Tiberius Gracchus

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Une vie agitée

FLORUS : On ne sait rien de Florus. Il écrivit une histoire romaine (-753 - +9). Son oeuvre est publiée à la fin du règne d'Hadrien.

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Florus dans ses chapitres consacrés aux séditions des tribuns parle de Tibérius.

Primam certaminum facem Tiberius Gracchus accendit, genere, forma, eloquentia facile princeps. Sed hic, sive Mancinianae deditionis, quia sponsor foederis fuerat, contagium timens, et inde popularis; sive aequo et bono ductus, quia depulsam agris suis plebem miseratus est, ne populus gentium victor orbisque possessor laribus ac focis suis exsularet, quacunque mente, rem ausus ingentem. Postquam rogationis dies aderat, ingenti stipatus agmine rostra conscendit, nec deerat obvia manu tota inde nobilitas, et tribuni in partibus. Sed ubi intercedentem legibus suis Cnaeum Octavium videt Gracchus, contra fas collegii, ius potestatis, iniecta manu, depulit rostris, adeoque praesenti metu mortis exterruit, ut abdicare se magistratu cogeretur. Sic triumvir creatus dividendis agris, cum ad perpetranda coepta, die comitiorum, prorogari sibi vellet imperium, obvia nobilium manu, eorum quos agris moverat, caedes a foro coepit; inde cum in Capitolium profugisset, plebemque ad defensionem salutis suae, manu caput tangens, hortaretur, praebuit speciem regnum sibi et diadema poscentis; atque ita, duce Scipione Nasica, concitato in arma populo, quasi iure oppressus est.

FLORUS, III, XV

  vocabulaire

Tibérius Gracchus alluma le premier brandon des luttes. Il était de loin le meilleur par sa race, sa beauté et son éloquence. Mais soit qu'il craignait les suites de la reddition de Mancinus parce qu'il en avait été le garant et pour cela passa du côté du peuple; soit poussé par son sens de la justice et du bien parce qu'il plaignait la plèbe chassée de ses terres et qu'il craignait que le peuple victorieux et propriétaire du monde entier ne soit chassé de ses lares et de ses foyers. Quelle que soit son motif, il osa entreprendre quelque chose d'énorme. Quand le jour de la proposition de loi arriva, il monta à la tribune entouré d'une immense foule. Toute la noblesse était présente et des tribuns la soutenaient. Quand Tibérius vit Caeus Octavius s'opposer à ses lois, il le fit arrêter allant à l'encontre du droit sacré du collège des tribuns et des prérogatives de sa fonction; il le chassa des rostres et l'épouvanta en le menaçant de mort au point qu'il fut forcé d'abandonner sa magistrature.
Il fut ainsi nommé triumvir pour la répartition des terres. Pour achever ce qu’il avait entrepris, le jour des comices il voulut faire se faire réélire. Mais les nobles s’y opposèrent, accompagnés de ceux qu'il avait dépossédés de leurs champs. Le massacre commença sur le forum. Tibérius se réfugia au Capitole, et porta la main à sa tête pour exhorter le peuple à défendre sa vie. On crut qu’il réclamait la royauté et le diadème. Sous la direction de Scipion Nasica le peuple fut appelé aux armes. Il fut mis à mort, comme s’il l’avait bien mérité.

FLORUS, III, XV

 

Plutarque, vie de Tiberius Gracchus (suite)

