PRISCIEN
POÈME SUR LES POIDS ET MESURES
Oeuvre numérisée par Marc Szwajcer
PRISCIEN.POÈME SUR LES POIDS ET MESURES
Il est bon de connaître les poids dont il est parlé dans les livres des médecins de l’antiquité. La nature a donné un poids à tous les corps; chaque élément a son poids qui le gouverne. Le poids de la terre la retient immobile; l’air même, quoique dénué de pesanteur, entraîne dans leur infatigable révolution, les astres qui roulent avec le ciel. Je commencerai par les moindres poids les gros viendront ensuite; car un gros poids n’est autre chose que la réunion de plusieurs petits. L’obole est le double de la demi-obole; le double de l’obole se nomme un gramme, nos ancêtres disaient un scrupule. D’autres donnent au scrupule le poids de six des graines renfermées dans le creux de la silique du caroubier, ou de seize lentilles, ou d’autant de graines d’épeautre, ou de quatre maigres lupins. Si ces fruits avaient dans tous les climats un poids égal, les différentes nations auraient partout les mêmes poids; mais ce poids varie: car tous ces végétaux ne sont point assujettis par la nature à des règles immuables: ils changent selon les lois de la culture et les découvertes de l’homme. Trois scrupules forment une drachme: ce poids désigne une monnaie d’argent d’un usage courant dans la docte Athènes. La holcé diffère de la drachme de nom seulement, et non de valeur. Double la drachme, et tu auras ce que tu entends appeler un sicilique. Si j’ajoute un scrupule à la drachme, j’obtiens ce qu’on nomme une sextule, parce que six sextules font une once. Quand la sextule est double, les anciens l’appelaient une duelle. L’once se compose de deux fois quatre drachmes; et c’est de là, on peut le croire, qu’on donna aux scrupules le nom de grammes, parce que l’once en contient vingt-quatre: or ce nombre est celui des lettres [prammata] qui peignent aux yeux la parole humaine, comme il est celui des heures qui composent sur la terre la durée du jour et de la nuit. L’once est à la livre ce que le mois est à l’année. Je parle de la livre en usage dans le grand Latium et chez le peuple qui porte la toge car la livre attique est moins forte; il suffit de soixante-quinze drachmes, dit-on, pour qu’elle soit au complet. Apprends en outre la valeur de ce poids que les Grecs désignent par un petit mot, mna, et que nos ancêtres appelaient mina. Cette mine est de cent drachmes; ôtes-en quatre, tu auras notre livre romaine; retranche le quart des cent drachmes de la mine, tu auras la livre athénienne. Il me reste à te faire connaitre le talent de l’Attique, composé de soixante mines, ou, situ veux, de six mille drachmes: il passe pour le plus grand des poids de la docte Athènes; elle n’en a pas de plus faible que l’obole, de plus fort que le talent. Maintenant je vais dire comment se divise la livre entière, ou l’as, pour parler le langage de la jurisprudence; car si nous avons droit à recueillir seuls l’hérédité entière, on nous reconnaît héritiers pour un as; et si nous ne sommes institués que pour une partie, on nous déclare héritiers pour certaines parties de l’as. S’il manque une once à la livre, le surplus s’appelle un déunx; si l’on retranche un sextans, ce n’est plus qu’un décunx. Il n’y a pas de nom pour désigner ce qui reste après la suppression d’une demi-once, ou d’une sesconce, qui est le triple de la demi-once. Quand on enlève un quadrans, le surplus s’appelle un dodrans; si l’on retranche un triens, le reste est un bès, comme disaient les anciens, qui nommaient septunx ce qui reste après la soustraction d’un quincunx. Vient ensuite le sémis, qu’on regarde comme la plus grande fraction de l’entier; car tout ce qui passe la moitié de l’as n’est pas considéré comme une fraction, ainsi que l’a enseigné Musa, qui traçait des lignes sur la fine poussière. J’ai désigné plus haut les poids qui sont inférieurs à la demi-once. Voilà pour les poids. Il nous reste un autre sujet à traiter, c’est-à-dire les mesures de capacité pour les liquides, ou pour les grains, si tu l’aimes mieux. J’en décrirai le principe et la base. Trace un pied en longueur, en largeur et en hauteur, de manière que les angles formés par ces trois lignes soient égaux, et que les quatre côtés enferment carrément l’espace vide au milieu: tu auras l’amphore qui sert de cubature; pour la défendre de toute altération, les Romains l’ont consacrée à Jupiter sur le mont Tarpéien. L’urne est la moitié de l’amphore, comme l’amphore elle-même est la moitié du médimne, et contient trois modius: on trouve seize setiers dans un modius, autant qu’il y a de doigts dans la division du pied. Il faut deux cotyles (on peut dire, si l’on veut, deux hémines) pour emplir un setier; quatre setiers font ce qu’on nomme en grec une chénice; deux setiers de plus font un chus, c’est-à-dire un conge: et je croirais assez que c’est de là que le setier a pris son nom; les anciens l’ont appelé ainsi parce qu’il en entre six dans un conge. Une cotyle contient deux fois