table des matières de l'œuvre d'ISOCRATE
ŒUVRES COMPLÈTES D'ISOCRATE TRADUCTION NOUVELLE AVEC TEXTE EN REGARD LE DUC DE CLERMONT-TONNERRE (AIMÉ-MARIE-GASPARD) Ancien Ministre de la guerre et de la marine Ancien élève de l'École polytechnique TOME DEUXIÈME PARIS LIBRAIRIE DE FIRMIN DIDOT FRÈRES, FILS ET Cie Imprimeur de l'Institut, rue Jacob, 56. M DCCC LXIII
DISCOURS CONTRE LES SOPHISTES.
Κατὰ τῶν σοφιστῶν
ARGUMENT. A quelle époque et à quelle occasion fut composé le discours contre les sophistes? On l'ignore. Quelques-uns ont cru qu'il était dirigé contre Aristote, qui avait enlevé à Isocrate un disciple nommé Théodecte, mais le grammairien anonyme à qui nous devons un argument de ce discours n'est pas de cette opinion. Le discours n'attaque pas seulement les philosophes, mais Ions les sophistes en général. Sans vouloir suivre le grammairien dans sa distinction entre ceux qui font profession de sophistes (titre primitivement honorable et désignant ceux qui, comme nous dirions aujourd'hui, cultivaient les belles-lettres, mais tombé en discrédit du temps d'Isocrate), et ceux qui sophistiquent la vérité, nous remarquerons que trois sortes de sophistes sont, dans ce discours, l'objet des attaques de l'orateur. Aux premiers, qui faisaient profession d'enseigner la dialectique et la morale, Isocrate oppose l'excellence des choses qu'ils prétendent apprendre, comparée à la modicité du salaire qu'ils exigent, et au mépris qu'ils affichent relativement aux richesses; il reproche aux seconds de chercher à éblouir leurs disciples en prétendant leur enseigner l'éloquence politique. Isocrate relève leurs erreurs sur la manière dont ils développent les préceptes de l'éloquence, et établit les qualités que doivent posséder le maître et le disciple. Quant aux troisièmes, Isocrate les accuse de réduire l'éloquence à l'art de la chicane, en se bornant à enseigner l'art de plaider. L'orateur promet ensuite de démontrer que l'étude de l'éloquence est l'exercice le plus propre à nous disposer et à nous former à toutes les vertus; mais il n'en apporte aucune preuve; son discours s'arrête en cet endroit, et, ainsi qu'Auger l'a fait remarquer le premier, il est inachevé. Nous manquons absolument de renseignements sur ce sujet. SOMMAIRE. 1. Si .tous ceux qui enseignent la littérature ne promettaient pas plus qu'ils ne peuvent tenir, ils suivraient un meilleur conseil pour les lettres et pour eux-mêmes. — 2. Commençons par les dialecticiens qui articulent des mensonges lorsqu'ils avancent que le but de leurs travaux est la recherche de la vérité, et qu'ils promettent à leurs disciples de leur donner une règle de conduite pour l'avenir, quoique personne n'ignore que les hommes sont tellement éloignés de posséder la connaissance des choses futures qu'Homère, si illustre par sa sagesse, nous montre quelquefois les dieux eux-mêmes délibérant avec incertitude sur ce qui doit arriver. — 3. Ces hommes qui veulent être considérés comme sages vous offrent pour le prix de quatre ou cinq mines ce qu'il y a de plus précieux, la vertu universelle et la félicité ; ils disent qu'ils ne manquent ni d'or ni d'argent , bien qu'on les voie, pour un modique salaire, promettre tout à leurs disciples, excepté l'immortalité ; et cependant ils accordent à ces mêmes disciples, auxquels ils prétendent enseigner la justice, moins de confiance qu'à des hommes inconnus , en sorte que ce qui est permis à d'autres ne l'est pas aux maîtres de la sagesse et de la vertu. — 4. Comment alors s'étonner si quelques ignorants, voyant en eux ces