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Extraits des auteurs grecs concernant la géographie et l'histoire des Gaules

texte et trad. nouv. publ. par Edm. Cougny et Henri Lebègue

LIVRE V

EUSÈBE PAMPHILE.

BIOGRAPHIE

1° Chroniques. EésebÛou toè PamfÛlou XronikÇn bibl. b', dans la Scriptorum, veterum nova collectio, e vaticanis codicibus edita, t. VIII, typis vaticanis, M DCCC XXXIII, in-4°; Ang. Mai.
2° A. Histoire ecclesiastique et Vie de Constantin. EésebÛou toè PamfÛlou ƒEkklhsiastik¯ „IstorÛa bibl. i'. Eusebii Pamphili Ecclesiasticæ Historiæ libri X.
B.
Toè aétoè EÞw tñn bÛon toè MakarÛou KvnstantÛnou toè basil¡vw bil. d'. - Ejusdem de vita Imperatoris Constatini libri IV. - Henricus Valesius Graecum textum, collatis IV mss. codicibus, emendauit, latine vertit, et adnotationibus illustrauit. - Noua editio ab auctore recognita et aucta. - Parisiis, typis Petri le Petit, etc. M. DC. LXXVIII, in-f°.
C. Histoire de l'Église, écrite par Eusèbe, évêque de Césarée, traduite par Monsieur Cousin, président en la Cour des Monnoies. Dédiée au Roi. Tome I. - Paris, chez Damien Foucault, etc., M. DC. LXXXVI, in-12.
D. Eusebii Cæsariensis Opera recognovit Guilielmus.Diridorfius., vol. IV. - Historiæ ecclesiasticæ libri I-X. Lipsiæ, Teubner, M DCCC LXXI.
3° Préparation évangélique.
A.
EésebÛou toè PamfÛlou ¤pistkñpou t°w ¤n PalaistÛnú KaisareÛaw proparaskeu¯ eéaggelik® .Eusebii Pamphili Caesareæ Palæstinæ episcopi Præparatio euangelica. Franciscus Vigerus, Rothomagensis societ. Jesu presbyter ex mss. codd..et laudatis ab ipso Eusebio scriptoribus recensait, Latine vertit, notis illustrauit. Accesserunt indices necessarii. - Parisiis, M. DC.  XXVIII, in-f °.
B. Eusebii Caesariensis Opera. Recognovit Guilielmus dorfius. Vol.. III, Praeparationis evangelicæ. - Lipsiæ, M DCCC LXVII, in-8°.
C. La Préparation évangélique, traduite du grec d'Eusèbe Pamphile, évêque de Césarée en Palestine, dans le IVe siècle de l'ère chrétienne, avec des notes critiques, historiques et philologiques, par M. Séguier de Saint-Brisson, membre de l'Institut (Académie des Inscriptions), 2 vol. in-8°. Paris, Gaumefrères, 1846.
OLYMPIODORE.
(Extraits des XXII livres ou discours historiques dans la Bibliothèque de Photius.)

 

EUSÈBE PAMPHILE (01).

CHRONIQUES.

Livre premier.

XXXVIII, 5.... Ptolémæus, fils de Lagus... surnommé Céraunus cherche à s'emparer de la Macédonie. Il meurt dans un combat contre les Galls...
XXXVIII, 5. Ptolémæos, fils de Lagos... qui avait pour surnom Céraunos... régna lui-même sur les Macédones : il fut tué dans une guerre contre les Galates (Gaulois).
XL, 8. Du vivant même de Séleucus Gallinicus, Antiochus [Hiérax], son frère puîné, ... se servit enfin même des Galls comme auxiliaires...
10. Bien plus, il envoyait des généraux contre Seleucus ; au moment où les ministres de ses plaisirs le livrèrent aux barbares, il s'échappa de leurs mains, et se sauva avec une faible escorte à Magnésie.
11.Séleucus (Céraunus), après un règne de trois ans dans son pays, est tué traîtreusement en Phrygie par le Gall Nicanor, vers la première année de la cent trente-neuvième olympiade.
XLIX. CCLIII Olympiade (02).
1. Sous les consuls susdits (Perpetuus et Cornelius), Alexandre (Sévère) fut tué par son armée, alors qu'il était dans sa tente, à Moguntiacum (Mayence) ; il était âgé de trente ans; sa mère Mammaea, qui était avec lui, fut, dans cette tente même, étranglée avec un lacet.
CCLIII Olympiade. Sous les susdits consuls (Perpetuus et Cornelius), fut égorgé par son armée Alexandre Auguste, tandis qu'il était dans sa tenté, à Mongontacum; il avait trente ans. Sa mère Mammaea était auprès de lui; on l'étrangla avec une corde, à l'intérieur de la tente.
CCLVII Olympiade, 4. Décius Caesar et Décius son fils, consuls. Décius lui-même, partant pour aller porter la guerre chez les Francs, est tué par un des grands de l'empire avec son fils à Abyrte (03) : il était âgé de soixante ans.
CCLVII Olymp. 4. Conss. Décius et son fils Décius. Le même Décius partait en guerre contre les Francs; à son départ, il fut égorgé avec son fils par un de ses lieutenants, à Abyrte : il avait soixante ans.

Livre second.

Canon chronologique (04).

Olymp. 46, an de Rome 160, fondation de Massilie.
Olymp. 97, 3, an de R. 364. L'an XVe du règne d'Artaxerxès, les Galls Sénons brûlèrent Rome, à l'exception du Capitole.

Les Galates ou Celtes s'emparèrent de Rome, à l'exception du Capitole
.
Olymp. 108, 1, an de R. 402. Les Romains sont vainqueurs des Galls.
Olymp.122, 3, an de R. 462. Les Romains sont vainqueurs des Galls et des Tyrrhènes. 
Les Romains vainquirent les Celtes et les Tyrrhènes. 
Olymp. 138, 3, an de R. 526. Quarante mille Galls environ sont taillés en pièces par les Romains.

Les Romains tuent aux Galls quarante myriades d'hommes
.
Olymp. 150 3, an de R. 576. Statilius Cæcilius devient célèbre comme poète comique; il était Gall insubre de nation, et avait été d'abord camarade de tente d'Ennius. Quelques-uns disent qu'il était de Médiolanum. Il mourût l'année qui suivit la mort d'Ennius et fut enterré près du Janicule.
Olymp. 153, 3, an de R. 586. Les Romains, après avoir tué Persée, - roi des Macédones, - et détruit ce royaume, rendirent libres par décret les Macédones, les Illyrii et les Galates.
Olymp. 157, 4, an de R. 603. Oppius conquiert les Galls

Oppius soumet les Celtes.

Olymp. 163, 3, an de R. 627. Arvernes, fameuse ville de la Gallia, est prise ainsi que son roi Vituitus.
Olymp. 165, 4, an de R. 635. Une colonie est conduite à Narbone.
Olymp. 169, 2, an de R. 649. Deux cent mille Teutons et Ambrons sont taillés en pièces à Aquae Sextiae; quatre-vingt mille sont faits prisonniers par Marius avec Teutomode leur chef.
Olymp. 169, 3, an de R. 650. C. Marius, consul pour la cinquième fois, est vainqueur des Cimbres près de l'Éridan ; il triomphe de ce peuple avec Catulus.
Olymp. 174, 4, an de Rome 671, P. Varron naît à Atax, bourgade de la province Narbonaise ; dans la suite, âgé de trente-cinq ans, il étudia les lettres grecques avec la plus grande ardeur.
Olymp. 181, 1, an de R. 696. M. Callidius devient célèbre comme orateur; plus tard, dans la guerre civile, ayant embrassé le parti de Caesar, tandis qu'il gouvernait la Gallia togata, il mourut à Placentia.
Olymp. 181, 2, an de R. 697. Caesar passe le Rhin et ravage la Germanie.

Caesar, ayant passé le Rhin dompte les Germains
.
Olymp. 182, 3, an de R. 703. Caesar conquiert les Germains et les Galls.

Caesar subjugue les Germains et les Galls.

Olymp. 189, 1 an de R. 728. Munatius Plancus, disciple de Cicéron, se fait un nom comme orateur ; étant gouverneur de la Gallia comata, il fonda Lugdunum.
Olymp. 189, 2, an de R. 729. Auguste soumet à un tribut la Calabrie (lis. la Cantabrie) et les Galls.

Auguste Caesar rend tributaire la Calabrie (lis. la Cantabrie) et les Galates (Gaulois).

Marcus Lollius réduit la Galatie en province romaine. Lollius Marcus annexe la Galatie à l'empire romain. 
Olymp. 190, 3, an de R. 734. Les Germains reprennent les armes; ils sont soumis par M. Lollius.

Lollius Marcus subjugue les Germains qui s'étaient révoltés.

Olymp. 192, 4, an de R. 743. Tibère ravage la Germanie; il est proclamé imperator.

Tibère, ayant défait les Germains, est proclamé imperator.

Olymp. 198, 3, an de R. 765, de J.-C. 14. Archélaus, la neuvième année de son règne, est relégué dans la ville de Vienne.
Archélaos, roi des Judaei, après neuf ans de règne, est relégué par les Romains dans la ville de Vienne, en Galatie (Gaule).
Olymp. 202, 1, an de R. 781, de J.-C. 29. Votiénus Montanus, orateur de Narbone, meurt dans les îles Baléares, où il avait été relégué par Tibère.
Olymp. 205, 1, an de R. 792, de J.-C. 42. Celui-ci (l'empereur Claude) est l'oncle paternel de Drusus qui a un monument près de Magontia (05).
Olymp. 206, 1, an de R. 797, de J.-C. 45. Claudius triomphe des Britans, et annexe à l'empire romain les îles Orcades.

Claudius triomphe des Brettans.

Claudius Quirinalis, rhéteur d'Arélatè (06), enseigne à Rome avec une rare distinction.
Domitius Afer, de Némause (07), se fait un nom illustre comme orateur ; plus tard, sous le règne de Néron, il meurt dans un repas où il avait trop mangé.
Olymp. 209, 1 , an de R. 809, de J.-C. 57. Statius Surculus, de Tolose, devient célèbre en Gallie par son enseignement de la rhétorique.
Olymp. 211, 2, an de R. 817, de J.-C. 66. Deux provinces seulement sont formées sous Néron, le Pont Polémoniaque et les Alpes Cotties, après la mort du roi Cottius.
Olymp. 214, an de R. 829, de J.-C.77. Gabinius, très célèbre rhéteur, enseigne dans les Gallies.
Olymp. 217, 3, an de R. 843, de J.-C. 91. Domitianus, triomphe des Daces et des Germains.

Dométianus triomphe des Daces et des Germains.

Olymp. 219, 2, an de R. 850, de J.-C. 98. Trajan est fait empereur à Agrippina (08), dans les Gallies.
Olymp. 222, 2, an de R. 862, de J.-C. 110. Trois cités de la Galatie sont renversées par un tremblement de terre.

Trois villes de la Galatie sont renversées par un tremblement de terre.

Olymp. 236, 1, an de R. 919, de J.-C. 168. Un grand nombre de chrétiens souffrent en, Gallie une mort glorieuse : leurs noms sont arrivés jusqu'à nous dans des poèmes qui leur ont été, consacrés.

Dans les Gallies, plusieurs souffrirent (ou combattirent) (09) légitimement pour le Christ : leurs martyres ont été relatés par écrit pour être transmis à la mémoire de la postérité.

Olymp. 244, 1, an de Rome 949, de J.-C. 197. La question se pose, entre les évêques d'Asie, de savoir si, conformément à la loi de Moïse, la pâque doit être célébrée le quatorzième jour du mois. Victor, évêque de Rome... et Irénée de Lugdunum (10)... exposent l'opinion qui leur paraît la plus probable dans des lettres dont le souvenir est venu jusqu'à nous.
Olymp. 246, 3, an de R. 959, de J.-C. 207. Clodius Albinus, qui s'était fait Caesar en Gallie, est tué près de Lugdunum. Sévèrus alors transporte la guerre en Britannie, et, pour mieux défendre des incursions des barbares les provinces reconquises, il fait un mur de 122 (al. 132) mille pas, d'une mer à l'autre: Une grande multitude de Pictes y périt.

Sévèrus, de retour à Rome, extermine près de la ville des Lugdones Albinus, qui avait usurpé l'empire.

Olymp. 247, 4, an de R. 964, de J.-C. 216. Sévère meurt à Éboracum (11), en Britannie.

Sévèrus, de retour en Bretannie, y meurt.

Olymp. 254, 1, an de R. 989, de J.-C. 237. Alexandre est tué à Moguntiacum (12) dans une émeute militaire.

Alexandre est égorgé à Mogontiacum.

Olymp. 261, 1, an de R. 1016, de J.-C. 265. Les Alamans, après avoir ravagé les Gallies, passent en Italie...
Olymp. 262, 2, an de R. 1021, de J.-C. 270. Les Gallies reconquises par Posthumus, Victorius et Tetricus.
Olymp. 263, 2, an de R. 1024, de J.-C. 271. Aurélianus, à qui Tetricus livre son armée près de Catalauni, reprend les Gallies.

Aurelianus... soumet la Gallie.

Olymp. 264, 4, an de R. 1031, de J.-C. 279. Probus, avec une grande valeur, remet en leur état les Gallies occupées par les Barbares.
Olymp. 265, 3, an de R. 1034, de J.-C. 283. Probus permet aux Galls et aux Pannonii d'avoir des vignes ; il donne aux provinciaux pour les cultiver l'Almée et le Mont d'Or plantés par les soldats.
Olymp. 266, 3, an de R. 1038 de J.-C. 287. Carus de Narbone... périt frappé de la foudre.

Carus, le Galate (Gaulois) frappé de la foudre est anéanti du coup avec sa tente.
Olymp. 267, 2, an de R. 1011, de J.-C. 290. Dioclétianus associe à l'empire Herculius Maximianus, lequel, après avoir écrasé des masses de paysans qui s'étaient donné le nom de Bacaudes (al. Bagarides), rend la paix aux Gallies.
Olymp. 267, 4, an de R. 1043, de J.-C. 292. Carausius (al. Causarius) prend la pourpre et s'empare des Britannies.
Olymp. 270, 3, an de R. 1054, de J.-C. 303. Après dix ans, les Britannies sont reprises par le préfet du prétoire, Asclépiodote.60 mille Alamans sont taillés en pièces près de Lingons par Constantius Caesar.
Olymp. 272, 2, an de R. 10.1, de J.-C. 310. Constantius-, la seizième année de son règne, meurt à Eboracum, en Britannie.

DU MÊME AUTEUR.

HISTOIRE ECCLÉSIASTIQUE (13).

Discours III.

I, 4 (0). Pierre paraît, avoir prêché les Juifs dispersés dans le Pont, dans la Galatie, la Bithynie, la Cappadocie et l'Asie...
IV, 2. D'après le dire de Pierre, on voit en quelles provinces, annonçant aux circoncis la bonne nouvelle du Christ, il leur transmit la parole du Nouveau Testament ; oui, cela est clair d'après l'épître qui, nous l'avons dit, lui est généralement attribuée, et qui est écrite aux Hébreux dispersés dans le Pont, la Galatie, la Cappadocie, dans l'Asie et la Bithynie (14)...  8. Des autres compagnons de Paul, Criscens fut, au témoignage de Paul lui-même, envoyé dans les Gallies (15).

Discours V.

