retour à l'entrée du site   table des matières d' Edmond Cougny

 

LES GAULOIS VUS PAR LES GRECS ET LES LATINS.

APPIEN STRABON POSIDONIUS ARTEMIDORE EPHORE POLYBE  Athénée Hérodien

 

XIPHILIN ARRIEN            

 

APPIEN : Celtique

Τοῦ δὲ οἴνου καὶ τῶν ἄλλων ἄδην ἐνεπίμπλαντο οἱ Κελτοί, τήν τε φύσιν ὄντες ἀκρατεῖς, καὶ χώραν ἔχοντες, ὅτι μὴ πρὸς δημητριακοὺς καρπούς τῶν ἄλλων ἄγονον καὶ ἀφυᾶ. Τά τε σώματα αὐτοῖς μεγάλα ὄντα καὶ τρυφηλὰ καὶ σαρκῶν ὑγρῶν μεστὰ ὑπὸ τῆς ἀδηφαγίας καὶ μέθης ἐς ὄγκον καὶ βάρος ἐξεχεῖτο. Καὶ πρὸς δρόμους καὶ πόνους ἀδύνατα πάμπαν ἐγίγνετο · ὑπό τε ἱδρῶτος καὶ ἄσθματος, ὅπου τι δέοι κάμνειν, ἐξελύοντο ταχέως.

VII. Les Celtes se gorgeaient de vin et d'autres aliments, car l'intempérance leur est naturelle, et le pays qu'ils habitent, à part les céréales, ne produit rien, n'est propre à rien. Aussi leurs corps qui sont grands et mous; bourrés de chairs flasques, à force de manger et de boire, se fondaient en une masse bouffie et pesante ils étaient absolument sans force pour les courses, pour les fatigues. Fallait-il faire quelque effort, trempés de sueur, essoufflés, ils étaient vite épuisés.

AThénée DE NAUCRATIS

Ménage à trois.

Κελτοὶ δὲ τῶν βαρβάρων καίτοι καλλίστας ἔχοντες γυναῖκας παιδικοῖς μᾶλλον χαίρουσιν · ὡς πολλάκις ἐνίους ἐπι ταῖς δοραῖς μετὰ δύο ἐρωμένον ἀναπαύεσθαι. 
Et parmi les barbares le Celtes aussi, bien qu'ils aient de très belles femmes, apprécient davantage les garçons de sorte que certains d'entre eux ont souvent deux amoureux pour dormir dans leurs lits faits de peaux d’animaux. 
Deipnosophistes, XIII, 79.

STRABON

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Τὸ δὲ σύμπαν φῦλον, ὃ νῦν Γαλλικόν τε καὶ Γαλατικὸν καλοῦσιν, ἀρειμάνιόν ἐστι καὶ θυμικόν τε καὶ ταχὺ πρὸς μάχην, ἄλλως δὲ ἁπλοῦν καὶ οὐ κακόητες. Διὰ δὲ τοῦτο ἐρεθισθέντες μὲν ἀθρόοι συνίασι πρὸς τοὺς ἀγῶνας καὶ φανερῶς καὶ οὐ μετὰ περισκέψεως, ὥστε καὶ εὐμεταχείριστοι γίνονται τοῖς καταστρατηγεῖν ἐθέλουσι· καὶ γὰρ ὅτε βούλεται καὶ ὅπου καὶ ἀφ' ἧς ἔτυχε προφάσεως παροξύνας τις αὐτοὺς ἑτοίμους ἔσχε πρὸς τὸν κίνδυνον, πλὴν βίας καὶ τόλμης οὐδεν ἔχοντας τὸ συναγωνιζόμενον. Παραπεισθέντες δὲ εὐμαρῶς ἐνδιδόασι πρὸς τὸ χρήσιμον, ὥστε καὶ παιδείας ἅπτεσθαι καὶ λόγων. Τῆς δὲ βίας τὸ μὲν ἐκ τῶν σωμάτων ἐστὶ μεγὰλων ὄντων, τὸ δ' ἐκ τοῦ πλήθους · συνίασι δὲ κατὰ πλῆθος ῥᾳδίως διὰ τὸ ἁπλοῦν καὶ αὐθέκαστον, συναγανακτούντων τοῖς ἀδικεῖσθαι δοκοῦσι ἀεὶ τῶν πλησὶον. Νυνὶ μὲν οὖν ἐν εἰρήνῃ πάντες εἰσὶ δεδουλωμένοι καὶ ζῶντες κατὰ τὰ προστἀγματα τῶν ἑλόντων αὐτοὺς ῾Ρωμαίων, ἀλλ' ἐκ τῶν παλαιῶν χρόνων τοῦτο λαμβάνομεν περὶ αὐτῶν καὶ τῶν μέχρι νῦν συμμενόντων παρὰ τοῖς Γερμανοῖς νομὶμων.

2. Toute la race appelée aujourd'hui Gauloise ou Galate a la manie de la guerre; elle est irascible, prompte à la bataille, du reste simple et sans malice. Aussi, une fois irrités, ils se rassemblent en foule pour courir aux combats, et cela avec éclat, sans aucune circonspection, de sorte qu'ils tombent facilement sous les coups de ceux qui veulent employer contre eux la stratégie. Et en effet, qu'on les excite, quand on veut, où l'on veut, pour le premier prétexte venu, on les trouve prêts à braver le danger, sans avoir pour entrer dans la lutte autre chose que leur force et leur audace. Si, l'on agit sur eux par la persuasion, ils s'adonnent aisément aux travaux utiles, jusqu'à s'appliquer à la science et aux lettres. Leurs forces tiennent en partie à leur taille qui est grande, en partie à leur multitude. S'ils se rassemblent en grande multitude avec tant de facilité, cela vient de leur simplicité et de leur fierté personnelle : grâces à ces qualités, ils s'associent toujours à l'indignation de quiconque leur paraît victime de l'injustice. Aujourd'hui, à la vérité, ils sont tous en paix, asservis; et ils vivent sous les ordres des Romains qui les ont conquis; mais nous nous les figurons ainsi d'après leurs anciens temps et d'après les maximes encore subsistantes aujourd'hui chez les Germains.

STRABON. IV. IV, 2.  

LES MARÉES

οὐδ' ὅτι ἀφοβίαν οἱ Κελτοὶ ἀσκοῦντες κατακλύζεσθαι τὰς οἰκίας ὑπομένουσιν, εἶτ' ἀνοικοδομοῦσι καὶ ὅτι πλείων αὐτοῖς συμβαίνει φθόρος ἐξ ὕδατος ἢ πολέμου ὅπερ ῎Εφορός φησιν, ἡ γὰρ τάξις ἡ τῶν πλημμυρίδων καὶ τὸ τὴν ἐπικλυζομένην χώραν εἶναι γνώριμον οὐκ ἔμελλε τοιαύτας τὰς ἀτοπίας παρέξειν δὶς γὰρ ἑκάστης ἡμέρας τούτου συμβαίνοντος τὸ μηδ' παξ αἰσθάνεσθαι φυσικὴν οὖσαν τὴν παλίρροιαν καὶ ἀβλαβῆ, καὶ οὐ μόνοις τούτοις συμβαίνουσαν ἀλλὰ τοῖς παρωκεανίταις πᾶσι, πῶς οὐκ ἀπίθανον ; οὐδὲ Κλείταρχος εὖ · φησὶ γὰρ τοὺς ἱππέας ἰδόντας τὴν ἔφοδον τοῦ πελάγους ἀφιππάσασθαι καὶ φεύγοντας ἐγγὺς γενέσθαι τοῦ περικαταληφθῆναι. Οὔτε δὲ τοσούτῳ τάχει τὴν ἐπίβασιν ὁρμωμένην ἱστοροῦμεν, ἀλλὰ λεληθότως προσι οῦσαν τὴν θάλατταν · οὔτε τὸ καθ' ἡμέραν γινόμενον καὶ πᾶσιν ἔναυλον ἤδη ὂν τοῖς πλησιάζειν μέλλουσι πρὶν ἢ θεάσασθαι τοσοῦτον ἔμελλε παρέξεσθαι φόβον ὥστε φεύγειν ὡς ἃν εἰ ἐξ ἀδοκήτου προσέπεσε.

