huic
liber eripitur ferro sine, decoquiturque,
Donec
victarum pars tertia subsit aquarum.
Hinc
medico potu pulsus dolor omnis abibit.
Nonnulli memorant consumi posse lienem,
Ervum
si semper jejuno sumpseris ore.
Arida
ficus item fervente domatur aceto
Et
trita inlinitur, vel splen apponitur haedi.
Marrubium in vino potum prodesse loquuntur,
Praeterea piper, ac nepetae cum flore et anethum
Capparis atque apium buglossaque jungitur una:
Horum
decoctos latices potare salubre est.
Pulegium, abrotonum nitida cum mastiche coctum
Ac
thymbrae speciem, quam commemorant cephaloten,
Praedixit spleni Deus Idae
[56]
posse mederi.
Dulcia Plautus ait, [57]
grandi minus apta lieni.
Splen
tumidus nocet, et risum tamen addit ineptum,
Ut
mihi Sardois videatur proximus herbis,
[58]
Irrita quae miseris permiscent gaudia fatis.
Dicitur exsectus faciles auferre cachinnos,
Perpetuoque aevo frontem praestare severam.
|
XIII. Contre les
affections de la rate.
Quelquefois la rate
se gonfle, et cette enflure se manifeste par la tension des
parties voisines. Il faut alors se servir, à table, d’une
coupe faite avec de bois de lierre, ou boire l’eau verdâtre
d’une décoction de légumes. On peut encore s’appliquer sur
le côté ou une sangsue, pour débarrasser la rate du sang qui
l’engorge, ou du tamarin à la sève puissante, ou du pain
imbibé d’eau de mer. Le jus de lierre, soit en boisson, soit
en fomentation, est salutaire. Le liber, arraché, sans le
secours du fer, à un aune que la cognée du bûcheron n’a
jamais touché, donne une boisson singulièrement efficace;
mais il faut avoir soin de la faire bouillir jusqu’à ce que
l’eau soit réduite au tiers. On prétend que l’ers mange à
jeun est également propre à dissiper le gonflement de la
rate. On fera bien aussi de se fomenter avec une figue sèche
qu’on a fait bouillir dans du vinaigre, ou avec de la rate
de chevreau. Le vin imprégné de marrube est une boisson qui
passe pour avoir quelque efficacité. On conseille aussi
comme une boisson salutaire une décoction de poivre, de
fleur de pouliot sauvage, d’aneth, de câpres, d’ache et de
buglose. Suivant l’oracle du dieu de l’Ida, le pouliot,
l’aurone, le sac luisant du lentisque, et cette espèce de
thym qu’on appelle céphalote, donnent une décoction qui
remédie particulièrement aux affections de la rate. Plaute
prétend que les substances douces ont peu d’efficacité
contre les affections de cette partie du corps. Le
gonflement de la rate, malgré la douleur qu’il cause,
provoque un rire stupide, semblable à celui auquel
s’abandonnent, lorsqu’ils auraient plutôt sujet de pleurer,
ceux qui ont goûté du persil sauvage. On dit que les
personnes à qui on a enlevé la rate perdent la faculté de
rire et contractent un air sérieux pour tout le reste de
leur vie. |
XXIV.
Praecordiis sanandis.
Languida si duro turgent praecordia morbo,
Miscetur mulsae farris sextarius unus,
Nec
non et lini tunsum siliquaeque legumen.
[59]
Haec
decocta simul nondumque tepentia nectes.
Aut
quae poma Cydon Creteis misit ab oris
[60]
Cocta
lines, durum ut possis mollire tumorem.
Ocima
praeterea bulbive linuntur amari.
Proderit et lymphis corpus mersare marinis.
Quin
etiam catulum lactantem apponere membris
Convenit: omne malum transcurrere fertur in illum:
Cui
tamen extincto munus debetur humandi.
[61]
Humanos quoque contactus mala tanta sequuntur
Et
junctus vitium ducit de conjuge conjux.
Quod
superest thridaci [62]
junges ramenta carinae
Quodque decem ex rebus confit simul atque vocatur,
Mastichis addentur fractae jam mollia farra.
Talibus auxiliis praecordia tuta resident.
|
XXIV. Contre les
affections du diaphragme.
Le diaphragme est,
comme la rate, sujet à se gonfler. Pour remédier à cette
enflure, délayez dans du vin miellé un setier de farine,
joignez-y du chaume de chanvre et du fenugrec, faites
bouillir le tout, et appliquez cette mixtion encore chaude
sur la partie malade. Le fruit originaire de Cydon, et qui
doit son nom a cette ville de Crète, devient, quand il est
cuit, un émollient très efficace. On a reconnu la même vertu
dans le basilic et dans le suc piquant de l’oignon. Un bain
d’eau de mer produit aussi de bons effets. On dit que si
l’on applique sur le ventre du malade un petit chien qui
tette encore, le mal passe du corps de l’homme dans celui de
l’animal. Il faut toutefois tuer ensuite le chien et
l’enterrer. Cette transmission de maladies a lieu aussi
entre les hommes; et l’on voit souvent un des époux
communiquer à l’autre le mal dont il est atteint. Enfin,
vous pouvez encore vous servir de raclure de navire mêlée
avec de la mandragore, ou de ce médicament qui doit son nom
aux dix ingrédients dont il est composé, en y joignant du
suc de lentisque broyé. Grace à ces remèdes, l’enflure du
diaphragme disparaîtra. |
XXV.
Lumbis et renibus sanandis.
Quum
saevit penitus haerens injuria lumbis,
Igne
lapis candens datur exultantibus undis,
Hoc
poteris potu tristem superare dolorem:
Aut
cum melle picem, nitrum sulphurque et acetum
Sucida lana rapit contacta calentibus iisdem,
Proderit hanc aegris crebro perducere membris.
Aut
caput asparagi cum vino sume vetusto,
Seu
mavis appone: modus conducit uterque.
Aut
adipi mixtum lumbis inductio sulphur.
Saepe
chelidoniam cum suco Palladis
[63]
addes,
Farraque quae tremulis prosunt sudantia flammis.
[64]
Fertur amygdalinae succus nucis esse bibendus:
Pinsitur, ac tepidis sorbebitur addita lymphis.
Aut
tres ex vino cochleas fervescere coges,
Cumque suis domibus franges, piperis quoque grana
Ter
quinque adjicies, potuque juvaberis illo.
Furfur item parca fuerit quum fervidus unda,
Post
oleo madidus saccis immittitur aptis,
Quos
vix passuris urentes addito membris.
Prodest cervinae violens natura medullae.
Nec
nocuit ciceris cocti potasse liquorem;
Aut
mixtam teneris madlvam contundito porris,
Contritumque simul cum mastiche confer anethum,
Quodque decem rebus componi ex nomine clarum est:
[65]
His
continge locum: Deus haec mihi certa probavit.
|
XXV. Contre les
affections des lombes et des reins.
Entre autres remèdes
propres a calmer les douleurs profondes et tenaces des
lombes, les médecins conseillent de faire boire au malade de
l’eau où l’on a plongé et fait refroidir une pierre rougie
au feu, ou de lui frictionner souvent le dos avec un flocon
de laine grasse trempé dans une décoction brûlante de poix,
de miel, de nitre, de soufre et d’aneth. Broyez encore une
tête d’asperge dans du vin vieux; et, soit en boisson, soit
en fomentation, ce vin ainsi préparé devient un bon
spécifique. Des frictions faites avec de la graisse mêlée de
soufre ne sont pas moins efficaces. J’en dirai autant du suc
de l’arbre consacré à Pallas, mêlé avec de la chélidoine et
du blé qu’on a fait cuire sur un feu ardent. On prétend que
l’amande broyée dans de l’eau tiède donne une boisson fort
salutaire. Faites bouillir dans du vin trois limaçons broyés
avec leurs coquilles, mêlez-y quinze grains de poivre, et
vous aurez un breuvage d’une grande vertu contre les
affections des reins. Faites bouillir aussi du son dans un
peu d’eau; puis, après l’avoir imbibé d’huile, mettez-le
dans un petit sac que vous appliquerez ensuite sur les reins
du malade, aussi chaud qu’il le pourra supporter. La moelle
de cerf est très adoucissante, et l’eau où l’on a fait cuire
des pois chiches devient un breuvage qui n’est pas sans
efficacité. Ou bien encore, broyez ensemble de la mauve avec
des poireaux; mêlez-y du suc de lentisque, de l’aneth, et de
ce médicament qui doit son nom aux dix ingrédients dont il
est composé; puis, fomentez avec cette mixtion la partie
douloureuse : Esculape m’est garant de la bonté de ce
remède. |
XXVI.
Ventris dolori mitigando.
Si
dolor insanus tota desaevit in alvo,
Heminis tribus in lymphae tu decoque tritum
In
vino prius hyssopum, validam quoque rutam,
Atque
apium, donec pars duplex desit aquarum.
Potus
erit medicus non detrectante palato.
Praeterea nivei sterilis testa uritur ovi,
Quae
postquam in tenuem fuerit conversa farinam,
Ex
calidis potatur aquis, et pota medetur.
Nec
non jungenda est utero nova virga myricae:
Illaesa haec ferro, terraque intacta, feratur.
Aut
medio ventris prodest aspergere terram,
Quam
signaverunt vestigia pressa rotarum.
Proderit et pulvis facili sub cardine raptus.
Quin
etiam ex lymphis tritum potare cuminum
Conveniet, quod jam nobis documenta probarunt.
Mentha quoque hoc pacto medicos dabit hausta sapores.
Coeliacos autem recreabis pane salubri,
Quem
madido farre efficies, ac mollibus ovis,
Quorum testa fero prius evanescat aceto.
Refert et teretes bulbos mollire terendo,
Cumque his Lenaei durum potare fluentum. |
XXVI. Pour calmer les
douleurs de ventre.
Si vous êtes en proie
à de violentes douleurs d’entrailles, broyez de l’hysope, de
la rue et de l’ache dans du vin; puis, faites cuire le tout
dans trois hémines d’eau, jusqu’à ce que celle-ci soit
réduite de moitié vous obtiendrez un breuvage efficace et
agréable. La blanche coquille d’un œuf sans germe, réduite
en poudre et délayée dans de l’eau chaude, n’est pas moins
sanitaire. On peut aussi s’appliquer sur le ventre une
branche fraîche de tamarin, arrachée sans le secours du fer
et qui n’ait point touché la terre ou bien encore faire
usage de la terre fangeuse des ornières, ou de la poussière
recueillie sur les gonds d’une porte mobile. Le cumin broyé
dans l’eau donne un breuvage dont l’expérience m’a démontré
l’efficacité. Une semblable infusion de menthe a la même
vertu. Le pain fait avec de la farine et des œufs dont on a
d’abord fait dissoudre la coquille dans du vinaigre, est
aussi un aliment très bon contre les douleurs d’entrailles.
Enfin, on peut boire avec confiance du vinaigre où l’on aura
broyé des oignons au bulbe arrondi. |
XXVII. Hydropisi depellendae.
Corrupti jecoris vitio, vel splenis acervo
Crescit hydrops aut quum siccatae febre medullae
Atque
avidae fauces gelidum traxere liquorem,
Tum
lympha interius, vitio gliscente, tumescit,
Secernens miseram proprio de viscere pellem.
Conveniet tenerae radix decocta sabuci
In
geminis calidi cyathis potanda Lyaei.
Nec
non et tepidis convolves corpus arenis.
Apposituque leves nepetae gustuque juvabunt.
Helleboro quoque purgatur lymphaticus humor.
Aut
hujus vice quod fert semen lenta genista
Miscetur mulsis, ac haustis ducitur undis.
Saepe
et scillitico [66]
pelluntur noxia Baccho.
Est
qui praevalidum frixo sale miscet acetum,
Atque
olei suco refricat turgentia membra
Fraxineum semen cum Bacchi rore bibendum est.
Nec
non apposito curantur dropace
[67]
membra,
Aut
calido filicis radicem mollit Iaccho,
Qui
subito raptos ventos succosque revellit
Unguine, quo frangit vires languoris aquosi.
|
XXVII Contre
l’hydropisie.
L’hydropisie peut
provenir ou de l’altération du foie, ou du gonflement de la
rate, ou des ravages d’une fièvre ardente qui a desséché la
moelle des os, ou enfin de ce que, pour étancher une soif
brûlante, on a eu l’imprudence de boire un breuvage glacé.
Alors tout se change en eau intérieurement, et la peau
boursouflée se détache de la chair et des muscles. Il est
bon, entre autres remèdes, de boire deux tasses de vin chaud
où l’on aura fait bouillir la racine de la tendre hièble. On
fera bien encore de se rouler dans le sable chaud. La
feuille légère de pouliot sauvage, soit en fomentation, soit
en boisson, n’est pas sans efficacité. L’ellébore aussi a la
vertu de dissiper l’hydropisie. On pourra, au lieu
d’ellébore, se servir de la graine du flexible genêt, qu’on
mettra dans du vin miellé, et qu’on avalera avec de l’eau.
L’oignon marin communique au vin une vertu également
salutaire. Il y en a qui se servent de fort vinaigre mêlé
avec du sel frit, ou qui frictionnent les membres gonflés du
malade avec de l’huile. On peut boire aussi du vin où l’on a
broyé des baies de frêne, on se frotter le corps avec du
dropax. Des fomentations faites avec de la racine de bruyère
détrempée dans du vin chaud, sont également bonnes contre
l’hydropisie: elles dissipent incontinent la boursouflure et
les sérosités du corps. |
XXVIII. Ventri molliendo.
Saepe
cibi specie, vitio vel corporis ipso,
Potibus aut duris quum adstricta morabitur alvus,
Vincetur talis mora gramine mercurialis,
Cujus
aquam cocti minimo cum melle bibemus.
Prunaque conveniunt, quae mittit clara Damascus.
[68]
Multos praeterea medici componere succos
Assuerunt: pretiosa tamen quum veneris emptum,
Falleris, frustraque immensa numismata fundes.
Quin
age, et in tenui certam cognosce salutem.
Aut
igitur tectum lana supponis alumen
Aut
edis in patinis tenerae decocta sabuci
Vel
salsum mulsum caprae cum lacte capessis.
Crede
tamen potum meliorem lactis equini:
Dicitur hic validos asinae pervincere succos.
Silvestris fici lacrymam [69]
prodesse loquuntur.
Quodque satis melius verbis dicemus Horati,
[70]
Mugilis et viles pellent obstantia conchae.
Sed
cochleas prius est urtica aut furfure pasci;
Purior hinc gustus noxa sine moverit alvum.
Saepe
thalassomeli [71]
adjecto cumulavimus imbri:
Haec
purgant, parili fuerint si pondere mixta.
|
XXVIII. Contre la
constipation.