I, 1 . C'est dans la Gallie que se forma la lice pour les combats que j'ai indiqués : cette contrée a des métropoles réputées insignes et, en comparaison des autres, les premières du pays : Lugdunum et Vienne. Toutes les deux sont traversées par le Rhodan, large fleuve qui baigne de ses eaux toute la contrée d'alentour. 2. Leurs très illustres églises envoyèrent à celles d'Asie et de Phrygie l'écrit concernant leurs martyrs (16) et racontant ce qui s'était fait chez elles, de cette manière. 3. J'en mettrai ici les paroles mêmes :« Les serviteurs du Christ habitant Vienne et Lugdunum en Gallie, aux frères d'Asie et de Phrygie qui ont la même foi et la même espérance en la rédemption, paix, grâce et gloire de la part de Dieu le père et du Christ Jésus, notre Seigneur. » 4. Puis vient la fin de ce préambule, et ils commentent ensuite leur récit en ces termes : « La grandeur de notre affliction, la fureur des gentils contre les, saints, toutes les souffrances de nos bienheureux martyrs, nous ne saurions les dire avec exactitude, et il n'est pas possible de les comprendre dans un écrit. 5. L'adversaire (17) est tombé sur nous de toute sa force, prélude des violences qui signaleront impunément sa venue (18) : il a eu recours à tout pour habituer ses ministres, pour les exercer contre les serviteurs de Dieu. Nous nous sommes vu exclure des maisons privées (19), des bains, de la place publique ; bien plus, défense générale fut faite à quiconque d'entre nous de se montrer en quelque lieu que ce fût. 6. Mais, pour conduire, notre armée, nous avions la grâce de Dieu qui sauva les faibles, qui rangea en face [de l'ennemi] des hommes, solides colonnes, capables par leur fermeté d'attirer sur eux toute la fougue du méchant, qui marchèrent à sa rencontre, bravant toute espèce d'opprobres et de peines, et qui, comptant pour peu de chose la plupart de ces misères, coururent au Christ, et montrèrent que les souffrances du temps présent ne sont rien au prix de la gloire qui se doit révéler en nous. 7. D'abord, ils ont supporté généreusement tout le tas d'outrages dont on peut être accablé par un peuple ameuté ; d'être hués, frappés, traînés, mis en pièces, assaillis à coups de pierres, emprisonnés; traités en un mot comme une populace sauvage traite d'habitude ceux gu'elle hait, et ceux qui lui font la guerre. 8. Amenés sur la place publique par le tribun des soldats, par les autorités civiles (20), interrogés devant toute la populace, ils avouent, ils sont enfermés dans un cachot jusqu'à l'arrivée du gouverneur (21). 9. Ils sont ensuite amenés devant le gouverneur qui use envers nous de toute sorte de cruauté : alors Vettius Epagathus, un de nos frères, coeur plein de charité envers Dieu et envers le prochain, qui s'était fait un genre de vie si sévère que, malgré sa jeunesse, on lui rendait le même témoignage qu'à Zacharie déjà vieux (22) ; qui avait marché dans tous les commandements et les justes préceptes du Seigneur, sans reproche, et toujours au service du prochain sans hésitation, rempli du zèle de Dieu, et tout enflammé de son esprit, cette âme si grande ne supporta pas une si brutale façon de procéder contre nous ; son indignation fut extrême : il demanda à être entendu comme défenseur de ses frères et soutint qu'il n'y avait en nous ni athéisme ni impiété. 10. Ceux qui entouraient le tribunal vociféraient contre lui, car il était fort connu, et le gouverneur, ne tolérant pas la requête si juste qu'il présentait, lui demanda seulement s'il était chrétien. Sur l'aveu qu'il en fit d'une voix éclatante, il fut pris lui-même pour être enrôlé parmi les martyrs, ayant gagné le titre d'avocat des Chrétiens, mais. ayant en lui-même l'avocat [par excellence], l'Esprit, plus que ne l'avait eu Zacharie, qu'il montra dans la plénitude de sa charité, trouvant tout simple d'exposer même sa vie pour la défense de ses frères. Car il fut un véritable disciple du Christ; suivant l'agneau partout où l'appelait ce doux guide. 11. Dès lors les autres furent aussi marqués et choisis (23), et ceux-là devinrent au grand jour et d'un bel élan les premiers martyrs qui de tout coeur firent leur profession de foi. On en vit d'autres aussi qui ne se trouvèrent pas prêts, pas aguerris, mais encore faibles et ne pouvant suffire à l'effort d'un grand combat. Ils furent au nombre de dix environ ceux qui avortèrent ainsi, et ils nous causèrent un grand chagrin, une immense douleur ; car ils rompirent l'élan généreux des autres qui, n'avaient pas encore été pris, et qui, bien qu'avec toute sorte de peines, assistaient les martyrs sans les quitter jamais. 12. Alors certes nous fûmes grandement consternés, dans l'incertitude de la confession, non pas que nous eussions peur des tourments qu'on nous infligeait, mais en considérant la fin, et redoutant quelques chutes. 13. On en prenait bien chaque jour de très dignes pour remplir le nombre de ceux [qui étaient tombés], et l'on ramassa ainsi les plus actifs des deux églises; ceux qui avaient le plus fait pour les établir. 14 . Mais on prenait aussi des Gentils, serviteurs de nos frères, parce que le gouverneur avait ordonné par un acte public de nous rechercher tous. [Ces malheureux], au milieu des embûches de Satan, craignant les tourments qu'ils voyaient souffrir aux saints, mentirent contre nous, à l’instigation des soldats, et nous imputèrent des repas de Thyeste, des unions comme celle d'Oedipe, et toutes les abominations qu'il ne nous est permis ni de penser ni de dire, ni même de croire, à supposer que jamais rien de tel se soit passé parmi les hommes. 15. Et cela , se dit partout, et partout on devint si féroce à notre égard que ceux qui, auparavant, par des raisons de parenté, nous montraient de la modération, étaient alors dans une grande exaspération et frémissaient de rage contre nous. Et ainsi s'accomplissait cette parole de Notre Seigneur : « Le temps viendra où quiconque vous tuera croira servir Dieu. » .16. Depuis lors tout récit est au-dessous des tourments qu'endurèrent nos saints martyrs, Satan se faisant un point d'honneur de leur entendre dire quelque blasphème. 17. Portée à son comble, toute la colère de la foule, du gouverneur et des soldats se déchargea sur le diacre Sanctus, de Vienne, et sur Maturus, simple néophyte (24), mais généreux champion, sur Altalos, natif de Pergame, qui fut toujours pour ceux d'ici une colonne, une solide assise, sur Blandine par qui le Christ fit bien voir que ce les hommes regardent : comme vil, laid, méprisable, est devant Dieu jugé digne d'une grande gloire, à cause de l'amour dont il est l'objet, amour qui se montre dans une réelle puissance et ne s'enorgueillit pas d'une vaine figure. 18. Nous avions tous grand'peur, et surtout sa maîtresse selon la chair, qui était, elle-aussi, parmi les martyrs une vaillante au combat, était battue de la crainte que Blandine ne pût, à cause de la faiblesse de son, corps, faire hautement sa confession. - Mais Blandine fut remplie d'une telle puissance que ceux-là se trouvèrent fatigués, épuisés, qui, pour la tourmenter en toutes façons, s'étaient relayés du matin jusqu'au soir : ils confessaient eux-mêmes qu'ils étaient vaincus, ne sachant plus que lui faire ; ils s'étonnaient de cette persistance du souffle de la vie dans un corps tout disloqué, transpercé ; ils attestaient qu'une seule de ces tortures était suffisante pour en arracher l'âme, sans tant et de si violents supplices. 19. Mais la bienheureuse, comme un généreux athlète, rajeunissait à confesser sa foi ; et c'était pour elle un moyen de se reprendre, de se reposer, de ne pas sentir la douleur que, de dire :
« Je suis chrétienne, et parmi nous il ne se fait rien de mal. » 20. Sanctus, lui aussi, avec une extrême patience , une vaillance plus qu’humaine, supporta tous les outrages des hommes : les impies espéraient que, dans la durée et la grandeur des épreuves, ils entendraient de sa bouche quelque parole contre son devoir ; mais il fit face à l'ennemi avec tant de constance qu'il ne dit ni son nom, ni le nom de son peuple, ni le nom de la ville d'où il était, ni s'il était libre ou esclave. À toutes les questions il répondait en langue romaine : « Je suis chrétien. » C'est là ce qu'au lieu de son nom, de sa ville, de sa famille, de tout, il déclarait sans cesse, et les païens n'entendirent pas une autre parole de lui. 21. De là contre lui une lutte passionnée, opiniâtre, du gouverneur et des questionnaires : ne sachant plus que lui faire, ils finirent par lui appliquer des lames de cuivre chauffées à blanc sur les parties les plus délicates du corps. 22. Et ces parties étaient brûlées ; mais lui, il demeurait toujours, sans plier, sans céder, inébranlable dans sa confession : d'une source céleste, du flanc du Christ sortait l'eau de la vie dont il était arrosé et fortifié. 23. Son pauvre corps témoignait bien de ce qui s'était passé : ce n'était que plaie et meurtrissure, une masse contactée, ayant perdu au dehors toute forme humaine. Mais le Christ, souffrant en lui, accomplit les actions les plus glorieuses, en réduisant l'adversaire à l'impuissance, et en montrant par un exemple, en vue de pareilles scènes dans. l'avenir, qu'il n'y a ni crainte où est l'amour du Père, ni douleur où est la gloire du Christ. Les impies, quelques jours après, torturèrent de nouveau le martyr : ils pensaient que si les membres étant .encore enflés et enflammés, ils lui infligeaient les mêmes supplices, ils auraient le dessus, dans un moment où le seul toucher de la main lui était intolérable, ou bien que sa mort dans ces épreuves épouvanterait les autres. Non seulement il n'arriva par rapport à lui rien de pareil, mais, contre l'attente de tout le monde, il releva la tête, son pauvre corps se redressa au milieu des tortures qui suivirent ; il reprit sa figure première et l’usage de ses membres. Et ce ne fut pas pour lui un supplice ce fut une guérison, par la grâce du Christ, que cette seconde torture. 25. Une certaine Bibliade était au nombre des renégats : le diable croyait l'avoir déjà dévorée : il voulut trouver dans un blasphème sa condamnation; il la mena au supplice, la pressant, toute frêle déjà, comme elle était, et sans courage, de parler de nous comme de gens sans dieu. 26. Mais les tortures mirent fin à son ivresse, et elle se réveilla pour ainsi dire d'un profond sommeil, et ces peines d'un moment lui rappelèrent les éternels supplices de la géhenne. Prenant à partie les blasphémateurs, elle leur dit : « Comment ces -gens-là mangeraient-ils des enfants, eux à qui. il n'est pas permis de manger du sang des bêtes? » Et depuis, elle confessa qu'elle était chrétienne; et elle fut enrôlée parmi les Martyrs. 27. Ainsi les instruments d'une cruauté tyrannique, le Christ les rendait impuissants par la constance des bienheureux. Le diable alors imagina d'autres machines : la réclusion dans des cachots ténébreux, insupportables, l'emprisonnement des pieds dans des ceps, en les distendant jusqu'au cinquième trou (25), et toutes les autres indignités dont des-valets [de prison] en colère et remplis de l'esprit du diable disposent d'ordinaire pour tourmenter les détenus. Aussi pour la plupart furent-ils asphyxiés dans les cachots, ceux que le Seigneur voulut faire sortir ainsi [du monde] pour manifester sa gloire. 28. Ceux qui avaient été soumis à des épreuves si rudes que, malgré tous les soins, ils ne paraissaient plus pouvoir vivre, subsistaient pourtant dans les cachots, privés de tout ;secours humain; mais fortifiés par le Seigneur, le corps et l'âme raffermis, exhortant les autres et les consolant. Au contraire, les novices, récemment arrêtés, dont le corps n'avait pas encore été en butte à ces violences, ne pouvaient supporter le poids de la réclusion, et en mouraient. 29. Le bienheureux Pothin à qui était confié lé ministère de l'épiscopat à Lugdunum, qui était âgé de plus de quatre-vingt-dix ans, était tout faible de corps, et, en raison de cette faiblesse corporelle, faiblesse du dehors, respirait à peine ; mais le souffle d'un coeur vaillant lui donnait une force nouvelle, grâce à la passion du martyre qu'il portait dans ce coeur. Il fut traîné, lui aussi, au tribunal. Son corps était miné par la vieillesse et la maladie, mais son âme s'y maintenait pour que par elle triomphât le Christ. 30. Porté par les soldats vers le tribunal où l'accompagnaient les autorités de la ville et toute la multitude qui poussait des cris de toute sorte, comme s'il était lui-même le Seigneur, il donna [de sa foi] un beau témoignage. 31. Le gouverneur lui posa la question : « Quel est le dieu des chrétiens? » - « Tu le connaîtras, dit-il, si tu en es digne. » Dès lors on le traîna sans ménagement ; on lui fit endurer mille coups, ceux qui étaient près de lui l'outrageant de toutes manières, avec les mains, avec les pieds, sans aucun respect pour son âge, ceux qui étaient loin lui lançant chacun ce qu'il avait sous la main : tous auraient cru grandement forfaire et se montrer impies, s'ils avaient manqué d'insolence envers lui. Car ils pensaient venger ainsi leur dieux. Il fut jeté, respirant à peine, dans le cachot, et deux jours après, il expira. 32. Alors s'affirma dans sa grandeur la loi distributive de Dieu; alors se montra aussi l'incommensurable miséricorde de Jésus par un effet bien rare entre des frères, mais non étranger à l'art du Christ. 33. Ceux qui, arrêtés une première fois, l'avaient renié, étaient emprisonnés eux-mêmes et avaient leur part de misères. Il ne leur revenait en ce moment aucun profit de leur apostasie. Ceux qui confessaient ce qu'ils étaient étaient enfermés comme chrétiens, sans qu'aucune autre accusation fût portée contre eux ; les premiers étaient détenus comme des homicides et des scélérats, et punis deux fois plus que les autres. 34. Les fidèles trouvaient un soulagement dans la joie du martyre, dans l'espérance de ce qui leur était promis, dans l'amour du Christ, dans l'esprit venant du Père. Pour les renégats, au contraire, leur conscience était un grand châtiment, et rien qu'à les voir quand ils passaient, on remarquait la différence entre eux et les autres. 35. Les uns s'avançaient d'un air joyeux (26) portant sur leur visage un mélange de gloire et de grâce, si bien que les chaînes mêmes leur faisaient une digne parure, comme à une jeune épouse richement parée, les franges d'or et les broderies. Ils exhalaient la bonne odeur du Christ, et quelques-uns croyaient y reconnaître quelque parfum mondain. Les autres marchaient la tête basse, abattus, honteux, remplis de toute indignité, et de plus, insultés par les païens comme des êtres ignobles et lâches; portant avec eux l'accusation d'homicide, et ayant perdu leur titre honorable, glorieux, vivifiant [de chrétiens]. Le reste, à cette vue, était singulièrement raffermi, et ceux qu'on arrêtait confessaient [leur foi] sans balancer, sans avoir même la pensée d'un calcul diabolique. » 36. À quelques lignes d'intervalle, la lettre ajoute : « Désormais ce fut sous les formes les plus diverses du martyre qu'ils sortirent de la vie. De différentes couleurs, de toutes sortes de fleurs ils tressèrent une couronne unique pour l'offrir au Père. Il fallait bien que de généreux athlètes qui avaient affronté une lutte aux incidents divers, et remporté une grande victoire, reçussent la grande couronne de l'immortalité. 37. Ainsi Maturus, Sanctus, Blandine et Attalos furent menés aux bêtes, en place publique, pour servir de commun spectacle à l'inhumanité des gentils, et un jour fut donné tout exprès à cause de nos frères pour un combat de bêtes (27). 38. Maturus et Sanctus passèrent de nouveau dans l'amphithéâtre par tous les supplices, comme s'ils n'eussent rien du tout souffert, ou plutôt comme des athlètes qui maintes fois déjà ont mis hors de l'arène l'adversaire que leur avait donné le sort, et luttant enfin pour la couronne même, ils supportèrent de nouveau le passage à travers les coups de fouet, selon l'usage de ces lieux, les morsures des bêtes qui les traînaient; et toutes les barbaries qu'un peuple en fureur, qui d'un côté, qui de l'autre, à grands cris demandait, ordonnait ; et après toutes ces horreurs, la chaise de fer sur laquelle les corps en rôtissant enivraient ce peuple d'une fumée de graisse brûlée. 39. Et ce n'était pas pour en finir ils n'en devenaient que plus furieux, voulant vaincre la constance de leurs victimes. Mais on n'entendait de la bouche de Sanctus d'autre parole que celle que, dès le commencement, il avait l'habitude de prononcer, et par laquelle il confessait sa foi. 40. Comme, durant ces grandes luttes [de nos frères], le souffle de la vie leur demeurait encore longtemps, ils furent enfin immolés ce jour-là; et au lieu de toute la variété des combats de gladiateurs, ils furent donnés en spectacle au monde. 41. Blandine, suspendue à un poteau, était offerte en pâture aux bêtes qu'on lançait contre elle. Et comme elle était. là sous les regards, suspendue en forme de croix, elle inspirait par l'intensité de sa prière un grand courage aux combattants. Dans ce combat, ils contemplaient même avec les yeux du dehors, sous les traits de leur soeur, celui qui avait été. crucifié pour eux, pour persuader à ses fidèles que quiconque souffre pour la gloire du Christ est admis pour toujours dans la société du Dieu vivant. 42. Aucune des bêtes ne l'ayant alors touchée, elle fut enlevée de son poteau et remise dans la prison : elle était réservée pour un autre combat, afin qu'après plusieurs victoires en ces nombreux exercices elle rendît irrévocable la condamnation du tortueux serpent, et poussât en avant ses frères, elle, petite par elle-même et faible et bien méprisée, mais qui revêtue [de la force] du Christ, le grand, l'invincible athlète, avait maintes fois jeté hors de l'arène l'adversaire que lui avait donné le sort, et s'était couronnée en ces luttes de la couronne de l'immortalité. - 43. Attalos aussi était demandé à grands cris par la foule, car il était très connu. Il s'avança, lutteur bien préparé, fort du témoignage de sa conscience car dans les rangs du Christ il s'était sincèrement exercé et avait toujours été parmi nous un témoin de la vérité. 44. On le promena autour de l'amphithéâtre précédé d'une tablette sur laquelle était écrit en langue romaine : « Voici Attalos le chrétien ; » et le peuple était exubérant de haine contre lui. Mais le gouverneur, ayant appris qu'il était romain, ordonna de le remettre avec les autres qui étaient dans les cachots; il écrivit à César, sur cette affaire et attendit sa réponse. 45. Le temps qui s'écoula dans l'intervalle ne fut pas pour les Chrétiens, sans action et sans fruit. Mais par leur constance se manifesta l'incommensurable miséricorde du Christ; par les vivants furent revivifiés les morts, et les martyrs communiquèrent la grâce aux non martyrs, et ce fut une grande joie pour la Vierge mère (28) de recevoir vivants [dans son sein] ceux qui comme des avortons en étaient sortis morts. 46. Par le soin de ces martyrs, la plupart des renégats rentrèrent dans le sein maternel, y furent de nouveau conçus, y retrouvèrent la chaleur vitale et apprirent à confesser [leur foi] ; vivants dès lors et réconfortés,- car ce Dieu qui ne veut pas la mort du pécheur, mais par sa bonté l'invite au repentir, les attirait doucement, ils marchèrent vers le tribunal pour être interrogés de nouveau par le gouverneur. 47. César avait répondu qu'on les fît mourir sous le bâton et qu'on relâchât ceux qui nieraient. En conséquence, au moment où l'on commençait de s'assembler pour la solennité qui attire ici un grand concours de tous les peuples [du pays], le gouverneur fit amener à son tribunal les bienheureux [martyrs], qu'il produisit, comme sur un théâtre, pompeusement aux yeux de la foule. Et c'est ainsi qu'il les interrogea de nouveau, et tous ceux qui paraissaient avoir le droit de cité romaine, il leur fit trancher la tête ; les autres, il les envoya aux bêtes. 48. Le Christ fut grandement glorifié à l'occasion de ceux qui, l'ayant auparavant renié, le confessèrent alors contre l'espérance des païens. On les avait interrogés séparément, avec l'intention de les relâcher tout de suite, mais comme ils confessaient [leur foi], on les adjoignit au groupe des martyrs. Restèrent en dehors ceux en qui il n'y avait jamais eu aucune trace de foi, aucun sentiment de ce qu'est la robe nuptiale, aucune idée de la crainte de Dieu, qui, en retournant sur leurs pas, diffamaient la [vraie] voie, en un mot les fils de perdition. 49. Tous les autres furent réunis à l'Église. Pendant qu'on les questionnait, il y avait un certain Alexandre, Phryge (Phrygien) de nation, médecin de profession, depuis longues années établi dans les Gallies, connu à peu près de tous par son amour pour Dieu et la hardiesse de sa parole, car il n'était pas sans avoir part, lui aussi, à la grâce (au charisme) apostolique. Debout tout près du tribunal, et par des signes de tête exhortant nos frères à confesser, il paraissait à ceux qui entouraient le tribunal être dans les douleurs de l'enfantement. 50. La foule révoltée de ce que ceux qui auparavant avaient renié, confessaient de nouveau, cria contre Alexandre qu'elle accusait d'être la cause de ce changement. Le gouverneur, à l'instant même (29), lui demande qui il est ; il répond qu'il est chrétien, et le magistrat, en colère, le condamne aux bêtes. Le jour suivant, il entra [dans l'arène], et Attalos était avec lui. Car le gouverneur, voulant être agréable à la foule, lui avait rendu Attalos pour le livrer aux bêtes. 51 . Ils passèrent dans l'amphithéâtre par tous les instruments inventés pour les supplices, et, après avoir soutenu le plus grand combat, ils furent, eux aussi, à la fin immolés, Alexandre sans pousser un gémissement, sans dire un seul mot, mais s'entretenant dans son coeur avec Dieu. 52. Attalos fut mis sur la chaise de fer. De son corps brûlé de tous côtés s'exhalait une grasse fumée ; il dit alors à la multitude en langue romaine. : « Voilà qui est bien manger des hommes, que de faire ce que vous faites ; mais nous, nous ne mangeons pas des hommes, nous ne faisons rien de mal. » On lui. demanda quel nom a Dieu, il répondit : « Dieu n'a pas de nom comme un homme. ». 53. Après tous les autres, le dernier jour de ces monomachies (30), fut de nouveau introduite Blandine avec Ponticus, jeune garçon d'environ quinze ans, lesquels étaient amenés chaque jour pour avoir le spectacle du supplice des autres, et on les pressait de jurer par les idoles. Mais leur inébranlable constance et leurs dédains exaspérèrent tellement la multitude qu'elle n'eut plus ni pitié pour l'âge d'un enfant, ni respect pour une faible femme. 54. On les exposa à toutes les horreurs ; on leur fit parcourir tout le cercle des supplices, en les pressant, à chaque épreuve, de jurer, mais sans pouvoir y réussir. Exhorté par sa soeur; tant et si bien que le peuple voyait clairement que c'était par elle qu'il était poussé et affermi; Ponticus, après avoir supporté d'un coeur généreux tous les supplices, rendit l'âme. 55. La bienheureuse Blandine restait la dernière : comme une généreuse mère qui a poussé ses fils au combat, et après la victoire les a conduits au roi, parcourant à son tour toutes les étapes de la lutte après ses enfants, elle se hâte de les rejoindre; joyeuse et toute fière de sortir ainsi de ce monde, comme si elle eût été appelée à un festin nuptial et non pas jetée aux bêtes. 56. Après les fouets, après les bêtes, après la chaise brûlante, elle fut en dernier lieu jetée dans une nasse, jetée devant un taureau; et quand l'animal l'eut assez jetée en l'air, sans qu'elle sentît plus rien du mal qu'on lui faisait, grâce à ses espérances, grâce aux croyances qui la possédaient et à ses entretiens avec le Christ, elle fut, elle aussi, immolée, et les païens eux-mêmes avouaient que chez eux jamais femme n'avait si longtemps ni si rudement souffert. 57. Mais ce n'était pas encore assez pour rassasier leur rage et leur cruauté envers les saints. Des peuples féroces, barbares, l'esprit troublé par une bête féroce (31), ne pouvaient pas facilement s'apaiser; leur violence saisit une autre occasion, à elle propre, de se montrer : elle s'en prit aux corps des martyrs. 58. Ils n'eurent pas honte d'avoir été vaincus, parce que, ne sachant plus raisonner en hommes, leur colère, comme celle d'une bête farouche, ne fit que s'enflammer davantage : le gouverneur et le peuple montrant à l'envi contre nous une injuste haine, afin que la parole de l'Écriture s'accomplît : « Que l'ennemi de la loi méconnaisse encore plus la loi ; que le juste soit encore justifié. » 59. Et en effet ceux qui étaient morts asphyxiés dans les cachots, on jeta leurs corps aux chiens, en les gardant soigneusement nuit et jour de peur qu'aucun de nous ne leur rendît les derniers devoirs ; et alors aussi on mit dehors ce que le feu et les bêtes avaient laissé : membres déchirés ou carbonisés, têtes coupées, troncs mutilés, tous ces débris, également sans sépulture, furent gardés par des soldats qui veillèrent sur eux pendant plusieurs jours. 60. Et parmi les païens, les uns frémissaient et grinçaient des dents, cherchant quelque vengeance plus extraordinaire à tirer des martyrs ; d'autres riaient, se moquaient de nous, tout en glorifiant leurs idoles et en leur attribuant le châtiment des chrétiens (32). Les plus modérés, ceux qui paraissaient dans une certaine mesure avoir de la sympathie pour nous, disaient souvent en manière de reproches : « Où donc est leur Dieu? A quoi leur a servi cette religion qu'ils ont préférée à leur vie ? » 61. Et voilà, du côté des païens, la variété dé leurs sentiments.'Quant à nous, nous étions dans une grande douleur de ne pouvoir cacher, en terre les corps [des saints] : ni la nuit ne nous aidait, ni l'argent ne pouvait gagner nos ennemis, ni nos prières les fléchir ; de toute façon ils faisaient bonne garde, comme si ce leur eût été un grand avantage que ces restes n'obtinssent pas une sépulture. » 62. Après quelques autres détails, la lettre dit : « Les corps des martyrs de toutes manières ainsi exposés pour l'exemple et laissés en plein air pendant six jours, puis brûlés et réduits en cendres, furent par les impies balayés dans le Rhôdan, qui coulait près de là; pour que pas un reste ne s'en vît plus sur la terre. 63. Et ils agissaient de la sorte comme s'ils avaient pu vaincre Dieu et ôter aux chrétiens le moyen de renaître, « afin, disaient-ils, que ces malheureux n'aient plus l'espérance de la résurrection, confiance par laquelle ils introduisent chez nous cette religion, étrange; nouvelle, et méprisent les plus affreux tourments, toujours prêts à marcher avec joie à la mort. Voyons donc s'ils ressusciteront et si leur Dieu pourra les secourir et les tirer de nos mains. »