inconséquences et d'autres encore de la même nature, les méprisent et n'aperçoivent dans leurs dissertations qu'une vaine et insignifiante loquacité ? — 5. Viennent ensuite les maîtres de l'éloquence politique, qui ne méritent pas moins de blâme; ils sont tellement stupides et regardent les autres comme l'étant à un tel point que, lorsqu'ils écrivent des discours inférieurs aux improvisations de certains ignorants, ils promettent néanmoins d'enseigner à leurs disciples, même alors que ceux-ci manqueraient de génie et d'étude, l'art oratoire, comme on enseigne les éléments de l'écriture. Ils ne pensent pas à la différence qui existe entre les deux enseignements, et ils oublient que les sciences s'accroissent par le travail, et non par de vaines promesses. — 6. Ce qu'ils annoncent serait désirable, sans doute, mais n'offre aucune réalité ; je préférerais donc qu'ils se tussent, de crainte que tous, se livrant à cette manière d'étudier, n'en recueillissent quelque déshonneur.—7. On s'étonne de voir confier des disciples à des hommes qui comparent un art mécanique avec l'œuvre du génie ; car les caractères de l'écriture sont, si je puis m'exprimer ainsi, immuables, tandis qu'il n'en est pas de même du discours, et que l'on regarde comme le plus habile dans l'art de parler celui qui, en raison de la dignité du sujet, peut trouver et dire des choses nouvelles, et qui peut aussi (ce qui marque la grande différence ) accommoder ses paroles aux temps et aux convenances. — 8. Une chose, selon moi, rend cette vérité plus claire , c'est que beaucoup d'hommes dénués de tous préceptes d'éloquence se sont montrés pleins d'habileté, soit pour parler, soit pour diriger les affaires de la République. La force de l'éloquence, comme celle des autres facultés, dépend du génie et de l'habitude ; l'éducation peut bien l'accroître, mais elle ne peut la produire. — 9. Je suis même facilement conduit à croire qu'avec un maître habile , les règles de l'éloquence peuvent être apprises, mais leur application exige beaucoup de soins et un esprit à la fois élevé et pénétrant ; ainsi, le maître qui enseigne cet art doit être non seulement doué de génie, mais posséder tous les préceptes dont il se compose, et il doit le prouver par l'explication des règles et par l'application des exemples. — 10. Au surplus, tous les sophistes récemment éclos doivent être placés dans cette classe. — 11. Reste donc ceux qui, avant notre époque, ont fait profession d'enseigner l'art de plaider devant les tribunaux, qu'ils appellent l'art de la chicane, flétrissant ainsi d'un nom odieux et mensonger l'étude de l'éloquence; ils sont pires que les dialecticiens, en ce sens que ceux-ci s'efforcent d'arriver à une bonne fin par une mauvaise voie, ceux-là par une bonne voie à une fin mauvaise. En effet, celui qui consacrerait sa vie aux arguties minutieuses de la dialectique deviendrait le plus misérable des hommes, bien que, dans la pensée des professeurs, ces arguties puissent préparer les voies qui conduisent à la vertu et à la sagesse, tandis que les préceptes de la rhétorique, encore qu'ils ne semblent promettre rien autre chose que des moyens de succès pour l'intrigue et pour la cupidité, pourraient cependant, s'ils étaient convenablement appliqués, conduire à la vertu.— 12. Mais, afin d'empêcher qu'on ne m'accuse d'incriminer à tort les promesses des autres, je crois qu'il me sera facile de faire connaître les motifs sur lesquels je fonde mon jugement. LANGE.
La suite manque. |
|