La constipation a
pour cause ou la qualité des aliments, on un vice naturel du
corps, ou l’âpreté de quelque breuvage astringent. On peut y
remédier avec de la mercuriale qu’on a fait bouillir dans
l’eau avec un peu de miel. On se trouvera bien de manger des
prunes qui nous viennent de la célèbre Damas. Les médecins
conseillent une infinité de remèdes composés d’une multitude
d’ingrédients; mais les médicaments recherchés ne sont pas
toujours ceux qui sont les plus salutaires, et l’on peut se
miner en remèdes sans recouvrer la santé. Sans chercher si
loin la guérison, vous la trouverez dans cette triple
prescription: prenez de l’alun que vous envelopperez dans un
flocon de laine, et appliquez-vous ce spécifique sur le
ventre, on contentez-vous de manger de l’hièble cuite; ou
bien encore, buvez du lait de chèvre combiné avec du vin
miellé et du sel. Cependant le lait de cavale est
préférable; il passe même pour avoir plus de force que le
lait d’ânesse. On attribue aussi une vertu particulière aux
larmes qui découlent de la figue sauvage, et, pour me servir
des expressions mêmes d’Horace, le muge et les coquillages
communs délivrent le ventre de tout embarras. Toutefois, il
faut avoir la précaution de nourrir les coquillages avec de
l’ortie ou du son. Ils deviennent alors plus salutaires et
provoquent sans danger l’évacuation du ventre. J’ai eu
souvent occasion de reconnaître l’efficacité de l’eau de
pluie et du thalassomel mélangés à doses égales. |
XXIX.
Solutioni ventris et dysenteriae compescendae.
Tam
varii casus mortalia secla fatigant,
Ut
sint diversis obnoxia corpora morbis.
Saepe
etenim nimio cursu fluit impetus alvi:
Frenatur commixto quum fervet brassica vino:
Aut
cerasi victum longo jam tempore pomum.
Succus aminaeae vitis [72]
cum pane medetur:
Vel
bene permixtum calida potatur acetum:
Vile
quidem facili facto, tamen utile opinor.
Si
lentent medica data purgatoria dextra,
Adjecto piperis medicatur pulvere calda.
Sin
autem longo decurrent intima fluxu
Atque
immane malum multo jam tempore gliscit,
Torridus ex vino cortex potabitur ovi.
Ramentum nivei credunt, prodesse elephantis.
Arbore Pyramea [73]
cortex direpta coquetur
Axe
sub aethero, sic nigro mixta Lyaeo
Immensum poterit potu retinere fluorem.
Numinis aut jussu cedrini mastiche misces
Mollitamque picem, et rasum de navibus unguen:
Languida quo fidens medicamine membra fovebis.
Proderit et pueris quos dentis origo fatigat,
Castaneas coxisse nuces et sorba vetusta,
Atque
apium caulesque, rubus quos fundit acuta:
Potio
quae fluidam quum sumpta morabitur alvum.
|
XXIX. Contre la
diarrhée et la dysenterie.
L’humanité est
sujette à tant d’accidents divers, qu’il ne faut pas
s’étonner de rencontrer dans l’homme les maladies les plus
opposées. Nous venons de parler de la constipation: cette
maladie a son contraire, la diarrhée, qui est un flux de
ventre très violent. On peut l’arrêter avec une décoction de
chou dans du vin. Des cerises cuites et presque desséchées,
du pain imbibé de vin aminéen, de l’eau chaude et du
vinaigre mélangés, tout cela est bon contre la diarrhée.
S’il y a lieu de hâter l’effet trop lent d’une médecine
purgative, il faut boire de l’eau chaude oh l’on a broyé du
poivre: remède bien simple, mais très efficace. Si la
diarrhée est violente et invétérée, on y peut remédier en
buvant du vin où l’on a délayé une coquille d’œuf brûlée. La
raclure d’ivoire passe aussi pour un bon spécifique.
L’écorce de l’arbre de Pyrame cuite en plein air et mêlée
avec du vin noir donne un breuvage qui arrête les diarrhées
les plus fortes. Esculape recommande comme une bonne
fomentation une mixtion composée de cèdre, de suc de
lentisque, de poix liquéfiée et de raclure de navire. Il est
bon de faire boire aux enfants, à l’époque critique de la
dentition, des décoctions de châtaignes, de vieilles cormes,
d’ache et de choux de chardon. Il est rare que la diarrhée
ne cède point à ce remède. |
XXX.
Lumbricis et taeniis aspurgandis.
Quid
non adversum miseris mortalibus addit
Natura? interno cum viscere taenia serpens
Et
lumbricus edax vivant inimica creanti:
Quod
genus assiduo laniat praecordia morsu,
Saepe
etiam scandens oppletis faucibus haeret
Obsessasque vias vitae concludit anhelae.
Ergo
cinis cornu cervini proderit haustus,
Vel
nepetae tritum ex vino vel lacte capellae:
Nec
non et succus medici potatur aceti.
Prodest praeterea cum Baccho Persica frons, et
Democritus [74]
memorat menthae conducere potum.
Sumitur abrotonum, nec non et vile melanthum.
Allia
per sese sanant, aut vis coriandri.
Quin
et marrubium decoctum haustumque juvabit.
Pulegiumve potens et agreste jugatur anethum:
Synthesis haec prodest unda mollita calenti.
|
XXX. Contre les
ascarides lombricoïdes et les ténias.
En quoi la nature ne
semble-t-elle pas conspirer contre les malheureux mortels ?
Au sein des entrailles de l’homme, à lui-même funeste, il se
forme de sa propre substance des vers rongeurs, tels que les
ténias et les ascarides lombricoïdes, qui mordent, qui
déchirent sans relâche les parois de l’estomac, qui montent
quelquefois jusqu’au gosier, et obstruent les voies de la
respiration. Pour les détruire, il faut boire de la cendre
de come de cerf. Le pouliot sauvage, broyé dans du vin ou du
lait de chèvre, donne aussi une boisson qui n’est pas moins
bonne. Le vinaigre se recommande également par sa vertu
anthelmintique. La feuille de pêcher communique au vin une
vertu très efficace. Démocrite recommande particulièrement
la menthe. L’aurone et la nielle parasite sont également
salutaires. On peut encore se servir d’ail ou de jus de
coriandre. Le marrube, le pouliot que ses propriétés
médicales ont rendu célèbre, et l’aneth sauvage, bouillis
dans l’eau, donnent une boisson dont on se trouvera bien. |
XXXI.
Colo sedando.
Quum
colum, invisum morbi genus, intima carpit,
Mande
galeritam volucrem quam nomine dicunt.
Aut
pavidi leporis madefacta coagula pota.
Sive
apio nepetas tereti cum mastiche junges,
Nec
non et species ambas redolentis anethi,
Quarum decoctos patiens haurito liquores.
|
XXXI. Contre la
colique.
Pour se délivrer des
douleurs de la colique, une des maladies que nos yeux ne
peuvent saisir, il est bon de manger du cochevis ou de boire
sur la présure détrempée du lièvre peureux. Une décoction
d’ache, de pouliot sauvage, de suc de lentisque, et des deux
espèces de l’aneth odorant, est également très efficace
contre ce mal. |
XXXII. Vesicae et calculo purgando et urinae provocandae.
Si
cui vesicae tardus cunctabitur humor,
Haec
mora rumpetur vino pervicta vetusto.
Proderit ex parvis acinos potare sabucis
Aut
hederae sucum, aut lacrymosi intrita sinapis.
Nec
non resinas ex Oricia terebintho
[75]
In
speciem erviliae parvos glomerabis in orbos,
Quos
ternos tepida mixtos hausisse medella est.
Quondam etiam nimio praeceps urina fluento
Inrigat exuvias obscenoque inficit imbri:
Tum
leporis cerebrum ex vino potare juvabit.
Si
dolor internam vesicae concoquit alvum,
Subveniet radix frondosae epota cupressi
Puleiumve potens domitum ferventibus undis.
Si
vero in lapides densus convertitur humor,
Qui
retinet cursus, gemitumque dolore frequentat,
Saxifragam seu fongitenam
[76]
succurrere credunt.
Praeterea semen myrti silvestris Iaccho
Atque
oleo mixtum bibitur, nec desit acetum,
Vinaque sumantur fricto condita cumino:
Sive
palumborum capitur fimus aeriorum
Dulcacidis sparsum sucis, trituque solutus:
Nec
non obscenus caprae potabitur humor:
Obruet hic morbum, labefactaque saxa remittit.
|
XXXII. Contre les
affections de la vessie; contre le calcul et la rétention
d’urine.
Si la vessie est
embarrassée, on peut remédier à cette obstruction en buvant
du vin vieux. Le basilic sauvage mêlé avec de l’hièble, le
suc de lierre, la moutarde piquante, la gomme de térébinthe,
réduite en petites boules de la grosseur d’une cicérole, au
nombre de trois, et détrempée dans de l’eau tiède, peuvent
aussi, servir à composer des breuvages dont l’expérience a
confirmé la vertu diurétique. — Pour remédier à la maladie
opposée, c’est-à-dire à l’incontinence d’urine, on fera bien
de boire de la cendre de corne de cerf. On peut, dans le
même cas, faire usage du pouliot sauvage mêlé avec du vin ou
du lait de chèvre, ou de la cervelle de lièvre délayée dans
du vin. —- Si l’on ressent des douleurs dans l’intérieur de
la vessie, il sera bon de boire me décoction faite avec la
racine du cyprès touffu, ou du pouliot, cette herbe si
efficace, qu’on aura laissée bouillir jusqu’à réduction en
bouillie. — Si l’urine condensée se convertit en pierre, et
obstrue les uretères, entre autres plantes propres à
remédier à cette maladie cruelle, il y a la saxifrage et la
scolopendre qui croît au bord des fontaines. Les baies de
myrte sauvage mêlées avec du vin, de l’huile et du vinaigre,
le cumin frit détrempé dans du vin, la fiente du raimer au
vol élevé broyée et arrosée d’oxymel, sont autant de remèdes
également regardés comme très salutaires. Enfin on attribue
à l’urine de chèvre une vertu dissolvante qui liquéfie la
pierre et dégage entièrement la vessie. |
XXXIII. Conceptioni et partui.
Irrita conjugii sterilis si munera languent
Nec
sobolis spes est multos jam vana per annos
Femineo fiat vitio res, necne, silebo:
Hoc
poterit quartus magni monstrare Lucreti
[77]
Sed
natura tamen medicamine victa potenti
Saepe
dedit foetus, studio curante, paratos.
Aut
igitur leporis consumit femina vulvam,
Aut
ovis in stabulis carptas quum ruminat herbas,
Pendentem spumam molli deducit ab ore
Atque
illam meminit mixto potare Falerno.
Mercurialis item capitur communiter herba,
Si
cubitum noctu conjunx festinat uterque.
Atque
ubi jam certum spondet praegnatio foetum,
Ut
facili vigeat servata puerpera partu,
Dictamnum bibitur, et cochleae manduntur edules.
Aut
quum olim menses minus octo moratus in alvo,
[78]
Erumpit thalamis et nexus solvit inertes,
Pulegii quoque purgari tunc convenit imber,
Cujus
opem veram casus mihi saepe probarunt.
Quin
etiam stercus supponunt vulturis atri,
Sentiat ut minime partus quam proximus urget.
Ova
etiam rutae et fragili miscentur anetho,
Quae
diluta simul vino, atque exhausta medentur.
|
XXXIII. De la
conception et de l’enfantement.
Il n’est pas rare que
plusieurs années s’écoulent sans que le vœu le plus cher des
époux se réalise. Quelles sont les causes de la stérilité du
manage? S quoi peut-on reconnaître si elle vient de la femme
ou du mari ? Sur ce point, je renvoie le lecteur au
quatrième livre du grand poète Lucrèce. J’indiquerai
seulement les principaux remèdes qui peuvent triompher de la
nature. La femme stérile peut espérer de devenir mère en
mangeant une valve de hase de lièvre. La salive qui découle
des lèvres de la brebis, pendant qu’elle rumine, peut aussi,
mêlée avec du falerne, remédier à la stérilité; une
décoction de mercuriale est encore au breuvage auquel on a
communément recours; mais, après avoir usé de ces remèdes,
les époux ne doivent pas laisser passer la nuit sans se
livrer à de doux épanchements. Si la conception a lieu, la
femme fera bien, pour se procurer un accouchement facile et
sans suites fâcheuses, de boire une infusion de dictamne, et
de manger des escargots. — Quand la femme est menacée d’un
accouchement prématuré, et sent, avant le huitième mois, la
matrice se relâcher sous le poids du fœtus, il convient de
lui faire boire une décoction de pouliot soigneusement
nettoyé. J’ai pu souvent me convaincre de l’efficacité de ce
remède. — Au terme de sa grossesse, pour faciliter son
accouchement, la femme devra se fomenter les parties
sexuelles avec de la fiente de vautour noir, et boire du vin
contenant un mélange d’œufs, de rue et d’aneth à la tige
fragile. |
XXXIV. Profluvio cujuscumque sanguinis et matrici
subveniendae.
Si
modicus pleno manat de corpore sanguis,
Subvenit; at nimius cum vita funditur ipsa.
Quapropter multo naris completa cruore
Quum
fluit, attritus cimex conducit odore.
Lana
oleo madefit, sed nondum lauta, rosato:
Haec
datur in nares vel claudit densior aures.
Contritis prodest cochleis perducere frontem
Aut
galli cerebro, vel sanguine tinge columbae.
Quod
nisi supprimitur sanguis, potandus et ipse est.
Praeterea Phariis caput emetire papyris,
Detrahe quod superest, illo genitalia necte.
[79]
Femineas illinc prodest vincire mamillas.
Menstruus inmenso si profluit impete sanguis,
Succida lana malos remoratur subdita cursus,
Mortua quin etiam producit corpora partu.
Sed
quacumque fluit vis immoderata cruoris,
Subereus cortex calidis potatur in undis
Ante
minutatim studio vincente terendus.
Pulegii calido purgatur femina potu;
Sed
si forte cruor clausa cunctabitur alvo,
Aut
molles nepetae, aut rutae quaecumque bibentur.
At si
puniceos fundit vessica liquores,
Marrubium ex passo tritum perfunditur undis:
Hi
poterunt haustus rutilum purgare liquorem.
Relliquias partus dictamni detrahit herba.
Quod
si feminei properabit sanguinis imber,
Est
qui frusta molae percussu decutit uno,
Quorum aliquod lanis tectum ad praecordia nectit,
Haec
simul incantans, [80]
sisti debere cruorem,
Ut
lapis ille viae solitos jam destitit orbes.
|
XXXIV. Contre toute
espèce de flux de sang et les diverses affections de la
matrice.
La perte de sang,
quand elle est faible, est souvent un soulagement pour le
corps; mais si elle est excessive, elle peut occasionner la
mort. Si donc le sang vient à couler du nez avec abondance
on peut y remédier, soit en respirant l’odeur d’une punaise
écrasée, soit en introduisant dans les narines on dans les
oreilles un flocon de laine qui encore été lavée, imbibé
d’huile rosat. On peut aussi se frotter le front avec des
limaçons broyés, ou de la cervelle de coq, ou du sang de
colombe. Si l’hémorragie ne s’arrête pas, il faut boire le
sang même qu’on perd. Il sera bon encore de se couronner la
tête de papyrus d’Egypte et d’employer l’excédant à se
couvrir les parties sexuelles. — Appliqué sur les mamelles
d’une femme dont les règles sont trop abondantes, cet
arbrisseau aura la même efficacité. Un flocon de laine
grasse, placé dans le vagin, suffit encore pour arrêter le
sang, et même, si l’enfant meurt avant d’avoir vu le jour,
pour le faire sortir de sein maternel. Mais, de quelque
cause que provient la perte du sang, une décoction de liège
préalablement coupé par petits morceaux pour le mieux
détremper, est en pareil cas un des meilleurs spécifiques.