III, 1. Le même écrit des martyrs dont nous avons parlé contient une autre histoire mémorable, que rien ne saurait m'empêcher de porter à la connaissance de ceux entre les mains de qui tombera ce livre. La voici : 2. Alcibiadès, un de ces martyrs, menait une vie tout à fait misérable : il ne prenait auparavant aucun autre aliment que du pain et de l'eau, et il essayait de conserver ce régime, dans la prison. Attalos, après le premier combat qu'il avait mené à bonne fin dans l'amphithéâtre, apprit par une révélation qu'Alcibiadès ne faisait pas bien de ne point user des choses créées par Dieu et de laisser après lui aux autres, un type de scandale. 3. Alcibiadès se laissa persuader, il prit librement de toutes les nourritures, en rendant grâce à Dieu, car les détenus n'étaient pas sans être visités de la grâce de Dieu, et l'Esprit saint était leur conseiller. Mais tenons-nous-en là sur ce point. 4. Montanus, Alcibiadès et Théodotos commençaient alors d'être considérés par plusieurs comme des prophètes. Et, d'ailleurs, plusieurs autres faits incroyables de la grâce de Dieu, accomplis encore en ce temps-là dans différentes églises, donnaient à plusieurs la ferme conviction que ces hommes avaient le don de prophétie : une discussion s'éleva par rapport à ceux que j'ai désignés : ceux de nos frères qui étaient en Gallie joignirent [à leur écrit] leur jugement particulier sur ce sujet, jugement prudent, très orthodoxe, et ils produisirent différentes lettres que les fidèles consacrés chez eux par le martyre avaient écrites, étant encore dans les fers, pour leurs frères d'Asie et de Phrygie, mais surtout pour Eleuthère, alors évêque de Rome, et par lesquelles ils se faisaient ambassadeurs de la paix entre les églises.

IV. 1 . Les mêmes martyrs mirent aussi en rapport avec l'évêque de Rome, ci-dessus désigné, Irénée, alors déjà prêtre dé la paraecia (33) de Lugdunum, rendant à ce vaillant homme de nombreux témoignages qui se montrent assez dans les termes dont ils se servent et que voici: 2. « Nous souhaitons que tu te réjouisses en Dieu pour toutes choses et toujours, père Eleuthère. Cette, lettre, nous avons invité? notre frère et compagnon Irénée à te la porter, et nous te prions de l'avoir en recommandation comme un zélateur du testament du Christ. Si nous savions que le rang d'un homme peut lui constituer un droit, comme il est prêtre de l'Église, nous te l'aurions à ce titre recommandé tout d'abord. 3. Faut-il énumérer tous les martyrs dont l'écrit ci-dessus indigné contient l'énumération, les uns consacrés par le coup qui leur trancha la tête, les autres jetés en pâture aux bêtes, ceux encore qui ont trouvé dans les cachots leur dernier sommeil et, ceux des confesseurs qui survivent encore? Celui à qui il plaira [de les connaître] le pourra aisément et de la manière la plus, complète, en prenant en main l'écrit qui, comme je l'ai dit, a été par nous inséré tel quel dans notre Recueil des Martyres. Voilà ce qui s'est passé sous Antonin (34).

V.8. Pothin, après une vie de quatre-vingt-dix ans entiers, fut consacré par le martyre avec ceux qui souffrirent en Gallie, et Irénée prit en sa place, à Lugdunum, la surveillance (l'épiscopat) de cette paraecia que Pothin avait gouvernée. Or, nous savons que ce dernier avait été dans son jeune âge un des auditeurs de Polycarpe. 

XVI. 1. Récemment étant à Ancyre, en Galatie, je trouvai l'église du Pont mise toute en rumeur, non par cette nouvelle prophétie, comme ils disent, mais bien plutôt, comme nous le montrerons, par cette fausse prophétie (35); alors, autant que je le pus avec l'aide du Seigneur, je discourus pendant plusieurs jours dans l'église sur ces sectaires et sur chacune des raisons qu'ils mettent en avant. Et je fis si bien que l'église en fut toute réjouie et affermie dans la vérité, nos adversaires pour le moment refoulés et les ennemis de Dieu bien affligés. 5. Les prêtres (36) me prièrent de leur laisser une sorte de mémoire de ce qui avait été dit contre les adversaires de la vérité, en présence de mon collègue le prêtre . Zoticos d'Otrus (37); je n'en fis rien; mais je leur promis de l'écrire ici, si le Seigneur le permettait, et de le leur envoyer bientôt.... »

XXIII. 3. On a encore .aujourd'hui la lettre des paraecies (38) (églises) dans la Gallie dont Irénée était évêque... (2. Il s'agissait de la fête de Pâques : il fut interdit de célébrer un autre jour que le dimanche le mystère de la résurrection de Notre Seigneur, et le jeune pascal ne dut prendre fin que ce jour-là.)

XXIV, 11. De ce nombre fut Irénée, qui, au nom des frères qu'il avait sous sa conduite en Gallie, écrivit à Victor; soutenant bien, il est vrai, la nécessité de célébrer seulement le jour du Seigneur le mystère de la résurrection du Seigneur, mais conseillant avec respect au pontife de ne pas retrancher [de la communion] des églises entières de Dieu, parce qu'elles gardaient la tradition d'une ancienne coutume ; à cet avis, il en joignit plusieurs autres...

Discours X.