II, 1 Il y a erreur et chez celui qui dit... et chez celui qui affirme que les Celtes, pour s'exercer à ne rien craindre, restent dans leurs maisons battues des flots, quittes à les rebâtir après, et que parmi eux il périt plus de gens par les eaux que par la guerre : c'est ce que dit Éphore. Mais les marées sont régulières, on sait jusqu'où va la mer. Il n'y avait donc pas place pour ces absurdités; car ce phénomène se produit deux fois par jour. Et ils n'ont jamais remarqué que ce va-et-vient des eaux est une chose toute naturelle, sans danger, qui n'arrive pas seulement chez eux, mais chez tous les riverains de l'Océan ! Cela n'est-il pas incroyable ? Clitarque n'est pas plus exempt d'erreur : il nous parle de cavaliers qui, voyant la mer arriver, se sauvèrent à cheval et, dans leur fuite, furent près d'être atteints et entourés par les flots : les flots n'avancent pas, que nous sachions, d'un mouvement si rapide ; la mer monte d'une façon insensible. Et puis un phénomène qui se produit chaque jour, dont on a le bruit dans les oreilles, dès qu'on en approche, avant même de le voir, ne devait pas inspirer assez de frayeur pour mettre en fuite, comme un accident imprévu.

STRABON, VII, II, I

 

POSIDONIUS

L'île des  femmes.

᾿Εν δὲ τῷ ὠκεανῴ φησι εἶναι νῆσον μικρὰν οὐ πἀνυ πελαγίαν, προκειμένην τῆς ἐκβολης τοῦ Λίγηρος ποραμοῦ · οἰκεῖν δὲ ταύτην τὰς τῶν Σαμνιτῶν γυναῖκας Διονύσῳ κοτεχομένας καὶ ἱλασκομένας τὸν θὲον τοῦτον τελεταῖς τε καὶ ἄλλαις ἱεροπιίαις ἐξελλαγμέναις. Οὐκ ἐπιβαίνειν δὲ ἄνδρα τῆς νήσου, τὰς δὲ γυναῖκας αὐτὰς πλεούσας κοινωνεῖν τοῖς ἀνδράσι καὶ πάλιν ἐπανιέναι. ῎Εθος δ' ἶναι κατ' ἐνιαυτὸν ἅπαξ τὸ ἱερὸν ἀποστεγάζεσθαι καὶ στεγὰζεσθαι πάλιν αὐθημηρὸν πρὸ δύσεως, ἑκάστης φορτίον ἐπιφερούσης · ἧς δ' ἄν ἐκπέσῃ τὸ φορτίον, διασπᾶσθαι ταύτην ὑπὸ τῶν ἄλλων · φερούσας δὲ τὰ μέρη περὶ τὸ ἱερὸν μετ' εὐασμοῦ μὴ παύεσθαι πρότερον, πρὶν παύσωνται τῆς λύττης · ἀεὶ δὲ συμβαίνειν ὥστε τινὰ ἐμπίπτειν τὴν τοῦτο πεισομένην.

6. Il (Posidonius) parle d'une petite île située dans l'Océan, non pas tout-à-fait en pleine mer, mais vis-à-vis de l'embouchure de la Loire : elle est habitée par les femmes des Samnites, qui sont possédées de Dionysos et qui cherchent à se rendre ce dieu propice par des cérémonies mystiques et autres pratiques sacrées singulières. Aucun homme n'aborde en cette île : ce sont les femmes elles-mêmes qui passent sur le continent pour avoir commerce avec les hommes, et s'en retournent ensuite. C'est aussi l'usage qu'une fois par an on enlève le toit du temple, et qu'on le refasse le même jour avant le coucher du soleil, chaque femme apportant à cet effet sa charge de matériaux. Si l'une d'elles laisse tomber cette charge, les autres la mettent en pièces, et portant avec des cris d'évohé les membres de la malheureuse autour du temple, elles ne cessent point qu'elles n'aient senti cesser leur fureur. Or chaque fois il arrive à quelqu'une de tomber et de souffrir cette mort.

STRABON, IV, 6.

ARTEMIDORE

Anecdotes

Τούτου δ' ἔτι μυθωδέστερον εἴρηκεν ᾿Αρτεμίδωρος τὸ περὶ τοὺς κόρακας συμβαῖνον. Λιμἐνα γάρ τινα τῆς παρωκεανίτιδος ἰστορεῖ δύο κοράκων ἐπονομαζόμενον, φαίνεσθαι δ' ἐν τούτῳ δύο κοράκας τὴν δεξίαν πτέρυγα παράλευκον ἔχοντας · τοὺς οὖν περί τινων ἀμφισβητοῦντας, ἀφικομένους δεῦρο ἐφ' ὑψηλοῦ τόπου σανίδα θέντας ἐπιβάλλειν ψαιστά, ἑκάτερον χωρίς · τοὺς δ' ὄρνεις ἐπιπτάντας τὰ μἐν ἐσθίειν, τὰ δἐ σκορπίζειν · οὗ δ' ἄν σκορπισθ ῇ τὰ ψαιστά, ἐκεῖνον νικᾶν. Ταῦτα μέν οὖν μυθωδέστερα λέγει, περὶ δὲ τῆς Δήμητρος καὶ Κόρης πιστότερα, ὅτι φησὶν ε ἶναι νῆσον πρὸς τῇ Βρεττανικ ῇ, καθ' ἣν ὅνομα τοῖς ἐν Σαμοθρἀκῃ περὶ Δήμητρα καὶ τὴν Κόρην ἱεροποιεῖται. Καὶ τοῦτο δὲ τῶν πιστευομένον ἐστίν, ὅτι ἐν τῇ Κελτικ ῇ φύεται δένδρον ὅμοιον συκ ῇ, καρπὸν δ' ἐκφέρει παραπλήσιον κιοράνῳ κορινθιουργεῖ · ἐπιμηθείς δ'οὑτος ἀφίησιν ὀπὸν θανάσιμον πρὸς τὰς ἐπιχρίσεις τῶν βελῶν. Καὶ τοῦτο δὲ τῶν θρυλουμένων ἐστίν, ὅτι πάντες Κελτοὶ φιλονεικοί τε εἰσι καὶ οὐ νομίζεται παρ' αὐτοῖς αἰσχρὸν τὸ τῆς ἀκμῆς ἀφειδεῖν τοὺς νέους.

Il y a encore quelque chose de plus fabuleux dans les récits d'Artémidore ; c'est l'histoire des corbeaux. Il raconte qu'il y a sur la côte de l'Océan un port dit des deux corbeaux, qu'on y voyait en effet deux corbeaux ayant l'aile droite blanchâtre; que ceux qui avaient quelque contestation venaient en cet endroit et plaçaient sur un lieu élevé une planche avec des gâteaux dessus, chacun ayant à part les siens, que les oiseaux s'abattant sur ces gâteaux mangeaient les uns et dispersaient les autres, que celui-là était vainqueur, dont les gâteaux avaient été dispersés. Voilà une histoire qui ressemble bien trop à une fable ; ce qu'il raconte de Dèmèter (Cérès) et de Corè (Proserpine) est plus digne de foi. Il y a, dit-il, près de la Bretagne, une île où l'on sacrifie à Dèmèter et à Coré suivant des rites semblables à ceux de la Samothrace. Encore un fait du genre de ceux auxquels on ajoute foi : il croît dans la Celtique un arbre semblable au figuier, lequel porte un fruit dont la forme se rapproche de celle du chapiteau corinthien. Si l'on fait une incision dans ce fruit, il en sort un suc mortel dont les habitants imprègnent leurs flèches. - Des traits caractéristiques généralement connus, c'est que tous les Celtes sont querelleurs, et qu'à leurs yeux il n'y a point de honte pour les jeunes gens à ne point ménager la fleur de leur bel âge. 

STRABON, IV, 6.

EPHORE

῎Εφορος δὲ ὑπερβάλλουσάν τε τῷ μεγεθεὶ λέγει τὴν Κελτικήν, ὥστε ἧσπερ νῦν ᾿Ιβηρίας καλοῦμεν ἐκείνοις τὰ πλεῖστα προσνέμειν μέχρι Γαδείρων, φιλέλληνάς τε ἀπροφαίνει τοὺς ἀνθρώπους, καὶ πολλὰ ἰδίως λέγει περὶ αὐτῶν οὐκ ἐοικότα τοῖς νῦν. ῎Ιδιον δὲ καί τοῦτο · ἀσκεῖν γὰρ αὐτοὺς μὴ παχεῖς εἶναι μηδὲ προγάστορας, τὸν δ' ὑπερβαλλόμενον τῶν νέων τὸ τῆς ζώνης μέτρον ζημιοῦσθαι.

Ephore donne à la Celtique une étendue exagérée : il lui attribue la plus grande partie du pays que nous appelons aujourd'hui Ibérie, jusqu'à Gadira, il nous en représente les habitants comme amis des Hellènes, et il signale maintes particularités où nous ne retrouvons pas les Celtes d'aujourd'hui. En voici une : ils s'étudieraient à ne devenir ni gras ni ventrus, et tout jeune homme dont l'embonpoint dépasserait la mesure marquée par une ceinture, serait puni.

STRABON, IV, 6.