Κατὰ τῶν σοφιστῶν [1] Εἰ πάντες ἤθελον οἱ παιδεύειν ἐπιχειροῦντες ἀληθῆ λέγειν, καὶ μὴ μείζους ποιεῖσθαι τὰς ὑποσχέσεις ὧν ἔμελλον ἐπιτελεῖν, οὐκ ἂν κακῶς ἤκουον ὑπὸ τῶν ἰδιωτῶν· νῦν δ' οἱ τολμῶντες λίαν ἀπερισκέπτως ἀλαζονεύεσθαι πεποιήκασιν ὥστε δοκεῖν ἄμεινον βουλεύεσθαι τοὺς ῥᾳθυμεῖν αἱρουμένους τῶν περὶ τὴν φιλοσοφίαν διατριβόντων. Τίς γὰρ οὐκ ἃν μισήσειεν ἅμα καὶ καταφρονήσειε πρῶτον μὲν τῶν περὶ τὰς ἔριδας διατριβόντων, οἳ προσποιοῦνται μὲν τὴν ἀλήθειαν ζητεῖν, εὐθὺς δ' ἐν ἀρχῇ τῶν ἐπαγγελμάτων ψευδῆ λέγειν ἐπιχειροῦσιν; [2] οἶμαι γὰρ ἅπασιν εἶναι φανερὸν ὅτι τὰ μέλλοντα προγιγνώσκειν οὐ τῆς ἡμετέρας φύσεώς ἐστιν, ἀλλὰ τοσοῦτον ἀπέχομεν ταύτης τῆς φρονήσεως, ὥσθ' Ὅμηρος ὁ μεγίστην ἐπὶ σοφίᾳ δόξαν εἰληφὼς καὶ τοὺς θεοὺς πεποίηκεν ἔστιν ὅτε βουλευομένους ὑπὲρ αὐτῶν, οὐ τὴν ἐκείνων γνώμην εἰδώς, ἀλλ' ἡμῖν ἐνδείξασθαι βουλόμενος ὅτι τοῖς ἀνθρώποις ἓν τοῦτο τῶν ἀδυνάτων ἐστίν. [3] Οὗτοι τοίνυν εἰς τοῦτο τόλμης ἐληλύθασιν, ὥστε πειρῶνται πείθειν τοὺς νεωτέρους ὡς, ἢν αὐτοῖς πλησιάζωσιν, ἅ τε πρακτέον ἐστὶν εἴσονται καὶ διὰ ταύτης τῆς ἐπιστήμης εὐδαίμονες γενήσονται. Καὶ τηλικούτων ἀγαθῶν αὑτοὺς διδασκάλους καὶ κυρίους καταστήσαντες, οὐκ αἰσχύνονται τρεῖς ἢ τέτταρας μνᾶς ὑπὲρ τούτων αἰτοῦντες. [4] Ἀλλ' εἰ μέν τι τῶν ἄλλων κτημάτων πολλοστοῦ μέρους τῆς ἀξίας ἐπώλουν, οὐκ ἂν ἠμφεσβήτησαν ὡς12 εὖ φρονοῦντες τυγχάνουσι, σύμπασαν δὲ τὴν ἀρετὴν καὶ τὴν εὐδαιμονίαν οὕτως ὀλίγου τιμῶντες, ὡς νοῦν ἔχοντες διδάσκαλοι τῶν ἄλλων ἀξιοῦσι γίγνεσθαι. Καὶ λέγουσι μὲν ὡς οὐδὲν δέονται χρημάτων, ἀργυρίδιον καὶ χρυσίδιον τὸν πλοῦτον ἀποκαλοῦντες, μικροῦ δὲ κέρδους ὀρεγόμενοι μόνον οὐκ ἀθανάτους ὑπισχνοῦνται τοὺς συνόντας ποιήσειν. [5] Ὃ δὲ πάντων καταγελαστότατον, ὅτι παρὰ μὲν ὧν δεῖ λαβεῖν αὐτούς, τούτοις μὲν ἀπιστοῦσιν, οἷς μέλλουσι τὴν δικαιοσύνην παραδώσειν, ὧν δ' οὐδεπώποτε διδάσκαλοι γεγόνασι, παρὰ τούτοις τὰ παρὰ τῶν μαθητῶν μεσεγγυοῦνται, πρὸς μὲν τὴν ἀσφάλειαν εὖ βουλευόμενοι, τῷ δ' ἐπαγγέλματι τἀναντία πράττοντες. [6] Τοὺς μὲν γὰρ ἄλλο τι παιδεύοντας προσήκει διακριβοῦσθαι περὶ τῶν διαφερόντων, οὐδὲν γὰρ κωλύει τοὺς περὶ ἕτερα δεινοὺς γενομένους μὴ χρηστοὺς εἶναι περὶ τὰ συμβόλαια· τοὺς δὲ τὴν ἀρετὴν καὶ τὴν σωφροσύνην ἐνεργαζομένους πῶς οὐκ ἄλογόν ἐστι μὴ τοῖς μαθηταῖς μάλιστα πιστεύειν; οὐ γὰρ δή που περὶ τοὺς ἄλλους ὄντες καλοὶ κἀγαθοὶ καὶ δίκαιοι περὶ τούτους ἐξαμαρτήσονται, δι' οὓς τοιοῦτοι γεγόνασιν. [7] Ἐπειδὰν οὖν τῶν ἰδιωτῶν τινες, ἅπαντα ταῦτα συλλογισάμενοι, κατίδωσι τοὺς τὴν σοφίαν διδάσκοντας καὶ τὴν εὐδαιμονίαν παραδιδόντας αὐτούς τε πολλῶν δεομένους καὶ τοὺς μαθητὰς μικρὸν πραττομένους, καὶ τὰς ἐναντιώσεις ἐπὶ μὲν τῶν λόγων τηροῦντας, ἐπὶ δὲ τῶν ἔργων μὴ καθορῶντας, ἔτι δὲ περὶ μὲν τῶν μελλόντων εἰδέναι προσποιουμένους, [8] περὶ δὲ τῶν παρόντων μηδὲν τῶν δεόντων μήτ' εἰπεῖν μήτε συμβουλεῦσαι δυναμένους, ἀλλὰ μᾶλλον ὁμονοοῦντας καὶ πλείω κατορθοῦντας τοὺς ταῖς δόξαις χρωμένους ἢ τοὺς τὴν ἐπιστήμην ἔχειν ἐπαγγελλομένους, εἰκότως οἶμαι καταφρονοῦσι, καὶ νομίζουσιν ἀδολεσχίαν καὶ μικρολογίαν ἀλλ' οὐ τῆς ψυχῆς ἐπιμέλειαν εἶναι τὰς τοιαύτας διατριβάς. [9] Οὐ μόνον δὲ τούτοις ἀλλὰ καὶ τοῖς τοὺς πολιτικοὺς λόγους ὑπισχνουμένοις ἄξιον ἐπιτιμῆσαι καὶ γὰρ ἐκεῖνοι τῆς μὲν ἀληθείας οὐδὲν φροντίζουσιν, ἡγοῦνται δὲ τοῦτ' εἶναι τὴν τέχνην, ἢν ὡς πλείστους τῇ μικρότητι τῶν μισθῶν καὶ τῷ μεγέθει τῶν ἐπαγγελμάτων προσαγάγωνται καὶ λαβεῖν τι παρ' αὐτῶν δυνηθῶσιν· οὕτω δ' ἀναισθήτως αὐτοί τε διάκεινται καὶ τοὺς ἄλλους ἔχειν ὑπειλήφασιν, ὥστε χεῖρον γράφοντες τοὺς λόγους ἢ τῶν ἰδιωτῶν τινες αὐτοσχεδιάζουσιν, ὅμως ὑπισχνοῦνται τοιούτους ῥήτορας τοὺς συνόντας ποιήσειν ὥστε μηδὲν τῶν ἐνόντων ἐν τοῖς πράγμασι παραλιπεῖν. [10] Καὶ ταύτης τῆς δυνάμεως οὐδὲν οὔτε ταῖς ἐμπειρίαις