V, 9. « Il m'a paru bon (39) que Caecilianus (40) en personne, avec dix des évêques qui pensent redresser ses erreurs, avec dix autres encore dont il croira le témoignage nécessaire à sa cause, s'en aille à Rome par mer sans différer, afin qu'en votre présence, en présence aussi de Rétécius, de Maternus et de Marinus, vos collègues, à qui j'ai ordonné de se rendre en diligence à Rome pour cet objet, il puisse être entendu dans la mesure où vous aurez reconnu que cela s'accorde avec notre très auguste loi (41). »

21. - Une première fois déjà, voyant que quelques-uns, d'un sens mauvais et tout perverti, avaient commencé d se mettre à l'écart au sujet de la sainte religion, de la céleste puissance (42), et de la secte catholique, et voulant couper court à leurs disputes, j'avais donné à l'affaire cette forme quelques évêques avaient été envoyés de la Gallie; on avait appelé aussi de l'Afrique ceux qui, dans des camps opposés, se combattaient à outrance, sans relâche, et là, en présence de l'évêque de Rome, cette querelle, qui paraissait avoir été excitée, aurait pu, grâce à la présence des adversaires et à la suite d'un examen attentif, trouver un juste accommodement. 22. Mais attendu que, comme il arrive, quelques-uns, oublieux de leur propre salut et du respect qui est dû à la très sainte Église, ne cessent pas de prolonger encore aujourd'hui leurs inimitiés personnelles c'est devenu un devoir pour moi de pourvoir à ce que cette querelle, qui, après le jugement déjà porté, aurait dû cesser par un accord volontaire, puisse aujourd'hui enfin, grâce à des juges nombreux, avoir un terme. 23. En conséquence, ayant ordonné à un très grand nombre d'évêques de venir de cent lieux différents et de se réunir, aux calendes d'Auguste, dans la ville d'Arelatè, nous avons cru devoir t'écrire aussi pour que tu prennes une voiture publique que te livrera le très illustre Latronianus, correcteur de la Sicélie, que tu t'adjoignes deux ministres du second siège à ton choix, que tu emmènes avec toi trois valets, pour votre service durant le voyage, et que tu arrives a ainsi au lieu susdit le jour indiqué. »

DU MÊME AUTEUR,

VIE DU BIENHEUREUX ROI CONSTANTIN (43).

Discours I.

VIII. Après avoir muni son armée des préceptes bienfaisants et sages de la religion, il alla au pays des Brettans et chez les peuples qui habitent l'Océan lui-même, dont les bornes sont marquées par le soleil couchant.

XXV. Lorsqu'il fut bien assis dans la royauté, il porta d'abord son attention sur l'héritage paternel, examina avec des sentiments d'humanité, parfaite tous les peuples auparavant gouvernés sous l'autorité de son père, et ces nations barbares, habitant les bords du Rhèn et de l'océan occidental, qui osaient s'insurger, il les soumit toutes et se donna la tâche d'adoucir ces natures inapprivoisables.... Quand ces choses furent mises en l'état qu'il voulait, ayant toujours devant les yeux parmi les contrées de la terre celles qui étaient encore de son héritage, il passa, en attendant [la suite], chez les peuples, de la Brettanie, établis dans l'Océan même. Quand il les eut rattachés à l'Empire...

Discours IV.

L. Au commencement de son règne, les Brettans qui habitent l'Océan au soleil couchant se rangèrent les premiers [sous ses lois] (44)...

DU MÊME AUTEUR.

PRÉPARATION ÉVANGÉLIQUE (45).

Livre IV.

XVI, 18. « On dit que les anciens [Romains] offraient à Cronos des sacrifices comme il s'en fit à Carchédon tant que subsista cette ville, comme il s'en fait encore en ce temps-ci chez les Celtes et chez quelques autres peuples de l'Occident qui immolent des hommes... »

Livre V.

XVII, 10 . « Démétrios (46) dit que, parmi les îles situées autour de la Brettanie, il en est plusieurs qui sont désertes, éparses; et que quelques-unes d'entre elles tirent leurs noms de démons ou de héros ; que, naviguant dans ses parages, envoyé par le roi (l'empereur) pour savoir et pour voir, il aborda dans la plus voisine de ces îles désertes, qu'elle n'avait pas beaucoup d'habitants, que ces habitants étaient sacrés pour les Brettans et à l'abri de toute injure de leur part. 11. Qu'à son arrivée, une grande . perturbation venait de se faire dans l'air, avec des signes célestes nombreux, les vents soufflant avec fracas et là foudre tombant en plusieurs endroits ; puis que, le calme s'étant rétabli, les insulaires disaient qu'il y avait eu éclipse de quelque être supérieur. Car, ajoutaient-ils, de même qu'une lampe qu'on allume n'offre rien de fâcheux, qui, si on l'éteint, fait de la peineà maintes personnes; ainsi les grandes âmes dans tout leur éclat font du bien et ne font jamais de mal, mais qu'elles viennent à s'éteindre, à périr, souvent, comme aujourd'hui, elles nourrissent des vents et de la grêle ; souvent aussi elles empoisonnent l'air d'émanations pestilentielles. 12. Là, dit-il encore, il y a une île où est emprisonné Cronos, endormi et gardé par Briarée; le sommeil est le lien inventé pour le tenir ; il y a autour de lui nombre de démons (génies) qui sont ses valets et ses serviteurs. »

Livre VI.

X, 47. « Il y a beaucoup d'entre eux (les Magusaei) qui encore aujourd’hui demeurent en Médie, en Egypte, en Phrygie et en Galatie. »

27. Chez les Galls, les jeunes gens se prennent pour maris en toute liberté, et ne voient à cela aucun blâme, parce qu'il y a chez eux une loi qui le permet (47). Certes, il n'est pas possible que tous ceux qui, en Gallie, se livrent à ces excès impies, le sort les ait fait naître au moment où Phosphoros (Lucifer), avec Hermès se couche dans les maisons de Cronos et dans les limites d'Arès. 28. « En Brettanie, plusieurs hommes n'ont qu'une femme (48)... »

35. «... Dans chaque contrée dominent sur les hommes la loi et la coutume, à cause du libre arbitre dé l'homme : l'heure natale ne force pas les Galls à se marier entre hommes.... »

12. « Tous les Judaei (Juifs), qu'ils se trouvent en Syrie ou en Gallie ou en quelque lieu que ce soit, font la même chose (49). » 

OLYMPIODORE DE THÈBES (50).

BIBLIOGRAPHIE

OLYMPIODORE DE THÈBES.

FvtÛou Muriñbiblon µ bobliy®kh. Photii Myriobiblon sive Bibliotheca librorum quos Photius patriarcha Constantinopolitanus legit et censuit. - Graece edidit David Hoeschelius Augustanus et notis illustravit. - Latine vero reddidit et scholiis auxit Andreas Schottus Antuerpianus, etc. - Coloniae, Oliva, Pauli Stephani. M. DG. XI, in-f°. 
2° Même titre, de plus : Hac ultima editione recognitum locisque aliquot suae integritati restitutum. Rothomagi, sumpt. Ioan. et Davidis Berthelin. fratr. M. DC. LIII. - Reproduction à peu près identique de l'édition de Cologne. - Olympiodore. pp. 178-199.

Les extraits d'Olympiodore, ceux de Priscus et de Candide sont dans les deux recueils suivants : 
1° Dans la Byzantine (Corpus byzantinae historiae), grande édition de Paris : De Byzantinae Historiae scriptoribus, sub felicissimis Ludovici XIV, Francorum ac Navarraeoruin Regis Christianissimi auspiciis; publicam in lucem e Luparaea typographia emittendis, ad omnes per orbem eruditos Proteptikòn, proponente Philippo Labbe Biturico soc. Iesu sacerdote. Parisiis, e typographia regia; in-f°; M. DC. XLVII. - Titre spécial, avec pagination particulière, pour les fragments : Eclogae Historicorunn de rebus Byzantinis quorum integra scripta aut injuria temporum interciderunt, aut plura continent ad Contantinopolit. Historiam minus spectantia selegit, interpretationem recensuit, notisque brevibus illustravit P. Philippus Labbe, Bituricus, societatis Jesu sacerdos.
2° Fragmenta historicorum Graecorum collegit, disposuit, notis et prolegomenis illustravit Carolus Müller, vol. quartum. Parisis, editore, Ambr. Firmin-Didot, M. DCCC LXVIII. Olympiodore, pp. 57-68 ; Priscus, pp. 69-110 ; Candide, pp. 135-137.

 

DISCOURS HISTORIQUES (51).

12. (0). Constantin, élevé à la tyrannie, envoie une ambassade à Honorius pour se justifier : c'est malgré lui, c'est contraint par ses soldats qu'il a pris le pouvoir; il demande donc sa grâce, mais il réclame aussi une part de la royauté. Le roi (52), au milieu des difficultés qui le pressent, admet pour le moment ce partage de la royauté. Constantin se trouvait avoir été proclamé dans les Brettanies. et porté au pouvoir en ces pays-là par une insurrection militaire. Et, en effet, dans les Brettanies, avant le VIIe consulat d'Honorius (53) les soldats insurgés avaient proclamé empereur un certain Marcus, lequel ayant été tué par eux, Gratianus fut mis à sa place. Mais, au bout de quatre mois, dégoûtés. aussi de ce dernier, ils l'égorgent et Constantin alors est porté au rang suprême avec le nom d'empereur. Ayant promu généraux Justin et Néovigaste, il quitte les Brettanies et passe avec les siens à Bonônia (54), c'est le nom d'une ville maritime, la première qu'on trouve sur ces limites des Gallies; - il y séjourne, et, s'étant approprié tous les soldats galls et akytans, il s'empare de toutes les parties de la Galatie jusqu'aux Alpes, qui sont entre l'Italie et la Galatie.
16. Le tyran Constantin et Constant, son fils, qui avait été élu d'abord caesar, puis roi, sont défaits tous les deux et mis en fuite. Gérontius, qui commandait une armée, se prête volontiers à faire la paix avec les barbares ; il avait au nombre de ses domestiques un fils à lui nommé Maxime, il le proclame roi (55); puis, se mettant à la poursuite de Constant, il réussit à le tuer; enfin, poursuivant aussi Constantin, le père de Constant, il le suit pied à pied. Au moment où cela se passait, Constantius et Ulfilas étaient envoyés par Honorius contre Constantin. Ayant atteint Arèlatos, où Constantin faisait son séjour avec Julianus son fils, ils assiègent cette ville. Constantin se réfugie dans un oratoire et il est ordonné prêtre, on lui avait promis la vie sauve ; les portes de la ville sont ouvertes aux assiégeants, et Constantin est envoyé avec son fils à Honorius. Ce prince, qui lui gardait rancune à cause de ses parents, que Constantin se trouvait avoir fait périr, donna l'ordre, au mépris de la foi jurée, de les faire périr à trente milles en deçà de Ravenne. Gérontius, à l'approche d’Ulfilas et de Constantius, s'enfuit ; il est arrêté, et pour s'être montré dur envers les soldats qu'il commandait, il est en butte à leur mauvais vouloir. Et, en effet, ils mirent le feu à sa maison. Il combattit vaillamment, n'ayant contre ces insurgés, pour aide, qu'un seul homme, Alain de nation, qui était au nombre de ses esclaves. Enfin, il tue, selon leur désir, cet Alain et sa femme, et s'égorge lui-même. Maxime, son fils, informé de ces événements, s'enfuit chez les barbares que protègent dés traités.
17. À Mundiacum, ville, de la deuxième Germanie, Jovinus, grâce aux intrigues de l'Alain Gôar et de Guntiarius, qui tenait l'emploi de phylarque (56) des Burguntions, fut proclamé tyran. Attalus, conseille à Adaülf de se joindre à lui, et Adaülf se joint à Jovinus avec tout son monde. Mais ce dernier s'inquiète de la présence d'Adaülf, et reproche à mots couverts son arrivée à Attalus aux conseils de qui elle était due. Sarus devait aussi venir se joindre à Jovinus, mais Adaülf l'apprend ; avec dix mille soldats qu'il a rassemblés, il court à la rencontre de Sarus qui n'avait avec lui que dix-huit ou vingt hommes, et qui, malgré les prodiges d'une valeur héroïque, fut pris vivant, non sans peine, à l'aide de sacs (57), et plus tard mis à mort...
19. Jovinus, ayant, malgré l'avis contraire d'Adàülf, nommé roi son frère Sébastianus, encourut la haine de son allié. Aussi Adaülf envoie-t-il à Honorius des ambassadeurs pour promettre à ce prince de lui donner la tête des tyrans et la paix. L'ambassade de retour et les serments échangés, la tête, de Sébastianus est envoyée au roi (à l'empereur) ; Jovinus; assiégé par Adaülf, se livre lui-même; il est aussi envoyé au roi, et l'éparque Dardanus prend sur lui de le faire mourir. 
20. Adaülf, à qui l'on réclamait Placidie, réclamait de son côté les vivres qui avaient été garantis. Ceux qui les lui avaient promis étaient bien embarrassés pour les livrer.; ils n'en conviennent pas moins de les lui fournir, pourvu que Placidie leur soit remise. Le barbare faisait des réponses semblables, et cependant il s'approchait de la ville appelée Massalie, comptant bien la prendre par ruse. Mais alors il fut blessé, et c'est le très noble Bonifacius qui lui porta ce coup ; à grand'peine il échappa à la mort, et se retira dans ses tentes, laissant la ville le coeur content, qui prodiguait à Bonifacius louanges et bénédictions. 
21. Grâce au zèle et aux bons avis de Candidianus, s'accomplit le mariage d'Adaülf avec Placidie, au commencement de janvier (58), à Narbôn, dans la maison d'Ingénius, un des premiers citoyens de cette ville; Placidie assise dans l'atrium (59) orné à la manière romaine, et en costume royal, Adaülf s'assit près d'elle, vêtu, lui aussi, du manteau et des autres habits en usage chez les Romains. Entre autres présents, il offrit à sa fiancée cinquante beaux jeunes gens vêtus d'une robe de soie, et portant chacun dans leurs mains deux grands plateaux, chargés l'un d'or, l'autre de pierres de haut prix ou plutôt sans prix, dépouilles de Rome enlevées. par les Goths lors de la prise de cette ville. Puis on dit des épithalames, dont Attalus récitait les premiers vers et que continuaient Rusticius et Phoebadius ; et le mariage s'accomplit au milieu des jeux et de la joie, où se confondaient barbares et Romains.

ZOSIME.

HISTOIRE NOUVELLE (60).

BIBLIOGRAPHIE

ZOSIME.

ZvsÛmou kñmhtow kaÜ Žpofiskosunhgñrou „IstorÛa n¡a, livres I et II, à la suite de l’Hérodien (v. plus haut, p. V, 2°), sans le nom de.Zosime ; sic : Historiarum Herodianicas subsequentium libri duo, nunc primuni graece editi (avec la trad. lat. de Leunclavius). - Excudebat Henricus Stephanus. Anno M. D. LXXXI, in-f°. 
2° Même titre dans le t. III des Historiae romanae Scriptores graeci minores (de Sylburg). Francofurti, M. D. XC, in-f°. C'est l'édition dont s'est servi D. Bouquet.
3° Zosimi Historiae. Græce et latine recensuit, notis criticis et commentario historico illustravit Io. Frid. Reitemeier L V. D. - Ad Calcem subjectae sunt animadversiones C. G. Heynii. - Lipsiae, apud Weidmanni heredes et Reichium. M. DCC. LXXXIV, in-8°.
4° Zosimus ex recognitione Immanuelis Bekkeri, Bonnae, impensis Ed. Weberi. M DCCC XXXVII, in-8°; dans le Corpus scriptorum Historiae Byzantinae, de Niebuhr.
5° Histoire romaine de Zosime, traduction du président Cousin, revue (?) par Bachon, dans le Panthéon littéraire, sous ce titre : Ouvrages historiques de Polybe, Hérodien et Zosime, in-8° à deux colonnes. Paris, M. DCCC. XXXVI.

livre premier.