Le pouliot donne une boisson qui, prise bien chaude,
facilite l’écoulement des règles. Cependant, si le sang ne
vient pas, il faut boire une infusion de molle cataire on de
rue de l’une ou de l’autre espèce. — Si l’urine est
rougeâtre, le moyen de la purifier est de boire du vin fait
avec des raisins séchés au soleil dans lequel on a broyé du
marrube: cette préparation doit être étendue d’une certaine
quantité d’eau. Le dictamne accélère la sortie de
l’arrière-faix. Quelques personnes, pour arrêter la
ménorragie, enveloppent de laine un des fragments de meule
de moulin qu’on a détachés en la frappant d’un seul coup,
puis l’appliquent sur le ventre de la femme, en prononçant
ces paroles magiques: Sang, arrête-toi, de même que cette
pierre s’est arrêtée et a cessé de tourner. |
XXXV.
Internecandis quae oculos laedunt aut impediunt.
Mollis hirsutas horret lascivia saetas
Et
gaudet rapto nudari flore pilorum.
Sed
bona nonnumquam vellendi causa videtur,
Corpora quum relevat ratio manifesta salutis.
Namque oculos infesta pilorum tela lacessunt,
Quodque illis dederat vallum natura tuendis,
Inde
inimica seges proprios desaevit in orbes.
Ergo
locum crinis vulsi continge cruore
Quem
dat avis tremulis simulat quae pellibus alas.
[81]
Praeterea quascumque voles avertere saetas
Atque
in perpetuum rediviva occludere tela,
Corporibus vulsis saniem perducito ranae,
Sed
quae parva situ est, [82]
et rauco garrula questu.
Nec
non quae stagnis cessantibus haesit hirudo
Sumitur, et vivens Samia torretur in olla,
[83]
Haec
acidis unguit permixta liquoribus artus
Avulsamque vetat rursus percrescere silvam.
|
XXXV. Contre ce qui
blesse ou embarrasse la vue.
Il y a des personnes
dont la délicatesse efféminée a horreur de ce qui est velu,
et qui prennent plaisir a s’épiler. Cette épilation pourtant
est quelquefois utile, lorsqu’elle a manifestement pour
effet de soulager le corps. En effet, il peut arriver que
ces mêmes cils, destinés à protéger les yeux, les blessent
de leurs traits aigus, et leur fassent éprouver une cuisson
insupportable. Alors il est bon de les arracher, malis il
faut avoir soin d’humecter la place qu’ils occupaient avec
du sang de cet oiseau qui se sert en guise d’ailes de
membranes, mobiles. Si l’on veut empêcher les cils ou tout
autre poil de renaître, il faut frotter la partie épilée
avec du sang de grenouille autant que possible, la
grenouille doit être de petite taille et prise parmi celles
qui coassent le plus. Une sangsue prise dans le limon d’un
marais, et brûlée vive dans un vase de terre cuite, donne un
résidu qui, mêlé avec du vinaigre, rapproche les chairs et
empêche les poils de renaître. |
XXXVI. Omnibus obscenis medendis.
Dicendum et quae sit membris medicina pudendis.
Languidus antiquo purgatur penis Iaccho
Ac
super illinitur fecundae felle capellae.
Mane
novo myrti frondes commandere prodest
Cui
dolet, atque illas in vulnus despuere ipsum.
Faece
etiam vini genitalia lauta levantur,
Et
tumidos testes Nereia lympha
[84]
coercet,
Vel
bulbi ex mulso, vel cera immixta cupresso;
Aut
faba quum tepuit Bacchi decocta fluentis.
Ramicis immensum fertur cohibere tumorem
Far
madidum lympha, et feralis fronde cupressi,
Unde
etiam ex fotu frons haec memoratur amica.
Sin
autem exsistit duratis tibi glandibus inguen,
Proderit induci cochleas cum melle minutas.
Obscenos si pone locos nova vulnera carpent,
Horrentum mansa curantur fronde ruborum.
At si
jam veteri succedit fistula morbo,
Mustelae cinere immisso purgabitur ulcus,
Sanguine seu ricini, quem bos gestaverit ante.
Herba
chelidoniae fertur cum melle mederi
Herbaque cum sevo foliis de mille vocata.
|
XXXVI. Contre les
affections des parties sexuelles.
Je passe aux remèdes
qu’il faut employer contre les affections des parties
sexuelles. Le vin vieux et le lait de chèvre en fomentation
sont très efficaces contre les affections du pénis. Il est
bon de mâcher le matin des feuilles de myrte, puis de les
appliquer sur la partie malade. Des lotions de lie de vin
sont encore un remède efficace. L’eau de mer a une âcreté
qui dissipe le gonflement des testicules. On peut également
y remédier au moyen d’oignons broyés dans du vin miellé, ou
de cire combinée avec du cyprès, ou bien encore de fèves
cuites dans la liqueur de Bacchus. On prétend que, entre
autres remèdes propres à dissiper les fortes tumeurs
produites par les hernies, il est bon d’employer un mélange
de farine mouillée et de feuilles de cyprès. La feuille de
cet arbre funèbre est aussi très bonne en fomentation. Pour
dissoudre les glandes qui se forment quelquefois dans les
aines, il faut appliquer dessus des limaçons broyés dans du
miel. Si quelque autre affection se déclare en dessous des
parties sexuelles, on fera bien d’y appliquer des feuilles
de chardon mâchées. Si le mal invétéré se change en fistule,
il faut introduire dans l’ulcère de la cendre de belette, ou
du sang d’une tique précédemment attachée à un bœuf. On
recommande encore l’emploi de la chélidoine mêlée avec du
miel, ou de cette herbe qui doit son nom à ses mille
feuilles mêlée avec de la graisse. |
XXXVII. Ischiae et articulari morbo.
Saepius occultus victa coxendice morbus
Perfurit, et gressus diro languore moratur:
Populus alba dabit medicos de cortice potus;
Nec
non et tenerae gracili de fronde genestae
Arreptos caules, acidoque liquore madentes
Sumere conveniet, rubiam quoque ducere potu,
Aut
in aminaeo cochleas haurire Lyaeo.
[85]
Si
vero articulos tabes inimica per omnes
Haeserit, ex ficu betas cum melle ligabis
Vel
pelagi latices, simul et Baccheia dona
Sumere curabis, nimio sed parcito vino.
Ennius ipse pater, [86]
dum pocula siccat iniqua,
Hoc
vitio tales fertur meruisse dolores. |
XXXVII. Contre la
sciatique et l’arthritis.
Souvent la hanche
devient le siège d’un mal occulte, douloureux, qui ôte
jusqu’à la faculté de marcher. L’écorce du peuplier blanc et
la feuille tendre et délicate du genêt donnent une boisson
qui en calme les angoisses. Il convient aussi de manger des
choux bouillis dans du vinaigre ou de boire une infusion de
garance. Le vin aminéen on l’on a broyé des limaçons est une
boisson également salutaire Si le mal se fixe sur toutes les
articu1ations, il sera bon de faire usage de cataplasmes de
poirée mêlée avec des figues et du miel. L’eau de mer mêlée
avec la liqueur de Bacchus n’est pas moins efficace mais le
vin ne doit être employé qu’avec une sorte de parcimonie. A
force de boire, dit-on, Ennius, ce père de la poésie, puisa
dans coupe cette cruelle maladie. |
XXVIII. Furunculo medendo.
Quum
sanguis nimius puri permixtus atroci
Aestuat et papulas alte sustollit acutas,
Resinam misces, et saxis hordea fracta:
Conspersa haec tepidis apponere convenit undis.
Vis
et hyoscyamum cerae sevoque jugatum
Nectere, non minus haec poterit medicina juvare.
Praetereaque fimum ex gallo quod legeris albo,
Imbribus ex acidis fidens appone dolenti.
Auribus aut pecudum molles expromito sordes,
Unguine quo fotis dabitur medicina papullis.
|
XXVIII Contre les
furoncles.
Lorsque la trop
grande abondance du sang mêlé aux humeurs mordicantes pousse
au dehors des pustules saillantes, pétrissez de la résine
avec de l’orge broyée, imbibez d’eau tiède ce mélange, et
appliquez le tout sur la partie malade. Un topique composé
de jusquiame, de cire et de graisse, ou de fiente de coq
blanc délayée dans du vinaigre, c’est un remède qu’on peut
employer avec confiance. Vous pouvez encore vous servir en
fomentation du cérumen que sécrète l’oreille de la brebis. |
XXXIX.
Carboni medendo.
Horrendus magis est, perimit qui corpora, carbo:
Urit
hic inclusus, vitalia rumpit acerbus;
Hunc
veteres quondam variis pepulere medellis.
Tertia namque Titi simul et centesima Livi
Charta docet ferro talem candente dolorem
Exsectum, aut poto raporum semine pulsum:
Infecti dicens vix septem posse diebus
Vitam
produci: tanta est violentia morbi.
Dulcacidum laticem cum lini semine junge
Atque
fimum pariter Paphiae compone columbae:
Hinc
line duratas partes et clausa venena.
Praeterea triti reserant et operta lupini.
Nonnullus calcem vivam dissolvit aceto
Fumantemque illam papulis apponit acerbis.
Est
qui gallinae perducat stercore corpus.
Allia
vel piperi parce commixta linuntur.
Pythagorae cognata [87]
levi condita cumino
Proderit, et madido fermentum polline turgens.
|
XXXIX. Contre le
charbon.
Plus terrible dans
ses ravages, le charbon est une gangrène dévorante, qui
détruit, partout où elle s’étend, le principe de la vie. Les
anciens recouraient à divers remèdes pour combattre cette
maladie. On lit dans le cent troisième livre de Tite-Live,
qu’on peut y remédier en cautérisant la partie gangrenée
avec un fer rouge blanc, ou encore en buvant une décoction
de graine de rave. Il dit que ce mal est si violent, si
rapide dans ses effets, que celui qui en est atteint ne
saurait prolonger sa vie au delà de sept jours. Des
fomentations faites avec un mélange de graines de lin,
d’oxymel, et de fiente de la colombe consacrée à la déesse
de Paphos, peuvent aussi avoir un bon résultat. Des
cataplasmes de lupins broyés ont une vertu émolliente, qui,
en relâchant les chairs, ouvre une issue au poison
intérieur. Quelques personnes font dissoudre de la chaux
vive dans du vinaigre et l’appliquent toute fumante sur la
plaie. D’autres frottent le corps du malade avec de la
fiente de poule. L’ail broyé avec un peu de poivre est
encore regardé comme un liniment efficace. On peut aussi se
servir de la fève parente de Pythagore, qu’on aura soin de
broyer avec la feuille légère du cumin, ou de farine pétrie
avec du levain. |
XL.
Pano, vomicae et strumae depellendis.
Sunt
alii, quos dura movet natura, tumores
Non
minus horrendi, sed non ita perniciosi,
Vomica qualis erit, vel eidem proxima quaedam.
Simplice resina miscebimus hordea tusa,
Et
mulsos amnes et purgamenta columbae:
His
bene decoctis languentia membra foventur.
Mollis odorato faba jungatur coriandro:
Proderit appositu, mollitque aperitque tumorem.
Aut
de phasganio radix decocta palustri,
Quae
salis admixto tundetur condimento;
Proderit et mansum quod traxeris arbore viscum.
Gramen hyoscyami cerae sevoque vetusto
Concilia mixtisque locos perduce dolentes.
Exercere etiam corpus medicina potens est.
Ovum
defundes in fictile, deinde putamen
Marrubii suco implebis, post melle liquenti
Omnia
consociata, tepenti prospera potu
Sumuntur, reserantque malum purgantque levantque.
|
XL. Contre
l’érésipèle, la vomique et les scrofules.
La nature marâtre a
encore suscité contre l’homme d’autres maux aussi
dégoûtants, mais moins dangereux. De ce nombre est la
vomique, et les autres affections qui ont quelque analogie
avec elle. On peut y remédier par des fomentations faites
avec une décoction d’orge, d’eau miellée et de fiente de
colombe. Un cataplasme fait avec la fève tendre et la
coriandre odorante a la vertu d’amollir et de dissiper la
tumeur. On peut aussi se servir d’une décoction de racine de
glaïeul assaisonnée de sel, ou bien encore de gui mâché. Des
frictions faites, sur la partie malade, avec un mélange de
feuilles de jusquiame, de cire et de vieux oing ne sont pas
sans efficacité. L’exercice est en pareil cas un puissant
remède. Délayez encore un œuf dans un vase de terre,
emplissez une coquille de sac de marrube, puis mêlez et
faites chauffer le tout avec du miel, et vous obtiendrez une
boisson qui, en relâchant et purifiant les chairs,
facilitera l’écoulement des matières purulentes. |
XLI.
Igni sacro removendo.
Est
etiam morbi species, quae dicitur ignis,
[88]
Languida quod multo torrentur membra calore.
Vel
tu vicino sevum bovis igne remittis
Mollitumque lines: vel oloris faecibus ova,
Sed
non cocta, dabis, sic torrida membra fovebis,
Lumbricus terrae mixto inducetur aceto,
Aut
parili nova ruta modo, sed jungis olivum.
Ovaque cum betis prosunt super illita tritis.
Allia
dant cinerem sociandum oleoque garoque,
Unguine quo gliscens deponet flamma furorem.
Saepe
chelidoniae pars, candida jungitur ovi,
Quae
modico in potu, sed valde trita, capesses,
Admiscere memor lymphas amnemque Falerni.
|
XLI. Contre le feu
sacré.
Il ya une espèce de
maladie qui brûle, qui dévore le corps ce qui lui a fait
donner le nom de feu. On peut y remédier en frottant
le corps du malade avec de la graisse de bœuf, qu’on a fait
chauffer pour la rendre plus maniable, ou de la fiente de
cygne mêlée avec des œufs non cuits. On peut encore se
servir, comme topique, de vers de terre macérés dans du
vinaigre. On peut remplacer les vers par de la rue fraîche,
mais en y joignant de l’huile. On attribue la même vertu à
de nombreuses frictions faites avec un mélange d’œufs et de
poirée broyée. La cendre d’ail mêlée avec de l’huile et de
la saumure de garas est également propre à apaiser le feu
sacré. On ordonne souvent au malade pour boisson un peu
d’eau et de vin de Falerne contenait de la chélidoine et un
blanc d’œuf soigneusement triturés. |
XLII.
Podagrae depellendae.
Quaedam sunt rabidae medicamina digna podagrae,
Cui
ter tricenas species Epidaurius ipse
Dixit
inesse deus: requiem tamen indere morbo
Fas
erit, et tristem saltem mulcere dolorem.
Ergo
age et arreptum salicis frondemque librumque
Cum
vino tere, sic contractos perline nervos.
Aut
quum prima mali sese ostentabit origo,
Fervida non timidis tolera cauteria plantis:
Seminecisve hirci reserato pectore calces
Insere, sic dirae reprimes primordia pestis.
Aut
si corruptus persederit altius humor,
Trita
cupressus ibi Baccho jungetur acerbo,
Panibus et teneris: cohibebitque addita questus.