οὔτε τῇ φύσει τῇ τοῦ μαθητοῦ μεταδιδόασιν, ἀλλά φασιν ὁμοίως τὴν τῶν λόγων ἐπιστήμην ὥσπερ τὴν τῶν γραμμάτων παραδώσειν, ὡς μὲν ἔχει τούτων ἑκάτερον, οὐκ ἐξετάσαντες, οἰόμενοι δὲ διὰ τὰς ὑπερβολὰς τῶν ἐπαγγελμάτων αὐτοί τε θαυμασθήσεσθαι καὶ τὴν παίδευσιν τὴν τῶν λόγων πλέονος ἀξίαν δόξειν εἶναι, κακῶς εἰδότες ὅτι μεγάλας ποιοῦσι τὰς τέχνας οὐχ οἱ τολμῶντες ἀλαζονεύεσθαι περὶ αὐτῶν, ἀλλ' οἵτινες ἄν, ὅσον ἔνεστιν ἐν ἑκάστῃ, τοῦτ' ἐξευρεῖν δυνηθῶσιν. [11] Ἐγὼ δὲ πρὸ πολλῶν μὲν ἂν χρημάτων ἐτιμησάμην τηλικοῦτον δύνασθαι τὴν φιλοσοφίαν, ὅσον οὗτοι λέγουσιν, ἴσως γὰρ οὐκ ἂν ἡμεῖς πλεῖστον ἀπελείφθημεν, οὐδ' ἂν ἐλάχιστον μέρος ἀπελαύσαμεν αὐτῆς· ἐπειδὴ δ' οὐχ οὕτως ἔχει, βουλοίμην ἂν παύσασθαι τοὺς φλυαροῦντας· ὁρῶ γὰρ οὐ μόνον περὶ τοὺς ἐξαμαρτάνοντας τὰς βλασφημίας γιγνομένας, ἀλλὰ καὶ τοὺς ἄλλους ἅπαντας συνδιαβαλλομένους τοὺς περὶ τὴν αὐτὴν διατριβὴν ὄντας. [12] Θαυμάζω δ' ὅταν ἴδω τούτους μαθητῶν ἀξιουμένους, οἳ ποιητικοῦ πράγματος τεταγμένην τέχνην παράδειγμα φέροντες λελήθασι σφᾶς αὐτούς. Τίς γὰρ οὐκ οἶδε πλὴν τούτων ὅτι τὸ μὲν τῶν γραμμάτων ἀκινήτως ἔχει καὶ μένει κατὰ ταὐτόν, ὥστε τοῖς αὐτοῖς ἀεὶ περὶ τῶν αὐτῶν χρώμενοι διατελοῦμεν, τὸ δὲ τῶν λόγων πᾶν τοὐναντίον πέπονθεν· τὸ γὰρ ὑφ' ἑτέρου ῥηθὲν τῷ λέγοντι μετ' ἐκεῖνον οὐχ ὁμοίως χρήσιμόν ἐστιν, ἀλλ' οὗτος εἶναι δοκεῖ τεχνικώτατος, ὅς τις ἂν ἀξίως μὲν λέγῃ τῶν πραγμάτων, μηδὲν δὲ τῶν αὐτῶν τοῖς ἄλλοις εὑρίσκειν δύνηται. [13] Μέγιστον δὲ σημεῖον τῆς ἀνομοιότητος αὐτῶν· τοὺς μὲν γὰρ λόγους οὐχ οἷόν τε καλῶς ἔχειν, ἢν μὴ τῶν καιρῶν καὶ τοῦ πρεπόντως καὶ τοῦ καινῶς ἔχειν μετάσχωσιν, τοῖς δὲ γράμμασιν οὐδενὸς τούτων προσεδέησεν. Ὥσθ' οἱ χρώμενοι τοῖς τοιούτοις παραδείγμασι πολὺ ἂν δικαιότερον ἀποτίνοιεν ἢ λαμβάνοιεν ἀργύριον, ὅτι πολλῆς ἐπιμελείας αὐτοὶ δεόμενοι παιδεύειν τοὺς ἄλλους ἐπιχειροῦσιν. [14] Εἰ δὲ δεῖ μὴ κατηγορεῖν τῶν ἄλλων ἀλλὰ καὶ τὴν ἐμαυτοῦ δηλῶσαι διάνοιαν, ἡγοῦμαι πάντας ἄν μοι τοὺς εὖ φρονοῦντας συνειπεῖν ὅτι πολλοὶ μὲν τῶν φιλοσοφησάντων ἰδιῶται διετέλεσαν ὄντες, ἄλλοι δέ τινες οὐδενὶ πώποτε συγγενόμενοι τῶν σοφιστῶν καὶ λέγειν καὶ πολιτεύεσθαι δεινοὶ γεγόνασιν. Αἱ μὲν γὰρ δυνάμεις καὶ τῶν λόγων καὶ τῶν ἄλλων ἔργων ἁπάντων ἐν τοῖς εὐφυέσιν ἐγγίγνονται καὶ τοῖς περὶ τὰς ἐμπειρίας γεγυμνασμένοις· [15] ἡ δὲ παίδευσις τοὺς μὲν τοιούτους τεχνικωτέρους καὶ πρὸς τὸ ζητεῖν εὐπορωτέρους ἐποίησεν, οἷς γὰρ νῦν ἐντυγχάνουσι πλανώμενοι, ταῦτ' ἐξ ἑτοιμοτέρου λαμβάνειν αὐτοὺς ἐδίδαξεν, τοὺς δὲ καταδεεστέραν τὴν φύσιν ἔχοντας ἀγωνιστὰς μὲν ἀγαθοὺς ἢ λόγων ποιητὰς οὐκ ἂν ἀποτελέσειεν, αὐτοὺς δ' ἂν αὑτῶν προαγάγοι καὶ πρὸς πολλὰ φρονιμωτέρως διακεῖσθαι ποιήσειεν. [16] Βούλομαι δ', ἐπειδή περ εἰς τοῦτο προῆλθον, ἔτι σαφέστερον εἰπεῖν περὶ αὐτῶν. Φημὶ γὰρ ἐγὼ τῶν μὲν ἰδεῶν, ἐξ ὧν τοὺς λόγους ἅπαντας καὶ λέγομεν καὶ συντίθεμεν, λαβεῖν τὴν ἐπιστήμην οὐκ εἶναι τῶν πάνυ χαλεπῶν, ἤν τις αὑτὸν παραδῷ μὴ τοῖς ῥᾳδίως ὑπισχνουμένοις ἀλλὰ τοῖς εἰδόσι τι περὶ αὐτῶν· τὸ δὲ τούτων ἐφ' ἑκάστῳ τῶν πραγμάτων ἃς δεῖ προελέσθαι καὶ μῖξαι πρὸς ἀλλήλας καὶ τάξαι κατὰ τρόπον, ἔτι δὲ τῶν καιρῶν μὴ διαμαρτεῖν, ἀλλὰ καὶ τοῖς ἐνθυμήμασι πρεπόντως ὅλον τὸν λόγον καταποικῖλαι καὶ τοῖς ὀνόμασιν εὐρύθμως καὶ μουσικῶς εἰπεῖν, [17] ταῦτα δὲ πολλῆς ἐπιμελείας δεῖσθαι καὶ ψυχῆς ἀνδρικῆς καὶ δοξαστικῆς ἔργον εἶναι, καὶ δεῖν τὸν μὲν μαθητὴν πρὸς τῷ τὴν φύσιν ἔχειν οἵαν χρὴ τὰ μὲν εἴδη τὰ τῶν λόγων μαθεῖν, περὶ δὲ τὰς χρήσεις αὐτῶν γυμνασθῆναι, τὸν δὲ διδάσκαλον τὰ μὲν οὕτως ἀκριβῶς οἷόν τ' εἶναι διελθεῖν ὥστε μηδὲν τῶν διδακτῶν παραλιπεῖν, περὶ δὲ τῶν λοιπῶν τοιοῦτον αὑτὸν παράδειγμα παρασχεῖν, [18] ὥστε τοὺς ἐκτυπωθέντας καὶ μιμήσασθαι δυναμένους εὐθὺς ἀνθηρότερον καὶ χαριέστερον τῶν ἄλλων φαίνεσθαι λέγοντας. Καὶ τούτων μὲν ἁπάντων συμπεσόντων τελείως ἕξουσιν οἱ φιλοσοφοῦντες· καθ' ὃ δ' ἂν ἐλλειφθῇ τι τῶν εἰρημένων, ἀνάγκη ταύτῃ χεῖρον διακεῖσθαι τοὺς πλησιάζοντας. [19] Οἱ μὲν οὖν ἄρτι τῶν σοφιστῶν ἀναφυόμενοι καὶ νεωστὶ προσπεπτωκότες ταῖς ἀλαζονείαις, εἰ καὶ νῦν πλεονάζουσιν, εὖ οἶδ' ὅτι πάντες ἐπὶ ταύτην κατενεχθήσονται τὴν ὑπόθεσιν. Λοιποὶ δ' ἡμῖν εἰσιν οἱ πρὸ ἡμῶν γενόμενοι καὶ τὰς καλουμένας τέχνας γράψαι τολμήσαντες, οὓς οὐκ ἀφετέον ἀνεπιτιμήτους· οἵ τινες ὑπέσχοντο δικάζεσθαι διδάξειν, ἐκλεξάμενοι τὸ δυσχερέστατον τῶν ὀνομάτων, ὃ τῶν φθονούντων ἔργον ἦν λέγειν, ἀλλ' οὐ τῶν προεστώτων τῆς τοιαύτης παιδεύσεως, καὶ ταῦτα τοῦ πράγματος, [20] καθ' ὅσον ἐστὶ διδακτόν, οὐδὲν μᾶλλον πρὸς τοὺς δικανικοὺς λόγους ἢ πρὸς τοὺς ἄλλους ἅπαντας ὠφελεῖν δυναμένου. Τοσούτῳ δὲ χείρους ἐγένοντο τῶν περὶ τὰς ἔριδας καλινδουμένων, μένων, ὅσον οὗτοι μὲν τοιαῦτα λογίδια διεξιόντες, οἷς εἴ τις ἐπὶ τῶν πράξεων ἐμμείνειεν εὐθὺς ἂν ἐν πᾶσιν εἴη κακοῖς, ὅμως ἀρετὴν ἐπηγγείλαντο καὶ σωφροσύνην περὶ αὐτῶν, ἐκεῖνοι δ' ἐπὶ τοὺς πολιτικοὺς λόγους, παρακαλοῦντες, ἀμελήσαντες τῶν ἄλλων τῶν προσόντων αὐτοῖς ἀγαθῶν, πολυπραγμοσύνης καὶ πλεονεξίας ὑπέστησαν εἶναι διδάσκαλοι. [20] Καίτοι τοὺς βουλομένους πειθαρχεῖν τοῖς ὑπὸ τῆς φιλοσοφίας ταύτης προσταττομένοις πολὺ ἂν θᾶττον πρὸς ἐπιείκειαν ἢ πρὸς ῥητορείαν ὠφελήσειεν. Καὶ μηδεὶς οἰέσθω με λέγειν ὡς ἔστι δικαιοσύνη διδακτόν· ὅλως μὲν γὰρ οὐδεμίαν ἡγοῦμαι τοιαύτην εἶναι τέχνην, ἥτις τοῖς κακῶς πεφυκόσι πρὸς ἀρετὴν σωφροσύνην ἂν καὶ δικαιοσύνην ἐμποιήσειεν· οὐ μὴν ἀλλὰ συμπαρακελεύσασθαί γε καὶ συνασκῆσαι μάλιστ' ἃ οἶμαι τὴν τῶν λόγων τῶν πολιτικῶν ἐπιμέλειαν. [22] Ἵνα δὲ μὴ δοκῶ τὰς μὲν τῶν ἄλλων ὑποσχέσεις διαλύειν, αὐτὸς δὲ μείζω λέγειν τῶν ἐνόντων, ἐξ ὧνπερ αὐτὸς ἐπείσθην οὕτω ταῦτ' ἔχειν, ῥᾳδίως οἶμαι καὶ τοῖς ἄλλοις φανερὸν καταστήσειν. |
XIII. DISCOURS CONTRE LES SOPHISTES. [1] 1. Si tous ceux qui entreprennent d'enseigner voulaient rester dans les bornes de la vérité, et s'abstenir de promesses qui dépassent les limites de ce qu'ils doivent réaliser, ils ne seraient pas discrédités dans le public; mais aujourd'hui l'audace de certains hommes, dont la jactance ne connaît point de bornes, est devenue telle que ceux qui préfèrent vivre dans l'oisiveté semblent suivre des conseils plus sages que ceux qui se consacrent à l'étude de la philosophie.
2. Comment ne pas haïr et
ne pas mépriser à la fois des hommes qui, passant leur temps dans de vaines
discussions, feignent de chercher la vérité, et commencent immédiatement par
débiter des mensonges? [2] Je crois évident pour tout le monde qu'il
n'appartient pas à notre nature de connaître l'avenir. Nous sommes si éloignés
de posséder cette faculté, qu'Homère, dont la renommée proclame la haute
sagesse, présente quelquefois les dieux mêmes délibérant sur les choses qui
doivent arriver; non qu'il contint la pensée des dieux, mais afin de nous
montrer qu'une telle prescience n'est [3] 3. Ces hommes, dans l'excès de leur audace, se sont efforcés de persuader aux jeunes gens que, s'ils les prennent pour maîtres, ils auront la prescience de tout ce qu'ils doivent faire, et qu'à l'aide de cette connaissance ils obtiendront le bonheur. Or, c'est lorsqu'ils se sont ainsi établis les maîtres et les dispensateurs de si grands biens, qu'ils n'ont pas honte de demander trois ou quatre mines, pour prix de tels avantages. [4] S'ils vendaient une portion de ce qu'ils possèdent pour une faible partie de sa valeur, ils ne pourraient pas nier leur folie ; et c'est quand ils estiment à si bas prix la vertu