(0). Alexandre (61) était occupé chez les nations des bords du Rhèn ; là il apprit les changements qui s'étaient accomplis et songea tout de suite à partir pour Rome. Il promit bien, aux soldats et à Maximin lui-même leur pardon s'ils se prêtaient à ses entreprises, mais il ne lui fut pas possible de les amener à lui ; renonçant donc à toutes ses espérances, il livra en quelque sorte sa gorge aux poignards. Mamaea qui sortit du prétoire avec les officiers [de l'empereur], pensant apaiser les troubles, fut égorgée elle-même, et les officiers avec elle (62)...
XV (0) Maximin ... marchait sur Rome avec ses bandes de Maurusii et de Celtes (63).
XXVIII (0) Gallus... envoya Valerianus avec charge de lui amener les légions de la Celtique et de la Germanie (64)...
XXX. Galliénus, voyant que les peuples de la Germanie étaient les plus intraitables, qu'ils étaient des voisins très incommodes. pour les peuples celtiques des bords du Rhèn, voulut de sa personne faire face aux ennemis de ce côté-là .... Gardant donc en personne les passages du Rhèn, autant que cela se pouvait, ici il les empêchait de le traverser, là il faisait face à ceux qui le passaient. Mais n'ayant pour guerroyer contre ces grandes multitudes que des forces insuffisantes et se trouvant dans un grand embarras, il pensa amoindrir en partie le danger en traitant avec un des chefs de la Germanie ; celui-ci empêchait les courses continuelles des autres barbares au delà du fleuve, et ceux qui envahissaient le pays le trouvaient devant eux (65).
XXXVIII. Mais, quand Postumus, à qui avait été confié un commandement militaire chez les Celtes, est poussé, lui aussi, à tenter un changement, il prend avec lui les soldats complices de sa révolte et court à Agrippina (66), très grande ville située sur le Rhèn où se trouvait Saloninus, fils de Galliènus. Il y met le siège et se déclare résolu à ne le point lever qu'on ne lui ait livré le jeune prince. Forcés par les misères du siège, les soldats le livrent avec Silvanus qui avait reçu de son père la charge de veiller sur lui. Postumus les fit périr tous les deux, et prit ainsi le pouvoir souverain chez les Celtes.
LII (0). Il (Aurélianus) rangea en face (des Palmyrènes) son armée dans laquelle il y avait, avec des Dalmates à cheval, des Nôriques et des Rheetes qui sont des légions celtiques (67)...
LXIV... A Florianus (68) obéissaient les peuples transalpins, Galates et Ibères, avec l'île Brettanique.
LXVI (0). Une autre révolte avait été pratiquée en Brettanie : il (Probus) y mit fin par le ministère de Victorinus, Mauruse de nation, à la persuasion duquel il se trouvait avoir chargé de commander en ce pays l'auteur de la révolte. Ayant donc mandé Victorinus, il lui reproche son mauvais conseil et l'envoie en Brettanie pour réparer sa faute. Celui-ci part sur-le-champ et, par un moyen non moins prudent qu'ingénieux, il détruit l'usurpateur.
LXVII... (69). Les villes de la Germanie étaient incommodées par les barbares des bords du Rhèn : forcé de les secourir, Probus en personne vole vers le Rhèn ... ; et grâce à la fortune du roi (de l'empereur) on vint facilement à bout de cette guerre.
LXVIII. Il eut une seconde bataille contre les Francs, et ayant remporté la victoire grâce à la valeur de ses généraux, il combattit en personne les Burgundes et les Vandiles... (0) Tous ceux qu'il lui fut possible de prendre vivants, il les envoya en Brettanie. Fixés dans cette île, quand il y eut quelque révolte, ils lui rendirent de bons services. 
LXIX (0). Après la défaite de ces peuples sur les bords du Rhèn ...
LXXI.... Des Francs étant venus trouver le roi (l'empereur) et ayant obtenu des terres pour y habiter, une partie d'entre eux se sépara des autres, se procura des vaisseaux et porta le trouble dans l'Hellade entière. Ils abordèrent en Sicélie, et, ayant attaqué la ville de Syracuse, ils y firent un grand carnage. Enfin ils opérèrent une descente même en Libye ; repoussés par des troupes envoyées de Carchèdon (Carthage), ils purent s'en retourner chez eux sans avoir rien souffert (70)...

Livre deuxième.

X. Maximianus Herculius, mécontent des troubles dont la république était pleine, alla trouver Dioclétianus qui demeurait alors à Carnutum, ville des Celtes... mais, ayant manqué son but, il alla jusqu'à Ravenne, et poussa de nouveau vers les Alpes pour se rencontrer avec Constantin qui demeurait en ce pays. (71)
XIV (0). Maxentius avait la pensée de pousser jusqu'à Rhaetion par la raison que ce peuple est proche de la Gallie et des régions de l'Illyrie (72).
XV (0) ... Constantin ayant rassemblé des forces prises chez les barbares qu'il avait conquis pal les armes, chez les Germains et les autres peuples celtiques, avec les hommes enrôlés en Brettanie, en tout environ neuf myriades de fantassins et huit mille cavaliers, poussa des Alpes en Italie (73) ...
XVII. ... Ayant donné ordre aux affaires de Rome, Constantin courut chez les Celtes et les Galates (Gaulois). Puis, ayant mandé Licinnius à Médiolanum, il lui donna la main de sa soeur Constantia qu'il lui avait déjà promise auparavant, voulant l'associer à sa haine contre Maxentius. Cela fait, Constantin s'en retourna chez les Celtes (74).
XX. ... Constantin déclara caesar Constantin qui lui était né peu de jours auparavant à Arelatum (Arles) (75).
XXXIII. ... (0) Au quatrième (préfet du prétoire) il (Constantin) donna les Celtes transalpins et les Ibères avec l'île Brettanique (76)...
XXXIX. ... Constantin l'aîné, avec Constant le plus jeune, eut en partage tous les pays delà les Alpes et en outre l'Italie, l'Illyride (77), etc.
XLII ...... (0). Ceux qui étaient à table (78) avec lui (Magnentius) l'ayant proclamé roi (empereur), les habitants de la ville d'Augustodunum, où cela se passait, furent tous pareillement du même avis. Et comme le bruit en courut plus loin, les gens de la campagne affluèrent et se réunirent hors de la ville. À ce moment, des cavaliers d'Illyrie qui avaient été envoyés pour compléter les légions campées chez les Celtes, se mêlèrent à ceux qui avaient été rassemblés pour cet objet. En somme, ceux qui étaient à la tête d'une troupe quelconque de soldats, se réunirent en un groupe, et ayant vu les chefs de la conspiration pousser des cris, sans presque savoir ce qui se faisait, ils crièrent aussi tous à la fois et appelèrent auguste Magnentius. Constant, averti de ce mouvement, se hâte et veut fuir vers une petite ville proche du Pyrénceum et nommée Hélénè. Mais il est arrêté par Gaïson envoyé à cet effet avec quelques hommes choisis, et tué dans l'abandon de tout secours (79).
XLIII (0). Magnentius eut donc l'empire et se trouva maître des peuples au delà des Alpes et de l'Italie elle-même... Pendant qu'il demeurait chez les Celtes, Népotianus... marcha sur Rome, se montrant sous la toge royale (impériale) (80)...
XLV. ... Magnentius, ayant résolu d'aller à la rencontre (de Constantius) avec de plus grandes forces, déclare caesar Décentius, son parent (81) pour lui donner la garde des peuples transalpins.
LIV. Magnentius fut donc tué de cette manière (82) ; il tirait son origine des barbares et avait été chez les Lètes, peuple galatique (gaulois) où il avait appris les lettres latines (83)...

Livre troisième.