Parva
sabucus item hircino collita sevo,
Triticeaeque acido manantes amne farinae,
Aut
nitido ranae decoctum viscus olivo
Sive
chelidoniae succus, sed mixtus aceto.
Sunt
quibus apposita siccatur hirudine sanguis.
Non
audita mihi sit fas, sed lecta referre:
[89]
Hoc
quidam rabidus morbo per tempora messis
[90]
Vicino plantas frumenti pressit acervo
Evasitque gravem casu medicante dolorem. |
XLII. Contre la
podagre.
Il n’y a point de
remède qui puisse guérir entièrement de la podagre, maladie
cruelle, dont Esculape compte quatre-vingt dix espèces;
cependant on peut en apaiser l’ardeur et en rendre les
douleurs moins aiguës. Ainsi on obtiendra quelque
soulagement en se fomentant avec de feuilles et de l’écorce
de saule broyées dans du vin. Dès les premières attaques, il
faut avoir le courage de s’appliquer un fer brûlant sous la
plante des pieds. En plongeant vos pieds dans les entrailles
palpitantes d’un bouc qu’on vient d’éventrer, vous arrêterez
les progrès du mal naissant. Mais si le mal est plus
profond, plus intime, il faut alors y appliquer un
cataplasme composé de cyprès, de vinaigre et de pain tendre,
et la douleur sera réprimée. L’hièble unie à la graisse de
bouc est aussi un bon spécifique. On peut encore se servir
de farine de froment pétrie avec du vinaigre, ou d’intestins
de grenouille cuits dans de l’huile d’olive pure, ou enfin
de suc de chélidoine mêlé avec du vinaigre. Il y en a qui
s’appliquent des sangsues et se soulagent ainsi par une
émission sanguine. Qu’il me soit permis de rapporter, non ce
que j’ai entendu dire, mais ce que j’ai lu: un homme atteint
d’un accès de goutte au temps de la moisson, se sentit tout
d’un coup délivré de son mal, en foulant par hasard une
gerbe de blé qui se trouvait là. |
XLIII.
Vulneribus ferro aut verberibus factis.
Naturae vitiis medicas objecimus artes:
Nunc
et fortunae jaculis obsistere par est.
Si
cui forte lapis teneros violaverit artus,
Necte
adipes vetulos simul et tritam chamaecisson
[91]
Nec
pudeat luteae stercus perducere porcae.
Sin
autem saevo laceratum est verbere corpus,
Tum
lixiva cinis [92]
ceras dissolvit et ova
Admixtoque oleo vibices comprimit atras.
Si
vero infrenus manat de vulnere sanguis,
Purpura torretur conchyli perlita fuco,
Hujus
et atra cinis currentem detinet undam.
Verrucae quoque desectae frenare cruorem
Dicitur ambustus Tyrio de vellere pulvis:
Praeterea nimios reserati vulneris amnes
Feniculi cinis adstringit, vel fimbria porri.
Sive
fimus manni cum testis uritur ovi
Et
reprimit fluidos miro medicamine cursus. |
XLIII. Contre les
blessures faites par le fer ou par le fouet.
J’ai indiqué les
remèdes propres à combattre les maux qui viennent de la
nature: il me reste à faire connaître ceux qui guérissent
les maux causés par des accidents. Si une pierre a mis à
l’épreuve la sensibilité de notre corps, il faut appliquer
sur la blessure du vieux oing et du lierre terrestre broyé.
Ne répugnez pas à vous servir de la fiente du porc, qui se
plaît dans la fange. Si le corps a été déchiré par les
cruelles lanières du fouet, en se fomentant avec une mixtion
de cire, d’œufs, de cendre de lessive et d’huile, on fera
disparaître les meurtrissures. Si le sang ruisselle, la
cendre de la laine qui doit sa couleur à ce précieux
coquillage d’où la pourpre a tiré son nom, en arrêtera le
flux. La cendre de la laine de Tyr a aussi la vertu
d’étancher le sang qui jaillit après l’excision d’une
verrue. Dans le cas où une blessure vient à se rouvrir, on
peut également arrêter l’hémorragie avec de la cendre de
fenouil ou des filaments de poireau. Le fumier de cheval
brûlé avec les coquilles d’un œuf est encore un remède d’une
merveilleuse efficacité pour réprimer la fuite du sang. |
XLIV.Vulneribus quibuscumque casibus factis.
Tam
varia humanae sunt vulnera conditionis,
Ut
nequeam proprias cunctis adscribere curas.
Iisdem igitur monitis casus sanabimus omnes,
Sic
tamen ut nullus medicinam excluserit error.
Ergo,
modus quicumque obtingit vulneris atri,
Contritus cum melle dabit medicamina bulbus:
Herbaque quae foliis nomen de mille recepit,
Appositu prodest adipi permixta vetusto.
Succida cum tepido nectetur lana Lyaeo
Ambustaeve cinis complebit vulneris oras.
Concludit vero vel frons vel ramus ab ulmo;
At
sucis hederae pulchrescit foeda cicatrix.
|
XLIV.
Contre les blessures causées par des accidents divers.
L’homme est sujet à tant de sortes de blessures, qu’il est
impossible d’indiquer des remèdes pour chaque cas en
particulier. Je me bornerai donc à donner des conseils
généraux, mais tels qu’on ne puisse en retirer que d’heureux
effets. Ainsi, quelle que soit la nature de la blessure, on
peut appliquer dessus avec confiance soit un oignon broyé
avec du miel, soit du vieux oing avec de la millefeuille, ou
un flocon de laine grasse imbibé de vin tiède. Réduite en
cendre, cette laine a la vertu de rapprocher les chairs. Les
feuilles ou un rameau d’orme cicatrisent bien les blessures,
et le suc de lierre en fait disparaître les traces hideuses. |
XLV.
Hominis ac simiae morsui.
Sive
homo seu similis turpissima bestia nobis
Vulnera dente dedit, virus simul intulit atrum,
Vettonicam ex puro prodest assumere Baccho.
Nec
non et raphani cortex decocta medetur,
Si
trita admorsis fuerit circumlita membris.
|
XLV. Contre la
morsure de l’homme ou du singe.
Pour dissiper le
venin que distille dans la chair la morsure de l’homme ou de
ce vilain animal qui lui ressemble, on se trouvera bien de
boire du vin pur ou l’on aura infusé de la bétoine, ou de
fomenter la partie blessée avec une décoction de pelure de
raifort. |
XLVI.
Serpentium morsibus et venenus excludendis.
Cuspide non quisquam, longae neque caede sarissae,
Fulmine non gladii, volucris nec felle sagittae
Quam
cito vipereo potis est affligier ictu.
Quare
aptam dicamus opem, succosque medentes.
Quae
nocuit serpens: fertur caput illius apte
Vulneribus jungi: sanat quem sauciat ipsa
Ut
Larissaea curatus Telephus hasta.
[93]
Proderit et caulem cum vino haurire sabuci
Aut
coctum raphani librum tritumque ligare,
Sive
etiam celsa folium de mole cupressi.
Aut
tithymallus atrox vulnus contrita perungit.
Carduus est nondum doctis fullonibus aptus,
Ex
illo radix tepido potatur in amni.
Cervino ex foetu commixta coagula vino
Sumuntur, quae res membris agit atra venena
Aut
ferulae radix potatur in imbre Lyaei
Betonicaeve leves, gallinae aut jura vetustae.
Si
vero horrendum vulnus fera fecerit aspis,
Urinam credunt, propriam conducere potu:
Varronis fuit ista senis sententia; nec non,
Plinius ut memorat, sumpti juvat imber aceti.
Dicendum, et quae sit praecox medicina timenti:
Cautio namque potest diros praevertere morsus.
Si
jecur exsectum tardo de vulture portes,
Erucis aut si totos perduxeris artus,
Quas
prius attritas vehementi spargis aceto.
Aut
tu cervina per noctem in pelle quiesces,
Aut
genere ex ipso dentem portabis amicum.
Toxica praetera qua sint pellenda medella,
Expediam: sanguis poterit prodesse caninus,
Qui
facili potu antidotos imitatur honestas.
Vis
et mirificos cautus praediscere odores,
Accensis quibus arcetur teterrima serpens?
Aut
styracem torres, aut diri vulturis alam,
Vel
nepetam, aut frondem rigidae stirpemque myricae.
|
XLVI. Contre la
morsure des reptiles venimeux.
La pointe acérée de
la longe pique macédonienne, l’éclair mortel de l’épée, le
poison de la flèche empennée, ont des effets moins rapides
que la morsure de la vipère. Disons ce que l’art a découvert
pour le salut de l’homme, et quels sont les sucs dont
l’expérience a prouvé la vertu salutaire. Un moyen, dit-on,
de remédier à la piqûre d’un serpent, c’est d’appliquer la
tête du reptile sur la blessure même: elle blesse et guérit,
comme la lance du héros de Larisse, qui blessa et guérit
Télèphe. Il convient aussi de boire du vin où l’on a mis une
tige d’hièble, et d’appliquer sur la plaie une pelure de
raifort cuite et broyée; ou de se fomenter avec des feuilles
broyées de tithymale ou de cet arbre qui déploie dans les
airs le vaste ombrage de ses rameaux funèbres. Le chardon,
trop vert encore pour servir à l’industrieux foulon, fournit
aussi, par la décoction de sa racine, un breuvage non moins
salutaire. La présure d’un fœtus de cerf, mêlée avec du vin,
est un bon spécifique contre le funeste venin des reptiles.
La racine de férule, la bétoine légère ou le jus d’une
vieille poule communique au vin une vertu médicale des plus
efficaces. — Pour conjurer les effets de la terrible piqûre
de l’aspic, on prétend qu’il faut boire de sa propre urine:
c’était l’avis du vieux Varron; Pline recommande de boire du
vinaigre. L’art a encore des préceptes pour prévenir le mal
et préserver l’homme des piqûres venimeuses. Il faut avoir
soin, par exemple, de porter sur soi un foie de vautour,
enlevé avec le fer du flanc de cet oiseau au vol pesant, ou
de se frotter tout le corps avec des chenilles broyées dans
du fort vinaigre. On se trouvera bien aussi de s’envelopper
la nuit dans une peau de cerf, ou de cacher dans ses
vêtements une dent de cet animal. — En cas d’empoisonnement,
il faut boire du sang de chien: remède facile, et qui vaut
les antidotes les plus vantés. — Voulez-vous enfin connaître
les odeurs qui ont la vertu merveilleuse de mettre en fuite
les hideux reptiles ? Les principales sont celles
qu’exhalent, en les brûlant, le storax, l’aile du cruel
vautour, le pouliot sauvage, la feuille ou la racine de
tamarin, cette plante qui ne sait point plier sous l’haleine
du vent. |
XLVIII. Ictibus scorpii et morsibus muris caeci, vel aranei.
Sunt
minimae specie, sed dirae vulnere pestes,
Quae
magis in tenui latitantes corpore fallant:
Scorpius ut gravis est, et araneus: haec mala semper
Captant securos multa jam nocte sopores.
Et
documenta dedit nobis prostratus Orion,
[94]
Magna
quod exiguis perimantur saepe venenis.
At
qui vulnus atrox incussit scorpius ardens,
Continuo capitur; tunc digna caede revulsus,
Vulneribusque aptus, fertur revocare venenum.
Aut
calidis pelagi lymphis loca laesa foventur:
Sive
meri potu dissolvitur improba pestis.
Ad
cunctos autem morsus ictusque minorum
Caseus aptus erit simae de lacte capellae
[95]
Cumque hoc absumi debebit origanus herba:
Haec
duo mirificis curabunt icta medelis.
Nec
non feniculo calidum annectetur anethum
Aut
vivum sulphur sicca cum faece Lyaei.
Exiguo piperis cerebrum conspergito galli,
Quo
lita sanescant depulso membra dolore.
Sin
autem muris nocuit violentia caeci,
Quae
sola signavit volvendis orbita plaustris,
Illine: mira datur vili de pulvere cura. |
XLVII. Contre la
piqûre du scorpion et la morsure de la musaraigne.
Il y a des animaux
dont les blessures sont d’autant plus redoutables, que la
petitesse même de leur corps semble ne devoir inspirer que
la sécurité: tels sont le scorpion et la musaraigne. C’est
pendant la nuit profonde, dans la tranquillité du sommeil,
qu’on est exposé aux atteintes de ces animaux venimeux:
témoin Orion, dont la fin funeste prouve qu’un poison
presque imperceptible peut anéantir les natures les plus
puissantes. Si l’on a eu le malheur d’être piqué par le dard
brillant du scorpion, il faut à l’instant se saisir du
reptile et, d’une main prompte à se venger, l’écraser sur la
plaie; car on dit qu’il retire à lui le venin dont il a
infecté sa victime. Il sera bon aussi de faire chauffer de
l’eau de mer et d’en fomenter la plaie. Le vin pur, pris en
boisson, a également une vertu salutaire qui neutralise
l’effet du venin. — Quant aux morsures et aux piqûres moins
dangereuses des autres bêtes venimeuses, il est facile d’en
prévenir les suites en mangeant du fromage fait avec le lait
de la chèvre camuse et mêlé avec de l’origan: l’efficacité
de ce remède est vraiment merveilleuse. On peut encore
appliquer sur la plaie de l’aneth bouilli avec de fenouil,
ou bien du soufre vif mêlé avec de la lie de vin desséchée.
Une fomentation faite avec la cervelle d’un coq, assaisonnée
d’un peu de poivre, n’est pas moins salutaire. — A-t-on à
remédier à la terrible piqûre de la musaraigne? il est on
remède vil, mais d’une merveilleuse efficacité : c’est
d’enduire la plaie avec de la boue ramassée dans une
ornière. |
XLVIII. Subitanco dolori, febri atque ostocopo.
Nonnunquam exsistit subiti nova causa doloris,
Cujus
origo latet, veris reprimenda medelis.
Namque chelidoniam mixto sale nectere prodest
Velleraque infuso recalentia sulphure sanant.
Ostocopon [96]
lento conducit melle perungui.
Sin
autem calidae depascent corpora febres,
Tunc
apii succus leni sociatur olivo.
Membra lines, fotuque ferus mulcebitur ignis.
Nec
spernendus adeps, dederit quem bestia melis.
Seminecis cervi lacrymam miscere liquori
Convenit, atque artus illinc mulcere calentes:
Febribus at longis galli nova jura vetusti
Subveniunt, tremulis etiam medicantia membris.
|
XLVIII. Contre les
douleurs subites; contre la fièvre et les douleurs
ostéocopes.
Quelquefois une
douleur subite et dont la cause est inconnue, nous soumet à
de rudes épreuves. On peut y remédier en appliquant sur le
siège du mal des feuilles de chélidoine avec du sel ou de la
laine chaude imprégnée de soufre. Les douleurs ostéocopes
cèdent aisément à une douce fomentation de miel. Si le corps
est dévoré par l’ardeur de la fièvre, il sera bon de se
fomenter avec du suc d’ache mêlé avec de l’huile onctueuse:
rien n’est plus efficace pour rafraîchir les membres
brûlants. On peut encore se servir avec confiance de graisse
de blaireau. Les larmes d’un cerf mourant mêlées avec de
l’eau ont également une vertu qui apaise le feu dont le
corps est consume. Ce remède dissipe complètement la maladie
et refoule la bile dans les entrailles. Il débarrasse aussi
l’estomac du chyme qui le surcharge, affection qui est
d’autant plus redoutable qu’elle est plus ancienne. S’il
s’agit de combattre une fièvre invétérée, le jus tiède d’un
vieux coq a une vertu très efficace; il apaise aussi le
frisson. |
XLIX.
Quartanae typo medicando.
Nec
tu crede levem dilato tempore febrem,
Quae
spatium sibi dat, magis ut cessando calescat,
Letali quae grassatur quartana calore,
Ni
medicas adhibere manus curemus et herbas.
Allia
non pudeat terno cum cimice trita
Et
diluta mero mediis haurire diebus;
Aut
facilem jecoris murini ducere fibram,
Quattuor ut puri junguntur scrupula Bacchi.
Mira
est absinthi cum simplice potio lympha.
Sume
tribus digitis apprensum semen anethi,
Tantumdem marathri, mulsum nec desit acetum,
In
cujus cyatho praedicta salubriter hauris.
Maeoniae Iliados quartum suppone timenti:
Aut
leporis trepidi diluta coagula trade.
Prodest et potus, sed mulsus Doridis humor.
[97]
Quidam etiam miranda ferunt, veniente calore,
Jurantes ludum Veneris munusque petendum.
Sed
prius est oleo partus fervescere ranae
In
triviis, [98]
illoque artus perducere succo. |
XLIX. Contre la
fièvre quarte.
Ne croyez pas que
l’intermittence soit un signe du peu de gravité de la
fièvre; au contraire, la maladie disparaît pour revenir plus
forte qu’auparavant. Telle est la fièvre quarte, dont le
terme est la mort, si l’on ne se hâte d’y remédier en
recourant aux conseils de l’art et à la vertu salutaire des
plantes. N’hésitez pas à boire, sur le midi, du vin où vous
aurez broyé de l’ail avec trois punaises, ou à avaler du
foie de rat détrempé dans quatre scrupules de vin pur. Une
simple infusion d’absinthe dans de l’eau donne un breuvage
qui est encore d’un merveilleux effet. Cueillez de la graine
d’aneth avec trois doigts ajoutez-y une égale quantité de
fenouil; puis broyez ces deux plantes dans une tasse
d’oxymel, et vous obtiendrez une boisson qui n’est pas moins
salutaire. Placez sous le corps du malade qui craint le
retour de la fièvre quarte le quatrième livre de l’Iliade
d’Homère, ou faites-le boire sur la présure du lièvre
peureux. L’eau de mer, édulcorée avec le miel, est un
breuvage efficace. Il y en a qui conseillent des remèdes
étranges; qui veulent, par exemple, qu’au retour de la
fièvre on se livre à l’amour, mais après avoir fait
bouillir, au milieu d’un carrefour, un têtard dans de
l’huile, et s’en être frotté le corps. |
L.
Tertianae typo medicando.
Est
etiam alternis febris rediviva diebus,
Tempora discernens quasi justae pondera librae.
Ut
possis igitur talem prohibere furorem,
Involves cera pallentis grana cumini,
Puniceaeque indes pelli, colloque ligabis.
Pulegii ramus lanae velatus amictu
Tempore suspecto medicos praebebit odores.
Praeterea tritus cimex potatur in ovo,
Horridus attactu, sed gustu commodus apto.
|
L. Contre la fièvre
tierce.
Il y a une autre
fièvre qui cesse et se renouvelle alternativement de deux
jours l’un. Pour y remédier, il faut enfermer de la graine
du pâle cumin dans une boule de cire, mettre ensuite cette
boule dans un sac de cuir rouge et suspendre le sac au cou
du malade. Une branche de pouliot enveloppée de laine
prévient aussi par son odeur le retour de la fièvre. Quelle
que soit la répugnance que vous éprouviez à toucher une
punaise, n’hésitez-pas à écraser cet insecte dans un œuf
cru, et à l’avaler en suite, car ce remède est des plus
efficaces. |
LI.
Quotidianae typo medicando.
At
qui continuis non cessat adire diebus,
Sed
tantum certas morbus discriminat horas,
Triticeum metuit granum, si credere dignum est,
Quod
latitans fracto fuerit sub pane repertum.
Nec
non ossa juvant septis inventa domorum:
Convenit haec tereti pendentia subdere collo.
Multaque praeterea verborum monstra silebo:
[99]
Nam
febrem vario depelli carmine posse
Vana
superstitio credit tremulaeque parentes. |
LI. Contre la fièvre
quotidienne.
La fièvre qui revient
tous les jours sans d’autre intermittence que l’intervalle
de quelques heures, ne peut résister, dit-on, au pouvoir
qu’exerce sur elle un grain de froment qu’on vient à
découvrir en rompant son pain. Des os trouvés dans les murs
d’une maison et suspendus en guise de collier, produisent le
même effet. Je tairai beaucoup d’autres moyens magiques; car
une vaine superstition, née de la sollicitude craintive des
mères, croit qu’on peut chasser la fièvre avec des mots. |
LII.
Hemitritaeo depellendo.
Mortiferum magis est quod Graecis
hmitritaion
Vulgatur verbis: hoc nostra dicere lingua
Non
potuere ulli, puto, nec volvere parentes.
Inscribes chartae quod dicitur
abracadabra,
[100]
Saepius, et subter repetis, sed detrahe summae,
Et
magis atque magis desint elementa figuris
Singula, quae semper rapies, et cetera figes,
Donec
in angustum redigatur littera conum:
His
lino nexis collum redimire memento.
Nonnulli memorant adipem prodesse leonis.
Coralium [101]
atque crocum corio connectito felis,
Ne
dubites illi verides miscere smaragdos:
Talia
languenti conducent vincula collo
Lethalesque abiget, miranda potentia, morbos.
|
LII. Contre la fièvre
demi-tierce.
La fièvre que les
Grecs appellent
hmitritaion
[demi-tierce] est plus dangereuse. Le nom grec de cette
fièvre n’a point été traduit en latin, soit parce que le
génie de cette langue s’y oppose, soit parce que les pères
et les mères, dans la crainte de porter malheur a leurs
enfants, n’ont pas osé lui donner un nom. Ecrivez sur un
morceau de papier ABRACADABRA; puis répétez ce mot autant de
fois qu’il y a de lettres dans le mot, mais en retranchant
chaque fois une lettre, de sorte que le tout ait la figure
d’un cône. Cela fait, suspendez avec un fil de lin le
morceau de papier au cou du malade. On prétend que la
graisse de lion est aussi un bon spécifique. Le corail et le
safran enveloppés dans une peau de chat ont une vertu non
moins merveilleuse. Si vous jugez convenable de suspendre du
corail au cou du malade, joignez-y avec confiance des
émeraudes: ce talisman chassera infailliblement le feu
mortel de la fièvre. |
LIII.
Fracturis et luxis sanandis.
Infandum dictu cunctis procul absit amicis,
Sed
Fortuna potens omen convertat in hostes:
Vis
indigna novo si sparserit ossa fragore,
Conveniet cerebrum blandi canis addere fractis,
Lintea deinde superque indutas nectere lanas:
Saepius et sucos conspergere pinguis olivi:
Bis
septem credunt coalescere cuncta diebus.
Aut
veteri Baccho caprae fimus inde petulcae:
Hoc
aperit clausum, trahit haerens, sanat apertum.
Si
vero caput infestus colliserit ictus,
Ex
oleo necti vestis debebit arachnes:
Nesciet haec illinc, nisi quum sanarit abire.
Quod
si luxa suo decedant membra tenore,
Urere
femineos crines, ac jungere sevum
Congruet, ac tali medicamine mota ligare.
Aut
malum ex pingui tritam apposuisse juvabit.
At si
conclusum servavit tibia vulnus,
Stercus ovis placidae adipesque vetustos,
Pandere quae poterunt ulcus, patuloque mederi.
|
LIII. Contre les
fractures et les luxations.
Si par malheur (que
la Fortune détourne ses rigueurs de ceux qui nous sont chers
et ne les fasse sentir qu’à nos ennemis!), si par malheur on
s’est fracturé un os, il faut appliquer sur la partie
blessée la cervelle du chien caressant, et envelopper la
plaie avec du linge, puis recouvrir de laine. Il convient
aussi de la fomenter avec le suc de la grasse olive: au bout
de quatorze jours, les os se rejoindront. On peut encore
mêler du vin vieux avec la fiente de la chèvre bondissante:
ce remède dilate la chair, fait sortir les esquilles et
cicatrise la plaie. — S’il s’agit de remédier à une
contusion à la tête, il faut y appliquer une toile
d’araignée imbibée d’huile. Cette toile d’araignée ne
tombera qu’après cicatrisation parfaite. S’il y a luxation,
la cendre de cheveux de femme, mêlée avec de la graisse,
donne au cataplasme qui, appliqué sur l’os démis, remédiera
à la dislocation. Une pomme broyée avec de la graisse est
encore une bonne fomentation. Si l’os tibia est atteint
d’une douleur provenant d’une blessure antérieure, le
crottin de la douce brebis, mêlé avec de vieux oing, dilate
la chair et ouvre une issue à la cause du mal. |
LIV.
Nervis incisis, et dolentibus, atque contractis.
Haud
quisquam credet desectos vulnere nervos
Ad
solitum rursus revocari posse vigorem;
Sed
prodest terrae lumbricos indere tritos,
Queis
vetus et rancens sociari axungia debet.
Si
vero occultus nervos dolor urit inertes,
Vulturis excisos adipes rutamque remittes
Ac
ceram, et tali recreabis languida fotu.
Convenit et pelagi calidis perfundier undis:
Carica vel betis lento cum melle jugatur
Aut
Baccho madefacta Ceres cum fronde cupressi,
Quo
poteris fotu recreare rigentia membra.
Sin
autem subito replicantur corpora morbo.
Contractos revocat nervos caro sumpta columbae. |
LIV. Contre les
ruptures, les douleurs et les contractions de nerfs.
Il paraîtra peut-être
impossible de renouer des nerfs rompus et de leur rendre
leur vigueur première; cependant ces lésions se guérissent
par l’application de vers de terre broyés avec de la graisse
rance. S’il s’agit de remédier aux douleurs occultes qui
affectent les nerfs engourdis, en broyant ensemble de la
graisse de vautour, de la rue et de la cire, vous obtiendrez
me mixtion très salutaire pour dissiper cette inertie. Il
n’est pas moins bon de se fomenter avec de l’eau de mer
qu’on a fait chauffer. On peut encore se servir de figues
mélangées avec de la poirée et du miel gluant, ou de farine
pétrie avec du vin et des feuilles de cyprès: des
fomentations faites avec ces sortes de médicaments rendent
aux nerfs leur souplesse. S’il s’agit de remédier a une
contraction subite, en mangeant de la chair de colombe, on
la dissipera infailliblement. |
LV.
Aegris somno adsciscendo.
Non
solum miseros teterrima febris adurit,
Sed
super optato pergit viduare sopore,
Ne
prosint placidi, caelestia munera, somni.
Charta igitur, variis quam pinxit littera verbis,
Uritur, inde cinis calido potatur in amni.
Proderit et magnum capiti substernere fulcrum.
Prodest et mixtam lymphis potare cupressum,
Palladiis itidem succis cum flore rosarum
Jungis, et immisces madidum tritumque papaver,
Quo
lita frons facilem praebebit nocte quietem.
Nec
non mandragorae gustu sopor additur altus,
Dilue
praeterea glomeramina, quae gerit intus
Clausa aries inter geminae coxendicis umbras:
Inde
soporati ducentur gutture potus. |
LV. Contre les
insomnies.
La fièvre ne se borne
pas à brûler de ses feux les membres du malade, elle le
prive aussi du sommeil, ce présent des dieux. Entre autres
remèdes, brûlez un papier sur lequel vous aurez tracé
différents mots, et buvez-en la cendre dans de l’eau chaude.
Il est bon encore d’avoir au lit la tête élevée, de boire
des infusions de feuilles de cyprès, ou de se frotter le
front avec un mélange d’huile, de feuilles de rose et de
pavot frais broyé: cette fomentation ramènera sans peine le
sommeil pour la nuit qui suit. La mandragore est aussi très
soporifique. En délayant les globules fangeux qui pendent à
la queue de bélier, on obtiendra encore un breuvage propre à
rappeler le sommeil. |
LVI.
Lethargiae expellendae.
Diximus hanc sortem miseris mortalibus esse,
Ut
saepe mala inter se contraria morbi.
Denique nonnunquam somno sic membra gravantur,
Ut
conjungatur letho sopor altus acerbo.
Ergo
levi flamma torrentur cornua caprae,
Quo
nidore gravem depellent lumina somnum.
Aut
Veneris labrum quae dicitur herba, bibetur,
Quae
teritur prius, et vino confusa liquescit.
Conveniunt acidis euphorbia mixta fluentis,
Gramina vel rutae, gemina si nare trahantur.
Quidam dira jubent; septeno cimice trito
Ut
vitientur aquae, cyathusque bibatur earum:
Haec
potiora putant, quam dulci morte perire. |
LVI. Contre la
léthargie.
Nous avons déjà fait
remarquer que les malheureux mortels sont sujets aux maux
les plus opposés. Quelquefois leurs membres sont saisis d’un
engourdissement qui les plonge dans un sommeil qui devient
celui de la mort. La come de chèvre, suspendue sur la flamme
légère, exhale une odeur qui soulève les paupières
appesanties par le sommeil. L’herbe qu’on appelle lèvre de
Venus, broyée dans du vin, donne une boisson qui n’est pas
moins salutaire. L’euphorbe mêlé avec du vinaigre ou de la
graine de rue, et aspire par les narines, est également
efficace. Enfin, il y en a qui ordonnent un remède bien
dégoûtant: c’est de boire une tasse d’eau infectée de sept
punaises broyées: breuvage odieux, mais préférable a la
mort, si douce qu’elle soit. |
LVII.
Comitiali morbo.
Est
subiti species morbi, cui nomen ab illo est,
Quod
fieri nobis suffragia justa recuset.
Saepe
etenim membris atro languore caducis,
Consilium populi labes horrenda diremit.
Ipse
Deus memorat dubiae per tempora lunae
Conceptum, talis quem saepe ruina profudit.
Prodest cum veteri Baccho fel vulturis ampli:
Sed
cochlear plenum gustu tibi sufficit uno.
Aut
cruor ex Progne mixtus cum polline thuris:
Aut
apium elixum, aut conditum melle fel agni;
Marrubiumve pari confusum pondere mellis,
Cui
tu terna dabis gustu cochlearia in uno.
Aptus
mustellae cinis est et hirundinis una.
Praeterea pluvias hominis quas calva supina
Excepit projecta sinu, consumere prodest.
Aut
lapis ex nido, vaga quem congessit hirundo,
[102]
Vellitur, et nexu fovet attollitque jacentem.
Pellitur, ut fama est, gustu quoque languor anethi. |
LVII. Contre
l’épilepsie.