15.  Ce jour-là il renvoya l'assemblée. Mais il commença à comprendre que la ligne de conduite qu’il avait suivie avec Octavius avait offensé aussi bien le peuple que la noblesse, parce qu'il sembait avoir violé la dignité des tribuns : cette dignité avait toujours jusqu'à ce jour été sacrée et respectable. C’est pourquoi il prononça un discours devant le peuple pour se justifier. Il n’est pas hors de propos d’en rapporter quelques extraits pour donner une impression de la force de persuasion qu’il avait en parlant. "Un tribun du peuple" dit-il, "est sacré et doit être inviolable parce que il est en quelque sorte consacré pour être le gardien et le protecteur de celui-ci. Mais s’il dégénère au point d’opprimer le peuple, de diminuer sa puissance et d’enlever sa liberté de vote, il se voit par lui-même privé des honneurs et de son immunité pour avoir négligé les devoirs que cette fonction honorifique lui a confiés. Sinon nous devrions être dans l’obligation de laisser un tribun faire ce qui lui plaît : détruire le Capitole ou mettre le feu à l'arsenal. Le tribun qui ferait cela serait un mauvais tribun. Mais celui qui détruit la puissance du peuple n'est plus un tribun du tout. N'est-il pas inconcevable qu'un tribun pourrait avoir le pouvoir d'emprisonner un consul et que le peuple n’aurait aucune autorité pour le révoquer quand il emploie à son détriment cet honneur qu'il a reçu de lui ? Les tribuns aussi bien que les consuls sont élus par le peuple. La Royauté, gouvernement qui possède en soi tous les pouvoirs, s’est élevé par sa solennité la plus grande et la plus religieuse jusqu’à la divinité. Mais malgré cela les citoyens ont déposé Tarquin quand il commit une faute. Et pour le crime d’un simple particulier l’ancien gouvernement qui s’était installé à la fondation de Rome a été supprimé à jamais. Qu'y a-t-il dans tout Rome de plus sacré et vénérable que les Vestales qui n’ont d’autre occupation que la conservation du feu éternel? Pourtant si l’une d’elles transgresse son devoir, elle est enterrée vivante car la sainteté qui leur vient du service des dieux leur est retirée quand elles les offensent. De même un tribun perd son inviolabilité qu’on lui a accordée dans l’intérêt du peuple quand il offense le peuple et quand il attaque les bases de cette autorité qui fait sa force. Nous considérons qu’un tribun est légalement élu quand il est élu seulement à la majorité des voix des tribus; donc cette même personne n'est-elle pas beaucoup plus légalement révoquée quand elle est déposée par le consentement général de toutes les tribus? Rien n'est plus sacré que les offrandes religieuses et pourtant on n’a jamais interdit au peuple de se servir d'elles, de les enlever et de les porter là où il le voulait. Ainsi, le tribunat, comme une offrande sacrée, le peuple peut le faire passer des mains d'un homme à celles d’un autre. Cette autorité ne peut être inviolable et intransmissible : beaucoup de ceux qui l'ont obtenue l’ont rendue de leur propre gré et ont désiré en être déchargé."

16.  Tels étaient les principaux arguments de l’apologie de Tibérius. Mais ses amis, appréhendant les dangers qui semblaient le menacer et la conspiration qui était ourdie contre lui, pensaient que la solution la plus sûre serait qu'il pose sa candidature pour un second tribunat. Entre-temps ils lui disaient de s’efforçer de conserver la bienveillance du peuple par de nouvelles lois en faisant diminuer le temps du service militaire, en accordant au peuple le droit judiciaire, en adjoignant aux sénateurs, qui à cette époque étaient les juges, un nombre égal de chevaliers, en essayant autant que possible de diminuer la puissance du sénat plutôt par passion et par esprit partisan que par respect de la justice et du bien public. Mais quand on en vint à la question de savoir si ces lois allaient passer et qu’ils s’aperçurent que l’opposition était la plus forte, car le peuple n’était pas venu en nombre ils commencèrent d'abord tous à gagner du temps par des discours accusateurs contre leurs collègues magistrats et finalement ils ajournèrent l’assemblée au jour suivant.  Tibérius descendit alors au Forum au milieu du peuple et fit humblement un discours les larmes aux yeux. Il dit qu’il avait de bonnes raisons de suspecter que ses adversaires essayent durant la nuit de forcer sa maison et de l'assassiner. Ce discours frappa tellement la foule que beaucoup placèrent des tentes autour de sa maison et montèrent la garde toute la nuit pour le protéger.