trois cyathes. Mais le cyathe souvent aussi nous désigne un poids: il vaut deux fois cinq drachmes, si tu le pèses; il faut cinq drachmes de plus pour faire un oxybaphe. Le mystre est le quart du cyathe; la chême est le tiers du mystre, et contient deux cochléars. S’il est permis de comparer les poids aux capacités, le cyathe est au setier ce que l’once est à la livre: la sesconce représentera l’oxybaphe, le sicilique pourra te donner une idée du mystre; enfin le scrupule est à peu près l’équivalent du cochléar. Nous avons encore à parler de l’amphore attique, ou cadus: elle contient une urne de plus que la nôtre. Il y a encore le culléus, qui vaut vingt fois notre amphore; on ne connaît pas de plus grande mesure pour les liquides. Enfin, aux lieux qu’inonde le Nil échappé de ses rives, il est une autre mesure, l’artaba, qui contient trois modius et un tiers, car dix modius emplissent trois artabas. Souviens-toi, en outre, d’un fait observé par les anciens, c’est que les différents liquides ont chacun une pesanteur déterminée. Ainsi, disent-ils, un setier rempli d’une onde pure ou des dons de Lyéus pèse une livre et un bès; ils ajoutent qu’un setier d’huile limpide pèse une livre et un sémis, et un setier de miel deux livres et demie. Et la justesse de cette remarque est facile à comprendre; car l’eau que roulent les fleuves voyageurs, l’eau qui dort au fond des puits, l’eau qui jaillit d’une source intarissable, n’ont pas le même poids: même différence entre le vin de la plaine et le vin des coteaux, entre les vins nouveaux et les vins vieux. La muse de la science pourra t’en convaincre à l’aide d’un instrument bien simple. On prend un cylindre d’argent ou de bronze, de peu d’épaisseur et de la longueur des entre-nœuds du roseau fragile; on le ferme en dedans par un petit bouchon de forme conique qui alourdit sa base, et le soutient droit sur l’eau, de sorte qu’il ne peut ni s’enfoncer tout entier ni tout entier flotter à la surface. On trace à l’extérieur une ligne légère qui descend de haut en bas, et qu’on partage horizontalement en autant de sections égales que le cylindre d’argent ou de bronze pèse de scrupules. Avec cet instrument, tu peux connaître le poids spécifique de toute espèce de liquide. Si le liquide est léger, une plus grande partie du cylindre s’enfoncera dans l’eau; s’il est lourd, tu verras rester hors de l’eau un plus grand nombre des degrés marqués au cylindre. Qu’on prenne un égal volume de deux liqueurs différentes, la plus dense pèsera davantage: pour que leur poids s’accorde, il faudra un plus fort volume de la plus légère de ces deux liqueurs. Si le cylindre s’enfonce de vingt et un degrés dans un liquide, et de vingt-quatre dans un autre, tu reconnaîtras que le premier liquide pèse une drachme (trois degrés) de plus que le second. Mais pour rétablir l’équilibre, pour que le liquide le plus dense remonte de ces trois degrés, il faut rapporter une quantité de liquide égale à celle que le long cylindre, en plongeant dans l’un ou dans l’autre, en a fait sortir. Voilà pour les mesures: si tu veux en connaître les signes, tu pourras les trouver dans les écrits des anciens. Maintenant nous allons révéler une autre conquête de l’esprit humain. Si quelqu’un allie de l’argent à l’or pur, le moyen t’est donné de trouver les proportions de cet alliage, et c’est le génie du maître de Syracuse qui s’éleva le premier à cette belle découverte. On rapporte, en effet, qu’un roi de Sicile ayant un jour fait fabriquer une couronne d’or qu’il avait vouée au roi des dieux, reconnut bientôt qu’il avait été trompé, et que l’ouvrier, gardant une partie de l’or, l’avait remplacée par une pareille masse d’argent. Il eut recours au génie d’un citoyen, dont l’esprit pénétrant sut découvrir la quantité d’argent mêlée à l’or pur, sans endommager cette couronne, qui avait été consacrée aux dieux avant l’expérience. Par quel moyen? Ecoute, et je vais te l’apprendre en peu de mots. Sur les plateaux égaux d’une balance employée d’ordinaire à peser ces métaux, tu places une livre d’or et une livre d’argent, purifiées d’avance par le feu rongeur, et d’un poids exactement semblable tu poses la balance sur un vase d’eau; aussitôt qu’elle touche à l’onde pure, le plateau qui porte l’or s’enfonce; car l’or est plus lourd que l’argent et plus dense que l’onde. Toi, retiens le fléau, et remarque la distance qui sépare du point central le fil auquel le bassin qui plonge est suspendu, et le nombre de degrés compris dans cet intervalle. Évaluons ce nombre à trois drachmes. Nous connaissons dès lors la différence du poids de l’or et de l’argent, puisque la livre d’or l’emporte de trois drachmes sur la livre d’argent quand on les plonge dans l’eau. Prends ensuite une masse d’or mêlée d’une partie d’argent, et un poids égal d’argent pur; place-les de même sur des plateaux, et plonge-les dans l’eau. La masse d’or penchera plus que l’autre, mais elle s’arrêtera bientôt, et c’est ce qui trahira la fraude. Car si elle