L’épilepsie est un
mal subit, qu’on appelle vulgairement maladie comitiale,
parce qu’il fait exclure des comices ceux qui en sont
atteints. En effet, il est arrivé maintes fois qu’un citoyen
frappé de ce mal affreux a troublé et interrompu l’assemblée
publique. Esculape dit que ceux qui sont sujets aux attaques
d’épilepsie ont été conçus pendant la nouvelle lune. Le fiel
du vautour à la vaste envergure, mêlé avec du vin vieux,
donne une boisson salutaire, dont il suffira de faire
prendre une cuillerée chaque fois que reviendra le mal. On
recommande également de boire de sang d’hirondelle mêlé avec
de la farine d’encens, ou une infusion d’ache bouillie, ou
bien encore de fiel d’agneau avec du miel. Le marrube
mélange avec une égale quantité de miel fournit encore un
remède salutaire; mais il ne faut pas en administrer plus de
trois cuillerées chaque fois. L’emploi de la cendre de
belette et d’hirondelle n’est pas moins efficace. Il sera
bon aussi de boire de l’eau de pluie recueillie dans un
crâne l’homme. Prenez dans un nid d’hirondelle une de ces
pierres qu’on trouve, dit-on, dans le ventre de cet oiseau
voyageur; attachez-la au cou de l’épileptique, il ne tardera
pas à recouvrer ses esprits et à se relever. L’aneth en
boisson passe pour avoir la même vertu. |
LVIII. Regio morbo pellendo.
Regius est vero signatus nomine morbus
[103]
Molliter hic quoniam celsa curatur in aula.
Huic
rubia ex mulsa fertur conducere lympha.
Allia
trita dabis vino madefacta calenti.
Vellera cum vivo suffiri sulphure prodest.
|
LVIII.
Contre la jaunisse.
La jaunisse est
appelée mal royal, parce que les délices des cours
ont, dit-on, la vertu de la dissiper. On la traite par la
garance délayée dans de l’eau miellée. On se sert encore en
fomentation d’ail broyé dans du vin chaud, ou de laine
imprégnée de soufre vif. |
LIX.
Infantibus dentientibus vel strige inquietatis.
Nudum
hominem primum mater natura profudit;
Insuper excruciat, niveis quum dentibus armat.
Collo
igitur molli dentes nectentur equini,
Qui
primi fuerint pullo crescente caduci.
Aut
teneris cerebrum gingivis illine porci
Aut
leporis niveum bibitur cum lacte caprino.
Praeterea si forte premit strix atra
[104]
puellos
Virosa inmulgens exertis ubera labris,
Allia
praecepit Titini sententia
[105]
necti,
Qui
veteri claras expressit more togatas. |
LIX. Contre les
douleurs de la dentition chez les enfants et l’influence
funeste des sorcières.
Non contente d’avoir
jeté l’homme nu sur la terre, la nature marâtre ne lui
permet de se développer qu’au prix des souffrances. Pour
remédier aux douleurs qui font pleurer l’enfant dont la
bouche commence à s’armer de blanches rangées de dents, il
faut lui attacher autour du cou des dents de lait d’un
poulain. Il faut aussi frotter ses tendres gencives avec de
la cervelle de porc, ou lui faire boire de la cervelle de
lièvre délayée dans du lait de chèvre. — S’il arrive qu’une
malfaisante sorcière ait fait sucer son lait venimeux à un
enfant, le célèbre et ancien poète comique Titinius
conseille de suspendre à son cou des gousses d’ail. |
LX.
Combusturis igne, vel frigore.
Sunt
diversa quidem mala frigoris atque caloris:
Sed
tamen amborum simili nocet ulcere virus.
Illa
quoque usta putes, quae sunt nive laesa rigente.
Conversa in cinerem platani pila curat utrumque.
At
vero ambustum flammis, qui candidus ovi
Succus inest, penna inductus, sanare valebit.
Aut
tu succosae cinerem perducito lanae,
Aut
vivam ex oleo veteri componito calcem,
Hordea vel franges atque ovi candida junges.
Adsit
adeps porcae, mira est haec forma medelae,
Junge, chelidoniis ac sic line vulnera sucis.
Quodque recens ussit glacies, axungia simplex
Mulcet, et ex facili grata est medicamine cura. |
LX. Contre les
brûlures causées par le feu ou par le froid.
Le froid et le chaud,
si opposés entre eux, produisent néanmoins des lésions
identiques sur le corps, à tel point qu’on ne saurait
affirmer qu’une blessure causée par la neige ne l’a point
été par le feu. La cendre de baies de platane guérit les
deux sortes de brulures. La lésion produite par le feu se
guérit au moyen d’un blanc d’œuf tendu sur elle avec une
plume. Vous pouvez encore y appliquer de la cendre de laine
en suint, ou un emplâtre composé soit de chaux vive et
d’huile rance, soit d’orge broyée dans un blanc d’œuf.
Servez-vous aussi en fomentation de chélidoine mêlée avec de
la graisse de truie, et ce bizarre remède vous soulagera
aussitôt. Il suffit même, pour guérir les érésipèles
flegmoneux occasionnés par le froid, de se fomenter avec un
peu de graisse. |
LXI.
Venenis prohibendis.
Ut
tutus fias infestae fraude novercae
Vel
quicumque tuo carpetur lividus auctu,
Non
expectatis eat obvia cura venenis.
Ante
cibos igitur juglandis foetus edatur.
Produnt electri [106]
variantia pocula virus.
Praeterea coctae querno cum cortice lymphae
Conveniunt potu, demersave ficus olivo.
Saepe
etiam raphanum praedixit numen edendum.
Antidotos vero multis Mithridatica
[107]
fertur
Consociata modis, sed Magnus scrinia regis
Quum
raperet victor, vilem deprendit in illis
Synthesin, et vulgata satis medicamina risit.
Bis
denum rutae folium, salis et breve granum
Juglandesque duas, totidem cum corpore ficus:
[108]
Haec
oriente die pauco conspersa Lyaeo
Sumebat, metuens dederat quae pocula mater.
|
LXI. Des préservatifs
contre le poison.
Si vous craignez les
machinations d’une perfide marâtre ou d’un ennemi que vous a
suscité votre prospérité, n’attendez pas que la haine ou
l’envie accomplisse ses funestes desseins dans le temps où
vous y pensez le moins. Souvenez-vous de manger des noix
avant de vous asseoir à une table suspecte. Une coupe
d’ambre décompose le poison et en trahit la présence. On
peut encore, entre autres préservatifs, boire une décoction
d’écorce de chêne bouillie dans de l’eau, ou manger des
figues détrempées dans de l’huile. Esculape recommande de
manger souvent du raifort. Le célèbre antidote de Mithridate
était compose de plusieurs ingrédients si communs, que
Pompée se prit à rire lorsqu’il en trouva la recette dans
l’écrin du roi de Pont. Il y entrait vingt feuilles de rue,
un peu de sel, deux noix, autant de figues, le tout broyé et
délayé dans un peu de vin. Cet antidote, qu’il tenait de sa
mère inquiète, était le breuvage qu’il prenait chaque matin
à son réveil. |
LXII.
Venenis datis.
Si
nequit infandum praevertere cautio virus,
Proximus ille gradus data pocula pellere cura.
Lacte
asinae placidaeque bovis prodesse loquuntur.
Betonicam ex parco sumunt plerique Lyaeo.
Quod
si hederae succos, quae truncos implicat altos,
Instilles pateris, poterunt haud ulla nocere
Pocula, quae quisquam saevis vitiaverit herbis.
Si
quis hyoscyamum gustarit, lacte capellae
Exhausto subitos poterit mulcere furores.
|
LXII. Contre les
effets du poison.
Si, malgré vos
précautions, vous n’avez pu prévenir les effets du poison,
voici les moyens qui vous restent de les neutraliser.
Hâtez-vous de boire du lait d’ânesse ou de vache. Le suc de
bétoine infuse dans une petite quantité d’eau est un
antidote auquel on a le plus souvent recours. Le lierre qui
s’enlace en grimpant autour du tronc des hauts arbres,
distille un suc dont quelques gouttes suffisent pour
conjurer les funestes effets d’un breuvage empoisonné. Le
lait de chèvre, administré en potion, dissipe le délire
furieux qui suit les ingestions de jusquiame. |
LXIII. Vulneribus ex re dubia curandis.
Vulnera tabescunt spatio vitiata vetusto,
Curaque nil prodest, nec ducitur ulla cicatrix.
Sed
tamen herbarum tam mira potentia pollet,
Ulceris annosi sinus ut coalescere possit,
Marrubium si melle coquas, illoque liquore
Vulnus atrox foveas, cineres vel hirundinis altae
Inducas, leporisve aspersa coagula vino,
Aut
hederam Baccho decoctam, et semen anethi,
Aut
cineres alni tardo cum melle ligentur.
Lumbrici terrae poterunt conducere vulnus,
Aut
facilis lapathi coma latior ulcera purgat,
Et
commixtus adeps, sed non nullo sale tactus.
Pinea
praeterea vivo cum sulphure cortex
Et
pice cum spissa jam perdita membra reponit. |
LXIII. Contre les
plaies dont l’origine est douteuse.
Le temps ne fait
qu’envenimer une plaie, et rend les soins impuissants pour
l’amener à guérison. Cependant les plantes ont des vertus
merveilleuses qui cicatrisent les ulcères les plus
invétérés. On peut, avec confiance, se servir en fomentation
d’une décoction de marrube et de miel, de la cendre que
donne le corps brûlé de l’hirondelle qui se plaît dans les
airs, de présure de lièvre mêlée avec du vin, ou enfin de
vin où l’on a fait bouillir du lierre et de la graine
d’aneth. Appliquez aussi sur la partie malade un cataplasme
de cendre d’aune et de miel, ou des vers de terre. Les
feuilles larges et tendres de l’oseille sont encore très
propres à cicatriser les plaies. Il n’est pas inutile d’y
mêler de la graisse modérément salée. L’écorce de pin broyée
avec du soufre vif et de la poix compacte donne un emplâtre
qui remédie à la corruption des chairs. |
LXIV.
Verrucis tollendis.
Interdum existit turpi verruca papilla:
Hinc
quondam Fabio verum cognomen adhaesit,
Qui
solus patriae cunctando restituit rem.
[109]
Id
poterit vitium sanguis curare lacertae,
Aut
urina canis cum terra inducta madenti,
Aut
herbae succus, quae fertur nomine lathyr.
[110]
Et
tithymallus item tali satis apta medelae.
Si
rupta inmensos fundit verruca cruores,
Purpureo triti cineres de vellere prosunt,
Quod
fuerit vero conchyli sanguine tinctum.
[111]
|
LXIV. De la manière
d’enlever les verrues,
Quelquefois il
s’élève sur le visage ou ailleurs une excroissance parasite
et hideuse qu’on appelle verrue. De là le surnom qui
fut donné a ce célèbre Fabius qui sauva la république par
ses temporisations. On peut parvenir à faire disparaître ces
excroissances en les frottant avec du sang de lézard, avec
de la terre détrempée d’urine de chien, ou avec du suc de
l’herbe appelée lathyris. Le tithymale est également un bon
spécifique. Pour arrêter l’écoulement du sang causé par la
coupure d’une verrue, il faut appliquer sur la plaie de la
cendre de la laine qui doit véritablement sa couleur à ce
coquillage dont la pourpre a tiré son nom. |
LXV.
Haemorrhoidibus medendis.
Excruciant turpes anum si forte papillae,
Agrestis prodest radix superaddita porri,
Ne
violet, sanant juglandis fragmina clausas.
[112]
Sal
niveum sumes, Baeticum nomine dicunt,
Dulcia cumque nigra junges fuligine mella,
Apponesque super: pellit medicina dolorem. |
LXV. Contre les
hémorroïdes.
Pour remédier aux
tumeurs enflammées et douloureuses qui affectent souvent
l’anus, il faut appliquer sur la partie malade de la racine
de poireau sauvage. Si le mal est interne et occulte, il
faut se servir d’écorce de noyer: le remède est très
violent, mais il est efficace. Le miel a la saveur douce, la
suie noire, et ce sel blanc qu’on appelle sel bétique,
donnent un cataplasme qui est encore un spécifique très
salutaire. |
NOTES.
[1]
— Phoebe, salutiferurn, quod pangimus (v. 4). L’auteur invoque ici Apollon, non comme dieu de la
poésie, mais comme inventeur de la médecine.
[2] —
Tuque potens artis (v. 6). On ne saurait douter
qu’Esculape n’ait été un médecin qui florissait quelques années
avant le siège de Troie, et dont les Grecs ont fait un dieu, comme
de tant d’autres personnages, qui, dans les temps héroïques et
fabuleux, se sont illustrés par leur courage ou par leurs
découvertes;
Inventas aut qui vitam excoluere per
artes,
Quiqne sui memores alios fecere
merendo.
(Virgile, Enéide, lib. VI, v. 663.)
Suivant la mythologie vulgaire, Esculape était fils
d’Apollon et de la nymphe Coronis. Il naquit près d’Epidaure, et son
éducation fut confiée au centaure Chiron, qui lui apprit à connaître
les vertus des plantes. Bientôt le disciple devint plus habile que
le maître, et sa réputation se répandit dans toute la Grèce. Il
accompagna les Argonautes dans leur expédition, et il les guérit de
toutes leurs maladies. A son retour de Colchide, il rendit la vie à
Hippolyte, qui venait de périr victime de la perfidie de sa
belle-mère. Pluton en porta ses plaintes à Jupiter, et ce dieu
foudroya Esculape. Apollon, irrité de la mort de son fils, perça de
ses flèches les Cyclopes qui avaient forgé la foudre dont Jupiter
s’était servi. Plus tard, Jupiter, voulant consoler Apollon, plaça
Esculape dans le ciel, où il forme la constellation du Serpentaire.
La plupart des villes de la Grèce lui rendirent,
après sa mort, les honneurs divins mais son culte fut surtout en
vigueur à Epidaure, à Athènes, à Pergame et à Smyrne, et passa dans
la suite en Italie.
On le représentait sous les traits d’un vieillard
grave et austère, enveloppé d’un long manteau, ayant à ses côtés un
coq, symbole de la vigilance ou du réveil, et tenant dans la main
droite un bâton entouré d’un serpent, emblème de la prudence.
Il avait eu deux fils, Podalire et Machaon, qui
devinrent la tige des Asclépiades ces deux médecins guérirent
Philoctète, à l’époque du siège de Troie.
[3] —
Qui colis Aeginam (v. 8). Egine, île voisine du
Péloponnèse, aujourd’hui Enghia. Nous avons suivi la leçon de
Turnèbe, justifiée par ce passage des Guêpes d’Aristophane
Diepleusen eiV Aiginan, « il passa dans l’île d’Egine. » On lit dans
d’autres éditions Aegeas, qui serait le nom d’une ville de Cilicie
ou, suivant Philostrate, auteur de la Vie d’Apollonius de Thyane,
Esculape avait un temple célèbre.
[4] —
Qui quondam.... Tarpeias arces (v. 9). Les Romains, ayant
été délivrés d’une peste affreuse qui désolait la ville, se crurent
redevables de ce bienfait à Esculape, et lui élevèrent un temple
dans une île du Tibre où ils avaient vu un serpent se réfugier. Il
est probable que, une fois ce dieu introduit à Rome, on lui consacra
dans la suite un autre temple sur la roche Tarpéienne.
