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RUFUS D'ÉPHÈSE.

FRAGMENTS

 

 

Oeuvre numérisée par Marc Szwajcer

RUFUS D'ÉPHÈSE.

a

FRAGMENTS

DE

RUFUS D'ÉPHÈSE

EXTRAITS DE GALIEN.

 

 

 

1

SUR L'ATRABILE, liv. VII.

Celui de tous les modernes qui a le mieux écrit sur la mélancolie, c'est Rufus. On peut affirmer à bon droit qu'il ne laisse rien à désirer à ceux qui le suivent naturellement (de bonne volonté?), sans parti pris de le contredire et de le chicaner, ce qui est trop souvent la prétention de beaucoup de médecins contemporains, et surtout de ceux qui se font appeler Erasistratiens, Asclépiadiens et Méthodiques.

2

SUR LES TEMPERAMENTS ET VERTUS DES MEDICAMENTS SIMPLES, liv. VI.

Quant à Rufus d'Éphèse, il a parlé de beaucoup de médicaments dans ses Thérapeutiques, et il a laissé sur les Plantes un ouvrage en quatre livres écrit en vers hexamètres.

3

SUR LA COMPOSITION DES MEDICAMENTS SELON LES LIEUX, liv. I.

Le résidu de la barbe-de-bouc (salsifis?) nous a semblé donner lieu à une explication se rapportant clairement au ladanum. En effet, il a été reconnu qu'elle concorde avec des dispositions de même nature, et son origine, dans certains pays, se rattache au menton des boucs. C'est ce que fait voir Rufus d'Éphèse dans les vers qui suivent :

Tu trouveras une autre variété de ladanum dans la contrée des Erembi, adhérant au menton des boucs; car c'est un grand plaisir pour les chèvres que de brouter le bout des feuilles du ciste en fleur. Les chèvres remplissent ainsi d'une couche laineuse leur menton barbu et leurs flancs. Ce n'est pas contre les maladies que cette plante est le plus efficace, mais c'est plutôt l'exhalaison qu'elle produit qui est excellente : aussi a-t-on beaucoup de médicaments composés que la terre produit dans les plaines des Erembi.

4

LIV. VII.

Autre potion calmante, dont je me sers d'après (la prescription de) Rufus : Ecorce de mandragore, 4 drachmes ; cèdre, 5 drachmes ; poivre blanc, 2 drachmes ½ ; safran, 5 drachmes; graine de jusquiame, 4 drachmes; suc de pavot, 5 drachmes; myrrhe, 5 drachmes; nard, 3 oboles; casse noire, 4 drachmes; vous pilez le tout, puis vous en faites des trochisques sucrés d'une demi-drachme chacun. Ayez soin de les ranger à l'aboi de l'humidité ; faites-en prendre dans de l'eau chaude la valeur de deux cyathus, et, pour les cholériques, clans de l'eau froide.

5

TRAITÉ DES ANTIDOTES, liv. II, ch. II.

(Citation du poème ïambique de Damocrate[1] sur les antidotes)

Le cuphi n'est pas une mixtion simple, ce n'est pas non plus un produit végétal ni un suc exprimé (une résine?). Les Égyptiens l'emploient comme encens en l'honneur de quelques-unes de leurs divinités, et le préparent de la manière suivante :

Ils prennent du raisin sec blanc et très gras, ils en enlèvent la peau et tous les pépins, en pilent bien la chair dans la proportion de 24 drachmes, ajoutent une égale quantité de térébenthine brûlée, 12 drachmes de myrrhe, 4 de cinnamome, 12 de jonc, 1 de safran, 3 d'onglets de bdellium (?), 2 ½ de genêt épineux, 3 de nard en épi, 3 de belle casse, 3 drachmes de souchet pur, même dose de baies de genévrier grosses et grasses, 9 de roseau odorant, une quantité modérée de miel, une très petite dose de vin. Après avoir mis du bdellium, du vin et de la myrrhe dans un mortier, ils pilent bien, de façon à obtenir l'apparence d'un miel liquide; puis ils ajoutent du miel, ils y réunissent le raisin pilé, ensuite ils battent tout le mélange, et ils en font de petites rondelles avec lesquelles ils encensent les dieux.

Telle est la manière dont Rufus disait qu'il fallait faire cette prépa ration, Rufus, cet homme supérieur, si consommé dans l'art (médical).

6

COMMENTAIRE SUR LE TRAITE DES HUMEURS D'HIPPOCRATE, liv. I.

Les commentateurs anciens et modernes d'Hippocrate, ne comprenant pas ce que signifie le mot ἔῤῥιυις (projection), ont émis beaucoup d'opinions erronées à ce sujet. Glaucias, Héraclide de Tarente et Zeuxis, les premiers qui aient commenté l'ensemble des œuvres hippocratiques, pensent que le mot ἔῤῥιυις désigne un certain trouble qui se produit lorsque le malade ne peut rester en place, mais cherche à chaque instant une nouvelle position. Rufus d'Éphèse et Sabinus, parmi les modernes, prétendent que ce n'est pas cela, mais bien un symptôme plus alarmant, c'est-à-dire mortel, en ce sens qu'il a lieu lorsque l'on s'imagine que l'on va mourir. Une frayeur s'empare du malade en songeant à ses actions passées. Il est rempli de crainte et de souci, et dès lors ne veut plus ni boire ni manger. Tout l'épouvante, et sa défiance s'adresse non seulement au médecin qui le traite, mais encore à tous ceux qui l'entourent et le servent.


 

FRAGMENTS

DE

RUFUS D'ÉPHÈSE

EXTRAITS DORIBASE.

 

Extraits analytiques de la Collection médicale.[2]

 

 

7

Liv. I, ch. xl. Des figues.

Elles sont meilleures que les autres fruits d'arrière-saison. Les anciens (οἱ παλαιοί) en donnaient à manger aux athlètes.

8

Liv. II, ch. lxi. de la manière de boire le lait.

(Traité du Régime, περί διαίτης, liv. V, au milieu.)

Celui qui veut boire du lait doit s'abstenir des autres aliments et boissons jusqu'à ce que le lait soit digéré. Le prendre dès le matin, aussitôt trait; éviter ensuite tout exercice violent. Le lait purge avec avantage. Utile surtout dans les maladies chroniques de la poitrine, ainsi que dans les expectorations de matières purulentes. Contre les humeurs corrosives et pour relâcher le ventre, le boire mêlé avec du miel. Il favorise aussi les évacuations quand on y met du sel. Contre la dysenterie, le flux de bile, et, en général, contre toutes les affections du jéjunum, prendre du lait bouilli. Le faire bouillir à petit feu.

9

Ch. lxiii. Du meilleur miel. (Même traité, liv. II, des Boissons, vers la fin.)

On cite le miel de l'Attique comme le meilleur. Il en est d'autres qui le valent, par exemple celui de l'Hymette. Mauvais miel : celui de Marathon, de Milet, d'Aphidna, celui de Sicile. Bon miel : à Chios, à Syros, à Cythnos, à Syphnos, et en d'autres Cyclades, sur le mont Hybla en Sicile, en Crète, et en Béotie, près d'Œchalie.

10

Liv. IV, ch. iI. De la préparation des aliments. (Même traité, liv. Ier, vers la fin.)

Les mets rôtis dessèchent; les mets bouillis humectent. Les mets diffèrent aussi en raison des assaisonnements. Manière de reconnaître la ladrerie, d'accélérer la cuisson. Préparation des sauces; de la viande destinée aux vieillards; préparation des poissons, des oiseaux, des huîtres, du coing.

11

Liv. V, ch. iii. De. l'eau. (Même traité, liv. II, des Boissons.)

Les eaux sans écoulement (eau de puits, etc.) sont denses et indigestes; celles qui coulent sur une pente, ténues, digestives et diurétiques. L'eau des lacs est de tout point mauvaise. Exception en faveur des eaux des marais d'Egypte. L'eau de pluie excellente, surtout au printemps et en hiver. L'eau de neige ou de glace, indigeste, est nuisible aux nerfs, à la poitrine et aux côtés, produit des convulsions, occasionne des crachats sanguinolents. L'eau de source a des qualités diverses, suivant l'exposition. L'eau du Nil est d'une qualité supérieure, bien que les eaux du Midi soient, en général, assez médiocres. Influence de la pente et de la nature du sol sur les qualités des eaux. Influence des mines, des plantes, des canaux. Les eaux de bonne qualité doivent être chaudes en hiver et froides en été, n'affecter le palais d'aucun goût particulier, s'échauffer et se refroidir vite. Qualités merveilleuses de certaines eaux (exemples curieux). Pour rendre l'eau potable, on la fait bouillir dans un vase de terre, puis refroidir, et on la boit après l'avoir fait chauffer de nouveau. Procédé pour l'usage d'une armée : la faire filtrer dans des fossés garnis de terre glaise.

12

Ch. vII. — Sur le vin. (Même traité, Liv. II, des Boissons.)

Le vin est précieux comme soutien de la santé, lorsqu'on ne s'attire pas, en en abusant, un mal quelquefois irrémédiable. Mauvais effets immédiats de l'excès du vin. Effets secondaires.

13

Ch. ix. Du vin doux cuIT (περί σιραίου). (Même traité, liv. II.)

Ce vin a la propriété de réchauffer, mais moins que le vin (naturel); il reste dans l'estomac, il épaissit le sang, il gonfle le foie et la raie.

14

Ch. xi. Sur le vinaigre. (Même traité, liv. II.)

Le vinaigre est d'un usage très fréquent, et même indispensable pour certains assaisonnements. Est excellent pour l'entrée de l'estomac (εὐκαρδιώτατον), favorise la digestion, combat la pituite. Le meilleur vinaigre est celui qui provient des vins forts et âpres.

15

Ch. xii. Sur la boisson faite avec du marc de raisin (piquette).

(Même traité, Liv. II.)

Mode de préparation. Cette boisson, bien bouillie, est un diurétique actif; non bouillie, elle se change en mauvais vinaigre. Dioscoride y, ajoute du sel, la conserve dans des vases de terre cuite, conseille de ne pas lui faire dépasser l'année, vu qu'elle se gâte rapidement.

16

Liv. VI, ch. xxxviii. Du coït et aussi du régime.

Le coït refroidit le corps. Effets différents des rapports entre homme et femme, et des rapports entre hommes. Avantages du coït.[3] Considérations relatives au régime dans ses rapports avec cet acte. Temps le plus favorable. Inconvénients à éviter. Observations recueillies par Rufus.

17

Liv. VII, ch. xxvi. Des médicaments purgatifs.

Ne pas purger tout individu dans quelque état qu'il se trouve. Eviter de purger ceux qui ont de l'embonpoint ou une complexion phtisique. Epoques défavorables : les changements de saison; les levers ou couchers des constellations telles qu'Arcture, les Pléiades; les solstices, les équinoxes, la canicule. Administration du purgatif par le haut ou par le bas, suivant les complexions. Les meilleures saisons pour purger sont le printemps et l'automne. Signes qui dénotent la nécessité d'une purgation. Régime à suivre en cas de purgation. Provenance des principaux purgatifs. Médicaments purgeant par le haut, par le bas. Nomenclature des purgatifs avec l'indication de la dose, et l'appropriation aux diverses maladies. Préparation, mélanges, conditions extérieures et accessoires, auxiliaires. Effets de l'ellébore blanc ; son emploi.

18

Liv. VIII, ch. xxi. Comment on vomit avec facilité.

(Traité des Emétiques, dédié à Potamonien.)

Régime préliminaire. Estomac rempli modérément. Aliments appropriés : raifort, oignon, etc. Boissons tièdes. Un peu de sommeil. Se laver le visage après le vomissement, et se faire frictionner les membres inférieurs. (Cp. Synopsis d'Oribase, I, xviii.)

19

Ch. xxiv. Des injections.

Injections administrées au moyen du clystère. Lavements émollients. Moyen d'augmenter la force du lavement. Prendre en considération l'âge, le genre de vie, la capacité des intestins, la gravité des affections ou des accidents. Lavements âcres (δριμεῖς κλυσμοί). Signes particuliers qui indiquent l'affection de chaque partie (intestinale), et emploi, suivant les circonstances, de la canule percée latéralement ou de la canule percée à son extrémité. Injections dans le vagin. (Cp. Synopsis d'Oribase, I, xix.)

20

Ch. xxxix. Des suppositoires.

Emploi des suppositoires (βαλάνια) réservé pour ceux qui ne peuvent supporter les lavements. Individus qui ne se prêtent pas au traitement par les suppositoires. Mode d'administration.

21

Ch. XL.  LINIMENTS (POUR L'ANUS[4]).

Les liniments sont employés chez ceux dont l'anus est très resserré, ou dont les parties sont assez délicates et faibles. Enumération des principaux liniments. Soins préliminaires. Retour à l'administration des suppositoires.

22

Ch. xlvii. (Purgatif) sacré à la coloquinte.

(Extrait du traité sur les maladies des articulations ou la goutte.)

Primitivement inventé contre la pleurésie. Ne purge pas très rapidement. Dose. Efficace contre les douleurs articulaires, contre la goutte. Composition.[5]

23

Livres incertains,[6] ch. ii. Du régime des jeunes filles.

Les filles qui restent vierges plus longtemps qu'il ne convient tombent en proie à un grand nombre de maladies causées le plus souvent par la pléthore. Il faut attacher une grande importance au régime des filles nubiles. Nourriture légère, exercices fréquents. Les chœurs de danse et de chant ont un bon effet hygiénique pour les jeunes filles. Elles doivent boire de l'eau. Veiller au premier mouvement des règles, qui est souvent pénible et critique. Aider la menstruation au début. Eviter les emménagogues en dehors de l'abstinence, du repos et de quelques légères fomentations.

24

Ch. in. De la grossesse.[7]

Nécessité de prescrire un régime pour les femmes enceintes.

25

CH. vi. Des signes de la conception, et du régime [des femmes enceintes].

Si la femme a eu des rapports sexuels au commencement ou vers la fin des règles. Si elle a des maux de cœur. Lorsque la conception est présumable, elle doit se reposer, autant que possible, dormir, éviter toute espèce d'agitation physique ou morale, s'abstenir de légumes verts et de bains, recourir aux promenades sans se fatiguer. Après la première quinzaine, augmenter la force de l'alimentation et les exercices. Éviter les sauts, l'enlèvement de fardeaux trop lourds, les mouvements trop brusques, les bruits trop forts, les émotions violentes. Ne pas supprimer, mais ne pas trop multiplier non plus les rapports sexuels. User modérément des bains. Éviter l'éternuement. Appliquer des cataplasmes sur le ventre. Provoquer et entretenir l'appétit par des mets agréables, par de longs voyages. Un bon exercice, c'est le chant et la déclamation. Traitement pour le gonflement des pieds.

26

Ch. ix. Sur les rapports sexuels.

Régime à suivre quand on se livre fréquemment aux rapports sexuels.

Bains chauds, promenades modérées, frictions douces, alimentation nourrissante, mais légère, boissons tempérées, sommeil suffisant. Éviter les émotions fortes, les bains de vapeur, les sueurs, les vomissements, l'ivresse, et généralement tous les excès. (Cp. plus loin le fragment 41)

27

Ch. xii. De la manière d'Élever les enfants.[8]

Soins à donner à l'enfant aussitôt après l'accouchement. Couper le cordon ombilical. Déterger le corps de l'enfant, le saupoudrer avec du sel, l'emmailloter ; lui donner à sucer du miel écume, lui faire avaler quelques gouttes d'hydromel tiède, le faire téter, mais, autant que possible, seulement le quatrième jour. Bander le nombril aussitôt que le cordon sera tombé.

28

CH. xiii. Du choix d'une nourrice.

S'assurer une nourrice avant la naissance de l'enfant; la choisir entre vingt-cinq et trente-cinq ans, bien constituée, bien portante, un peu corpulente, ayant des seins d'une grandeur moyenne, sobre, propre, non colère. Régime à lui faire suivre. Aliments et boissons à éviter pour elle. Elle devra s'abstenir des rapports sexuels, se livrer à certains travaux à titre d'exercices. Moyens d'éviter un mauvais lait.

29

Ch. xiv. De la nourrice.

Durée de l'allaitement (jusqu'à la troisième année de l'enfant). Résumé du chapitre précédent.

30

Ch. xx. De la. manière d'Élever l'enfant.

Précautions à prendre pour faire baigner le nourrisson. Ce soin doit être confié à la sage-femme plutôt qu'à la nourrice. Le premier aliment à donner à l'enfant est le miel, puis le lait, puis enfin des viandes légères. Ne pas le tenir trop souvent dans les bras. Le laisser crier afin de lui faire expulser la salive et le mucus ; mais toutefois calmer ses cris lorsqu'ils risquent de lui donner des convulsions. Éviter pardessus tout de l'effrayer par un grand bruit, par des cris dans ses oreilles, par des surprises trop brusques, telles que des apparitions subites de spectres, etc. Si l'enfant est effrayé, on le rassurera et l'on tâchera de l'endormir.

31

Liv. XXV, ch. ier. Des noms des parties de l'homme.

Utilité de la connaissance de ces noms en médecine. Tête, cou, thorax, et leurs parties. Bras, côtes, vertèbres, siège, jambes.[9]

32

Liv. XLIV, ch. xvii. Du bubon.

Bubon (ordinaire) du cou, des aisselles ou des cuisses, avec ou sans lièvre. Bubon pestilentiel souvent mortel, particulier à la Libye, à l'Egypte et à la Syrie. C'est parfois la suite d'une affection des parties génitales.

33

Ch. xx. De L'Épinyctis.

Petit ulcère se produisant spontanément sous la forme d'une vésicule rougeâtre. Très douloureux, surtout la nuit. Traitement : suc de silphium délayé dans de l'eau, etc.

34

Ch. xxviii. De l'erésipèle.

Les érésipèles qui surviennent aux plaies sont tous de mauvaise nature. De même ceux qui rentrent (ἀφανιζόμενα) et ceux qui sont suivis de fièvre. Un érésipèle sur la poitrine disparaissant avec dyspnée, somnolence et rougeur des pommettes, peut dégénérer en péripneumonie et causer promptement la mort.

35

Liv. XLV, ch. viii. Du ganglion.

On distingue les ganglions indolents et ceux d'espèce maligne, qui sont le siège de douleurs périodiques ou irrégulières. Les ganglions situés au carpe se dissipent quand on les comprime.

36

Ch. xi. Des acrochordons et des carcinomes.

Citation, par Rufus, d'un fragment du médecin Xénophon concernant une variété maligne et cancéreuse de l'acrochordon ; excroissance noire, raboteuse, volumineuse, arrondie. Ces carcinomes, considérés isolément, tantôt s'accroissent, tantôt diminuent; le plus souvent ils restent simples. Ils affectent les lèvres, les oreilles, le nez ou le cou, le siège, les parties génitales, les paupières, le thénar de la main, les aisselles, le pubis, le sein, surtout celui des femmes. Ces tumeurs doivent n'être excisées qu'avec la plus grande circonspection, afin d'éviter qu'elles ne s'ulcèrent.

37

Ch. xxviii. De l'Éléphantiasis.

Les anciens ne nous ont rien appris sur l'éléphantiasis, appelée cacochymie par Straton. On a distingué les variétés dites léontiasis, satyriasis, termes qui désignent plutôt les différents degrés précédant l'éléphantiasis. Description des symptômes : bosselures livides et noires sur la face, aux bras, aux jambes, au dos, à la poitrine, au ventre, etc.; tuméfaction des lèvres, putréfaction des chairs, chute des ongles, etc. Son origine est aussi profonde que celle du carcinome.

38

Ch. xxxi Des dépÔts.

Parmi les maladies, il y en a qui sont calmées par le traitement médical, et d'autres par suite de dépôts ou de la substitution d'autres affections. Il ne faut pas toujours détourner ou combattre certaines transformations du .mal qu'on entreprend de traiter. Exemples. Il y a donc tels accidents (énumérés plus bas) qu'il faut réprimer, et d'autres qu'on doit moins contrarier que favoriser. Nouveaux exemples avec développements. La fièvre quarte guérit de l'épilepsie, de la mélancolie, de la lèpre. Heureux effets de quelques autres lièvres; des tumeurs qui se forment contre les oreilles. La dysenterie est bonne dans certaines fièvres. A l'état chronique, elle guérit l'épilepsie, les vertiges, les douleurs de tête, la mélancolie, etc. Bienfait des hémorroïdes, des varices, des suppurations, de l'inflammation locale, de la goutte, des efflorescences survenant à la peau.

Dangereux effets de certaines transformations ou successions morbides, telles que l'hydropisie survenant dans les affections de la rate ou du foie, la péripneumonie succédant à la pleurésie, etc.

Méthode à suivre pour savoir si l'on doit provoquer ou conjurer un dépôt ou la substitution d'une maladie à une autre.

39

Liv. XLIX, ch. xxvi. Banc d'Hippocrate.

Hippocrate a donné à la machine inventée par lui tantôt le nom de madrier (ξύλον), tantôt celui de planche (σχίδιον). Plus tard, on l'a nommée banc (βάθρον), en y ajoutant des pieds. Description, d'après Pasicrate. (Voir dans les œuvres d'Oribase, t. IV, page 698, la figure représentant cette machine, avec une explication d'après M. Littré.[10])

40

Liv. LI, ch. xli. De L'ulcère pestilentiel.

Il existe un ulcère dit pestilentiel, accompagné d'inflammation grave, de fièvre aiguë et de délire. Induration dans l'aine, annonce de la mort du malade. Ces affections sont contractées principalement dans le voisinage des marais.

 

Extraits analytiques de la Synopsis.[11]

 

 

 

41

Liv. Ier, ch. vi, Sur les rapports sexuels.

Avantages qu'on retire de ces rapports : évacuation de la pléthore, allègement du corps, développement de la croissance et de la virilité. Ils dissipent les idées fixes (συνεστεκότα λογισμόν), calment la colère, guérissent la mélancolie, diminuent les accès de délire, sont très efficaces contre les affections causées par la pituite. Chez certains, ils excitent l'appétit, font cesser les pollutions nocturnes. Natures plus ou moins aptes à ces rapports. Régime qui les favorise et les rend profitables. (Voir la vieille traduction latine, Œuvres d'Oribase, t. V, p. 807. Cp. Collection d'Oribase, liv. VI, ch. xxxviii, et livres incertains, ch. 9.)

42

Ch. xvIIi, Comment on vomit avec facilité.

Exposé des diverses méthodes à pratiquer. Aliments de nature humide et sucrés, tisane au miel, purée de fèves, viandes grasses. Eviter une mastication prolongée. Vins d'un goût sucré, pris tièdes, etc. (Voir la vieille traduction latine, Œuvres d'Oribase, t. V, p. 821. Cp. Collection d'Oribase, VIII, xxi.)

43

Ch. xix. —·Des lavements.

Deux sortes de lavements, les uns émollients, les autres âcres (δριμεῖς). Parmi les premiers figure l'eau simple, assez chaude, la décoction de fenugrec, de mauve, de graine de lin, de son, etc. Lavements d'huile pure en cas d'inflammation ou de coliques produites par des flatuosités. Lavements de lait en cas d'ulcération et d'inflammation des intestins, des reins, de la vessie ou de l'utérus.