POLYBE II, 32 - 35

14. ῾Υπὲρ ὧν δοκεῖ μοι χρήσιμον εἶναι κεφαλαιώδη μὲν ποιήσασθαι τὴν ἐξήγησιν ἵνα τὸ τῆς προκατασκευῆς οἰκεῖον συσσώσωμεν κατὰ τὴν ἐξ ἀρχῆς πρόθεσιν, ἀναδραμεῖν δὲ τοῖς χρόνοις ἐπὶ τὴν ἀρχήν ἐξ ὅτου κατέσχον οἱ προειρημένοι τὴν χώραν ·
[2] ἡγοῦμαι γὰρ τὴν περὶ αὐτῶν ἱστορίαν οὐ μόνον ἀξίαν εἶναι γνώσεως καὶ μνήμης, ἀλλὰ καὶ τελέως ἀναγκαίαν χάριν τοῦ μαθεῖν τίσι μετὰ ταῦτα πιστεύσας ἀνδράσι καὶ τόποις ᾿Αννίβας ἐπεβάλετο καταλύειν τὴν ῾Ρωμαίων δυναστείαν.

à propos de ce peuple, nous ne ferons pas mal d'en donner ici l'histoire en raccourci, et de la reprendre au temps où il s'était emparé d'une partie de l'Italie : le dessein que je me suis proposé dans mes deux premiers livres, réclame cette esquisse. D'ailleurs, outre que cette histoire est digne d'être connue et transmise à la postérité, elle est encore nécessaire pour connaître quel pays Hannibal eut la hardiesse de traverser, et à quels peuples il osa se fier, lorsqu'il forma le projet de renverser l'empire romain. 

[3] Πρῶτον δὲ περὶ τῆς χώρας ῥητέον ποία τίς ἐστιν καὶ πῶς κεῖται πρὸς τὴν ἄλλην ᾿Ιταλίαν. Οὕτως γὰρ ἔσται καὶ τὰ περὶ τὰς πράξεις διαφέροντα κατανοεῖν βέλτιον ὑπογραφέν των τῶν περί τε τοὺς τόπους καὶ τὴν χώραν ἰδιωμάτων. 
[4] Τῆς δὴ συμπάσης ᾿Ιταλίας τῷ σχήματι τριγωνοειδοῦς ὑπαρχούσης, τὴν μὲν μίαν ὁρίζει πλευρὰν αὐτῆς τὴν πρὸς τὰς ἀνατολὰς κεκλιμένην ὅ τ' ᾿Ιόνιος πόρος καὶ κατὰ τὸ συνεχὲς ὁ κατὰ τὸν ᾿Αδρίαν κόλπος, τὴν δὲ πρὸς μεσημβρίαν καὶ δυσμὰς τετραμμένην τὸ Σικελικὸν καὶ Τυρρηνικὸν πέλαγος.
[5] Αὗται δ' αἱ πλευραὶ συμπίπτουσαι πρὸς ἀλλήλας κορυφὴν ποιοῦσι τοῦ τριγώνου τὸ προκείμενον ἀκρωτήριον τῆς ᾿Ιταλίας εἰς τὴν μεσημβρίαν ὃ προσαγορεύεται μὲν Κόκυνθος, διαιρεῖ δὲ τὸν ᾿Ιόνιον πόρον καὶ τὸ Σικελικὸν πέλαγος.
[6] Τὴν δὲ λοιπὴν τὴν παρά τε τὰς ἄρκτους καὶ τὴν μεσόγαιαν παρατείνουσαν ὁρίζει κατὰ τὸ συνεχὲς ἡ τῶν ῎Αλπεων παρώρεια, λαμβάνουσα τὴν μὲν ἀρχὴν ἀπὸ Μασσαλίας καὶ τῶν ὑπὲρ τὸ Σαρδῷον πέλαγος τόπων παρήκουσα δὲ συνεχῶς μέχρι πρὸς τὸν τοῦ παντὸς ᾿Αδρίου μυχόν πλὴν βραχέος, ὃ προκαταλήγουσα λείπει τοῦ μὴ συνάπτειν αὐτῷ.
[7] Παρὰ δὲ τὴν προειρημένην παρώρειαν, ἥν δεῖ νοεῖν ὡσανεὶ βάσιν τοῦ τριγώνου παρὰ ταύτην ἀπὸ μεσημβρίας ὑπόκειται πεδία τῆς συμπάσης ᾿Ιταλίας τελευταῖα πρὸς τὰς ἄρκτους ὑπὲρ ὧν ὁ νῦν δὴ λόγος, ἀρετῇ καὶ μεγέθει διαφέροντα τῶν κατὰ τὴν Εὐρώπην ὅσα πέ πτωκεν ὑπὸ τὴν ἡμετέραν ἱστορίαν.
[8] ῎Εστι δὲ τὸ μὲν ὅλον εἶδος καὶ τῆς ταῦτα τὰ πεδία περιγραφούσης γραμμῆς τριγωνοειδές. Τούτου δὲ τοῦ σχήματος τὴν μὲν κορυφὴν ἥ τε τῶν ᾿Απεννίνων καλουμένων ὀρῶν καὶ τῶν ᾿Αλπεινῶν σύμπτωσις οὐ μακρὰν ἀπὸ τοῦ Σαρδῴου πελάγους ὑπὲρ Μασσαλίας ἀποτελεῖ.ᾇ
[9] Τῶν δὲ πλευρῶν παρὰ μὲν τὴν ἀπὸ τῶν ἄρκτων ὡς ἐπάνω προεῖπον. Τὰς ῎Αλπεις αὐτὰς ἐπὶ δισχιλίους καὶ διακοσίους σταδίους παρήκειν συμβαίνει.
[10] Παρὰ δὲ τὴν ἀπὸ μεσημβρίας τὸν ᾿Απεννῖνον ἐπὶ τρισχιλίους ἑξακοσίους.
[11] Βάσεώς γε μὴν τάξιν λαμβάνει τοῦ παντὸς σχήματος ἡ παραλία τοῦ κατὰ τὸν ᾿Αδρίαν κόλπου · τὸ δὲ μέγεθος τῆς βάσεώς ἐστιν ἀπὸ πόλεως Σήνης ἕως ἐπὶ τὸν μυχὸν ὑπὲρ τοὺς δισχιλίους σταδίους καὶ πεντακοσίους.
[12] ῞Ωστε τὴν πᾶσαν περίμετρον τῶν προειρημένων πεδίων μὴ πολὺ λείπειν τῶν μυρίων σταδίων.

Mais montrons d'abord quel est, et comment est situé, par rapport au reste de l'Italie, le terrain que les Gaulois occupaient ; cette description aidera beaucoup à faire concevoir ce qu'il y aura de remarquable dans les actions qui s'y sont passées.
(4) Toute l'Italie forme un triangle, dont l'un des côtés, qui est à l’orient, est terminé par la mer d'Ionie et le golfe Adriatique qui lui est adjacent, et l'autre, qui est au midi et à l'occident, par la mer de Sicile et celle de Tyrrhénie.
(5) Ces deux côtés, se joignant ensemble, font la pointe du triangle, et cette pointe, c'est ce promontoire d'Italie qu'on appelle Cocinthe, et qui sépare la mer d'Ionie de celle de Sicile. 
(6) Au troisième côté, qui regarde le septentrion et le milieu des terres, sont les Alpes, chaîne de montagne qui, depuis Marseille et les lieux qui sont au-dessus de la mer de Sardaigne, s'étend sans interruption jusqu'à l'extrémité de la mer Adriatique, à l'exception d'un petit terrain où elles finissent, avant que de se joindre à cette mer. 
(7) C'est du pied de ces montagnes, qui doivent être regardées comme la hase du triangle, et du côté du midi, que commencent ces plaines dont nous avons à parler, plaines situées dans la partie septentrionale de l'Italie, et qui par leur fertilité et leur étendue surpassent tout ce que l'histoire nous a jamais appris d'aucun pays de l'Europe. 
(8) Elles sont aussi en forme de triangle. La jonction des Apennins et des Alpes auprès de la mer de Sardaigne, au dessus de Marseille, fait la pointe du triangle. 
(9) Les Alpes bornent le côté du septentrion à la longueur de 2,200 stades, et au midi sont les Apennins qui s'étendent à 5,600. 
(11) La base de ce triangle est la côte du golfe Adriatique, et cette côte, qui s'étend depuis Séna jusqu'à l'extrémité du golfe, est longue de plus de 2,500 stades, en sorte que ces plaines ne renferment guère moins de 10,000 stades dans leur circonférence.