l’emporte de trois fois six drachmes sur la masse d’argent pur, nous dirons qu’elle ne contient que six livres d’or: le reste est de l’argent, parce qu’en effet l’argent ne pèse pas plus que l’argent quand on le plonge dans l’eau. Nous pouvons arriver au même résultat avec une masse d’or pur balancée par une masse d’or mêlé d’alliage, et d’un poids égal. Si la masse d’or pur pèse dans l’eau trois drachmes de plus que la masse d’alliage, tu peux être sûr que la fraude a mêlé à l’or dans cette dernière autant de livres d’argent. Si elle pèse en plus une fraction quelconque de la livre, cette fraction te représente un pareil nombre de drachmes. La science nous apprend aussi à découvrir cette fraude sans le secours de l’eau: tu peux avec moi essayer cette expérience. Tu fais un lingot d’or du poids d’une livre, et un lingot d’argent de même volume semblables de forme, ces deux lingots n’auront pas le même poids, car l’or est plus dense. Tu les mettras dans la balance, pour connaître le poids de l’argent; car nous venons de dire le poids du lingot d’or. Admettons qu’il pèse un sextans de plus que le lingot d’argent. Tu fais ensuite un lingot d’argent égal en grosseur à la masse d’or qui renferme la fraude et l’alliage que tu veux découvrir. Tu prends le poids de ce lingot; il pèsera moins, et l’autre pèsera plus. Evaluons cette différence à un sémis: tu peux dès lors dire la quantité d’argent mêlée à l’or pur. Car, puisque nous avons un sémis qui est le triple du sextans, il n’y a que trois livres d’or dans la masse; tout le surplus, quel qu’il soit, est un alliage frauduleux. Et la raison en est facile à saisir, si tu ne refuses pas de connaître la vérité et de prêter attention aux écrits des anciens. En effet, si à deux nombres inégaux vient s’ajouter de part et d’autre un même nombre, l’inégalité subsiste toujours et la différence reste ce qu’elle était auparavant, et ce résultat se présentera toujours à tes recherches, soit dans le calcul des années, soit dans l’examen du poids des corps, soit dans la mesure de l’étendue. Ainsi, à deux masses d’or et d’argent, différentes par la nature du métal, mais pareilles de poids et de forme, ajoute une même quantité de matière; tu fais croître le poids de l’argent, mais tu n’augmentes pas celui de l’or: autant donc tu trouveras de sextans en plus, autant tu pourras compter de livres d’or, et chaque fraction de sextans équivaudra à une égale fraction de livre. Si tu n’as pas d’or pour composer un lingot d’alliage, prends de la cire: cette substance molle recevra sous tes doigts en peu de temps et sans peine la forme d’un cube, d’un hémisphère ou d’un cylindre allongé. Façonne une masse pareille d’argent pur, et assure-toi de leurs poids. Soient, douze drachmes pour l’argent, et trois drachmes pour la cire: il est donc clair que le rapport des poids entre l’argent et la cire, à volumes égaux, est celui de quatre à un. Façonne alors, toujours en cire, une masse égale au lingot d’or mêlé d’argent dont tu veux connaître la quantité d’alliage. Pèse-la avec soin, et le poids que t’en aura donné une balance exacte, porte le au quadruple car cette masse, qui est de cire, pèserait quatre fois autant, si elle était d’argent. Le reste, je crois, t’est connu; car nous t’avons expliqué plus haut le moyen de découvrir l’alliage sans le secours de l’eau. Tu peux soumettre les autres métaux à la même épreuve. NOTES SUR LES POIDS ET MESURES.I. — Vacuus quoque ponderis aether (v. 4). Césarius et Rivinus écrivent vacuus neque ponderis, et la pensée de l’auteur, selon Wernsdorf, semble exiger cette correction. Mais vacuus quoque est la leçon de tous les manuscrits je l’ai conservée, comme M. Eudlicher. M. Bary, qui l’appuie et la justifie par des exemples, en donne l’explication suivante: Vacuus quoque ponderis aether ne signifierait-il pas: “L’air même, quoique dénué de pesanteur, etc.? Car les anciens paraissent avoir nié la pesanteur de l’air, surtout celle de l’air des hautes régions (aether, qu’ils confondaient souvent avec ignis, to pur abariz). Ovide (Metam., liv. I, v. 67): Haec super imposuit liquidum et gravitate carentem AEthera; Τούτοις ἑπέθηκε τὸν διαφανῆ καὶ βάρους ἕρημον αἰθέρα (Trad. de Planude.) Lucrèce (liv. v, v. 501) ..............................Et liquidissimus aether Atque levissimus aerias super influit auras. La pesanteur de l’air a été découverte par Galilée, et confirmée par Torricelli et par Blaise Pascal. Je n’admettrais pas la correction vacuus neque ponderis aether. (E. Bary.) 2. — Indefessa rapit volventis sidera mundi (v. 5). Priscien attribue à l’air le pouvoir d’entraîner les astres. Mais, malgré Priscien, ces grands corps se meuvent dans le vide, ou du moins dans un fluide subtil et impondérable dont l’existence fort hypothétique est admise par quelques astronomes qui l’appellent éther ou fluide éthéré. Si ce fluide existe, il doit opposer une très faible résistance au mouvement des astres qui le traversent, et non pas favoriser ce mouvement. Ce