Emploi des lavements âcres en cas dé sciatique et d’Orthopnée, etc. ; contre l'empoisonnement par les champignons, contre les ascarides et autres vers intestinaux; en cas d'ulcération des intestins. (Voir la vieille traduction latine, Œuvres d'Oribase, t. V, p. 823. Cp. Collection médicale, VIII, xxiv.)

44

Liv. ΙII, ch. lxxxviii[12] (in extenso). PÂles couleurs, taches livides.

Onction entalique (réactive?) plus énergique :

Myrrhe, soufre, carthame (moelle), 1 drachme de chacun ; nigelle, 2 drachmes; pyrèthre, 2 oboles; 30 grains de poivre noir; 20 grains de daphné-cnidium bien épluché. Après avoir concassé, piler le tout ensemble, en y joignant 1 drachme d'oignon marin (scille). Lorsque le mélange est bien effectué, faire fondre un peu de cire dans de l'huile de ricin et du miel, verser [fonction sur la partie malade] et frotter. La dose du miel et de l'huile sera d'une cotyle pour chacun. Certains se frottent aussi le siège de cette onction avant le coït, avec un linge, afin de le rendre parfaitement propre. (Voir la vieille traduction latine, tome V des Œuvres d'Oribase, p. 869.)

45

Liv. III, ch. cLxviii (in extenso).  Savon pour enlever les rides.[13]

Une personne frottée de ce savon verra les parties ridées de sa peau bien tendues. On pile avec des figues grasses de la vigne blanche et de la farine d'ers, de l'os de sèche brûlé; arroser le tout d'un peu de miel. (Voir la vieille traduction latine, t. V des Œuvres d'Oribase, p. 882.)

46

Liv. III, ch. ccx (in extenso).

[Remède] sacré de Rufus. Sicyonie ou coloquinte (son intérieur), 20 drachmes; germandrée, 10 drachmes; champignon agaric, 1 ο drachmes ; assa fœtida, 8 drachmes ; suc de panax, 8 drachmes ; persil sauvage, aristoloche ronde, poivre blanc, 5 drachmes de chacun; cinnamome, cannelle (tige), épi de nard, safran, myrrhe, polium, 4 drachmes de chacun. Mélanger le tout, hacher menu, arroser de miel, faire déposer et faire prendre k drachmes au plus. (Voir la vieille traduction latine, Œuvres d'Oribase, t. V, p. 891. Cp. ci-après fragment 55 (liv. IV des Euporistes, ch. cxliv, même vol., p. 793, où le texte est entaché de plusieurs lacunes qui le défigurent). On rapprochera de ce morceau le texte d'Aétius (III, cxv; voir plus loin, fragment 61), celui de Paul d'Égine (VII, viii; plus loin, fragment 119), et enfin la vieille traduction latine du traité perdu de Rufus, de Podagra, au ch. xix, ci-dessus, p. 267.

47

Liv. iiΙ, ch. ccxvii (in extenso).

 [Antidote] simple. Coloquinte, 2 drachmes; marrube, germandrée, stéchas, 10 drachmes de chacun; gentiane et champignon agaric, 12 drachmes de chacun; résine de palmier, nard (épi), safran, cinnamone, 8 drachmes de chacun ; laurier-casse, fleur de jonc, poivre blanc, poivre long, scille grillée, 6 drachmes de chacun; racine de centaurée, 4 drachmes. Piler le tout, mélanger dans une décoction de panax avec de la résine de palmier et du miel bien cuit.

48

Liv. IV, ch. xl. De la manière de boire du lait.

Celui qui boit du lait ne doit pas prendre d'autres aliments avant que le lait absorbé soit digéré et qu'il ait passé par le bas. Le prendre le matin, aussitôt trait; éviter les exercices violents, se reposer sans dormir, absorber des portions successives au fur et à mesure de l'évacuation. Le lait bouilli est d'un bon effet contre les flux bilieux, etc. Manière de faire bouillir le lait.

49

Liv. VI, ch. xxv. — De la peste.

Grande variété des accidents qui peuvent accompagner la peste, signes avant-coureurs de la peste. Usage des purgatifs en cas de pituite, et de la saignée en cas de surabondance de sang. S'appliquer à ramener la chaleur du fond du corps aux extrémités.

50

Liv. VIII, ch. xlix. Du glaucome et de la cataracte (πόχυμα).

Différences qui distinguent ces deux affections. Tous les glaucomes sont incurables, toutes les cataractes ne sont pas curables. Traitement de la cataracte par la saignée, la purgation, les évacuations. Deux formules.

51

Liv. IX, ch. XXV. De L'INDURATION DES REINS.[14]

Cette induration ne cause pas de souffrance, mais plutôt la sensation d'un poids qui serait fixé dans la région iliaque. Autres caractères. Traitement par les émollients, les frictions, les diurétiques et les lavements laxatifs.

52

Ch. XXVIII.  DE L'INFLAMMATION DE LA VESSIE.[15]

Gravité de cette affection. Caractères généraux. Traitement par la saignée, les embrocations, les lavements laxatifs. Fomentations, bains de siège de graine de lin ou de fenugrec, cérats.

53

Ch. xxxv.  Traitement du diabète.

Traiter cette maladie en provoquant des vomissements aussitôt après avoir bu. Suivre un régime très froid, manger des herbes potagères cuites, etc. Bains de vapeur dans un tonneau, avec inspiration d'air froid. Cataplasme diversement composé sur l'hypocondre. Au début, saignée au pli du bras. Dans certains cas, emploi de remèdes narco tiques.

 

Extraits du traité intitule des Euporistes ou

médicaments faciles à se procurer et dédie A eunape.[16]

 

 

 

54

préambule (extraits in extenso).

Rufus, homme d'un grand talent, a écrit un livre adressé aux personnes qui ne sont pas du métier. Cependant ce livre ne renferme pas tout ce qu'à mon avis on doit savoir, mais seulement ce que le vulgaire peut faire…………………………………………………………...

J'entreprendrai donc, suivant la nature de mes forces et comme tu le désires, d'exposer les divers modes de traitement et tous les remèdes faciles à préparer, tirant cette exposition en partie des écrits de Galien, où l'on trouve l'indication de ces remèdes, en partie de ceux de Rufus d'Éphèse et d'autres médecins, en faisant un choix de ce qui rentre dans mon dessein, et de ce dont j'aurai moi-même fait l'expérience…………..

55

Liv. IX, ch. cxliv.

Le (remède) sacré. Même morceau que dans la Synopsis d'Oribase, liv. III, ch. ccx. (Fragment 46.)


 

FRAGMENTS

DE

Rufus d'éphèse

EXTRAITS D'AÉTIUS.

 

 

 

56

Synopsis médicale, liv. I, ch. cccxxvn. La rUe.

La rue sauvage appartient à la quatrième classe des échauffants et des desséchants, tandis que la rue cultivée n'appartient qu'à la troisième. Le goût de cette plante n'est pas seulement âcre, mais aussi amer, ce qui lui donne des propriétés incisives des humeurs visqueuses, favorables à leur perspiration et à l'évacuation de l'urine. En outre, elle est subtile et chasse les vents; et, par la même raison, elle convient contre les flatuosités. De plus, elle réprime les désirs aphrodisiaques et dessèche très bien, car c'est un desséchant des plus énergiques. Rufus s'exprime ainsi : La rue sauvage a pour effet d'enflammer et de produire des ulcères, surtout à la vessie. Voilà pourquoi ceux qui boivent le remède antipodagrique (lequel a pour base la rue sauvage), sont affectés douloureusement à la vessie. Quant à ceux qui seraient capables de le supporter, ils s'en trouveront évidemment très bien, car ce remède est bon contre les affections arthritiques. Si vous y mêlez de la rue cultivée, l'effet sera encore plus sûr, bien que cette espèce soit encore défavorable à la vessie, mais moins. Nous employons la rue sauvage pour les personnes chez lesquelles nous voulons réchauffer telle partie refroidie; elle est utile aux gens sujets aux flatuosités et hydropiques, aux personnes atteintes d'anasarque, ou piquées soit par une vipère, soit par une musaraigne, notamment si la musaraigne, auteur de la morsure, est pleine, et surtout…………….? C'est un antidote énergique contre le suc de pavot et contre l'aconit, lorsqu'on le prend avec du vin. Quant à la, rue cultivée, elle calme les frissons des fièvres périodiques, si on la boit avant la manifestation [de l'accès] ; dans le cas des coliques, [on l'emploie] en potion et en lavements, comme aussi dans celui de l'étranglement hystérique. Elle aiguise la vue lorsqu'on la prend comme aliment. Voilà pourquoi les peintres qui en mangent d'une manière continue ont une vue meilleure [que les autres personnes]. Le suc de cette plante mélangé avec du miel produit aussi un médicament favorable à la vue. Cuite dans l'huile, elle est encore d'un bon effet contre la dysurie et contre l'inflammation de la vessie ; car elle ne le cède à aucun remède dans ces diverses affections. Dans les douleurs au flanc, lorsqu'il y a dyspnée, pris avec du miel, ce remède soulage instantanément. Pour les léthargiques, il est excellent pris soit en potion, soit en lavement. On peut encore, après avoir pilé la rue avec de l'huile aux roses et du vinaigre, leur en frotter la tête. Elle peut dissiper les douleurs sciatiques, prise soit en potion, soit en lavements, soit en cataplasmes. Employée, sous cette dernière forme, pour les podagres et ceux qui ont les genoux enflés, elle opère promptement et fait bientôt disparaître les douleurs. Enfin elle fait tomber les escarres, employée dans un cataplasme où l'on fait entrer du miel et des raisins secs.

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Liv. II, ch. lxxxvi. Extraits de Rufus et de Galien sur le lait.

On emploie le lait de deux, manières, comme aliment et comme remède. Le lait préférable pour la santé, c'est celui qui est pur, clair, auquel on ne trouve ni acidité ni goût aigre, salé ou amer, ni mauvaise odeur, mais qui est, pour ainsi dire, ou d'une odeur agréable, ou même inodore, ou ne laisse percevoir qu'une odeur agréable, mais très peu prononcée. Il paraît évidemment bon à ceux qui le goûtent, lorsqu'il est un peu doux (sucré?). Il faut examiner d'abord les variétés de lait.

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Ch. xcii.  Sujets auxquels le lait convient.

Le lait est encore très efficace pour ceux qui ont avalé une cantharide ou un taon, et d'un effet absolu pour combattre les poisons produisant la décomposition et l'ulcération; de même contré la jusquiame, attendu que (le lait) est un contrepoison ; il rend aussi le calme à ceux qu'une passion agite; on l'emploie encore contre les ulcérations qui se produisent au pharynx ; en beaucoup d'autres cas, notamment dans les angines, et pour ceux qui ont absorbé de l'éphémère.[17] On se trouvera très bien de faire boire du lait aux personnes qui ne peuvent s'alimenter, qui ne peuvent boire, qui ne peuvent se refaire (à la suite d'une maladie). Il est utile contre les humeurs âcres et les congestions sanguines qui se portent aux yeux; notamment, appliqué extérieurement sur les paupières, au moment où l'on va s'endormir, avec un mélange d'eau de rose et d'œuf, il y calme l'inflammation ; de même lorsque nous voulons conjurer les ulcères au siège, accompagnés de suppuration âcre et d'inflammation.

Nous l'employons encore contre les ulcères situés sur les parties géni tales, et généralement contre toutes les affections qui réclament un soulagement à l'inflammation, à la corrosion ou à la malignité de la maladie.

C'est aussi pour ce motif qu'il est en usage, dans les cas d'affection cancéreuse, mélangé aux remèdes anodins, surtout ceux qui sont administrés à l'état mousseux. On voit que le lait, d'une manière générale, est un calmant, sa nature étant exempte d'action corrosive, surtout si nous épuisons la substance séreuse dans la cuisson ou par quelque autre procédé.

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Ch. XCIII.  De LA MANIÈRE D'EMPLOYER LE LAIT, DU MOMENT OPPORTUN ET DE LA QUANTITÉ À PRENDRE.

Une précaution capitale, lorsqu'on veut se mettre au lait, c'est de s'abstenir de toute autre nourriture, de toute autre boisson, jusqu'à ce que le lait absorbé soit digéré et même évacué; car, si l'on prenait quelque autre aliment avant que le lait fût digéré, il arriverait nécessairement qu'il se corromprait, ainsi que l'aliment pris à sa suite. Le meilleur moment pour le boire, c'est à l'aurore, quand on vient de le traire. Il faut alors éviter une trop grande fatigue, marcher tranquillement et par intervalles, se reposer sans dormir, car c'est le moyen de le faire passer par en bas, entraînant avec lui les matières nuisibles. Il est bon, si l'on a d'autre lait, d'attendre que la première portion soit évacuée, puis, l'évacuation ayant eu lieu, d'en boire une seconde. Ainsi, comme premier effet, il purge d'abord avantageusement, agissant non sur le corps entier mais sur le bas-ventre, les intestins et les autres parties avoisinantes. Ensuite il se répand dans les veines, il alimente très bien et n'est plus évacué, mais, au contraire, tend à resserrer le ventre.

Quant à la quantité à prendre, il est impossible de la déterminer d'une manière générale, pas plus que [celle de toute autre] nourriture ou boisson, mais (il faut en prendre) autant que l'on peut en supporter aisément. Contre les humeurs corrosives, contre l'obstruction (de l'estomac), il est bon de le boire avec un peu de miel, ce qui le rend plus efficace, plus détersif et d'une action plus grande sur les selles; le mélanger encore avec du vin nouveau cuit et du vin d'un goût sucré, car ce mélange le rend encore: plus stomachique. Son action comme évacuant est plus forte, si l'on y met du sel, mais alors il est moins agréable à .boire.

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Liv. III, cH. viii. Sur les rapports sexuels.

L'acte vénérien est un acte naturel. Aucune des choses naturelles n'est nuisible, mais cet acte, effectué d'une façon immodérée, trop prolongée, mal à propos, peut devenir préjudiciable, principalement pour ceux qui sont faibles en ce qui touche le système nerveux, la poitrine, les reins, le flanc, l'aine ou les pieds- Voici des indices auxquels on reconnaîtra le mal. Toute force humaine s'amoindrit par l'usage qu'on en fait; or, la force, c'est la chaleur naturelle qui existe en nous. Par suite, les digestions ne sont pas bonnes chez ceux qui se livrent [avec excès] au coït; ils deviennent pâles, leur vue et leur ouïe s'altèrent, aucun de leurs sens ne conserve sa forcé. Ils perdent la mémoire, contractent un tremblement (convulsif), ont des douleurs articulaires, surtout dans le côté. Les uns deviennent néphrétiques, d'autres y gagnent une maladie de la vessie ; d'autres encore ont la bouche remplie d'aphtes, souffrent des dents et ressentent une inflammation du gosier.

Beaucoup d'hommes, à la suite de coïts multipliés, crachent le sang, soit en raison de leurs violents efforts pour retenir et suspendre leur souffle, soit par le concours des veines et des artères entraînées de la poitrine vers les testicules.

Quant à la femme, il est très rare qu'elle crache le sang à la suite du coït, d'abord parce que son corps a une autre humidité [que celle de l'homme], puis parce qu'elle fatigue moins dans cet acte, et enfin à cause de ses fréquentes purgations (sanguines) par en bas. Aussi, lorsqu'une femme, par hasard, crache le sang, ses menstrues lui apportent un remède très efficace. Par les motifs qui précèdent, les bons médecins ont soin de prescrire, soit qu'il survienne quelqu'une des affections sus-énoncées, soit qu'il y ait lieu de les redouter, vu la faiblesse naturelle de l'individu, l'abstention des plaisirs vénériens.

Jusqu'ici nous avons parlé des mauvais effets (de ces actes), des affections qui les accompagnent, et cela aussi sommairement qu'il nous était possible de le faire; maintenant il nous resté à parler des avantages qu'ils comportent. En effet, ils ne sont pas absolument nuisibles, ni pour tout le monde, pour peu que l'on considère l'opportunité de l'acte, la me sure à y mettre et la constitution sanitaire de la personne qui l'accomplit.

Les avantages qu'il procure sont les suivants : il évacue la pléthore, il rend tout le corps léger, provoque la croissance et augmente la virilité. Pour les tempéraments durs (portés à la constipation?), pratiqué avec de nombreux, intervalles, son emploi est d'un bon effet, car il ramollit les organes, élargit les pores, purge quelque peu la bile, délie l'esprit épaissi; enfin il produit un mouvement de détente sur les plus grandes colères.[18] C'est encore pour la même raison que le mélancolique à la tête basse, au naturel misanthrope, trouvera le meilleur remède dans l'acte vénérien. Il ramène aussi à un état d'esprit plus sain les personnes affectées d'une autre maladie mentale; il a fait cesser l'épilepsie chez plusieurs, ainsi que les lourdeurs et douleurs de tête, à l'époque de l'entrée dans l'âge de puberté. Hippocrate a dit en un seul mot qu'il est excellent contre les maladies qui dépendent de la bile. Bien des individus émaciés par suite d'une maladie, se restaurent[19] par le moyen de celte pratique. Certains autres y gagnent une respiration facile, de gênée qu'elle était, d'autres le goût de la nourriture, qu'ils avaient perdu, d'autres encore, la cessation de pollutions nocturnes continues.

Quant aux natures plus particulièrement aptes à l'acte vénérien, les plus chaudes et les plus humides y sont aussi plus disposées que les autres; les natures sèches et froides y sont le moins propres; la fleur de l'âge s'y prête très bien, la vieillesse nullement. La saison favorable est le printemps ; les saisons contraires, l'automne et l'été ; l'hiver ne s'y prête pas non plus à cause de son effet réfrigérant. Le régime le plus chaud et le plus humide est le plus favorable, et celui qui l'est le moins, c'est le régime desséchant et refroidissant ; car le régime humide convient bien, au point de vue de cet acte, à celui qui en est incapable.[20] Il faut donc que le régime soit humide et chaud. On doit éviter les excès de travail et rechercher une nourriture appétissante. Le vin doit être couleur paille et léger, le pain de pur froment, cuit au four. On prendra de la viande de jeune bouc, d'agneau, de porc; en fait de volailles, des poulets, des coqs de bruyère, des perdrix, des oies et des canards; en fait de poissons, des poulpes et tout ce qui porte le nom de mollusques; en fait de légumes, de l'ermin, de l'érésymon, de la roquette, des raves cuites deux fois et bien ramollies. En effet, tous ces aliments ont un caractère thérapeutique. Comme légumes secs, on prendra des fèves, des pois chiches, des haricots, de l'ers, des pois, toutes cosses[21] ayant pour double effet de provoquer des flatuosités et de fournir une nourriture abondante. Je recommande aussi le raisin de premier choix pour le régime dont il s'agit en ce moment, car il rend le corps humide et le remplit de sang et de flatuosités.[22]

Celui qui se dispose à pratiquer l'acte vénérien doit se tenir en garde contre les plénitudes récentes, les indigestions, l'ivresse, aussi bien que le défaut d'alimentation. En effet, il est dangereux de s'y livrer avec des superfluités dans le corps, ou en sortant soit du gymnase, soit du bain. Il faut aussi éviter la fatigue, les vomissements qui viennent de se produire, ainsi que les évacuations, seulement quand elles sont subites, car l'exercice vénérien tarit les diarrhées chroniques. Le meilleur moment, c'est après avoir mangé sans s'être chargé l'estomac; car, dans ces conditions, l'acte contribue à fortifier, et le refroidissement (du corps) est moins à craindre. Si l'on désire [se livrer à cet acte] après déjeuner, il faut se reposer jusqu'à ce que la nourriture soit passée; si c'est après dîner, il faut dormir un moment. Je ne suis pas pour les désirs trop ardents; je recommande plutôt de les combattre, surtout à ceux qui sont malades par suite d'excès vénériens.

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CH. CXV. REMÈDE SACRÉ DE RUPUS CONTRE LES ACCÈS DE MÉLANCOLIE.

REMÈDE SACRÉ DE RUFUS, TIRÉ DE SES LIVRES SUR LES MÉLANCOLIQUES.

Coloquinte (moelle), 2 dr. ½ ; ivette, 10 drachmes; germandrée, 10 drachmes; casse, 5 drachmes; champignon agaric et marrube, 10 drachmes de chacun; suc de panax, 1….....; assa fœtida, persil sauvage, aristoloche ronde, poivre blanc 5 drachmes de chacun; cinnamome, nard en épi, safran, myrrhe troglitide, polium, 4 drachmes. Former une liaison du tout avec du miel et administrer une dose complète de 4 drachmes dans de l’hydromel et de l’eau salée. Il est de quelque utilité, pour le diagnostic, de promener cette onction à partir de la tête. Par suite, j’ai l’habitude d’appliquer ce remède particulièrement contre les vertiges, les lourdeurs de tête, les glaucomes observés de longue date, les cas d’épilepsie, de paralysie locale, s’il faut rappeler le souvenir [de ma pratique]. Pour l’individu affecté de mélancolie, il n’est pas d’une efficacité médiocre et quelconque; aussi doit-on le faire servi souvent de purgation à cette sorte de malades. En effet, tel remède est composé de telle autre façon en vue de telle ou telle autre maladie, suivant telle application; or, dans les affections mélancoliques, on peut employer celui-ci à la dose de la grosseur d’une fève par jour, à titre d’antidote et non pas de purgation. Il est très bon pour faciliter la digestion et conjurer les flatuosités. Je suis d’avis qu’après toutes les purgations énergiques il est utile de boire 2 drachmes d’une décoction de mauve.

Coloquinte (moelle), 20 onces ivette, 10 onces; suc de panax, 8 onces ; assa fœtida, 5 onces ; poivre long, 5 onces; cinnamome, 4 onces; nard en épi, safran, myrrhe troglitide, politum, 4 onces de chacun ; former une liaison du tout avec du miel, et administrer une dose complète de 4 onces dans de l’hydromel et de l’eau salée, fi est de quelque utilité, pour le diagnostic, de promener cette onction à partir de la tête. Par suite, si nous rappliquons particulièrement contre les vertiges, les lourdeurs de tête, les glaucomes observés de longue date, les cas d’épilepsie, de paralysie locale, nous parvenons à les guérir. S’il faut rappeler le souvenir de ce que nous avons dit dans les Mélancoliques, on en tirera, sous ce rapport, un avantage considérable et prévu. En effet, tel remède est composé de telle autre façon, en vue de telle ou telle autre maladie, suivant telle application. Or, dans les affections mélancoliques, on peut employer celui-ci à la dose de la grosseur d’une fève par jour, à titre d’antidote et non pas de purgation. Il est d’une grande efficacité en ce qui regarde la digestion, pour éviter les flatuosités. Je suis d’avis qu’après toutes les purgations hygiéniques il est utile de boire deux onces [d’une décoction] de graine de mauve.

 

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CH. cxix.  Sur les vomissements.