Περί γε μὴν τῆς ἀρετῆς οὐδ' εἰπεῖν ῥᾳδιον. Σίτου τε γὰρ τοσαύτην ἀφθονίαν ὑπάρχειν συμβαίνει κατὰ τοὺς τόπους ὥστ' ἐν τοῖς καθ' ἡμᾶς καιροῖς πολλάκις τεττάρων ὀβολῶν εἶναι τῶν πυρῶν τὸν Σικελικὸν μέδιμνον, τῶν δὲ κριθῶν δυεῖν τοῦ δ' οἴνου τὸν μετρητὴν ἰσόκριθον.
[2] ῾Ελύμου γε μὴν καὶ κέγχρου τελέως ὑπερβάλλουσα δαψίλεια γίνεται παρ' αὐτοῖς. Τὸ δὲ τῶν βαλάνων πλῆθος τὸ γινόμενον ἐκ τῶν κατὰ διάστημα δρυμῶν ἐν τοῖς πεδίοις ἐκ τούτων ἄν τις μάλιστα τεκμήραιτο ·
[3] πλείστων γὰρ ὑϊκῶν ἱερείων κοπτομένων ἐν ᾿Ιταλίᾳ διά τε τὰς εἰς τοὺς ἰδίους βίους καὶ τὰς εἰς τὰ στρατόπεδα παραθέσεις, τὴν ὁλοσχερεστάτην χορηγίαν ἐκ τούτων συμβαίνει τῶν πεδίων αὐτοῖς ὑπάρχειν.
[4] Περὶ δὲ τῆς κατὰ μέρος εὐωνίας καὶ δαψιλείας τῶν πρὸς τὴν τροφὴν ἀνηκόντων οὕτως ἄν τις ἀκριβέστατα κατανοήσειεν ·
[5] Ποιοῦνται γὰρ τὰς καταλύσεις οἱ διοδεύοντες τὴν χώραν ἐν τοῖς πανδοκείοις, οὐ συμφωνοῦντες περὶ τῶν κατὰ μέρος ἐπιτηδείων, ἀλλ' ἐρωτῶντες πόσου τὸν ἄνδρα δέχεται.
[6] ῾Ως μὲν οὖν ἐπὶ τὸ πολὺ παρίενται τοὺς καταλύτας οἱ πανδοκεῖς, ὡς ἱκανὰ πάντ' ἔχειν τὰ πρὸς τὴν χρείαν ἡμιασσαρίου τοῦτο · δ' ἔστι τέταρτον μέρος ὀβολοῦ · σπανίως δὲ τοῦθ' ὑπερβαίνουσι.

Pour la fertilité du pays, il n'est pas facile de l'exprimer. On y recueille uni si grande abondance de grains, que nous avons vu le médimne de froment, mesure de Sicile, à quatre oboles , et le médimne d'orge à deux. Le métrète de vin s'y donne pour une égale mesure d'orge. Le mil et le panis y croissent à foison ; les chênes répandus çà et là fournissent une si grande quantité de glands, que, quoiqu'en Italie on tue beaucoup de porcs, tant pour la vie ordinaire que pour les provisions de guerre, cependant la plus grande partie se tire de ces plaines. Enfin les besoins de la vie y sont à si bon marché, que les voyageurs, dans les hôtelleries, ne demandent pas ce que leur coûtera chaque chose en particulier, mais combien il en coûte par tête ; et ils en sont souvent quittes pour un demi-as, qui ne fait que la quatrième partie d'une obole, rarement il en coûte davantage, quoiqu'on y donne suffisamment tout ce qui y est nécessaire. 

[7] Τό γε μὴν πλῆθος τῶν ἀνδρῶν καὶ τὸ μέγεθος καὶ κάλλος τῶν σωμάτων, ἔτι δὲ τὴν ἐν τοῖς πολέμοις τόλμαν ἐξ αὐτῶν τῶν πράξεων σαφῶς ἔσται καταμαθεῖν. Τῶν δ' ῎Αλπεων ἑκατέρας τῆς πλευρᾶς.
[8] Τῆς ἐπὶ τὸν ῾Ροδανὸν ποταμὸν καὶ τῆς ἐπὶ τὰ προειρημένα πεδία νευούσης, τοὺς βουνώδεις καὶ γεώδεις τόπους κατοικοῦσι τοὺς μὲν ἐπὶ τὸν ῾Ροδανὸν καὶ τὰς ἄρκτους ἐστραμμένους Γαλάται Τρανσαλπῖνοι προσαγορευόμενοι τοὺς δ' ἐπὶ τὰ πεδία Ταυρίσκοι καὶ καὶ ῎Αγωνες πλείω γένη βαρβάρων ἕτερα.
[9] Τρανσαλπῖνοί γε μὴν οὐ διὰ τὴν τοῦ γένους, ἀλλὰ διὰ τὴν τοῦ τόπου διαφορὰν προσαγορεύονται τὸ γὰρ τρὰνς ἐξερμηνευόμενόν ἐστι πέραν διὸ τοὺς ἐπέκεινα τῶν ῎Αλπεων Τρανσαλπίνους καλοῦσι.
[10] Τὰ δ' ἄκρα διά τε τὴν τραχύτητα καὶ τὸ πλῆθος τῆς μενούσης ἀεὶ χιόνος ἀοίκητα τελέως ἐστίν. Τὸν δ' ᾿Απεννῖνον ἀπὸ μὲν τῆς ἀρχῆς τῆς ὑπὲρ Μασσαλίαν καὶ τῆς πρὸς τὰς ῎Αλπεις συμπτώσεως Λιγυστῖνοι κατοικοῦσιν, καὶ τὴν ἐπὶ τὸ Τυρρηνικὸν πέλαγος αὐτοῦ πλευρὰν κεκλιμένην καὶ τὴν ἐπὶ τὰ πεδία.
[2] Παρὰ θάλατταν μὲν μέχρι πόλεως Πίσης, ἥ πρώτη κεῖται τῆς Τυρρηνίας ὡς πρὸς τὰς δυσμάς κατὰ δὲ τὴν μεσόγαιον ἕως τῆς ᾿Αρρητίνων χώρας.
[3] ᾿Εξῆς δὲ Τυρρηνοί · τούτοις δὲ συνεχεῖς ἑκάτερον τὸ κλίμα νέμονται τῶν προειρημένων ὀρῶν ῎Ομβροι.
[4] Λοιπὸν ὁ μὲν ᾿Απεννῖνος ἀπέχων τῆς κατὰ τὸν ᾿Αδρίαν θαλάττης σταδίους ὡσανεὶ πεντακοσίους ἀπολείπει τὰ πεδία δεξιὸς ἀπονεύων, καὶ διὰ μέσης τῆς λοιπῆς ᾿Ιταλίας διήκων εἰς τὸ Σικελικὸν κατατείνει πέλαγος.
[5] Τὸ δ' ἀπολε ιπόμενον μέρος πεδινὸν τῆς πλευρᾶς ἐπὶ θάλατταν καὶ πόλιν καθήκει Σήνην.

Je ne dis rien du nombre d'hommes dont ce pays est peuplé, ni de la grandeur et de la beauté de leur corps, ni de leur courage dans les actions de la guerre ; on en doit juger par ce qu'ils ont fait. Les deux côtés des Alpes, dont l'un regarde le Rhône et le septentrion, et l'autre les campagnes dont nous venons de parler, ces deux côtés, dis-je, sont habités, le premier par les Gaulois transalpins, et le second par les Taurisques, les Agones et plusieurs autres sortes de Barbares. Ces Transalpins ne sont point une nation différente des Gaulois ; ils ne sont ainsi appelés, que parce qu'ils demeurent au-delà des Alpes. Au reste, quand je dis que ces deux côtés sont habités ; je ne parle que des lieux bas et des douces collines ; car pour les sommets de ces montagnes, personne, jusqu'à présent, n'y a fixé son habitation ; la difficulté d'y monter, et les neiges dont ils sont toujours couverts les rendent inhabitables. Tout le pays, depuis le commencement de l'Apennin, au dessus de Marseille, et sa jonction avec les Alpes, tant du côté de la mer de Tyrrhénie jusqu'à Pise, qui est la première ville de l'Étrurie au couchant que du côté des plaines jusqu’aux Arretins, tout ce pays, dis-je, est habité par les Liguriens; au-delà sont les Tyrrhéniens ; et après eux les Ombriens, qui occupent les deux versants de l'Apennin, après lesquels cette chaîne de montagnes, qui est éloignée de la mer Adriatique d'environ 500 stades, se courbant vers la droite, quitte les plaines, et, traversant par le milieu tout le reste de l'Italie, va gagner la mer de Sicile. Ces plaines, dont l'Apennin s'écarte, s'étendent jusqu'à la mer et à la ville de Séna.