 

a, prép. : + Abl. : à partir de, après un verbe passif = par
abdico, as, are
: nier, renier, renoncer à
ac
, conj. : et, et aussi
accendo, is, ere, di, sum
: embraser, allumer, exciter, attiser
ad
, prép. : + Acc. : vers, à, près de
adeo
, adv. : tellement ; adeo... ut + subj : tellement... que
adsum, es, esse, adfui
: être présent, assister, aider
aequus, a, um
: égal, équitable (aequum est : il convient) (ex aequo : à égalité)
ager, agri
, m. : la terre, le territoire, le champ
agmen, inis
, n. : l'armée en marche, la colonne de marche

arma, orum
, n. : les armes
atque
, conj. : et, et aussi
audeo, es, ere, ausus sum
: oser
bonus, a, um
: bon (bonus, i : l'homme de bien - bona, orum : les biens)
caedes, is
, f. : le meurtre, le massacre
Capitolium, ii
, n. : le Capitole
caput, itis
, n. :1. la tête 2. l'extrémité 3. la personne 4. la vie, l'existence 5. la capitale
certamen, inis
, n. : le combat, la lutte, le conflit
Cnaeus, i
, m. : Cnéus
coepio, is, ere, coepi, coeptum
: (plutôt avec rad. pf et supin) : commencer
cogo, is, ere, egi, actum
: 1. assembler, réunir, rassembler, 2. concentrer, condenser 3. pousser de force, forcer
collegium, ii
, n : le collège, l'association
comitium, i,
n. : le comitium (lieu de réunion du peuple) ; comitia, orum : les comices, l'assemblée générale du peuple
concito, as, are
: pousser vivement, exciter, soulever, enflammer
conscendo, is, ere, scendi, scensum
: monter (-navem = embarquer)
contagium, i,
n. : le contact, la contagion, l'influence
contra
, adv : au contraire, en face ; prép+acc : contre
creo, as, are
: 1. créer, engendrer, produire 2. nommer un magistrat
cum
, inv. :1. Préposition + abl. = avec 2. conjonction + ind. = quand, lorsque, comme, ainsi que 3. conjonction + subj. : alors que
deditio, onis
, f. : la reddition, la soumission
defensio, ionis
, f. : la défense
depello, is, ere, puli, pulsum
: chasser, repousser; écarter de, détacher de
desum, es, esse, defui
: manquer
diadema, atis
, n. : le diadème, le bandeau royal

dies, ei
, m. et f. : le jour
divido, is, ere, visi, visum
: diviser

duco, is, ere, duxi, ductum
: I. tirer 1. tirer hors de 2. attirer 3. faire rentrer 4. compter, estimer II. conduire, emmener, épouser
dux, ducis
, m. : le chef, le guide
eloquentia, ae
, f. : l'éloquence
eorum
, G. M et N. PL. de is,ea,id = d'eux, leur, leurs
et
, conj. : et. adv. aussi
exsulo, as, are
: être exilé
exterreo, es, ere, terrui, territus
: épouvanter
facile
, adv. : facilement
fas
, n. indécl. : le droit divin ; fas est : il est permis par les dieux de...
fax
, facis, f. : la torche, le flambeau, le brandon
focus, i
, m. : le foyer, l'âtre, la maison, l'autel
foedus, deris
, n. : le traité
forma, ae
, f. : la forme, la beauté, le plan
forum, i
, n. :le marché, le forum
gens, gentis
, f. : la tribu, la famille, le peuple
genus, eris
, n. : la race, l'origine, l'espèce
Gracchus, i
, m. : Gracchus
hic, haec, hoc
: adj. : ce, cette, ces, pronom : celui-ci, celle-ci
hic
, adv. : ici
hortor, aris, ari
: exhorter, engager à
imperium, ii
, n. : le pouvoir (absolu)
in
, prép. : (acc. ou abl.) dans, sur, contre
inde
, adv. : de là, donc
ingens, entis
: immense, énorme
iniicio, is, ere, ieci, iectum
: jeter sur
intercedo, is, ere, cessi, cessum, ere
: venir, aller entre, intervenir, s’opposer à, être entre, survenir
ita
, adv. : ainsi, de cette manière ; ita... ut, ainsi que
iure
, inv. : à bon droit
ius, iuris
, n. : le droit, la justice
lar, is
, m. : le lare
lex, legis
, f. : la loi, la (les) condition(s) d'un traité
magistratus, us
, m. : la charge, la fonction publique, la magistrature
Mancinianus, a, um
: de Mancinus
manus, us
, f. : la main, la petite troupe
mens, mentis
, f. : l'esprit
metus, us
, m. : la peur, la crainte
miseror, aris, ari
: plaindre, déplorer
mors, mortis
, f. : la mort
moveo, es, ere, movi, motum
: déplacer, émouvoir
Nasica, ae
, m. : Nasica (cognomen de Scipion)
ne, 1. adv. : ... quidem : pas même, ne (défense) ; 2. conj. + subj. : que (verbes de crainte et d'empêchement), pour que ne pas, de ne pas (verbes de volonté) 3. adv. d'affirmation : assurément 4. interrogatif : est-ce que, si
nec
, adv. : et...ne...pas
nobilis, e
: connu, noble
nobilitas, atis
, f. : la réputation, la noblesse
obvius, a, um
: qui se trouve sur le passage de qqn., banal
Octavius, ii
, m. : Octavius
opprimo, is, ere, pressi, pressum
: opprimer, accabler