Comme les gens qui sont obligés de faire des efforts pour vomir éprouvent habituellement un grand nombre d'accidents, il convient d'exposer d'abord les moyens de vomir avec facilité. En effet, le vomissement évacue la pituite, allège la tête et écarte les inconvénients d'un repas mangé trop avidement ou d'une absorption immodérée de vin. La purgation par les vomissements est utile aussi dans le cas où le corps grossit démesurément; elle est encore d'un bon usage pour les gens émaciés. Le vomissement est aussi d'une sérieuse efficacité pour les affections fluxionnaires, telles que l'ulcération des reins, de la vessie, de l'anus et des autres parties (du corps); il guérit l'éléphantiasis, les cancers, les cachexies du corps et les affections articulaires ; il est d'une bonne application pour les hydropiques, et surtout pour ceux qui sont affectés d'anasarque, pour les personnes atteintes de la jaunisse, les épileptiques chez qui l’épilepsie a son point de départ dans l'estomac; car, pour les épileptiques dont le mal commence dans la tête, le vomissement n'est pas applicable. Il est avantageux contre les tremblements (nerveux), les paralysies, l'apoplexie, les attaques d'asthme, la mélancolie, les dartres. Les vomissements servent à combattre les crachements de sang, la suffocation de la matrice, les nausées, les syncopes; ils soulagent les personnes gênées par des étouffements, et celles qui, pour le premier motif venu, souffrent de la tête, ou qui éprouvent un soupçon de cataracte et généralement toutes les affections de l'œil.

Les aliments propres au vomissement ne doivent être ni âpres ni secs, mais tantôt sucrés, tantôt âcres. Parmi ces aliments, une certaine réputation semble être acquise au raifort, à la roquette, aux salaisons vieilles, à l'origan vert, à l'oignon et au poireau, ces deux derniers pris en petite quantité. Ce qui favorise encore les vomissements, en fait de farineux, c'est la ptisane mélangée de miel, ainsi que les parties grasses de la viande. Toutefois ne vous bornez pas à n'en prendre que le suc (ou le bouillon), mais avalez la viande elle-même. Celui qui se dispose à vomir ne devra pas prolonger la mastication; seulement, tous les aliments devront être ramollis par la cuisson. Quant aux vins, il faut évidemment choisir les plus sucrés, car ces sortes de vins ont plus de tendance à surnager dans l'estomac que les autres. La boisson qu'on prendra doit être tiède. On mangera aussi des amandes trempées dans du miel, avec du; gâteau plat et des pépins de concombre bien mûr (ou de pastèques) que l'on aura fait macérer et triturés avec du miel. La racine de concombre pur et celle de pastèque broyée provoquent aussi le vomissement. De même la racine de celtique triturée, à la dose de 7 drachmes et avalée dans de l'hydromel, purge fortement par en haut. C'est à ce point que bien souvent il en résulte une purgation excessive.

Ceux qui veulent des moyens encore plus efficaces font bouillir un oignon de narcisse dans de l'eau, coupent le vin avec cette décoction, et mangent l'oignon lui-même après l'avoir fait bouillir avec de l'huile d'olive et du sel pendant quelques instants. Une chose qui provoque aussi le vomissement, c'est l'huile aromatisée d'iris, si l'on s'en enduit les doigts et qu'ensuite on s'irrite [le gosier] en les y plongeant. Un autre vomitif anodin est obtenu par une décoction d'hysope, de graine d'arroche, de thym, de la semence de trèfle triturée avec du sésame, avalée avec une très grande quantité d'hydromel, ainsi que de la graine de cresson. On peut encore employer de l'huile de sésame, de raifort, de narcisse, des feuilles jaunâtres de faux-laurier (?) que l'on mangera. Voici un excellent vomitif : décoction de raifort, que vous ferez boire après y avoir mêlé une infusion de figues sèches, et laissé tiédir. Il faut conseiller d'éviter les vomitifs trop raffinés et donner (tout simplement) des raiforts à jeun à ceux qui ont fait' diète avant (de prendre le remède), et à ceux qui viennent de vomir en sortant de table. On devra choisir des raiforts très piquants, les couper en tranches très minces, faire baigner ces tranches du soir (au lendemain) dans l'oxymel, les prendre ayant l'estomac rempli, et les avaler aussitôt après une gorgée d'oxymel, puis marcher doucement environ deux heures; enfin, après avoir bu beaucoup d'eau tiède, on se fera vomir à l'aide de ses doigts ou d'une barbe de plume.

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Ch. cxx. Préparation des raiforts à l'ellébore blaNc.

On prépare encore les raiforts· d'une autre façon pour le cas des affections chroniques et d'une énergique action purgative : grains d'ellébore blanc de premier choix, 6 drachmes, enfoncés dans des raiforts. L'on a préalablement percé de trous les raiforts avec une plume ; puis les grains d'ellébore sont introduits dans ces trous. Ces grains y séjournent toute une nuit et n'en sont ôtés que le jour suivant, après avoir déposé leur vertu dans les raiforts. Ensuite il faut couper les raiforts et les faire baigner dans l'oxymel, comme on l'a dit plus haut [fragm. 62, § 22], et donner le remède à prendre de la même manière. Il faut bien veiller à ce qu'il ne reste rien dans les raiforts de l'écorce de l'ellébore.

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Ch. clix. Des lavements.

Un très grand nombre des maux qui affectent l'être animé ont pour cause l'embarras du ventre. En effet, de là viennent les lourdeurs de tète, les étourdissements, les troubles de l'estomac, les vomissements spasmodiques, les nausées, le manque d'appétit, la sécheresse et l'amertume de la bouche, les éructations désagréables et fétides, les gaz d'une mauvaise odeur, le sommeil troublé et pénible, les flatuosités, les coliques, les iléus. Cet embarras engendre des affections pléthoriques, articulaires, goutteuses et sciatiques, en augmente l'intensité et la malignité, leur donne un caractère chronique, et quelquefois les rend mortelles. L'utilité des lavements se fait sentir encore dans d'autres cas dont nous donnerons plus loin le détail.

Des lavements, les uns sont simples et émollients, les autres âcres, d'autres ont une action et un emploi différents.

Parmi les lavements émollients, l'eau simple agit pour enlever les matières fécales dans les fièvres continues, de mauvaise nature et ardentes, ainsi que pour les personnes qui se remettent d'une grande faiblesse et chez lesquelles les défécations sont laborieuses. Nous les donnerons avec de l'eau plutôt chaude : l'eau tiède développe des gaz. Nous administrons un mélange d'huile et d'eau contre la rétention de matières dures, et lorsque les malades éprouvent comme une sensation ulcéreuse et mordicante dans les intestins. Toutefois on évitera ce mélange lorsqu'il y aura lourdeur de tête, ou que l'estomac sera troublé, ou enfin que dominera le manque d'appétit. L'eau de rose, injectée avec de l'eau ordinaire, remplace avantageusement l'huile dans les fièvres ardentes et dans les inflammations excessives localisées au milieu des intestins, notamment au côlon. Ce liquide remplit la tête, il est moins glissant que le mélange d'huile et d'eau. Il faut introduire l'huile de rose pour un quart de la quantité d'eau, puis, en y joignant un mélange d'œuf et de suc de ptisane, nous injectons l'huile de rose dans le cas des fièvres très ardentes ou de mordications aux intestins. L'huile de camomille, un blanc et un jaune d'œuf mélangés avec du suc de ptisane, forment un lavement que nous donnons, le soir, contre les fièvres ardentes, en prescrivant de le garder toute la nuit, car il procure un sommeil agréable, et, le lendemain, entraîne avec lui les causes de la fièvre. Le beurre pris avec de l'eau conjure les mordications et les coliques, mais il faut, dans cette circonstance, que le beurre soit en petite quantité. Il agit bien aussi chez ceux dont les matières sont retenues par l'inflammation du rectum, et qui ont des ulcères sordides dans les intestins. La décoction de fenugrec pelé et bouilli dans de l'eau sera donnée en lavement dans le cas des fièvres dépendant de la pituite, et pour les personnes molles ouïes femmes, ainsi que dans le cas des douleurs intestinales aiguës. Ce lavement porte la plénitude dans la tête; aussi, dans les fièvres, lorsque la tète n'est pas exempte de mal, il faut éviter de le donner. On emploie avec succès le suc ou la décoction de mauve dans les coliques et les tranchées, mais surtout si les matières sont sèches. La décoction de graine de lin est d'un bon usage pour les personnes et pour les maladies tendant à la sécheresse. Elle est encore utile dans les douleurs aiguës, dans les cas d'inappétence et de soif excessive; elle remplit la tête, mais non de la même façon que le fenugrec. Le suc de ptisane réussit à dissoudre les matières dures, à nettoyer les intestins et à conjurer les tranchées. Le suc de fleurs d'iris est propre à détourner aussi les tranchées. Ce lavement est surtout favorable dans la maladie cardiaque et à ceux que la transpiration fait tomber en syncope, car il est nutritif et fortifiant; de plus, il lubrifie les matières amassées. Une décoction de son est efficace contre les fièvres sèches, les coliques et les ulcères intestinaux, car elle nettoie sans causer de douleurs aiguës. Le suc de pourpier est excellent contre les fièvres, dans le cas de douleurs et d'inflammation (d'intestins), comme d'autres accidents, et aussi dans celui où, par suite de l'excrétion de matières dures ou âcres, l'anus ou le rectum lésé a contracté une affection érésipélateuse. Il faut, dans ce cas, y mêler un œuf et de l'huile de rose. Administré isolément, le suc de pourpier combat l'inflammation érésipélateuse implantée profondément dans les intestins. On donne des lavements de lait lorsqu'il y a ulcération et inflammation des intestins, des reins, de la vessie ou de l'utérus. La partie séreuse du lait fait bien évacuer et chasse toutes les matières qui peuvent se trouver dans les intestins ; elle nettoie aussi les résidus sordides des ulcères intestinaux; mais on devra le préparer sans présure.

L'huile, employée seule et chaude en lavements, est utile contre l'inflammation d'intestins; elle est très bonne aussi pour les personnes parvenues à l'extrême vieillesse chez lesquelles les matières sont dures. L'administration de l'eau miellée convient aux personnes molles et efféminées ou sur le retour, chez qui le rectum ou le côlon s'est refroidi.

Une décoction de rue, d'aneth et de cumin, mélangée avec de l'huile, a la propriété de dissiper les gaz; aussi, l'administre-t-on contre les coliques. La proportion, dans ce cas, est de deux parties de cette décoction et d'une d'huile.

Le suc de fenugrec mélangé avec du beurre et de la térébenthine, chacun dans la proportion d'un quart de ce suc, sert à combattre les coliques aiguës ou les palpitations. En effet, ce lavement séjourne longtemps sans causer de douleur, et chasse les matières sans agiter le malade. Il est encore très utile contre les douleurs de l'utérus. On mélange aussi avec du suc de ptisane du beurre et du miel en très petite quantité, ce qui fait un lavement très efficace contre la rétention des matières causée par l'inflammation des intestins, et contre les ulcères sordides siégeant dans ces organes. L'huile de rue, mélangée avec du beurre et de la térébenthine, forme un lavement utile contre les coliques. Quelquefois nous administrons un mélange de 3 drachmes de poix liquide ou de 4 drachmes d'huile d'asphalte, préparé avec l'huile de rue. Ce lavement fait cesser les douleurs et sert à évacuer doucement la pituite. Quelquefois aussi nous faisons cuire des laines grasses dans du vin doux, puis, après les avoir lavées, nous les enduisons d'huile de rue, et nous en lirons un lavement qui fait cesser les coliques; la proportion est de 3 parties de vin contre 2 d'huile. S'il y a douleur aux crémasters ou à la vessie, on répandra du persil sauvage haché très menu dans l'huile de rue. Dans le cas des douleurs causées par des abcès ou des ulcères siégeant dans les intestins, nous donnons en lavement du beurre mélangé avec de la manne ou de la moelle soit de cerf, soit d'agneau, mélangée avec de l'huile. Lorsqu'il s'agit de maladies froides et de douleurs sourdes, nous donnons en lavement du galbanum mélangé avec du beurre dans la proportion de 1 drachme de galbanum, 6 grammes de beurre; ou encore un mélange de beurre et de 3 oboles de gomme de styrax.

Nous employons les lavements âcres en cas de sciatique, de léthargie, d'orthopnée, dans les maladies froides, chez ceux qui ont pris un poison mortel, et contre les poisons agissant par refroidissement ou coagulation. Quand il s'agit de personnes ayant tout le corps refroidi ou atteintes d'apoplexie, de sciatique, de néphrétique, on donnera 4 oboles de castoréum préparées avec de l'huile. Nous administrons du nitre au lieu de sel lorsque nous voulons produire par deux ou trois fois l'excitation à l'évacuation; car le sel exerce tout d'un coup son action irritante, mais cette action ne dure pas longtemps. D'autre part, le nitre est dangereux pour la tète, qu'il remplit, et pour l'estomac, qu'il trouble ; tandis que rien de tout cela n'arrive avec le sel. Sont efficaces (dans ce genre) les substances que nous allons énumérer sommairement ci-après : garon extrait des silures, eau de mer, eau salée, décoction de centaurée, de coloquinte, d'aristoloche, de racine de concombre sauvage, d'agaric, de thym, d'ivette, de millet. Ces substances activent le sang et soulagent les affections qui s'y rapportent.

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Ch. clx. Des suppositoires.

Nous employons les suppositoires tantôt pour les malades qui, en raison de leur faiblesse, ne peuvent supporter l'usage des lavements,· tantôt à cause que des matières dures sont dans le rectum, et pour se dispenser d'administrer un lavement, mais surtout dans le cas des fièvres très fortes et ardentes, ainsi que pour ceux chez qui la matière tend à remonter, et sur lesquels (par suite) l'emploi du lavement produit un effet nuisible; car, dans toutes ces affections, les excréments accumulés sont chassés de la façon la plus lénitive par le moyen des suppositoires. Ils sont encore utiles à ceux qui ont des affections froides dans la tête ou qui sont atteints de cataphora et de démence. Ils sont très bons aussi pour les personnes qui ne rendent pas le lavement qu'elles ont pris.

On préparera lés suppositoires de diverses façons, par exemple avec du miel cuit pour les personnes dont la respiration est embarrassée. On mélange encore du thym pile avec du miel cuit, de la cyclame pilée avec du miel, de l'absinthe ou de l'aurone, ou encore de la bouillie chaude avec du miel (suppositoire particulièrement efficace contre les helminthes), ou enfin de l'hysope, du thym-origan (origan de bouc?) et delà fleur de thym avec du miel (remède utile en cas d'inversion de l'estomac) ; des baies de Cnide mélangées avec de la résine sèche ou avec du miel cuit, du pyrèthre mélangé avec de la résine sèche, de la centaurée avec de la poix et de la cire, tous suppositoires d'un bon effet en cas de relâchement des parties [du corps] ; de l'asphalte, une petite quantité de racine d'opopanax, de l'hysope, du galbanum et de la résine sèche, remède qui convient à ceux qui ont tout le corps en résolution, et, par suite, éprouvent un grand affaiblissement dans l'action de rejeter les matières; il agit aussi contré la paralysie du rectum, de même contre les ascarides. On peut, à la place du miel, employer la résine sèche, comme on l'a dit, ou de la poix ou des figues grasses hachées très menu, eu bien encore du raisin sec sans les pépins, ou du savon. Le meilleur suppositoire est celui que l'on compose avec des feuilles encore vertes de mercuriale broyées, pétries et desséchées. Pour les enfants, on applique un grain de sel.

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CH. CLXV. SuR LES EAUX.

Cinq différences distinguent généralement les eaux potables entre elles. Il y a l'eau de pluie, l'eau de source, l'eau de puits, l'eau de rivière, et enfin l'eau des étangs. De toutes ces eaux, celle de pluie est évidemment la plus légère et la plus facile à modifier, comme aussi la meilleure à boire pour la plupart des affections, si, aussitôt tombée, on la filtre et qu'on la mette en réserve; mais elle ne convient pas en cas de fièvre, de choléra ou de jaunisse, car elle se transforme aisément en bile. C'est un remède bien approprié aux affections des yeux, soit fluxions, soit ulcères; mais il ne convient pas à ceux à qui on veut rendre la vue claire, ni au lavage des médecines minérales, car elle est plus astringente que l'eau de source; aussi n'est-elle pas très bonne pour nettoyer, ni pour faire cuire, ni pour humecter, et entrave-t-elle les déjections. En vieillissant, elle devient aigre, lourde[23] et indigeste; elle met beaucoup de temps à passer et à se faire évacuer ; elle engendre aussi des catarrhes, surtout si on la boit froide.

Quant à l'eau des sources, lorsque ces sources jaillissent d'un rocher en coulant vers le nord, du côté opposé au soleil, elle est dure et lourde ; cette eau est, de plus, longue à échauffer et à refroidir. Celle que les fontaines font jaillir dans la direction de l'orient, qui subit une certaine infiltration à travers le tuf ou une terre pure, qui s'échauffe et se refroidit très rapidement, est la meilleure eau, à moins qu'elle ne soit altérée par une canalisation malsaine.

L'eau de puits est froide, terreuse, difficile à digérer et à évacuer, et, pour ces motifs, plus favorable que l'eau de source à ceux qui éprouvent des cuissons à l'orifice de l'estomac ou dans l'estomac lui-même.

Les eaux, de rivière et d'étang sont toutes mauvaises, excepté celle du Nil; car celle-ci possède toutes sortes de vertus. Elle est une boisson agréable, et fait un séjour modéré dans le bas-ventre. Elle n'excite pas la soif, et, bue froide, elle est très inoffensive; enfin elle favorise la digestion et la déjection; de là vient son efficacité; de plus, elle est salutaire, fortifiante et d'une bonne couleur.[24] Quant à l'eau des autres rivières, elle est difficile à traiter, desséchante, altérante, surtout lorsqu'elle traverse des terrains malsains. Mais les meilleures rivières sont celles qui ont des sources perpétuelles et qui ne se mélangent point avec d'autres rivières.

L'eau des étangs doit aux marécages qui l'environnent d'être vaseuse et lourde, et, en raison de sa stagnation et de son immobilité, est, pour ainsi dire, morte et putréfiée; aussi, comme elle ne se renouvelle jamais, il faut l'administrer aux (tempéraments) faibles.

Quant aux terrains et aux expositions, il existe encore une foule de différences entre les eaux. Pour parler sommairement, celle qui aura été appropriée au goût et aura supporté l'épreuve des riverains devra être tenue pour la meilleure ; car, si elle s'échauffe et se refroidit promptement, si elle cuit sans difficulté la viande et toutes sortes d'aliments, elle les fera bien digérer dans le ventre. Mais toutes les eaux qui manifestent une action astringente, salante, nitreuse, épaississante ou quelque action analogue sur ceux qui les goûtent, devront être réputées nuisibles. Celles qui ont une odeur désagréable, celles dont la surface est crémeuse, celles qui laissent un dépôt nauséabond et solide, celles qui, en s'attachant aux vases d'airain, forment une croûte pierreuse, celles qui nourrissent des sangsues ou quelques animaux de même espèce, mais nuisibles;[25] les eaux stagnantes, marécageuses, celles qui arrosent des mines d'or, d'argent, d'alun, de soufre ou de substances semblables; les eaux dans lesquelles se rencontrent des sources non potables, ou qui sont dans le voisinage de thermes, ou encore qui sont thermales elles-mêmes, toutes ces sortes d'eaux sont nuisibles.

La meilleure eau sera donc celle qui se trouvera dans les conditions suivantes : ne la boire qu'après l'avoir fait bouillir dans des vases de terre cuite, puis refroidir, puis chauffer de nouveau. Dans les marches (militaires) ou dans un camp, il faut creuser des fosses continues du point le plus élevé vers la partie déclive et les faire traverser par l'eau après ν avoir jeté de la terre douce et grasse, par exemple celle dont on fait des poteries; car les eaux laisseront toujours leurs mauvaises qualités dans ces fosses.

En général, toute eau qui passe lentement, est indigeste, donne des flatuosités, et surtout si elle est glacée, produit le rhume. Si l’on boit de l'eau en y ajoutant des légumes, il est plus particulièrement à craindre qu'il n'en résulte de la gourme, la gale, la lèpre, des exanthèmes, des lichens, l'herpès, le satyriasis ou quelque autre affection dérivant de celles-là. Il en résulte encore des urines et des selles cuisantes, notamment si l'eau est nitreuse. Une eau de cette nature ne convient pas à la poitrine ni à la trachée-artère affectée d'ulcères, non plus qu'aux reins et à la vessie, ou à toute autre partie ulcérée. On corrige l'eau nitreuse avec des aliments de qualité émoussante et du vin ; l'eau épaisse, avec ceux qui ont la propriété de diviser [les humeurs visqueuses] et d'atténuer [les humeurs épaisses], comme par exemple l'ail et ses analogues ; l'eau astringente, avec du vin très léger, tout à fait diurétique et avec tous les aliments de nature à provoquer les déjections.

L'eau paraît convenir aux maux de tête, à l'amblyopie, à l'épilepsie, aux affections articulaires, au tremblement nerveux, à la paralysie, employée seule ou mélangée avec du miel. Elle est encore plus efficace pour les suffocations utérines et pour les personnes chez qui se produit un excès de bile noire ou jaune, ce qui est mordicant pour l'orifice de l'estomac; elle est bonne derechef pour le ventre supérieur, pour le jéjunum; pour les jeunes gens qui ont un embonpoint accompagné de sueurs; pour les personnes de tout âge qui sont trop grasses ou que l'on a purgées à l'excès; pour ceux qui ont des hémorragies provenant d'une blessure, des narines ou autre lieu. Elle convient encore contre la fièvre ardente, si on la donne à propos; elle ne convient pas moins, prise comme boisson, contre les pollutions nocturnes continuelles et la gonorrhée. En natation et en affusions, on s'en trouve bien pareillement. Elle réussit aux femmes sujettes à un excès de flux ou aux envies; elle est encore d'un bon usage, bue froide, pour ceux qui ont le hoquet et pour ceux dont l'haleine est fétide.

L'eau tiède convient contre l'épilepsie, la céphalalgie, l'ophtalmie, la corrosion des gencives, pour les dents déviées par des abcès des gencives et saignant; contre l'ulcération du pharynx, la fluxion aux amygdales descendant de la tête, la mélancolie brûlante, le flux de bile au début, et les vomissements survenant dans la fièvre bilieuse. L'eau tiède convient aussi dans certains cas où l'eau chaude serait impossible, et pour ceux qui ont des ulcères vers le diaphragme, qui crachent le sang, ou qui ont des déchirures dans la membrane ceignant la plèvre.

L'eau chaude convient lorsqu'il s'agit de préparer la déjection ou quand nous voulons atténuer, dissoudre, faire fondre ou amollir, nettoyer, favoriser une coction ou une diaphorèse. En général on obtient ces divers résultats en buvant de l'eau chaude; plus particulièrement, c'est encore un moyen d'activer la sécrétion nasale, de concourir à l'expectoration, de soulager toute espèce de douleur, et surtout de provoquer la sortie par en haut des gaz formés dans les hypocondres et dans les intestins, de solliciter les flatuosités et de faire uriner ou aller à la selle. L'eau chaude est également efficace pour la coction, la diffusion de l'aliment, la nutrition, l'accroissement; elle favorise le flux des femmes; elle est favorable dans le cas des maladies nerveuses et de l'asthme, de la pleurésie, de la péripneumonie et de l'angine. Quant à savoir si elle nourrit ou si elle ne nourrit pas, et si elle est simplement un véhicule de la nourriture, ce n'est pas le moment d'aborder cette question. Tout ce qu'il faut dire ici, c'est que les aliments ne peuvent être digérés sans eau, de même que sans eau rien ne peut être bouilli pour une destination utile. L'eau bue après qu'on l'a fait passer par la chaux fait du bien aux personnes malades de la rate, et le pain préparé avec cette sorte d'eau est d'une grande efficacité pour ces malades.