qui fait mouvoir les astres, c’est une attraction qui les porte sans cesse vers un astre central, et qui se combine avec une vitesse d’impulsion qu’ils paraissent avoir reçue dans l’origine. C’est ainsi que l’on explique, d’après Newton et Laplace, la révolution de la terre autour du soleil, et celle de la lune autour de la terre. (E. Bary.) 3. — Semioboli duplum est obolus (v. 8). Ici Priscien se défie un peu de l’intelligence de ses lecteurs. Plus loin il pèche par l’excès contraire. Sa méthode est d’un fréquent usage dans nos cours publics, où la plupart des professeurs de sciences dissertent longuement sur les choses faciles et passent sur les sujets difficiles comme sur des charbons ardents. (E. Bary.) 4. — Semina sex alii siliquis, etc. (v. 10 et suiv.). Je m’étonne que l’auteur, ne fut-ce que pour orner son sujet, n’ait pas exposé plus complètement l’origine des mesures et des poids. Il ne parle que des poids tirés des graines de quelques végétaux; mais c’est surtout dans leur propre corps et dans ceux des animaux domestiques, que les hommes durent choisir d’abord des termes de comparaison pour y rapporter toutes les grandeurs. Ils comparèrent les longueurs à celles de leurs bras et de leurs pieds, les épaisseurs à celle de leurs doigts, les surfaces à celles des peaux de bœuf et de mouton,* les poids à celui de leur corps, les prix à la valeur d’un boeuf,** etc., etc. Toutes les langues conservent des traces de ces unités primitives. L’intervention des lois devint ensuite nécessaire pour fixer définitivement ces unités, qui étaient très variables, et pour en régler les subdivisions. Mais cette fixation légale, ayant quelque chose d’arbitraire, ne fut pas la même dans les différents pays. De là une confusion déplorable, dont on n’est pas encore sorti, malgré les efforts des réformateurs modernes. (E. Bary.) 5.— Unde putandum Grammata dicta (v. 25). On sait que notre gramme est le poids d’un centimètre cube d’eau distillée, prise à quatre degrés centésimaux, température de son maximum de densité. Nos subdivisions étant décimales et non duodécimales, notre gramme n’est le vingt-quatrième d’aucun de nos poids, en sorte que ce mot de gramme, qui avait un sens chez les anciens, n’en a pas chez nous. C’est donc un nom mal choisi, comme tant d’autres termes scientifiques, qui ont la prétention d’être tirés du grec, et que l’on comprend d’autant moins que l’on est meilleur helléniste. (E. Bary.) * Virgile (Aeneid. lib. I, v. 367): Mercatique solum, facti de nomine Itycaom, Taurino quantum possent cicumdare tergo. Pour les mesures agraires, on adopta comme unité l’étendue de terrain que deux boeufs peuvent labourer en un jour. ** Homère (Iliade, liv. xxxii, v. 885): Λέβησ' ἄπυρον, βοὸς ἄξιον, ἀιθεμύεντα .............................................Un vase riche et beau, Respecté par la flamme, et du prix d’un taureau. (Trad. de M. A. Bignan.) 6. — Dempseris e mna (v. 36). Toutes les éditions, et même celle de M. Endlicher, portent dempseris hinc mna. La correction que j’ai introduite me semble justifiée et par le sens et par la leçon des manuscrits qui donnent emnam ou enam. 7. — Ex quo, etc. (v. 43). Un usage tiré du système de mesures des Romains faisait communément distribuer douze parts, et par conséquent diviser l’hérédité en douzièmes. En effet, on considérait l’hérédité, par forme de comparaison, comme un as, c’est-à-dire comme un entier, comme une unité quelconque, à peser et à distribuer par poids entre les héritiers. La distribution des parts entre les héritiers était, pour ainsi dire, une pesée à faire (pondius) de l’hérédité. Or, comme l’unité de poids se composait chez les Romains de douze onces, on était censé peser, partager l’hérédité par onces: à celui-ci deux, à celui-là quatre, cinq, jusqu’à concurrence de douze ordinairement, et chaque once (uncia) valait alors un douzième... (Explication historique des instituts de Justinien, par M. Ortolan, t. 1er, p. 423, 2e édit.) 8.— Scribens in pulvere Musa (v. 54). Peut-être le célèbre Antonius Musa, affranchi et médecin d’Auguste. Les anciens, pour faire les calculs, se servaient d’abaques ou tables couvertes d’une poussière préparée sur laquelle ils traçaient leurs démonstrations. Voir Cicéron (de Nat. deor., lib. ii, c. 18), Perse (Sat. i, v. 131). et S. Augustin (Confess. lib. iv, c. 16). 9.— Seus puros pendas latices seus dona Lyaei (v. 94). Klügel compare ici les poids donnés par Priscien aux résultats fournis par les expériences modernes. “Pondus sextarii aquae purae hic perhibetur 1 2/3 libae, et olei olivarum 1 1/2 librae. Ratio ergo gravitatum specificarum aquae et olei est 10 : 9. Haec satis exacte convenit cum ea quam Musschenbroeckius adsignat in Philosoph., natur., t. 11; nempe 1000 : 913. Pondus sextarii mellis hic dicitur esse 2 ½ librarum. Itaque ratio gravitatum specificarum seu densilatis aquae et mellis est 1 2/3 : 2 1/2, sive 2 . 