1. Constantius voyait que tous les pays soumis aux Romains leur étaient ôtés par les invasions barbares ; que les Francs, les Alamans et les Saxons leur avaient déjà pris quarante villes situées sur le Rhèn, qu'ils les avaient dévastées ; que des habitants de ces villes, innombrable multitude, ils avaient fait butin aussi bien que de leurs richesses, incalculables dépouilles... Ne sachant que faire, ... il n'osait pas pourtant associer personne à l'empire, et l'empire romain se trouvait dans le plus grand danger. Alors Eusébie, sa femme.... lui suggéra une idée (84) ; elle lui conseilla d'établir, avec le titre de caesar, Julianus chez les peuples transalpins...
II ... Dès que Julianus, mandé [par l'empereur], est arrivé de l'Hellade en Italie, Constantius le déclare caesar, lui donne la main de sa soeur Hélène, et renvoie au delà des Alpes (85). Défiant de son naturel, et croyant qu'il ne pouvait pas encore compter sur le dévouement et la fidélité de Julianus, il envoya avec lui Marcellus et Sallustius; et c'est à eux et non au caesar qu'il confia l'administration du pays. Julianus ayant passé les Alpes et s'étant installé chez les peuples galatiques qui lui étaient assignés, comme les barbares n'en continuaient pas moins tout à leur aise leurs invasions, Eusébie, par les mêmes raisons qu'auparavant, persuada à Constantius de lui laisser toute l'administration de ces contrées-là.
III. Julianus (86), trouvant que l'organisation de l’armée chez les Celtes était en majeure partie minée, que les barbares passaient le Rhèn sans rencontrer d'obstacles, qu'ils poussaient dans leurs courses presque jusqu'aux villes maritimes, examina ce que pouvait valoir ce qui lui restait en fait d'armée. Voyant d'autre part que les gens du pays tremblaient rien qu'à entendre le nom des barbares, que les soldats qui lui avaient été donnés par Constantius, au nombre de trois cent soixante, ne savaient, comme il dit lui-même quelque part, que faire des prières, il encadra dans ses légions tous les hommes dont il put disposer et reçut même de nombreux volontaires. S'occupant ensuite des armes, il en trouva de vieilles emmagasinées dans une certaine ville, et, ayant jugé qu'elles valaient la peine d'être entretenues comme il convient, il les distribua à ses soldats. Informé par ses espions que près de la ville d'Argentore, située sur la rive du Rhèn, une multitude innombrable de barbares avaient passé le fleuve, à peine en eut-il eu connaissance qu'il marcha contre eux avec son armée improvisée. Il en vint aux mains avec les ennemis et dressa un trophée, qui surpassa toute hyperbole, car dans la bataille six myriades d'hommes furent tués et d'autres, en pareil nombre, sautèrent dans le Rhèn et périrent dans les flots (87) ...
IV (0). Cette tâche accomplie, le caesar rassembla à loisir une multitude de soldats et se prépara à faire la guerre à toute la nation des Germains ; les barbares lui opposèrent une multitude énorme de combattants ; mais, au lieu d'attendre leur attaque, il passa le Rhèn, jugeant qu'il valait mieux guerroyer sur leurs terres que sur celles de Rome. Par ce moyen les villes n'avaient pas à souffrir une fois de plus du passage des barbares. Le combat fut très rude : une multitude innombrable d'ennemis y tomba et le caesar poursuivi les fuyards jusqu'aux forêts Hercynies. Ayant fait un grand carnage, et pris vivant Badomarios (88), le fils du chef des barbares, il ramena chez elle l'armée chantant ses victoires et célébrant l'habileté du caesar son général. Julianus envoya Badomarios à Constantius, faisant hommage de sa victoire à la fortune de l'empereur. Les barbares réduits à cet extrême danger, et craignant déjà pour leurs femmes et pour leurs enfants, qu'un jour le caesar, parvenant jusqu'aux lieux où ils étaient, ne fit butin de leur race tout entière, envoient des députés pour parler avec lui d'amitié et lui promettre de ne jamais plus faire la guerre aux Romains. Le caesar leur dit ne pouvoir pas entrer en pourparler d'amitié avant d'avoir recouvré tous les captifs qu'ils avaient antérieurement emmenés des villes prises par eux. Ils demeurèrent d'accord de lui donner satisfaction sur ce point et de lui rendre tous ceux qui étaient encore en vie. Et le caesar, pour faire en sorte que pas un des prisonniers ne restât à son insu chez les barbares, s'avisa de cet expédient : ayant envoyé chercher les hommes qui s'étaient enfuis de chaque ville et de chaque bourgade, il leur demanda de lui désigner par leurs noms ceux de la ville ou de la bourgade de chacun d'eux qui avaient été emmenés comme prisonniers par les barbares. Chacun lui ayant nommé ceux de sa connaissance, parents, voisins ou amis, il ordonne aux secrétaires royaux (impériaux) d'en dresser une liste complète. Cela fait, et les députés ignorant son dessein, il passe le Rhèn et enjoint aux députés de revenir avec les prisonniers : ils ne tardèrent guère à exécuter ses ordres et dirent qu'ils avaient tous les prisonniers. S'asseyant alors sur une haute, estrade, le cæsar qui avait placé derrière cette estrade ses secrétaires, ordonna aux barbares de faire, suivant leur convention, approcher les prisonniers. Ceux-ci s'avançaient un par un en disant leurs noms, et les secrétaires qui se tenaient près du cæsar cherchaient ces noms sur la liste qu'ils avaient par devers eux; puis, rapprochant ceux qu'ils avaient notés auparavant et ceux qu'on présentait actuellement au cæsar, et trouvant en bien plus grand nombre ceux dont les noms avaient été donnés par les habitants des mêmes villes ou bourgades, placés derrière le cæsar, ils lui signalaient ces différences. Et lui, menaçant de la guerre les députés des barbares, parce que tous les prisonniers n'avaient pas été rendus; il leur citait les noms, que lui soufflaient ses secrétaires, de ceux qui manquaient de chaque ville, et de chaque bourgade. Et les barbares, croyant que c'était par quelque action divine que des choses si bien cachées, si peu claires, se déclaraient au cæsar, convinrent de lui rendre tous les prisonniers qu'ils pourraient trouver vivants : ils en firent serment à la façon de leur pays.
V. Cela fait, et les captifs rendus en nombre tel que devaient l'être ces malheureux ramassés dans quarante villes prises de vive force, le cæsar se trouvait bien embarrassé : que faire ? Il voyait les villes détruites de fond en comble, la terre longtemps demeurée inculte, les vivres qu'il fallait fournir non pas en petite quantité aux prisonniers rendus par les barbares, et qu'il était impossible de se procurer dans les villes voisines qui, n'ayant pas été elles-mêmes exemptes des attaques des barbares, n'avaient pas même pour elles assez de vivres. Ne sachant donc comment faire face aux circonstances présentes, voici le moyen dont il s'avisa : aux extrémités de la Germanie, là où se trouve un peuple galatique (gaulois), le Rhèn se jette dans la mer Atlantique. De ce rivage à l'île Brettanique, la distance est de 900 stades (89). Julianus, ayant rassemblé beaucoup de bois coupé dans les forêts voisines du fleuve, construisit 800 bateaux plus grands que des chaloupes; il les envoya en Brettanié avec l'ordre d'en revenir chargés de blé; et ce blé, il s'arrangea de façon à le faire transporter par les bateaux du Rhèn en amont de ce fleuve. Cette opération, continuellement répétée, à cause de la brièveté du trajet, fournit aux habitants rendus à leurs villes de quoi se nourrir, ensemencer leurs terres et vivre commodément jusqu'à la moisson...
VI (0) Tous les barbares de ces pays-là avaient, pour ainsi dire, abdiqué toute espérance, et peu s'en fallait qu'ils ne s'attendissent à la destruction totale de ce qui restait encore de leur nation, lorsque les Saxons, de tous ceux qui habitent ces régions les plus puissants par leur courage, leur force (physique), et leur fermeté dans les batailles (90), envoyèrent les Quades, qu'ils regardent comme une partie d'eux-mêmes, sur les terres occupées par les Romains. Arrêtés au passage par les Francs, leurs voisins, qui craignaient de donner au caesar un juste motif de marcher de nouveau contre eux, ils construisirent des bateaux, et s'étant, par le Rhèn, portés au delà des terres qu'occupaient les Francs, ils se ruèrent sur les pays soumis aux Romains. Ayant abordé dans la Batavie, île formée par le Rhèn divisé en deux bras, et la plus grande de toutes les îles fluviales, ils en expulsèrent les Salii, branche de la nation franque, que les Saxons avaient chassés de leur pays dans cette île. Or, cette île, qui auparavant était tout entière aux Romains, était alors occupée par les Salii. Le caesar, ayant appris ce qui se passait, attaque à son tour les Quades, recommande à son armée de se battre rudement avec eux, mais de ne tuer aucun des Salii et de ne pas les empêcher de passer la frontière romaine, où ils ne se présenteraient pas en ennemis, mais contraints et forcés par les Quades. Connaissant cette bonté du cæsar envers eux, des Salii les uns quittent leur île et passent avec leur roi sur le territoire romain, les autres, cherchant un refuge, descendent vers nos frontières; tous s'adressent au caesar en suppliants et volontairement se donnent à lui avec tout ce qui leur appartient. Et lui, voyant que les barbares n'avaient plus de hardiesse pour la vraie guerre, et ne songeaient plus qu'à des courses clandestines et à des brigandages, mais n'en faisaient pas moins de mal, un mal réel au pays, et ne sachant quel parti prendre, il eut recours à un habile stratagème pour déjouer les artifices des barbares.
VII. Il y avait un homme d'une taille au dessus de tous les autres et d'un courage en rapport, avec sa taille : il était de la race des barbares, accoutumé à faire avec eux le brigandage ; l'idée lui vint de laisser là sa maison, ses habitudes, et de s'établir chez les Celtes, sujets des Romains. Il demeurait depuis un certain temps à Trivères, la plus grande ville des nations transalpines; voyant les barbares trans-rhénans courir par les villes de ce pays-là et, sans nul empêchement, faire butin du bien de tous les habitants, alors que Julianus n'avait pas encore l'autorité de cæsar, il s'était mis dans l'esprit de défendre ces villes. Mais n'ayant pas la liberté d'agir, attendu qu'aucune loi ne lui permettait de le faire, au commencement il se cachait seul dans les fourrés les plus épais des bois et guettait l'arrivée des barbares; puis, les attaquant de nuit dans le laisser-aller de l'ivresse et du sommeil, il coupait autant de têtes qu'il pouvait et les allait montrer dans la ville. Par cette pratique continuelle, il n'inspira pas peu de crainte aux barbares qui, sans savoir comment cela se faisait, s'apercevaient bien du mal dont ils souffraient à la diminution pour ainsi dire journalière de leur nombre. D'autres brigands se joignirent à lui et, se rassemblant un par un, devinrent une multitude. Alors, allant trouver le caesar, Charietton (c'était le nom de l'homme qui le premier eut l'idée d'en user ainsi avec les barbares) lui révèle ce qui, auparavant, n'était pas encore connu de beaucoup de personnes. Or, il n'était pas facile au cæsar de poursuivre pendant la nuit, avec son armée, en leurs incursions clandestines, les barbares qui, par petites troupes, et en se dispersant sur plusieurs points, exerçaient leurs brigandages, et, le jour venu, devenaient absolument invisibles, parce qu'ils se cachaient dans les bois, autour de leurs champs, pour s'y nourrir des produits de leurs rapines. Se prenant donc à penser à la difficulté de venir à bout de ces ennemis, il se trouva dans la nécessité de poursuivre ces brigands non seulement avec une armée, mais avec une bande de brigands. Il accueille ainsi Charietton et sa suite et, leur ayant adjoint un bon nombre de Salii, il envoie de nuit contre les Quades exerçant leurs brigandages ces hommes, brigands. eux-mêmes de profession ; pendant le jour, il avait des troupes postées en rasé campagne, et tous ceux qui pouvaient échapper aux brigands, il les tuait. Il continua de faire ainsi jusqu'à ce que les Quades, se voyant dans une situation extrêmement difficile et leur multitude réduite à un petit nombre, se rendirent avec leur chef au caesar qui leur avait déjà fait, dans les précédentes rencontres, quantité de prisonniers, et entr'autres le fils de leur roi, qu'il avait reçu de Charietton. Tandis qu'ils étaient là, lui adressant d'un air pitoyable leurs supplications, Julianus leur demanda en otages quelques personnages illustres de leur nation et, avec eux, le fils de leur roi. Alors le chef des barbares, s'étant mis à sangloter de la façon la plus lamentable, jura tout en larmes qu'il avait perdu avec les autres son fils. Et le caesar, prenant en pitié. ces larmes d'un père, lui montra son enfant, bien nourri, bien traité (91) ; il ajouta qu'il le gardait en qualité d'otage et, ayant reçu avec lui d'autres otages appartenant à la noblesse, il leur accorda la paix, à la condition de ne plus prendre les armes contre les Romains.
VIII..Ces affaires ainsi réglées, le caesar enrôla les Scilii, une partie des Quades et quelques-uns des barbares établis dans l'île des Bataves ; il en fit des corps réguliers qui, à ce qu'il paraît, ont été conservés jusqu'à présent. Dans le même temps, le roi Constantius était en Orient, n'ayant en tête que les affaires de la Perse, et employant ses forces aux guerres de ces pays-là. (0) Chez les peuples delà les Alpes, tout allait bien pour lui, grâce au gouvernement prévoyant et sage du caesar; l'Italie entière et l'Illyrie n'avaient à redouter aucun danger, parce que les barbares delà l'Ister, dans la crainte que le caesar, traversant les Gâlaties, ne vînt passer le fleuve et tomber sur eux, se montraient plus modestes.
L'Orient paraissait tranquille (92); les exploits du caesar étaient dans toutes les bouches ; Constantius en fut pris d'un affreux chagrin. Mordu [au coeur] par le calme heureux qui régnait chez les Celtes et les Ibères, il machinait des prétextes par où il pourrait peu à peu et sans honte diminuer les forces du caesar, et ainsi le dépouiller de sa dignité (93) : par un message, il ordonne à Julianus de lui envoyer deux légions des soldats qui étaient chez les Celtes ; il avait, disait-il, besoin de ce renfort. Julianus, qui ignorait son dessein et ne voulait lui donner aucun sujet de se mettre en colère, accomplit sur-le-champ les ordres [de l'empereur] ; mais aussi, jugeant à propos de donner tous ses soins aux affaires des Celtes, il augmentait continuellement son armée et inspirait aux barbares qui habitaient aux extrêmes frontières une telle terreur qu'ils n'avaient pas, même en songe, envie de faire la guerre. Cependant Constantius demanda que d'autres cohortes lui fussent encore envoyées par le caesar, et, en ayant obtenu ce qu'il demandait, il donna peu après l'ordre de lui envoyer quatre escadrons, et sur-le-champ le caesar signifia aux soldats d'avoir à se préparer au départ.
IX. (D. B.) Julianus demeurait alors à Parisium, petite ville de Germanie (94) ; les soldats, qui étaient tout prêts pour le départ, prolongeaient très avant dans la nuit leur repas du soir, aux alentours du palais, sans avoir, aucune idée de ce qui se tramait contre le caesar. Mais quelques taxiarques (tribuns) avaient découvert dans ce qui se faisait la vérité au sujet des machinations auxquelles, depuis longtemps, Julianus était en butte : ils jetèrent en cachette au milieu des soldats des billets anonymes et leur révélèrent ainsi que ce caesar qui, par ses habiles manoeuvres, leur avait pour ainsi dire donné à tous le moyen de dresser contre les barbares des trophées, que ce général qui, dans les batailles, ne mettait entre eux et lui aucune différence, allait courir un extrême danger, parce que le roi lui soutirait peu à peu toutes ses forces; s'ils ne couraient tous arrêter les soldats désignés pour partir. Ces billets ainsi semés çà et là furent lus de quelques soldats, qui rapportèrent à la multitude l'intrigue en question et excitèrent partout la colère. Ils se lèvent de table en grand tumulte et, la coupe encore à la main, ils s'élancent vers le palais; ils en forcent les portes, sans souci de l'étiquette, et, amenant le caesar dans la voie publique, ils l'élèvent sur un bouclier, le proclament auguste empereur et lui mettent par forcé le diadème sur la tête (95).
(0) Et lui, mécontent de ce qui était arrivé, mais ne pensant pas qu'il y eût aucune sûreté pour lui à rappeler le passé, - car Constantius ne tenait ni serments, ni traités, et ne gardait en rien la foi jurée, garantie des relations des hommes, - il voulut pourtant sonder les intentions du prince, et lui envoya des ambassadeurs. C'était contre sa volonté, disait-il, contre ses intentions que s'était produit l'incident de cette proclamation; que l'empereur voulût bien le lui pardonner, il se déclarait prêt à se contenter de la dignité de caesar et à déposer le diadème. Mais Constantius se laissa emporter par la colère et l'arrogance au point de dire aux ambassadeurs que, si Julianus tenait à la vie, il devait déposer, avec l'insigne de la royauté, le titre de cæsar; et, redevenu simple particulier, se remettre à la discrétion du roi : il ne serait pas traité avec rigueur ni comme le méritait son attentat. Après cette réponse, apportée par ses ambassadeurs, Julianus montra clairement les idées de son choix par rapport à la divinité en disant ouvertement, pour être entendu de tout le monde, qu'il valait mieux s'en remettre pour lui et pour sa vie à la volonté des dieux qu'à la parole de Constantius. Dès lors devint manifeste pour tous la malveillance de ce dernier envers Le caesar en était là, retournant sa pensée en tout sens, agité, hésitant à la veille d'une guerre civile, lorsque, dans un songe, la divinité lui montra l'avenir. Il était à Vienne ; le soleil, dans un rêve, sembla lui montrer les astres et lui dire ces vers :
Quand Zeus sera à la large limite du fameux verseau, et que Cronos viendra au vingt-cinquième degré de la Vierge, Constantius, le roi de la terre d'Asie, atteindra, dans les affres et la douleur, la limite de sa vie.
Rassuré par ce songe, il s'appliqua, selon son habitude, au soin des affaires publiques, et, comme on était encore en hiver, il crut à propos de prendre à l'égard des barbares toutes les précautions nécessaires, afin de laisser, s'il devait être occupé ailleurs, les affaires celtiques dans une entière sécurité...
X. Quand on fut au coeur de l'été, il avait arrangé les affaires avec les barbares d'outre-Rhèn en obligeant les uns, par la guerre, à se montrer plus sages, et en persuadant aux autres, par l'expérience du passé, de préférer la paix à la guerre. Alors il régla tout dans l'armée comme pour une longue absence, et, ayant établi dans les villes et sur les frontières des gouverneurs civils et militaires, il marcha vers les Alpes avec toutes ses forces...
XXXV. (D. B.) ... Les Bataves qui étaient à Sirmium, où ils avaient été laissés pour la garde de cette ville, à la nouvelle de la mort de Julianus, tuèrent Lucillianus parce qu'il avait été le messager d'un si grand malheur (96), sans considérer qu'il était allié du roi; quant à Procopius, respectant en lui un parent de Julianus, ils le renvoyèrent sans lui faire aucun mal.....

Livre quatrième.

III (0). Il parut bon à Valentinianus, de partager l'empire avec son frère... en prenant pour lui-même les villes de l'Illyrie, puis de passer en Italie et de mettre sous son obéissance les villes de ce pays avec les peuples transalpins, ceux de l'Ibérie, de l'île Brettanique et de la Libye tout entière Les barbares d'outre-Rhèn, qui, tant qu'avait vécu Julianus, redoutant le nom des Romains, étaient contents de rester dans leur pays sans y être troublés par personne, n'ont pas plus tôt appris la nouvelle de sa mort qu'ils sortent de leurs demeures habituelles et se préparent à la guerre contre les Romains. Valentinianus, informé de leurs mouvements, distribue, comme il convient, toutes ses troupes : infanterie, cavalerie, troupes légères, (D. B.) et met dans les villes du Rhèn les garnisons nécessaires...
IX. ... Le roi Valentinianus, pendant qu'il résidait chez les nations transalpines, courut les plus grands dangers et les plus imprévus (97). Tous les Germains, au souvenir des maux qu'ils avaient soufferts dans le temps que Julianus avait le pouvoir comme caesar, à l'heure même où ils connurent sa mort, secouèrent la terreur dont leurs âmes étaient pénétrées, et, reprenant leur audace naturelle, envahirent à la fois les contrées soumises à l'empire romain. Le roi étant allé à leur rencontre, une rude bataille s'engagea, où les barbares furent vainqueurs (98), après avoir poursuivi l'armée romaine en déroute. Valentinianus ne songea point à éviter le danger par la fuite, et, supportant sans fléchir ce coup de la fortune, il rechercha les auteurs de cet échec, ceux qui les premiers s'étaient mis à fuir. Grâce à une enquête exacte, il put accuser le corps des Bataves; il ordonna donc à toutes les troupes de prendre les armes et de se rassembler comme pour entendre des paroles qu'il avait à dire dans l'intérêt général. Alors il tint un langage infligeant à ceux qui avaient fui les premiers de la honte pour leur vie entière, et il donna l'ordre aux Bataves de mettre bas les armes pour être vendus publiquement, comme des esclaves fugitifs, à ceux qui en offriraient le prix, à condition de les transporter ailleurs. Tous alors, prosternés le visage contre terre, supplient l'empereur de délivrer l'armée d'une pareille honte, et promettent de se montrer des hommes de coeur, vraiment dignes du nom romain. Le prince leur ayant ordonné de montrer tout de suite ce qu'ils sauraient faire, ils se relèvent, s'arment comme il fallait et recommencent le combat ; sortis de leur camp, ils montrèrent dans la guerre un tel courage que, d'une immense multitude de barbares, il s'en sauva à peine quelques-lins qui rentrèrent dans leurs foyers. Telle fut alors la fin que la fortune mit à ce combat contre, la Germanie tout entière (99).
XII. Pendant que Valens était occupé à ces préparatifs, le roi Valentinianus, ayant rétabli l'ordre dans les affaires de Germanie (100), crut qu'il lui fallait aussi pour voir, pour l'avenir, à la sécurité des peuples celtiques. Ayant donc rassemblé une troupe de jeunes gens, la plus. nombreuse qu'il pût, et parmi les barbares qui habitent les bords du Rhèn et parmi les laboureurs des provinces soumises aux Romains, il les enrôla, leur donna place dans les rangs de ses soldats, et les exerça si bien aux choses de la guerre que, redoutant l'instruction et l'expérience de cette milice, pendant neuf ans entiers, pas un des peuples transrhènans n'incommoda les villes soumises aux Romains.
XIX. Après la mort de Valentinianus (101), les taxiarques (tribuns des soldats) Mérobaudès et Ékitius, voyant que Valens et Gratianus demeuraient au loin, l'un en Orient, l'autre chez les Galates occidentaux, où il avait été laissé par son père, soupçonnèrent qu'il pourrait bien arriver que les barbares delà l'Ister tombassent sur l'empire dépourvu de chefs; ils firent donc venir le jeune fils de Valentinianus, que ce prince avait eu de son mariage avec la veuve de Magnentius, et qui n'était pas loin de là avec sa mère, et le conduisirent, revêtu de la pourpre, dans le palais, bien qu'il eût à peine cinq ans. Gratianus et Valentinianus le Jeune se partagèrent l'empire au gré de ceux de leur entourage, qui étaient les arbitres des affaires, car, par eux-mêmes, les deux princes, en raison de leur âge, n'avaient aucune autorité. Gratianus eut en partage les nations celtiques, toute l'Ibérie et l'île Brettanique...
XXIV... Les peuples des bords du Rhèn infestaient, sans trouver d'obstacles, les villes [voisines] ; Gratianus associa Théodosius à l'empire (102) et... l'ayant mis à la tête des affaires de la Thrace et de l'Orient, il se rendit lui-même chez les Galates occidentaux pour y établir l'ordre autant qu'il serait capable de le faire.
XXXIII Le roi Gratianus ne fut pas médiocrement troublé par ce qu'on lui annonçait (103) : il envoya une armée assez forte, dont il donna le commandement à Baudon, un de ses généraux, avec qui il envoya Arbogastès. Ils étaient tous deux de nationalité franque, fort dévoués aux Romains, aussi peu que possible disposés à se vendre et distingués dans les choses de la guerre par leur prudence et leur valeur.
XXXIV... Pendant qu'il (Vitalianus) commandait en Illyrie, deux partis de Germains d'outre-Rhèn, l'un commandé par Tritigern, l'autre sous les Ordres d'Allothus et de Safrax, s'abattirent sur les peuples celtiques et mirent le roi Gratianus dans la nécessité de leur permettre, à condition qu'ils quitteraient la Celtique, de passer l'Ister et. d'occuper la Panonie et la Mysie supérieure...
XXXV... Les soldats s'insurgèrent aisément; ils proclamèrent roi Maxime (104), le revêtirent de la pourpre et du diadème, et aussitôt, traversant l'Océan, ils abordèrent aux embouchures du Rhèn. Les armées qui étaient en Germanie et dans les contrées voisines s'étant prêtées très volontiers à cette proclamation, Gratianus se présenta pour leur livrer bataille; il avait encore avec lui, dans cette lutte, une partie assez considérable de son armée. Quand les forcés [ennemies] se furent rapprochées les unes des autres, il y eut d'abord des escarmouches pendant cinq jours seulement; mais Gratianus, ayant vu d'abord toute la cavalerie des Maurusii faire défection et proclamer Maximus Auguste, ensuite les autres se ranger peu à peu au parti de son rival, renonça à ses espérances, réunit trois cents cavaliers et s'enfuit en toute hâte vers les Alpes... XLVII. Le roi Théodosius, ayant ouï dire que Maximus, passant les Alpes, avait laissé dans le pays son fils Victor (105), honoré de la dignité de caesar, envoya sur-le-champ son général Arbogastès, qui dépouilla du pouvoir le jeune homme et le fit mourir... Il laissa Valentinianus disposer à son gré de l'Italie, des Celtes et de tous les pays qui étaient sous sa domination. Ce prince avait avec lui sa mère, et elle suppléait, autant que cela était possible à une femme, ce qui, en raison de son jeune âge, lui manquait du côté de la prudence.
LI. Parmi ceux à qui avaient été commises les charges de l'État, on considérait comme tenant dans les honneurs un rang à part Rufin, Celte de nation, qui avait été fait maître des offices du palais (106). Le prince lui confiait toutes choses, comptant pour peu les autres.
LII. Ce Rufin, comme s'il eût fait (en assassinant Promotus) quelque noble action, fut déclaré consul... Auparavant, Titianus avait été destitué de sa charge et mis en jugement; et Rufin avait été nommé préfet du prétoire. 
LIII Arbogastès, issu de la nation des Francs, avait été établi par Gratianus, alors régnant, lieutenant de Baudon, et, celui-ci mort, fort de son énergie, il s'était investi lui-même de la charge de maître de la milice sans la permission du roi. Considéré par les soldats sous ses ordres comme à la hauteur de cette dignité par sa valeur, sa science de la guerre, son dédain pour l'argent, il parvint à une grande puissance et fut même assez fort pour parler librement au roi et empêcher ce qui ne lui paraissait ni honnête, ni opportun. Valentinianus, qui le supportait avec peine, lui résistait souvent, mais en pure perte, parce que Arbogastès avait pour appui l'affection de tous les soldats. Enfin le prince, ne pouvant souffrir davantage cette sujétion, un jour qu'assis sur son trône royal il vit Arbogastès s'approcher, il lui jeta un regard courroucé et lui remit un ordre écrit qui le privait de sa charge. Mais lui, l'ayant lu : « Tu ne m'as pas, dit-il, donné cette charge, tu ne pourras pas me l'ôter. » Et, cela dit, il déchira la lettre, en jeta les morceaux par terre et s'en alla (107)...
LIV. Le roi faisait sa résidence à Vienne, ville celtique. Un jour qu'il se livrait à divers jeux avec quelques soldats autour des murailles, sans avoir aucune idée du sort qui l'attendait, Arbogastès, tombant sur lui, le frappe au bon endroit et le tue (108). Tout le monde souffrit en silence ce coup d'audace, à cause de la dignité de celui qui l'avait fait, de sa bravoure dans les combats et aussi de la grande affection qu'inspirait à tous les soldats son mépris pour l'argent. Il déclare Eugénius roi, donnant de lui de bonnes espérances, à cause des qualités supérieures dont il était doué.
LVIII. ... Arbogastès, trouvant indigne de rien devoir à l'humanité de Théodosius, s'enfuit dans les endroits les plus escarpés des montagnes, mais, connaissant les allées et venues de ceux qui le cherchaient, il s'enfonça son épée dans le corps, préférant une mort volontaire au malheur d'être pris par ses ennemis.
LIX... Le roi Théodosius, ayant donné à Honorius, son fils, les peuples de l'Italie, les Ibères, les Celtes et, en outre, toute la Libye, et revenant à Constantinople, mourut de maladie (109) ...