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Liv. V, ch. lxxxiii. Diagnostic exact de la fièvre quarte.

Les fièvres quartes prenant leur principe dans la rate sont celles qui durent le plus longtemps. Ces fièvres sont reconnaissables au teint (du malade), à la difficulté de ses digestions et de ses évacuations, au gonflement de sa rate et à la tendance à se coucher de préférence sur le côté gauche. Il y a danger qu'avec le temps, lorsque ces signes se manifestent, il ne devienne hydropique. Lorsque la fièvre quarte est accompagnée d'inflammation du foie, ceux qui l'ont sont blêmes; l'hydropisie les affecte par tout le corps, leurs urines sont couleur vermillon très rouge. Si l'on palpe l'hypocondre droit, on y sent une tumeur. Ces malades respirent plus difficilement que ceux qui souffrent de la raie ; ils ont un peu de toux, et finissent inévitablement par devenir hydropiques.

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Ch. lxxxiv. Traitement de la fièvre quarte.

Une infusion d'absinthe balaye les humeurs qui sont à charge au ventre et favorise la digestion ; c'est pour cette raison que ceux qui boivent de l'absinthe ne salivent pas. Ce remède calme aussi l'inflammation du foie et celle de la rate; il est diurétique et provoque les menstrues.

Lorsque le malade s'était fait une habitude de son mal, que la constitution aimait l'évacuation par le ventre, et s'il survenait des sérosités mordicantes, j'ai donné quelquefois du lait d'ânesse ou de jument nouvellement trait à ceux que je préférais purger, et du lait de chèvre aux autres, à cause de l'usage commun et de la facilité qu'on a de se le procurer. Je commençais par une dose de 3 cotyles, allant ensuite jusqu'à 6, puis, après une certaine période d'interruption, je reprenais la dose primitive de 3 cotyles, et, ajoutant 1 cotyle chaque jour, je revenais à la dose de 6. Après cela, je réduisais la dose chaque jour d'une cotyle, puis je prescrivais l'abstention pour deux périodes. J'obtins ainsi ce double résultat que la maladie se dissolvait et que le malade s'alimentait. Seulement il faut s'assurer du bon état de l'animal dont on emploie le lait. Si ce lait ne s'aigrit pas dans l'estomac, s'il ne donne pas des renvois nidoreux, s'il ne fait pas irruption dans le ventre,[26] même dans un jour suspect, en place de la décoction d'orge, il convient de le faire prendre longtemps avant (l'accès) ; de plus, on y joindra quelques bouchées de pain. Lorsque la maladie est parvenue à son acmé, c'est-à-dire que la digestion est visiblement avancée,[27] sans que les entrailles soient lésées, je donne aussi de l'eau froide à ceux qui ont l'habitude d'en boire étant en santé. Aux approches de l'accès, j'en fais prendre coup sur coup 2 cotyles, et infailliblement il m'est arrivé plus d'une fois de soustraire les malades au frisson et de dissiper les fièvres, après une onction générale. Il est préférable aussi de réchauffer le corps extérieurement avec une friction d'huile de troène, de coloquinte ou de moût de vin, soit avant le paroxysme, pour faire cesser le' frisson, soit au déclin de la fièvre pour éviter un refroidissement causé par les choses extérieures.

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Ch. xcv. SuR la peste.

La peste amène avec elle toute espèce de maux très dangereux, et rien n'y est caché,[28] comme dans chacune des autres maladies; des accidents multiples et très variés s'y produisent (tels que) délire de diverses sortes, vomissements de bile, gonflement et douleurs aux hypocondres, sueurs surabondantes, refroidissement des extrémités, flux de ventre bilieux, ténus et accompagnés de vents, urines aqueuses, ténues chez les uns, bilieuses chez les autres, noires chez d'autres encore, ayant des sédiments mauvais et des énéorèmes très mauvais; saignements de nez, chaleurs ardentes dans la poitrine, langue brûlée, insomnie, spasmes violents, ulcères malins, charbonneux. Il y a dans la peste des symptômes terribles qui se manifestent sur le visage, aux amygdales et sur tout le reste du corps. Si l'on est sagace, on reconnaîtra à l'avance l'invasion de la peste en ayant égard aux saisons malfaisantes et aux animaux qui périssent antérieurement (aux hommes). En effet, si c'est bien l'air dont nous sommes environnés qui engendre la peste, les volatiles et les autres sortes d'oiseaux seront les premiers atteints ; si elle a pour origine des émanations miasmatiques sortant de la terre, ce seront les quadrupèdes. Quand vous aurez tenu compte de ces pronostics, vous aurez encore à considérer la nature de la saison courante, et celle de l'année entière; car c'est en partant de ces données que vous trouverez moyen d'établir très bien le régime; comme par exemple si telle saison devait être sèche, du moins dans l'ordre régulier, et qu'elle devînt humide, il faut alors adopter le régime desséchant afin que l'excès d'humidité soit absorbé. On devra aussi avoir égard aux occupations des individus, qui compromettraient leur santé, et les leur interdire. Prendre soin du ventre; si l'estomac contient de la pituite, l'évacuer par des vomissements. Les personnes chez qui le sang sera surabondant, on les saignera. La purgation par les urines est encore une bonne chose, ainsi que toutes les autres, et notamment celle qui se fait par tout le corps. Si le malade a une fièvre ardente et que le feu remonte jusqu'à la poitrine, il ne sera pas hors de propos d'appliquer des réfrigérants sur la poitrine et d'administrer de la boisson froide, non pas par petites quantités, car, surpassée par la supériorité de la chaleur du ventre, elle contribue à la souffrance du malade et augmente le feu qui le dévore. Mais le médecin apprend, par une complète expérience, à la donner en abondance et tout d'un coup, afin d'éteindre le feu par la grande quantité du liquide. Si la fièvre ardente occupe l'intérieur, tandis que les extrémités et la surface seraient froides en même temps que l'hypocondre serait tendu, que le ventre chasserait des matières colliquatives, les unes par en haut, les autres par en bas, qu'il y aurait insomnie, délire, rugosité de la langue; il faut alors recourir aux topiques réchauffants, afin d'attirer la chaleur à la surface du corps, et, par tous les autres moyens praticables, de faire remonter la chaleur du fond du corps à sa partie extérieure.

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LIV. VI, ch. IX. SuR LA MÉLANCOLIE.

Dire les causes de tous les symptômes qui accompagnent chacun des cas, c'est là une chose impossible; car une foule de questions douteuses se présentent, comme par exemple pourquoi (les mélancoliques) voient des dangers où il n'y en a pas, poursuivent comme des avantages tels objets qui n'ont rien d'avantageux; pourquoi tel malade a peur de son entourage et tel autre de tous les hommes pris en masse, etc. Mais, pour ce qui est d'expliquer la raison d'être de presque tous les symptômes, le médecin peut le faire sans difficulté. Ainsi, celui qui s'imagine être un pot de terre doit cette illusion à la sécheresse; car froide et sèche est l'humeur mélancolique. Il en est de même de celui qui se figure avoir la peau desséchée et semblable à du parchemin. Citons encore celui qui croyait qu'il n'avait pas de tête (?), peut-être à cause de la légèreté que le souffle porté en haut y produisait. Pourquoi les mélancoliques ont-ils un fort appétit? sans doute parce que l'orifice de leur estomac est froid.

Pourquoi certains d'entre eux sont-ils grands buveurs de vin? sans doute parce que le froid demande à être réchauffé. Pourquoi se donnent-ils la mort sans doute parce qu'ils supposent qu'ils se délivrent ainsi de maux plus grands ; à moins qu'il ne leur vienne cette pensée qu'il est beau de mourir, comme à certains peuples barbares. Pourquoi ont-ils des apepsies continuelles? sans doute parce que leur corps est bourbeux et plein de superfluités, et que, pour cette raison, leur ventre n'est pas bien tempéré, se trouvant entièrement refroidi par l'humeur mélancolique. Mais pourquoi leurs cavités abdominales sont-elles absolument desséchées? sans doute parce que les vents (chez eux) se produisent dans la partie supérieure des hypocondres, et ne peuvent pas du tout s'échapper par en bas. Il en résulte nécessairement que leur ventre est sec; et, par suite de l'empêchement (que les matières éprouvent), leurs selles se font-coup sur coup et de matières de colliquation.

Leurs yeux deviennent clignotants et saillants, leurs lèvres très n épaisses à cause de l'épaisseur de leur souille ; ils ont le teint noir, ce qui vient de la diffusion de l'humeur (mélancolique). Ils sont le plus souvent velus à cause de la grande quantité des superfluités épaisses. Ils parlent vite, bégayent et ont la voix grêle, ne pouvant régler l'usage de leur langue, car les efforts que celle-ci fait pour se mouvoir dépendent du souffle; or tout ce qui est mû avec effort s'échappe précipitamment.

Il est aisé à quiconque le voudra d'expliquer les causes de tous les autres symptômes, en partant des explications qui viennent d'être données. L'humeur devient noire tantôt lorsqu'elle est outre mesure tantôt échauffée tantôt refroidie. En effet, ce qui arrive au charbon en combustion, lequel est très brillant lorsqu'il est en feu, puis, le feu une fois éteint, devient noir, se produit ici : le refroidissement l'effectue sur la couleur éclatante du sang. Ne voyons-nous pas, à l'extérieur, certains corps devenir livides et noirs par l'action du froid? En revanche l'excès du chaud, desséchant et consumant les liquides dont s'alimente le chaud, brunit les humeurs, comme le soleil fait des fruits et du corps humain.

Il faut donc que le médecin, avant d'entreprendre un traitement, fasse le diagnostic sur ces données. Quant aux notions qu'il doit acquérir pour guérir ceux qui sont affectés de cette maladie, le moment est venu de les exposer. Il importe, pour le traitement, d'examiner à fond comment la maladie a commencé. Il faut savoir qu'il y a deux espèces de mélancolies. Quelques-uns parmi les mélancoliques le sont de nature et en vertu de leur tempérament congénital, d'autres, au contraire, le sont devenus à la suite d'un mauvais régime. Cette seconde variété se produit toujours avec lenteur et sourdement. Par suite de la combustion excessive de la bile jaune, ils tombent dans la démence; ils sont plus audacieux, plus irascibles qu'on ne l'est d'ordinaire, enclins à frapper, et peuvent se porter à des excès dangereux, surtout dans le moment où a lieu cette combustion exagérée de la bile. Puis, avec le temps, et lorsque ce feu s'est éteint, ils deviennent sombres, tristes et craintifs. Lorsque tout le corps est rempli d'un sang mélancolique, il faut que le traitement débute par la saignée ; mais, lorsqu'il n'y a que le cerveau d'envahi, le malade n'a pas besoin d'être saigné, à moins qu'il ne soit surchargé de sang et que nous n'en ôtions par mesure de précaution. Voilà donc quel sera votre diagnostic, selon que tout le corps aura été envahi par le sang mélancolique, ou que cette humeur n'occupera que le cerveau.

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Ch. x. Traitement de la mélancolie.

Que le cerveau soit affecté en premier ou que ce soient les hypocondres, on emploie des moyens curatifs communs aux deux cas, destinés à relâcher le ventre. D'abord il faut veiller à procurer une bonne digestion, ensuite purger avec du thym et de l'aloès, car ces deux substances, prises chaque jour à petite dose, procurent un relâchement modéré et anodin.

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Autre fragment de rufus, extrait du même chapitre.

On fera vomir (les malades) à des intervalles assez longs et au moyen de certains aliments;[29] mais, si c'est au moyen du raifort, ils devront être à jeun; de même, si c'est au moyen de l'origan ou du thym. Il ne faut pas user d'émétiques trop énergiques, car ils seraient nuisibles, causant dans ces affections une grande fatigue à l'estomac et à l'œsophage, déjà travaillés par la maladie elle-même. On voit certains malades, à la suite de vomitifs trop actifs, être saisis par la mélancolie. Il faut bien savoir que des personnes affectées de cette maladie n'éprouvent aucune amélioration pendant le temps du traitement; puis, laissées à elles-mêmes, elles ressentent l'effet salutaire du traitement antécédent, la nature triomphant de maladies devenues faibles par la cure qui avait été instituée. Aussi faut-il donner quelque relâche à la nature (car celle-ci semble prendre sa part de la fatigue causée par le traitement), la fortifier en la laissant se reposer, enfin la faire triompher des affections qui ont déjà été atténuées.

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Ch. XIII.  De L'EPILEPSIE.

(Doctrine et explication de Rufus concernant ce chapitre.) Il faut que ceux qui sont malades (de l'épilepsie) soient maintenus à un régime dans lequel entre une grande absorption d'eau et qu'on inaugure le traitement par la saignée, si rien ne s'y oppose, en laissant un intervalle de quatre ou cinq jours pour que le corps reprenne des forces; puis on fait évacuer au moyen de purgatifs, principalement avec l'ellébore noir ou la coloquinte, ou encore avec la scammonée. Après avoir pilé la peau desséchée de l'ellébore et l'avoir tamisée, on fait prendre cette préparation mélangée de mélicrat à la dose d'une drachme (alias de 5 cyathes); ou bien avec du miel cuit, mélangé d'un peu de poivre, on fait des pilules. Après avoir extrait la graine de la coloquinte et avoir laissé l'intérieur, vous la remplissez de vin d'un goût sucré, et laissez (déposer) toute la nuit, puis vous filtrez le mélange sucré dès l'aurore, faites tiédir et donnez cette potion à boire. Lorsque la purgation a fait assez d'effet, faites prendre un bain au malade. Au troisième jour (du traitement), il faut lui appliquer des ventouses scarifiées sur les hypocondres et dans le dos. On laisse passer quelques jours pour que le corps reprenne des forces, puis on purge avec l'hiéra à la coloquinte. Ensuite on ventousera la tète (et la nuque), et le lendemain on y appliquera un cataplasme de mie de pain bouilli et de mélicrat trituré avec des amandes amères ou du serpolet, du calament, de la menthe ou de la rue. Il faut faire cela pendant trois jours, puis raser la tête et la frictionner avec du suc de peucédane (fenouil de porc) délayé dans du vinaigre, mélangé d'une décoction de grande berce, de serpolet ou d'iris; puis on laisse encore un intervalle de temps, et l'on donne 3 drachmes seulement de l'hiéra. On a recours ensuite aux sternutatoires, à l'évacuation de la pituite, aux nausées, en injectant du jus de cyclame dans les narines ou la racine même de la plante pulvérisée, ou l'élatérion mélangé de lait. Après un nouvel intervalle, faites prendre un lavement à la centaurée et à la coloquinte, employez ensuite les sinapismes appliqués sur la tête. Il faut aussi recourir en temps utile aux aliments âcres.[30]

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Ch. xiv. Recettes pour reconnaître les épileptiques.

Un moyen de faire découvrir l'épilepsie, c'est une fumigation d'asphalte, qui prédispose les malades à tomber, ou de jayet, ou de corne de cerf, ou encore l'odeur du foie de chèvre brûlé, et le foie lui-même pris en nourriture.[31]

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Ch. xxiii. Sur la perte de la mémoire.

On voit souvent la perte de la mémoire survenir dans une maladie, en même temps que la raison s'est altérée, attendu que ces deux facultés éprouvent la même affection, et, lorsque cette affection s'aggrave, on perd en même temps et la mémoire et la raison, état que l'on nomme folie.

L'une et l'autre faculté sont anéanties dans les léthargus et généralement dans toutes les affections carotiques. Quelquefois le traitement prescrit pour les cas précités s'applique même quand ces cas surviennent dans le cours des maladies; car cela arrive, et aussi dans la peste, comme on le vit dans la peste qui affligea Athènes. Si ces accidents surviennent à la suite des dites maladies au moment de leur solution, en se caractérisant par l'oubli, il faut examiner la qualité réellement prédominante. L'humidité surabondante agissant seule occasionne un sommeil profond et prolongé; la sécheresse excessive, considérée isolément, cause des insomnies. Maintenant, si le froid vient s'ajouter à l'humidité, il en résulte la constitution d'un état léthargique et somnolent; mais, si c'est l'humidité qui vient s'ajouter à un peu de froid, il en résulte une lésion de la mémoire et les idioties. Comme il existe une grande différence en plus et en moins parmi les divers tempéraments, il est une non moins grande variété de causes pouvant altérer les fonctions psychiques. Il faut, en conséquence, préserver avec soin le sommeil de ceux qui ne jouissent plus de leur mémoire ou de leur intelligence; caria perle de l'intelligence, c'est ce que l'on nomme idiotie. (Il faut observer) si les malades sont tout à fait en somnolence ou bien si leur sommeil est modéré; ce sera un moyen de reconnaître le côté prédominant de leur mauvais tempérament. On devra encore considérer s'ils rejettent par le nez ou la bouche une grande quantité des (humeurs) descendant de la tête, ou bien si ces parties paraissent demeurer sèches. S'il y a froid seul, il convient de réchauffer seulement, sans dessécher ni humecter; mais, s'il y a froid accompagné de sécheresse, il faut réchauffer et humecter. Pour ma part, je connais[32] quelqu'un qui perdit ou peu s'en faut la mémoire et la raison par suite d'un excès de travail et de veilles consumées dans les sciences, et un autre individu, un vigneron, qui tomba dans le même état à la suite de fatigues éprouvées dans l'exercice de sa profession. Chacun d'eux, bien évidemment, était devenu malade sous l'action d'un excès de chaleur et de sécheresse : ils ont tous deux été guéris sous la double influence des humectants et de la chaleur.

Ces divers points préalablement déterminés, nous allons parler du traitement. Si certaines purgations ou des évacuations immodérées obtenues autrement, ou encore des défaillances, ont amené une déperdition de force, suivie elle-même d'oblitération delà mémoire, il convient de recourir à un régime réconfortant, sans poursuivre d'autre objet.[33] En effet, le corps étant fortifié et les forces rassemblées, la mémoire se remet à fonctionner. Il en est de même pour l'extrême vieillesse; s'il y survient lésion de la mémoire, il ne faut pas aller chercher autre chose qu'un régime convenable.[34] Si la mémoire se perd tout d'un coup et que la santé générale reste bonne d'ailleurs, il y a lieu de présumer que les personnes dans ce cas seront affectées d'épilepsie, de paralysie ou d'apoplexie, et, absolument parlant, leur état est grave. Pour cette classe de malades, il suffit d'appliquer les mesures de précaution qu'exige la perspective d'une maladie, car, de cette façon, en même temps que nous empêcherons la maladie de venir, la mémoire sera sauvée. Or, parmi les choses qui préviennent lesdites maladies, il y a d'abord l'action atténuative et incisive, puis des purgations bien appropriées, et moyens analogues. Mais, si le mal provient de quelques maladies, ainsi qu'on l'a dit, comme par exemple d'un léthargus, d'une peste, il faut tâcher de lutter plus vigoureusement dans l'administration des remèdes.

Le point capital de la médicamentation consiste à réchauffer le corps des malades dans toutes ses parties par des moyens externes et internes, en restant dans les conditions d'une dérivation naturelle. Les réchauffants convenables à ces sortes de maladies sont, en général, pour l'été, l'huile d'olive chaude employée toute seule, et, pour l'hiver, l'huile d'iris avec du vinaigre un peu fort (acre), que l'on administre aussi quelquefois dans une décoction de serpolet, de berce ou de calament. Il arrive encore que l'on y met du nitre, du poivre ou des baies de laurier. Une bonne recette, c'est le castoréum mélangé avec de l'huile d'olive, appliqué sur la nuque. On soulage encore mieux ces malades avec la purgation hiéra de Rufus.[35] En effet, on a vu souvent, dit-il, ce remède seul avoir une très grande efficacité dans ce genre d'affection (Traité des purgations). (Il ajoute) qu'il n'entraîne avec lui aucun élément utile, car il commence par dégager la tête en agissant par en haut, ensuite il traverse les autres parties (du corps), sans jamais introduire rien de violent ni de douloureux, tel que l'inflammation, la cardialgie, la soif; mais toujours il soulage au fur et à mesure de l'évacuation. De là vient que l'on fortifie l'estomac, par le moyen de cette purgation, à ce point qu'il en résulte une recrudescence d'appétit. Il est constant qu'après une purgation hiéra on guérit (la perte de) la mémoire avec une potion de raclure d'ivoire à la dose de deux cuillers, mélangée dans une drachme de mélicrat ; de même, la corne de cerf prise dans du mélicrat; de même encore le castoréum administré à la dose d'une drachme dans du mélicrat, réussit assez bien. Un remède excellent, c'est une potion d'ellébore blanc, non pas comme plusieurs le prétendent dans le dernier période, niais bien plutôt au début du traitement. En effet, quelle nécessité de prolonger et d'aggraver la maladie lorsqu'on peut, dès son début, au moyen d'un remède souverain, obtenir une guérison parfaite? Conséquemment, il faut donner de l'ellébore sans aucune défiance, avant que le malade soit mis à bas par la maladie, et que (son état) ne paralyse les effets du traitement. Or les sternutatoires à l'ellébore blanc, au castoréum, etc., sont d'une grande efficacité lorsqu'on les porte sous les narines, après les évacuations, ainsi que les errhins appliqués de même, et les apophlegmatismes.

On doit préférer des aliments sans densité, réchauffants, atténuatifs. Il faut s'abstenir, en général, de tous les légumes· refroidissants, des fruits d'automne, des friandises de dessert, de fromage, de laitage, de toute nourriture épaississante et flatueuse, car tout cela ou bien trouble le souffle, ou le condense. Par intervalles on relèvera les aliments avec des ingrédients assez âcres, tels que l'ail, la sarriette, l'origan, la menthe et le raifort; mais il faut en user avec mesure et toujours se tenir en garde contre les indigestions, car rien n'est plus funeste à l'intelligence. Le vin qui vaut le mieux, c'est le vin léger, blanc et pas trop vieux. Grâce à sa chaleur modérée, il a, entre autres qualités, celle de purifier l'âme humaine, d'imprimer une juste mesure à la danse, lui donnant un mouvement musical et constant. L'absorption d'une grande quantité d'eau, et encore bien pis, de vin, est tout ce qu'il y a de plus mauvais; car il en résulte que la tête est excessivement humectée, et l'excès d'humidité est ce qui contribue le plus à oblitérer la mémoire. Il faut dormir modérément et ne pas se livrer au sommeil après un repas copieux. On doit goûter le plus rarement possible.les plaisirs vénériens; ils ne sont favorables ni à la santé générale ni aux raisonnements de l'âme, et bien au contraire ils lui ôtent sa vigueur. D'abord les mouvements violents qui accompagnent le coït sont de la famille des spasmes, ensuite le refroidissement qui lui succède ralentit et engourdit la pensée. Après qu'on a donné des purgations générales et locales, les sinapismes à la .nuque sont encore une bonne chose, et, après les sinapismes, un bain. Il faut éviter pardessus tout l'indigestion et la fatigue de n'importe quelle partie du corps, mais surtout celle de la tête et de la pensée elle-même ; les échauffements et les refroidissements excessifs, car les uns comme les autres ont pour résultat de remplir la tête. Il faut éviter aussi une alimentation épaississante, flatulente, humectante. Tels sont les principes dont il faut partir, même lorsqu'il s'agit de gens en santé, mais dont la tête est trop humide, pour décrire le régime le plus favorable au fonctionnement de la mémoire.