[6] ῾Ο δὲ Πάδος ποταμός, ὑπὸ δὲ τῶν ποιητῶν ᾿Ηριδανὸς θρυλούμενος, ἔχει μὲν τὰς πηγὰ ς ἀπὸ τῶν ῎Αλπεων ὡς πρὸς τὴν κορυφὴν μᾶλλον τοῦ προειρημένου σχήματος, καταφέρεται δ' εἰς τὰ πεδία ποιούμενος τὴν ῥύσιν ὡς ἐπὶ μεσημβρίαν.
[7] ᾿Αφικόμενος δ' εἰς τοὺς ἐπιπέδους τόπους, ἐκκλίνας τῷ ῥεύματι πρὸς ἕω φέρεται δι' αὐτῶν · ποιεῖ δὲ τὴν ἐκβολὴν δυσὶ στόμασιν εἰς τοὺς κατὰ τὸν ᾿Αδρίαν τόπους · τὸ δὲ πλεῖον ἀποτέμνεται μέρος τῆς πεδιάδος χώρας εἰς τὰς ῎Αλπεις καὶ τὸν ᾿Αδριατικὸν μυχόν.
[8] ῎Αγει δὲ πλῆθος ὕδατος οὐδενὸς ἔλαττον τῶν κατὰ τὴν ᾿Ιταλίαν ποταμῶν διὰ τὸ τὰς ῥύσεις τὰς ἐπὶ τὰ πεδία νευούσας ἀπό τε τῶν ῎Αλπεων καὶ τῶν ᾿Απεννίνων ὀρῶν εἰς τοῦτον ἐμπίπτειν ἁπάσας καὶ πανταχόθεν.
[9] Μεγίστῳ δὲ καὶ καλλίστῳ ῥεύματι φέρεται περὶ κυνὸς ἐπιτολήν, αὐξόμενος ὑπὸ τοῦ πλήθους τῶν ἀνατηκομένων χιόνων ἐν τοῖς προειρημένοις ὄρεσιν.
[10] ᾿Αναπλεῖται δ' ἐκ θαλάττης κατὰ τὸ στόμα τὸ καλούμενον ῎Ολανα σχεδὸν ἐπὶ δισχιλίους σταδίους.
[11] Τὴν μὲν γὰρ πρώτην ἐκ τῶν πηγῶν ἔχει ῥύσιν ἁπλῆν σχίζεται δ' εἰς δύο μέρη κατὰ τοὺς προσαγορευομένους Τριγαβόλους · τούτων δὲ τὸ μὲν ἕτερον στόμα προσονομάζεται Παδόα, τὸ δ' ἕτερον ῎Ολανα.
[12] Κεῖται δ' ἐπὶ τούτῳ λιμήν οὐδενὸς τῶν κατὰ τὸν ᾿Αδρίαν ἥττω παρεχόμενος ἀσφάλειαν τοῖς ἐν αὐτῷ καθορμιζομένοις. Παρά γε μὴν τοῖς ἐγχωρίοις ὁ ποταμὸς προσαγορεύεται Βόδεγκος.
[13] Τἄλλα δὲ τὰ περὶ τὸν ποταμὸν τοῦτον ἱστορούμενα παρὰ τοῖς ῞Ελλησι, λέγω δὴ τὰ περὶ Φαέθοντα καὶ τὴν ἐκείνου πτῶσιν, ἔτι δὲ τὰ δάκρυα τῶν αἰγείρων καὶ τοὺς μελανείμονας τοὺς περὶ τὸν ποταμὸν οἰκοῦντας, οὕς φασι τὰς ἐσθῆτας εἰσέτι νῦν φορεῖν τοιαύτας ἀπὸ τοῦ κατὰ Φαέθοντα πένθους.
[14] Καὶ πᾶσαν δὴ τὴν τραγικὴν καὶ ταύτῃ προσεοικυῖαν ὕλην ἐπὶ μὲν τοῦ παρόντος ὑπερθησόμεθα διὰ τὸ μὴ λίαν καθήκειν τῷ τῆς προκατασκευῆς γένει τὴν περὶ τῶν τοιούτων ἀκριβολογίαν.
[15] Μεταλαβόντες δὲ καιρὸν ἁρμόττοντα ποιησόμεθα τὴν καθήκουσαν μνήμην, καὶ μάλιστα διὰ τὴν Τιμαίου περὶ τοὺς προειρημένους τόπους ἄγνοιαν.

Le Pô, que les poètes ont tant célébré sous le nom d'Éridan, prend sa source dans les Alpes, à la pointe du dernier triangle dont nous avons parlé ; il prend d'abord son cours vers le midi, et se répand dans les plaines ; mais à peine y est-il entré, qu'il se détourne du côté du levant, et va, par deux embouchures, se jeter dans la mer Adriatique. Il se partage dans la plaine, mais de telle sorte, que le bras le plus gros est celui qui coule vers les Alpes et la mer Adriatique. Il roule autant d'eau qu'aucune autre rivière d'Italie, parce que tout ce qui sort d'eau des Alpes et des Apennins, du côté des plaines, tombe dans son lit, qui est fort large et fort beau, surtout lorsqu'au retour de la belle saison, il est rempli par les neiges fondues qui s'écoulent des montagnes dont nous parlions tout à l'heure. 
On remonte ce fleuve sur des vaisseaux, par l'embouchure nommée Olana, depuis la mer jusqu'à l'espace d'environ 2,000 stades. Au sortir de sa source, il n'a qu'un lit, et le conserve jusque chez les Trigaboles, où il se divise en deux. L'embouchure de l'un s'appelle Padoa, et celle de l'autre Olana, où est un port qui, pour la sûreté de ceux qui y abordent, ne le cède à aucun autre de la mer Adriatique. Ce fleuve est appelé, par les gens du pays, Bodencus.
On me dispensera bien de discuter ici tout ce que les Grecs racontent de ce fleuve, l'affaire de Phaéton et sa chute, les larmes des peupliers, la nation noire qui habite le long du fleuve, et qui porte encore le deuil de Phaéton, et en un mot tout ce qui regarde cette histoire tragique, et peut-être d'autres semblables. Une exacte recherche de ces sortes de choses ne convient pas à un préambule. Cependant nous en dirons ce qu'il faudra dans une autre occasion, ne fût-ce que pour faire connaître l'ignorance de Timée sur les lieux que nous venons de décrire.

III, 70

III, 79

DIODORE DE SICILE, V, 26-32.

Hérodien

HISTOIRE DE L'EMPIRE DEPUIS LA MORT DE MARC-AURÈLE. (livre III, XIV)

Les Bretons

7. Οὐδε γὰρ ἐσθῆτος ἴσασι χρῆσιν, ἀλλὰ τὰς μὲν λαπάρας καὶ τοὺς τραχήλους κοσμοῦσι σιδήρῳ, καλλώπισμα τοῦτο καὶ πλούτου σύμβολον νομίζοντες ὥσπερ τὸν χρυσὸν οἱ λοιποὶ βάρβαροι · τὰ δἐ σώματα στίζονται γραφαῖς ποικίλαισ καὶ ζῴων παντοδαπῶν εἰκόσιν · ὅθεν οὐδ' ἀμφιέννυνται, ἵνα μὴ σκέπωσι τοῦ σώματος τὰς γραφάς.

7. Ils ne connaissent pas, en effet, l'usage des vêtements ; mais ils portent au-dessus du ventre et autour du cou des ornements de fer qui sont pour eux une parure et un signe de richesse, comme l'or pour les autres barbares. Ils se font sur le corps, au moyen de piqûres, des peintures variées, des images d'animaux de toute espèce. Aussi ne s'habillent-ils pas pour ne point recouvrir ces peintures de leur corps.

8. Εἰσὶ δὲ μαχιμώτατοί τε καὶ φονικώτατοι, ἀσπίδα μόνην στενὴν προβεβλημένοι καὶ δόρυ, ξίφος δὲ παρηρτημένοι γυμνοῦ σώματος. Θώρακος δὲ ἤ κράνους οὐκ ἴσασι χρῆσιν, ἐμπόδιον νομίζοντες πρὸς τὴν δίοδον τῶν ἑλῶν, ἐξ ὧν τῆς ἀναθυμιάσεως καὶ παχύτητος ὁ κατ' ἐκείνην τὴν χώραν ἀὴρ ζοφώδης ἀεὶ φαίνεται. Πρὸς δὴ ταῦτα ὁ Σεουῆρος ἐξήρτυεν ὅσα συνοίσειν ἔμελλε τῷ ῾Ρωμαίων στρατῷ, λυπήσειν δὲ καὶ ἐμποδιεῖν τὴν τῶν βαρβάρων ὁρμήν.