Livre cinquième.

VII Le roi (Arcadius), s'étant laissé persuader (par Gaïnas), vint hors de la ville (Constantinople) au-devant des soldats, qui, l'ayant salué (110), en reçurent les marques d'amitié qu'il convient de leur donner. Alors, à un signe convenu que leur fit Gaïnas, tous ensemble. ils entourent Rufin et le frappent de leurs épées : celui-ci lui abat la main droite, celui-là lui coupe la main gauche ; un autre, qui lui a séparé la tête du cou, s'en va en chantant des refrains. de victoire (111). Dans leurs sarcasmes, ils allèrent jusqu'à promener sa main partout dans la ville, en demandant à ceux qu'ils rencontraient de donner de l'argent à cet homme qui en était insatiable.
XXVI. Pendant qu'Alarich était dans l'attente de l'ordre auquel il devait obéir, Rodogaïse, ayant rassemblé au delà de l'Ister et du Rhèn, chez les Celtes et chez les Germains, jusqu'à quarante myriades d'hommes, se hâtait pour passer en ltalie (112)....
XXVII. À Ravenne Stélichon était prêt à marcher avec une armée sur les villes d'Illyrie : aidé d'Alarich, il voulait les arracher à Arcadius et les annexer au royaume d'Honorius; mais il se produisit deux incidents qui l'en empêchèrent : le bruit qui courut de la mort d'Alarich et l'arrivée d'une lettre de Rome par laquelle Honorius l'informait que Constantin s'était emparé de la tyrannie, et qu'ayant passé de l'île Brettanique [sur le continent], il se trouvait chez les peuples transalpins, exerçant dans les villes l'autorité royale...
XXXI... il (Stélichon) lui disait que la révolte de Constantin ne lui permettait pas de détourner son attention de l'Italie et de Rome elle-même, lorsque déjà ce tyran avait parcouru toute la Galatie (Gaule) et faisait sa résidence à Arélatos.
XXXII.... Les soldats, pris d'une sorte de délire, égorgent Limenius, préfet du prétoire chez les peuples transalpins, et avec lui Chariobaudès, maître de la milice en ces contrées : ils avaient pu s'échapper des mains du tyran et étaient allés à la rencontre du roi à Ticènum.
XLIII. En ce moment, Constantin le tyran envoya des eunuques à Honorius pour lui demander pardon d'avoir osé prendre la dignité royale : ce n'était pas de son plein gré qu'il s'en était emparé; elle lui avait été imposée de force par les soldats. Le roi, ayant entendu cette demande, considéra qu'il ne lui était pas facile, alors que les barbares d'Alarich n'étaient pas loin, de songer à d'autres guerres ; il fit d'ailleurs réflexion que ses propres parents, Vérènianus et Didymius, étaient entre les mains du tyran ; il accorda donc ce qu'on lui demandait et envoya à Constantin même la robe royale, mais il prenait un soin bien inutile pour ses parents, égorgés même avant le départ des ambassadeurs, et là-dessus il renvoya les eunuques.

Livre sixième.

I. ... (113) (0). À ce moment arriva de la part de Constantin qui s'était fait tyran chez les Celtes,.Jovius, envoyé en ambassade à Honorius. Ce personnage, aussi distingué par sa science que par ses autres vertus, venait demander la confirmation de la paix, précédemment: conclue, et en même temps le pardon [de l'empereur] pour le meurtre de Didymius et Vérènianus, parents d'Honorius. Il disait, pour la défense de son maître, que ce n'était pas par la volonté dé Constantin que s'était accompli ce meurtre. Voyant Honorius tout troublé, Jovius ajouta que, occupé comme l'était l'empereur des intérêts de l'Italie, il serait raisonnable à lui de céder; que, s'il avait la permission de s'éloigner et d'aller annoncer à Constantin la détresse de l'Italie, ce dernier ne tarderait guère à venir avec toutes les forcés qui étaient chez les Celtes, en Ibérie et dans l’île Brettanique pour secourir l'Italie et Rome en ces circonstances difficiles. À ces conditions, Jovius reçut l'autorisation de partir. Mais les événements accomplis chez les Celtes n'ont pas encore été racontés avec tous les détails qu'ils méritent ; il est donc juste de remonter plus haut et de dire, en les parcourant, comment les faits se sont passés.
II. Arcadius régnait encore; Honorius était consul pour la septième fois et Théodosius pour la deuxième. Les soldats campés en Brettanie s'étant révoltés, élevèrent Marcus sur le trône royal et lui obéirent comme au maître de ce pays. L'ayant tué ensuite, parce qu'il ne partageait pas leurs idées, ils amènent au milieu d'eux Gratianus, lui mettent la robe de pourpre et la couronné et lui donnent une garde comme à un roi. Mais il leur déplaît bientôt et, au bout de quatre mois, ils lui ôtent le pouvoir et la vie, et donnent le titre de roi à Constantin (114). Celui-ci, ayant placé à la tête des soldats campés chez les Celtes Justinianus et Néviogastès, quitte la Brettanie et passe sur le continent. Arrivé à Bonônia, - c'est la première ville qu'on trouve près de la mer, et elle appartient à la Germanie inférieure, - il y demeure quelques jours et, ayant mis dans ses intérêts toutes les troupes [du pays] jusqu'aux Alpes, limites communes de la Galatie et de l'Italie, il croyait sûrement posséder l'empire. Mais, vers le même temps, arrive le général Sarus avec une armée envoyée contre Constantin pàr Stèlichon. Sarus, avec toutes ses forces, marche à la rencontre de Ju­tinianus, général [ennemi] ; il le tue, lui et la plus g,rande partie de ses soldats. Maître d'un butin considérable, il apprend que Constantin a occupé Valentia, ville assez forte pour le mettre en sûreté, et il en fait le siège. Restait l'autre général, Néviogastès ; il offrit à Sarus de parler avec lui de paix. et d'amitié, et il fut accueilli comme un ami ; mais les serments étaient à peine, échangés qu'il était massacré ; car, pour Sarus, les serments ne comptaient pas. Or, Constantin prit pour généraux Édobinclh, Franc de nation, et Gérontius, originaire de la Brettanie. Alors Sarus, redoutant l'expérience de ces généraux aux choses de la guerre et aussi leur bravoure, s'éloigna de Valentia, après l'avoir assiégée sept jours. Les généraux de Constantin coururent après lui avec de très grandes, forces, et c'est à grand'peine qu'il leur échappa, après avoir abandonné tout son butin aux Bacaudes qui étaient venus à sa rencontre autour des Alpes, afin d'obtenir d'eux le champ libre pour passer'en Italie (115). Sarus arrivé ainsi sain et sauf en Italie, Constantin rassembla toutes ses forces et eut l'idée de mettre des garnisons suffisantes dans les Alpes. Ces montagnes, qui forment les routes pour aller du pays des Celtes en Italie et de cette dernière contrée dans l'autre, se divisent en trois groupes, les Cotties, les Poenines et les Maritimes. S'il jugea à propos de prendre les mesures de prévoyance que j'ai dites, voici quels furent ses motifs.
III. A une époque antérieure, sous le sixième consulat d'Arcadius et de Probus (116), des Vandiles mêlés à des Suèves et à des Alains, ayant franchi ces passages, avaient porté le ravage chez les peuples transalpins, et, après y avoir fait de grands massacres, s'étaient rendus redoutables même aux armées de Brettanie, qui furent contraintes, par la peur de les voir arriver jusqu'à' elles, d'en venir à élire des tyrans, je veux parler de Marcus, de Gratianus et de Constantin après eux. Dans une rude bataille contre ce dernier, les Romains furent vainqueurs, après avoir égorgé la plus grande partie ,des barbares; mais ils ne poursuivirent pas les fuyards, qu'ils auraient pu exterminer totalement : ils leur permirent ainsi de réparer leur défaite, de former une grande multitude agglomérée et de devenir assez forts pour engager de nouveaux combats. Voilà pourquoi Constantin mit dans ces lieux des garnisons; afin de ne pas laisser le passage libre aux barbares. Il mit ainsi hors de tout danger les pays rhénans, dont la sécurité avait été bien négligée depuis les temps du roi lulianus (117).
IV. Après avoir ainsi réglé toutes choses dans la Galatie (Gaule) il revêt des insignes de caesar Constant, l'aîné de ses fils, et l'envoie en Ibérie ; il voulait se rendre maître de tous les peuples de ce pays, tout à la fois pour augmenter son empire et pour ôter en ce pays la puissance aux parents d'Honorius. La crainte lui était venue que, rassemblant un jour en corps d'armée les soldats de ce pays, et franchissant la Pyrènè, ils ne marchassent contre lui, pendant que le roi Honorius, envoyant d'Italie ses légions, l'envelopperait de toutes parts et le dépouillerait de la tyrannie. Sur ce point, Constant passa en Ibérie, ayant pour général Térentius, et pour préfet du palais Apollinarius...
V. Les opérations terminées en Ibèrie , Constant revint vers Constantin son père, emmenant avec lui Vérènianus et Didymius, et laissant là-bas, avec les soldats de la Galatie (Gaule), le général Gérontius pour garder le passage de chez les Celtes en Ibérie, malgré les réclamations des légions d'Ibérie, qui voulaient que, selon la. coutume, cette garde leur fût confiée, et qu'on ne s'en remît pas à des étrangers pour la sécurité du pays. Vérènianus et Didymius, amenés à Constantin, furent mis à mort sur-le-champ. Constant fut de nouveau envoyé par son père en Ibérie ; il emmenait avec lui Justus comme général, intolérable affront pour Gérontius, qui, ayant gagné les soldats de ces pays-là, souleva contre Constantin les barbares cantonnés chez les Celtes, et Constantin ne leur put tenir tête, parce que la plus grande partie de ses forces était en Ibérie. Aussi les barbares transrhènans, envahissant à leur aise toutes ces contrées, mirent les habitants de l'île Brettanique et quelques-uns des peuples celtes dans la nécessité de se séparer de l'empire des Romains, de vivre par eux-mêmes, sans plus obéir à ses lois. Les gens de la Brettanie prirent donc les armes et, affrontant le danger pour leur intérêt, délivrèrent leurs villes des barbares qui les infestaient. Toute l'Armorique et les autres provinces des Galates (Gaulois), à l'exemple des Brettans, se rendirent libres de la même façon, chassant les magistrats romains et constituant à leur gré chez eux un gouvernement national.
VI. Cette défection de la Brettanie et des peuples celtes arriva au moment où Constantin usurpait le pouvoir souverain...