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Ch. xxiv. SUr les gens mordus par un chien enragé où hydrophobes.

Vous userez du diagnostic suivant pour vous assurer que la personne mordue est à l'abri du danger. Formez un cataplasme de noix royales hachées très menu, après un jour, vous l'enlèverez et le donnerez à manger à un coq ou à une poule. Si le gallinacé, après l'avoir mangé, ne meurt pas, alors faites cicatriser la plaie, considérant le malade comme hors de danger. Employez ce diagnostic dès le principe, car, si l'animal, après avoir mangé le cataplasme de noix royales appliqué sur la plaie pendant le premier jour, ne meurt pas empoisonné, soyez assuré que le chien auteur de la morsure n'était pas enragé; et, s il en meurt, tirez-en la conclusion inverse, car, dans ce cas, tout d'abord il ne voudra pas du tout y toucher, et, si la faim le contraint à le faire, il mourra, du-moins si le chien était enragé. Il faut donc renouveler chaque jour ce (cataplasme) jusqu'à ce que le volatile qui en aura mangé ne meure pas.

La plaie se cicatrise très bien et très sûrement avec le remède à la thériaque étendue d'eau à la rose. Les plaies une fois cicatrisées, donnez de l'ellébore blanc pour remettre entièrement le malade. En effet, les chiens enragés qui en mangent dans la bouillie vomissent, et tout aussitôt ils redeviennent sains, et sont débarrassés de la rage. Il serait encore nécessaire, si vous purgiez par en bas avec l'hiéra de Rufus,[36] lorsqu'une circonstance quelconque interdit l'usage de l'ellébore, de boire ce purgatif chaque jour (non pas en vue de purger, mais comme remède auxiliaire), la valeur d'une noix pontique (ou noisette), mélangé avec un cyathus de décoction de sauge ou de la plante ferrée appelée aussi héraclée. Quelques médecins emploient aussi cette dernière seule, et prétendent qu'elle est d'une efficacité suffisante. On lui donne encore, pour cette raison, le nom d'alysson (antirabique). Il faut observer un régime excluant le trop de nourriture, et surtout le trop peu, car le trop peu augmente la malignité des humeurs, ce qui n'est jamais favorable à une plaie de mauvaise nature. Il faut donc bien régler l'alimentation, de façon que les digestions soient régulières et que le corps se garnisse d'humeurs d'une bonne nature. Il faut aussi veiller aux selles, qui (doivent être) quotidiennes, et aux urines. On obtient ce résultat avec les racines [des plantes] mentionnées plus haut, avec du cerfeuil mâché ainsi que du fenouil. Le crithmum excite le ventre et les urines; la chicorée, surtout la chicorée sauvage, mangée crue, est favorable à l'orifice de l'estomac. Quelques personnes l'appellent aussi seris ou picris. Une bonne recette, c'est la jeune pousse de chou, l'asperge de marais,[37] la patience des jardins et la patience sauvage, l'oxylapathum (patience acide, oseille?[38]). En fait de poissons, ceux à chair tendre, les homards, les crabes, les oursins, sont avantageux, assaisonnés au vin miellé; en fait de viandes, les extrémités des animaux; tous les oiseaux de montagne, qui sont digestifs et de bon suc; le vin ténu,

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Ch. xxxviii. Sur le spasme ou le tétanos.

Les spasmes compliqués d'une grande sécheresse, jamais on ne les guérira ; mais ceux qui proviennent de la pléthore ou de l'inflammation, on les guérira en évacuant ces humeurs surabondantes et en traitant l'inflammation par les remèdes qu'elle réclame. Le spasme a lieu aussi chez ceux auxquels les vomissements donnent des mouvements convulsifs, et s'apaise après qu'on a rejeté ce qui causait le trouble. On guérit ceux qui ont des spasmes causés par la pléthore en leur faisant boire de la centaurée ténue, du séséli mélangé avec de l'oxymel ou de l’oxycrat. On se trouve bien du castoréum administré non seulement en boisson, mais aussi en onction. Tels sont les médicaments que nous employons contre les spasmes qui ont pour cause la surabondance des humeurs.

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Liv. VIII, ch. vi. Savons pour le visage et cosmétiques.

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Savon pour enlever les rides. Extrait des écrits de Rufus. — Une personne frottée continûment de ce savon verra les parties ridées de sa peau bien tendues. Prenez figues grasses et racine de vigne hachées à sec, os de sèche brûlé, farine d'ers, toutes choses pilées séparément, puis ensemble, et arrosées convenablement de miel; puis employez.[39]

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Livre X, ch. xvii. —· L'ictère (Extrait de Rufus et de Galien.)

Il faut savoir que l'ictère se produit suivant trois modes généraux. Le premier est en raison d'une crise ayant lieu dans les fièvres ardentes, lorsque la nature les a poussées critiquement hors des vaisseaux, c’est-à-dire des veines, vers le derme, et les a résolues. Cette jaunisse se produit durant les jours critiques, savoir, le septième, ou le neuvième, ou le onzième, ou le quatorzième. Hippocrate dit, section IV des Aphorismes, chapitre lxiv : « L'ictère survenu dans les fièvres le quatrième, le septième, le neuvième, le onzième ou le quatorzième jour, est de bon augure, pourvu que l'hypocondre droit ne soit pas dur. » Il dit pareillement que l'ictère qui se manifeste avant le septième jour est mortel. Les signes et les caractères de ce mode résultent de ce fait que l'ictère résout la fièvre, et de ce que, dans les jours critiques, les urines et les excréments sont naturels. Le deuxième mode est dû à une dyscrasie chaude du foie, laquelle répand la bile dans le sang de tout le corps ; ce mode se produit avec la fièvre; il comporte des urines et des excréments bilieux, sans pesanteur du foie. Le troisième mode a pour cause l'obstruction, et il se manifeste par les indices suivants : le foie devient lourd, et tout le corps est inondé de bile jaune, les urines et les excréments sont blancs, par suite de ce que les obstructions empêchent la bile de descendre, soit dans les intestins pour colorer les matières, ou dans les reins pour colorer l'urine.

D'où vient le nom d'ictère? De l'analogie de cette affection avec l’animal appelé ἰκτή [fouine], espèce de belette sauvage qui a des yeux couleur d'or. L'ictère est une diffusion de l'humeur bilieuse dans le corps, se produisant alors que la force séparative de cette humeur a été diminuée et n'est plus capable de la diviser et de la répartir par ses voies sécrétives habituelles. Il faut considérer comme une erreur l'opinion que le foie est affecté chez tous les ictériques. On voit souvent, sans que le foie éprouve aucune affection, se produire une diffusion de la bile jaune dans le derme, pendant la période critique des maladies. On voit quelquefois aussi, indépendamment de toute fièvre, le sang troublé par la bile à la suite d'une altération provenant d'une cause étrangère, telle que la morsure d'une bête venimeuse. En effet, une personne mordue par une vipère eut tout le corps d'une couleur jaune verdâtre, et, s'étant mise à boire d'une manière continue de la thériaque, fut promptement guérie. Il ne faut donc pas s'étonner qu'il y ait parfois une telle aberration des humeurs du corps, qu'il se produise un ictère général. Il est possible aussi, pour cette raison et à cause de l'altération survenant dans le tempérament naturel du foie, qu'il se produise un genre de cacochymie consistant en ce que tout le corps devient manifestement, tantôt semblable aux herbes de couleur jaune clair, tantôt couleur plomb, et cette teinte tire plutôt sur le noir, si la maladie est dans la rate, que si elle affecte le foie, d'autant plus que la rate attire à elle, suivant son habitude, l'humeur atrabilaire qui provient du foie, et purifie le sang.

Il y aura encore ictère à cause de l'impuissance de la vésicule biliaire à faire venir à elle, comme dans l'état normal, la matière bilieuse, et à purifier le sang· par suite de cette attraction. Il arrive encore que la vésicule soit trop pleine et ne puisse se vider à cause de son trop plein même; et quelquefois aussi, à cause de l'obstruction ou de l'atonie des vaisseaux débouchant de cette poche dans le foie, la liqueur bilieuse ne peut y être attirée. Il est donc très nécessaire, dans les affections ictériques, de considérer l'aspect des déjections; ainsi, chez certaines personnes, ce sont les excréments qui sont colorés par la bile jaune ; chez d'autres, ce sont les urines. En effet, lorsque, dans les fièvres, en raison d'une crise heureuse, l'humeur bilieuse se répand dans le tissu cutané, les selles et les urines ont une apparence naturelle. Lorsque les malades, exempts de fièvre, ont un ictère avec sensation d'un poids dans l'hypocondre droit, il y a lieu de croire à l'obstruction de la vésicule biliaire. Si la sensation d'un poids ou d'une douleur est éprouvée dans l'hypocondre gauche, on doit supposer que la rate est la cause de la cacochymie constatée. Chez les personnes qui, tout en ne sentant ni poids, ni douleur aux hypocondres, ni fièvre préalable (le sang s'étant tourné en bile dans tout leur corps), sont affectées de l'ictère, il y a démangeaison plus vive et sécheresse plus grande de la peau. Mais celles chez qui l'humeur atrabilaire se répand dans le sang sont dans un état encore plus fâcheux : elles éprouvent en effet un abattement excessif, des mordications dans le ventre, de la dyspnée, le dégoût de la nourriture ; leurs urines sont noires.

Quelquefois aussi leur corps devient chaud par intervalles ; leurs selles affectent la couleur de la couperose. C'est surtout chez cette sorte de malades que le ventre se dessèche. Quant à ceux qui ont l'ictère à cause de la bile jaune clair, ils n'éprouvent aucune mordication dans le ventre ni une aussi grande aversion pour les aliments; toutefois leur appétit est plus faible, leurs selles sont blanches; leurs urines, couleur safran, restent troubles et nuageuses.

Il y a des caractères communs à toutes les sortes de jaunisse; ce sont la répugnance à se mouvoir et l'indifférence pour les aliments doux [sucrés], mais nulle aversion pour ceux qui sont amers, enfin des imaginations étranges, une démangeaison par tout le corps et beaucoup de difficulté à transpirer. Le blanc de l'œil, les parties qui avoisinent les tempes, les joues, montrent une teinte jaune ; les veines placées sous la langue sont remplies et accusent une surabondance d'humeur.

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Ch. xviii. Traitement de l'ictère.

Ceux qui se trouvent dans un état de crise heureuse, par la dissipation, de la fièvre, voient leur ictère cesser très facilement lorsqu'ils usent de bains d'eau douce et de friction d'huile diaphorétique et de toutes substances rendant la peau plus poreuse, telles que l'huile de camomille, d'aneth, d'iris, de glycin [vin doux], [de suc de] marjolaine; la plante appelée libanotis, en décoction dans l'huile, est aussi d'un bon effet pour la perspiration. Il convient aussi d'instituer pour ces malades un régime général, à la fois humectant et de nature à produire une atténuation modérée des humeurs épaisses. Pour les ictériques d'une autre espèce, il y a d'abord deux remèdes de premier ordre, la saignée et la purgation. Pour ceux qui ont une surabondance de sang mélangé de bile dans tout le corps, comme pour ceux qui sont affligés d'une douleur dans la rate ou dans le foie accompagnée de distension, il n'y a pas de traitement plus convenable que la saignée, si rien autre ne s'y oppose. Il faut tirer le sang par petites quantités, afin de ne pas trop réduire les forces du malade par une évacuation de sang faite tout d'un coup ; car une évacuation faite tout d un coup a pour effet d'évacuer en même temps le pneuma vital et le pneuma psychique, ce qui amène la mort.

C'est pourquoi Hippocrate conseille de saigner ces malades, non pas en une seule fois, mais par quantités partielles, afin de proportionner la perte de sang à leur force. Le lavement ne serait pas une mauvaise chose au cas où la saignée serait impossible. Après la saignée, le lavement est utile, car, par suite de l'évacuation des matières, il amène une respiration plus facile, il irrite les intestins, et, par la mordication, il y attire les humeurs répandues à la surface. Quant aux purgations, elles sont plus appropriées que tout le reste, comme le dit Rufus. Il faut, par la nourriture, par les boissons et par les médicaments, atténuer préalablement les humeurs et dégager les obstructions, puis donner un remède qui évacue la bile jaune ou noire. Les purgatifs donnés aux ictériques doivent être assez énergiques ; car, en raison de la sécheresse du ventre, les purgatifs faibles ne seraient d'aucun effet pour eux ; aussi ne faut-il pas purger dès le principe et avant d'avoir, par des substances désobstruantes, atténué la bile et de l'avoir attirée dans les intestins. En effet, on se trouve quelquefois très mal de purger tout d'abord. Il faut donc employer avant tout les désobstruants dont nous allons parler bientôt. Après avoir atténué ainsi qu'on vient de le dire, je fais prendre un fort purgatif en rapport [avec le mal]. Si un premier purgatif ne produit pas d'effet, vous faites prendre, deux jours après, une nouvelle potion désobstruante, puis, au bout de trois jours, un purgatif plus énergique, dit Rufus, de telle façon qu'à la fin de la purgation, la bile, rejetée avec accompagnement d'une vive mordication, est plutôt azurée [ou verdâtre] que jaune. « Pour ma part, dit-il, si la fièvre s'empare du malade, je donne un purgatif ainsi composé: graine de pourpier, buglose, germandrée, trisandale (?), ivette, violette de Damas, fleur de pourangion (?), fleur de thym ; mélangez avec de l'eau jusqu'à réduction au tiers. Ensuite, prenant de cette composition, vous y mettrez du sucre de violette, de l’oxyphénice (?), de la tige de fausse cannelle nettoyée, 1 once de chacun; manne, 6 drachmes. Après avoir mélangé le tout, vous tirez au clair; ensuite vous y mettez du réum (?) brillant, 1 sextaire, et de l'extrait d'eau de rose (?) 3 sextaires plus ou moins, selon la force du malade, puis employez. »

Un autre médecin dit: Mélangez euphorbe, fleur de thym, aloès, graine de persil et de daucus [athamante], si le malade n'a pas de lièvre; ce remède purge les ictériques. Voici encore qui les purge très bien: Poivre long, 9 grammes; poivre noir, 5 grammes; scammonée, 6 grammes, cumin-ammi, 4 grammes ; graine de fenouil, 1 ½ gramme ; graine d'ache, 2 ½ grammes; graine de carvi, 4 grammes; grains d'anis, 3 grammes ; miel, quantité suffisante pour former une pâte épaisse. La dose sera de la grosseur d'une noix pontique avec une cuillerée de vinaigre blanc et une d'eau chaude. Pour les mélancoliques, il faut ajouter à la dose 3 grammes de fleur de thym bien réduite en poudre. Voici encore une recette excellente : Vous prenez une grosse courge ; vous faites un trou à sa partie supérieure, vous en retirez les pépins en y laissant la masse moelleuse; vous remplissez la courge de vieux vin sucré que vous y laissez passer la nuit. Le lendemain dès l'aurore, après avoir filtré soigneusement le vin à travers un morceau d'étoffe, vous le faites chauffer et le donnez à prendre aux malades qui ont la bile jaune.

Pour les mélancoliques, il faut, en outre[40] faire dans du vin sucré une décoction de 6 grammes de fleur de thym, mettre ce vin dans une coloquinte et le faire prendre comme on Ta dit précédemment. La racine de cyclame desséchée et réduite en poudre, donnée à la suite d'une médicamentation désobstruante, est excellente pour purger à fond les entrailles et fait sécréter la bile contenue dans tout le tissu cutané, par le moyen de la transpiration; aussi faut-il, après la potion prise, favoriser la sortie de la sueur au moyen de couvertures et d'une certaine chaleur maintenue dans le lit du malade. La dose complète est de à drachmes avec du mélicrat. Lorsque l'inflammation survient sur quelque point des entrailles, il faut d'abord recourir aux embrocations et aux cataplasmes, puis aux liniments et applications décrits précédemment contre l'inflammation d'entrailles. Il est encore préférable de mélanger dans de la farine de froment la libanotis, la fleur du jonc odorant, de l'absinthe, de l'aurone, de la rue, du cardamome, de l'ivette, du scordium, du polium. Chacune de ces plantes ainsi mélangée provoque l'urine, ce qui produit le meilleur effet contre l'inflammation d'entrailles. On emploiera aussi les ventouses simples dans les affections du foie, et quelquefois aussi avec scarification; mais dans celles de la rate, toujours avec scarification, car les ventouses simples ne soulagent aucunement la rate. Les potions désobstruantes sont bonnes aussi contre l'ictère, surtout les diurétiques, tels que la décoction d'ache, de fougère-adiante, etc.

81-82-83

Liv. XI, chapitres divers;[41] liv. XII, ch. xxiv et xxv.[42] (Pour mémoire.)


 

FRAGMENTS

DE

RUFUS D'ÉPHÈSE

EXTRAITS D'ALEXANDRE DE TRALLES.

(THÉRAPEUTIQUES.)

 

 

 

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Livre VIII, ch. x. Sur les affections qui ont leur siÈge dans les reins.

Les pierres qui se forment dans les reins ont leur origine dans les humeurs visqueuses et épaisses qui s'y sont desséchées, réchauffement des reins ayant été porté jusqu'à l'inflammation. La cause matérielle est donc l'épaississement de la matière, et la cause effective, la chaleur fébrile, ainsi que cela se voit dans les choses extérieures. En effet, c'est au moyen du feu et de toute matière jouissant des mêmes propriétés que lui, que ceux qui fabriquent des poteries arrivent toujours à ce résultat, que leur ouvrage ne peut être détruit même par l'eau. Puisqu'il en est ainsi, il faut éviter et qu'une matière trop épaisse se forme dans les reins et que ceux-ci s'enflamment et contractent un mauvais tempérament. Si ces accidents sont évités, il ne se formera jamais de pierre.

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Ch. xi. Diagnostic.

Vous diagnostiquerez exactement de la manière suivante si c'est réellement la pierre qui cause de la douleur. Et en effet, les mêmes indices se manifestent et chez ceux qui ont des coliques et chez ceux qui ont une pierre dans les reins. C'est surtout au début de la maladie que le diagnostic est difficile, car, dans l'une comme dans l'autre affection, il survient des vomissements, une obstruction du ventre, des ventosités et une distension qui monte jusqu'à l'orifice de l'estomac et au foie, et, si les mêmes accidents affectent les deux sortes de malades, du moins le médecin ne devra pas prendre le change. Chez ceux qui ont des coliques, les vomissements sont plus fréquents; ils compromettent davantage la digestion; ils sont plus pituiteux en obstruant le ventre et les gaz qui s'y forment. Chez les néphrétiques, les accidents n'ont pas lieu au même degré, mais les malades une fois traités évacuent souvent. Autre différence : il arrive que l'évacuation des gaz a lieu indépendamment du traitement, ainsi que celle des matières, ce qui n'arrive en aucune façon pour ceux qui souffrent au côlon. Il faut aussi se préoccuper sérieusement des urines, lesquelles fournissent un diagnostic très précieux. Le sédiment est plus pituiteux et plus abondant chez ceux qui ont des coliques, moindre chez les néphrétiques. Si vous y regardez attentivement, vous y reconnaîtrez des parties sablonneuses qui ne se rencontrent pas dans les urines des encoliqués. De plus, la douleur éprouvée par les néphrétiques est plutôt une douleur pesante et fixée en un seul point, ce qui n'est pas le cas des encoliqués. Tels sont les moyens de diagnostiquer et de distinguer entre eux les néphrétiques et les encoliqués.

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Ch. XII.  ΤRΑΙΤΕΜΕNT DE LA PIERRE [QUI SE FORME DANS LES REINS].

Il faut traiter ceux qui ont la pierre, dans la période du paroxysme, avec les remèdes de nature laxative et calmante, puis briser et extraire les calculs. Le meilleur de ces remèdes, c'est le bain; non seulement il calme, mais il peut même amener la guérison. Pour les encoliqués, il ne fait souvent que calmer; mais pour les néphrétiques, il procure ce double résultat. Comme onction locale, on emploiera la camomille dans le bain et on y restera plus longtemps (que les autres malades), et dans une plus grande quantité d'eau. On devra se baigner, non pas seulement une fois, mais deux et trois fois par jour, et, en été, prendre des bains froids. Après avoir mis le peignoir, on boira du jus de colombade (plante aquatique) mélangée de persil en petite quantité. (?) Si la douleur persiste, et que le calcul ne soit pas du tout sorti, on boira du jus de la racine de quintefeuille avant de quitter le peignoir. Il en résultera tout à la fois une sensation agréable et une action très bienfaisante. Après le bain, on devra prendre ce médicament seul et avec de l'oxymel. Si vous ne pouvez pas vous procurer facilement de la racine de quintefeuille, vous prendrez de l'éryngium ou de l'érysimum ou encore de la bétoine en très grande quantité, et vous en boirez la décoction. Pour l'usage externe, le malade se servira de sachets remplis de son de blé, bouilli surtout avec de la camomille, du mélilot et de l'huile de camomille ; on les alternera souvent. Si l'on n'a pas de son, on le remplacera par des chiffons de laine que l'on plongera dans de l'huile douce, quelquefois aussi dans de l'huile de camomille, et, faisant chauffer ainsi, on renouvellera continuellement cette application. Il faut aussi relâcher le ventre par des lavements qui ne soient pas trop âcres, mais plutôt mélangés d'huile d'olive et de nature à détendre et à désagréger, sans pour cela piquer par l'âcreté. Telle est, par exemple, la décoction passée de guimauve, de fenugrec, de figue, de son, de camomille, ainsi que l'huile extraite de cette dernière plante; pour les (tempéraments?) particulièrement chauds, la crème de ptisane (orge mondée), combinée avec (l'eau) de rose, la camomille et des jaunes d'œufs. Ce lavement procure du calme et rétablit un bon tempérament dans les parties (malades), et, administré en vue d'agir sur l'affection, empêche les néphrétiques d'être continuellement en proie à leur mal. Si la douleur persiste et qu'on ait de la peine à faire sortir la pierre, recourez à des moyens plus énergiques. Tel est le sang de bouc ; seulement il faut le bien dessécher, et, après l'avoir desséché, le broyer, le tamiser, et le donner ainsi préparé à ceux qui ont la pierre. On dessèche de la même façon des cigales, on les pile, puis on les fait prendre; ou du moins on détache leurs ailes et leurs pattes et on les donne ainsi préparées au malade dans le bain (ou) dans le réservoir réfrigérant. Ce sera encore mieux si l'on broie le médicament dans du vin miellé ou du conditum.[43] Il faut en faire grand cas; il est énergique.

Voilà pour les remèdes simples. Quant aux composés, le meilleur est celui-ci : Nard en épi, poivre, une once de chacun ; casse, roseau, costus, deux onces de chacun; faites prendre dans de l'eau la nuit et le matin. Ce remède est très actif et tout à fait énergique lorsqu'on le prend dans du sang de bouc de la manière suivante : lorsque le raisin commence à noircir, on met dans un plat neuf de l'eau que l'on y fait bouillir jusqu'à ce qu'on en ait chassé toute la partie terreuse, puis, après avoir égorgé un bouc, on y verse la partie moyenne de son sang en évitant d'en prendre ni la première ni la dernière ; on le laisse se solidifier, puis on le coupe en petits morceaux dans le plat, on recouvre celui-ci d'un léger filet ou d'un linge perméable, puis on le met dans un endroit exposé à l'air libre, de façon à ce qu'il reçoive les rayons du soleil et de la lune, afin que son contenu se dessèche et qu'il se conserve bien sans se liquéfier. On le broie ensuite avec soin et on le serre dans une boîte.