tout entière et la félicité, qu'ils prétendent, comme s'ils possédaient la sagesse, devenir les instituteurs des autres, ils disent n'avoir aucun besoin de fortune ; ils appellent la richesse une vile poussière d'argent et d'or , et cependant, pour un modique salaire, ils promettent tout à leurs disciples, excepté de les rendre immortels. [5] Mais ce qu'il y a de plus bizarre, c'est qu'ils se méfient de ceux dont ils doivent recevoir de l'argent, et auxquels ils doivent enseigner la justice; et qu'ils demandent à d'autres hommes, dont jamais ils n'ont été les maîtres, de cautionner ces mêmes disciples, mesure sage pour la sécurité de leurs intérêts, mais en opposition, avec leurs promesses. [6] On peut, quand on enseigne une science quelconque, prendre des précautions pour garantir ses droits (car rien n'empêche que des hommes, devenus habiles relativement à d'autres choses, ne soient pas loyaux en ce qui concerne les contrats); mais comment ne serait-il pas opposé à la raison que des hommes, dont la profession est de faire pénétrer dans les âmes la vertu et la sagesse, ne missent pas leur principale confiance dans leurs disciples ? Car si ces disciples sont des hommes justes, sincères et généreux à l'égard des autres, ils ne manqueront pas à leurs devoirs envers ceux qui les auront, rendus tels. [7] 4. Lors donc que certains ignorants, réunissant et comparant tous ces faits, voient les docteurs de la sagesse , les dispensateurs de la félicité, se trouver eux-mêmes dans le besoin et exiger de leurs disciples une mesquine rétribution; lorsqu'ils les voient se donner des soins pour éviter les contradictions dans leurs discours, et ne pas apercevoir celles qui se rencontrent dans leurs actions ; [8] se vanter de pénétrer l'avenir, sans pouvoir rien dire ni rien conseiller d'utile pour le présent; lorsqu'ils reconnaissent surtout que les hommes soumis aux lumières du bon sens sont plus d'accord entre eux, plus heureux dans leurs entreprises que les fanfarons de doctrine; c'est avec raison, selon moi, qu'ils les méprisent, qu'ils regardent de tels exercices d'esprit comme des puérilités, comme de vaines paroles, et non comme une étude propre à développer les facultés de l'âme. [9] 5. Ces sophistes, toutefois, ne sont pas les seuls dignes de blâme, et la même réprobation doit s'attacher à ceux qui professent l'art des discours politiques. Ceux-là, non plus, ne tiennent aucun compte de la vérité, et croient avoir atteint le sublime de l'art, lorsque attirant à eux le plus grand nombre possible de disciples par la modicité du salaire et la magnificence des promesses, ils peuvent en obtenir quelque profit. Ils sont si stupides eux-mêmes et si convaincus de la stupidité des autres, que, dans le moment où ils écrivent des discours inférieurs aux improvisations de certains ignorants, ils prennent l'engagement de faire de leurs disciples des orateurs assez, habiles pour ne rien laisser échapper de ce qui se trouve au fond des affaires. [10] Ils n'accordent aucune part, dans cette faculté, ni à l'instruction première ni au génie de l'élevé; ils prétendent enseigner les préceptes de l'éloquence comme ou enseigne l'art de tracer des caractères, sans même chercher à se rendre compte de la nature de ces deux sciences, et croyant, par l'exagération de leurs promesses, se faire admirer, en même temps qu'ils obtiendront plus d'estime pour l'étude de l'éloquence. Ils ignorent que ce ne sont pas les hommes qui se vantent insolemment de leur habileté qui font prospérer les arts, mais ceux auxquels il est donné de