8. Ils sont au plus haut point batailleurs et sanguinaires, n'ayant pour toute défense qu'un bouclier étroit et une pique. Ils portent en outre une épée suspendue au côté sur ce corps tout nu ; ils ne connaissent l'usage ni de la cuirasse ni du casque : ce seraient, à leurs yeux, des entraves au passage des marais. De ces marais s'élèvent des vapeurs, des exhalaisons épaisses dont l'air, en ces contrées, est souvent obscurci. Pour faire face à ces difficultés, Sévère prit toutes les mesures qui devaient être utiles à l'armée des Romains, inquiéter les barbares et entraver leur élan.

XIPHILIN

ABRÉGÉ DE L'HISTOIRE ROMAINE DE DION CASSIUS (livre LXII. II)

BOUDICCA

Βουνδουῖκα, γυνὴ Βρεττανὶς γένους τοῦ βάασιλείου, μεῖζον ἢ κατὰ γυναῖκα φρονήμα ἔχουσα. Αὕτη γὰρ συνήγαγέ τε τὸ στράτευμα ἀμφὶ δώδεκα μυριάδας ὄν, καὶ ἀνέβη ἐπὶ βῆμα ἐκ γῆς ἑλώδους ἐς τὸν ῾Ρωμαικὸν τρόπον πεποιημένον · ἦν δὲ καὶ τὸ σῶμα μεγίστη καὶ τὸ εἶδος βλοσυρωτάτη τό τε βλέμμα δριμυτάτη, καὶ τὸ φθέγμα τραχὺ εἶχε, τήν τε κόμην πλείστην τε καὶ ξανθοτάτην οὖσαν μέχρι τῶν γλουτῶν καθεῖτο, καὶ στερπὸν μέγαν χρυσοῦν ἐφόρει, χιτῶνά τε παμποίλικον ἐπεπεπόρητο. Οὕτω μὲν ἀεὶ ἐνεσκευάζετο · τότε δὲ καὶ λόγχην λαβοῦσα, ὥστε καὶ ἐκ τούτου πάντας ἐκπλήττειν, ἔλεξεν ὧδε.

Bunduica, une Brettanide de race royale, qui avait l'âme plus grande qu'une femme. Ayant rassemblé une armée d'environ douze myriades [d'hommes], elle monta sur un tribunal fait à la manière des Romains, avec de la terre de marais. Elle avait la taille haute, l'air terrible, le regard perçant ; sa voix était rude et sa chevelure, qui était très abondante et très blonde, lui descendait jusqu'au bas du dos. Elle portait un grand collier d'or et serrait sur son sein une tunique bariolée sur laquelle elle agrafait une épaisse chlamyde. C'était là son accoutrement habituel, mais alors elle avait pris une lancé pour frapper de terreur tous les assistants, et elle leur tint ce langage

TACITE, ANNALES, XIV

Boadicée

XXXV. Boadicée, montée sur un char, ayant devant elle ses deux filles, parcourait l'une après l'autre ces nations rassemblées, en protestant "que, tout accoutumés qu'étaient les Bretons à marcher à l'ennemi conduits par leurs reines, elle ne venait pas, fière de ses nobles aïeux, réclamer son royaume et ses richesses ; elle venait, comme une simple femme, venger sa liberté ravie, son corps déchiré de verges, l'honneur de ses filles indignement flétri. La convoitise romaine, des biens, était passée aux corps, et ni la vieillesse ni l'enfance n'échappaient à ses souillures. Mais les dieux secondaient enfin une juste vengeance : une légion, qui avait osé combattre, était tombée tout entière ; le reste des ennemis se tenait caché dans son camp, ou ne songeait qu'à la fuite. Ils ne soutiendraient pas le bruit même et le cri de guerre, encore moins le choc et les coups d'une si grande armée. Qu'on réfléchît avec elle au nombre des combattants et aux causes de la guerre, on verrait qu'il fallait vaincre en ce lieu ou bien y périr. Femme, c'était là sa résolution : les hommes pouvaient choisir la vie et l'esclavage."  

XXXVI. Suétonius ne se taisait pas non plus en ce moment décisif. Plein de confiance dans la valeur de ses troupes, il les exhortait cependant, il les conjurait "de mépriser ce vain fracas et ces menaces impuissantes de l'armée barbare : on y voyait plus de femmes que de soldats ; cette multitude sans courage et sans armes lâcherait pied sitôt qu'elle reconnaîtrait, tant de fois vaincue, le fer et l'intrépidité de ses vainqueurs. Beaucoup de légions fussent-elles réunies, c'était encore un petit nombre de guerriers qui gagnait les batailles ; et ce serait pour eux un surcroît d'honneur d'avoir prouvé qu'une poignée de braves valait une grande armée. Ils devaient seulement se tenir serrés, lancer leurs javelines, puis, frappant de l'épée et du bouclier, massacrer sans trêve ni relâche, et ne pas s'occuper du butin : la victoire livrerait tout en leurs mains." Telle fut l'ardeur qui éclatait à chacune de ces paroles, et l'air dont balançaient déjà leurs redoutables javelines ces vieux soldats éprouvés dans cent batailles, que Suétonius, assuré du succès, donna aussitôt le signal du combat.  

XXXVII. Immobile d'abord, et se faisant un rempart de la gorge étroite où elle était postée, la légion attendit que l'ennemi s'approchât, pour lui envoyer des coups plus sûrs. Quand elle eut épuisé ses traits, elle s'avança rapidement en forme de coin. Les auxiliaires chargent en même temps, et les cavaliers, leurs lances en avant, rompent et abattent ce qui résiste encore. Le reste fuyait ou plutôt essayait de fuir à travers la haie de chariots qui fermait les passages. Le soldat n'épargna pas môme les femmes ; et jusqu'aux bêtes de somme tombèrent sous les traits et grossirent les monceaux de cadavres. Cette journée fut glorieuse et comparable à nos anciennes victoires : quelques-uns rapportent qu'il n'y périt guère moins de quatre-vingt mille Bretons. Quatre cents soldats environ furent tués de notre côté ; il n'y eut pas beaucoup de blessés. Boadicée finit sa vie par le poison. Quand Pénius Postumus, préfet de camp de la deuxième légion, apprit le succès de la quatorzième et de la vingtième, désespéré d'avoir privé la sienne d'une gloire pareille en se refusant, contre les lois de la discipline, aux ordres du général, il se perça de son épée.  

 

Voici ce que disait AMMIEN-MARCELLIN, XV.

Collection des Auteurs latins publiés sous la direction de M. NISARD, Ammien Marcellin, Jornandès, ... , Paris Firmin Didot, 1860

Les anciens auteurs, faute de données précises, ne nous ont transmis sur l'origine des Gaulois que des notions plus ou moins incomplètes. Mais plus récemment Timagène, Grec par l'activité d'esprit comme par le langage, parvint à rassembler un grand nombre de faits longtemps perdus au milieu des livres obscurs dont il les avait tirés. Je vais m'aider de ses recherches, en y ajoutant la méthode, et en tâchant de mettre chaque chose dans son ordre et dans son jour.
D'après le rapport des contemporains, les Aborigènes de cette contrée étaient un peuple appelé Celtes, du nom d'un roi de mémoire chérie; ou Galates, du nom de la mère de ce même roi. De ce dernier nom les Grecs ont fait celui de Galles (Gaulois). Une colonie de Doriens, suivant d'autres, y était venue, à la suite du plus ancien des Hercule former un établissement sur le littoral. Selon les antiquités druidiques, la population de la Gaule n'est indigène qu'en partie, et s'est recrutée à diverses reprises par l'incorporation d'insulaires étrangers venus d'au delà les mers , et de peuplades transrhénanes chassées de leurs foyers, soit par les vicissitudes de la guerre, état permanent de ces contrées, soit par les invasions de l'élément fougueux qui gronde sur leurs côtes.
D'autres disent qu'une poignée de Troyens, échappés au sac de leur ville, et rencontrant partout les Grecs dans sa fuite, vint occuper ces régions, alors sans habitants. L'opinion soutenue par les naturels, et leurs monuments en font foi, est qu'Hercule, fils d'Amphitryon, destructeur rapide de Géryon et de Taurisque, l'un tyran de l'Espagne, l'autre de la Gaule, eut, de son commerce avec diverses femmes des plus nobles familles de ce dernier pays, un grand nombre d'enfants, dont chacun donna son nom au canton régi par ses lois. La même tradition veut qu'une émigration de Phocéens d'Asie, fuyant l'oppression d'Harpale, satrape de Cyrus, ait d'abord pris terre en Italie, et fondé la ville lucanienne de Vélia; puis soit allée avec le reste de son monde élever Marseille dans la Gaule Viennoise, établissement qui, devenu prospère, aurait, à la suite des temps, couvert le pays de nombreuses colonies.
Nous abrégeons cette revue, que trop de fidélité finirait par rendre fastidieuse. Insensiblement la civilisation s'introduisit chez ce peuple : il prit goût au culte de l'intelligence, sous l'inspiration de ses bardes, de ses eubages et de ses druides. Les bardes célébraient les grandes actions dans des chants héroïques, où se mariaient les doux accords de la lyre; les eubages interrogeaient, commentaient les sublimes secrets de la nature. Quant aux druides, leurs spéculations étaient encore d'un ordre plus élevé : formés en communautés dont les statuts étaient l'oeuvre de Pythagore, l'esprit toujours tendu vers les questions les plus abstraites et les plus ardues de la métaphysique comme le maître, ils tenaient en mépris les choses d'ici-bas, et déclaraient l'âme immortelle.