[5] —
Teneris expone papyris (v. 13). Le mot
teneris a exercé l’érudition des
commentateurs, comme s’il cachait quelque sens figuré, fondé sur les
différentes sortes de papier dont se servaient les anciens. On
distinguait, en effet, le petit et le grand papier, et, sous les
mêmes mots pris métaphoriquement, le style simple et le style
pompeux. Nous croyons qu’il ne faut voir ici qu’une épithète
oiseuse, donnée à l’écorce du papyrus, avec laquelle on faisait ce
qu’on appelait charta, papier.
[6] —
Vel quae septenis censentur gramina nodis (v. 16). On lit
dans Pline (Hist. Nat., liv.
xxiv,
ch. dern.) : « Quod e graminum genere septem
internodia habet, efficacissime capiti contra dolorem adalligabis.
» Les botanistes donnent à cette plante le nom de renouée.
[7] —
HEMICRANIO MEDENDO. Hemicranium
(migraine), mot composé de ἥμισυς, demi, et κράνιον, tète, crâne ,
parce que la migraine est une douleur qui affecte la moitié de la
tête.
[8] —
Allia diversam per aurem (v. 30).
Peut-être faut-il entendre diversam
dans le sens de utramque, l’une et
l’autre. Sammonicus écrivait à une époque où la pureté de la langue
latine commençait à s’altérer.
[9] —
Allia vel ternis piperis terna addita granis (v. 32). On
retrouve ici l’idée superstitieuse que les anciens attachaient au
nombre impair.
[10] —
Sed noxia formae (v. 34).
Noxia est pris ici comme substantif, le
même que noxa, mais moins usité.
[11] —
Copia faris
uti frangentibus edita saxis (v. 36).
Nous avons préféré frangentibus
à frendentibus qu’on lit dans quelques
éditions.
..............................Fruges
quoque saepe miputas,
Robore quum saxi franguntur.
(Lucrèce, de Rerum natura,
lib. I, v. 580.)
Et torrere parant flammis, et
frangere saxo.
(Virgile, Enéide, lib. 1, v. 179.)
On rencontre néanmoins frendere
fruges dans les vieux auteurs.
[12] —
Ut varios crines (v. 41)
Varios, expression élégante, par
opposition à puros. Nous verrons plus
loin dans le même sens: Variant maculae.
[13] —
Vel frons lentisci, vel tristia poma sabuci (v. 50).
Le lentisque est un arbrisseau d’où découle
une résine odorante appelée mastic, de ματίζω, frapper, blesser,
parce que, pour l’obtenir, il faut faire une incision dans l’écorce.
L’hièble (sabucus) est une espèce de
sureau, mais plus petite que le sureau proprement dit. C’est pour
cela que notre auteur lui donne plus loin (v. 100 et 334) l’épithète
de parva.
[14]. —
Praedixit Plinius auctor (v. 56). Toutes
les éditions, excepté celle d’Ackermann, portent Tullius; mais il
est évident qu’il faut lire Plinius, d’autant
que la recette citée ici se trouve dans Pline.
[15] —
Si praegnans artus captivi soricis edit
(v. 57). Sammonicus reproduit
ici encore l’opinion de Pline (Hist. Nat., liv.
xxx, ch. 5): Si oculi
nigri nascentium placent, soricem praegnanti edendum exhibe.
[16] —
Pherecydis fata tragaedi (v. 62).
Phérécyde était un philosophe de l’île de Scyros. On ne lit nulle
part qu’il ait été acteur ou poète tragique. Si le texte est exact,
l’épithète de tragaedus ne peut
s’entendre qu’au sens figuré.
[17] —
Sylla quoque infelix (v. 65). La fin de Sylla fut
affreuse et donna un démenti cruel au surnom de Félix qu’il avait
porte jusque-là. Par suite des excès auxquels on croit qu’il
s’abandonnait pour étouffer ses remords, il se forma dans ses
entrailles un abcès incurable d’où s’exhalait une odeur infecte. Il
naissait de ses chairs pourries une si grande quantité de vermine,
qu’il ne fut pas possible de le défendre contre ces insectes. Voici
ce qu’on lit dans Pline (Hist. Nat., liv.
vii, ch. 43) au sujet
de cette triste fin de l’heureux Sylla : « Age, non
exitus vitae ejus omnium proscriptorum ab illo calamitate crudelior
fuit, erodente se ipso corpore, et supplicia sibi gignente? »
[18] —
Vel inopia nobilis escae (v. 74).
Quoique o soit ordinairement bref dans
inopia, cette leçon nous a paru
préférable à toutes les autres, qui ne présentent aucun sens.
[19] —
Quod facit ex asino saccatus corporis humor
(v. 77). Nous croyons qu’il faut lire saccatus
plutôt que siccatus; c’est l’avis de
Turnèbe, qui cite, à l’appui de sa correction, ce passage de Lucrèce
Pusi saepe lacum propter, se, ac
dolia curta
Somno devincti credunt extollere
vestem,
Totius humorem saccatum ut corpori
fundant.
(De Rerum natura, lib. IV, v.
1020.)
[20] —
Non semper praesens dolor est sanabilis
(v. 103). Ovide avait exprimé la même pensée en deux vers qui sont
passés en proverbe
Principiis obsta: sero medicina
paratur,
Quum mala per longas invaluere morse.
(Remed. Amor., v. 91.)
[21] —
Seu salamandra
(v. 107). Les anciens croyaient que la salamandre avait le
privilège de vivre dans le feu. Ce qui paraît avoir donné lieu à
cette opinion, c’est que ce reptile à une humeur visqueuse qui le
garantit pendant quelque temps de la brûlure. Phase, comme
Sammonicus, croyait que son venin faisait tomber les cheveux.
[22] —
Est elephas morbus (v. 131). Cette
maladie a été appelée éléphantiasis, parce qu’elle rend la
peau rude, épaisse, inégale, rugueuse, comme celle de l’éléphant.
[23] —
Et chartam, quam gens Aegyptia mittit (v.
141). L’écorce du papyrus, comme nous l’avons dit plus haut, servait
à faire du papier ou ce qu’on appelait charta.
Dans la suite on a confondu ces deux mots.
[24] —
Si vero vitium est quod ducit ab impete nomen
(v. 157). On a donné le nom d’impétigo à une certaine maladie de la
peau, semblable à la lèpre.
[25] —
Mascula thura (v. 162). Virgile s’est
servi de la même épithète
Verbenasque adole pugues et mascula
thur.
(Eclog.,VIII,v.65.)
Nous ne pensons pas qu’on doive y attacher une autre
idée que celle de force, comme on peut l’induire de la suite du même
passage de Virgile
Conjugia ut magicis sanos avertere
sacris
Experiar sensus.
[26] —
Divinaque cura valebit (v. 162). L’usage
ordinaire de l’encens explique naturellement l’épithète de divin
que Sammonicus donne au remède composé avec cette gomme aromatique.
[27] —
Sive obscenos ex virgine rores (v. 162).
Le sens que avons donné à cette périphrase est évidemment plus
plausible et moins détourné que celui de règles, menstrues, que
proposent quelques commentateurs.
[28] —
Vis et Phaebigenae (v. 183). Il est
impossible d’admettre l’interprétation du scoliaste qui veut qu’on
entende ici Circé, sous prétexte que cette magicienne était fille du
Soleil, et connaissait les vertus des herbes. Sammonicus n’a songé
qu’à Esculape, qu’il nomme tantôt Epidaurius,
tantôt Deus Idae, tant6t enfin, comme
le Phoebigena, fils d’Apollon.
[29] —
Sed dolor immeritum lumen
(v. 194). Immeritum est une épithète purement
poétique, comme dans ce vers de Properce:
Et saepe immeritos corrumpas dentibus
ungues.
(lib. II, eleg. 3, v. 3.)
[30] —
Viventisve nepae
(v. 196). S’agit-il d’une écrevisse ou d’un scorpion? Nous
avons adopté le premier sens, d’après ce passage de Pline (Hist.
Nat., liv.
xxxii, ch. 7) « Cancri
oculos adalligatos collo mederi lippitudini dicunt.
»
[31] —
Qui grana cumini (v. 220).
Le
cumin est une plante qui croit spontanément en Egypte et dans les
contrées méridionales. Un des effets de sa graine est de rendre
pâle.
[32] —
Ambitiosa putas, sunt ista salubria cunctis
(v. 239). Ce passage offrirait quelque difficulté, si l’auteur ne
reproduisait plus loin (ch.
xxviii) sa pensée d’une manière plus claire. Les médicaments
recherchés, dit-il, ne sont pas toujours ceux qui sauvent.
[33] —
Sic est Hortensius (v. 258). Il s’agit
ici de l’orateur Hortensius qui tint le
premier rang au barreau jusqu’au moment où Cicéron parut.
[34] —
Aerium mel (V. 263). Reminiscence de Virgile : Protinu aerii
mellis caelestia dona. (Georg.
lib. IV, v.
Le miel était regardé comme un don de l’air, en ce
sens qu’il a pour principe la rosée qui tombe dans le calice des
fleurs, où l’abeille va butiner le suc dont on se sert pour le
composer.
[35] —
Hinc longum per iter nervos medicina sequetur (v. 283) les
manuscrits portent hinc longos.
Nous avons adopté la correction de scoliaste, qui présente un sens
très naturel. L’auteur veut dire qu’il y a loin du cou à la cuisse,
et que néanmoins, en se frottant la cuisse, on parvient
longum per iter, à détendre les nerfs de
cou.
[36] —
Quos autem vocitant tolles (v. 288).
Tolles, et tusillae
ou tunsillae par diminution, vient du
verbe tollere. On se sert plus
généralement du mot tunsillae.
[37] —
Qua grillus erit pressante peremptus (v.
289). Le grillon jouissait d’une grande autorité parmi les
magiciens, parce qu’il marche à reculons.
[38] —
Interiora vora
veritus contingere dente (v. 297).
On lit dans quelques éditions integriora.
Ce comparatif, qui n’est pas d’ane bonne latinité, et qui d’ailleurs
ne s’explique pas comme diminutif, nous a semblé une correction
hasardée de quelque commentateur qui, faute de rapporter
interiora au verbe
contingere a cherché à éluder la difficulté.
[39] —
Siliquaeque madentes (v. 312).
Siliqua signifie en général la cosse des
légumes, l’enveloppe des grains; mais il se prend aussi quelquefois
dans le sens de silicia, fenugrec,
sénegré. Ce qui nous persuade que ce mot doit être entendu ici dans
ce dernier sens, c’est que Sammonicus dit plus loin (v. 434)
siliquaeque legumen.
[40] —
Seu salibus piper adde (v. 321).
Quoique sales ne soit jamais employé au
pluriel pour designer l’eau de mer, il n’est guère possible de lui
donner ici un autre sens.
[41] —
Et tenue cuminum (v. 321). Nous avons
déjà fait remarquer que Sammonicus se servait souvent d’épithètes
oiseuses ou pittoresques. Nous croyons donc que notre auteur a voulu
seulement faire allusion, par le mot tenue, a la tige ou a la
feuille menue et délicate du cumin.
[42] —
Quae coctis tinges epulis et rapta vorabis
(v. 322). Nous ne pensons pas, avec le scoliaste, que Sammonicus
veuille, dans ce passage, parler d’un de ces remèdes qu’on peut
prendre en mangeant. Il s’agit ici de remédier aux suites d’une
indigestion, et d’ailleurs le mot rapta
ne laisse aucun doute.
[43] —
Grana peregrini piperis (v. 328). Le poivrier était
une plante exotique pour les Romains: de là l’épithète de
peregrinum.
[44] —
Nicolao molli (v. 329). Le nom de
nicolai fut donné aux dattes de Syrie et
à des gâteaux faits de ces dattes, parce que le philosophe Nicolas
de Damas, est le premier qui en ait envoyé à Rome au temps
d’Auguste.
[45] —
Praeterea caules
frondet si parva sabucus (v. 334). Nous n’avons vu là
qu’une périphrase ni d’autre obscurité que celle qui accompagne
ordinairement ce qui est prolixe et diffus. Notre poète aurait dit
tout simplement en prose caulem sabuci,
une tige d’hièble
[46] —
At vomitum radix narcissi pota movebit
(v. 341). Peut-être faut-il lire ad vomitum;
la phrase présenterait alors un sens plus naturel. A quoi bon faire
observer, sans rapport avec ce qui précède ni avec ce qui suit, que
la racine de narcisse est un vomitif dont il faut se garder? Le
conseil contraire serait plus conséquent, puisque l’auteur traite
des remèdes propres à faire évacuer la bile.
[47] —
Et raptas fumis mandare coronas (v. 356).
On attribuait sans doute quelque vertu magique au lierre jeté au feu
après qu’on s’en était servi.
[48] —
Navis ramentum (v. 363). Résine mêlée de
cire qu’on raclait du corps des navires, et que les Grecs appelaient
ζώπισσα.
[49] —
Graecos hyoscyamon (v. 365). Le fruit de
l’hyoscyamon ou, comme nous l’appelons maintenant, de la jusquiame,
ressemble a la fève et donne des convulsions aux porcs: de là son
nom compose de ὖς, porc, et κύαμος fève. L’épithète
insana, que lui donnaient les Latins, lui
était sans doute appliquée en raison de sa propriété de produire la
folie. On trouve plus loin (v. 1079) le remède à employer contre
cette sorte de délire.
[50] —
Saepe lapis teritur, specularem nomine dicunt
(v. 373). Talc, pierre transparente [specularis]
dont les anciens faisaient leurs vitres.
[51] —
Vel jus perdicis
apricae (v. 384).
Aprica, qui aime le soleil. Une remarque
que nous consignons ici, quoique déjà plusieurs fois l’occasion se
soit présentée de la faire, c’est que toutes les fois que Sammonicus
donne une épithète à une plante ou à un animal, c’est comme poète,
et non comme médecin. C’est ainsi que, quelques vers plus haut, il
la qualifie la perdrix de babillarde [garrula].
[52] —
Quid referam multis composta philonia rebus (v. 393).
Ce remède était ainsi appelé du nom de son
inventeur, Philon, médecin de Tarse.
[53] —
Jungenturque simul costum,
foliumque, piperque (v. 397). Le costus est une plante
aromatique de l’Asie. Quant à celle que notre auteur appelle
folium, elle est inconnue aujourd’hui, du
moins sous ce nom.
[54] —
Quod telum commemoratur (v. 399). Les
Latins donnaient à la pleurésie le nom de trait, à cause des
douleurs aiguës qui la caractérisent.
[55] —
Mollibus ex hederae tornantur pocula lignis
(v. 406). Le lierre passait pour communiquer au vin ou à tout autre
breuvage une vertu très salutaire. On lit dans Pline (liv.
xxiv, ch. 10) « Hujus
quoque ligni vase spleneticos bibentes sanari invenio. »
[56] —
Deus Idae (v. 425). Esculape, adore a
Pergame, dans le voisinage du mont Ida.
[57] —
Dulcia, Plautus ait (v. 426). Le passage
auquel Sammonicus fait allusion, ne se trouve dans aucune des pièces
de Plaute qui sont parvenues jusqu’à nous.