Lorsqu'on en a besoin, on en donne une cuillerée pleine dans du vin sucré de Crète. Tel est ce médicament; pour notre part, ce n'est pas d'hier que nous en avons éprouvé l'efficacité. Il convient de choisir un bouc dans la force de l'âge, c'est-à-dire âgé de quatre ans environ. Il faut avoir soin, avant qu'on le tue, de lui faire manger du fenouil, de l'amomum et d'autres plantes de cette nature afin de donner une bonne odeur (à son sang). Quant à moi, je sais qu'ayant fait un mélange de gingembre et de myrrhe troglodytique torréfiée, pour combattre les grandes douleurs, mon malade a essayé de rendre avec ses urines un très gros calcul que j'ai extrait après l'avoir divisé en le brisant; et le morceau rendu avec l'urine fit voir l'ensemble des diverses cassures. Ce remède a le double avantage de désagréger la pierre sans douleurs et d'empêcher qu'il ne s'en forme d'autres; aussi l'appelle-t-on la main de Dieu.

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ch. XIII.  CONDITUM NÉPHRÉTIQUE.

Si vous n'avez pas de sang de bouc, c'est le cas d'employer le remède au conditum. Voici ce que c'est : Nard en épi, valériane, sarxiphage (probablement la saxifrage), bétoine, asarum, graine de lin, persil sauvage, une once de chacun ; costus, feuille (de faux cannellier?)[44] une once de chacun; versez une cuillerée de cette préparation réduite en poudre sèche dans le conditum, et buvez une heure avant le déjeuner. Il désagrège les pierres, fait uriner, et il est constant qu'il empêche les calculs de se reformer.

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Ch. xiv. Sur les calmants.

On doit employer ces moyens et d'autres semblables dans les ciâses de souffrances et les calculs étant enclavés, mais non pendant le temps de la santé, de peur de rendre les reins dyscrasiques. Mais, si la douleur est persistante, et qu'il y ait grand risque que la vigueur (du malade) aille en décroissant, sous l'influence des insomnies et d'une souffrance opiniâtre, il faut recourir et aux médicaments qui calment la douleur et procurent le sommeil, et aux substances qui sont de nature à atténuer et à désagréger les calculs; telles sont, par exemple, la (préparation) de Philon,[45] celle qu'on nomme la panacée, la thériaque encore fraîche employée seule ou mélangée avec la composition de Philon. Il est préférable, en effet, de rétablir d'abord le calme et de faire revenir les forces du malade avant de recourir derechef aux remèdes plus forts et pouvant désagréger les calculs.

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Ch. xv. SuR la sAiGNÉE [dANs les affections des reins].

Si vous avez lieu de croire qu'il y a pléthore ou inflammation en même temps qu'obstruction calculeuse, administrez avant tout la saignée; car de cette façon vous ne manquerez pas de soulager votre malade. Par la détente qui se produira, et grâce au dégagement des pores, les remèdes appliqués manifesteront encore mieux leur action propre. J'ai reconnu qu'un seul des médicaments décrits plus haut suffit pour la guérison radicale de cette affection, et si j'en ai rapporté plusieurs, c'est parce que, faute de pouvoir employer l'un, on pourra recourir à un autre, Il reste maintenant à découvrir, d'après la gravité de la maladie, d'après le degré de force et la constitution du malade, quel remède correspond le mieux à chaque cas. Dans la multitude des remèdes, certains ont pour effet de briser les calculs déjà produits, et d'autres d'en produire de nouveaux, augmentant la cause efficiente des calculs en portant chez le sujet la dyscrasie et l'inflammation à cause de leurs propriétés échauffantes, de telle façon que d'autres calculs pourront se cuire chez lui. Pour éviter cela, il faut avoir soin de proscrire les remèdes très échauffants et trop âcres; et, si l'on ne peut se dispenser de les employer, après les avoir administrés une fois ou deux et avoir obtenu l'effet qu'on en attendait, s'en abstenir dès lors, loin d'imiter beaucoup de médecins qui ont l'habitude de s'en servir dans l'état de santé à titre de préservatifs, pour empêcher l'accumulation de matières trop épaisses ou trop froides qui favoriseraient la formation des calculs; il faut, au contraire, s'appliquer à bien disposer le tempérament et employer des remèdes atténuant sans trop échauffer, tels que l'oxymel, l'adiante, le suc d'asperge de marais et de chiendent, la racine du persil sauvage, le suc de l'éryngium, de la racine de quintefeuille, de la racine du plantain et de ses feuilles et mieux encore celui de son fruit, le bouillon aux pois chicb.es, le fruit de la pivoine, les amandes. Du reste, il ne faut pas employer ces médicaments d'une façon continue, mais alors seulement que l'on suppose trop abondante la matière épaisse contenue dans les reins. Avant de prendre n'importe quelle nourriture, il faut boire quelque chose de bien tempéré, car rien ne contribue autant à tenir les reins à l'abri de l'excès des humeurs et dans une bonne disposition, à ce point qu'ils ne peuvent plus produire de calculs, et, avec le temps, leur chaleur se consume sous l'influence d'une disposition convenable. Aussi fait-on bien de boire, même en prenant ses repas, de l'eau ou du vin rafraîchi, du vin aux roses ou à la violette[46] car il faut absolument interdire le conditum, comme aussi le mélange d'eau et de garum et généralement toutes les boissons poivrées. On doit éviter non seulement les substances âcres, mais encore les aliments incrassants, tels que les salaisons, le gâteau au miel et au sésame, les pâtes en fleur de farine, les œufs durs, la galette et tout ce qui est préparé avec du lait, le lait lui-même et le fromage. On proscrira aussi les vins noirs et âpres; on défendra au malade de coucher sur un lit garni de plume d'oie. Tout cela échauffe les reins. Il faut se garder de rester longtemps debout, et avoir soin de se mouvoir ou d'être assis. On évitera encore de prendre des aliments trop longs à passer, ou de manger quand on ne digère pas, ainsi que les saucisses en trop grande quantité et, parmi les poissons, ceux de grosse taille, tels que le thon, la pélamyde, le maquereau, le muge, les crustacés, à l'exception des petits coquillages et des oursins. Quant à ces derniers, on en mangera d'une façon continue, si c'est possible, car, outre qu'ils entretiennent (les reins) en bonne disposition, c'est de plus un diurétique. On mangera rarement du homard et du buccin. Il faut interdire absolument les huîtres, ainsi que la viande de boucherie et la chair d'oiseau quand elles sont grasses ; il ne faudra pas non plus manger continuellement de la chair des animaux qui vivent dans les étangs. On fera manger les membres de l'oie, les parties grasses de l'autruche, les oiseaux verts qui perchent dans les tours, et d'autres semblables. En fait de végétaux, on mangera la courge, principalement la moelle, et les pastèques.[47] On admettra aussi les figues sèches et les figues vertes, le raisin, les pommes, les brugnons, les poires (?), mais ni en grande quantité, ni d'une façon continue.

Voilà en détail tout ce que j'avais à vous exposer suivant la méthode scientifique. Mais, comme quelques-uns de nos devanciers et de ceux qui ont décrit les faits physiques relatifs à l'antipathie[48] ont exposé certains remèdes présentés comme de nature à balayer des calculs déjà formés et à empêcher qu'il ne s'en forme d'autres, j'ai pensé qu'il était nécessaire de faire connaître à mon tour quelques-uns de ces remèdes, et surtout pour le profit des amis delà vertu, afin qu'ils puissent sauver les hommes et vaincre le mal. Il est beau de vaincre et de guérir, par quelque moyen que ce soit.

Ce n'est pas tout;[49] le très divin Galien, après avoir pensé que les enchantements n'étaient pas (efficaces), a trouvé, à la suite d'un grand laps de temps et d'une expérimentation prolongée, qu'ils avaient beaucoup de puissance. Écoutez plutôt ce qu'il dit dans son traité sur la médecine au temps d'Homère.[50] Il s'exprime ainsi : « Quelques-uns s'imaginent que les enchantements ressemblent à des contes de vieilles femmes ; moi-même je l'ai cru longtemps; puis, en mûrissant, convaincu par des faits d'une évidence éclatante, j'ai reconnu qu'ils possédaient une vertu.

Dans le cas de la blessure causée par un scorpion, j'ai fait l'épreuve de leur utilité. J'en dirai autant du cas où des os s'arrêtent dans le pharynx, ils sont rejetés aussitôt après une incantation. Je pourrais citer encore beaucoup de détails importants où les enchantements sont suivis de succès. »

Si donc le très divin Galien porte ce témoignage et avec lui un grand nombre d'autres anciens, qu'est-ce qui nous empêche d'exposer les faits que nous avons acquis par notre propre expérience ou par l'autorité de nos amis?

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CH. xvi. Remèdes naturels.

Il y a encore beaucoup d'autres (remèdes), mais aucun n'égale l'anneau de cuivre chypriote. Voici la citation : « Remèdes naturels. On prend un morceau de cuivre d'une grosseur suffisante, qui n'ait pas encore été soumis au feu; la (portion) de bronze que l'on trouve dans le minerai, vous la ferez réduire aux proportions d'une petite pierre, de façon qu'elle se voie dans un anneau, et vous y graverez la figure d'un lion, de la lune, et d'une étoile; vous y tracerez en exergue le nom du susdit animal, et, après l'avoir montée sur un anneau d'or, vous porterez celui-ci au petit doigt médical.[51] »

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CH. xvii. Inflammation des reins.

Que l'inflammation consiste généralement dans une surabondance de matière qui se répand dans les (diverses) parties (du corps) et surtout dans les parties charnues, c'est un fait universellement admis. Il s'agit maintenant d'envisager scientifiquement cette question : Est-ce que la substance ainsi répandue incommode par sa quantité seule, ou par sa seule qualité, ou enfin par l'une et l'autre tout ensemble? Par sa quantité seule, lorsque, le sang étant bon par lui-même, ce n'est pas par une autre cause que par sa surabondance qu'il occasionne de l'engorgement, qu'il distend et soulève la partie affectée? Par sa qualité seule, comme lorsqu'il est quelque peu bilieux, trop âcre, épais et visqueux ou terreux et atrabilaire? Si la substance répandue est à la fois et surabondante et cacochyme, il arrive alors que la partie malade l'est à un double titre: elle est distendue par suite de cette surabondance et lésée en raison de la qualité nuisible qui l'afflige. Il faut donc examiner si cette matière prend sa source dans tout le corps ou si elle provient de quelque partie située au-dessus du rein, telle que la rate, le foie, etc. ; car de cette question de provenance dépend la diversité du traitement. Si le corps est tout entier envahi par la pléthore, il faut d'abord s'occuper de son ensemble, puis de chaque partie. S'il y a bien évidemment surabondance de sang, pratiquez une saignée; s'il y a cacochymie, administrez une purgation qui enlève l'humeur prédominante. Faites précéder la purgation d'un régime sûr et rendez le corps bien libre au moyen de ptisane, de poisson, de chicorée et de tous ingrédients de nature à humecter et à mélanger. Si la matière est épaisse sans avoir aucune âcreté, traitez par une alimentation à l'oxymel et par des décoctions atténuantes et dissolvantes. Mais, comme les dissolvants sont presque toujours mordicants, et qu'ils causent un picotement sur les parties enflammées, il faut avoir soin de choisir les médicaments exempts de propriétés mordicantes. Il y a certes plusieurs atténuants qui n'ont rien d'acre ni de nuisible; mais rien n'égale, à cet égard, le mélicrat mélangé d'eau. Après avoir ainsi atténué préalablement les parties épaisses et tempéré les parties âcres, vous en venez à la purgation, si vous trouvez que le malade a une double affection (sc. pléthore et humeurs âcres] et qu'une action unique ne peut vaincre, la cacochymie. Car il faut éviter tels remèdes pouvant enflammer en même temps que purger, surtout au début du traitement, les humeurs étant encore incuites et l'inflammation produisant partout du feu, mais nulle part autant qu'aux reins et dans la vessie. En effet, ces parties reçoivent en soi les superfluités plutôt qu'elles ne les laissent se dissiper, à moins que la cuisson de l'humeur inflammatoire et de toute la matière ne se soit effectuée. En conséquence, si la matière vous apparaît et surabondante et cacochyme, il faut donner du mélicrat et des diurétiques, tandis que, si vous ne la trouvez pas surabondante par tout le corps mais plutôt en petite quantité, âcre et brûlante, il faut vous abstenir des diurétiques, même désaltérants, ainsi que du mélicrat, et employer de préférence une boisson tempérée prise en grande quantité. En effet, elle affaiblit l'âcreté (des humeurs) et entraîne ce qu'elles ont de mordicant. C'est ce mordicant qui, se fixant, attire à soi la chaleur et cause une mordication et douleur ; or la douleur est fort capable d'augmenter la fluxion sur les parties malades, à ce point que, si l'âcreté est accompagnée de souffrance, il ne faut pas craindre de donner trop à boire. C'est ce qu'il y a de meilleur pour guérir les inflammations causées par les humeurs âcres; quant à celles qui ont pour cause la surabondance de matière, les boissons diurétiques sont loin de les guérir. Elles attirent une nouvelle quantité de matière excessivement épaisse, en même temps que les urines, dans les parties affectées, matière qui, ne trouvant pas de passage pour s'écouler, y séjourne.

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Ch. xviii. Remèdes topiques.

Il faut appliquer extérieurement, — s'il y a de la bile dans l'humeur qui produit l'inflammation, — les remèdes réfrigérants, surtout au début et lorsque l'inflammation est encore bouillonnante. Il est un grand nombre de remèdes pouvant réussir pour cet objet, mais aucun n'agit aussi heureusement que le cérat composé (d'huile) de rose, d'un peu de vinaigre, de jus de polygonum et de pourpier. Dans la période d'augment, il faut administrer les médicaments qui favorisent la perspiration, telle que la camomille ou des graisses encore fraîches, ou enfin, durant la période de décroissance qui survient bientôt grâce à la décoction administrée, des remèdes poussant encore davantage à la perspiration.

Maintenant, si vous voyez que la matière occasionnant l'inflammation soit trop épaisse, il faudra traiter par des atténuants non mordicants, et extérieurement par la camomille, par des cataplasmes d'orge et de graine, de lin cuits dans une décoction de camomille et de mélilot, d'absinthe et de guimauve en petite quantité. Proscrivez les fortes transpirations à l'étuve, mais procurez au malade une chaleur plus douce. De même donc qu'il faut interdire les moyens trop violents de donner de la chaleur, parce qu'ils empêchent la matière contenue dans l'inflammation de se convertir en humeur purulente, de même aussi les réfrigérants trop actifs et administrés trop fréquemment ont pour effet de durcir très promptement les inflammations des reins. Il faut donc, dans tous les cas, éviter les extrêmes, mais surtout dans celui de 1"inflammation des reins.

On doit avoir soin de ne pas faire prendre de bains avant la déplétion de la pléthore, mais de n'y recourir qu'après avoir veillé à l'état général, et encore n'emploiera-t-on avec sécurité que des bains chauds.

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Ch. XIX. De L'INFLAMMATION DES REINS QUI ABOUTIT A LA SUPPURATION.

Quant à l'inflammation qui est sur le point de se convertir en humeur purulente, vous la diagnostiquerez d'abord d'après ce fait qu'il surviendrait, sans aucune cause préalable, des fièvres ou des frissons sans raison et irréguliers. En effet, c'est aux approches de la formation du pus que surviennent les douleurs et les fièvres, bien plus qu'après cette formation. Un second signe est que le malade, étant couché sur le côté sain, dit ressentir, du fait de la partie malade, une pesanteur beaucoup plus grande qu'avant que l'inflammation tournât en suppuration. Enfin, si le pus se montre, ne supposez pas qu'il puisse s'échapper d'un autre endroit que des reins. En effet, la douleur qui précède et la sensation de pesanteur (éprouvée par le malade) donnent un diagnostic positif en même temps qu'une démonstration non équivoque. Maintenant, comme le pus peut encore provenir de plusieurs autres endroits, je vais vous dire tous les signes auxquels vous pourrez reconnaître d'où provient cette humeur, soit des reins, ou de la vessie, ou des voies urinaires, ou encore du poumon, etc., soit des organes de la respiration ou de ceux de la nutrition; car, si cette provenance est rare, elle n'en est pas moins réelle.

Donc cette humeur, lorsqu'elle descend des parties supérieures, se rencontre toujours mélangée complètement avec de l'urine. Si elle vient, des parties, inférieures, vous la trouverez plutôt à l'état de dépôt au fond du vase de nuit. Si elle prend sa source dans les parties intermédiaires, le mélange de l'humeur [avec l'urine] est médiocre et incomplet. Observez aussi avec soin les matières contenues dans les urines et mélangées avec elles : elles vous feront toujours reconnaître le siège de l'affection morbide. Si le mal est dans la vessie, ces matières auront l'aspect de pellicules; sont-elles charnues? il est dans les reins. Au surplus, la douleur locale, les faits avant-coureurs et concomitants feront reconnaître le point affecté et la diathèse d'une façon tout à fait manifeste.

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Ch. XX. MÉDICAMENT NEPHRETIQUE SEC CONTRE LA DYSURIE ET LA LITHIASE.

Graine de guimauve, graine de lin, une demi-once de chacun; graine d'ortie, 6 grammes; nard en épi, baume, 6 grammes de chacun; grains de paliure, une demi-once, [poussière de] verre, 1 once.

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CH. XXI. AUTRE MÉDICAMENT QUE J'EMPLOIE MOI-MÊME.

Agaric, 1 once; graine de guimauve, une demi-once; graine de lin, une demi-once ; graine d'ortie, baume, grains de paliure, [poussière de] verre, 6 grammes de chacun. Faites prendre 1 gramme de cette poudre avec du chrysattique (sorte de vin artificiel) bouillant ou une décoction d'éryngium, de chiendent, de pépins de concombre et la plante elle-même du chardon.

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Ch. XXII. TRAITEMENT.

IL faut traiter ceux qui urinent du pus par les médicaments à la fois non mordicants et capables de le l'aire évacuer, entre autres, le mélicrat mélangé d'eau, la décoction de ptisane accompagnée d'un peu de miel, l'adiante, les pépins de concombre pris avec du vin d'Athènes, la pastille de physalis, le lait d'ânesse en boisson, surtout pour ceux qui ont un ulcère à la vessie, la pilule d’Arménie,[52] prise en boisson, l'équisetum et surtout le chiendent. [On traite] les affections de l'urètre par des pilules ou des pastilles à la fois desséchantes et non mordicantes. Il faut aussi se préoccuper grandement du régime, et ne pas croire, comme beaucoup de médecins, qu'il suffit de s'en reposer sur l'action des seuls remèdes. On se trouvera bien de la décoction de ptisane et de folle avoine administrée seule et avec le chrysattique, ou le vin aux roses, ou encore le vin miellé, le vin sucré de Crète, le ladanum ou le scythopolite.

Si le malade n'aime pas à boire sucré, il prendra du vin [ordinaire], ou de l'hydromélon, du daphné-cnidium, du sarephthinon, ou du petit fromage, en petite quantité toutefois, car il n'en faudrait pas beaucoup pour amener une fluxion sur les ulcérations et les enflammer. Sont excellents contre ceux-ci les raisins secs pris comme nourriture, ainsi que les amandes et les pommes de pin prises dans du vin sucré (pourvu qu'elles ne soient pas pierreuses, car d'ordinaire elles engendrent des calculs dans les reins) ; les œufs des oiseaux de basse-cour, mangés tièdes et très mollets, sont encore d'un très bon effet. Pour ma part, je connais quelqu'un qui les avalait aussitôt pondus, sans les faire cuire, et m'affirmait qu'il s'en trouvait parfaitement ; il ajoutait que, par ce moyen, il parvenait à pouvoir bien supporter les mordications et toutes douleurs prenant naissance dans la vessie. L'oursin encore, que l'on mange simplement blanchi, ou seul ou avec du chrysattique ou de l'hydromélon sucré; de même les coquillages simplement blanchis. Le homard cuit dans une eau, puis recuit dans une autre eau après qu'on l'a vidé, est tout ce qu'il y a de plus efficace. En fait de légumes, l'intybe[53] et le chou cuit trois fois et mangé dans du vin, à moins que le pus contenu [dans les reins] ne soit trop âcre et mordicant. Les lupins non salés[54] ont du bon, aidant à la désagrégation [des calculs] et au nettoiement des ulcères; de même les bourgeons du fenugrec pris comme nourriture, ainsi que le cumin sans saveur,[55] pris modérément. Les châtaignes bouillies ou grillées sont très bienfaisantes, surtout lorsque [l'humeur] formée est ténue et bilieuse ; mais, lorsqu'elle est épaisse et obstruante, à ce point qu'elle s'échappe avec peine, [il faut] éviter les aliments trop succulents.

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Ch. XXIII. DIAGNOSTIC ET TRAITEMENT DE LA STRANGURIE.

S'il y a une certaine âcreté dans les urines et que l'appétit se porte vers les aliments âcres et bilieux, il faut toujours conjecturer, en raison de la mordication, que c'est cette âcreté qui produit la strangurie. Mais, s'il ne survient rien de tel, qu'au contraire l'urine apparaisse plutôt de couleur blanche, que l'état antérieur ait plutôt marqué une tempéra ture froide, avec un régime et des bains froids également, il faut, dans ce cas, s'en prendre plutôt à une dyscrasie froide de la vessie qui ne lui permet pas de triompher de l'urine. Telles sont les causes de la strangurie ; quant au traitement de cette affection, il faut qu'il soit en rapport avec la cause effective. On doit recourir aux remèdes humectants et produisant le mélange [des matières], s'il y a âcreté, et proscrire tout ce qui est échauffant ou salé. Dans ce cas-là, la ptisane donne d'excellents résultats, employée seule ou avec une petite quantité d'hydromélon ou de chrysattique, quelquefois aussi avec du lait, après que le plus fort de l'âcreté est passé; car il tourne [dans l'estomac] lorsqu'on le prend pendant que la sécheresse et l'âcreté [des humeurs] règnent absolument. A ce traitement devront succéder des bains continus et une boisson bien tempérée prise avant le manger, puis l'intérieur du concombre ainsi que le concombre lui-même, des bourgeons de fenugrec, du raisin bien sucré, du vin sucré aussi, tel que celui de Bithynie par exemple; en un mot, tout ce qui peut mélanger [les humeurs] et en faire cesser l'âcreté.

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Ch. XXIV. DE LA STRANGURIE CAUSEE PAR LE FROID.

Maintenant, si l'affection strangurique vient de ce que le tempérament pèche par le froid, il est nécessaire de suivre un régime et de prendre des remèdes de nature à lui procurer de la chaleur. Le vin un peu chaud convient dans ce cas, ainsi que le mélange de vin et de miel, le vin à l'absinthe ou à l'anis, pris comme aliment et comme boisson; parmi les légumes, le persil sauvage, le poireau recuit, le panais et généralement tout ce qui procure de la chaleur sans causer de mordication. On usera aussi de l'onction à l'aneth ou bien du vin doux, ou encore du marciat (?)[56] ou même simplement des eaux naturelles. Dans certains cas, une potion composée d'une décoction de scordium et d'armoise produit un bon effet sur la dysurie, quand il n'y a pas beaucoup d'âcreté ni d'inflammation.