3, sire 10 : 15; Musschenbroeckius hanc rationem tradit 1000 : 1500, vel etiam 1000 : 1450, quarum prior exacte eadem est quae auctori nostro.” C’est vrai; seulement on admet aujourd’hui que le poids spécifique de l’huile d’olive est à celui de l’eau pure (eau de pluie, ou mieux eau distillée) comme 915 est à 1000, au lieu du rapport donné par Musschenbroeck, de 913 à 1000. Mais on peut dire qu’approximativement le poids spécifique de cette huile est à celui de l’eau comme 9 est à 10. Les vins les plus spiritueux sont les moins denses. Exemples: Densité (ou poids spécifique) du vin de Bordeaux = 0,994 (c’est-à-dire les neuf cent quatre-vingt quatorze millièmes de celle de l’eau). Densité du vin de Bourgogne = 0,991 (c’est-à-dire les neuf cent quatre-vingt onze millièmes de celle de l’eau). Un vin en vieillissant, le vin de Malaga, par exemple, peut éprouver un faible accroissement de densité par la transformation d’une partie de son alcool en sucre. L’eau de puits, qui est souvent chargée (ou saturée) de sulfate de chaux (ou sélénite), est peut-être un peu plus dense que l’eau de rivière; celle-ci, qui tient quelques sels en dissolution, tels que le chlorure de sodium (sel marin) et le sulfate de soude (sel purgatif de Glauber), est un peu plus dense que l’eau distillée. C’est l’eau de mer qui est la plus dense; elle contient des chlorures de sodium, de calcium, de magnésium, du sulfate de soude, etc., etc. La densité moyenne de l’eau de mer est 1,026, c’est-à-dire qu’elle est à celle de l’eau distillée comme 1026 est à 1000; ou autrement, comme 1 litre d’eau distillée pèse 1000 grammes (ou 1 kilogr.), 1 litre d’eau de mer pèsera 1026 grammes. La différence de densité entre un vin et un autre, entre l’eau de puits et l’eau de rivière, est trop faible, pour que les anciens pussent la constater par des expériences directes. Il n’en est pas de même pour l’eau d’un fleuve et l’eau de la mer. Ausone indique sur ce point une bonne épreuve (Technopœgn., per interrog. et resp., v. 13): Quid fluitat pelago, quod non natat in fluvio? Pix. Je n’ai pas vérifié le fait pour la poix; mais il y a certains corps pour lesquels il aurait lieu nécessairement. (E. Bary.) 10.— Ducitur argenti, tenuive ex aere cylindras (v. 103). L’auteur décrit ici un de ces instruments que les modernes nominent aréomètres (ἀραιὸς, μέτρον). On les fait aujourd’hui en cuivre, en fer-blanc, en verre, très rarement en argent. Quelques auteurs attribuent l’invention des aréomètres à la célèbre et malheureuse Hypatia, fille de Théon, qui fut massacrée à Alexandrie, en mars 415. Cependant Synésius, dans une lettre où il demande à Hypatia un aréomètre, lui décrit cet instrument avec des détails qui sembleraient superflus s’il s’adressait à l’inventeur même.* Un physicien du siècle dernier qui aurait prié Franklin par écrit de lui envoyer un paratonnerre, lui eût fait grâce de la description de l’appareil préservateur. (E. Bary.) * Synesii Epist. xv. On a longtemps ignoré quel était l’instrument décrit dans cette lettre. Le P. Petau lui-même, dernier éditeur des œuvres complètes de Synésius, avoue qu’il ne la comprend pas bien. Pierre de Fermat est le premier qui en trouva la véritable explication. Il en fit part à Saporta, qui la publia à la suite de sa traduction du traité italien de Benedetto Castelli, de la Mesure des eaux courantes (Castres, 1664, in 4°, p. 84); elle a été insérée depuis, parmi les pièces préliminaires du recueil intitule Varia opera mathematica D. Petri de Fermat, senatoris Tolosani, etc.; Tolosae, 1679, in fol. Cette description de Synésius mérite d’être rapprochée de celle de Priscien. Le disciple, malade, demande, à celle qu’il nomme la philosophe, un hydroscope pour comparer les poids des différentes eaux; car, dit Fermat, les médecins s’accordent à penser que les plus légères sont les meilleures. Voici la lettre entière, avec la traduction qu’en a donnée Saporta, d’après les explications de Fermat: Οὕτω πάνυ πίπραγα πονήρως, ὥστε ὑδροσκοπίου μοι δεῖ. Ἐπέταξον αὐτὸ χαλευθῆναί τε καὶ συνωτηθῆναι. Σωλήν ἐστι κυλινδρικὸς, αὐλοῦ καὶ σχῆμα κὰι μέγεθος ἔχων. Οὗτος ἐπί τινος εὐθείας δέχεται τὰς κατατόμας. Αἷς τῶν ὑδάτων τὴν ῥοπὴν ἐξετάζομεν. Ἐπιπωματίζει γὰρ αὐτὸν ἐκ θατέρου κῶνος κατὰ θέσιν῾ἴσην ἐγκείμενος, ὡς εἶναι κοινὴν πάσιν ἀμφοῖν τοῦ κώνου τὲ καὶ τοῦ σωλῆνος. Αὐτὸ δὴ τοῦτο ἐστι τὸ βαρύλλιον. Ὅταν οὖν εἰς ὕδωρ καθῇς τὸν αὐλὸν, ὀρθὸς ἑστήξει, καὶ παρέξει σοι τὰς κατατομὰς ἀριθμεῖν. Αἱ δὲ τῆς ῥοπῆς εἰσὶ γνωρίσματα. Je me trouve si mal, que j’ai besoin d’un hydroscope: je vous prie d’en faire faire un de cuivre, et de me l’acheter. C’est un tuyau en forme de cylindre, qui a la figure et la grandeur d’une flûte; sur sa longueur, il porte une ligne droite, qui est coupée en travers par de petites lignes, par lesquelles nous jugeons du poids des eaux. L’un des bouts est couvert d’un cône, qui est posé également dessus, en telle sorte que le tuyau et le cime ont une même base. L’on appelle cet instrument baryllion. Si on le met dans l’eau par la pointe, il y demeurera debout, et l’on peut aisément compter les sections qui coupent la ligne droite, et par là l’on connaît le poids de l’eau. 11. — Cui cono interius modico pars ima gravatur (v. 105). C’est ce qu’on appelle lester un aréomètre. (E. Bary.) 12.