[58] —
Ut mihi Sardois videatur proximus herbis
(v. 428). Ce passage nous donne l’étymologie du mot sardonique,
appliqué au rire.
[59] —
Siliquaeque legumen (v. 434). Voyez la
note 39.
[60] —
Aut quae poma Cydon Creteis misit ab oris
(v. 436). Le coing, fruit du cognassier, qui, d’après le
témoignage de Pline, était très commun dans les environs de
l’ancienne ville de Cydon, dont il porte le nom.
[61] —
Cui tamen exstincto munus debetur humandi
(v. 442). Sammonicus veut qu’on tue et qu’on enterre le chien, qui a
pris le mal de l’homme, pour prévenir, sans doute, la contagion.
[62] —
Quod superest thridaci (v. 445). On lit
dans quelques éditions styraci. Le
styrax ou storax est une gomme odoriférante qui découle d’un
arbre de l’Arabie.
[63] —
Cum succo Palladis (v. 458). L’olivier
paraît avoir été des premiers arbres cultivés parmi les hommes. Les
nombreux et utiles usages auxquels sont employés ses produits, l’ont
fait regarder, de tout temps, comme un des végétaux les plus
précieux pour l’espèce humaine. Les Grecs l’avaient consacré à
Minerve ou Pallas.
[64] —
Farraque, quae tremulis prosunt sudantia flammis
(v. 459). Les annotations des commentateurs ne jettent aucun jour
sur ce passage; et, de notre côté, nous craignons bien de n’avoir
pas été plus heureux.
[65] —
Quodque decem rebus componi ex nomine clarum est (v. 47a).
Sorte de médicament que les Grecs
appelaient δεκάμυρον.
[66] —
Saepe et scillitico (v. 507). On appelait
scilla, squille, une espèce d’oignon
marin.
[67] —
Nec non apposito curantur dropace (v. 511).
Dropax, nom grec d’une
sorte d’onguent siccatif.
[68] —
Prunaque conveniunt, quae mittit clara Damascus
(v. 519). Damas a toujours été célèbre par ses fruits, ses eaux et
son air, ce qui l’a fait surnommer l’odeur du Paradis.
[69] —
Silvestris fici lacrymam
(v. 529). Lacryma, expression poétique pour succus.
[70] —
Quodque satis melius verbis dicemus Horati
(v. 53o). Voyez Horace, Sat., liv.
ii, sat. 4, v. 28.
[71] —
Saepe thalassomeli (v. 534). Mot compose
de θάλασσα mer, et de μέλι, miel.
[72] —
Succus aminaeae vitis (v. 541). Suivant
Macrobe (Saturn., liv. i, ch. 2), Aminaei
était l’ancien nom du mont Falerne, célèbre par ses vins; mais son
opinion n’est qu’une conjecture, du reste, le vin dont parle ici
Sammonicus était très renommé. On lit dans Virgile liv.
ii, v. 97 :
Sunt etiam amineae vites, firmissima
vina.
Pline dit aussi (liv.
xiv, ch. 2) que ce vin
se conservait longtemps, et qu’il gagnait en vieillissant.
« Principatus datur amineis, propter
firmitatem, senioque proficientem vini ejus ubique vitam. »
[73] —
Arbore Pyramea (v. 550). On sait que ce
fut sous un mûrier qu’eut lieu la triste fin de Pyrame et de Thisbé,
si gracieusement racontée par Ovide. Le sang des deux amants, en
tombant sur les fruits de cet arbre, les rendit rouges, de blancs
qu’ils étaient auparavant.
[74] —
Democritus (v. 570). Démocrite,
philosophe de l’école d’Elée, adopta et perfectionna le système des
atomes, inventé par Leucippe. Il admettait une multitude d’esprits,
de génies et de démons gigantesques: tous ces êtres étaient formés
d’atomes subtils, remplissaient l’air, nous environnaient de toutes
parts, et nous faisaient tantôt du bien, tantôt du mal. De là il
concluait que la divination et autres pratiques superstitieuses
n’avaient rien que de raisonnable. C’est ce qui nous explique pour
quoi le nom de ce philosophe se trouve mêlé à l’histoire de la
médecine, de la théurgie et de la magie.
[75] —
Nec non resinas ex Oricia terebintho (v.
586). Oricos était le nom de deux
villes grecques, situées l’une en Epire, l’autre en Macédoine.
[76] —
Saxifragam, vel fontigenam (v. 599). Le
saxifrage, dont Pline rapporte le nom à sa prétendue vertu
lithontriptique, le doit plutôt, ainsi que le remarque M.
Decandolle, à la manière dont il végète dans les fentes des rochers.
Nous supposons, sans l’affirmer, que l’herbe désignée ici sous le
nom de fontigena, est la scolopendre,
qui croît, en effet, dans les puits, les fosses et les lieux
humides, et qui jouit de propriétés apéritives et diurétiques.
[77] —
Hoc potent quartus magni monstrare Lucreti
(v. 610). Lucrèce a traité fort au long de l’amour dans le quatrième
livre de son poème de Rerum natura (v.
1029 et suiv.).
[78] —
Aut quum olim menses minus octo moratus in alvo
(v. 622). Il semblerait, au premier coup d’œil, que
Sammonicus suppose le cas d’un accouchement prématuré; mais, si l’on
observe qu’il traite exclusivement dans ce chapitre des moyens
d’assurer un accouchement facile et heureux, et non des suites de
l’accouchement, on reconnaîtra que le sens que nous avons adopté est
plus conséquent, bien qu’il ne suit pas celui qui se présente
d’abord à l’esprit.
[79] —
Detrahe quod
superest, illo genitalia necte (v. 640).
Quelques éditions portent alio;
mais nous avons suivi les plus anciennes, oii se lit jib, qui
présente un sens moins embarrassé.
[80] —
Haec simul incantans (v. 658). Il est à
remarquer que Sammonicus, qui jusqu’ici ne conseille contre les
maladies que des moyens naturels, passe tout d’un coup aux remèdes
magiques. On ne saurait douter néanmoins, comme quelques critiques,
que le poème ne soit tout entier du même auteur. Le style et la
manière sont, d’un bout à l’autre, parfaitement homogènes.
[81] —
Quem dat avis tremalis simulat quae pellibus alas (v. 668).
Il n’est personne qui, à ce caractère,
ne reconnaisse ici la chauve-souris.
[82] —
Sed quae parva situ est
(v. 672). Parva situ, c’est-à-dire petite par la
structure. Pline le Naturaliste (liv.
xxxii, ch. 10)
recommande, en effet, pour le même usage, une grenouille verte de la
plus petite espèce.
[83] —
Samia torretur in
olla (v. 674). Les vases de Samos
étaient faits de terre, de sorte que vase de Samos et vase de terre
devinrent synonymes.
[84] —
Nereia lympha
(v. 683). Nereia lympha,
pour aqua marina,
eau de mer. Nérée était le plus ancien dieu de la mer.
[85] —
Aut in aminaeo.... Lyaeo (v. 704). Voyez
la note 72.
[86] —
Ennius ipse pater (v. 709). Horace a dit
de ce poète des premiers temps de la littérature romaine:
Ennius ipse pater nunquam, nisi
potus, ad arma
Prosiluit dicenda.
(Epist. lib I, ep. 19, v.7.)
[87] —
Pythagorae cognata (v. 737). Réminiscence d’Horace: « O
quando faba Pythagorae cognata! »
(Serm.,
lib. II, sat, 6, v. 63.) Pythagore, qui croyait à la métempsycose,
ne mangeait ni viande ni poisson, et même parmi les légumes, il
faisait des distinctions. Il prétendait que les fèves avaient été
formées de la même matière que l’homme; aussi s’en abstenait-il dans
la crainte de manger un parent.
[88] —
Est etiam morbi species, quae dicitur ignis
(v. 757). Cette maladie est vulgairement appelée aujourd’hui feu
Saint-Antoine.
[89] —
Non audita mihi sit fas, sed lecto referre
(v. 788). On rencontre à chaque instant dans Sammonicus des
réminiscences des poètes du siècle d’Auguste. Il est évident qu’il
s’est souvenu ici de ce passage du sixième livre de l’Enéide (v.
266) : « Sit mihi fas audita loqui .........
»
[90]
— Hoc quidam raptus morbo per tempora messis (v. 789).
L’histoire de cette guérison due au hasard est tirée de Pline (Hist.
Nat., liv. xxii,
ch. 25) « Sextus Pomponius, Hispaniae Citerioris princeps, quum
horreis suis ventilandis praesideret, corruptus dolore podagrae,
mersit in triticum sese super genua; levatusque siccatis pedibus
mirabilem in modum, hoc postea remedio usus est. »
[91] —
Et tritam chamaecisson (v. 795). Mot grec
compose de χαμαὶ, par terre, et κισσὸς, lierre.
[92] —
Tum lixiva cinis (V. 798). Sammonicus
emploie indifféremment cinis au
masculin et au féminin. Ainsi, quatre vers plus loin, il dit
atra cinis.
[93] —
Utque Larissaea curatus Telephus hasta
(v. 831). La lance d’Achille, œuvre de Vulcain, passait pour guérir
les blessures qu’elle avait faites. Télèphe éprouva la vertu
surnaturelle de cette arme divine. Blessé par Achille sous les murs
de Troie, il fut guéri par un emplâtre fait avec la rouille de la
lance qui l’avait frappé. Larisse, ville de Thessalie, était
la patrie d’Achille : de là l’épithète de
Larissaea donnée à sa lance.
[94] —
Et documenta dedit nobis prostratus Orion
(v. 865). Suivant la fable, Orion, fils de Neptune, se rendit
célèbre par son amour pour l’astronomie et par son goût pour la
chasse. Diane, qu’il avait osé défier a qui prendrait le plus de
bêtes sauvages, fit sortir de la terre un scorpion dont la piqûre
lui fit perdre la vie. La déesse ne tarda pas à s’affliger de la
mort du bel Orion, et obtint de Jupiter qu’il fut placé dans le
ciel, où il ferme la plus brillante des constellations.
[95] —
Simae de lacte capellae.
(v. 873). Réminiscence de Virgile:
Dum tenera attondent simae virgulta
capellae.
(Bucol., ecl. X, v. 4.)
[96] —
Ostocopon
(v. 887). Mot grec compose de ὀστέον, os, et de κόπος
travail, douleur.
[97] —
Doridis humor (v. 913). Doris, déesse de
la mer, pour la mer elle-même. Ainsi Virgile a dit:
Sic tibi, quum fluctus subterlabere
Sicanos,
Doris amara suam non intermisceat
undam.
(Bucol., ecl. X , v. 4.)
[98]
— Sed prius est oleo partus fervescere ranae in triviis (v.
916). Pline (liv. xxxii,
ch. 10) fait mention de ce remède, qui appartient à la magie. « Ranae vero in trivio
decoctae oleo abjectis carnibus perunctos liberant quartanis.
»
[99]
— Multaque praeterea verborum monstra cilebo
(v. 933). Caton, par exemple, prétendait guérir les luxations
en prononçant les mots suivants: Gibel. Danata.
Daries. Dardaries. Astaries.
— Pour apaiser le mal de dents, on s’attachait au cou un papier sur
lequel était écrit Galbes. Galbat. Galde. Galda.
— L’hémorragie s’arrêtait aussi devant ces mots prononcés tout bas
Charat. Carasarite. Confirma. Consona. Imabolite.
— Dans son Traité d’Agriculture, Varron conseille contre la goutte :
Sista. Pista. Kista. Xista., et contre
le mal de dents : Anasaga. Anasaga.,
qu’il faut prononcer trois fois.
[100] —
Quod dicitur
abracadabra (v. 939).
Les lettres de ce mot magique devaient être disposées de l’une de
ces deux manières
Cette figure étant principalement composé des lettres
du mot abraca, le même qu’abracax,
que l’on croyait le plus ancien des dieux, était elle-même révérée
comme une espèce de divinité.
[101] —
Coralium (v. 946). On a cru longtemps que
le corail avait une vertu surnaturelle; qu’il préservait, par
exemple, des terreurs paniques et de la foudre.
[102]
— Aut lapis ex nido, vaga quem congessit hirundo (v. 1025).
Ces pierres lenticulaires ne se
trouvent que dans le lit des torrents. On ignore la raison qui a pu
donner lieu aux anciens de croire qu’elles se formaient dans le
ventre des hirondelles.
[103] —
Regius est.... morbus (v. 1028).
Sammonicus et Celse expliquent de la même manière l’origine du
surnom donné à la jaunisse. Il est plus probable qu’elle a été
appelée mal royal parce qu’elle naît de l’ennui qui dévore
ordinairement les grands et les riches.
[104] —
Strix atra (v. 1039). Les sorciers et les
sorcières, la magie, l’astrologie, ne sont point une création du
moyen âge. La superstition, née de l’ignorance et de l’amour du
merveilleux, est une chose de tous les temps et de tous les lieux.
On petit consulter, sue cette partie curieuse de l’histoire de
l’esprit humain, la Démonolatrie de Nicolas Remi, les
Pratiques superstitieuses de Lebrun, les Disquisitions
magiques du P. Debris, les œuvres de Cardan, le traité
De amatoria Magia de Célius Caliginus, le
Dictionnaire infernal de M. Collin de Plancy.
[105]
— Allia praecepit
Titini sententia (v. 1041).
Sammonicus est le seul qui fasse mention de ce poète comique.
[106] —
Produnt electri (v. 1060). Electrum,
nom dérivé du grec épithète du soleil, et donné à l’ambre, à cause
de sa couleur.
[107] —
Antidotus.... Mithridatica (v. 1064).
Tous les historiens s’accordent à dire que Mithridate voulut
s’empoisonner pour ne pas tomber au pouvoir des Romains, mais que le
fréquent usage qu’il avait fait des antidotes l’empêcha de réaliser
son dessein. Il est probable que celui dont parle Sammonicus n’était
pas le seul dont il fît usage.
[108]
— Juglandesque duas, totidem cum corpore ficus (v. 1069).
En y réfléchissant un peu, on ne
conçoit pas ce que l’auteur a pu vouloir dire par
ficus cum corpore.
Heinsius propose de lire:
Juglandisque duas trito cum
corpore ficus,
c’est-à-dire « deux figues avec une noix broyée. »
[109] —
Qui solus patriae cunctando restituit rem
(v. 1097). Vers d’Ennius, conservé par Virgile, qui n’a pas cru
pouvoir dire mieux en parlant de ce Fabius, qui fatigua Annibal par
ses marches et contremarches:
...................................Tu
maximus ille es,
Qul nobis unus cunctando restituis
rem.
(Enéide, lib. VI, v. 846.)
[110]
— Quae fertur nomine lathyr (v. 1100). Lathyr, par
syncope, pour
lathyris. Cette herbe parait être la même que celle que
nous appelons épurge.
[111] —
Conchyli sanguine tinctum (v. 1104). Le
murex ou purpura, poisson à coquille, dont les anciens tiraient la
couleur de pourpre.
[112] —
Ni violent, sanant juglandis fragmina clausas
(v. 1107). Littéralement : « Si le remède n’était trop violent, il
serait bon d’y recourir. » Toutefois l’auteur l’interdit moins qu’il
ne conseille d’en user avec précaution et ménagement.
|