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Ch. XXV. MOYENS DE RECONNAITRE ET DE TRAITER LA DYSURIE.

Il y a dysurie avec douleur et dysurie sans douleur. Si l'urine s'écoule difficilement et avec douleur, il faut en conclure nécessairement que la vessie est affectée. Si l'écoulement en a lieu sans une [sensation de] pesanteur, on doit supposer l'existence d'un ulcère à la vessie, surtout quand il est accompagné de picotements violents et d'excrétion de pus; mais, s'il y a une sensation de pesanteur, il y a plutôt lieu de supposer que la vessie a de l'inflammation ou un abcès. Si la douleur n'est pas accompagnée d'une sensation de pesanteur, ou que le malade ressente seulement une distension à la vessie, vous devez en conclure que la flatulence localisée là occasionne cette obstruction. Si le malade n'éprouve à la vessie ni douleur, ni enflure, ni distension, concluez-en que c'est dans les reins ou dans les uretères que réside l'obstruction, ou l'inflammation ou le calcul. Quant aux moyens de reconnaître et de traiter tous ces divers cas, ils ont été détaillés précédemment, lorsque nous avons parlé de l'inflammation des reins, des abcès et des autres accidents qui s'y produisent ; il est inutile de les décrire en ce moment ; toutefois, pour faciliter la recherche, nous mentionnerons ici quelques points. Contre l'obstruction des urines causée par des humeurs visqueuses, on emploie avec succès l'oxymel composé, le mélicrat, la décoction de nerprun épineux, faite avec sa racine; celle d'origan est merveilleuse. Il y a mieux encore, si l'obstruction est forte au point d'arrêter le cours des urines, pour agir efficacement, diviser [les matières] obstruantes et désobstruer : c'est une décoction d'écorce d'euphorbe. Il ne faut pas faire usage de ces remèdes lorsqu'il y a inflammation, mais employer ceux qui ne causent pas de picotements et qui sont digestifs, tels que le mélicrat trempé d'eau et tous ceux qui font mûrir l'inflammation, étant appliqués à l'extérieur. Contre les calculs existant dans les reins, s'ils sont assez gros pour causer l'arrêt des urines, on se, trouvera bien de la bétoine prise en potion avec du vin au miel. Donner 2 ou 3 onces de cette racine. La décoction de quintefeuille réussit encore mieux, de même que celles d'érysimum, de serpolet sec, celle-ci mélangée avec du sang de bouc et des cigales. Tous ces médicaments, il est avéré qu'ils ont, en outre, la propriété de désagréger, partie par partie, les calculs de la vessie. Quant aux remèdes composés, nous les avons déjà mentionnés.

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Ch. XXVI. DES CALCULS QUI SE FORMENT DANS LA VESSIE.

Les calculs qui se forment dans la vessie se comportent de la même façon que ceux des reins, sauf que les premiers viennent plutôt aux enfants qu'aux hommes, et qu'ils sont dus, non pas à une aussi grande chaleur [que ceux des reins], mais plutôt à une matière trop épaisse et propre à engendrer des pierres et à être figée sous l'action de la chaleur naturelle. Contre l'épaisseur [des humeurs] il faut d'abord recourir aux atténuants, afin d'empêcher une accumulation excessive de la matière épaisse, résultant vraisemblablement d'une voracité désordonnée et de l'immobilité après les repas.

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Ch. XXVII. INDICES DE LA LITHIASE, D'APRES LES URINES.

Les urines, dans ce cas, ne présentent point de coction, et sont d'une couleur blanchâtre; le sédiment en est sablonneux et d'apparence psorique. [Les personnes affectées] sont portées à se gratter dans les parties génitales ou à les distendre violemment, et cela fréquemment, mais surtout lorsqu'elles éprouvent le besoin d'uriner.

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Ch. XXVIII. TRAITEMENT.

On a indiqué précédemment des remèdes énergiques à employer contre les calculs de la vessie. On en indique maintenant qui sont encore plus efficaces, que le temps et l'expérience ont permis d'ajouter [aux autres], et dont l'effet est attesté; ainsi, par exemple, le sang de chèvre, employé tout chaud comme onction à l'extérieur, est excellent. Ce sera encore mieux [si] vous placez le bouc [égorgé] au-dessus de la vessie; mais ce qui est parfait c'est de pratiquer l'onction dans l'atmosphère chaude du bain et de sauter dans ces conditions. Faites cela non pas une fois seulement, mais à plusieurs reprises et par intervalles.

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Ch. XXIX. MOYENS DE RECONNAÎTRE LA PSORIASE DE LA VESSIE.

Vous devez reconnaître la psoriase de la vessie à la présence des particules furfuracées qui se manifestent dans l'écoulement des urines. Il vous sera loisible de les distinguer de celles qui proviennent des veines. En effet, il arrive souvent que les veines, comme le corps tout entier, éprouvent une sorte de psoriase, dans le cas de fièvres très violentes, et qu'il s'en échappe des particules furfuracées. Ainsi donc, lorsque l'urine est ténue dans sa composition et âcre, concluez-en que ces particules proviennent des veines; si elle est épaisse dans sa composition, tirez-en l'indication qu'il y a psoriase de la vessie. Il faut traiter par les moyens capables de purger et, en dernier lieu, par des remèdes desséchants et qui soient de nature à cicatriser l'ulcère. Cette maladie est rebelle, je dirais presque incurable, au point que nul remède ne peut lutter victorieusement contre elle. Il n'en faut pas moins appliquer des médicaments sans se décourager et faire concourir le régime et là thérapeutique, par tous les moyens possibles, au soulagement des malades. Le lait d'ânesse, administré avec une grande persistance, leur fera du bien. Si l'on n'en a pas, le lait de chèvre est bon aussi, pris non seulement en breuvage et comme nourriture, mais encore comme ingrédient avec divers aliments, avec du pain, de la farine sémidalise, de l'itrion,[57] de la farine d'épeautre, de la farine de gruau (?). Une chose qui est encore d'un bon effet, ce sont des œufs tout à fait mollets et l'intérieur des concombres ou des courges ; ou bien, comme nourriture, des pommes de pin fraîches, des raisins secs, ou encore de la graine de concombre prise en boisson et toutes choses préparées avec ces ingrédients, jouissant de propriétés anodines, ou avec la ciguë ou l'opium dans le cas de douleurs trop vives. Il ne faut pas employer les calmants d'une manière continue, mais rien que pour produire l'effet (?).

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Ch. XXX. REMÈDE EFFICACE CONTRE LES AFFECTIONS PSORIQUES, LA DYSURIE

ET LES INFLAMMATIONS.

20 petites pommes de pin, 40 pépins de courge de jardin (littéralement adoucie par la culture), amidon,[58] nard en épi, 1 drachme de chacun; graine de céleri, 10 drachmes dans 1 sextaire d'eau. On fait bouillir le nard et le céleri, puis, de cette décoction, on mélange avec les ingrédients précités une dose de 2 cotyles (près d'un demi-litre).

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Ch. XXXI. DU DIABÈTE.

Il y a ce que l'on appelle diabète lorsque l'urine s'écoule en quantité démesurée, souvent pendant que l'on boit, de même qu'il arrive aux personnes affectées de lienterie de rendre par en bas leurs aliments sans qu'ils puissent être retenus un seul instant dans le ventre', ni être transformés, ni nourrir le corps. Aussi certains [médecins] ne donnent pas à cette maladie le seul nom de diabète, mais, en outre, celui de diarrhée urinaire, à cause de l'écoulement immédiat des liquides absorbés. De plus, comme les malades ont une soif immodérée, vu que tout le liquide s'écoule, on a donné aussi à cette maladie le nom de dipsacos (de δίψα, soif). Telles sont les dénominations diverses qu'elle a reçues. Elle a pour origine l'affaiblissement de la puissance rétentive des reins et l'accroissement de la puissance attractive, qui, par suite d'un excès d'échauffement, est amenée forcément à entraîner, non seulement les liquides contenus dans les veines, mais même ceux de tout le corps. Voilà pourquoi il faut combattre le mauvais tempérament qui s'y rapporte et diriger tout le traitement dans de sens, cherchant à rafraîchir et à fortifier le corps, puis augmentant la quantité des liquides et les mélangeant dans tout l'organisme; d'autant plus que le corps devient nécessairement plus sec par suite d'une grande dépense d'urine. Il faut donc donner à boire à ces malades dans des proportions inusitées, au point de leur faire convenir qu'ils n'ont plus soif, et à manger des aliments d'une transformation difficile, de façon que leur nourriture ne soit pas facile à convertir en urine et à atténuer. En effet, le foie devenu trop chaud et trop âcre rend le ventre trop sec, les aliments attirant à eux et absorbant son humidité. Il faut donc nécessairement donner à ces malades une nourriture plus riche et épaississante, pour qu'elle puisse suffire à cette dépense. Il n'y a rien de meilleur contre ces affections que l'épeautre (?) mélangé avec du vin aux roses, du chrysattique, ou du vin aux pommes de roses, de la liqueur au jus de pommes, ou bien avec une petite quantité de [vin] sarephthin ou de Tyr ou de Cnide (?) ; en fait de légumes, des intybes, ceux qui se mangent crus, la laitue sauvage ; en fait de viandes, le ventre [de truie], les tripes, et les pieds, surtout ceux du bœuf, ou le groin du porc ; en fait de poissons, l'isicus (?), l'orphe, et les autres à chair dure; des [fruits] tendres, la chair qui entoure le noyau; les pommes tout à fait sucrées. Il faut éviter tous les aliments salés et âcres. Ne vous hasardez pas à prendre le jus exprimé de l'anis ou du cumin, ni généralement d'aucune graine de cette nature ou de celles qui provoquent les urines. Évitez aussi les [fruits] épineux, ainsi que les amandes, les pistaches, les ligues sèches, les dattes. Quant aux châtaignes, elles ne présentent aucun inconvénient.

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Ch. XXXII. — DE LA GONORRHÉE.

La gonorrhée a pour origine, tantôt une surabondance de sperme alourdissant la faculté rétentive qui existe dans les vaisseaux spermatiques au point de ne plus pouvoir retenir le sperme en formation, tantôt l'âcreté et la ténuité du sperme.

Il faut donc questionner le malade sur la couleur du sperme et sa composition, ainsi que sur les causes antécédentes, le régime suivi et la vie passée. En effet, si, après s'être fait une habitude d'actes vénériens nombreux et variés, on modifie sa conduite dans le sens de la continence et de la pureté, il est constant que la maladie est amenée dans ce cas par la surabondance, les parties ne pouvant supporter cette surabondance. Mais, s'il n'y a rien de tel, et que le sperme émis apparaisse plutôt avec un caractère bilieux et âcre, c'est le lieu de reconnaître que la semence est en état d'éréthisme et qu'elle est entraînée à cause de sa ténuité; mais généralement aussi elle s'échappe à cause de la diminution de la faculté rétentive.

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CH. XXXIII. TRAITEMENT.

Dans le cas de la gonorrhée ayant pour origine la surabondance, il faut s'abstenir avec soin de tous les aliments riches, et surtout de ceux qui engendrent la bile et de nombreux gaz, comme de ceux qui excitent la matière à se précipiter au dehors. Un grand nombre d'aliments et de remèdes produisent ces divers effets. Tels sont, parmi les aliments, les pommes de pin(?), les fèves, les pois chiches, les oignons, la roquette, les radis ou les raves, et surtout les breuvages faits avec leurs, graines, comme aussi la graine de grand panais cultivé et la menthe.

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Ch. XXXIV. REMÈDES QUI ENGENDRENT LE SPERME ET L'EXCITENT.

En fait de remèdes, la graine d'ortie prise en potion est un excitant, ainsi que le costus employé avec du vin miellé, ou la grande racine d'orchis, appelée quelquefois testicule de chien, qui, prise en potion, est un stimulant, le satyrium, les parties des grands lézards avoisinant les reins, administrées comme breuvage portant à l'érection du membre viril.

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Ch. XXXV. REMÈDES POUR DESSECHER LA SEMENCE.

Ces remèdes et tous leurs analogues, il faut éviter de les mettre dans la nourriture ou de les prendre en potion. On doit rechercher ce qui combat la production exagérée de la semence et ce qui consume plutôt le sperme, notamment le fruit de l’agnus-castus, desséché ou non; un lit de ses feuilles et de ses fleurs produit le même effet. "La graine de laitue bue avec de l'eau n'est pas moins efficace et arrête la gonorrhée ; aussi la fait-on prendre aussi contre les pollutions nocturnes. Il en est de même du chènevis; si l'on en boit une bonne quantité, il dessèche la semence. Citons encore Torchis, que l'on nomme quelquefois testicule [de chien], ou petite racine qui, prise en potion, retient le sperme; du plomb appliqué sur les régions lombaires est un remède utile contre les pollutions nocturnes. La racine du nénuphar et sa graine sont d'un bon effet dans le même cas, et, dans celui des écoulements immodérés, [cette même racine] prise en potion dans du vin noir et âpre. Le fruit et le feuillage du chèvrefeuille dessèchent encore le sperme, et l'on prétend même que certains sont devenus impuissants pour en avoir pris en potion une grande quantité.

Donc, en général, les substances refroidissantes et desséchantes, soit comme aliments, soit comme remèdes, sont à rechercher pour traiter ceux chez qui il y a surabondance de sperme et amoindrissement de la faculté rétentive. Il faut éviter celles qui ont le double caractère de flatulentes et d'échauffantes, et choisir, au contraire, celles qui ont le double caractère inverse. Maintenant, s'il arrive que le sperme soit ténu et âcre, il faut administrer, parmi les remèdes précités, ceux qui sont de nature à le rafraîchir et à le dessécher, et se préoccuper surtout de l'alimentation. Ces malades ont besoin de ce qui opère le mélange [des humeurs], de tout ce qu'il y a de plus rafraîchissant et de bains convenablement composés, de façon que la semence, devenant insensiblement plus épaisse et mieux proportionnée dans ses diverses parties, ne soit plus susceptible d'écoulement. Que la rue, étant chaude, épaississe la semence, c'est un fait avéré; aussi est-elle efficace pour combattre les pollutions nocturnes continues et l'atténuation de la semence, et c'est dans toute sa substance et non pas seulement dans son tempérament qu'elle possède cette bienfaisante qualité.

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Ch. XXXVI. DU PRIAPISME.

Il faut traiter de la même façon ceux qui sont affectés de priapisme ; ils doivent s'abstenir d'aliments trop chauds, pouvant résoudre la matière en gaz et élargir les artères qui introduisent dans le pénis, organe garni de trous nombreux et disposé pour les recevoir, les gaz propres à le distendre et à le gonfler. Aussi faut-il sevrer le malade non seulement de ce qui échauffe, mais, en outre, de ce qui peut engendrer une humeur visqueuse ou produire des effets · analogues, tel que spectacles, conversations, pensées obscènes; de façon à écarter autour de lui tout mouvement qui pourrait raviver par le souvenir la surexcitation de la nature. Beaucoup [de malades], grâce à cette précaution, ont été complètement guéris. Ceux qui, tout en observant un régime chaud et humide de nature à favoriser une nouvelle formation de sperme, ne mettent pas de terme à leurs désirs lubriques, ceux-là, même après la mort, on leur trouve le membre viril roide et distendu. Le cérat à la rose réussit bien à ces individus, battu dans de l'eau fraîche mélangée d'un peu de vinaigre. Proscrire tout ce qui est très refroidissant, surtout les astringents et les narcotiques, afin d'éviter que la maladie ne se complique d'une perspiration difficile. Que les malades prennent en potion tout ce qui peut modérer la semence, notamment la graine du nénuphar et sa racine; car l'efficacité de ces substances est un fait qui a été observé, non seulement en raison de leur tempérament, mais encore dans son essence même. Qu'ils aient recours aussi à l'exercice fréquent et au frictionnement des parties supérieures, qu'ils s'exercent avec les haltères et la paume, afin de tirer en sens contraire la matière [spermatique] et de provoquer l'évacuation des gaz flatulents.

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Livre IX, ch. ier. de l'affection dite colique.

L'affection dite colique est un état dangereux, faisant beaucoup souffrir, et, qui plus est, fort difficile à diagnostiquer. Quant au premier point, c'est-à-dire les souffrances qu'elle occasionne, elles tiennent à ce que le côlon est dense, épais, nerveux, et à ce que rien de ce qui s'y accumule ne peut être facilement évacué, comme il arrive pour les intestins grêles. En ce qui touche la difficulté de la diagnostiquer, elle provient de ce que d'autres parties manifestent des symptômes analogues à ceux qui accompagnent les douleurs du côlon. Donc, afin que, sur le point de s'engager dans la voie de l'erreur, on ne soit pas aveuglé en fait de traitement, il est nécessaire de savoir et de discerner tout d'abord si c'est bien le côlon qui est affecté, ou si ce n'est pas telle ou telle autre partie, puis quels sont les divers états dans lesquels il se trouve, enfin quels sont les moyens de diagnostiquer chaque état en particulier. C'est qu'en effet il y en a plus d'un, et ils sont même nombreux et variés. Les humeurs froides et bilieuses [amassées dans le côlon], ou l'invasion de la pituite formée dans cet intestin ou y affluant d'ailleurs, enfin l'inflammation, l'arrêt d'excréments secs, l'obstruction de gaz abondants et trop épais, en un mot, mille autres causes, et non pas seulement une affection originaire [de cet organe], mais une sorte de communauté de sensations avec les parties qui l'avoisinent, telles sont les raisons d'être de cette maladie. Ajoutons-y l'inflammation de la vessie, des reins, du foie, de la rate, du diaphragme, de la cavité intestinale, des flancs. Du reste, les obstructions du ventre et des intestins produites en vertu de cette sympathie, il ne faut pas leur donner le nom de coliques : nous en parlerons en traitant de l'iléus, que certains dénomment aussi chordapsus. Pour le moment, notre dessein est de discuter les faits qui concernent le côlon seul en vertu d'une affection ayant pris naissance en lui-même. Comme les affections qu'éprouvent ceux qui souffrent du côlon et les néphrétiques ont une grande ressemblance, et même si grande, que des médecins fort savants ont parfois beaucoup de peine à les discerner, il faut d'abord traiter la question de savoir à quel point de vue elles se ressemblent entre elles, et en quoi elles diffèrent, de telle façon que, chacun de ces deux ordres d'affections bien diagnostiqué, nous ne soyons, dans le traitement, exposés à aucune erreur.

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Ch. II. COMMENT NOUS DISCERNERONS LA COLIQUE DE LA NEPHRETIQUE.

D'abord, dans la colique, les douleurs sont plus continues et plus fortes que dans la néphrétique ; en second lieu, les vomissements qui surviennent sont plus fréquents, plus prolongés, pituiteux ; le ventre est aussi plus obstrué que dans la néphrétique, au point que les flatuosités ne peuvent pas du tout passer ; car, lorsqu'il y a colique proprement dite, la douleur ne se produit pas seulement au côlon lui-même, mais elle gagne, en outre, les parties environnantes, parfois même tout le ventre, ce qui n'a pas lieu dans la néphrétique. La douleur s'attache aux reins et on ne la voit pas voyager d'un point sur un autre : cela vous fournira un moyen non équivoque de différencier [la colique] et la néphrétique. Au surplus, les urines sont plus épaisses dans la colique, tandis que, chez les néphrétiques, elles sont aqueuses au début, puis avec le temps elles deviennent sablonneuses, ce qui n'a pas lieu chez ceux qui sont affectés de la colique. Dans cette dernière affection, aussitôt après l'évacuation alvine, la douleur cesse instantanément, tandis que, chez les néphrétiques, cet effet n'est pas immédiat, et l'on voit la douleur persister même après l'évacuation. Tels sont les moyens de distinguer ces deux affections. De plus, après avoir considéré attentivement et diagnostiqué avec précision [l'état du malade], on doit aborder le traitement avec la même attention. Lorsqu'il s'agit de maladies aussi graves, une application téméraire de remèdes choisis trop légèrement peut devenir la cause des plus grands maux, et même de la mort. C'est donc ainsi que vous reconnaîtrez les affections qui se produisent de diverses manières dans le côlon.

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Liv. XII, ch. lxxviii. fièvre quotidienne.

Que la fièvre quotidienne tire son origine de la pituite, tout le monde en convient. En effet, il est constaté que ces sortes de lièvres ne sont pas aiguës, qu'elles ne donnent pas une grande soif, qu'elle ne rendent pas tout de suite [la peau] brûlante et sèche au toucher, mais plutôt qu'on voit se produire en ceux chez qui elle devient chronique une chaleur fumeuse qui vient des profondeurs. Le plus généralement, le pouls est petit et faible, l'acmé ne se produit pas vite et se prolonge beaucoup.

Les sueurs qui surviennent à ceux qui ont cette fièvre n'amènent jamais d'intermittence, ce que l'on observe souvent dans le cas de la fièvre tierce ou de la fièvre quarte. Mais vous verrez mieux et tout à fait clairement en quoi consiste cette variété de fièvre si, loin d'y mettre de la négligence, vous apportez une exactitude rigoureuse dans la recherche et dans l'examen de tous les faits ; car le plus souvent elle a pour antécédents de mauvaises digestions, un appétit vorace, un usage immodéré du bain, un refroidissement du foie et de l'estomac. Il faut tenir grand compte de ces circonstances et les observer avec exactitude lorsque l'on veut reconnaître de quelle espèce de fièvre il s'agit. Tantôt ces divers symptômes apparaissent tous ensemble, tantôt non. Ils se manifestent à peu près tous dans le cas des fièvres légitimes ; dans celui des fausses fièvres, certains d'entre eux surviennent mais certains autres pas toujours ; en un mot, il existe dans ces fièvres la plus grande diversité, et quant au traitement et quant à la spécification. Voilà ce qu'il en est du diagnostic; il en a été traité tout au long par le très divin Galien, par Rufus et par beaucoup d'autres médecins de l'antiquité.


 

FRAGMENTS

DE

RUFUS D'ÉPHÈSE

EXTRAITS DE PAUL D'EGINE.

 

 

 

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Livre II ; ch. xxxv. SuR la peste.

Tous les accidents les plus terribles peuvent avoir lieu dans la peste, et il n'y a rien de spécial comme dans chaque autre maladie …………………………………………………………

Voici un bon propoma.[59] Aloès, 2 parties; encens de gomme d'ammoniaque, 2 parties; myrrhe, une partie; broyer le tout, puis en fait prendre dans du vin aromatique la valeur d'un demi-cyathus chaque jour. Je ne sache pas, dit Rufus, de malade qui ne se soit tiré d'affaire avec cette potion. C'est ainsi que s'exprime Rufus.

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Liv. III, ch. III. Dartres farineuses A la tÊte.

Autre recette. Prenez nitre, lie de vin brûlée, myrobolan, une livre 1 de chacun ; staphisaigre, une livre et demie ; frictionnez la tête avec du vin dans lequel vous aurez fait dissoudre ces substances. Si d'autres parties du corps éprouvent une démangeaison, [vous les frictionnerez] à sec. Quant aux dartres à la tête accompagnées d'humidité, faites-les disparaître en les lavant avec de la saumure ou une décoction de lupins.