[15,10] X. Cette région, qu'à la réserve de ses cantons maritimes séparent du reste du genre humain des monts gigantesques couronnés de neiges éternelles, tient de la nature un ensemble de défense aussi complet que si l'art s'en fût mêlé. Baignée au midi par les mers Tyrrhénienne et Gallique, vers le nord elle oppose aux barbares le cours du Rhin pour barrière. Elle a l'Océan et les Pyrénées pour rempart au couchant; et, du côté où le soleil se lève, la masse imposante des Alpes Cottiennes. C'est là que le roi Cottis tint seul contre nous si longtemps, protégé par ses impraticables défilés et par ses rocs inaccessibles. Ce prince toutefois rabattit plus tard de sa fierté; et ce fut lui qui, devenu l'ami de l'empereur Octavien, par un retour d'affection mémorable, et après des efforts inouïs, ouvrit plus loin, au travers des vieilles Alpes, ces routes si commodes qui en abrègent le trajet. Je donnerai une autre fois sur cette opération les renseignements que j'ai pu recueillir.
Dans la chaîne des Alpes Cottiennes qui s'appuie à la ville de Suse, se trouve une crête presque impossible à franchir. La montée, pour le voyageur qui vient de la Gaule, s'en opère facilement sur un plan peu incliné; mais pour descendre par le versant opposé on trouve une pente et des précipices dont la vue seule fait frémir. C'est surtout au printemps, quand la température adoucie détermine le dégel et la fonte des neiges, que sur une chaussée étroite, bordée des deux côtés par des précipices, et coupée de fondrières masquées par une accumulation de frimas, il faut voir chanceler, trébucher piétons, bêtes de charge et voitures. On n'a encore trouvé qu'un expédient pour diminuer les chances de destruction : c'est d'assujettir les véhicules au moyen de gros câbles qu'on retient en arrière à force de bras, ou avec des attelages de boeufs; et, une fois enrayés de la sorte, de les convoyer un peu plus sûrement jusqu'au pied de la côte. Voilà comme les choses se passent au printemps.
En hiver, la scène change : le sol, durci et comme poli par la gelée, n'offre partout qu'une surface glissante où l'on peut à peine tenir pied; et de profonds abîmes, auxquels une croûte de glace donne l'apparence perfide de la plaine, engloutirent plus d'une fois les imprudents qui osèrent s'y risquer. Aussi, pour le salut des voyageurs, les habitants du pays, à qui les passes sont connues, ont-ils soin de leur jalonner la route la plus sûre par de longues perches fichées en terre. Mais que, renversés par les éboulements, ces pieux viennent à disparaitre sous la neige, la traversée devient bien dangereuse, même en prenant pour guides les paysans des environs. Ce pas franchi, on marche en plaine l'espace de sept milles jusqu'à la station de Mars. Là se dresse devant vous un pic plus élevé, plus difficile encore à gravir, et dont le point culminant a pris le nom de la Dame, depuis l'accident arrivé à une femme de qualité. De là on ne fait plus que descendre en pente douce jusqu'au fort de Virgance. Le tombeau du petit souverain constructeur des routes dont nous avons parlé se voit sous les murs de Suse. Un double motif de vénération s'attache à sa mémoire : il gouverna son peuple avec équité, et, par son alliance avec nous, lui assura la paix à toujours.
La route dont nous venons de parler est effectivement la plus courte, la plus directe et la plus fréquentée; mais antérieurement il en avait été ouvert d'autres à diverses époques. La plus ancienne est l'œuvre de l'Hercule thébain; et ce travail fut à peine un temps d'arrêt pour le héros, lorsqu'il courait donner la mort à Géryon et à Taurisque. Cette voie longe les Alpes maritimes, auxquelles Hercule donna le nom d'AIpes Grecques. La citadelle et le port de Monaco sont encore d'éternels monuments de son passage dans ces contrées. Cette chaîne, plusieurs siècles après, prit le nom d'Alpes Poenines : voici à quelle occasion. Publius Cornélius Scipion, père du premier Africain, chargé de porter secours à Sagonte, si célèbre par sa constance et par ses malheurs, et dont le siège était alors vivement poussé par les forces puniques, faisait voile vers l'Espagne avec une flotte montée par un corps de troupes considérable. Mais déjà les armes de Carthage avaient prévalu; le désastre était consommé : Scipion ne pouvait se flatter d'atteindre par terre Annibal, qui avait déjà passé le Rhône, et qui était depuis trois jours en pleine marche vers l'Italie. La mer lui offrait un trajet plus court. Par une navigation rapide, il revint se placer en observation devant Gênés, ville de la Ligurie, se tenant prêt dans l'occasion à fondre sur l'ennemi au moment où il déboucherait en plaine, harassé par les difficultés de la route. La prévoyance de Scipion ne s'en tint pas là : il envoya son frère contenir en Espagne l'armée d'Asdrubal, qui menaçait Rome d'une double invasion. Mais Annibal fut averti de la présence de Scipion par des transfuges; et comme il n'avait pas moins de décision dans l'esprit que de finesse, il prit à Turin des guides qui le conduisirent dans une autre direction, par le Tricassin et l'extrême frontière des Voconces, jusqu'aux défilés des Tricores. Là il s'ouvrit un passage où nul ne s'en était frayé avant lui, en perçant une énorme roche, amollie au moyen d'un grandfeu et de vinaigre qu'il y avait fait répandre; puis, traversant le lit vagabond et dangereux de la Durance, il envahit soudain les campagnes d'Étrurie. Mais c'en est assez sur les Alpes; parlons du reste de la Gaule.
[15,11] XI. Il paraît qu'en remontant à une époque reculée, où la Gaule barbare était tout à fait inconnue, on trouve le pays divisé entre trois races bien distinctes, les Celtes où Gaulois, les Aquitains et les Belges; toutes trois différentes de langage, de coutumes et de gouvernement. Entre les Aquitains et les Celtes ou Gaulois, la limite naturelle est la Garonne, fleuve qui prend naissance dans les Pyrénées, et baigne des villes nombreuses avant de se perdre dans l'Océan. La Seine et la Marne, deux rivières d'importance égale, séparent ces dernières des Belges. Elles traversent la Gaule Lyonnaise, enferment par leur jonction la forteresse des Parisiens qu'on appelle Lutèce, puis vont, réunies dans un même lit, se jeter dans la mer, non loin de la ville à laquelle Constance Chlore a donné son nom.
De ces trois nations, celle des Belges passait pour la plus vaillante aux yeux de nos pères; ce qui tient à leur position géographique, qui les mettait d'un côté en dehors du contact de la civilisation et des raffinements qu'elle procure, et, de l'autre, les tenait en collision permanente avec les peuples germaniques d'outre-Rhin. Les Aquitains au contraire, par le rapprochement des distances, et la facilité d'accès de leurs côtes, appelaient en quelque sorte les importations du commerce. Aussi furent-ils de bonne heure amollis, et n'opposèrent qu'une faible résistance à la domination romaine.
Quand la Gaulle eut, de guerre lasse, fait sa soumission au dictateur César, sa superficie entière fut divisée en quatre gouvernements, savoir, celui de la Gaule Narbonnaise, comprenant la Lyonnaise et laViennoise; celui de l'Aquitaine, qui embrassait tous les peuples du nom d'Aquitains, et deux autres gouvernements par lesquels étaient respectivement régies les Germanies tant supérieure qu'inférieure, et le pays des Belges.
Son organisation, plus compliquée aujourd'hui, se compose, à partir du couchant, des provinces ci-après : la seconde Germanie, qui possède dans son sein les deux vastes et populeuses cités de Tongres et d'Agrippine; la première Germanie, où l'on rencontre, entre autres villes municipales, Moguntiacum, Vangion , les Nemètes et Argentoratum; célèbre depuis par la défaite des barbares. Vient ensuite la première Belgique, qui s'enorgueillit de Metz et de Trèves, illustres résidences de souverains; la seconde Belgique, limitrophe de la première, où se trouvent Amiens, ville du premier ordre, Chàlons (sur Marne) et Reims. Au pays des Séquanais on compte Besançon et Rauraque, qui le cèdent à peu d'autres villes. Lyon, Châlons (sur Saône), Sens, Bourges et enfin Autun, par la splendeur séculaire de leurs murs, font l'ornement de la première Lyonnaise. La seconde étale avec orgueil Rouen; Tours, Mediolanum et les Tricasses. Les Alpes Grecques et Paenines, sans parler de cités plus obscures, possèdent Avenche, déserte aujourd'hui, mais ville de renom jadis, ainsi que l'attestent encore de nos jours les ruines de ses édifices. Toutes ces provinces et cités sont la fleur de la Gaule. Dans l'Aquitaine, bordée par les Pyrénées et par la mer qui baigne l'Espagne, la première Aquitanique se fait remarquer par la grandeur de ses villes, parmi lesquelles il faut citer de préférence Bordeaux, les Arvernes, Saintes et Poitiers. Auch et Bazas sont l'honneur de la Novempopulanie. Euse, Narbonne et Toulouse priment entre les cités de la Narbonnaise. La Viennoise n'est pas moins fière de la beauté de ses villes, dont les plus remarquables sont Vienne elle-même, dont elle tire son nom; puis Arles et Valence. II faut y joindre Marseille, puissante auxiliaire de Rome, suivant l'histoire, en plus d'une circonstance critique. Non loin de là sont Saluces, Nice, Antipolis et les Staochades. Puisque l'enchaînement de mon sujet m'oblige à parler de ces contrées, taire un fleuve aussi renommé que le Rhône serait une impardonnable omission. Le Rhône, au sortir des Alpes Poenines, précipite impétueusement vers les basses terres une masse d'eau considérable, et, vierge encore de tout tribut, roule déjà dans son lit à pleins bords. Il se jette ensuite dans un lac appelé Léman, qu'il traverse sans se mêler à ses ondes, et sillonnant à la sommité cette masse comparativement inerte; s'y fraye de vive force un passage. De là, sans avoir rien perdu de ses eaux, il passe entre la Savoie et le pays des Séquanais, poursuit son cours, laissant à sa droite la Viennoise, à sa gauche la Lyonnaise, et forme brusquement le coude après s'être associé l'Arar, originaire de la première Germanie, qu'on appelle dans ce pays la Saône, et qui perd son nom dans cette rencontre.
C'est ici que commence la Gaule, et les distances se mesurent, à partir de ce point, non plus par milles, mais par lieues. Grossi de cet affluent, le Rhône peut alors recevoir les plus gros navires, ceux même qui ne naviguent ordinairement qu'à voiles. Arrivé enfin au terme marqué à sa course par la nature, il verse son onde écumante dans la mer des Gaules par une vaste embouchure, près de ce qu'on nomme les Échelles , à dix-huit milles d'Arles environ. Mais c'est assez de détails géographiques; parlons de la conformation physique et du caractère des habitants.
[15,12] XII. Les Gaulois sont en général de haute taille; ils ont le teint blanc, la chevelure blonde, le regard farouche et effroyable. Leur humeur est querelleuse et arrogante à l'excès. Le premier venu d'entre eux, dans une rixe, va tenir tète à plusieurs étrangers à la fois, sans autre auxiliaire que sa femme, champion bien autrement redoutable encore. Il faut voir ces viragos, les veines du col gonflées par la rage, balancer leurs robustes bras d'une blancheur de neige, et lancer, des pieds et des poings, des coups qui semblent partir de la détente d'une catapulte. Calmes ou courroucés, les Gaulois ont presque toujours dans la voix des tons menaçants et terribles. Ils sont universellement propres et soigneux de leur personne. On ne voit qui que ce soit, homme ou femme, en ce pays, en Aquitaine surtout, porter des vêtements sales et déchirés; rencontre si commune partout ailleurs.
Le Gaulois est soldat à tout âge. Jeunes, vieux courent au combat de même ardeur; et il n'est rien que ne puissent braver ces corps endurcis par un climat rigoureux et par un constant exercice. L'habitude locale en Italie de s'amputer le pouce pour échapper au service militaire, et l'épithète de "murcus" (poltron) qui en dérive, sont choses inconnues chez eux. Ils aiment le vin de passion, et fabriquent pour y suppléer diverses boissons fermentées. L'ivresse, cette frénésie volontaire, comme l'a définie Platon, y est l'état habituel de bon nombre d'individus de la basse classe, qui ne font qu'errer çà et là dans un abrutissement complet; ce qui justifie le mot de Cicéron dans son plaidoyer pour Fonteius : "Les Gaulois vont mettre de l'eau dans leur vin". Autant vaudrait, selon eux, y mettre du poison.
La partie de cette région qui avoisine l'Italie a passé sans de grands efforts sous le joug romain. Son indépendance menacée en premier lieu par Fulvius, puis ébranlée fortement dans une suite de petits combats soutenus contre Sextius, fut tout à fait abattue par Fabius Maximus; avantage que ce dernier n'obtint cependant que par la réduction des Allobroges, nos plus opiniâtres adversaires dans cette lutte, et qui lui valut un surnom. Mais ce ne fut qu'après dix ans de campagnes, comme nous l'apprend Salluste, et diverses alternatives de succès et de revers, que l'universalité de la Gaule; sauf les cantons rendus inaccessibles par des marais, fut enfin soumise à César, et annexée à l'empire par un lien désormais indissoluble. Mais cette digression nous éntratue trop loin du sujet; hâtons-nous d'y rentrer.