orbis, is
, m. : le cercle, le globe. - terrarum : le monde
pars, partis
, f. : la partie, le côté
perpetro, as, are
: achever, exécuter, accomplir
plebs, plebis
, f. : la plèbe
popularis, e
: qui a trait au peuple, qui vient du pays, indigène
populus, i,
m. : le peuple
posco, is, ere, poposci
: réclamer, demander
possessor, oris
, m. : le possesseur, le propriétaire
postquam
, conj. : après que
potestas, atis
, f. : 1. la puissance, le pouvoir 2. le pouvoir d'un magistrat 3. la faculté, l'occasion de faire qqch.
praebeo, es, ere, bui, bitum
: fournir
praesens, entis
: présent
primus, a, um
: premier
princeps, ipis
, n. m. et adj. : premier, chef, empereur
profugio, is, ere, profugi, profugitum
: fuir, abandonner ; s'échapper
prorogo, as, are
: prolonger, proroger
quasi
, conj. : comme si; adv. : pour ainsi dire, environ
quia
, conj. : parce que
quicumque, quae-, quod- (-cun-)
: qui que ce soit, quoi que ce soit
quos
, 1. ACC. MASC. PL. du relatif. 2. Idem de l'interrogatif. 3. après si, nisi, ne, num = aliquos. 4. faux relatif =
et eos
regnum, i
, n. : le pouvoir royal, le trône, le royaume
res, rei
, f. : la chose, l'événement, la circonstance, l'affaire judiciaire; les biens
rogatio, ionis
, f. : 1. la demande 2. la proposition de loi 3. la prière
rostrum, i
, . : le bec (au pluriel : les rostres)
salus, utis
, f. : 1. la santé 2. le salut, la conservation 3. l'action de saluer, les compliments
Scipio, onis
, m. : Scipion
se
, pron. réfl. : se, soi
sed
, conj. : mais
sic
, adv. : ainsi ; sic... ut : ainsi... que
sive
, (seu) inv. : sive... sive : soit... soit
species, ei,
f : l'apparence, l'aspect
sponsor, oris
, m. : le répondant, la caution
stipo, as, are
: entourer de façon compacte
sum, es, esse, fui
: être
suus, a, um
: adj. : son; pronom : le sien, le leur
tango, is, ere, tetigi, tactum
: toucher
Tiberius, ii
, m. : Tibérius

timeo, es, ere, timui
: craindre
totus, a, um
: tout entier
tribunus, i
, m. : le tribun ; tribunus pl. : le tribun de la plèbe
triumvir, i
, m. : le triumvir, le commissaire
ubi
, adv. : où; conj. quand
ut
, conj. : + ind. : quand, depuis que; + subj; : pour que, que, de (but ou verbe de volonté), de sorte que (conséquence) adv. : comme, ainsi que
victor, oris, m. : le vainqueur
video, es, ere, vidi, visum
: voir (videor, eris, eri, visus sum : paraître, sembler)
volo, vis, velle
: vouloir
texte
texte
texte
texte