— Nam si tenuis erit, etc. (v. 111). Klügel dit avec raison que les densités des divers liquides sont réciproquement (ou inversement) proportionnelles aux portions du cylindre immergées dans ces liquides. Cela résulte de ce que le poids total d’un corps flottant est égal au poids du volume de liquide qu’il déplace. (E. Bary.) 13. — Quod si ter septem, etc. (v. 116 et suiv.). Ici l’auteur latin paraît ne pas se faire une idée nette de ce que l’on doit entendre par les poids spécifiques des liquides; il n’interprète pas bien les indications de son instrument. Ce sont des rapports, des quotients, et non des différences que l’on doit chercher entre les poids des liquides pris à volume égal. Il devrait dire qu’à égalité de volume, le poids de l’un des deux liquides serait au poids de l’autre comme 24 est à 21 (24/21 ou 8/7), et non pas que l’excès du poids de l’un sur le poids de l’autre serait 24 moins 21, c’est-à-dire 3. Car cet excès varie avec la grandeur du volume égal sous lequel on pèse les deux liquides, tandis que le quotient de l’un des poids divisé par l’autre est constant, quel que soit le volume (supposé égal) que les deux liquides occupent. Peut-être cette faute était-elle commise par tous les contemporains de Priscien; l’aréométrie était encore dans son enfance: cependant Archimède devait avoir sur ce point des notions moins confuses que ses successeurs, qui le copiaient en ne le comprenant qu’à demi. (E. Bary.) 14. — Sed refert aequi tantum conferre liquoris (v. 119 et suiv.). Ce passage me paraît obscur, et l’explication qu’en donne Klügel n’est pas conforme, je crois, à l’histoire de la science. On distingue aujourd’hui deux espèces d’aréomètres: 1° les aréomètres à poids constant (fig. 1), qui sont gradués dans leur partie cylindrique, et qui, par la quantité variable de leur immersion dans des liquides différents,
indiquent les densités relatives de ces liquides; c’étaient sans doute les aréomètres des anciens; 2° les aréomètres à volume constant (fig. 2), que l’on surcharge de poids additionnels posés sur la cuvette A, et choisis de manière que dans chaque liquide ils s’enfoncent jusqu’en un point B gravé sur la tige (point d’affleurement). Le plus simple de ces instruments, qui ne sert que pour les densités des liquides, est appelé aréomètre de Fahrenheit, du nom d’un physicien de Dantzick qui vivait au commencement du siècle dernier, et qui passe pour l’inventeur. Il n’est pas probable que Priscien ait eu en vue cette surcharge de l’instrument, qui est sana doute une idée moderne, suggérée par les progrès que l’hydrostatique devait à Galilée (E. Bary.) 15. — Quarum si signa requires (v. 122). Ces signes ont été conservés et expliqués par plusieurs auteurs que Denis Godefroy a réunis dans son recueil intitulé Auctores Latinae linguae in unum redactim corpus, etc., col. 1453 et seq. (S. Gervasii, 1602, in-4°). 16.— Nunc aliud partum ingenio, etc. (v. 124 et suiv.). Aujourd’hui, comme nous possédons des tables de poids spécifiques qui embrassent tous les corps usuels, la solution du problème serait beaucoup plus simple. Il suffirait de déterminer, par des pesées faites dans l’air et dans l’eau, la densité de l’alliage proposé; puis, connaissant déjà les densités des deux métaux constituants, on trouverait, par un calcul élémentaire le rapport des poids de ces métaux. Toutefois, pour que notre solution ou celle des anciens fût rigoureuse, il faudrait que les deux métaux fussent seulement plaqués l’un sur l’autre, et non pas alliés par la fusion. Car, dans ce dernier cas, la combinaison qui s’opère entre les métaux modifie les intervalles de leurs particules, et, suivant la nature de ces corps, le volume du composé est un peu plus grand ou un peu plus petit que la somme des volumes des composants; en d’autres termes, il y a tantôt raréfaction, tantôt condensation. Les proportions données par la balance s’appliquent donc à des mélanges ou assemblages, ou systèmes, plutôt qu’à de véritables alliages. Quand il s’agit d’un alliage obtenu dans un creuset, il n’est pas inutile de consulter d’abord la balance; mais il faut ensuite recourir à l’analyse chimique. (E. Bary.) 17. — Syracosii mens prodidit alta magistri (v. 127). L’histoire de cette découverte d’Archimède et de son expérience sur la couronne d’Hiéron, a été racontée par Vitruve (liv. ix, ch. 3). Voici ce récit, avec la traduction de Claude Perrault:
Archimedis vero quum multa miranda inventa et varia fuerint, ex omnibus etiam infinita solertia, id quod exponam, videtur esse expressum nimium. Hiero enim Syracusis auctus regia potestate, rebus bene gestis, quum auream coronam votivan, diis immortalibus in quodam fano constituisset ponendam, immani pretio locavit faciendam, et aurum ad sacoma appendit redemptori. Is ad tempus opus manufactum subtiliter regi approbavit, et ad sacoma pondus coronae visus est praestitisse. Posteaquam indiciam est factum, dempto auro tantumdem argenti in id coronarium opus admixtum esse, indignatus Hiero se contemptum, neque inveniens qua ratione id furtum repre.henderet, rogavit Archimedem ut in se sumeret sibi de eo cogitationem. Tunc is, quum haberet ejus rei curam, casu venit in balneum, ibique quum in solium descenderet, animadvertit quantum corporia sui in eo insideret, tantum aquae extra solium effluere. Itaque quum ejus rei rationem explicationis offenderet, non est moratus, sed exsilivit gaudio motus de solio, et nudus vadens domum versus, significabat clara voce invenisse quod quaereret: nam curreus identidem Graece clamahat Eurhka, eurhka. Tam vero ex eo inventionis ingressu, duas dicitur fecisse massas aequo pondere, quo etiam fuerat corona, unam ex auro, alteram ex argento. Quum id fecisset, vas amplum ad summa labra implevit aqua, in qua demisit argenteam massam, cujus quanta magnitudo in vase depressa est, tantum aquae effluxit: ita exempta massa, quanto minus factum fuerat, refudit sextario mensus, ut eodem modo, quo prius fuerat, ad labra aequaretur. Ita ex eo invenit, quantum ad certum pondus argenti, certa aquae mensura responderet. Quum id expertus esset, tam auream massam similiter pleno vase demisit, et ea exempta, eadem ratione mensura addita, invenit ex aqua non tantum defluxisse sed tantum minus, quanto minus magno corpore eodem pondere auri massa esset, quam argenti. Postea vero repleto vase in eadem aqua ipsa corona demissa, invenit plus aquae defluxisse in coronam, quam in auream eodem pondere massam: et ita ex eo, quod plus defluxerat aquat in corona, quam in massa, ratiocinatus, deprehendit argenti in auro mixtionem, et manifestum furtum redemptoris.
Entre les inventions merveilleuses d’Archimède, qui sont en grand nombre, celle dont je vais parler une semble marquer une subtilité d’esprit presque incroyable. Lorsque Hiéron régnait à Syracuse, ce prince étant heureusement sorti de quelque affaire d’importance, et ayant à offrir dans un certain temple une couronne d’or qu’il avait vouée aux dieux, il convint avec un ouvrier d’une grande somme d’argent pour la façon, et lui donna l’or au poids. Cet artisan livra sa besogne au jour qu’il avait promis au roi, qui la trouva fort bien faite, et la couronne ayant été pesée parut être du poids de l’or qui avait été donné; niais lorsqu’on éprouva l’or par la pierre de touche,*** on reconnut que l’ouvrier avait ôté une partie de l’or pour y mettre autant d’argent à la place. Le roi était offensé de cette tromperie, et ne pouvant trouver de moyen pour convaincre l’ouvrier du vol qu’il avait fait, pria Archimède d’en chercher quelqu’un dans son esprit. Un jour qu’Archimède se mettant au bain rêvait à cette affaire, il s’aperçut par hasard qu’à mesure qu’il s’enfonçait dans le bain, l’eau s’en allait par-dessus les bords. Cela lui ayant découvert la raison qu’il cherchait, sans tarder davantage, la joie le fit promptement sortir du bain, de sorte qu’il s’en alla tout nu courant en sa maison, et se mit à crier qu’il avait trouvé ce qu’il cherchait, disant en grec: Eureka, Eureka (je l’ai trouvé). Et l’on raconte qu’en conséquence de cette première découverte, il fit faire deux masses du même poids qu’était la couronne, l’une d’or et l’autre d’argent: qu’il plongea dans un vaisseau plein d’eau la masse d’argent, laquelle, à mesure qu’elle s’enfonçait, faisait sortir autant d’eau qu’elle était grande: qu’ensuite l’ayant ôtée, il remit dans le vaisseau alitant d’est: qu’il en était sorti, le remplissant jusqu’aux bords comme devant, et qu’ayant mesuré l’eau qui était sortie, il connut quelle quantité d’eau répond à une masse d’argent d’un certain poids: qu’après cette expérience, il plongea de même la masse d’or dans le vaisseau plein d’eau, et que l’ayant retirée il mesura l’eau comme devant, et trouva que la masse d’or n’avait pas tant fait sortir d’eau, et que sa quantité était d’autant moindre que l’or a moins de volume que l’argent qui est de même poids qu’ensuite il remplit encore le vase et y plongea la couronne, qui fit sortir moins d’eau que la masse d’or qui était de même poids n’en avait fait sortir; et raisonnant sur la quantité de l’eau que la couronne avait fait sortir, qui était plus grande que celle que la masse d’or avait fait sortir, il connut combien il y avait d’argent mêlé parmi l’or, et fit voir clairement ce que l’ouvrier en avait dérobé.
*** Cette traduction de Perrault n’est pas exacte, car pour conserver sa couleur, l’or avait dû être appliqué sur l’argent, et non allié à l’argent par la fusion; or une parcelle de ce placage, de ce masque d’or pur, détachée et posée sur une pierre de touche, n’aurait pas trahi le fripon. Il est plus naturel de penser que la fraude fut découverte, ou par suite d’une dénonciation (indiciata), ou sur quelque soupçon causé au roi par le trop grand volume de la couronne.