ARRIEN

Ἐνταῦθα ἀφίκοντο πρέσβεις ὡς Ἀλέξανδρον παρά τε τῶν ἄλλων ὅσα αὐτόνομα ἔθνη προσοικεῖ τῷ Ἴστρῳ καὶ παρὰ Σύρμου τοῦ Τριβαλλῶν βασιλέως. καὶ παρὰ Κελτῶν δὲ τῶν ἐπὶ τῷ Ἰονίῳ κόλπῳ ᾠκισμένων ἧκον. μεγάλοι οἱ Κελτοὶ τὰ σώματα καὶ μέγα ἐπὶ σφίσι φρονοῦντες. πάντες δὲ φιλίας τῆς Ἀλεξάνδρου ἐφιέμενοι ἥκειν ἔφασαν. καὶ πᾶσιν ἔδωκε πίστεις Ἀλέξανδρος καὶ ἔλαβε. τοὺς Κελτοὺς δὲ καὶ ἤρετο, ὅ τι μάλιστα δεδίττεται αὐτοὺς τῶν ἀνθρωπίνων, ἐλπίσας ὅτι μέγα ὄνομα τὸ αὐτοῦ καὶ ἐς Κελτοὺς καὶ ἔτι προσωτέρω ἥκει καὶ ὅτι αὐτὸν μάλιστα πάντων δεδιέναι φήσουσι. τῷ δὲ παρ' ἐλπίδα ξυνέβη τῶν Κελτῶν ἡ ἀπόκρισις. οἷα γὰρ πόρρω τε ᾠκισμένοι Ἀλεξάνδρου καὶ χωρία δύσπορα οἰκοῦντες καὶ Ἀλεξάνδρου ἐς ἄλλα τὴν ὁρμὴν ὁρῶντες ἔφασαν δεδιέναι μήποτε ὁ οὐρανὸς αὐτοῖς ἐμπέσοι, Ἀλέξανδρόν τε ἀγασθέντες οὔτε δέει οὔτε κατ' ὠφέλειαν πρεσβεῦσαι παρ' αὐτόν. καὶ τούτους φίλους τε ὀνομάσας καὶ ξυμμάχους ποιησάμενος ὀπίσω ἀπέπεμψε, τοσοῦτον ὑπειπὼν ὅτι ἀλαζόνες Κελτοί εἰσιν.

Là, il reçoit les envoyés de plusieurs peuples libres des rives de l'Ister, de Syrmus, roi des Triballiens, et des Celtes qui bordent le golfe Ionique. Les Celtes ont une haute stature, et un grand caractère ; ils venaient rechercher l'amitié d'Alexandre. La foi fut donnée et reçue. Alexandre demanda aux Celtes ce qu'ils craignaient le plus au monde, persuadé que son nom s'étendait dans leurs contrées et au-delà, et qu'il' était pour eux l'objet le plus redoutable. Il fut déçu dans cette pensée : en effet, habitants des lieux d'un accès difficile, éloignés d'Alexandre qui tournait ailleurs l'effort de ses armes, ils répondirent qu'ils ne craignaient que la chute du ciel. Alexandre les congédia, en leur donnant les titres d'amis et d'alliés, et se contenta d'ajouter : « Les Celtes sont fiers. »

Arrien, Anabase, I, 4