trouver ce que renferme chacun d'eux. [11] 6. Je voudrais pour beaucoup que la philosophie pût avoir la puissance qu'ils lui prêtent ; peut-être alors ne serions-nous pas nous-mêmes rejetés au dernier rang, et ne nous offrirait-elle pas les fruits les moins abondants. Mais, puisqu'il en est autrement, je désirerais, du moins, pouvoir imposer silence à ces impertinents discoureurs ; car je vois que leurs injures n'atteignent pas seulement les coupables, mais tous ceux qui consacrent leur vie à l'étude de la philosophie. [12] 7. Je m'étonne de voir confier des disciples à des hommes qui, sans chercher à s'en rendre compte, présentent un art, où tout est défini, comme un point de comparaison avec une science appartenant en quelque sorte au domaine de la poésie. Qui peut ignorer, eux exceptés, que l'art de l'écriture a quelque chose de fixe et qu'elle est renfermée dans des limites dont on ne peut s'écarter, de sorte que nous nous servons toujours des mêmes signes pour représenter les mêmes choses, tandis que, pour l'éloquence , c'est absolument le contraire ? Ainsi, une pensée exprimée par un orateur n'a pas le même mérite dans la bouche de celui qui la reproduit après lui; et celui-là paraît être le plus habile qui, parlant avec la dignité que réclame le sujet, peut trouver des expressions complètement différentes de celles dont les autres se sont servis. [13] Voici la preuve la plus certaine de la différence qui existe entre les deux sciences. Les discours ne peuvent avoir une valeur réelle, s'ils ne sont pas en harmonie avec les temps et s'ils n'offrent pas le double charme de l'élégance et de la nouveauté, tandis que, pour tracer des caractères, rien de pareil n'est nécessaire. Par conséquent, ceux qui se servent de semblables comparaisons devraient payer une amende plutôt que recevoir de l'argent ; parce qu'eux-mêmes ils auraient besoin d'être instruits, alors qu'ils prétendent instruire les autres. [14] 8. Si, cependant, je ne dois pas me borner à formuler des accusations, et si je dois faire connaître ma pensée tout entière, je crois être d'accord avec tous les hommes sensés en disant qu'un grand nombre parmi ceux qui se sont livrés à l'étude des lettres sont restes dans l'obscurité de la vie privée, tandis que quelques autres, sans avoir jamais été à l'école d'aucun sophiste, se sont fait remarquer par leur éloquence et par leur habileté dans le gouvernement de l'État. La puissance de la parole et de toutes les autres facultés de l'homme se manifeste dans ceux qui sont nés avec des dispositions heureuses et dans ceux qui ont développé des dispositions ordinaires par le travail. [15] L'éducation les rend plus habiles; elle leur fournit de plus abondantes ressources pour faire des recherches, parce que, les choses qu'ils rencontraient en errant et comme au hasard, elle leur enseigne à les prendre comme dans un dépôt. Si elle ne peut pas faire que des hommes d'une nature inférieure deviennent des athlètes redoutables ou des orateurs distingués, du moins les rend-elle en quelque sorte supérieurs à eux-mêmes et plus capables à beaucoup d'égards. [16] 9. Je veux, puisque je me suis avancé jusque-là, m'expliquer avec encore plus de clarté. Je dis que la science des formes dont nous nous servons soit pour parler, soit pour composer dos discours, n'est pas au nombre des choses très difficiles à acquérir, si l'on place sa confiance, non dans les hommes qui font facilement de vaines promesses, mais dans ceux qui sont véritablement instruits des choses qu'ils enseignent. Quant à l'art de choisir