18. — Lancibus aequatis, etc. (v. 136 et suiv.). Ici Priscien complique un peu l’expérience dont il s’agit: aujourd’hui on attacherait les lingots d’or et d’argent par des fils très minces ou des crins (dont on peut négliger le poids) sous chacun des bassins, dont les faces inférieures sont munies de crochets (la balance ainsi disposée est appelée balance hydrostatique), et l’on plongerait les lingots ou l’un d’eux dans l’eau, sans immerger en même temps le bassin. (E. Bary.) 19. — Protinus inclinat pars haec quae sustinet aurum (v. 144). Un corps plongé dans un fluide (air ou eau) y perd une partie de son poids égale au poids du volume de fluide qu’il déplace. Tel est l’énoncé connu sous le nom de principe d’Archimède. Des poids égaux (ou masses égales) d’or et d’argent plongés dans un liquide, y éprouveront des pertes de poids inégales. La perte sera la plus grande pour l’argent, qui, à poids égal, a plus de volume, et partant déplace plus de liquide. La densité de l’or vaut un peu plus de 19 fois celle de l’eau (19,3). Celle de l’argent est 10 fois et demie celle de l’eau; de sorte qu’à égalité de volume le poids de l’or est à celui de l’argent comme 19,3 est à 10,5, ou comme 193 à 105. (E. Bary.) 20. — Simul aurum et (ou est) crassius unda (v. 141). Je hasarde cette correction qui me paraît plus claire que la leçon du manuscrit de Bobbio, simul aere crassior unda, et que celle des autres manuscrits et des éditions, simulare, ou simulari, ou similari crassius, qui, malgré l’explication de Wernsdorf, n’étaient pas très intelligibles. 21. — At tu siste jugum (v. 142) De nos jours, comme on ne fait plonger dans l’eau aucun des plateaux en même temps que le corps qu’il supporte, on rétablirait l’équilibre en posant des poids convenables sur le plateau soulevé; cela vaudrait beaucoup mieux. (E. Bary.) 22. — Denique libram Libra tribus drachmis superat (v. 146 et 147). La note de Klügel est juste quant au fond des idées; mais je n’admets guère ses nombres, empruntés à des expériences faites par Musschenbroek vers le milieu du siècle dernier. Aujourd’hui l’on connaît plus exactement les densités des métaux, parce que l’on sait mieux les affiner, parce que l’on construit des balances plus sensibles, et que l’on fait les pesées avec beaucoup plus de soin. La densité de l’eau étant prise pour unité, la densité de l’or est 19,3 et celle de l’argent 10,5. Cela posé, si deux lingots, l’un d’or, l’autre d’argent, pesant chacun une livre, sont attachés par des fils sous les plateaux d’une balance, et qu’en cet état ou les plonge tous deux dans l’eau, le fléau de la balance s’abaissera du côté de l’or, et, pour rétablir l’équilibre, il faudra mettre 1/23 de livre environ sur le plateau qui supporte l’argent; c’est ce que je trouve par un calcul simple.* Si 1 livre = 96 drachmes, 1/23 de livre 4 drachmes + 1/23 de drachme; et si 1 scrupule est le tiers de 1 drachme, ces 1/23 de drachme feront à peu près un demi scrupule. Ainsi l’on rétablirait l’équilibre avec 6 drachmes et scrupule, ce qui s’éloigne un peu des 3 drachmes indiquées par Priscien. (E. Bary.) * 1-1/19,3 = 1-1/10,5 + x; x poids à mettre sur le plateau à l’argent; d’où x = 1/10,5 - 1/19,3 = 8,8 / (10,5 x 19,3) = 176 /4053 = 1/23 environ. 23. — Nec non et sine aquis (v. 163). Ici finit le texte de toutes les éditions antérieures à celle de M. Endlicher. Les quarante-cinq vers et demi qui suivent ont été retrouvés par Mich. Denis et M. Endlicher sur le manuscrit de Bobbio. Voir la Notice sur Priscien. 24. — Causa, id cur ita sit (v. 179). Correction de Mich. Denis. Le manuscrit de Bobbio et l’édition de M. Endlicher portent causa cur ita sit. On pourrait lire aussi causaque, cur ita sit. 25.— At mollem sumito ceram (v. 193). Il y aurait plus de simplicité et d’exactitude à couler successivement dans le même moule de l’argent en fusion et de la cire pareillement fondue. Au reste, l’emploi de l’eau est bien préférable à celui de la cire, qui est tout à fait rejeté par les physiciens modernes. (E. Bary.) 26.— Fac denique drachmas Bis sex argenti, etc. (v. 197). Priscien n’est pas heureux dans le choix de ses nombres: la densité de la cire est 0,96 (les quatre-vingt seize centièmes de celle de l’eau); celle de l’argent est 10,5; en sorte que les densités de l’argent et de la cire sont entre elles comme 1050 est à 96, ou comme 175 est à 16, ou à peu près comme 11 est à 1. L’argent est donc presque 11 fois aussi dense que la cire, et Priscien le suppose seulement 4 fois aussi dense. On voit qu’il n’avait pas répété lui-même l’expérience qu’il conseille à son lecteur. (E. Bary.)
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