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Ch. XXII. Du GLAUCOME ET DE LA CATARACTE.

Les anciens médecins croyaient que le glaucome et la cataracte étaient une seule et même chose; mais les modernes sont d'avis que les glaucomes sont des affections de l'humeur cristalline, passant sous l'influence de l'humidité à la couleur glauque;[60] tandis que les cataractes sont un épanchement d'humeurs coagulées entre la cornée et le cristallin. Tous les glaucomes sont incurables et toutes les cataractes ne sont pas curables. On traite ceux qui sont attaqués de la cataracte, avant que l'affection ait pris de la consistance, par une évacuation de sang au pli du bras, par la purgation et par des évacuants plus ou moins âcres comme est une décoction de centaurée ou de concombre amer, enfin par l'emploi assez fréquent de laxatifs ; on applique aussi des ventouses scarifiées sur l'occiput. Pendant toute la durée du traitement, on s'astreint à boire de l'eau et l'on se sert d'aliments atténuants. Après un certain temps, il est utile d'employer aussi des apophlegmatismes, à quelques jours d'intervalle. Lorsqu'il se produit un trouble dans la vue, faisant l'effet de moucherons que l'on aurait devant les yeux, par suite des mauvaises humeurs ou de vapeurs bilieuses qui surviendraient, nous donnerons le médicament amer à l'aloès, d'une façon continue, ou même nous purgerons à l'aide de ce médicament. Dans les affections des yeux, il faut d'abord se servir de remèdes simples, par exemple, d'une combinaison de miel, d'huile et de suc de fenouil ; plus tard on aura recours à des médicaments composés comme le suivant : gomme sagapène, a drachmes; suc de cyrène, ellébore blanc, 6 drachmes de chacun, d'autres ajoutent : pris dans 8 cotyles de miel. Quant à nous, dit Oribase, nous employons le médicament ci-après : suc de petit boucage, etc.

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Liv. III, ch. xlv. Des affections des reins et df, la vessie, ET PREMIÈREMENT DE LA LITHIASE,

L'affinité des maladies nous force à rompre l'ordre de notre enseignement; car il y a un point commun aux coliques et à la présence des calculs dans les reins, c'est qu'au début le ventre est obstrué, les douleurs sont vives, on manque d'appétit, on digère mal et l’on a des tranchées. Quant aux caractères particuliers, celui des coliques consiste en ce que tous ces accidents sont plus aigus, et celui de la néphrétique, en ce qu'ils le sont moins; celui des coliques, en ce que la douleur siège au flanc droit et monte jusqu'à l'orifice de l'estomac, au foie et à la rate, et que l'excrément est complètement arrêté, au point que les vents mêmes ne peuvent s'échapper, et que l'évacuation, quand elle est procurée par la force des médicaments, s'accompagne de ventosités et produit des selles qui ressemblent à la bouse ; quelquefois aussi on rend une pituite vitreuse, et l'on urine un liquide très abondant et pituiteux. Dans la néphrétique, une douleur pesante siège dans les reins eux-mêmes, donnant la sensation d'une broche que l'on y enfoncerait ; le testicule du côté de la douleur est douloureux, et de ce côté aussi la cuisse est engourdie. Le malade a rarement des selles naturelles, mais en tout cas à l'aide de lavements, et ses défécations sont accompagnées de ventosités et de bile. Ses urines sont d'ordinaire peu abondantes et sablonneuses, et ses voies urinaires sont contractées. Tels sont les indices de la présence des calculs dans les reins, indices plus accentués chez les hommes faits.

Quant à la fixation des calculs dans la vessie, elle a plutôt lieu chez les jeunes enfants. Les signes de leur présence sont les suivants : Urine crue et blanchâtre avec sédiment sablonneux. Continuellement, ils se grattent le membre génital, ils y portent la main et le mettent en érection ; continuellement aussi ils ont besoin d'uriner et éprouvent la strangurie.

La cause matérielle de la formation des calculs, c'est l'existence d'une humeur épaisse et terreuse; la cause effective, une chaleur brûlante des reins et de la vessie. Dans le cas de la lithiase des reins, il faut employer des remèdes qui divisent et morcellent les calculs sans produire d'inflammation manifeste. Telles sont les racines de l'asperge royale et de la mûre sauvage,[61] le verre brûlé,[62] la racine de chiendent, la fougère-adiante, la résine [du palmier], l'écorce de la racine du laurier, la graine de l'althée, les bourgeons des pois chiches, les graviers de l'éponge, le vinaigre au jus de scille, la valériane-phou, le méum, l'asarum, le bois de carpèse, le sarxiphage, le sium, pris comme aliment ou comme boisson, la racine de chardon comestible et la bétoine. On prendra continuellement des bains, et, immédiatement après chaque bain, on boira quelqu'un des remèdes précités. On aura aussi recours aux embrocations, aux cataplasmes, aux fomentations, aux bains de siège, aux laxatifs et aux calmants, ceux-ci, en les empruntant au traitement de la colique. On emploiera des boissons composées de rue sauvage, de mauve sauvage, après avoir fait dans du vin une décoction de racines de mauve sauvage et de céleri, puis, la liqueur ainsi formée et trempée d'eau, on en donne deux cuillerées. On applique un cataplasme de fruit du baume, des graviers des éponges, de sèche, de graine de mauve sauvage, le tout pilé par parties égales ; on en donnera une cuillerée mélangée avec deux cuillerées de vin. On donnera encore le sang de bouc desséché et les cigales sèches auxquelles on a ôté les ailes et les pattes, ou les dissolvants de la pierre, employés avec du vin miellé dans l'eau chaude du bain. Il y a aussi les remèdes composés préparés avec les précédents, tels que la fusca néphrétique, les condita accommodés contre cette [maladie]. Le roitelet troglodite est au nombre des recettes renommées. Citons encore le moineau struthium, le plus petit des oiseaux, le susdit roitelet excepté, car il ne le cède qu'à celui-ci en petitesse; il lui ressemble par la couleur du plumage, qui est entre le gris cendré et le jaune ; il a un tout petit bec ; il vit principalement dans les murs et dans les haies vives. Cet oiseau, salé tout entier et mangé cru d'une façon continue, fait rendre avec les urines les calculs déjà formés, et empêche qu'il ne s'en forme d'autres. Brûlé tout vivant avec ses ailes, sa cendre bue seule et avec du poivre ainsi que des feuilles en quantité modérée, dans du miel bien tempéré, a par nature la même efficacité. Contre les douleurs aiguës et l'insomnie, le médicament dit « le Sauveur » et le médicament de Philon[63] sont de bons remèdes.

L'emploi de la saignée a souvent enlevé la douleur en accélérant la sortie du calcul.

Les préservatifs de la formation des calculs seront d'abord une nourri ture succulente et modérée, l'exercice, l'abstention de l'emploi continu de toutes les sortes de graines légumineuses et des céréales, du fromage, du lait et de tous les aliments qu'il sert à préparer.

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Liv, V, cH. III. Des gens moRdus par un chien et de l’affection HYDROPHOBIQUE.

……………………………………………………………………………………………………………

Quant à Rufus, il a fait voir que c'est là pour ces malades une variété de la mélancolie, le venin [rabique] imitant cette humeur, de même que nous savons que les objets de crainte des mélancoliques varient suivant les individus. Cette raison confirme l'opinion de ceux qui prétendent que le malade voit dans les eaux l'image du chien qui a fait la morsure. De tous ceux qui tombent dans cette affection, nous savons qu'aucun n'en réchappe, sauf un ou deux cas consignés dans l'histoire, et encore ces malades n'avaient-ils pas été mordus par un chien, mais c'était d'une personne mordue elle-même qu'ils avaient pris leur mal. Du reste [si l'on prend] l'affection dès son premier accès, il y a beaucoup d'exemples de morsures par un chien auxquelles on a survécu. Il faut donc commencer le traitement dès ce moment-là. Mais, comme il arrive souvent que l'affection hydrophobique ne se déclare par sur-le-champ (assez généralement elle reste en suspens durant quarante jours environ, et, dans certains cas, jusqu'à six mois, et même sept à ce que l'on rapporte), quelques-uns .jugeant non enragé le chien qui a fait la morsure et s'appliquant à la faire cicatriser, deviennent eux-mêmes les auteurs de l'affection. Voici une épreuve dont l'emploi vous fera découvrir si la morsure provient ou non d'un animal atteint de la rage. Vous pilez avec soin des noix royales dont vous faites un cataplasme que vous appliquez sur la plaie. Le lendemain, vous le donnez à manger à un coq ou à une poule. Tout d'abord, le gallinacé n'y voudra pas toucher; mais observez si, pressé par la faim, il vient à en manger; car, si le chien qui a fait la morsure n'est pas enragé, l'oiseau conservera la vie, sinon il mourra le jour suivant. Dans ce dernier cas, procédez à l'ouverture de la plaie. Renouvelez cette épreuve après quelques jours d'intervalle. Lorsque l'oiseau ne mourra pas, amenez la cicatrisation [de la plaie], considérant le danger comme écarté. Telle est l'épreuve qu'Oribase rapporte. Si, au moyen des indices précités, nous reconnaissions que le chien était atteint de la rage, il faudrait aussitôt recourir aux recettes usitées pour l'ouverture [des plaies]. La première de ces recettes, c'est un composé de poix, de vinaigre très acide et de suc de panacée, tel qu'on l’a décrit exactement dans le chapitre des blessures affectant les nerfs. Si la personne mordue avait la peau fine, il faudrait amortir ce [médicament] avec du vin d'iris, du baume, ou quelque autre analogue. Vous pouvez encore, après une fomentation préalable, appliquer sur les plaies un cataplasme d'ail ; cela produit aussi une escarre.

Remède sec pour la formation d'une escarre dans le cas des morsures de chiens enragés. — Sel fossile, 8 drachmes ; calamine ou pierre de cuivre, 16 drachmes; scille, 16 drachmes; rue verte, 4 drachmes; raclure de rouille, 4 drachmes; graine de marrube, 1 drachme. Employez d'abord à sec, afin que l'escarre se forme, puis avec du vin aux roses, afin de faire tomber les escarres. Maintenez les parties [malades] sans les laisser se cicatriser pendant quarante-deux jours au moins.

Cataplasmes pour maintenir les plaies ouvertes dans le cas des morsures de chiens enragés. — Faites un cataplasme d'oignon avec du sel et de la rue, ou encore de silphium avec du sel, ou de vieille salaison. On emploie aussi la cendre de sarment avec de l'huile, ou l'ail, ou les feuilles de sureau, ou la menthe, ou la mélisse, chacun d'eux [seul] ou avec du sel. On emploie encore les noix royales avec de l'oignon, du sel et du miel, ou de la cendre de bois de figuier retenue dans du cérat. Laver la plaie avec une décoction de camomille et de racine de patience sauvage. Quelques-uns brûlent aussi la plaie avec des cautères au fer [rouge]. Faire boire d'abord à ces malades des médicaments simples, le nerprun, l'absinthe, le jus de silphium, la germandrée, le scordium, le polium; des médicaments composés : écrevisses de rivière grillées sur des sarments de vigne blanche dans un vase de cuivre ou d'airain, la valeur de 2 cuillerées; racine de gentiane pilée, 3 cuillerées (?) avec 2 cyathus de vin vieux non trempé : vous prendrez cette potion pendant quatre jours. Quelques-uns prescrivent encore 2 cuillerées de sang de perdrix. Vous prendrez les écrevisses tandis que la lune est dans sa période de croissance, avant le lever du soleil. Si la potion n'est pas administrée le jour même [de la morsure], vous doublerez la dose; quelquefois il faut la tripler. La thériaque de vipère serait encore bien efficace. Purger avec le concombre en donnant le médicament tous les jours dans une décoction de sauge ou d'héraclée ferrée, appelée aussi dialysson. Certains font manger au malade le foie du chien qui l'a mordu.

Quant au régime que l'on adoptera, il devra tendre, soit à émousser et à consumer la force du venin, soit à l'empêcher dé pénétrer plus avant dans les tissus. Ce double objet est rempli par une potion composée de vieux vin sucré non trempé [et] de lait bien pur, comme aussi d'aliments à l'ail, aux oignons et aux poireaux. Si, par suite d'un empêchement quelconque, ces remèdes n'ont pas été administrés dès le principe, il ne faut pas manquer de faire une incision autour de la plaie, d'y poser des ventouses ou de la brûler, car le virus rabique a bientôt fait de pénétrer dans la profondeur. En outre, on devra employer ceux des remèdes précités qui renouvellent le sang par l'évacuation des humeurs. Si l'affection hydrophobique ne survient pas, il faut administrer une purgation à l'hiéra ou bien au lait caillé, appliquer des sudorifiques, des emplâtres de poix, des sinapismes sur la partie malade [et] par tout le corps. Le plus efficace de tous les traitements a été reconnu être une fréquente administration d'ellébore.

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Liv. VII, ch. viii. Sur ies remèdes sacrés. Le remède sacré de rufus.

Sicyonie ou coloquinte (son intérieur), 20 drachmes; germandrée, 10 drachmes; assa fœtida, 8 drachmes; persil sauvage, 5 drachmes; aristoloche ronde, 5 drachmes ; poivre blanc, 5 drachmes ; cinnamome, 4 drachmes; cannelle, 8 drachmes; stachys, safran, polium, myrrhe, à drachmes de chacun; miel, quantité suffisante.

 


 

[1] Damocrate, mentionné plusieurs fois par Pline le naturaliste sous les noms de Servilius Damocrates, a dû composer ce poème sous le règne d'Auguste ou de Tibère. (Voir Fabric. Bibl. gr. t. XIII, p. 135 et Kühn, Additam. Spec. 6; 1826.) Ses poésies médicales ont été réunies, en 1833, par Cbf. F. Harless (Bonn, gr. in-4°).

[2] Sur ces Fragments voir la Préface, IV, 2.

[3] Cette partie du chapitre pourrait bien être un extrait du traité de Rufus intitulé Médecine populaire. (Cp. plus loin, fragments extraits de Rhazès, fol. 274.)

[4] Sur l'attribution de ce chapitre à Rufus et sur son placement, voir Œuvres d'Oribase, vol. II, notes, p. 839.

[5] La suite du texte, attribuée à Rufus par Rasarius et Matthei, ne doit pas être de cet auteur : MM. Daremberg et Bussemaker en ont fait l'observation. (Œuvres d'Oribase, t. II, p. 911.) Cp. le traité de Podagra, chap. xix, ci-dessus, p. 267, et plus loin le fragment 46.

[6] Sur les livres incertains, voir Œuvres d'Oribase, t. III, p. ii et 82.

[7] On trouvera dans les Œuvres d'Oribase, t. III, p. 694, les raisons qui nous font attribuer ce fragment, ainsi que le chap. vi, à Rufus.

[8] Les chapitres xii, xiii et xiv, nous semblent devoir être attribués à Rufus tout aussi bien que le chapitre vi, qui se termine ainsi : « J'exposerai plus loin tous les autres soins qu'on doit prendre lors de l'accouchement. »

[9] Sur les parties mentionnées dans ce chapitre et omises dans le traité de Rufus portant le même titre, voir les notes qui accompagnent le texte et la traduction dans les Œuvres d'Oribase, t. III, p. 383 et suiv.

[10] Sur le « banc d'Hippocrate, » cf. Littré, Œuvres complètes d'Hippocrate, t. IV, p. 40 à 44, 297-385. Voir aussi Hippocrate, Fractur. 13, t. III, p. 466, Artic. 72-76, et Mochl. 38. Ce fragment de Rufus, conservé par Oribase, se retrouve in extenso, aux paragraphes 189 à 198, dans la compilation médicale de Nicétas, dont l'archétype présumé est à Florence (Plut. LXX.IV, n° 7) et que possède notre Bibliothèque nationale dans deux copies du xvie siècle (ancien fonds, n° 2447 et 2248). — Bien que le nom de Rufus ne soit pas répété entête des huit chapitres qui suivent le vingt-sixième, il n'est pas douteux pour nous que cette suite appartient à notre auteur. (Du reste, dans la compilation de Nicétas, tout le texte renfermé dans ces chapitres est placé sous le nom de Rufus.) Ce fait est surtout manifeste dans la disposition adoptée par le copiste érudit (Christophe Auver) qui a exécuté le codex 2247 (fol. 222a-226a). La collection de Nicétas contient, au paragraphe 229, un autre morceau assez étendu sur le banc d'Hippocrate, attribué par le compilateur byzantin au médecin Apollonius de Citium et publié par Dietz en 1834. Voir, dans la préface (II, iv, ms. 1), l'article relatif au manuscrit de Florence contenant Nicétas.

[11] Œuvres d'Oribase, t. V, p. 1.

[12] Traduit ici pour la première fois, ainsi que les fragments 45, 46 et 47.

[13] Cp. plus loin les fragments de Rufus extraits d'Aétius, VIII, vi, frag. n° 78.

[14] Cp. plus haut, le passage correspondant du Traité des maladies des reins et de la vessie.

[15] Passage correspondant, Maladies de la vessie, plus haut.

[16] Œuvres d'Oribase, t. V, p. 560-561.

[17] Εφέμηρος, plante vénéneuse, colchicum automnale, ou bien un poison composé, ainsi nommé parce qu’il tue en un jour (cf. Thésaurus l. gr. s. v.)

[18] Traduction du texte d’Oribase : «Dissipe les idées fixes et adoucit les passions indomptables. »

[19] Le grec donne un temps passé dans toute cette phrase, mais c’est sans doute pour marquer l’effet habituel de l’acte aphrodisiaque.

[20] Cette phrase offre à peine un sens. Celle d’Oribase, dans le passage correspondant, est beaucoup plus logique: « Le régime approprié au coït et le traitement de ceux qui ne peuvent pas en user se révèlent maintenant à nous. » (Trad. Bussemaker et Daremberg.)

[21] Le mot λοβοί, cosses, est pris dans le sens, inconnu jusqu’ici, de « légumes à cosses. »

[22] Ici encore le passage d’Aétius est complété par celui d’Oribase.

[23] Littéralement : d'une marche lente.

[24] La traduction latine de Cornarius suppose un teste différent Unde concinnum et robustum et bene coloratum corpus facit.

[25] Sur l'emploi des sangsues chez les anciens et le caractère venimeux qui leur a été attribué quelquefois, voir Œuvres d'Oribase, t. II, p. 790.

[26] Cornarius : Si … neque per centrem erumpit.

[27] Cornarius : Apparente manifestissima concoctione.

[28] ἀποκρύπτεται. Il est probable que le compilateur Aétius avait sous les yeux, au lieu de la bonne leçon ἀποκεκριμένον, conservée par Oribase, une copie fautive ἀποκεκρυμμένον.

[29] Cornarius : Vomant ex longioribus intervallis etiam a cibo.

[30] Traduction de la leçon donnée par l'édition : « Ensuite appliquez un sinapisme sur la tête et ayez recours, par intervalles, à l'absorption des aliments âcres.»

[31] Voir, sur ce sujet, Œuvres d'Oribase, t. II, p. 888.

[32] C'est Galien qui parle.

[33] Traduction de la glose de P insérée dans le texte : « Éléments du régime réconfortant : exercices et alimentation tels que, le corps étant purgé et le souffle (vital) le pénétrant, étant excité et y adhérant, et la vigueur naturelle reprenant le dessus, il semble consolidé comme par un retranchement et un rempart. »

[34] Voir, sur le régime salubre des vieillards, Oribase, t. III, p. 167.

[35] Cette phrase doit être de Galien. Cp. ci-dessus, p. 359, n. 1. Glose probable, insérée dans le texte de P : « On en a donné précédemment la préparation à propos des mélancoliques. »

[36] Pour la composition de ce remède, voir, à l'index du présent volume, l'article Remède sacré.

[37] Comarius : « Brassicae asparagus et asparagus palustris.»

[38] Sur le lapathum (lapais, etc.) et l’oxylapathum, voir Hugonis Solerii medici in II priores Aetii libros scholia, en tête de la traduction latine de Comarius, éd. 1549, voce Lapathum.

[39] Cp. plus haut, fragment 45.

[40] Ou bien « au préalable, » suivant la leçon du ms. P.

[41] Le texte grec de ces chapitres a été inséré ci-dessus, p. 85 à 126. Le livre XI sera complété dans l'Appendice, section III.

[42] Le texte grec et la traduction française ont été insérés ci-dessus, p. 280, not. 5 et p. 282, not. 3.

[43] Sur le conditum au vin poivré, voir Oribase, Coll. méd. V, xxxiii, 8. Cp. Boissonade, Notices et Extraits des mss., t. XI, p. 195.

[44] J'ai ajouté μαλαβάθρου en raison des propriétés diurétiques de ce simple. (Cp. Orïb. Coll. XV, i, 16.) Peut-être faut-il lire πεντεφύλλον. La quintefeuille est prescrite plus bas, frag. 89, § 6.

[45] Décrite dans les Euporistes d'Oribase, t. IV, p. 141; t. V, p. 792.

[46] Voir, sur ces vins, Oribase, Coll. méd. V, xxxiii.

[47] On a traduit ici πέπονες comme l'a fait M. Daremberg (Oribase, Coll. méd. t. I, p. 47).

[48] Probablement le traitement par les remèdes d'une action inverse des causes de la maladie, ce qui est, en effet, le principe curatif de l'école dite méthodique. Ceci n'est certainement pas de Rufus ; car Rufus est antérieur à Galien.

[49] Ceci n’est certainement pas de Rufus ; car Rufus est antérieur à Galien.

[50] Fragment rapporté dans les Œuvres de Galien, éd. de Paris, t. X, p. 578. Cp. dans Fabrici Bibl. Gr. éd. 1708, t. III, p. 635 (Galeni scripta, 109), De incantatione, etc.

[51] Nous hasardons cette expression sous les plus expresses réserves.

[52] Pilule d'ellébore (Cp. Œuvres d'Oribase, t. II, p. 102), ou plutôt de terre d'Arménie (ibid. p. 706).

[53] Espèce de chicorée, endives.

[54] Tendres, frais, si l'on adopte la correction conjecturale ἁπαλοὶ.

[55] Traduit d'après la correction conjecturale.

[56] Ou, si l'on adopte la correction conjecturale (ναρκιάτον), du vin de gentiane.

[57] Voir une note sur ce gâteau, Œuvres d'Oribase, t. I, p. 562; voir aussi ibid. p. 20.

[58] Voir note sur l'aliment à l'amidon, Œuvres d'Oribase, t. I, p. 561.

[59] Sur le sens du mot πρόπομα, voir Œuvres d'Oribase, t. I, p. 669.

[60] Voir, sur les mots γλαυκός et γλαύκωνα, Sichel, Mémoire sar le glaucome, Bruxelles, 1842, p. 124-154, et Littré, Œuvres d'Hippocrate, t. IV, p. 502, note 1. M. Littré, avec M. Siechel, traduit γλαύκωνα par cataracte. Nous adoptons ici, comme dans tous les cas prêtant à la controverse, la traduction donnée dans les Œuvres d'Oribase par MM. Bussemaker et Daremberg. Toutefois, le mot γλαυκός nous a paru, comme à M. Littré, signifier plutôt bleuâtre, glauque ou gris.

[61] Ou de la ronce?

[62] Cp. Oribase, Coll. XV, i, 25.

[63] Voir la formule de ce médicament dans Oribase, Euporistes, IV, cxli, t. V, p. 792.