les formes que réclame chaque objet en particulier, de les disposer entre elles, de les placer à propos, de ne laisser échapper aucune occasion de donner par les pensées une variété convenable à tout un discours , d'observer enfin, dans les paroles, les règles du nombre et de l'harmonie , [17] je dis que c'est un travail qui exige beaucoup de soins, et que c'est l'œuvre d'un esprit courageux et pénétrant ; j'ajoute que le disciple doit non seulement avoir reçu de la nature les moyens nécessaires pour apprendre et connaître les divers genres de style , mais qu'il doit s'être exercé à en faire usage, et que le maître, indépendamment de la faculté d'expliquer toutes les règles avec une exactitude telle que rien de ce qui doit être appris ne soit passé sous silence, est obligé pour tout le reste de s'offrir lui-même à ses disciples comme un modèle si complet, [18] que ceux qu'il aura formés et qui seront capables de l'imiter se fassent aussitôt reconnaître par un langage plus gracieux et plus fleuri. Lorsque tous ces avantages se trouveront réunis, ceux qui se livrent à l'étude de la philosophie atteindront la perfection ; mais, toutes les fois qu'une des conditions n'aura pas été remplie, les disciples seront nécessairement inférieurs dans cette partie. [19] 10. Tous ces sophistes nouvellement éclos, qui récemment ont fait éclater leur orgueil, je les regarde, quel que soit leur nombre, comme étant tous compris dans le cercle que je viens de tracer. 11. Il nous reste à parler de ceux qui, nés avant notre époque, ont osé consigner dans leurs écrits ce qu'ils appellent les artifices de la chicane, et que nous ne devons pas laisser passer sans leur infliger la part de blâme qui leur appartient, Ils promettaient d enseigner l'art de discuter devant la justice, choisissant pour désigner la science qu'ils enseignaient la plus odieuse de toutes les expressions, celle qu'auraient pu employer les hommes jaloux de l'éloquence, mais non pas les chefs d'une science aussi élevée; [20] et cela, lorsqu'ils parlaient d'une chose qui, en tant qu'elle puisse être enseignée, ne peut pas être plus utile pour les discours judiciaires que pour tous les autres discours. Ces sophistes étaient d'autant plus inférieurs à ceux qui se traînent dans les disputes de la dialectique, que ces derniers, en débitant des discours sans force et sans valeur , tels que celui qui persisterait à en faire l'application aux affaires tomberait bientôt dans toutes sortes de calamités, annonçaient cependant que la vertu et la sagesse se trouveraient au fond de leur doctrine, tandis que les premiers, exhortant à l'étude des discours politiques et négligeant tout ce que cette étude peut offrir de beau et d'utile, n'étaient en réalité que des professeurs d'intrigue et de cupidité ; [20] néanmoins ceux qui voudraient obéir aux prescriptions de cet enseignement en retireraient plus d'avantages dans l'intérêt de la justice que dans celui de l'éloquence. Et que personne ne suppose qu'à mes yeux la justice soit une science qui puisse être enseignée , car je ne crois pas qu'il y ait un art capable de faire pénétrer la sagesse et la justice dans les âmes mal nées pour la vertu ; je crois seulement que l'étude des discours politiques peut servir, sous ce rapport, de secours et d'encouragement.
[22] 12. Afin, toutefois,
de ne pas paraître annuler les promesses des autres, en dépassant moi-même les
limites de la vérité, j'espère trouver facilement, dans les motifs qui mit
déterminé mes convictions, les moyens de les rendre évidentes pour tous ...... |