 

(01) Eusèbe (Eusébios), surnommé Pamphile, évêque de Césarée en Palestine, né en 264, mort en 340, retoucha l'ouvrage de Julius Africanus, Chronologie universelle, qui s'arrêtait à l'an 221, et le continua jusqu'à l'année 325. Il ne reste des Chroniques d'Eusèbe (deux livres) que la traduction, de saint Jérôme et des fragments recueillis par Scaliger en 1658, et par A.. Mai en 1833. Ces fragments ont été tirés de la Chronique paschale et de la Chronographie de George le Syncelle, qui souvent ne font que copier l'ouvrage d'Eusèbe. Nous donnons avec la version de saint Jérôme ce qui reste du texte grec (la trad. en italiques).
(02)
V. plus bas, liv. II (p. 144), sous la date Ol. 254, 1, la mort d'Alex. Sévère ; notez la différence.
(03
Abyrtum, ville de Thrace ou de Moesie. Ce nom est diversement écrit. Aure. Vict., Cæsar., Abruto (al. leg. Bruti fraude), Cassiodor., Chronic., Abricio, Thraci e loco, De Regn. succ., I, abrupto, etc.
(04
Nous donnons, sans les discuter, les dates d'Eusèbe et de saint Jérôme : on y remarquera quelques différences avec la chronologie généralement admise.
(05)
Mayence.
(06
Arles.
(07
Nîmes. 
(08)
 
Cologne, Colonia Agrippina.
(09)  
Žylein, Žylht®w, figure très usitée dans le sens de martyre. V. ci-après Eus. H. E., V, 1.
(10)
Lyon.
(11
York.
(12)
Mayence.
(13)
L'Histoire ecclésiastique, en X livres ou discours, depuis la naissance de Jésus-Christ jusqu'à la défaite de Licinius (323). Cet ouvrage est intéressant surtout par les nombreuses citations de documents qu'on ne trouve pas ailleurs. - Aucun de ces extraits d'Eusèbe n'a été donné par D. Bouquet.
(14)
Pierre, Iere Epit., 1, 1 : « Pierre, apôtre (envoyé) de Jésus-Christ, aux [Juifs] élus, dispersés chez les peuples du Pont, de la Galatie, de la Cappadocie, de l'Asie et de la Bithynie. »
(15)
V. la note 2 ci-contre. Paul, Iere Epit. à Timothée, IV, 10 : « Crescens se rendit en Galatie... »
(16
« Il y avait plus de vingt ans que la colonie asiatique de Lyon et de Vienne, malgré plus d'une épreuve intérieure, prospérait en toutes les oeuvres de Christ... La communauté lugduno-viennoise était liée par une correspondance active avec les églises mères d'Asie et de Phrygie... » Renan, ib., p. 289-290.
(17)
 
Le démon, « l'ennemi commun, » dans la trad. du président Cousin, celui qui est appelé plus loin « le méchant, » õ ponhrñw.
(18
Cousin ajoute « à la fin du monde. »
(19
Christophorson entendait les édifices publics.; Valois n'a pas de peine à démontrer qu'il s'agit des maisons particulières, c'est-à-dire que toute relation privée ou publique avec les autres citoyens était interdite aux chrétiens.
(20
Les magistrats municipaux tels que les duumvirs (Val.).
(21
Le légat de l'empereur, peut-être ici Sept. Sévère, celui qui régna quelques années plus tard (193-211). Il fut, en effet, légat de Marc-Aurèle dans la Lyonnaise; Lugdunensem provinciam legatus accepit. Spartien, Sévère, III.
(22)
Cf. ci-dessus, § 10. C'est une allusion au mot de saint Luc, 1, 67, sur Zacharie, père de saint Jean-Baptiste. KaÜ ZaxarÛaw õ pat¯r aétoè ¤pl®syh pneæmatow gÛou « et Zacharie, son père, fut rempli de l'Esprit saint. »
(23)
 
Allusion à l'examen que subissaient les athlètes avant d'être choisis pour la lutte : l'auteur reprend sa métaphore favorite. V. quelques lignes plus bas, 14.: « On prenait chaque jour; etc. »
(24
Le texte dit néophôtiste, c.-à-d. «nouvellement éclairé. » Ce mot, qui est aussi expressif que néophyte, « nouvellement né, » méritait au même titre d'être reçu dans notre langue. Nous n'avons pas osé le conserver.
(25)
Il est question ailleurs de cet instrument de torture. Justin, ap. Euseb.,.IV, 16 k’n jælÄ ¤ntinag°nai, et Origène, ap. Euseb., VI,39 : toçw pñdaw êpò t¡ssara toè kolasthrÛou jælou paratayeÜw diast®mata kataspÅmenow. - Cf. Prudence; Peristeph., V, 251 sq.: Lignoque plantas inserit divaricatis crucibus. On voit par ces textes que le jælon, le nervus, les ceps, était une pièce de bois percée de plusieurs trous où l'on introduisait, en les écartant plus ou moins, les jambes du patient.
(26
„IlaroÜ pros¹esan, c'est le même sens qu'à la ligne d'avant, katŒ toçw parodouw, c.-à-d. dans le trajet de la prison au tribunal.
(27)
Spectacle extraordinaire; car ces sortes de jeux ne pouvaient avoir lieu qu'à certains moments de l'année et pendant un temps déterminé. - Cf. Eusèbe, H. E., IV, XV, 27, lettre des chrétiens de Smyrne sur le martyre de Polycarpe. Le peuple demandait qu'on lâchât un lion contre le saint. Le gouverneur répondit que cela ne lui était pas permis, les chasses (kunhg¡sia) étant finies.
(28)
L'Église.
(29
On peut entendre ¤pist®santow « l'ayant fait comparaître, » ou bien « l'ayant remarqué. »
(30
Combats d'un contre un; combats de gladiateurs.
(31
Le démon.
(32)
1. Tatien, ibid., XXVIII : «... N'allez pas, dans vos moqueries, prêter votre démence au héraut de la vérité. » - Cf. XXXVI : pÇw ²mw diagelte; et surtout L. gelte k. t. l. .
(33
« Le mot paroikÛa, d'où est venu « paroisse, », fut d'abord à peu près synonyme d'église ou diocèse.... ParoikÛa impliquait le sens de colonie étrangère, l'Église,à la manière des Juifs, se considérant comme étrangère et exilée partout où elle était... » Renan, ibid., note.
(34
Marc-Aurèle Antonin, 177 de J.-C.
(35
L'hérésie des Montanistes.
(36)
Les Anciens, les Presbyteri.
(37)
D'Otrus ou Otrum, peut-être la même ville que l'Otryae, ƒOtræai, de Plut. Lucull., et l'Otroea, ƒOtroÛa, de Strabon.
(38)
Sur le sens du mot paroikÛa, v. la note 4 de la page 189.
(39)
Lettre de l'empereur Constantin I.
(40)
Cacilianus, évêque de Carthage, accusé d'opinions hétérodoxes.
(41)
 
An de J-C. 314.
(42
dun‹mevw. Le traducteur grec de la lettre impériale a sans doute rendu par ce mot le latin numen, puissance, volonté divine.
(43)
Quatre livres, qu'il ne faut pas confondre avec le Panégyrique du même empereur, EÞw KvstantÝnon tòn basil¡a triakontaethrikñw (lñgow), prononcé la 30e année de son règne.
(44
Le rhéteur Eumènius, ou l'auteur quel qu'il soit du Panégyrique déjà cité, ne revient pas avec moins de complaisance sur cette soumission de la Bretagne. Il trouve même cette île bien heureuse d'avoir eu un tel vainqueur : il s'écrie (c. IX): O fortunata et nunc omnibus beatior terris Britannia, quae Constantinum caesarem prima vidisti...
(45)
 
Quinze livres.
(46)
Démétrios de Tarse, contemporain de Plutarque ; le souverain dont il est ici question est vraisemblablement Vespasien. - Sur les îles voisines de la Grande-Bretagne, v., outre Mêla, loc. cit., Pline, IV, XXX, 16 ; Solin., XXII, etc.
(47
Comp. Diod. Sic., V, XXXII, dans notre t. 11, p. 396-397, et la note 2 de cette dernière page.
(48)
 
Comp. César, V, 14 : Uxores habent deni duodenique, inter se communes, et maxime fratres cum fratribus, parentesque cum liberis, etc.
(49
La circoncision, le huitième jour après la naissance.
(50)
  En Égypte.
(51)
  Vingt-deux livres ou discours, embrassant une période de dix ans, du 7e consulat d'Honorius à l'avènement de Valentinien III (407-425). Il n'en reste que des fragments conservés par Photius, Bibl., cod. LXXX. Zosime s'est beaucoup servi de ces Mémoires d'Olympiodore dans les deux derniers livres de son ouvrage. 
(52) L'auteur désigne le souverain tantôt parle nom de roi
basileçw, tantôt par celui d'empereur aétokr‹tvr. - Comp. ici Zosime, V, XLIII, et. VI, II. V. ci-après.
(53)
An de J.-C. 407.
(54
Boulogne-sur-Mer, auparavant Gesoriacum. Le nom nouveau commence à paraître vers cette époque. Eutrop., IX, , 21 ; Eumen., Panéq. de Constantin, V, Bononiense oppidum. - V. ci-apr. Zosime.
(55
A Vienne en Dauphiné, apud Viennam, P. Oros., VII, 42, ¤n bi¡nnú, Sozom., IX, 13.
(56
Commandant du contingent fourni par les Burgundes.
(57
Probablement une sorte de filets tels que ceux qu'on appelle en grec kruw et en latin casses.
(58
1er janvier 414. - Ingénius, forme exacte Ingénuus.
(59)
Sur un lit de parade. - Cet usage a duré longtemps. V. Sévigné, Lettr., 8 déc. 1679, et comp. Labruyère, ch. VII, De la Ville, av.-dern, alinéa.
(60
Six livres : Histoire des empereurs romains depuis Auguste jusqu'à l'an 410; simple résumé jusqu'à Dioclétien, le récit est plus développé à partir du règne de ce prince. Il manque la fin du 1er livre, le commencement du second, c'est-à-dire la fin du règne de Probus, les règnes de Carus, de Numérien et de Carin (liv. 1), puis les règnes de Dioclétien, de Maximien, de Constance et de Galerius jusqu'à l'an 305 de J.-C.; il manque aussi la fin du 6e.
(61)
Sévère.
(62
Comp. plus.haut, p. 144-145, Eusèbe, Chronic., II, sub ann. Ol. 254, 1, apr. J.-C. 235.
(63
Apr. J-C. 237.
(64
Apr. J.-C. 253.
(65
Apr. J.-C. 254.
(66)
Agrippina (Colonia), Cologne (an de J.-C. 260).
(67
C'est-à-dire cantonnées chez les Celtes.
(68)
An de J.-C. 276.
(69)
An de J.-C. 277.
(70)
An de J.-C. 277. - Eumène (Paneg. de Constance Chl., 18) rappelle ce fait d'incroyable audace de prisonniers francs « qui a Ponto usque correptis navibus, Graeciam Asiamgiie populati, nec impune plerisque Libye littoribus appulsi, ipsas postremo navalibus quondam victoriis ceperant Syracusas, etc.
(71)
An de J.-C. 307.
(72)
An de J.-C. 308.
(73
An de. J.-C. 312.
(74)
An de J-C. 313.
(75
An de J.-C. 317.
(76
An de J.-C. 332.
(77) An de J.C. 337. Les deux princes ici mentionnés étaient fils de Constantin 1er, dit le Grand.
(78) An de J.-C. 350 : Le repas se prolongea fort avancé dans la nuit...
Toè d¢ sumposÛou m¡xri m¡svn ¤ktay¡ntow nuktÇr, õ Magn¡ntiow di‹ ti d°yen tÇn ŽnagkaÛvn dianstŒw ¤k toè deÛpnou kaÜ pròw braxç tÇn daitumñnvn ¥autòn Žpost®saw, ¤faÛneto toÝw sumpñtaiw Ësper ¤n skhn» t¯n basilik¯n ±mfiesm¡now stol®n. TÇn de ktl.
(79
Ce passage est traduit d'Aurelius Victor (De Vita et Moribus impp. rom., XLI) ou puisé à la même source « Constans fugere conatus apud Helenam oppidum Pyrenaeo proximum a Gaisone cum lectissimis misso interficitur anno III dominationis. - Helena, Elne (Pyrén.-Orientales), nommée primitivement Illiberis.
(80)
An de J.-C. 350.
(81)
An de J.-C. 351. Saint Jérôme dit « son frère. »
(82
An de J.-C. 352. - V. la note 2 de la page ci-contre.
(83)
La perte de la bataille de Mursa, en Pannonie (351), lui avait porté un coup dont il n'avait pu se relever. Il avait dans son armée des cohortes gauloises ou celtes; il en engagea quatre qui périrent jusqu'au dernier homme dans un stade près de la ville où il les avait postées. Zosime, II, 50. ToætÄ (stadÛÄ) KeltÇn f‹laggaw t¡ssaraw ¤nap¡krucen... xriw ÷te di¡fyeiran "pantaw .- Sur Magnence et sa tyrannie, v. ci-après Socrate, II, 25, 32. Selon cet historien, Mursa est une place forte des Gaules (froærion d¢ toèto tÇn GalliÇn), à trois journées de marche de Lyon, et Adrien de Valois n'hésite pas à y voir la petite ville de La Mure en Dauphiné. « Eam esse existimat Hadr. Valesius, quæ, sublata una littera, nunc appellatur Mura, La Mure, et in Delphinatu posita est, abestque ab urbe Lugduno leugas circiter XXV aut etiam XXX, quod trium dierum iter facile conficitur. Note de D. Bouq. - Sozornène, Hist. eccl., IV, 7 (v. ci-apr.), copie Socrate.
(84
Sur le rôle de l'impératrice Eusébie en cette affaire, v. ci-apr. Socrate, Hist. eccl., III, 1. Comp. Amm. Marcell., XV, VIII, 1 : Queis (Constantii proximis) adnitentibus obstinate, opponebat se solaregina, incertum...... an pro nativa prudentia consulens in commune, omnibusque memorans anteponi debere propinquum....
(85)
Comp. plus bas Socrate, Hist. eccl., liv. II, 1, et Sozomène, Hist., eccl., V, 1-3. Ces écrivains chrétiens apprécient avec assez d'impartialité dans le nouveau césar et dans le successeur de Constance l'homme de guerre, l'administrateur, le philosophe et le restaurateur impuissant d'une religion à jamais déchue.
(86
350 ap. J.-C. - Socrate, ibid., indique l'espèce de désordres auxquels le jeune césar dut avant tout remédier.
87
) Pour les détails de la bataille d'Argentoratum (apr. J.-C. 357), v. les développements un peu emphatiques d'Amm. Marcellin (XVI,,12). Selon lui, les pertes des Romains furent insignifiantes : Ceciderunt autem in hac pugna Romani quidem CCXL et in rectores vero IV... ex Alamannis vero sex millia corporum inventa sunt in campo constrata, et inaestimabiles mortuorum acervi per undas fluminis ferebantur...
(88)
Ici, comme plus haut, dans le XIIIe fragm. d'Eunape, p. 128-9, il faudrait sans doute écrire Vadomarios ou Vadomarius. Cf. Amm. Marcel:, XIV, X, 1 et ailleurs.
(89)
Les quatre lignes qui précédent se trouvent dans les extraits de D. Bouquet. - 900 stades = 180 m. X 900 st. = 162 kil. - C'est de la Bretagne qu'il tirait d'habitude ses approvisionnements, annona a Britannis sueta transferri. Amm. Marcell., XVIII, II, 3.
(90) Ce morceau, à partir d'ici, se trouve dans D. B.
(91) Comp. plus haut, p. 122-129, le dramatique récit d'Eunape.

(92) An de J.-C. 359.
(93) Amm. Marcell.,. XX, IV, 1 : .... Urebant Juliani virtutes, quas per ora gentium diversarum fama celebrior efundebat...

(94) An de J.-C. 360. - Cf. Amm. Marcel l., ibid., 11 : cum ambigeretur diutius qua pergerent via, placuit...... per Parisios homines transire, ubi morabatur adhuc caesar nusquam motus...

(95) Comp. Ammien, ibid., 14, 17 : ... lmpositusque scuto pedestri et sublatius eminens, nullo silente, Augustus renuntiatus ...

(96)
Il était le beau-père du nouvel empereur Jovien, et avait été chargé, avec Procope et Valentinien (le successeur de Jovien), de porter aux armées la nouvelle de la mort de Julien. - Apr. J.-C. 363.
(97)
  Apr. J.-C. 366.
(98)
Charietton périt dans cette bataille: V., Amm. Marcell., XXVII, 1.
(99) An de J.-C. 366.

(100) Valentinien demeura toute cette année dans le N.-E. de la Gaule, à Reims, à Metz, à Chalons, pour surveiller les desseins des Alamans.

(101) An de J.-C. 375.

(102) An de J.-C. 379.

(103)
Ces mauvaises nouvelles étaient le déplorable état de la Thessalie et de la Macédoine, et la négligence de Théodose, son associé à l'empire, qui, sans être touché des misères publiques, ne songeait qu'a donner à Constantinople un luxe et des plaisirs en rapport avec la grandeur de la ville.
(104) An de J.-C. 383.

(105) An de J.-C. 388. Magister officiorum. « C'était une espèce de ministre universel, dont les fonctions étaient fort étendues ; il rendait la justice à presque tous les employés du palais (palatini), etc., etc. » Guizot, Hist. de la civil. en France, t. III, p. 9, in-8°.

(106)
Comp. ci-après Philostorge, XI, 1, p. 283. - Grég. de Tours, 11;9, donne, d'après Sulpice Alexandre, d'autres détails intéressants ... Valentiniano, pene infra privati modum redacto, militaris rei cura Francis satellitibus tradita...
(107)
An de J.-C. 392. - Cf. Philostorg., ibid., p. 85.
(108)
An de J.-C. 395.
(109)
Proprement « adoré, » selon l'usage.
(110) Littéralement des « paeans. » - Cf. ci-apr. Philost., p. 288-289.
(111) An de J.-C. 405.
(112) A Honorius qui voulait passer en Orient pour venir en aide à son jeune neveu, Théodose II, que la mort d'Arcadius venait de mettre en possession du trône.
(113) An de J.-C. 407.
(114) Ici commence l'extrait de D. Bouquet.
(115) An de J.-C. 408.
(116) An de J.-C. 406.
(117) De l'empereur Julien.